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Marc-Adélard Tremblay (1922 - ) Anthropologue, retraité, Université Laval (1989) L’anthropologie à l’Université Laval Fondements historiques, pratiques académiques, dynamismes d'évolution Un document produit en version numérique par Jean-Marie Tremblay, bénévole, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Courriel: [email protected] Site web pédagogique : http://www.uqac.ca/jmt-sociologue/ Dans le cadre de: "Les classiques des sciences sociales" Une bibliothèque numérique fondée et dirigée par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Site web: http://classiques.uqac.ca/ Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.ca/

Anthropologie a laval

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Page 1: Anthropologie a laval

Marc-Adélard Tremblay (1922 - ) Anthropologue, retraité, Université Laval

(1989)

L’anthropologie à l’Université Laval

Fondements historiques, pratiques académiques,

dynamismes d'évolution

Un document produit en version numérique par Jean-Marie Tremblay, bénévole, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi

Courriel: [email protected] Site web pédagogique : http://www.uqac.ca/jmt-sociologue/

Dans le cadre de: "Les classiques des sciences sociales"

Une bibliothèque numérique fondée et dirigée par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi

Site web: http://classiques.uqac.ca/

Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi

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Cette édition électronique a été réalisée par Jean-Marie Tremblay, bénévole, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi à partir de :

Marc-Adélard Tremblay (1922 - ) L’anthropologie à l’Université Laval. Fondements

historiques, pratiques académiques, dynamismes d'évolution.

Québec: Laboratoire de recherches anthropologiques, département

d'anthropologie, Université Laval, septembre 1989, 206 pp. Collection: Documents de recherche, no 6.

M Marc-Adélard Tremblay, anthropologue, professeur émérite re-

traité de l’enseignement de l’Université Laval, nous a accordé le 4 jan-vier 2004 son autorisation de diffuser électroniquement toutes ses oeuvres.

Courriel : [email protected] ou [email protected]

Polices de caractères utilisée : Comic Sans, 12 points.

Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Micro-soft Word 2008 pour Macintosh. Mise en page sur papier format : LETTRE US, 8.5’’ x 11’’. Édition numérique réalisée le 6 octobre 2011 à Chicou-timi, Ville de Saguenay, Québec.

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Marc-Adélard Tremblay (1989)

L’anthropologie à l’Université Laval.

Fondements historiques, pratiques académiques, dynamismes d'évolution.

Québec: Laboratoire de recherches anthropologiques, département d'anthropologie, Université Laval, septembre 1989, 206 pp. Collection: Documents de recherche, no 6.

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Table des matières Avant-propos

INTRODUCTION 1. Problématique et contextualisation

Chapitre 1. L'ANTHROPOLOGIE EN TANT QUE DISCIPLINE ACADÉMIQUE À LAVAL

1. Les précurseurs à Laval et ailleurs2. Les premiers anthropologues-enseignants dans les universités

québécoises3. L'anthropologie à l'Université Laval jusqu'aux années 1970

3.1. Les premiers enseignements anthropologiques à Laval3.2. L'établissement de l'Option « anthropologie » en 19613.3. Le statut de l'anthropologie dans les universités3.4. La coexistence pacifique de la sociologie et de l'anthropolo-

gie 4. Les contestations étudiantes de 1968-19705. Les réformes et la création du département en 1971

5.1. La Commission de la Réforme5.2. Le comité Gérard Dion et la création du département

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Chapitre 2. LA RECHERCHE ANTHROPOLOGIQUE

1. L'importance du terrain en anthropologie2. L'ethnographie de la Côte-Nord du Saint-Laurent (Tremblay,

Charest, Breton) 3. Les études inuit (Saladin d'Anglure, Dorais, Trudel) 4. Les études sur l'Afrique Noire francophone (Chalifoux, Charest,

Collard, Doutreloux, Genest et Santerre) 5. Les études sur la Méso-Amérique et la Caraïbe (Beaucage, Breton,

Arcand, Dagenais, Chalifoux, Labrecque) 6. Les études autochtones (Arcand, Charest, McNulty, Simonis,

Tremblay, Trudel) 7. Les études sur les communautés rurales (Bariteau, Breton, Pilon-

Lê) 8. Le structuralisme et la représentation symbolique du Québec

(Maranda, Saladin d'Anglure, Simonis) 9. Les études symboliques (Arcand, Saladin d'Anglure, Simonis,

Schwimmer, Maranda) 10. Les études sur les femmes (Dagenais, Labrecque) 11. L'ethnicité urbaine (Dorais, Elbaz, Pilon-Lê, Schwimmer, Trem-

blay) 12. L'anthropologie de la santé, de la maladie et du vieillissement

(Genest, Santerre, Tremblay) 13. Conclusions sur la recherche anthropologique à Laval

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Chapitre 3. ORGANISATION ADMINISTRATIVE,

PROGRAMMES DE FORMATION ET CLIENTÈLES ÉTUDIANTES

1. Le profil démographique du département2. La conception du programme

2.1. Le corps professoral et la répartition des tâches

2.1.1. Le corps professoral : ses débuts et son évolution 3. Les clientèles étudiantes

3.1. L'évolution dans les effectifs étudiants en anthropologie de 1970-1985

3.2. L'Association des étudiants/tes en anthropologie3.3. Les champs de recherche des étudiants/es

Chapitre 4. LA DIFFUSION DES CONNAISSANCES ET LE RAYONNEMENT SCIENTIFIQUE

1. La diffusion des connaissances

1.1. Anthropologie et Sociétés1.2. Études Inuit/Studies

2. Le rayonnement scientifique

2.1. La diversité du rayonnement2.2. L'intervention anthropologique au département2.3. La participation aux groupes interfacultaires et interuniver-

sitaires

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Conclusion. Les singularités de l'anthropologie (au Québec et ailleurs) :

Les travaux, la critique, la pulsion de mort (par Eric Schwimmer) Annexe

1. Liste des thèses de maîtrise produites au Département2. Liste des thèses de doctorat produites au Département

Références bibliographiques

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À Jacques Le Querrec, assistant d'enseignement et de recherche à notre Département, parti dans la fleur de l'âge, dont le souvenir reste profondé-ment gravé dans notre mémoire de même que dans celle des personnes qui se sont enrichies à son contact et qui ont béné-ficié de son amitié.

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[v]

L’anthropologie à l’Université Laval. Fondements historiques, pratiques académiques,

dynamismes d'évolution.

AVANT-PROPOS

Retour à la table des matières

C'est à l'automne 1986 que le rédacteur d'un ouvrage à paraître sur la Faculté des Sciences sociales à l'occasion du cinquantième anni-versaire de sa fondation me demanda de rédiger le chapitre sur l'an-thropologie. J'acceptai avec d'autant plus d'empressement que j'avais dans les années antérieures, en collaboration avec le professeur Ge-rald L. Gold de York University, publié des études sur l'anthropologie du Québec. La tâche m'apparaissait suffisamment bien amorcée pour que je sois en mesure de respecter l'échéance de production du 31 décembre 1987. Grâce à une aide financière du département, Josée Thivierge fut engagée comme assistante de recherche à l'été 1986. La tâche à accomplir était de taille, car elle nécessitait des recherches dans les archives du département, dans celles de la Faculté et de l’Université, ce qui posait des problèmes d'accessibilité aux données de base. Elle requérait aussi des contacts personnels avec chacun des membres du corps professoral pour dénicher des données sur le dé-partement dont ils étaient parfois les uniques dépositaires, pour obte-nir des informations sur leurs travaux de recherche et leurs engage-ments professionnels depuis leur arrivée au département et pour

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consigner leurs vues sur l'évolution de la discipline à la fin de ce millé-naire.

Il s'agissait, en quelque sorte, de relater les événements mar-quants que j'avais vécus depuis mon arrivée au Département de socio-logie à l'automne 1956, c'est-à-dire, la co-existence de la sociologie et de l'anthropologie dans un département conjoint, la conquête de l'au-tonomie départementale, les recherches anthropologiques amorcées par l'équipe professorale sur plusieurs continents de la planète, l'évo-lution des programmes d'étude et des clientèles étudiantes, les revues publiées au département, l'engagement des membres de l'équipe dans la communauté et leur rayonnement académique, l'avenir de la discipli-ne. Ces grands thèmes constitueraient les principaux éléments de la toile de fond sur laquelle serait esquissé le profil historique de notre unité d'appartenance. Au fur et à mesure que la collecte des données et que leur analyse provisoire progressait, je me suis rendu compte que le travail amorcé débordait largement la tâche assignée et que la production finale ne pourrait prendre la forme d'un chapitre dans le cadre de l'ouvrage collectif projeté. Après discussion avec le rédac-teur, j'en suis venu à la conclusion que je produirais une monographie sur notre département et que l'un des chapitres de celle-ci pourrait [vi] représenter ma contribution. Le thème de la recherche et de l'in-tervention anthropologiques s'imposa alors d'emblée dans mon esprit, car ce serait celui qui représenterait le mieux la nature de notre dé-partement, la marque de notre discipline.

Le chapitre proposé parut à l'automne 1988 dans un collectif publié aux Presses de l'Université Laval sous la direction d'Albert Faucher 1 et une version préliminaire de la monographie fut terminée à la date prévue. À l'été 1988, à la suite de tractations avec la responsable du Laboratoire d'anthropologie, Madame Marie France Labrecque, il fut décidé que le Laboratoire en assurerait la publication grâce à une sub-vention de la Faculté des Sciences sociales, Budget spécial de la Re-cherche. Cela m'apparaissait d'autant plus intéressant puisqu'ainsi une certaine diffusion de la monographie permettrait une meilleure 1 Cinquante ans de sciences sociales à l'Université Laval : Histoire de la Faculté

des Sciences sociales (1938-1988). Voir « La recherche et l'intervention anthro-pologiques à l'Université Laval », pp. 279-328.

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connaissance de notre discipline et des travaux de ceux et celles qui ont incarné ses ambitions dans la région de Québec. Elle pourrait aussi permettre, à ceux et celles qui s'inscrivent à notre programme d'étu-de, de connaître le contexte institutionnel dans lequel ils et elles s'en-gagent pour quelques années de leur vie. Notre histoire étant relati-vement courte, il était plus facile d'en reconstituer les principales étapes et d'identifier les principaux dynamismes qui les ont suscitées.

Quelques mises en garde s'imposent. La plus importante de toutes se rapporte à la facture de cette entreprise. Ce n'est pas une analyse du contexte socio-politique de la production des connaissances anthro-pologiques. Ce n'est pas, non plus, une histoire qui comporte un carac-tère définitif, la proximité des événements narrés de même que la subjectivité de l'analyste, pour ne pas mentionner tous les aspects de cette histoire qui ont été délibérément mis de côté ou tout simple-ment oubliés, ne nous y autorisent pas. C'est plutôt la reconstruction d'une fresque d'ensemble où sont identifiés des acteurs, des situa-tions et des événements qui la rendent compréhensible. Des historiens chevronnés de même que des historiens de la science pourront eux aussi éventuellement reconstituer cette histoire et lui conférer une toute autre coloration, une ampleur bien différente.

La version préliminaire de cette monographie ne comportait pas de conclusion et j'ai longuement hésité sur sa nature. J'ai finalement choisi pour ce faire le texte provisoire du Rapport du Comité des orientations rédigé par son président, M. Eric Schwimmer. Présenté au moment où le département traversait une crise d'importance, ce do-cument esquisse l'histoire départementale sous un angle critique et propose une vision d'avenir de l'anthropologie à Laval [vii] fondée sur une spécificité quelque peu différente de celle de nos origines, mais qui s'appuie sur les effectifs existants et représente une réponse aux critiques dont notre discipline est l'objet. Je suis d'autant plus recon-naissant à Eric Schwimmer d'avoir accepté qu'elle paraisse ici car elle ajoute de la profondeur aux réflexions contenues dans la monographie et fait la démonstration, il me semble, en quoi une crise de nature épistémologique et socio-politique peut être génératrice de prises de conscience et de renouvellements si essentiels à une discipline en plei-ne transformation.

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Cette expérience anthropologique que j'ai vécue ici à Laval et que j'ai cherché à reconstituer le mieux possible dans le temps qui me fut imparti a représenté pour moi un indéfinissable enrichissement. Revi-vre symboliquement toute une tranche de sa vie, avec ses intensités et ses adversités, prendre conscience des apports considérables, tant sur les plans personnel que professionnel, de ceux et celles qu'on a côtoyés/ées, mener à terme un projet qui témoigne à la fois de notre identité professionnelle de groupe et de nos enracinements dans le milieu plus large, voilà qui représente un extraordinaire élément de ressourcement. S'engager en anthropologie devient facilement, au fil des années, un mode de vie, une passion. Puisse la lecture de cette his-toire inachevée susciter de nombreux projets d'avenir.

Je tiens à remercier en tout premier lieu madame Josée Thivierge qui m'a assisté dans ce travail de reconstruction historique et qui m'a été d'une aide précieuse. J'exprime également mes remerciements à mes collègues qui m'ont fourni soit des documents ou qui m'ont rédigé des sommaires me permettant de mieux caractériser les activités dé-partementales de recherche. J'ai fort apprécié l'aide que m'ont ap-porté madame Michèle Bouchard et monsieur Jean-Pierre Garneau, en tant qu'adjoints au Directeur du Département, dans le repérage de certains documents. J'exprime ma gratitude aux collègues qui ont pris le temps de lire ces chapitres et qui m'ont offert de nombreuses sug-gestions visant à améliorer la version préliminaire de cette monogra-phie. Cette étude est basée sur certains documents officiels du Dé-partement d'anthropologie (Collectif 1970, 1976, 1978a, 1978b et 1982) ou de l'Université, sur les écrits de mes collègues ainsi que sur mes expériences en tant que professeur à Laval depuis 1956. J'expri-me, enfin, mes remerciements à madame Christine Bédard qui a assu-mé avec compétence professionnelle la transcription du manuscrit.

Marc-Adélard Tremblay

1er juin 1989

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[1]

L’anthropologie à l’Université Laval. Fondements historiques, pratiques académiques,

dynamismes d'évolution.

INTRODUCTION

1. Problématique et contextualisation

Retour à la table des matières

L'anthropologie, en tant que discipline académique, est née vers le milieu du XIXe siècle en Europe et aux États-Unis. Dans une très large mesure, sa naissance a coïncidé avec l'apogée de l'ère coloniale. Suite aux pressions internes en provenance des peuples gouvernés, les gran-des puissances coloniales se sont vues dans l'obligation de s'intéresser de plus près aux traditions et coutumes de leurs colonies qui, pour la très grande majorité, étaient multiethniques et multilingues. Le motif premier de la puissance conquérante européenne avait été jusque-là l'exploitation des ressources naturelles disponibles sur les territoires assujettis pour des fins d'enrichissement matériel, et à ce sujet on avait mis en place des structures politiques et des modes de contrôle qui en assuraient l'efficacité. Les revendications internes des peuples soumis s'adressaient surtout à la participation, tant dans les structu-res de gouvernement que dans celles se rapportant à la vie économique et sociale. Cette participation des peuples conquis à l'administration locale et régionale a nécessité que les puissances impériales [2] for-ment des administrateurs ayant une excellente connaissance de la lan-gue et des coutumes des ethnies sous leur tutelle. C'est ce que l'on a

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nommé l'indirect rule. Aux États-Unis, la situation fut quelque peu dif-férente dans la mesure où, à la même époque, l'ambition coloniale des Américains se limitait à la conquête de l'Ouest où vivaient de nom-breux peuples autochtones ayant lutté, sans succès, pour contrer l'en-vahissement et l'usurpation de leurs territoires.

En Europe, comme en Amérique d'ailleurs, bien avant que l'anthro-pologie ne conquière son statut de discipline scientifique et qu'elle s'insère dans les structures universitaires, il y eut des missionnaires, des explorateurs, des commerçants ainsi que des philanthropes et des autodidactes qui s'intéressèrent aux langues indigènes, aux rituels religieux et cérémonies médicinales et aux visions du monde de ces populations et qui se préoccupèrent de leur sort. Il existait, donc, avant la naissance formelle de l'anthropologie scientifique, toute une documentation écrite sur un très grand nombre de tribus qui a servi de matériau de base aux premiers anthropologues, ceux que l'on a ap-pelés les armchair anthropologists.

Cette discipline fit son apparition peu de temps après la parution de l'ouvrage sur l'évolution des espèces de Charles Darwin (1859). Il y effectuait la démonstration de l'évolution des espèces animales sur de très longues périodes de temps à la suite de processus adaptatifs (à l'environnement naturel), compétitifs (des espèces entre elles), sélec-tifs (reproduction des éléments les plus vigoureux) et de lentes muta-tions génétiques. Cet ouvrage, plus que tout autre, allait inspirer dans sa foulée, des interrogations sur l'évolution de l'Homme dans sa lente progression vers la station verticale, dans la spécialisation de ses membres antérieurs, dans la fabrication d'outils et dans le développe-ment du cerveau. L'apparition de l'espèce Homo sapiens allait, en ef-fet, susciter des interrogations très nombreuses se rapportant à l'évolution de la vie [3] en société et de l'organisation sociale. Ce sont les réponses apportées à ces questions qui seront à l'origine des pre-mières théories anthropologiques, c'est-à-dire, des explications géné-rales à caractère universel (dans l'esprit de ceux qui les énonçaient) sur le processus d'hominisation et sur ceux de la complexification so-ciale et de la diversité culturelle. C'est par son intérêt dans l'explica-tion générale basée, à la manière des sciences naturelles, sur l'obser-vation rigoureuse et la documentation minutieuse des faits de civilisa-

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tion que l'anthropologie aspirait à un statut scientifique. Il fallait, se-lon cette conception, développer des lois universelles de comporte-ment tout comme il s'avérait nécessaire de reconstituer, par l'analyse comparative et des perspectives transculturelles, les grandes étapes de l'expérience humaine et de l'évolution des sociétés. Voilà certes une ambition qui s'est concrétisée dans plusieurs directions différen-tes et qui fut à l'origine de la spécialisation disciplinaire en anthropo-logie et de la définition de champs particuliers de pratique, à savoir, l'anthropologie biologique, l'archéologie, l'ethnolinguistique (étude des langues indigènes) et l'anthropologie sociale ou culturelle.

Ce bref aperçu sur ce champ disciplinaire vise avant tout à contex-tualiser la très grande complexité (variété) des conditions historiques et socio-politiques qui furent à l'arrière-plan de son émergence en tant que l'une des sciences de l'Homme et qui ont inspiré ses principa-les orientations, lesquelles donnèrent lieu au développement de sec-teurs particuliers de spécialisation. Il faut ajouter que les grands cen-tres de l'anthropologie, en tant que science moderne, sont l'Angleter-re (anthropologie sociale), la France (ethnologie) et les États-Unis (an-thropologie culturelle), qui ont tous trois des traditions anthropologi-ques spécifiques, que l'appellation de la discipline dans ces pays reflè-te et auxquelles se rattachent les anthropologues des autres pays, répartis aujourd'hui sur tous les continents. Le cas de l'anthropologie indigéniste [4] (celle pratiquée par les nationaux nés et vivant dans des pays économiquement peu développés) est spécial et mériterait à lui seul un traitement que nous ne pouvons pas lui accorder ici. L'an-thropologie pratiquée au Canada et au Québec (Tremblay et Preston 1987 ; Gold et Tremblay 1982) n'échappe pas à cette règle générale, étant à la périphérie des grands centres. Le Canada français, cepen-dant, plus encore que le Canada anglais où coexistent les traditions américaines et britanniques, est un espace intellectuel et un lieu de rencontre entre les traditions européennes et nord-américaines. Les anthropologues universitaires, à tout le moins, sont influencés par les travaux d'adhérents à l'une ou l'autre de ces trois traditions et la dynamique de leurs interinfluences crée au Québec un type particulier d'anthropologie. Toutefois, je n'irai pas jusqu'à affirmer qu'il existe une anthropologie québécoise, ou encore une anthropologie canadienne.

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L'anthropologie qui se pratique au Québec, par les Francophones en particulier, se distinguait nettement, jusqu'à tout récemment en tout cas, du type d'anthropologie pratiquée au Canada anglais (Balikci 1980). Les traditions intellectuelles qui l'ont développée au Québec ainsi que les conditions socio-politiques qui ont été associées à sa nais-sance sont différentes de celles du Canada anglais. Il existe aussi des différenciations marquées entre les universités francophones elles-mêmes : je m'y référerai lorsque celles-ci seront nécessaires ou utiles pour mieux saisir la trajectoire académique à Laval. L'enseignement des sciences sociales y débuta en 1938 (Collectif 1948 ; Lévesque et al. 1984) et l'École des sciences sociales, économiques et politiques obtint le statut de Faculté en 1943. Cependant ce n'est que le 13 oc-tobre 1970 que le Conseil de l'Université Laval adoptait une résolution créant le Département d'anthropologie. Mais n'anticipons pas trop! Avant de reconstituer les premières étapes de développement de l'an-thropologie [5] à Laval, il m'apparaît important d'esquisser les grandes lignes du contenu de cette monographie historique.

Un premier chapitre traite de l'anthropologie en tant que discipline académique à l'Université Laval. J'y reconstitue les différentes éta-pes de sa naissance, de sa croissance et de la conquête de son autono-mie par la création d'un Département d'anthropologie en 1970.

Le deuxième chapitre porte sur la recherche anthropologique ef-fectuée par les professeurs/res et les étudiants/tes du département selon le mode chronologique et celui des aires culturelles pour ce qui se rapporte aux premières études de terrain et, par après, selon soit le champ d'étude particulier ou la perspective théorique générale pri-vilégiée.

Le troisième chapitre se rapporte à l'organisation administrative du département, à ses programmes d'enseignement et à ses clientèles étudiantes.

Le quatrième chapitre traite de la diffusion des connaissances et définit la production scientifique et le rayonnement des profes-seurs/res du département en mettant l'accent sur l'intervention des anthropologues dans le milieu social plus large et sur la participation des professeurs/res aux groupes interfacultaires et interuniversitai-res.

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Une conclusion esquisse quelques-uns des défis qui confrontent l'anthropologie (Tremblay 1983b) d'ici à la fin de ce millénaire. Celle-ci fut rédigée par Eric Schwimmer qui présida le comité des orienta-tions au moment où notre département dut affronter une importante mise en question interne aux débuts des années 1980.

[6]

Suivent, dans l'ordre, une annexe qui dresse la liste des thèses de maîtrise et de doctorat présentées avant le 1er avril 1989 et les réfé-rences bibliographiques de la monographie.

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[7]

L’anthropologie à l’Université Laval. Fondements historiques, pratiques académiques,

dynamismes d'évolution.

Chapitre 1

L'anthropologie en tant que discipline académique à Laval

1. Les précurseurs à Laval et ailleurs 2

Retour à la table des matières

Durant l'ère duplessiste (1944-1959), on peut affirmer que l'acti-vité anthropologique fut directement ou indirectement reliée aux nombreux changements sociaux qui sont survenus au Québec après la Seconde Guerre mondiale. Les premiers praticiens se sont affairés [8] à ce que nous appellerions aujourd'hui « une anthropologie de sauveta-ge ». En effet, il s'est agi pour eux de constituer des dossiers ethno-graphiques sur les communautés traditionnelles en voie de disparition. Travaillant à la fois au Musée National du Canada et aux Archives de Folklore de l'Université Laval, Marius Barbeau fut incontestablement le premier observateur systématique de villages canadiens-français et 2 Les sections 1 et 2 s'inspirent largement d'un article publié conjointement avec

Gerald L. Gold (Tremblay et Gold 1976) tandis que la section 3 reprend certains éléments qui apparaissent dans le même article.

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de réserves amérindiennes dans les perspectives de l'anthropologie. Ses premières enquêtes ethnographiques et folkloriques dans la vallée du Saint-Laurent remontent à 1914. Plusieurs anthropologues améri-cains de l'époque connaissaient Barbeau par le biais de ses liens avec Edward Sapir qui fut le premier directeur du Musée National du Cana-da en 1910, au moment de sa fondation. Les folkloristes, par après, tour à tour dénommés spécialistes en arts et traditions populaires et ethnologues, l'identifient comme étant le maître de Luc Lacourcière (Barbeau 1916, Barbeau et Sapir 1925, Savard 1946, Rioux 1969, La-courcière 1947). Ce dernier, avec l'assistance de Mgr Félix-Antoine Savard, créa en 1944 à la Faculté des Lettres de Laval les Archives de Folklore 3. Marius Barbeau est certes une des figures les plus mar-quantes de l'anthropologie du Québec et je regrette que, tout en ayant un certain nombre d'articles et de films sur lui et sur son oeu-vre, nous ne disposions pas encore d'une évaluation critique de l'en-semble de ses travaux. Quant aux retombées des travaux de Lacour-cière, elles sont visibles à travers la richesse extraordinaire de la do-cumentation que l'on retrouve dans les anciennes Archives de Folklore, dans ses écrits sur les contes et les légendes du Canada français et dans les travaux de nombreuses générations d'étudiants/tes qu'il a formés/ées (direction de près d'une centaine de thèses) et qui ont poursuivi son oeuvre, sensiblement a partir des mêmes préoccupations.

[9]

Jacques Rousseau, botaniste de formation, mais aux connaissances encyclopédiques, fut un contemporain de Barbeau, bien que ce dernier ait été son aîné de plusieurs années. A l'occasion de ses études botani-ques dans la péninsule du Québec-Labrador, il sut observer minutieu-sement les coutumes et les traditions amérindiennes, en particulier, la culture matérielle, l'organisation sociale et le dualisme religieux des Montagnais-Naskapis. La synthèse de ses travaux ethnobiologiques sur

3 « En 1976, sous la direction de Jean Hamelin, le Fonds documentaire des Archi-

ves de Folklore, ceux de l'Atlas linguistique de l'Est du Canada et du Trésor de la langue française au Québec ont été regroupés pour former le CELAT(centre d'Études sur la Langue, les Arts et les Traditions populaires des Francophones en Amérique du Nord », in, CELAT, Un centre multidisciplinaire à fréquenter, Fa-culté des Lettres, 1986, pamphlet d'information.

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cette péninsule (Rousseau 1964) fut présentée dans un ouvrage qu'il co-édita avec Jean Malaurie (Malaurie et Rousseau 1964). J'ai effec-tué récemment, en collaboration avec Josée Thivierge, une évaluation critique de son oeuvre amérindienne (Tremblay et Thivierge 1986) avec l'intention de rendre ainsi hommage à l'un des fondateurs du champ scientifique québécois, à un farouche défenseur des droits abo-rigènes et à un définiteur des besoins des peuples autochtones. À par-tir de son entrée au Centre d'études nordiques de Laval en 1962 jus-qu'à sa mort en 1970, Rousseau continua ses travaux amérindiens sans pouvoir, toutefois, produire un exposé de synthèse sur l'ensemble de son oeuvre.

Un autre précurseur de travaux anthropologiques au Québec fut Marcel Rioux qui, par son mariage, devint le gendre de Barbeau. En dé-but de carrière, Rioux entreprit, durant son séjour au Musée National du Canada, des études systématiques en anthropologie sociale sur des villages francophones du Québec (Rioux 1954, 1957) qui demeurent encore aujourd'hui des monographies fort intéressantes. Peu de temps après son arrivée à l'Université de Montréal, Rioux passa du Départe-ment d'anthropologie au Département de sociologie, estimant que ses travaux se situaient de plus en plus dans les traditions sociologiques des études sur la globalité. Cette conversion nous amène comme natu-rellement, à faire ressortir la contribution de sociologues éminents au développement de la recherche anthropologique au Québec.

[10]

Le Canadien-français Léon Gérin, disciple de Fréderic LePlay, par ses monographies de village et ses études sur la paysannerie québécoi-se (Gérin 1898, 1931, 1932) a établi une solide tradition d'observation-participante et d'entrevue à l'aide d'informateurs-clefs (Tremblay 1957), méthodes de cueillette de données encore largement utilisées en anthropologie (Genest 1985). L'Américain Everett C. Hughes (Hug-hes 1938, 1943, 1963), dans ses études à Cantonville sur l'industriali-sation et les contacts interculturels, suivit essentiellement une dé-marche similaire. Ces deux chercheurs, le premier de l'École françai-se, le second, de l'École de Chicago, allaient exercer une forte in-fluence sur Jean-Charles Falardeau (Falardeau 1953,1964, 1968, 1974a, 1974b) lequel, en tant que directeur-fondateur du Départe-

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ment de sociologie (1943-1960), influença plusieurs générations d'étu-diants dans leurs orientations professionnelles et leurs carrières et présida à l'introduction de l'anthropologie à la Faculté des Sciences sociales de l'Université Laval. L'utilisation par Gérin de la technique de la monographie de famille dans l'étude des villages québécois ainsi que les études de terrain de Hughes sur la mobilité professionnelle et la différenciation ethnique à Cantonville et à Montréal constituaient des entreprises scientifiques qui se complétaient bien. N'oublions pas aus-si que, durant son séjour au Québec, Hughes dispensa un enseignement dans les trois principales universités du Québec de l'époque (McGill, Montréal et Laval), ce qui eut pour résultat, me semble-t-il, de réduire les écarts dans les orientations premières de ces universités et de susciter à l'occasion des collaborations.

C'est en 1939, qu'Horace Miner, un anthropologue culturel, formé à l'Université de Chicago, publia son analyse fonctionnelle de Saint-Denis de Kamouraska (Miner 1939), laquelle devint par la suite un mo-dèle de monographie de village à la fois pour les anthropologues et les sociologues. Saint-Denis fut publiée dans une version française en 1985 : il aura fallu attendre plus de quarante [11] cinq ans (Miner 1985) avant que ce classique de l'analyse fonctionnaliste et de l'an-thropologie du Québec devienne disponible aux spécialistes et au grand public d'expression française (Tremblay 1985). C'est d'ailleurs cette même étude qui servit de point d'horizon aux travaux récents de Gerald L. Gold sur l'industrialisation de Saint-Pascal de Kamouraska (Gold 1973,1975). Elle avait servi auparavant a déclencher une polémi-que entre Philippe Garigue, formé à l'anthropologie sociale en Angle-terre, qui rejetait le modèle de l'École de Chicago comme étant capa-ble d'expliquer l'évolution sociale du Québec et Marcel Rioux ainsi qu'Hubert Guindon (Garigue 1957, 1961, 1964 ; Rioux 1959 ; Guindon 1960). Les orientations européennes de Rioux ainsi que ses expérien-ces québécoises de recherche l'amenèrent plus tard a accepter et à modifier le modèle de la société paysanne afin de l'insérer dans sa conception culturaliste de l'évolution globale du Canada d'expression française (Rioux 1964).

Travaillant à l'aide de données recueillies sur la Basse-Côte-Nord du Saint-Laurent (Breton 1973b) et dans le comté de Bellechasse

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(Breton 1979), Yvan Breton et son équipe ont poussé plus loin le modè-le développé par Rioux dans les perspectives du matérialisme histori-que afin de mieux rendre compte du caractère apparemment idiosyn-cratique de la production maritime et agricole au Québec. Les travaux de Lise Pilon-Lê (1977, 1979, 1980, 1984a, 1984b) sur les milieux agri-coles s'inspirent des mêmes perspectives. Les études ethnographiques sur la Côte-Nord du Saint-Laurent, à leurs tous débuts, s'appuyèrent sur celle d'un autre anthropologue des premières heures formé par Robert Redfield à Chicago. Il s'agit d'Oscar Junek (Junek 1937) dont la monographie sur les isolats a constitué le schéma de départ (étude des petites unités sociales fonctionnelles en périphérie dépendantes pour leur développement de la diffusion des modèles culturels du cen-tre) pour établir des comparaisons historiques dans cette région. En bref, cette période fut caractérisée par des études empiriques sur le territoire et par [12] l'utilisation adaptée de schémas théoriques éla-borées ailleurs en vue de l'étude de la culture québécoise. Comme je l'illustrerai plus loin, l'ethnographie de la Côte-Nord fut conçue, pour devenir un laboratoire qui servirait à la formation de générations d'an-thropologues à la pratique du terrain dès leur entrée à l'Université. Elle permettrait aussi de constituer un dossier ethnographique com-plet sur une région isolée du Québec qui nous permettrait de mieux comprendre le processus d'industrialisation du Québec et, partant, de connaître les dynamismes influant sur l'évolution de la mentalité qué-bécoise vers la nord-américanisation et la modernité. N'oublions pas aussi, qu'à l'époque des précurseurs, il n'existait aucun programme d'anthropologie dans les universités du Québec. De fait, l'anthropolo-gie au Québec était une discipline inconnue qui semblait osciller entre l'ethnographie-folklore et un type de sociologie globaliste émergeant des traditions sociologiques durkheimiennes professées à Laval par Fernand Dumont (Dumont 1965, 1974a, 1974b). Ce type de sociologie a influencé la perspective centrée sur les problèmes sociaux de l'École de Chicago, si bien représentée à Québec par Jean-Charles Falardeau au début de sa carrière professorale (Falardeau 1974a et 1974b).

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2. Les premiers anthropologues-enseignants dans les universités québécoises

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Au Québec, les premiers enseignements anthropologiques furent d'abord dispensés à McGill par William Kelly en 1948 et, par après, par Fred Voget qui étudia les changements religieux à Caughnawaga (Voget 1950). À son départ, Voget fut remplacé par Jacob Fried (Fried 1954), dont les intérêts en psychiatrie sociale transculturelle allaient carac-tériser ce département durant toute une décennie. C'est en 1953 que Philippe Garigue devint professeur au Département de sociologie de McGill. Son appartenance à ce département allait donner à McGill une avance remarquée dans l'étude des communautés canadiennes-françaises (devenues dans la terminologie [13] actuelle, québécoises, d'expression ou d'ascendance française), et du système de parenté (Garigue 1956, 1958, 1962, 1967, 1973). Cette avance ne fut toutefois pas conservée après le départ de ce dernier, en 1960, pour devenir le doyen de la Faculté des Sciences sociales de l'Université de Montréal et ainsi succéder à Esdras Minville, dont les études sur le milieu avaient influencé toute une génération d'étudiants formes dans les collèges classiques du Québec. C'est durant cette période que McGill produisit son premier détenteur d'une maîtrise en anthropologie et forma des chercheurs tels que Peter Pineo (aujourd'hui à McMaster) et Nelson Graburn (aujourd'hui à l'University of California à Los Ange-les). McGill offrit plus tôt que les autres universités québécoises des cours d'anthropologie. Par ailleurs, il me semble qu'il existe une faible continuité entre ce département du début des années cinquante et le programme d'anthropologie mis au point, peu après l'arrivée de Ri-chard Salisbury en 1962 (formé à la fois en Angleterre et aux États-Unis) et de Norman Chance en 1963 (un diplômé de Cornell).

Il existe peut-être une plus grande continuité entre les premiers enseignements qu'offrit Guy Dubreuil à l'Université de Montréal en 1953, au Département de psychologie, et ceux qui sont offerts au-jourd'hui au Département d'anthropologie. Il est important de noter

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que les intérêts de Dubreuil en anthropologie psychologique à Montréal se comparaient à ceux de Fried en psychiatrie sociale transculturelle à McGill et à ceux de Tremblay dans le champ de la culture et de la per-sonnalité à Laval (appelé aujourd'hui anthropologie psychologique) (Du-breuil 1962, Hughes Charles C. et al. 1960) dans les années cinquante. C'est à l'automne 1958 que Laval offrit un premier cours d'anthropo-logie à la Faculté des Sciences sociales. Le titulaire de ce cours fut Marc-Adélard Tremblay, un diplômé de Cornell ayant travaillé sous la direction d'Alexander H. Leighton (psychiatre-anthropologue), pion-nier des études en psychiatrie sociale aux États-Unis (Leighton 1959) ainsi que de l'anthropologie [14] appliquée (Leighton 1945). Ce premier cours d'anthropologie, intitulé « Éléments d'anthropologie » compor-tait 60 heures, était réparti sur deux trimestres et était obligatoire pour tous les étudiants/tes du Département de sociologie. Tremblay était venu à Québec à l'automne de 1956 avec le mandat de développer des enseignements dans les domaines de la méthodologie et des scien-ces sociales appliquées (Tremblay 1977). L'ensemble des cours qu'il offrit sur l'initiation à la recherche empirique dans les sciences socia-les et sur la méthode scientifique (Tremblay 1968a) représentent des étapes importantes dans l'émergence de l'anthropologie culturelle en tant que discipline académique à Laval dans la mesure où, dans le cadre de ces cours, il initiait les étudiants/tes aux techniques ethnographi-ques, à celles de l'entrevue libre avec informateur-clef (Tremblay 1957), de l'observation-participante et des techniques biographiques, (le récit de vie, en particulier), autant de techniques d'observation particulièrement valorisées en anthropologie. De plus, afin d'illustrer ces techniques par des instruments concrets, il utilisait, à titre d'exemples, les travaux d'équipes anthropologiques de recherche ainsi que les siens propres sur le Québec. À l'hiver 1961, au moment où le Département de sociologie fut transformé en un Département de so-ciologie et d'anthropologie, Tremblay dispensa aux premiers étudiants inscrits à la Section d'anthropologie, un cours d'anthropologie appli-quée, dont les principales orientations s'inspiraient des enseignements d'Alexander H. Leighton sur le même sujet à la fin des années quaran-te et aux débuts des années cinquante à Cornell University.

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3. L'anthropologie à l'université Laval jusqu’aux années 1970

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Afin de mieux comprendre ce qui a fondé l'enseignement de l'an-thropologie culturelle à Laval durant les années cinquante, il faut re-placer cette discipline dans son contexte institutionnel, soit celui de la Faculté des Sciences sociales. Rappelons que cette [15] dernière, au moment de sa fondation en 1938, se dissociait de la vision traditionnel-le du social et proposait une conception positiviste du réel. Cette posi-tion innovatrice suscita la critique interne des clercs (il faut se rappe-ler que Laval était encore à ce moment-là confessionnelle et que la re-cherche, surtout celle amorcée dans les sciences sociales, devait s'inspirer de la position officielle de l'Église catholique) et des politi-ciens affiliés à un régime politique ultra-conservateur (Falardeau 1964, 1974a). Rappelons aussi que la Faculté reçut en 1949 une impor-tante subvention de la Fondation Carnegie pour entreprendre, dans le cadre du Centre de recherches sociales (Murbach et Gagnon 1986) une étude systématique de la société canadienne-française. Le petit Dé-partement de sociologie d'alors (1956), composé de six professeurs et localisé au Quartier latin, constitua le foyer d'une recherche interdis-ciplinaire orientée vers l'application 4. Quand Tremblay offrit pour la première fois ses « Éléments d'anthropologie », Laval n'était pas en- 4 En plus de Jean-Charles Falardeau, (Falardeau 1974b), les autres membres du

département étaient : Guy Rocher (Rocher 1974), aujourd'hui professeur-chercheur à la Faculté de Droit de l'Université de Montréal mais anciennement sous-ministre au Québec ; Fernand Dumont (Dumont 1974c), toujours professeur au Département de sociologie de Laval, mais aussi Président de l'Institut québé-cois de la Recherche sur la Culture (IQRC) ; Yves Martin, ancien sous-ministre du ministère de l'Éducation, ancien recteur de l'Université de Sherbrooke et ancien directeur général de l'Institut de recherche en santé et sécurité du travail du Québec (IRSST) ; Gérald A. Fortin (Fortin 1974), ancien directeur et maintenant chercheur à l'Institut National de la Recherche scientifique-urbanisation (INRS) et l'auteur du présent ouvrage, professeur au Département d'anthropo-logie de Laval et depuis mai 1987, Président du Conseil québécois de la Recher-che sociale (CQRS).

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core le genre d'institution où s'établissaient des cloisons étanches entre les disciplines, ce qui facilitait d'autant les collaborations entre professeurs venant d'horizons disciplinaires différents. À cette épo-que, d'ailleurs, le programme d'étude en folklore, par exemple, était perçu comme ayant une étroite liaison aux sciences sociales. Ce fait facilitera la venue de Nancy Schmitz en anthropologie.

Voilà le type de climat intellectuel qui prévalait au moment où les professeurs/res de la Faculté entreprirent d'importantes [16] re-cherches empiriques sur le Québec. L'étude sur l'instabilité des tra-vailleurs forestiers (Tremblay 1960) regroupait des professeurs des départements des relations industrielles, d'économique et de sociolo-gie. Les études sur l'impact des changements technologiques sur les communautés agricoles et forestières de la région du Bas Saint-Laurent dans les années cinquante et qui furent à l'origine de la vaste entreprise de recherche que fut le BAEQ (Bureau d'Aménagement de l'Est du Québec) ainsi que celle portant sur le logement à Québec (Hodgson 1961-1963) furent conduites par des professeurs venant de ces mêmes départements. L'étude sur les comportements économiques (besoins, conditions de vie et aspirations) de la famille salariée cana-dienne-française qui dura sept ans (1957-1964) fut elle aussi une en-treprise conjointe de la sociologie et de l'anthropologie (Tremblay et Fortin 1964). Combien d'autres études pourraient être citées qui pos-sédaient ces deux caractéristiques essentielles que furent l'interdis-ciplinarité et une orientation en vue de l'action, deux traits distinc-tifs, souvent oubliés, lorsqu'on se réfère à l'émergence de l'anthropo-logie en tant que discipline académique à Laval.

L'établissement d'un programme d'anthropologie en 1961 obligea la direction du Département de sociologie à engager des anthropologues sur une base permanente (Albert Doutreloux, un africaniste originaire de Belgique, en 1963 et Nancy Schmitz, une diplômée en folklore, en 1966), mais aussi à inviter des savants européens pour y dispenser des enseignements spécialisés. Ceux-ci influencèrent profondément l'évo-lution du programme, comme je l'illustrerai plus loin. Renaud Santerre, diplômé de la première promotion d'anthropologues formés a Laval, fut embauché en 1968 et Pierre Beaucage, de la seconde promotion, arriva lui aussi en 1968, tandis que Paul Charest, membre du troisième

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contingent, joignit nos rangs en 1969. Geza de Rohan Csermak, un au-tre membre du corps professoral des premières heures, fit un bref séjour à Laval (1970-1972) et dut repartir [17] faute d'obtenir sa permanence. Doutreloux retourna en Belgique pour occuper un poste à l'Université Libre de Bruxelles en novembre 1969 tandis que Beaucage accepta un poste au Département d'anthropologie de l'Université de Montréal en 1971. Durant les années soixante, Laval invita plusieurs collègues européens pour de brèves périodes : Raoul Hartveg (anthro-pologie somatique) et Paul Mercier [ethnologie africaine et histoire de l'anthropologie (Mercier 1966)] furent certes les invités les plus re-marqués par leurs visites régulières à l'automne de chaque année pour une période de deux mois et aussi firent partie de ceux qui furent les plus appréciés par les étudiants/tes. D'autres invités, toutefois, s'adaptèrent plutôt mal à la vie québécoise : non seulement eurent-ils moins de succès dans leurs enseignements que les deux premiers, mais en certaines occasions ils entrèrent en conflit avec les étudiants/tes et leurs jeunes collègues québécois.

3.1. Les premiers enseignements anthropologiques à Laval

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Comme je l'ai noté plus tôt, les premiers enseignements en anthro-pologie à Laval furent offerts à la Faculté des Lettres durant les an-nées quarante. À la Faculté des Sciences sociales, ces premiers ensei-gnements furent dispensés au Département de sociologie. Dès l'ouver-ture de l'année académique 1958-1959, Tremblay fut autorisé à dis-penser son cours d'anthropologie qu'il donnera sans interruption du-rant douze ans. Au moment de l'établissement de l'Option d'anthropo-logie en 1961, le même cours sera donné exclusivement aux étu-diants/tes s'inscrivant à ce programme d'étude, dès leur première année d'inscription. Ce cours définissait les objectifs de l'anthropolo-gie en tant que discipline scientifique ; retraçait dans leurs grandes lignes, les principaux courants théoriques qui ont marqué son dévelop-pement ; exposait les principaux outils conceptuels dont elle se ser-vait ; examinait les principaux paliers de l'analyse anthropologique (de-

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venus depuis autant de champs sous-disciplinaires) [18] et, finalement, passait en revue les principales techniques d'enquête et d'observation qu'elle utilisait. Si le temps le permettait, les étudiants/tes, qui de-vaient préparer des travaux longs sur une société sans écriture, pré-sentaient en classe les résultats de leurs travaux (sur un auteur ou sur une étude particulière).

À l'automne 1959 (année académique 1959-1960), Tremblay offrait un deuxième cours d'inspiration anthropologique. Celui-ci se situait dans la foulée des travaux de l'École de Chicago sur la croissance des villes et l'écologie des phénomènes de désorganisation sociale et s'ins-pirait de ceux de Leighton sur l'épidémiologie sociale des maladies mentales dans le comté de Stirling en Nouvelle-Écosse. La première fois que ce cours fut dispensé, il le fut sous le titre de « Désorganisa-tion et réorganisation sociales » (Collectif 1970:5). Ce cours fut aussi obligatoire pour tous les étudiants/tes de sociologie 3e année ainsi que pour ceux/celles de l'École de service social. Les psychiatres de l'épo-que en résidence à Saint-Michel-Archange (aujourd'hui, Robert Gif-fard) l'ont également suivi durant une couple d'années. Essentielle-ment, ce cours traitait des conditions de la production ainsi que des conséquences de la désorganisation sociale (ou de l'anomie, pour utili-ser un concept durkheimien) (Tremblay et Gosselin 1960 ; Gosselin et Tremblay 1960) en tant qu'ensembles de facteurs particulièrement favorables, tant au niveau individuel qu'au niveau collectif, à l'appari-tion de maladies mentales ou d'expériences psychologiques suffisam-ment traumatisantes pour qu'apparaissent des symptômes d'intérêt psychiatrique. C'est à cette époque que Tremblay amorça ses travaux sur l'impact des changements technologiques sur la vie communautaire et la survivance des Acadiens (Tremblay 1962b) et sur leur accultura-tion linguistique (Tremblay 1961, 1962a). Il entreprit, par après, ceux se rapportant à l'hôpital psychiatrique en tant que culture de la folie (Fortier 1966, Côté 1966) et ceux [19] traitant de réhabilitation so-ciale des ex-patients psychiatriques dans le Québec métropolitain (Tremblay 1982a et 1987).

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3.2. L'établissement de l'Option « anthropologie » en 1961

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Si on se rapporte au Mémoire de l'anthropologie (Collectif 1970: 9-10) rédigé dans le but de justifier la création d'un Département d'an-thropologie autonome, on y remarque que l'option anthropologique à Laval en 1961 possédait cinq caractéristiques différentes décrites ci-après :

a) c'est une option d'anthropologie culturelle et sociale structurée en fonction des liens étroits qu'elle doit entretenir avec la so-ciologie : à titre d'exemple, les sociologues et les anthropolo-gues suivent plusieurs cours en commun et à peu près le 1/5 des crédits en anthropologie sont obtenus par des enseignements sociologiques ;

b) la linguistique dispensée à ce moment-là à la Faculté des Lettres est conçue comme une discipline fondamentale dans un pro-gramme d'enseignement en anthropologie culturelle : elle y oc-cupe effectivement une place privilégiée, soit 8 crédits sur un total de 60 crédits (4 semestres de 15 crédits) ;

c) l'enseignement théorique ainsi que les applications ethnographi-ques porteront sur trois aires culturelles : l'Afrique noire fran-cophone, l'Amérique latine et l'aire nord-américaine à l'inté-rieur de laquelle on accordera une importance particulière au Canada d'expression française, aux Amérindiens et aux Inuit ;

d) dès l'origine, on consacre la nécessité d'une expérience d'au moins trois mois sur un terrain particulier dans le but de re-cueillir des données empiriques nécessaires à la rédaction d'une thèse de maîtrise : toutefois, on n'exclut pas la possibilité de présenter une thèse théorique ; et

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e) la carrière anthropologique, à ce moment-là, est vue comme pou-vant en être une d'enseignement (à l'Université), de recherche (dans un Centre de recherche), ou encore d'action dans un contexte gouvernemental.

Le même Mémoire discute de la aise en place et de l'évolution sub-séquente du programme d'étude en anthropologie. Les deux extraits qui suivent en établissent le profil d'ensemble.

Afin de mettre à exécution un tel programme de soixante crédits devant conduire à la maîtrise en anthropologie, en plus d'utiliser les ressources sociologiques et celles de la Faculté, on puise à mime les ressources de la Faculté des Lettres (Dépar-tement de Linguistique, Département de Folklore, Institut de Géographie) et occasionnellement à celles du Centre d'études nordiques. On invite aussi régulièrement d'Europe des profes-seurs qui assument les enseignements de (l'Ethnographie de l'Afrique française » (Paul Mercier), (L'Ethnographie de l'Amé-rique latine (Maria de Queiros et Henri Favre), et « L'Anthro-pologie physique » (Raoul Hartweg). Il n'y avait à ce moment-là qu'un seul anthropologue à plein temps (1970: 9)

Depuis ses tout débuts, la Faculté des Sciences sociales de Laval comportait une Propédeutique de deux années à la suite de laquelle les étudiants/tes s'inscrivaient dans un département pour y poursuivre leurs études durant deux autres années au terme desquelles ils de-vaient présenter une thèse pour l'obtention d'une maîtrise. Au début des années soixante, cette Propédeutique fut réduite à une seule an-née et les études disciplinaires (départementales) s'échelonnèrent alors sur trois ans. En 1966-1967, l'année de Propédeutique disparaît complètement et les étudiants s'inscrivent directement dans un dé-partement à leur arrivée à la Faculté. Ce changement dans les orienta-tions pédagogiques de la Faculté allait accélérer le développement de l'anthropologie par la nécessité qu'il imposait d'accroître les ressour-ces humaines pour être en mesure de mieux répondre aux besoins aca-

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démiques de clientèles étudiantes qui [21] s'orientaient davantage en fonction d'une spécialisation disciplinaire offerte seulement dans un département. Le Mémoire de 1970 ne manque pas d'y faire allusion :

En 1966-1967, l'année propédeutique disparaît et les étu-diants s'inscrivent directement au Département de sociologie et d'anthropologie, font une année commune à la suite de laquelle ils choisissent soit l'Option (Sociologie », soit l'Option « An-thropologie ». Dès lors l'Option « d'anthropologie » comporte 90 crédits qui s'échelonnent sur trois années académiques (soit la 2e, la 3e, et la 4e). À l'automne 1968, l'ancien programme de maîtrise de quatre années est concentré en trois ans et mène à l'obtention d'un baccalauréat en sociologie ou en anthropologie, On élabore, à la même occasion, un nouveau programme de maî-trise. À l'automne 1969, le programme est conçu de telle sorte que les étudiants optent pour l'anthropologie ou pour la sociolo-gie à la fin du premier semestre de la première année, Il n'exis-te plus que quelques cours communs au niveau des études de premier cycle. (Collectif 1970:10)

3.3. Le statut de l'anthropologie dans les universités

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Dans un document analysant le processus d'intensification de l'en-seignement de l'anthropologie au sein du Département de sociologie de Laval, la direction souligne avec emphase que le statut académique de cette discipline n'est défini avec rigidité dans aucune institution uni-versitaire. C'est donc dire que parfois on la retrouve avec une autre discipline pour former un Département conjoint et que, dans d'autres circonstances et dans d'autres lieux, elle est complètement autonome. Elle peut être logée dans une variété de structures facultaires diffé-rentes, telles qu'une Faculté des Arts et des Sciences, une Faculté des Sciences sociales, une Faculté des Lettres et, exceptionnellement, dans d'autres facultés. Enfin, certaines universités offrent seulement

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un programme de 2e et 3e cycle en anthropologie ; d'autres, seulement un programme de 1er cycle et d'autres, un programme complet à tous les cycles de l'enseignement universitaire. En tant que tradition, l'an-thropologie s'intéressait [22] aux peuples sans écriture et à l'Autre lointain. Mais avec l'évolution disciplinaire, l'éventail des intérêts an-thropologiques s'est élargi pour incorporer les civilisations complexes et pour intégrer tout autant la culture même de l'observateur que cel-le des autres (Genest 1984 et 1985). De ce point de vue, les études anthropologiques d'aujourd'hui portent tout autant sur la vie d'usine que sur les communautés rurales. Ce même document souligne encore que l'anthropologie, en tant que science fondamentale, se divise en deux traditions qui sont complètement différentes l'une de l'autre, à savoir, l'anthropologie physique ou biologique et l'anthropologie sociale ou culturelle. Ce clivage, prétend-on, correspond et reflète bien l'une ou l'autre des grandes orientations des anthropologues d'aujourd'hui. Soulignant qu'il serait difficile d'initier correctement en même temps les étudiants/tes à ces deux traditions scientifiques, le document pro-pose d'orienter l'enseignement et la recherche à Laval du côté de l'anthropologie dite sociale ou culturelle. Le rédacteur, a n'en pas dou-ter, se réfère surtout dans les propos qui précèdent à la tradition eu-ropéenne plutôt qu'à la tradition boasienne (américaine), laquelle conçoit l'anthropologie comme devant plutôt se diviser en quatre champs sous-disciplinaires : anthropologie physique, ethnolinguistique, archéologie et anthropologie culturelle. Ce modèle fut adopté par la plupart des universités américaines qui imposent à leurs clientèles étudiantes un apprentissage rigoureux dans chacune de ces sous-disciplines puisqu'elles disposent habituellement des ressources né-cessaires pour ce faire. Ces ressources, on peut le comprendre à la lumière du contexte universitaire québécois, n'existaient pas à Laval.

L'influence européenne apparaît encore plus nettement dans la sui-te du document où on met en relief les nécessaires rapprochements de la sociologie et de l'anthropologie en plus de rappeler que cette der-nière ne possède pas encore la maturité nécessaire pour voler de ses propres ailes à la lumière surtout des exigences du [23] marché du travail. Ce document fut écrit, ne l'oublions pas, en 1960 au moment où l'Université de Montréal songeait à créer un Département d'anthropo-logie complètement indépendant de toute autre discipline. Ce qui fut

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fait en 1961. Laval se devait, par conséquent, de fournir une réponse à une telle innovation dans le monde francophone québécois. La réaction ne tarda pas à se manifester : Laval élargirait les structures de son Département de sociologie pour inclure l'anthropologie, mais une an-thropologie à la manière européenne (française), sous l'éclairage socio-logique. Voici comment cette nouvelle orientation départementale est justifiée dans le document de la direction.

Par suite de cette orientation que nous proposons pour notre programme d'études anthropologiques, celles-ci se rapproche-raient de très près, à Laval, de la formation sociologique. D'ail-leurs, si on se reporte à l'histoire de la sociologie, on retrouve une tradition importante orientée en ce sens : l'École sociologi-que française en est sans doute la plus glorieuse et la plus écla-tante incarnation, Plus que jamais, il semble fructueux, pour le sociologue, de situer constamment ses travaux par comparaison avec les sociétés archaïques, Et la perspective inverse, pour l'anthropologue, ne paraît pas moins importante. Des arguments tout à fait « pratiques » se joignent à ces considérations plus purement scientifiques. Les possibilités d'emploi pour les an-thropologues sont encore, dans notre milieu, assez mal définies, Il semblerait judicieux de proposer, en conséquence, une forma-tion assez polyvalente à nos étudiants. Ce serait faciliter beau-coup la tâche des professeurs du Département de sociologie que leur permettre d'orienter, selon la conjoncture, les élèves ayant terminé le cycle des études vers tel ou tel secteur de travail où une formation à tendance « sociologique » ou « anthropologi-que » paraîtrait plus opportune [...] Pour toutes ces raisons, il ne nous semble pas souhaitable de créer un Département distinct d'anthropologie. Nous proposons, plutôt, la transformation ac-tuelle de notre Département de sociologie en un Département de sociologie et d'anthropologie. (Direction du Département de sociologie. 1960: 2-3)

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3.4. La coexistence pacifique de la sociologie et de l'anthropologie

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Entre 1961 et 1969, les Annuaires de l'Université Laval présentent, dans la foulée du document de la direction du Département de sociolo-gie de 1960 et du discours dominant qui s'y trouve, la sociologie et l'anthropologie comme deux disciplines scientifiques ayant de fortes ressemblances et entretenant entre elles des liens étroits. On y re-marque aussi que les étudiants du 1er cycle des deux disciplines sui-vent des cours de base en commun.

Par contre le Mémoire de l'anthropologie (Collectif 1970) visant à la création d'un département autonome d'anthropologie, tient un dis-cours quelque peu différent de celui des Annuaires. Il affirme, en ef-fet, que depuis l'introduction de l'anthropologie au Département de sociologie, ces deux disciplines se sont développées plus ou moins pa-rallèlement, l'anthropologie cherchant surtout à se différencier de la sociologie et aspirant avant tout à établir sa spécificité. Si, pour connaître leurs vues à ce sujet, on interrogeait les personnes qui ont été formées durant cette décennie dans un département conjoint, la grande majorité d'entre elles nous confirmeraient, je pense, qu'elles ont été fortement marquées soit par les professeurs de sociologie, soit par les professeurs d'anthropologie et, plus rarement, par des professeurs des deux options. A la limite, on pourrait presqu'affirmer que l'interdépendance des deux disciplines paraissait mieux dans les principes que dans les faits, surtout dans les années qui ont précédé l'établissement d'un département autonome d'anthropologie.

La création de la revue Recherches Sociographiques, en 1960, sera un événement de très grande importance pour le Département de so-ciologie et d'anthropologie dans la mesure où tous les professeurs du Département (j'étais le seul anthropologue en poste à ce moment-là) publieront au moins un article dans l'un ou l'autre des quatre [25] nu-

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méros de la première année (1960) et que 62% des articles de cette même année proviendront des professeurs du Département. Mais la revue se définit aussi comme étant un carrefour de rapports interdis-ciplinaires. Durant sa première année d'existence, par exemple, elle accueillera des articles en provenance de l'histoire, du folklore, de la science politique, de l'économique et des relations industrielles. C'est donc sous l'égide des sociologues que ces rapports interdisciplinaires s'intensifieront, l'anthropologie étant une des disciplines parmi l'en-semble des disciplines représentées. Comme la revue se consacre d'abord et avant tout au milieu « canadien-français », les anthropolo-gues y occuperont une place de plus en plus effacée au fur et à mesure que l'anthropologie acquerra de la maturité et que plusieurs des tra-vaux de terrain en anthropologie s'effectueront ailleurs qu'au Qué-bec. Tremblay, par exemple, qui occupait la deuxième position en 1969 pour l'ensemble de ses contributions à la revue durant la première dé-cennie de son existence (Santerre 1969:42), n'apparaît même plus dans la liste des 37 principaux collaborateurs de la revue pour la pé-riode allant de 1970 à 1983 (Santerre 1983a: 6). Se sentant obligé de faire progresser l'anthropologie en tant que discipline académique pleinement reconnue, Tremblay réduisit sensiblement ses travaux à caractère appliqué avec les collègues des autres départements vers le milieu des années soixante, quelques années à peine après les premiè-res effervescences de la Révolution tranquille. De concert avec Dou-treloux, il commença à mettre l'accent sur les aspects traditionnels de l'enquête ethnographique dans le but de susciter les études sur le ter-rain et de favoriser les expériences transculturelles, quand cela s'avé-rait possible, et ainsi permettre des comparaisons interculturelles soi-gneusement documentées.

Les études entreprises sur les Amérindiens du Canada dans le ca-dre de la Commission d'étude Hawthorn-Tremblay (1966-1967, 2 vols) [26] qui débutèrent en 1964 ainsi que les études de Tremblay sur les Acadiens du Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse (1960-1965) de même que le programme de recherche sur l'Ethnographie de la Côte-Nord du Saint-Laurent (1965-1975), les travaux de Doutreloux au Zaïre, ceux de Beaucage au Honduras, ceux de Santerre au Cameroun contribuè-rent à élargir graduellement le fosse entre l'anthropologie et la socio-logie, tant sur le plan théorique que méthodologique. Comme je le re-

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marquais plus tôt, dès 1969 les étudiants/tes de sociologie et d'an-thropologie ne suivaient plus que quelques cours en commun. Ainsi le nombre restreint d'étudiants/tes à l'Option anthropologique, tant au premier qu'au deuxième cycles, favorisa leur insertion dans les projets et programmes de recherche existants. La plupart des inscrits/tes des années soixante firent des séjours de recherche sur le terrain, soit sur la Basse-Côte-Nord avec Tremblay (Tremblay 1967, Tremblay et Lepage 1970 ; Charest et Tremblay 1967 ; Breton 1968 ; Beaucage 1968 ; Pleau 1967 ; Dominique 1975 ; Joubert 1974, Blondin 1974, Tremblay 1976), soit en Afrique noire avec Doutreloux (Doutreloux 1967, Bourque 1969, Charest 1965, Genest 1969 et 1970, Bergeron-Coulombe 1969, Roberge 1969 et Lepage 1969), ou Santerre (Santerre 1973 et 1974), ou soit encore chez les Inuit avec Saladin d'Anglure (Saladin d'Anglure 1964 et 1970 ; Trudel 1971, Larochelle 1972, Audet 1974, Pharand 1975 et Vézinet 1975). Tous les étudiants/tes, sans exception, étaient tenus/ues d'effectuer des séjours sur le terrain pour les fins de l'apprentissage méthodologique et de la rédaction d'une thèse à caractère empirique.

Grâce à une politique d'apprentissage hâtif aux techniques anthro-pologiques d'observation, les diplômés/ées de l'Option « anthropolo-gie », détenteurs/trices d'une maîtrise, purent s'inscrire à des pro-grammes d'études de troisième cycle à l'étranger ou réussirent a se trouver des postes dans les services gouvernementaux. La recherche en équipe, encadrée au Laboratoire d'anthropologie, était centrée sur la notion d'aire culturelle qui sous-tendait [27] le programme d'étude (Gold 1987). L'établissement d'équipes de recherche fut certes un autre élément qui a raffermi la distanciation de la sociologie. Cette philosophie de la recherche, contrairement à celle centrée sur l'élabo-ration de modèles conceptuels en sociologie, est reflétée dans le Rap-port annuel de la Faculté des Sciences sociales au tout début de l'éta-blissement de l'Option « anthropologie ». Voici ce qu'on y lit :

La recherche étoffe et illustre l'enseignement théorique. Un des buts primordiaux est l'analyse de la société canadienne-française, passée et présente... Deux autres aires culturelles font aussi l'objet d'une étude poussée : l'Afrique française et

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l'Amérique latine... La responsabilité particulière du Canada français envers ces contrées, une certaine communauté cultu-relle, la présence de missionnaires canadiens-français dans ces pays : ce sont des arguments déterminants. (Rapport Annuel 1962-1963).

Si les anthropologues se sont donnés une vocation ethnographique, les sociologues, de leur côté, sous la direction de Dumont, s'étant dé-fini une vocation théorique, s'adonnèrent en grand nombre aux analy-ses idéologiques et historiques (Dumont 1974a et 1974b). Ces deux orientations parallèles, car les uns et les autres travaillaient sur des objets distincts, sont apparues au moment où Dumont fut directeur du Département de sociologie et d'anthropologie (1960-1967) et l'unité de ces deux disciplines, dont ce dernier était le principal promoteur, s'est maintenue en tant que pensée officielle du département au moins jusqu'à l'accession de Fortin au poste de directeur en 1967. Les socio-logues s'attendaient à ce que les anthropologues, ici comme ailleurs, étudient les sociétés traditionnelles et le processus de modernisation des communautés rurales. D'une certaine manière, c'était aussi la dé-finition que les anthropologues se donnaient d'eux-mêmes. S'inspirant en cela des traditions anthropologiques dans leurs études sur les peti-tes unités sociales fonctionnelles (Redfield 1955), les anthropologues du Québec de cette époque, amorcèrent des études sur les communau-tés [28] paysannes en voie de décomposition et sur les isolats du Qué-bec et du Canada. Au principe de l'unité des disciplines correspondait une stratégie de division des tâches entre sociologues et anthropolo-gues : les contestations étudiantes de 1968-1970, auxquelles je réfé-rerai bientôt, mettront en cause à la fois le principe et l'opérationnali-sation de cette division du travail en vue de la création d'un départe-ment autonome.

Les réactions des populations à l'étude, tant sur la Basse-Côte-Nord que chez les Inuit et les Amérindiens, forcèrent les différentes équipes de recherche qui y oeuvraient à l'intervention anthropologique. Imprévue au point de départ, cette orientation vers l'action, suscitée par les attentes des populations étudiées, ne se confirmera pleinement qu'après la création du Département d'anthropologie en 1970. Entre-

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temps, les terrains ethnographiques des années soixante avaient réus-si à former des anthropologues québécois et à établir une tradition empirique de recherche dans cette discipline. Toutefois, il est néces-saire de remarquer que le nombre des publications qui furent produi-tes par ces équipes de recherche ne fut pas aussi grand qu'on aurait pu l'espérer. Leur succès, en tant que formation de chercheurs et d'action concertée, cependant, est incontestable. Il ne faudra que quelques années pour qu'un noyau de jeunes chercheurs, ayant une lon-gue expérience de travaux d'observation à la manière de l'anthropolo-gie nord-américaine et britannique, terminent leurs études doctorales, soit aux États-Unis ou en Europe, viennent se joindre au corps profes-soral et tentent d'élaborer une anthropologie plus théorique en s'ap-puyant sur des traditions empiriques déjà bien établies (Beaucage 1965 et 1966 ; Charest et Tremblay 1967, Charest 1971 ; Breton 1973a ; Genest 1974 ; Genest et Santerre 1974).

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4. Les contestations étudiantes de 1968-1970

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En plus d'avoir vécu cette expérience des contestations étudiantes de 1968-1970 d'une manière un peu spéciale, dû au fait principalement qu'elles furent perçues par plusieurs comme étant le résultat d'une querelle entre les « Anciens » et les « Modernes » (ma séniorité me classant chez les premiers) et que ma position personnelle n'a jamais parfaitement correspondu à celle de la majorité (surtout en ce qui a trait à leurs manifestations sur le campus de Laval à la Faculté des Sciences sociales), je n'appuierai sur trois documents inédits (L'an-thropologie à Laval, La création du Département d'anthropologie et Les rapports étudiants-assistants professeurs dans la prise de déci-sion : le cas du comité pédagogique -Section anthropologie) pour pré-senter un point de vue d'ensemble sur ces événements qui se produisi-rent durant la période 1968-1970, au moment où l'anthropologie fai-sait encore partie du Département de sociologie et d'anthropologie.

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Je n'ai pas l'intention de passer en revue les diverses contesta-tions étudiantes qui se sont produites sur le campus lavallois, particu-lièrement à la Faculté des Sciences sociales, ni d'en reconstituer les principaux enjeux. Je m'attarderai davantage aux objectifs poursuivis et aux résultats obtenus : l'analyse des stratégies, à elle seule néces-siterait des études approfondies. Il m'apparaît pertinent, aussi, de les contextualiser par rapport aux conditions socio-politiques existantes à ce moment-là au Québec. On se souviendra que les contestations étu-diantes de 1968 commencèrent en Californie pour s'étendre, comme une traînée de poudre, à la plupart des grandes universités américai-nes dans les semaines qui suivirent les premières manifestations. En Europe, c'est Nanterre (Université de Paris Xe) qui fut le foyer d'ori-gine des confrontations et manifestations étudiantes de mai 1968 à Paris : ces dernières se reproduisirent par après dans d'autres pays européens. Ces révoltes étudiantes [30] (le concept n'est pas exagéré) donnèrent lieu à de vives manifestations, à des grèves générales illimi-tées et à des confrontations étudiantes-policières lesquelles dégéné-rèrent en batailles rangées entre les forces de l'ordre et les manifes-tants, des groupes d'agitateurs profitant de ces affrontements pour déstabiliser les gouvernements en place. Au Québec, ces contestations et ces manifestations étudiantes n'eurent jamais l'ampleur ni l'inten-sité de celles qui se produisirent ailleurs, principalement en Europe occidentale et aux États-Unis. Quels ont été les objectifs poursuivis et quels ont été les résultats obtenus? Ce sont les deux questions auxquelles je vais tenter de répondre sommairement.

On peut affirmer que ces révoltes étudiantes visaient tout un en-semble d'objectifs définis comme inséparables les uns des autres. Es-sayons d'en reconstituer les principaux patrons constitutifs : (a) la réforme des structures universitaires académiques (régime des étu-des, organisation des cours et des programmes d'étude) et adminis-tratives (démocratisation des structures) afin qu'elles correspondent davantage aux aspirations des générations montantes et qu'elles re-flètent mieux les habitudes de vie des autres secteurs de la vie socia-le ; (b) une plus grande sensibilisation des gouvernements et des structures étatiques aux besoins financiers grandissants des universi-tés afin que celles-ci puissent offrir un éventail plus large et mieux adapté de programmes d'étude tout en maintenant, et atteignant si

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possible, un haut degré de qualité dans la formation des diplômés/ées ; (c) une plus grande ouverture de l'université sur le monde extérieur par l'abandon de son statut traditionnel de « tour d'ivoire » et l'ins-tauration de programmes de formation préparant plus directement à une fonction sur le marché du travail ; et (d) une participation étudian-te active dans les structures du pouvoir (décisionnelles et consultati-ves) de l'Université Laval afin de devenir les principaux/les agents/tes de leur formation et qu'ils/qu'elles puissent choisir les programmes et les cours qui [31] correspondent le mieux à leurs aptitudes, préféren-ces et ambitions. Les revendications précises des groupes contestatai-res pouvaient varier quelque peu d'un milieu universitaire à l'autre, car elles étaient le produit de conditions historiques particulières. Toute-fois, l'idéologie fondamentale qui les sous-tendait s'inspirait de deux principes directeurs, a savoir, la modernisation des structures univer-sitaires et la participation étudiante dans les structures du pouvoir.

Au Québec, à la suite des recommandations de la Commission royale d'Enquête sur l'Enseignement (Parent 1963-1966, 5 vols.), on avait préalablement mais en vigueur une réforme en profondeur de notre système d'éducation, dont la création d'un ministère de l'Éducation en 1964. Les recommandations de ce Rapport n'avaient pas encore toutes été mises en oeuvre en 1968, c'est-à-dire, la démocratisation de l'ins-truction, la gratuité de l'enseignement, une plus grande participation des Francophones du Québec aux disciplines scientifiques et adminis-tratives, la réforme complète des cycles de l'enseignement, la partici-pation des étudiants/tes à l'élaboration des programmes, le renouvel-lement des méthodes et outils pédagogiques, le respect des capacités d'apprentissage de l'étudiant/te, une meilleure liaison entre les pro-grammes d'étude à l'université et les exigences du marche du travail, l'importance des études des 2e et 3e cycles à l'université, et ainsi du reste. Ces recommandations donnèrent lieu à des politiques et prati-ques nouvelles dans le monde de l'éducation. Mais les réformes en pro-fondeur ne s'implantaient pas assez rapidement. Au fur et à mesure que les années passaient (c'était la période euphorique des débuts de la Révolution tranquille) et que les contingents étudiants grossissaient en nombre dans les universités, on commença a percevoir certaines frustrations chez les étudiants/tes dont les attentes et les ambitions devenaient de plus en plus précises par rapport à la qualité de l'ensei-

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gnement universitaire, à la compétence des professeurs/res en ensei-gnement [32] et recherche et, surtout, par rapport à leur participa-tion active dans le processus pédagogique. Laval eut, comme toutes les autres universités québécoises, ses contestations étudiantes, lesquel-les furent sporadiques, localisées et particulières, sous l'angle des re-vendications spécifiques qui les avaient amorcées. Les Facultés des Sciences de l'éducation et des Sciences sociales furent sur le campus de Québec les initiatrices de ces mouvements de revendication, au moment même où le Québec connaissait une période de croissance économique et de développement social. Les diplômés/ées des universi-tés québécoises, à cette époque, contrairement à ce qui se passait en Europe, se trouvaient assez facilement des emplois sur le marche du travail. Je me souviens nettement, qu'à certains moments, les adminis-trateurs d'université et le public en général se demandaient « ce que voulaient réellement les étudiants d'université » qu'ils considéraient comme « des enfants gâtés » !

Les observations générales qui précèdent me permettent de mieux contextualiser les doléances étudiantes des anthropologues au Dépar-tement de sociologie et d'anthropologie à la fin des années soixante. Celles-ci n'ont pas été prises à la légère, car elles étaient pleinement fondées, le recul du temps nous permettant, dans leur cas, de dégager avec plus de netteté les enjeux en présence. Une première revendica-tion se rapporte à la dissolution du Département conjoint (même si cela allait à l'encontre des recommandations de la Commission de la réforme de l'Université Laval) afin que les anthropologues puissent gérer eux-mêmes leurs programmes d'étude et définir les conditions de développement de l'anthropologie au Québec. La Commission de la réforme, présidée par l'Abbé Lorenzo Roy, visait à abolir les départe-ments, non à en créer de nouveaux. Ce principe d'une dissolution fut, cependant, apprécié à son mérite spécialement en vertu du fait que l'anthropologie, une discipline autonome dans la plupart des grandes universités du monde, méritait une plus grande indépendance à l'Uni-versité Laval. Dans le contexte [33] lavallois, ce statut de dépendance de l'anthropologie était surprenant non seulement à la lumière des pratiques ailleurs mais aussi de celles en existence sur le campus lui-même où certaines disciplines avaient conquis le statut départemental sans en avoir tous les desiderata. Le nombre d'anthropologues engagés

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dans l'enseignement, l'importance de la recherche anthropologique mesurée par le montant global des subventions annuelles de recherche obtenues sur concours ainsi que les effectifs étudiants justifiaient que l'anthropologie obtienne le statut départemental.

S'appuyant sur les critères mentionnés plus haut, on rejette car-rément l'existence de deux sections relativement autonomes à l'inté-rieur d'un Département conjoint, car cela était perçu comme le statu quo, ou encore l'établissement d'un programme d'étude qui aurait un fort degré d'autonomie. On veut la dissolution de l'ancien départe-ment et la création d'un Département d'anthropologie, entièrement indépendant de la sociologie. On exige encore que les professeurs/res embauchés/ées au Département d'anthropologie soient d'une grande compétence en recherche, mais aient aussi de bonnes qualités pédago-giques. On insiste, enfin, pour que les étudiants/tes soient parties prenantes aux principales décisions qui les concernent, d'où l'impor-tance de la création d'instances décisionnelles constituées, sur une base paritaire, de professeurs/res et d'étudiants/tes. Ces revendica-tions n'ont pas toutes été acceptées d'emblée au moment où elles ont été énoncées, mais elles l'ont été sur une période relativement courte. Un certain nombre de ces revendications, par exemple, seront reflé-tées dans les rapports des travaux de la Commission Roy et, en parti-culier, dans un document se rapportant au 1er cycle (Roy 1970: 3). Voi-ci quelques-uns des principes énoncés dans ce document qui ont un rapport direct aux propos qui précèdent :

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Pour l'ensemble des programmes, le premier cycle des étu-des universitaires a comme objectifs généraux de permettre à l'étudiant : 1. d'être le principal agent de sa formation ; 2. de progresser suivant son dynamisme personnel ; 3. de s'orienter graduellement à partir d'une formation de base vers une spécia-lisation admettant des degrés divers ; 4, d'acquérir la méthode, les concepts et les principes fondamentaux propres à une disci-pline ou à un champ d'étude ; 5. de développer des habitudes de travail qui favorisent le jugement critique, l'esprit novateur et rendent capable l'éducation continue ; 6. d'assurer une forma-

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tion qui prépare au travail interdisciplinaire, à la mobilité oc-cupationnelle et à la perception des problèmes que posent les développements de l'état actuel de la société, (p.3)

Que faut-il retenir des contestations étudiantes de 1968-1970? Elles ont exercé un poids considérable sur les réformes universitaires qui s'ensuivirent aux débuts des années soixante-dix et elles ont été, dans une très large mesure, à l'origine de la création d'un Départe-ment d'anthropologie. Elles ont aussi influencé grandement les orien-tations pédagogiques de l'anthropologie au début de cette même dé-cennie (l'évaluation des professeurs/res et des cours date de cette période) en plus de favoriser la participation directe des étu-diants/tes aux décisions départementales.

5. Les réformes et la création du département en 1971

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Comme nous l'avons vu, à partir de 1968, de multiples activités de consultation, la production de travaux de comités d'étude et de grands rapports, se concrétiseront dans des réformes importantes à l'Université Laval (Laberge 1978). À partir de 1960, avec l'arrivée au pouvoir d'un Gouvernement qui avait promis la réforme de l'éducation dans le sens d'une démocratisation des structures et d'une meilleure accessibilité des étudiants aux institutions d'enseignement, avec l'ac-croissement des populations étudiantes et des contestations qui s'en-suivirent, avec aussi la dissociation de l'Université Laval du Séminaire de Québec qui avait été à ses origines et l'augmentation substantielle des subventions gouvernementales [35] de fonctionnement, l'Universi-té Laval se voit dans l'obligation de modifier en profondeur ses struc-tures.

En avril 1967, le Conseil de l'Université met sur pied un Comité du développement et de planification de la recherche que préside l'Abbé Lorenzo Roy. Ce Comité remet son rapport en septembre 1968 : il

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contient pas moins de 55 recommandations différentes se rapportant à presque tous les aspects de l'enseignement et de la recherche. À l'époque, ces recommandations produisirent bien des bouleversements, car elles transformaient les rapports de l'administration centrale aux facultés en ce qui avait trait à la conception des programmes et à la gestion des études. La tendance générale est à la centralisation et à la création de secteurs regroupant plusieurs facultés. En effet, le Rap-port Roy

[...] proposait de les intégrer dans un vaste ensemble cohérent et communicant, et concluait que, finalement, les Facultés pour-raient être appelées à disparaître au profit de secteurs plus vastes. (Desmartis 1981: D)

5.1. La Commission de la Réforme

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Dans le document cité plus haut, André Desmartis présente un bon aperçu de la nature et des impacts de la Commission de la réforme à Laval. Je me contenterai de citer intégralement une partie de son ex-posé car il rapporte l'essentiel de la chronologie des événements ainsi que des étapes qui ont abouti aux principales réformes structurelles à Laval :

En novembre 1968, était formée la Commission de la réforme chargée d'appliquer les principales recommandations du Rapport Roy. Après avoir élaboré la nouvelle Charte et les Statuts qui [...] furent mis en vigueur en 1971, la Commission de la réforme faisait adopter après plusieurs versions successives, le règle-ment des études du 1er cycle qui fut mis en application en sep-tembre 1972, non sans avoir déclenché au passage une importan-te contestation étudiante. Finalement, la Commission [36] de la réforme disparaissait en 1973, sans avoir réussi à établir les liens organiques entre la structure des ressources (les dépar-

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tements et les facultés) et la structure des programmes (les di-rections de programme et les directions d'ensemble) qu'elle avait conçues. Il faudra attendre en 1980 pour qu'un comité « chargé d'harmoniser les statuts et les règlements » fasse fi-nalement accepter une solution de compromis sur ce point. De même, la Commission de la réforme échouait dans sa tentative de regrouper les facultés en unités plus larges, les secteurs. L'effort de rationalisation et de lutte contre l'arbitraire, commencé par la Commission de la réforme, devait être poursui-vi par divers comités relevant généralement du Conseil de l'Uni-versité. Citons, entre autres, l'établissement de normes commu-nes d'allocation des ressources humaines aux diverses unités (la fameuse Annexe A), sans oublier l'uniformisation des conditions salariales entraînées par la signature de la convention collective conclue avec le Syndicat des professeurs de l'Université Laval en janvier 1977, après quatre mois de grève. En confiant aux UPA, c'est-à-dire au niveau départemental, de nombreuses res-ponsabilités qui relevaient jusque-là des doyens, cette conven-tion entraînait également d'importants changements de struc-ture (Desmartis 1981: D)

5.2. Le comité Gérard Dion et la création du département

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L'Université Laval traverse donc une période de mutations profon-des au moment où l'anthropologie tente de se dissocier de la sociolo-gie. En 1970, l'anthropologie réussira à obtenir un statut départemen-tal malgré les tendances centralisatrices de l'époque, lesquelles sont associées à un processus de rationalisation des ressources. À la suite de nombreuses perturbations internes au Département de sociologie et d'anthropologie, résultant tout autant de conflits entre profes-seurs que des contestations étudiantes, la Faculté des Sciences socia-les, par l'action de son doyen, l'économiste Yves Dubé, met sur pied en 1969 un comité présidé par l'abbé Gérard Dion dans le but d'étudier la

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situation du Département de sociologie et d'anthropologie. Plusieurs documents seront produits dans le but de réclamer la création d'un Département d'anthropologie distinct de la sociologie, y compris une pétition signée par les professeurs des [37] deux options du Départe-ment conjoint. Les positions des anthropologues sont exposées dans un volumineux mémoire qui sera à la fois présenté au Comité Dion et au Conseil de la Faculté des Sciences sociales. Dans ce Mémoire, on y fait état de la spécificité de l'anthropologie en tant que discipline acadé-mique, de sa croissance constante depuis l'établissement de l'option anthropologique à l'intérieur du Département conjoint, de la qualité de ses équipes de recherche qui oeuvrent sur la Côte-Nord du Fleuve Saint-Laurent, dans le Grand-Nord chez les Inuit, à la Sierra de Pue-bla au Mexique et au Nord Cameroun. Ces divers projets de recherche ont obtenu auprès des organismes de financement en 1969-1970 des subventions de l'ordre de 70 711,00 $ et en 1970-1971, 117 049,00 $. (Collectif 1970:20) et ils encadrent pour cette dernière année acadé-mique 28 chercheurs/res totalisant 139 mois/plein temps de recher-che (Idem: 22). On fait encore référence à ses acquisitions muséogra-phiques, au développement de ses programmes d'étude et de recher-che ainsi que des structures à institutionnaliser. On met en relief le fait que les étudiants/tes, dans leur mémoire du mois de novembre 1968 avaient réclamé la création immédiate d'un département : cette proposition n'avait pas rallié l'ensemble des professeurs/res, quel-ques-uns (dont j'étais) préférant que l'Option assoie plus solidement (sur une couple d'années) ses ressources humaines avant de réclamer officiellement un tel statut. Mais les initiatives étudiantes de 1969, la création d'un Comité pédagogique et l'établissement d'un programme complet d'études ainsi que le malaise grandissant que ressentaient les anthropologues à l'intérieur du Département conjoint, particulière-ment à la suite de mésententes se rapportant a la répartition du bud-get et à l'engagement du personnel départemental en 1969, ont accé-léré le processus de la dissociation.

Le Comité Dion fut sensible aux arguments avancés par les anthro-pologues (à leur très grande satisfaction et soulagement) et son Rap-port ainsi que celui que la Faculté des Sciences sociales [38] présente-ra au Conseil de l'Université reprendront essentiellement l'argumen-tation développée dans le Mémoire de l'anthropologie. À sa séance du

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13 octobre 1970, le Conseil de l'Université Laval approuvait la résolu-tion suivante :

1. Que le Département de sociologie et d'anthropologie de la Faculté des Sciences sociales soit aboli. 2. Que deux départe-ments soient créés, à savoir celui de sociologie et celui d'an-thropologie, 3. Que le nouveau Département d'anthropologie s'en tienne principalement aux domaines de l'anthropologie so-ciale et culturelle et qu'il concentre ses efforts sur les aires culturelles les plus rapprochées : Canada français, Amérindiens, Esquimaux (Extrait du Livre des délibérations du Conseil de l'Université. Résolution U-70-472)

Cette décision fut accueillie avec enthousiasme par les 85 person-nes qui composaient le Département à cette date mémorable : 67 étu-diants/tes (dont 54 au 1er cycle), 10 professeurs/res (dont 4 profes-seurs invités) et 8 assistants/tes de recherche et d'enseignement (Dorais : 1). Elle permit également aux anthropologues d'accéder à une autonomie administrative et de planifier le développement de la disci-pline selon les seuls critères en usage dans les centres académiques où elle était florissante. Marc-Adélard Tremblay, qui assumait à ce mo-ment-là la fonction de vice-doyen à la recherche à la Faculté des Sciences sociales depuis 1969, fut nommé directeur du département : il cumula les deux fonctions durant une période d'une année, jusqu'au moment où il accéda en novembre 1971 à la direction de l'École des Gradués. Le développement de l'anthropologie, comme je le documen-terai dans les prochains chapitres, fut exceptionnel à maints égards. Les thématiques qui serviront à étayer ce progrès se rapportent à la recherche anthropologique, aux programmes d'enseignement et de formation, à la production scientifique de ses membres et à leur rayonnement.

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[39]

L’anthropologie à l’Université Laval. Fondements historiques, pratiques académiques,

dynamismes d'évolution.

Chapitre 2

Une recherche anthropologique

1. L’importance du terrain en anthropologie

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Une des missions de l'université est la formation d'étudiants/ tes en vue de les préparer à exercer des fonctions dont la société a be-soin. Comme elle se voue de façon prioritaire à l'avancement des connaissances dans toutes les branches du savoir et au progrès de la conscience, la recherche constitue une des activités universitaires des plus importantes. Celle-ci, toutefois, ne représente pas une qualité spéciale de l'anthropologie puisque toutes les disciplines académiques s'y adonnent, avec plus ou moins d'intensité. Dans [40] le cadre de cette reconstruction historique, je ne pourrai certes pas établir de distinction entre les différents types de recherche qui s'y poursui-vent. Toutefois, étant donné les objectifs de l'anthropologie, dont la vocation l'amène à étudier toutes les civilisations passées et présen-tes de la planète - ce qui l'oblige à entreprendre des analyses à carac-tère historique, spatial (la perspective spatio-temporelle) et trans-

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culturel (la méthode comparative) -, je me dois de passer en revue les principales sociétés qui ont fait l'objet d'études approfondies par les professeurs/res de Laval et leurs équipes de recherche. La recherche anthropologique (c'est la marque de commerce de cette discipline dans les traditions nord-américaines) est une partie intégrante d'un pro-gramme de formation disciplinaire. On conçoit mal, par exemple, com-ment un/e professeur/e du département pourrait dispenser un ensei-gnement sur une aire culturelle ou sur un des champs d'analyse de l'anthropologie sans posséder lui-même/elle-même une longue expé-rience ethnographique de cette aire de culture ou de ce domaine d'étude. D'ailleurs, un apprentissage à une lecture anthropologique de la réalité d'ici ou d'ailleurs (le regard éloigné) nécessite plusieurs an-nées de formation aux perspectives conceptuelles de l'anthropologie et de familiarisation à ses techniques et outils d'observation. Dès ses débuts, l'anthropologie à Laval, s'est d'autant sentie liée à ces exi-gences disciplinaires que le principal, sinon le seul, débouché disponible aux apprentis-anthropologues sur le marché du travail était la recher-che. C'est ainsi que furent encouragées les expériences hâtives sur le terrain et que celles-ci devinrent, surtout aux débuts, la composante principale de la formation. Cette orientation permit à nos premiers diplômés d'être facilement acceptés dans les universités étrangères en vue de poursuivre des études doctorales comme de se tailler des carrières dans des milieux de travail habituellement réservés à d'au-tres profils disciplinaires. La recherche en anthropologie est habituel-lement dispendieuse puisqu'elle nécessite des déplacements vers des contrées éloignées et [41] des séjours prolongés sur le terrain. Dans La Passion de l'Échange (Genest 1985), des professeurs/res du Dépar-tement relatent leurs expériences de terrain : celles-ci mettent en lumière les difficultés de l'entrée sur le terrain et de la cueillette de données significatives qui se prêtent à une analyse systématique et à une interprétation. L'anthropologue travaille habituellement avec des données de première main qui doivent constituer un corpus nécessitant pour le construire plusieurs années d'observations à caractère ethno-graphique. Plusieurs circonstances socio-historiques (liées principale-ment aux politiques des organismes subventionnistes et à la croissance rapide des effectifs étudiants) ainsi que des transformations idéolo-giques et socio-politiques des milieux traditionnels d'observation

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(l'accession à l'indépendance politique, prise de conscience des grou-pes sous observation de leur statut défavorisé et volonté de contrôler les conditions de la production scientifique sur leurs territoires, me-née jusqu'alors par des étrangers sans qu'ils puissent bénéficier des retombées de ces recherches 5 )» suscitèrent de profondes trans-formations dans les activités de recherche du département. Bien que la tradition des équipes de recherche en anthropologie se soit mainte-nue jusqu'à aujourd'hui, ces dernières, contrairement à ce qui fut le cas dans les tout débuts, n'ont pas été en mesure d'intégrer l'ensem-ble des étudiants/tes de notre programme d'études. Celles qui réussi-rent à intégrer un certain nombre d'étudiants/es le faisaient à un moment plus tardif (après la troisième année, d'habitude) et possé-daient un bassin plus large de recrutement.

[42]

Un inventaire assez compréhensif de l'ensemble des travaux empi-riques et conceptuels des professeurs/res d'anthropologie depuis leur entrée au département fut réalisé par N'Tumba (1985) 6, dans le ca- 5 Ma recension des écrits dans le domaine de l'Amérindianisme (Tremblay 1982b)

ainsi que mon jugement critique sur la recherche universitaire nordique dans les sciences humaines (Tremblay 1984) témoignent largement des changements so-cio-politiques dans les milieux traditionnels d'observation de l'anthropologie. Des considérations du même genre se retrouvent dans les écrits anthropologiques sur les changements suscités dans les conditions d'observation en Afrique noire, par exemple, à la suite de l'accession à l'indépendance et de l'affranchissement pro-gressif des colonies des puissances impériales. A ces changements externes doi-vent s'ajouter les contestations qui viennent de l'intérieur par les anthropolo-gues du Tiers-Monde formés dans les universités occidentales (Tremblay 1979), mais aussi d'anthropologues occidentaux mettant en question les principes déon-tologiques de l'observation anthropologique pratiquée jusqu'à maintenant (Trem-blay, in Tremblay 1983b).

6 Le Rapport N'Tumba, le fruit du Comité des orientations du département, prési-dé par Eric Schwimmer, a identifié dix principaux champs de recherche à la suite d'une analyse fouillée des activités de recherche des professeurs/res du dépar-tement. Il m'apparaît intéressant de les mentionner dans la mesure où ils reflè-tent leurs principaux intérêts : Adoption et parenté au Québec et ailleurs (6 prof.) ; Questions ethniques au Québec et ailleurs (8 prof.) ; Paysans et chas-seurs-collecteurs (6 prof.) ; Développement et impacts au Québec et ailleurs (9 prof.) ; Anthropologie des sexes (7 prof.) ; Rites, arts et tourisme au Québec et ailleurs (6 prof.) ; Anthropologie de l'éducation (4 prof.) ; Anthropologie de l'in-

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dre d'une opération visant à établir des champs de recherche privilé-giés autour desquels se constitueraient des groupes fonctionnels de transmission du savoir anthropologique et de recherche. Une fois éta-blis, ceux-ci deviendraient les principaux pôles de développement du département, tant pour la recherche (professeurs/res et étu-diants/tes gradués/ées) que pour la formation des candidats/tes des trois cycles. Tout en fournissant des lieux de réflexion, de discussion et d'encadrement, ces champs de recherche permettraient une meil-leure intégration des étudiants/tes aux principales préoccupations disciplinaires et favoriseraient une meilleure concertation des efforts de l'équipe professorale. Ces champs de recherche sont maintenant en voie d'organisation et plusieurs thèmes ont fait l'objet de présenta-tions à l'occasion de rencontres dans le cadre des Conférences du La-boratoire d'anthropologie. Une grille de préparation aux discussions portant sur les champs en anthropologie fut proposée. Les responsa-bles des exposés devaient nécessairement répondre aux cinq questions suivantes : 1. Quels sont les défis qui [43] se posent à ce champ au plan conceptuel? ; 2. Quels sont les rapports interdisciplinaires qu'en-tretient ce champ? ; 3. Quelle est la spécificité de la contribution an-thropologique dans ce champ par rapport aux autres disciplines? ; 4. Quelle est l'utilité présente et future des recherches dans ce champ (applications pratiques)? ; et 5. À quel point le département est-il prêt à soutenir et à développer ce champ? Les champs qui ont fait l'objet de présentations formelles sont les suivants : (1) les ethnies et l'iden-tité culturelle ; (2) la condition féminine ; (3) la parenté au Québec ;

formatique (6 prof.) ; Anthropologie de la santé au Québec et ailleurs (4 prof.) ; et Langues et représentations symboliques, représentations de l'histoire locale et mondiale (8 prof.). Pour chacun de ces champs, l'auteur présente, les compé-tences développées et les services à la société québécoise, les chercheurs/res intéressés/ées par le champ, les activités de recherche des dernières années, y compris les communications et les publications, les cours, les conférences et les thèses d'étudiants/tes. Durant la dernière année académique un certain nombre de groupes se sont constitués autour de certains thèmes. Dans le cadre des Conférences du Laboratoire du Département d'anthropologie, ils sont venus pré-senter, pour fins de discussion, les champs retenus pour le moment, à savoir, la sémiotique, les études autochtones, les études sur les femmes, ethnies et identi-té, et classes sociales dans le milieu rural. Plusieurs autres efforts devront être déployés pour que ces groupes puissent opérer selon la conception que l'on s'en fait.

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(4) les classes sociales dans le milieu rural ; (5) les recherches nordi-ques ; et (6) la sémiotique 7.

Afin de mieux comprendre comment cette volonté de privilégier des champs de recherche est née, il faut se reporter à la tradition de recherche qui s'est établie depuis les premiers enseignements de l'an-thropologie en 1958, reconstituer les principales étapes de son évolu-tion au moment de la départementalisation, tenant particulièrement compte des efforts qui ont été faits par l'équipe professorale pour s'arrimer aux grandes orientations de l'Université Laval en élaborant des plans triennaux de développement qui leur étaient étroitement associés pour bénéficier des ressources supplémentaires qu'elles en-traînaient dans leur foulée. C'est cette tradition de recherche du pro-gramme d'anthropologie qui a permis au département de conserver son intégrité, en dépit de la baisse dramatique des effectifs étudiants au premier cycle à la fin des années soixante-dix et de certaines tentati-ves des autorités facultaires, aux débuts des années 80 pour réduire le nombre de postes de professeurs/res en anthropologie.

[44]

2. L'ethnographie de la Côte-Nord du Saint-Laurent (Tremblay, Charest, Breton)

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J'ai référé, plus tôt, aux équipes interdisciplinaires de recherche qui oeuvraient à la Faculté durant les années cinquante et soixante et qui ont largement contribué à sa réputation. L'anthropologie, à ses dé-buts, a participé à ces efforts interdisciplinaires de recherche dans de multiples projets d'observation et d'intervention. Quelques-unes de ces expériences ont été reconstituées dans leurs grandes lignes (Tremblay 1977) et ne feront pas l'objet de nouveaux commentaires ici. Deux projets de recherche ont imprimé leur marque sur les orien-

7 L'ensemble de ces détails sur les champs de recherche furent pris dans un do-

cument intitulé Les champs de recherche rédigé par l'animateur des discussions au Laboratoire, Eric Schwimmer, au début de janvier 1987.

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tations de la recherche plus proprement anthropologique. Ce sont la Commission d'Étude Hawthorn-Tremblay sur les Indiens contempo-rains du Canada (Hawthorn 1966-1968) et un programme de recherche qui a duré dix ans (1965-1975) sur l'Ethnographie de la Côte-Nord du Saint-Laurent (Tremblay 1967, Tremblay et Lepage 1970, Tremblay, Charest et Breton 1969). Ces recherches, et particulièrement la der-nière, ont permis la formation d'une trentaine d'étudiants/tes dont certains/nes sont aujourd'hui dans le monde de l'enseignement (Uni-versité, CEGEP), ont favorisé la publication d'articles scientifiques et ont contribué à définir les premières orientations de l'anthropologie par l'établissement d'un Laboratoire d'ethnographie lequel, avec le temps, est devenu un Laboratoire d'anthropologie. Quand on juge la production de l'Équipe Côte-Nord, à vingt ans de distance, il est dan-gereux de l'apprécier à la lumière du développement de l'anthropologie d'aujourd'hui et en utilisant les critères qui sont employés pour éva-luer les Centres de recherche. En dépit du fait que cette équipe de recherche n'ait pas produit un rapport d'ensemble (il existe à l'état d'ébauche : Tremblay 1976) et qu'elle ait utilisé au départ une pro-blématique culturaliste (valable pour l'époque dans l'état de dévelop-pement de l'anthropologie ici), le bilan d'ensemble m'apparaît positif. Cette équipe a démarré un programme de recherche ayant une certai-ne continuité à un moment où ce genre d'initiative était difficile ; [45] elle a permis la formation d'un grand nombre d'anthropologues dont la réputation est bien établie pour ne pas mentionner l'établissement d'un fichier bâti à l'image de ceux établis par Kluckhohn dans ses étu-des au Sud-Ouest américain et par Leighton dans ses études épidémio-logiques dans le comté de Stirling, en Nouvelle-Écosse. L'ensemble des données recueillies, il faut le reconnaître, ont été largement sous-utilisées. Toutefois, elles ont servi aux travaux de Charest et de ses équipes dans la région (chez les Montagnais en particulier) et plus ré-cemment à ceux de Breton et son équipe qui ont rédigé, dans les trois langues de la région, six brochures de vulgarisation sur divers aspects du milieu à l'intention des résidents de la région. L'utilisation res-treinte des données de base recueillies durant une décennie tient tout autant aux lacunes de l'infrastructure de la recherche qu'aux aléas

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des profils de carrière de ceux qui en ont été les principaux initia-teurs 8.

En dernier lieu, les travaux sur cette vaste région isolée en voie de changement rapide ont permis, comme le soulignent Tremblay et Gold (1983:57), l'élaboration de cadres théoriques inspirés de l'écologie culturelle (Charest 1973), de la perspective ethnohistorique (Domini-que 1975) et du matérialisme historique (Breton 1973b).

3. Les études Inuit (Saladin d'Anglure, Dorais, Trudel)

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Les études inuit, tout comme celles sur le Canada d'expression française, ont été définies, au moment de la départementalisation, comme étant une des aires de culture privilégiées. Elles ont bénéficié, dès le départ, d'appuis financiers importants. Ces études visent à une

[46]

[...] compréhension globale de la culture esquimaude de l'Arcti-que oriental, celle du Nouveau-Québec, en particulier. (Dorais 1972: 1)

Bien qu'on se soit intéressé aux aspects technologiques, écologi-ques et socio-économiques traditionnels et contemporains, on note, cependant, un intérêt plus marqué pour les représentations symboli-ques et la dialectologie, deux domaines de recherche constituant les champs d'études privilégiées des deux premiers professeurs du dé-partement à s'intéresser aux Inuit, a savoir, Bernard Saladin d'Anglu-re et Louis-Jacques Dorais. Saladin d'Anglure avait séjourné au Nou-

8 Pour avoir une meilleure idée des différentes activités de cette équipe, il faut se

référer aux rapports annuels de recherche qui ont été produits sur une période de dix ans. Ils sont disponibles auprès de Charest ou Tremblay.

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veau-Québec en 1956, 1960, 1961 et 1962. Des 1965 débutèrent les travaux d'équipe ayant pour base l'Université de Montréal.

À partir de 1968, le centre de gravité du projet se déplaça de Montréal à Québec, le directeur et la majorité des partici-pants travaillant dans le cadre du Département [il faut lire « de l'Option » (Note de l'auteur )] d'anthropologie de Laval (Dorais 1972: 3).

De 1967 à 1971, Saladin d'Anglure est professeur invité à Laval : il deviendra à plein temps en 1971 pour assumer la direction du Dépar-tement d'anthropologie en remplacement de Tremblay. Dorais se joi-gnit à l'équipe départementale en 1972 tandis que Trudel complète l'équipe des inuitologues en 1975. L'abondance des subventions de re-cherche à cette équipe (de 1968 à 1975, du Conseil des Arts du Cana-da ; de 1971-72 à 1980 du F.C.A.C. du ministère de l'Éducation ; de 1983 à 1985 du Programme F.C.A.R. du Québec ; de 1985 à 1988 du Conseil des Recherches en Sciences Humaines du Canada et du Conseil Québécois de la Recherche sociale pour l'année 1986), lui a permis, au cours des ans, d'engager de nombreux assistants de recherche. Mais la situation a changé quelque peu depuis ces dernières années pour deux raisons. La première tient au fait que de nombreuses données ethnographiques ont été récoltées et nécessitent d'être analysées. En raison des coûts prohibitifs de la recherche dans les [47] sciences humaines en milieu nordique, quelques rares étudiants/tes disposent des fonds nécessaires pour se rendre au Nord : cela constitue un frein au développement de ces études. Avant 1977, une dizaine de thèses de maîtrise furent produites : depuis cette date le rythme a quelque peu ralenti, deux thèses ayant été complétées (Dufour 1977, Beaudry 1977) et quatre autres étant en cours de rédaction. Une des caracté-ristiques originales de cette équipe fut d'intégrer, comme assistants de recherche, traducteurs ou comme informateurs-rédacteurs, des Inuit, permettant ainsi aux Autochtones, comme ils le souhaitent de plus en plus, de participer activement à la recherche (Dorais 1977) et à la publication de textes Inuit en syllabique. On concrétise ainsi,

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comme on le désirait dès les débuts, le retour en pays inuit des don-nées qui ont été récoltées chez eux.

Ces recherches au Nouveau-Québec Inuit (Nunavik), en particulier, ont eu un impact certain sur le milieu. Les recherches sur l'occupation effective et l'utilisation traditionnelle du territoire ont servi d'élé-ments de base au regroupement des Inuit de cette région à l'occasion des négociations entourant l'Entente de la Baie James. Dorais a oeu-vré dans un comité qui avait pour but de régulariser l'orthographe Inuit. Il a collaboré à la mise sur pied d'un système d'enseignement en Inuktitut chez les Inuit du MacKenzie et à la mise à jour des concepts traditionnels reliés aux droits autochtones. Enfin, les chercheurs de Laval produisent également l'Annuaire téléphonique du Nouveau-Québec en Inuktitut.

Dans le domaine des publications, cette équipe a produit de nom-breux articles, surtout depuis 1979-1980. Saladin d'Anglure, pour sa part, a produit un article sur les Inuit du Nouveau-Québec dans le To-me 5 du Handbook of North American Indians (1984a) en plus de faire paraître dans Études/Inuit-Studies, dont nous parlerons plus loin, et dans d'autres revues plusieurs articles reliés à ses recherches [48] dans le Grand Nord depuis un quart de siècle (Saladin d'Anglure 1979, 1984b, 1984c en sont des exemples). Trudel, de son côté, dans les perspectives de l'ethnohistoire, a assumé la direction de numéros de Recherches Amérindiennes au Québec le dossier caribou (Trudel 1979a) et les rapports entre l'ethnologie et l'histoire (Trudel 1978) en plus de présenter les résultats de ses travaux ethnohistoriques sur le Nord dans d'autres revues et ouvrages. Dorais vient de publier l'historique d'un village Inuit (1984a) ainsi qu'une grammaire de la lan-gue Inuit (Dorais 1983). Il a effectué un bilan critique des études sur les Inuit du Nord québécois (1984b) en plus de faire paraître un grand nombre de contributions sur les Inuit dans de nombreuses publications tant canadiennes (1987) qu'européennes. Le gouvernement canadien a établi récemment une Commission d'étude sur la science polaire qui vient de déposer son rapport (Roots et al. 1987) dans lequel on recom-mande la création d'une Commission canadienne de la recherche polai-re.

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Suite au constat que les Inuit éprouvaient des réticences à entrer directement en contact avec l'Université, les membres de cette équi-pe ont mis sur pied en 1974, en collaboration étroite avec les Inuit, une association indépendante de l'Université Laval, l'Association Inuk-siutiit Katimajiit inc. En 1978, cette association met sur pied la revue Études/Inuit/Studies vouée aux études inuit. La Corporation, en plus de se spécialiser dans la production de documents en syllabique, orga-nise à tous les deux ans sur un campus universitaire québécois un congrès (exceptionnellement il se tiendra en 1988 à Copenhague) qui réunit les chercheurs et les spécialistes de la culture inuit ainsi que les principaux leaders inuit. Un membre de l'Association a préparé ré-cemment l'historique et les activités de cette association (Dorais 1982). Depuis qu'elle existe, cette revue n'a cessé de progresser et de s'améliorer de telle sorte qu'aujourd'hui, elle est évaluée par les pairs comme étant d'excellente qualité et est bien appréciée par les spécialistes [49] de la culture inuit à travers le monde. Le statut à la fois de l'Association et de la revue ont suscité des débats à l'intérieur de l'assemblée départementale se ramenant à l'éternelle question de l'allocation des ressources départementales qui ont donné naissance à la création d'un comité visant à éclaircir cette situation. Celui-ci a produit un rapport (Charest et al. 1981) qui précise le statut et la na-ture des relations que doit entretenir le département avec ces deux organismes. D'autre part, dans le cadre des activités du Comité des revues du Conseil des publications savantes de l'Université Laval un professeur du département a présenté un rapport détaillé sur la revue Études/Inuit/Studies à la suite duquel il présente des recommanda-tions de nature à clarifier le statut de la revue et à préciser la nature de ses relations à la structure départementale (Santerre 1982a).

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4. Les études sur l'Afrique noire francophone (Chalifoux, Charest, Collard, Doutreloux,

Genest et Santerre)

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Les études africaines à Laval ont connu au cours des années des hauts et des bas qui sont liés à toutes sortes de facteurs. Elles ont été, aux débuts de l'anthropologie, tout comme celles sur le Canada français et les études autochtones, une aire privilégiée. En ce sens, les étudiants/tes de la première génération s'y sont rendus/es pour ef-fectuer des terrains diversifiés par la nature de leurs intérêts sans que ceux-ci soient intégrés, comme ce fut le cas pour le Projet Côte-Nord et les études inuit, dans une équipe ayant des objectifs intégrés et un programme systématique de travail. Pour autant, il est plus diffi-cile de reconstituer l'historique des contributions particulières dans ce domaine. Toutefois, il existe deux articles qui nous éclairent sur les études africaines à Laval : ce sont ceux de Santerre (1974) et de Lumsden (1983), bien que celui-ci traite de l'africanisme au Canada et couvre l'ensemble des universités. Il est important de mentionner que l'actuel directeur du Département (Genest) est en ce moment le ré-dacteur de la Revue canadienne [50] des études africaines laquelle constitue, dans ce domaine d'études, une source générale d'informa-tion.

Le premier africaniste à joindre le Département de sociologie en 1963 fut Albert Doutreloux, un Belge qui travailla une dizaine d'années au Zaïre avant sa venue à Québec. Il assuma, avec Tremblay et des professeurs invites européens, jusqu'à son départ pour l'Université Libre de Louvain en 1969, les enseignements anthropologiques de base (cours théoriques et méthodologiques, cours sur les aires culturelles, introduction à l'anthropologie sociale et culturelle, cours sur les au-teurs, parenté, etc.) aux étudiants inscrits à l'option anthropologique. La perspective herméneutique, sa préoccupation d'établir une jonction entre la philosophie, la psychologie et la sociologie ainsi que son intérêt pour les phénomènes religieux caractérisent son travail durant son

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séjour à Laval. Il a dirigé les travaux de terrain d'étudiants/tes pré-parant des mémoires de maîtrise dans des régions aussi variées que le Rwanda, le Cameroun, la Haute-Volta et le Zaïre. Parmi les étu-diants/tes qui ont travaillé sous sa direction, mentionnons au premier chef, Genest (1969) sur « L'Art et l'artisanat au Mayombe », région que Doutreloux connaissait particulièrement bien (Doutreloux 1967). Il a dirigé également André Lepage (1969), Diane Bourque (1969), An-drée Roberge (1969) et Jocelyne Bergeron-Coulombe (1969). D'autres étudiants/tes firent aussi des terrains sous sa direction (Ginette Tré-panier, Jacques Veys et Michel Goulet). Paul Charest, avant son enga-gement comme professeur à Laval, fit un terrain (1965) sous l'égide de Doutreloux au Rwanda et sous la direction de Robert Gessain du Musée de l'Homme à Paris au Sénégal oriental.

Le premier véritable programme de recherche sur l'Afrique portait sur La transmission du Savoir (Anthropologie de l'éducation) et fut mis sur pied par Renaud Santerre en 1970, soit deux ans après [51] son arrivée au Département. Il avait par ailleurs mis en route des tra-vaux sur ce sujet dès 1965. L'objectif de ce programme

[...] est d'étudier les modalités de la transmission du savoir en divers types de sociétés (à tradition orale, à tradition écrite et à tradition mixte) dans le but de contribuer à l'élaboration d'une théorie du savoir qui serait l'analogue de la théorie du pouvoir pour l'anthropologie politique. (Santerre 1972: 2)

Le projet a permis d'étudier l'école mixte, tandis que Genest, dans sa thèse de doctorat, s'est intéressé au savoir traditionnel (1976). Santerre, pour sa part avait produit la sienne sur l'école coranique (1968).

L'ensemble de ces recherches africaines qui se sont poursuivies à peu près jusqu'en 1980 ont été financées par de nombreux organismes différents (dont le Foreign Area Fellowship Program, Le Conseil des Arts du Canada, Le Conseil de recherches en Sciences humaines du Canada) ont permis à plusieurs étudiants/tes provenant d'horizons disciplinaires différents (anthropologie, éducation, histoire, psycholo-

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gie, sociologie) de poursuivre une expérience d'observation en Afrique et, dans certains cas, de produire une thèse de maîtrise (Sénéchal 1974), et sont à l'origine d'un certain nombre d'articles parus dans différentes revues par Santerre et Genest et de deux ouvrages (San-terre 1973 et 1982d). Le dernier, un collectif sur une anthropologie de l'éducation camerounaise, représente certes une contribution majeure.

Jean-Jacques Chalifoux, arrivé au Département en 1974, pour sa part, a conduit des recherches suivies chez les Piti du Centre du Nigé-ria. Ces recherches, reposant sur treize mois d'ethnographie en Afri-que de l'Ouest, ont donné lieu à une thèse de doctorat (Chalifoux 1976) et fait l'objet de publications portant sur des questions de polyandrie (1977 et 1979), des rapports parenté-économie [52] (1980b), de l'impact de l'histoire coloniale (1976), des rapports d'âge et de générations (1985), des rituels et idéologies (1976), et de l'eth-nicité (1980a, 1982, 1983). La contribution originale de ces travaux fut de permettre des analyses transformationnelles comparatives des po-pulations de cette région, et même d'ailleurs, en collaboration avec Jean-Claude Muller (le spécialiste des Rukuba) et de Chantal Collard qui s'est intéressée à des populations homologues au Cameroun. Ces modèles ont permis de redéfinir les approches structuralo-marxistes des sociétés africaines et de montrer comment la logique dialectique représentait une opération autonome des rapports matériels.

5. Les études sur la méso-amérique et la Caraïbe (Beaucage, Breton, Arcand, Dagenais,

Chalifoux, Labrecque)

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Deux aires culturelles particulières, le Mexique et la Caraïbe, ont été au coeur de la formation intellectuelle de professeurs/res et d'étudiants/tes au Département. Ainsi C. Bariteau, J.-J. Chalifoux, H. Dagenais et L. Pilon-Lê ont réalisé leur mémoire de maîtrise dans le cadre du Centre de Recherches Caraïbes de l'Université de Montréal, dirigé alors par Guy Dubreuil et Jean Benoist. Chalifoux et Dagenais ont développé, par la suite, des intérêts de recherche dans la région :

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Dagenais, sur les femmes en Guadeloupe et Chalifoux, sur la question de l'ethnicité en Guyane française, ce dernier pays établissant une jonction entre la Caraïbe et l'Amérique latine.

Les recherches effectuées sur la Méso-Amérique, à leurs débuts, ressemblaient à celles entreprises en Afrique noire francophone en ce qu'elles furent conduites soit par des individus ou par des groupes sur divers terrains et non pas à l'intérieur d'un projet unique. À ce propos, il convient de souligner

[53]

[...] le travail pionnier de Pierre Beaucage, maintenant profes-seur au Département d'anthropologie de l'Université de Mon-tréal qui, dès 1966, entreprenait des études sur le terrain au Honduras [...] Durant les années 1968, 1969, 1970 et 1971, il a étudié les populations de la Sierra Morte avec une équipe com-posée en majorité d'étudiants de Laval. Les groupes qui retin-rent l'attention des chercheurs, furent principalement les Na-huatl, les Otomis et les Totonaques. (Breton 1972:1)

Ces recherches visaient à obtenir une meilleure compréhension

[...] des déterminants socio-culturels du comportement économi-que, de manière à saisir un système économique de l'intérieur et dans sa totalité, (Idem: 2)

Les études de Beaucage au Mexique dans la Sierra Norte de Puebla débutèrent en 1969 après que des contraintes politiques l'eurent em-pêché de poursuivre ses travaux sur l'anthropologie économique des Caraïbes noires par un inventaire démographique et économique com-plet de trois communautés appartenant aux groupes ethniques men-tionnés plus tôt. En 1970 les travaux de cette équipe prirent de l'am-pleur et se sont poursuivis dans six villages différents sur la morpho-logie sociale et la dynamique sociale. À compter de 1971, avec le départ de Beaucage pour Montréal, ces travaux se sont poursuivis là-bas et

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ont pris de nouvelles orientations. Ils ont toutefois donné lieu à Laval à la production de quelques thèses de maîtrise (Tremblay J.-N. 1976, Durand 1973, Manzi 1975, Labrecque 1974, Nadal 1977).

À l'automne 1970, Yvan Breton entreprenait des travaux d'obser-vation chez les pêcheurs-paysans du Nord-est Vénézuélien, qui se si-tuaient dans la foulée de ses travaux à St-Paul's River sur la Basse-Côte-Nord (1973b), en fonction de ses études doctorales à l'Universi-té du Michigan (1973a). Comme c'est le cas pour plusieurs populations côtières, ces communautés vénézuéliennes tiraient leur subsistance traditionnelle d'une économie mixte (ressources de la [54] mer et de la terre). Cette économie était en voie de transformation rapide en vue d'une spécialisation. Il s'agissait d'analyser comment ces commu-nautés s'adaptaient à cette situation économique nouvelle. Une typolo-gie de communautés ayant des structures économiques différentes fut établie et des comparaisons entre elles furent amorcées en tenant compte non seulement du contexte écologique immédiat mais aussi des contextes économiques local et régional. Comme l'a démontré l'auteur, ce sont ces contextes qui sont significatifs dans l'évolution des chan-gements dans les attitudes et les pratiques économiques des produc-teurs.

En 1972-1973, Breton amorçait des travaux d'observation chez les pêcheurs-paysans Mayas des Basses Terres du Yucatan au Mexique dans le but

[…] d'étudier les problèmes de spécialisation économique de l'agriculteur Maya dans une sous-région particulière,, celle de la plaine côtière au nord-est de la ville de Mérida, et d'analyser, à l'aide de caractéristiques différentielles des unités de produc-tion, les possibilités de diversification qu'offrent les secteurs occupationnels de la pêche et de l'artisanat. (Breton 1972:10)

Cette étude s'inspire des développements enregistrés alors dans le champ de l'anthropologie économique, principalement par Eric Wolf, et conteste les fondements fonctionnalistes des études sur les sociétés paysannes réalisées, pour la plupart d'entre elles, en Afrique tribale.

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En examinant de plus près les facteurs et les rapports sociaux de pro-duction, l'auteur vise à démontrer que l'amélioration des conditions de vie dépend à la fois d'une diversification des ressources et d'un contrôle direct sur ces ressources. Ce projet d'équipe, d'une courte durée (deux ans) était le second dans cette aire culturelle, Beaucage ayant mis sur pied l'étude d'une communauté de la Sierra Norte de Puebla auparavant. Les travaux de Breton étaient novateurs en ce sens qu'ils se situaient en marge de la [55] tendance américaine, qui s'était concentrée jusqu'alors sur les Hautes Terres et négligeait l'impact de la production économique, et qu'ils comportaient un caractère prati-que. L'étude, en effet, est liée

[…] directement à un plan de relocalisation de paysans agri-culteurs dans les secteurs occupationnels moins achalandés, tels la pêche et l'artisanat. (Ibidem)

Il fut financé par le CRSHC, a permis l'encadrement de huit étu-diants/tes, dont un étudiant mexicain. Cette étude a permis la réalisa-tion de deux thèses de maîtrise (Dumas 1976, Royer-Blondin 1977) et d'une thèse de doctorat (Labrecque 1982b) ainsi que la publication d'un ouvrage qui est paru en langue française (Breton et Labrecque 1981) et en langue espagnole (Labrecque et Breton 1982).

Les études amorcées par Breton au Vénézuéla en 1970 se continuè-rent en 1976 : elles ont porté sur des villages de pêcheurs (l'anthropo-logie maritime devient durant cette décennie un champ en émergence) et le procès de production économique dans les perspectives du maté-rialisme historique (Gobeil 1977). Mentionnons encore que les études sur la Méso-Amérique ont débordé ce cadre géographique pour péné-trer dans le champ des études latino-américaines grâce aux efforts d'Yvan Breton et de ses équipes de recherche mais aussi de Bernard Arcand qui, auparavant, par ses travaux sur les Cuivas de la Colombie (Arcand 1971, 1972, 1976 1977, 1978 et 1979) a élargi les préoccupa-tions (ethnocide) ainsi que les perspectives théoriques (structuralisme et approche symbolique) de notre programme d'études et de recher-ches. Ces apports ont été consolidés par ceux des professeurs/res de

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Laval formés/ées à Montréal, comme je le mentionnais plus tôt, qui ont accumulé une riche expérience de recherche d'observation dans les Caraïbes (Bariteau 1968, Dagenais 1969). Dagenais, en particulier, de-puis sa venue au Département a amorcé [56] des études sur la condi-tion féminine en Guadeloupe (1983-1986) et a loge une demande de subvention pour une projet de longue haleine (1987-1991) sur les tra-jectoires démographiques et professionnelles des femmes dans les Caraïbes : Guadeloupe, Haïti et Trinidad. Je traiterai plus longuement de ses travaux lorsque j'aborderai les études sur la condition féminine dont elle est une des principales animatrices.

6. Les études autochtones (Arcand, Charest, McNulty, Simonis,

Tremblay, Trudel)

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On aura remarqué que je n'ai pas dressé la liste de tous les profes-seurs qui se sont engagés, au cours des ans, dans ce domaine d'études. J'exclus de cette section les études inuit qui ont été traitées plus tôt. Dès les débuts de l'anthropologie a Laval, les études autochtones ont été un champ privilégié non seulement parce que nous avions au Canada, à l'époque, une population autochtone d'un quart de million de person-nes (au Québec, trente mille) dont le taux d'accroissement était le plus rapide au pays, mais aussi parce que ces populations représen-taient celles qui, traditionnellement à tout le moins (« les peuples sans écriture »), avaient été les terrains d'observation et d'expérimenta-tion de l'anthropologie. Il n'y a donc rien de surprenant dans le fait qu'au moment de la départementalisation elles aient été considérées comme étant un des champs réservés à l'étude des futurs anthropolo-gues. Si on met de côté les études 'autochtones des précurseurs (Hawthorn-Tremblay 1966-1967 et Tremblay 1982b), les premiers travaux d'envergure ont été lents à démarrer. Mais une fois amorcées, les études ont pris une certaine ampleur, d'abord à la suite du Rapport Hawthorn-Tremblay et des travaux lies à l'Entente de la Baie James, puis par les études d'impact sur l'environnement et des projets (tech-

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nologiques et organisationnels) de développement. D'abord à caractère fondamental, les études autochtones ont vite évolué, dans la période récente, vers les études à caractère utilitaire dont la portée socio-politique [57] ne faisait aucun doute. Comme je le faisais remarquer dans un bilan d'ensemble de ces études au Québec (1982b: 84) :

[...] ce bilan [...] traduit à la fois une accélération de l'histoire sous la double poussée de l'évolution des schémas théoriques d'explication en ethnologie et des changements profonds dans la nature des rapports entre les Blancs et les Autochtones et une crise de conscience par rapport au type de société à bâtir

Les premiers travaux sur les Indiens du Québec par des gens de Laval furent entrepris par des étudiants/tes soit dans le cadre des études sur la Côte-Nord ou dans le but de rédiger un mémoire de maî-trise : ils ont été subventionnés par le Centre d'études nordiques au moment où Louis-Edmond Hamelin en était le directeur (Collectif 1971) et par le Bureau régional (de Québec) du ministère des Affaires in-diennes et du Nord (Lachance 1968). C'est à l'automne 1972 qu'un groupe formel d'études amérindiennes fut mis sur pied pour les fins d'encadrement des étudiants et de développement des recherches dans ce domaine privilégié (Pothier 1972). Au département, on ressen-tait de plus en plus le besoin de former des étudiants/tes qui seraient capables d'influencer l'opinion publique en reflétant mieux la situation complexe des Autochtones du Québec durant cette phase de trans-formations rapides à la suite de contacts interethniques plus intensifs avec les populations du Sud et d'interventions ponctuelles de plus en plus nombreuses de la part de diverses instances gouvernementales. On envisageait même

[...] de faire de cette équipe un centre important pour les In-diens du Québec eux-mêmes. (Pothier 1972:1)

Cet objectif se réaliserait, croyait-on,

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[58]

[...] en associant des Indiens aux travaux de recherche, en re-joignant des clientèles étudiantes amérindiennes et en élabo-rant des services (comme des publications en langues indiennes) qui seront accessibles à l'ensemble de la collectivité. (Ibidem)

Les objectifs définis par cette première équipe départementale ne furent pas tous réalisés durant son existence mais ils ont contribué, comme les travaux des prédécesseurs que furent Rémi Savard et Jo-sée Mailhot qui ont principalement oeuvré par après dans la région de Montréal, à mieux ancrer une tradition naissante qui prendrait un es-sor considérable quelques années plus tard. Ces premiers travaux ont porté sur la pharmacopée traditionnelle et les mythes des Iroquois Mohawk du Québec (Simonis 1972, 1973a, 1973b, 1977a et 1977b), les problèmes de développement chez les Cris de la Baie James et un in-ventaire toponymique chez les Montagnais de la Basse-Côte-Nord et du Labrador (Bouchard 1973).

Dans les années récentes, quatre professeurs ont particulièrement influencé l'évolution et le développement des études autochtones : ce sont Gerald McNulty dans le champ des études ethnographiques et ethnolinguistiques (McNulty 1974 et 1978, McNulty et Basile 1981, McNulty et Taillon 1982, McNulty et Gilbert 1984) ; François Trudel dans le domaine des analyses ethnohistoriques soit sur l'histoire des Inuit du Québec nordique, l'exploitation des ressources dans la pénin-sule du Québec-Labrador (Frenette 1980, Beaupré 1980, Trudel 1979a et 1979b) ou encore sur les relations inter-ethniques au Nord (Trudel 1981) ; Bernard Arcand, particulièrement dans ses études sur les re-présentations sociales avec Sylvie Vincent pour lesquelles, d'ailleurs, ils ont obtenu le prestigieux prix EAFORD (Arcand et Vincent 1979), ainsi que Paul Charest par ses études écologiques et ses analyses sur l'impact des méga-projets sur les communautés amérindiennes (1977, 1980a, 1980b, 1982b). Dans ce dernier cas il est nécessaire de référer d'une manière toute spéciale à son prêt de service au Conseil Attika-mek-Montagnais (CAM) [59] (1982b et 1986) dont les retombées au

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département sont considérables, à la fois pour la formation des étu-diants/tes et le rayonnement. En effet, depuis les débuts de son en-gagement auprès du CAM

[...] 10 étudiants ont eu l'occasion d'y faire des stages, des di-plômés en anthropologie ont eu des contrats pour au moins 20 années de salaire à temps plein et certains enseignements ont été institués ou renouvelés (ethnologie des Amérindiens, Dos-siers autochtones, Impacts sociaux des projets de développe-ment), (Charest 1987: 1)

Charest a également été engagé, avec Trudel qui assumait la coor-dination de la présentation du dossier d'exploration-élaboration (Tru-del et al. 1986), à la mise sur pied d'un certificat en études autochto-nes à l'automne 1986 qui est susceptible d'attirer, avec le temps, des clientèles de plus en plus nombreuses 9. Charest a également pu, avec la collaboration de McNulty et Jean Huot (biologie) pour le projet « Exploitation et aménagement des ressources fauniques par les Mon-tagnais du Québec », et l'appui du CAM et des communautés monta-gnaises elles-mêmes, obtenir des subventions de recherche totalisant près d'un demi-million de dollars. Il fait partie depuis peu de l'équipe des négociations territoriales pour le CAM.

On le voit à ces différentes mentions, plusieurs membres de l'équi-pe professorale sont pleinement engagés dans les études autochtones. Si à ces travaux sur les Amérindiens, dont la liste est loin d'être ex-haustive, on ajoute ceux qui ont été faits et qui sont en cours chez les Inuit, et ceux qui ont été réalisés et qui sont présentement en cours au Québec, on se rend compte que le département a pleinement assu-

9 Les thématiques d'enseignement (formation et perfectionnement) privilégiées

par le programme de certificat sont les suivantes : (a) l'économie des réserves indiennes et des communautés inuit ; (b). la politique autochtone ; (c) le gouver-nement local ; (d) l'entrepreneurship autochtone ; (e) l'autonomie politique des Premières Nations ; (f) la Loi sur les Indiens et autres lois se rapportant aux Au-tochtones ; (g) les revendications autochtones ; et, (h) les Traités et les Conven-tions modernes (Trudel 1986: 15).

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mé les responsabilités qui lui ont été assignées [60] au moment de la départementalisation dans l'aire nord-américaine. Cette dernière considération m'amène a examiner, dans les sections qui suivent, les études sur les communautés rurales québécoises ainsi que celles qui ont été entreprises par des collègues soit sur des thématiques ou en-core dans des aires culturelles autres que nord-américaine, latino-américaine et Afrique noire. Cette extension du mandat s'est en quel-que sorte graduellement imposée par la venue de nouveaux collègues et par les intérêts de plus en plus diversifiés des étudiants/tes ins-crits/tes à notre programme d'étude, aux cycles supérieurs principa-lement.

7. Les études sur les communautés rurales (Bariteau, Breton, Pilon-Le)

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Ces études sur les communautés rurales sont de réalisation récen-te. Le bref compte-rendu effectué ici exclut celles qui ont été réali-sées chez les Acadiens de la Nouvelle-Écosse par Tremblay, celles qui ont été conduites dans le cadre du Projet Côte-Nord ainsi que celles conduites par Le Querrec à l'Île-aux-Coudres (1981) et aux Îles-de-la-Madeleine (1982). Les orientations théoriques ainsi que les démar-ches méthodologiques de ces travaux sont assez bien couverts dans une publication récente de Tremblay et Gold (1984: 263-274). Ces travaux, pour la plupart, se situent dans la foulée des courants fonc-tionnalistes en anthropologie. Mais dès les débuts des années soixan-te-dix, d'autres courants théoriques vont marquer fortement les étu-des sur le Québec rural, en particulier, le matérialisme historique. En agriculture comme dans les pêcheries, par exemple, on cherchera à décomposer « l'impact d'une pénétration du mode capitaliste de pro-duction » (Tremblay et Gold, 1984:275). Le modèle néo-marxiste, on le sait, accorde une place de toute première importance aux effets du capitalisme sur le procès de différenciation sociale associée soit aux nouvelles structures du pouvoir et aux transformations idéologiques qui les accompagnent. Bariteau, dans ses analyses des pêcheries aux

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Îles-de-la-Madeleine (1977, 1978 [61] et 1979), Breton (1979) et Pi-lon-Lê (1979, 1980), dans leurs travaux sur l'agriculture d'un Québec moderne, en arrivent à la constatation d'une insertion de plus en plus grande du capitalisme comme force de production, d'une influence de plus en plus pénétrante de l'État sur le processus de production lui-même et d'un relâchement dans l'autonomie du producteur (le phéno-mène de la dépendance). Les travaux de l'équipe de Breton dans Belle-chasse sont remarquables sur ce point car ils visaient principalement à mettre en relation « les concepts de sociétés paysannes, de classes sociales et de structure étatique » (Breton 1979: 312) ayant constaté que les grandes caractéristiques de la société paysanne québécoise étaient : (1) la diversité du procès de travail chez les paysans ; (2) l'absence d'une stratification socio-économique poussée entre les producteurs et (3) la prédominance de la petite production marchande comme mode d'organisation économique (Idem: 311). Voilà que le comté de Bellechasse offrait un terrain particulièrement propice pour le gen-re d'étude proposée. De plus le chef d'équipe était lui-même originaire de ce milieu, ce qui lui accordait un avantage certain dans la conduite de ses propres travaux et de ceux des étudiants/tes. Ce projet a per-mis la production d'un certain nombre de thèses de maîtrise (Anctil 1975, Aubé 1978, Lajoie 1978, Nadeau-Lemieux 1978) ; il a été sub-ventionné par différents organismes (FCAC, le Conseil des Arts, le mi-nistère des Affaires culturelles) sur une période de huit années (1974-1975 à 1981-1982) ; il a été à l'origine de la production de deux films en plus de favoriser des interventions dans le milieu. Ces derniè-res, par la participation des chercheurs/res à des discussions avec des groupes d'intervenants, visaient à susciter une conscientisation des gens du milieu, étape préalable à une prise en charge par eux-mêmes des problèmes suscités par l'intensification du capitalisme industriel. Les résultats ne correspondirent pas tout à fait aux attentes. Mais cela tient à plusieurs facteurs, comme le fait remarquer Breton (1984:59) lui-même, c'est-à-dire, les contraintes liées aux apprentis-sages et pratiques universitaires du [62] temps au Québec et à Laval en particulier, la nécessaire familiarisation avec un cadre conceptuel relativement nouveau en anthropologie sociale (le matérialisme histori-que) et les résistances locales liées à une conjoncture socio-politique qui accentuait le factionalisme. Par ailleurs cette première expérience

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disciplinaire formelle de mise en application des résultats de la re-cherche anthropologique dans un milieu proche de Québec a alimenté le débat sur les relations entre académisme et intervention (Ibidem).

Les études récentes de Pilon-Lê sur le Québec rural portent sur la transmission des fermes. Elles s'insèrent dans le cadre d'un Projet France-Québec qui s'intéresse principalement à une étude comparati-ve des politiques agro-alimentaires de l'État et des conséquences qu'elles engendrent sur les collectivités rurales. L'aspect québécois de ces études vise à déterminer l'impact des politiques agricoles sur la transmission des fermes, principalement en ce qui a trait aux problè-mes rencontrés par les familles et les unités de production lors de la transmission proprement dite. Ces dernières études auprès de 50 fa-milles vivant sur 24 fermes différentes (familles des pères et familles des fils), inspirées par la perspective du matérialisme historique, ont permis l'organisation d'un colloque auquel ont participé tous les cher-cheurs associés au projet et la préparation d'un ouvrage collectif dans lequel seront consignés les principaux résultats (Pilon-Lê 1984b).

Claude Bariteau a amorcé des travaux sur les effets du dé-veloppement capitaliste sur les villages de pêcheurs aux Îles-de-la-Madeleine. À l'aide d'un modèle marxiste, il a illustré comment l'ensemble des contraintes originaires du système ca-pitaliste réduisent l'efficacité des coopératives. Par extension, tout comme l'a fait Bernier et Breton, Bariteau met à jour les freins structurels du développement régional (Bariteau, 1977). Ce dernier estime que le cas des Madelinots est typique, Les coopératives sont d'abord instituées dans le but de corriger les déséquilibres économiques évidents. Dans un second temps, le Gouvernement les marginalise pour favoriser l'implantation, dans le milieu où elles sont établies, de corporations multinatio-nales. Les coopératives deviennent ainsi [63] soumises au mode capitaliste de production (Idem: 36). Selon Bariteau, il est pos-sible, dans le contexte régional, d'améliorer la compréhension de la sorte de pouvoir ainsi que celle des conflits par le biais de l'étude de l'impact des changements produits par le monopole capitaliste. Bien que cette perspective sur le développement ré-

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gional de Bariteau possède une teinte déterministe, elle est so-lidement ancrée dans une description ethnographique de qualité sur la structure des élites locales et régionales ainsi que sur le procès d'industrialisation. Il poursuit aujourd'hui ses observa-tions, dans la même ligne de pensée, dans trois municipalités du Québec ayant une structure économique différente en vue de comparer les variations qui se manifestent dans les diverses modalités du pouvoir local et, par voie de conséquence, dans les comportements et relations de classe (Bariteau, Durand, Pilon-Lê 1980). Comme ces travaux portent tout autant sur les tra-vailleurs que sur les gérants, ils enrichiront l'univers des don-nées sur lesquelles se fondent les analyses anthropologiques comparatives sur les conséquences de l'industrialisation au Québec. (Tremblay et Gold 1984: 283-284)

8. Le structuralisme et la représentation symbolique du Québec (Maranda, Saladin d'Anglure, Simonis)

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Les modèles structuralistes ont servi à la représentation symbolique des Autochtones et des populations euro-québécoises. Ils ont été utilisés à la fois par des étudiants eu-ropéens de Lévi-Strauss venus au Québec (Saladin d'Anglure, Simonis) et par des Québécois qui ont étudié à la Sorbonne (Sa-vard). Les structuralistes et les néo-marxistes, engagés dans l'étude du Québec, ont entretenu des relations de coexistence. Tout récemment, d'ailleurs, certains anthropologues ont cher-ché à intégrer ces deux approches dans une seule et aime visée théorique. Tandis que l'anthropologie marxiste québécoise vise à déceler comment sont sapées les structures précapitalistes en faisant appel à un matérialisme historique de type universaliste, les structuralistes, de leur côté, fondent leurs interprétations sur des critères de type universaliste pour apprécier les repré-sentations idéologiques de la structure sociale québécoise et des mutations qu'elle subit. (Tremblay et Gold 1984:280)

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L'analyse structurale du discours populaire de Pierre Maran-da prolonge ses recherches antécédentes sur le mythe (que j'analyserai dans le cadre des études qui utilisent une approche symbolique) par une étude systématique de l'étayage sémanti-que des différences de classe et de celles des groupes ethni-ques (Maranda 1978 et 1979). Par une comparaison sémantogra-phique du domaine travail à la Haute ville et dans la Basse ville de [64] Québec, Maranda centre son analyse sur l'infra-discours. En utilisant les outils de l'analyse structurale et ceux de l'informatique, il fait la démonstration que les (clichés, les stéréotypes et les résidus expérientiels) (Maranda 1978: 251) du résident urbain définissent « la condition de son locuteur) (Ibidem) selon les clivages socio-économiques. Une analyse plus substantielle du même auteur compare la carte sémantique des groupes ethniques à Montréal par rapport à la solidarité sexuel-le, la masculinité, la féminité et la solidarité ethnique (Maranda 1979), Basés sur plusieurs types d'analyse, les résultats préli-minaires de cette étude produisent des cartes d'associations entre les groupes ethniques qui mettent en évidence le fait qu'un « réseau complexe d'intersections et de complémentari-tés sémantiques entre les groupes ethniques montréalais repose sur un fonds commun qui s'exprime au niveau paradigmatique (narratif). Cette étude fait l'objet d'études réplicatives dans d'autres villes du continent nord-américain » (Tremblay et Gold 1984: 281-281)

À la lumière de ces résultats, on peut constater que Maranda utili-se les perspectives conceptuelles et les outils opératoires du structu-ralisme et de la sémiotique afin de révéler les codes non verbalisés qui, tout en trahissant des modèles culturels implicites, nous apportent des constats d'une grande utilité pour mieux saisir la signification des rapports interethniques au Québec.

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9. Les études symboliques (Arcand, Saladin d'Anglure,

Simonis, Schwimmer, Maranda)

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Cette perspective conceptuelle, dont les premiers enracinements renvoient à l'étude des croyances, des rituels et des pratiques reli-gieuses, s'est renouvelée depuis un quart de siècle, grâce surtout aux efforts déployés par Lévi-Strauss, pour prolonger et élargir l'univers des apparences et des phénomènes visibles, qu'ils appartiennent au domaine religieux ou au domaine profane, en renvoyant à leurs fonde-ments, à leur sens et à leur portée symbolique. Plusieurs collègues ont effectué des études en s'inspirant de cette tradition et Laval est re-connue pour la qualité de ses contributions dans ce domaine. A titre illustratif, on peut mentionner : celles de Saladin d'Anglure dans ses analyses du troisième sexe (1986) ; [65] celles d'Arcand dans ses écrits sur les Cuivas (1978) ou encore celles sur les représentations sociales des Amérindiens (1979) ; celles de Simonis dont le livre La Passion de l'inceste (1980) est un classique sur le sujet et est traduit dans plusieurs langues ; celles de Schwimmer dont les nombreuses ana-lyses sur la fonction symbolique et en sémiotique (1965, 1979, 1981a, 1981b, 1983, 1985) font autorité autant sur le continent nord-américain qu'en Europe ainsi que les recherches et publications de Ma-randa tant sur l'analyse des mythes (1967, 1968, 1970, 1972a, 1972b, 1974, 1977a, 1977b, 1977c) que sur les champs sémantiques (1981, 1982a, 1982b) et la sémiographie (1977d, 1977e, 1978, 1981). Cette dernière approche, à caractère expérimental sur les représentations symboliques, nécessite la cueillette de données sur le terrain au moyen du protocole TAL-TAN. Elles sont analysées à l'aide d'un progiciel qu'il a développe. Il effectue aussi des travaux de longue haleine sur les traditions orales des Lao de Malaïta, Îles Salomon. Ceux-ci ont permis la production du film de Granada Television, en Angleterre, The Lau, lequel a remporté un grand prix international du documentaire en octobre 1987.

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La contribution de Schwimmer sur les Maori, les Orokaiva (Papoua-sie) est fondamentale en anthropologie de l'Océanie. Il y effectue des études en collaboration avec la prestigieuse équipe parisienne de Louis Dumont (Schwimmer 1973, 1978, 1984, 1986a, 1986b). Tout récem-ment il a amorcé des recherches empiriques sur la fête au Québec. L'ensemble de ses travaux, qui portent sur plusieurs cultures, en sui-vant des pistes nouvelles d'analyse ou encore en portant sur des ob-jets auxquels l'anthropologie avait accordé peu d'importance jusqu'à maintenant (la construction politique de l'objet esthétique par exem-ple : 1986b), élargissent la portée comme consolident les assises de l'approche symbolique.

[66]

10. Les études sur les femmes (Dagenais, Labrecque)

En dépit du fait que la fin de la Décennie des femmes ait donné lieu a l'établissement de plusieurs bilans dans ce nouveau domaine de re-cherche, permettant de mettre en relief l'ensemble des changements de tous ordres qui doivent être instaurés avant qu'elles réalisent une complète égalité avec les hommes, ce champ d'études en est encore à ses premières étapes de développement. Il y eut des progrès qui ont été enregistres surtout du côté d'une documentation du pouvoir mas-culin et du statut de dépendance des femmes dans plusieurs domaines différents d'activités, pour ne pas parler des abus dont elles sont vic-times et des actes discriminatoires ou injustes poses a leur endroit. Malgré cela les études féministes sont dans un relatif état de sous-développement. Elles sont en quelque sorte confrontées à une défini-tion de plus en plus précise de l'objet d'étude, a une spécification des principaux concepts et à une précision plus fine de la méthodologie ou des règles de procédure dans l'observation de l'objet d'étude. À l'oc-casion d'une rencontre du Laboratoire d'anthropologie sur le féminis-me comme champ possible à privilégier au département, un consensus s'est établi autour de deux pôles de réflexion et d'action :

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[...] (a) Continuer le travail critique et de sensibilisation : resi-tuer et recentrer la recherche des femmes chez nous et aux pays du Tiers-monde ; diffuser davantage nos connaissances sur la condition féminine par la comparaison interculturelle et par la contextualisation ; appuyer le mouvement féministe ; intégrer l'approche féministe, faire des analyses collectives des attitu-des parmi les étudiants et les enseignants ; fournir des informa-tions critiques à un public plus large ; continuer à choisir des champs pratiques de recherche. Augmenter l'apport de l'an-thropologie au discours féministe, participer aux débats inter-disciplinaires ; vulgariser les résultats des recherches. (b) Re-chercher plus activement des concepts qui seraient particuliers à l'anthropologie et qui pourraient fournir des concepts pour l'anthropologie des femmes. (Schwimmer, E. Les champs de re-cherche, 10 février 1987 : 1-2).

[67]

On se demande, enfin, si le département a les ressources nécessai-res pour être en mesure d'entreprendre toutes ces démarches et ces actions.

Quoi qu'il en soit, des membres de l'équipe professorale, principa-lement Huguette Dagenais et Marie France Labrecque, ont amorcé d'importants travaux de recherche dans ce domaine d'étude, au Qué-bec chez les Autochtones comme chez les Euro-canadiens, en Guade-loupe et au Mexique. Je chercherai à donner un aperçu général de ces travaux en m'inspirant des textes de ces deux auteures.

Une étude toute récente de Dagenais portant sur la méthodologie féministe mérite une attention spéciale en ce sens qu'elle vise à don-ner un aperçu d'ensemble sur la terminologie, à révéler les principes épistémologiques et éthiques qui sous-tendent les démarches d'obser-vation et à énoncer quelques pistes de recherche (Dagenais 1987). Cet essai n'est pas un bilan, comme l'affirme l'auteure, mais une réflexion sur sa compréhension d'une décennie d'expériences de recherche, d'interactions et de discussions avec un certain nombre de chercheu-

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res féministes appartenant à différentes disciplines et oeuvrant dans différentes parties du monde.

Il est évident, cependant, que c'est parce qu'il existe ac-tuellement une production scientifique féministe, abondante et de grande qualité, dit-elle, qu'il m'est possible aujourd'hui de tenter une présentation systématique de sa méthodologie. Les principes, les questions, les contradictions, les pistes que j'évo-que ici sont ceux que, selon moi, on retrouve implicitement ou explicitement, dans les travaux scientifiques des féministes, nord-américaines en particulier, ceux Qui m'apparaissent récur-rents dans leur discours. (Dagenais 1987: 1)

Le féminisme, en tant que champ de recherche, exige une définition afin d'éviter des malentendus. C'est un type de regard sur la réalité sociale et une perspective d'analyse des phénomènes observés qui sont très étroitement associés et nourris par le mouvement [68] des fem-mes, un mouvement social comportant plusieurs facettes, dont l'objec-tif primordial est la transformation en profondeur des institutions et des structures d'autorité ainsi que des rapports sociaux afin de bâtir une société égalitaire. Étant donné cet objectif, plusieurs milieux scientifiques considèrent cette approche comme ayant une visée poli-tique et dès lors ont tendance à l'écarter comme n'étant pas scienti-fique. L'auteure, dans cet article, cherche justement à démontrer le contraire, c'est-à-dire, que la recherche féministe se caractérise par une grande rigueur dans la démarche et s'inspire de principes épisté-mologiques qui revêtent un caractère d'unité en dépit d'appartenances disciplinaires différentes.

La recherche féministe est à la fois une activité intellectuel-le [...] non sexiste et « pleinement humain) et une forme d'enga-gement politique [...] C'est cette intégration dans une même dé-marche de préoccupations intellectuelles et politiques qui cons-titue la spécificité de la méthodologie féministe. (Idem: 4)

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Ces règles de l'observation et de l'analyse de type féministe repo-sent sur un certain nombre de principes qui m'apparaissent importants de rappeler. Le premier de ceux-ci est

[...] la reconnaissance de l'importance des rapports sociaux de genre dans tous les domaines de la vie, y compris dans le sec-teur de la production des connaissances, et de l'oppression des femmes oui en a résulté dans la majorité des sociétés connues. (Ibidem)

Sur ce plan, ce type de perspective s'oppose à l'androcentrisme de la plupart des recherches anthropologiques qui ont été effectuées dans le passé. Un second principe renvoie à l'adoption d'une perspecti-ve critique tant du vécu observé que du contexte historique dans le-quel celui-ci se développe. Le troisième principe s'inspire de l'histoire des sciences et de la phénoménologie. Il va encore plus loin que le pré-cédent en renvoyant aux contextes globaux de la [69] recherche et de la chercheure, en postulant que ceux-ci exercent un impact à la fois sur la situation observée comme sur la chercheure qui l'observe. De ce point de vue on argue, à juste titre d'ailleurs, que la subjectivité fémi-nine est aussi nécessaire pour aboutir à la connaissance que la subjec-tivité masculine l'est et que la valeur scientifique des deux types de regard, en principe a tout le moins, est identique. Cette subjectivité est aussi nécessaire à la conscientisation des participantes. En dernier lieu, la recherche doit servir la cause des femmes et contrecarrer l'oppression dont elles sont les victimes. Cet ensemble de principes va influer sur les stratégies à mettre en place : recherches pour et avec les femmes plutôt que des recherches « sur » les femmes. Ces straté-gies ne nécessitent pas en soi de nouvelles méthodologies, mais plutôt suggèrent des questionnements nouveaux qui émergent d'un position-nement différent par rapport à la réalité. Cet enjeu épistémologique n'est pas limite aux études féministes ; il est celui d'une nouvelle an-thropologie plus critique et désoccidentalisée. Je n'entrerai pas dans les questions et les problèmes qui découlent de cette position féminis-te ni n'aborderai le statut éventuel de telles études en anthropologie.

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Ce sont des aspects qui sont bien développés dans l'article cité plus haut (Dagenais 1987: 12-23).

La plupart des études de Dagenais, dans les perspectives féminis-tes sont centrées soit sur le Québec (Dagenais 1979, 1980, 1981a, 1981b, 1981c, 1985a, 1985b, 1985c, 1985d, 1986a et 1986b) ou sur la Guadeloupe (1985e, 1985f, 1986c, Dagenais et Poirier 1986). Certains travaux de Marie France Labrecque ont porté sur le Mexique où la préoccupation majeure est davantage liée au domaine de l'anthropolo-gie économique. En effet plusieurs de ses travaux là-bas se rapportent à la production économique et à la prolétarisation de la paysannerie maya au Yucatan, (Breton et Labrecque 1981, Labrecque 1982a, 1982b, 1985). Tout en poursuivant ses travaux dans les perspectives du maté-rialisme historique sur les rapports de production [70] au Yucatan, elle s'est également intéressée à la condition des femmes là-bas et à leur position dans la structure sociale (1986 et 1987). Dans des études en Haute-Mauricie sur les Attikamèques, Labrecque a visé à intégrer les perspectives néo-marxiste et féministe afin de mieux rendre compte de l'état de dépendance des communautés autochtones sur le régime capitaliste et de mieux saisir la nature des rapports femmes-hommes.

Ces études de Dagenais et Labrecque ont favorisé la contribution d'auxiliaires de recherche : quelques-uns en ont même fait l'objet de leurs mémoires de maîtrise. Dans le cas de Dagenais, mentionnons les principaux projets qui ont encadré les travaux de recherche des étu-diants/tes : (a) Réseaux et territorialité en milieu urbain québécois : le quartier Limoilou de la ville de Québec (1976-1979) ; (b) Condition fé-minine et tabagisme chez les jeunes femmes et les adolescentes qué-bécoises (1979-1981) ; (c) Condition féminine et vie quotidienne en mi-lieu rural québécois (1981-1982) ; (d) Condition féminine en Guadeloupe (1983-1986) et (e) La qualité de vie des femmes en agriculture (1986-1989). Labrecque, pour sa part, dans deux projets de recherche, a permis l'apprentissage à la recherche d'étudiants/tes des 2e et 3e cycles : (a) Les femmes amérindiennes au Québec : les cas Attikamek et Montagnais (1982-1985). Cette étude a permis, avec la collaboration de Gaétan Drolet, l'établissement d'un important guide annoté des ressources documentaires sur ces populations (Drolet et Labrecque 1986) ; et (b) Développement des forces productives en milieu rural au

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Mexique et condition des femmes paysannes au Mexique : le cas du Yucatan (1984 et 1985). Tenant compte des difficultés que doit confronter ce domaine d'étude ainsi que des limites dans les ressour-ces humaines auxquelles il est soumis, le bilan d'ensemble est positif, surtout si on prend également en compte l'intérêt qu'il suscite dans plusieurs autres départements de Laval et des rapports transdiscipli-naires qui en découlent. On projette à Laval la création d'une revue spécialisée [71] dans ce domaine d'étude, ce qui contribuerait à en consolider l'importance.

11. L'ethnicité urbaine (Dorais, Elbaz, Pilon-Lê, Schwimmer, Tremblay)

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L'anthropologie urbaine et l'anthropologie de l'ethnicité sont deve-nues au Québec, dans les années récentes à tout le moins, des champs d'études si voisins et ayant de si nombreuses interconnexions, que pour les fins de cet exposé, je puis les unifier pour en rendre compte. L'émergence de ces deux sous-disciplines anthropologiques tient à la fois a l'évolution de l'anthropologie en tant que discipline (la nécessité de plus en plus évidente d'étudier nos propres sociétés tout en ne né-gligeant pas l'étude des sociétés éloignées - l'ici par opposition a l'ail-leurs dans un modèle de comparaisons transculturelles -), aux trans-formations de la société québécoise qui devient de plus en plus post-industrielle et multiculturelle et aussi à la venue au Québec d'anthro-pologues nés à l'étranger qui n'ont pas perçu de la même manière que les anthropologues nés au Québec les contraintes du nationalisme qué-bécois par rapport à l'urgence de certaines études (rurales, sur le groupe québécois d'ascendance française, sur les Amérindiens, etc.) et qui ont élargi les horizons géographiques et idéologiques des études de terrain. Cette influence s'est fait surtout sentir dans le choix des po-pulations étudiées, les problématiques mises à l'essai (Elbaz 1985a) et l'examen des trajectoires de leur insertion sociale dans les infras-tructures et institutions québécoises.

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Il ne faut pas oublier aussi que, dans le cas du Québec, les minorité ethniques (appelées ici dans le discours officiel étatique « les commu-nautés culturelles » se sont surtout localisées à Montréal où elles re-présentent un segment de plus en plus important de la population. Les Francophones du Grand Montréal représentent à peu près 65% de la population de ce territoire en 1987. La proportion [72] des Anglopho-nes à Montréal est également en déclin. De plus l'immigration au Qué-bec est devenue ces dernières années un sujet d'une très grande im-portance pour le groupe francophone, surtout en ce qui a trait à l'ap-prentissage linguistique des immigrants. En cette période du déclin du taux de natalité chez les Francophones, cet enjeu est tout à fait prio-ritaire car il est lié à la survie de la francophonie québécoise. Un fac-teur qui a retardé l'émergence de ce champ d'étude à l'Université Laval est sa localisation à Québec qui est une ville d'une très grande homogénéité culturelle. À McGill et à l'Université de Montréal, la si-tuation fut toute différente (Tremblay et Gold 1984: 285-288).

Au tout début des enseignements de l'anthropologie à Laval et du-rant les premières années de son existence en tant que département, l'intérêt s'est porté sur les Autochtones et les Acadiens du Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse (les études de Tremblay dans le comté de Stirling) ainsi que sur les Acadiens de la Louisiane (les travaux de Ge-rald Gold et ceux de Louis-Jacques Dorais). Ces terrains de recherche ont porté principalement sur les assises de l'identité ethnique ainsi que sur les conditions sociales de l'aliénation culturelle et de l'anomie sociale. Dans cette foulée, d'ailleurs, Tremblay a entrepris un certain nombre d'études sur la société québécoise d'ascendance française qui ont donné lieu à son essai récent sur les périls que comportent l'accen-tuation des contacts interculturels et la pénétration de plus en plus envahissante de la culture de masse américaine au Québec (Tremblay 1983c). Qu'en sera-t-il avec le récent Accord de Libre-échange com-mercial avec les États-Unis? Voilà certes une question d'un très grand intérêt pour l'anthropologie du Québec.

En tant que champ scientifique, ce n'est que tout récemment que les études ethniques ont obtenu leur statut particulier. À ce [73] pro-pos, j'endosse entièrement le jugement que porte un collègue du dé-partement lorsqu'il affirme :

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Les études ethniques au Québec n'ont guère constitué jus-qu'à tout récemment un véritable champ scientifique. Sociolo-gues et anthropologues ont favorisé, durant deux décennies, l'étude des mutations socio-économiques de la société québécoi-se, la question nationale et linguistique et celle des Autochto-nes. Ce n'est qu'avec l'arrivée de cohortes d'immigrants non-européens et des implications posées par leur insertion dans le système urbain montréalais qu'un intérêt manifeste pour la re-cherche se développa et que de nouvelles interrogations furent formulées sur la place des ethniques dans la société civile au Québec. (Elbas 1985b: 14 ; Voir aussi Elbas 1983)

On peut affirmer aussi que les recherches entreprises récemment ont été, dans une certaine mesure, tributaires des intérêts des insti-tutions gouvernementales des deux niveaux de gouvernement (Secré-tariat d'État, ministère de l'Immigration et des Communautés cultu-relles, Office de la Langue française et Radio-Canada) qui se sont ins-pirées de ces études dans la gestion des problèmes que posaient à la société d'accueil ces populations nouvellement arrivées. Des monogra-phies à caractère synthétique sur les Chinois, les Grecs et les Juifs, par exemple, ont été réalisées récemment par l'Institut québécois de la recherche sur la culture. Depuis 1978, les études ethniques en an-thropologie à Laval se sont diversifiées tant dans les perspectives théoriques que méthodologiques, les champs d'investigation et les thè-ses qui y sont consacrées. Plusieurs recherches tentent de saisir les processus de communalisation ethnique, politique et culturelle des im-migrants en milieu urbain. Les dimensions d'interaction symbolique, de constructions d'identités situationnelles, d'insertion dans l'espace politique et sur le marché du travail sont explorées notamment dans les travaux de Dorais et de Pilon-Lê sur les communautés vietnamien-nes (Dorais et al. 1984, Dorais et al. 1985, Dorais et al. 1987), laotien-nes et cambodgiennes (Dorais et Pilon-Lê à paraître), par Elbaz res-pectivement à Québec et à Montréal (Elbaz 1979b, 1983, 1984, 1986, 1987a). Elbaz [74] et Schwimmer ont également. poursuivi des recher-

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ches en ethnicité urbaine en Israël (Elbaz 1979a, 1980a, 1980b, 1986) et en Nouvelle-Guinée (Schwimmer 1973, 1978, 1984, 1986a, 1986b).

Les différentes études auxquelles j'ai référé plus haut ont pour-suivi différents objectifs, ont utilisé des méthodologies des plus va-riées. De 1982 à 1984, par exemple, Dorais, Pilon-Lê et Nguyên Quy Bong se sont intéressés à la situation socio-linguistique des Vietna-miens, en particulier aux problèmes liés à l'apprentissage du français, a la préservation de la langue maternelle et à l'ensemble des facteurs sociaux liés au comportement langagier. Dorais et Pilon-Lê ont poursui-vi, de 1984 à 1987, des travaux sur l'insertion économique et l'inté-gration sociale des communautés vietnamiennes, cambodgiennes et lao-tiennes, lesquels, comme les précédents ont donné lieu a des publica-tions. Pour sa part Mikhaël Elbaz poursuit depuis quelques années, avec l'aide d'étudiants des 2e et 3e cycles, des études sur la ségrégation spatiale et l'identité ethnique chez les Juifs montréalais.

Cette recherche vise à identifier les facteurs qui favorisent la concentration des populations juives à Montréal et à cerner les relations entre un investissement particulier de l'espace, les pratiques politiques et l'identité socio-économique des Juifs montréalais [...] Nous avons cherché également à établir 1) les mécanismes et les processus qui induisent une communalisation politique chez les Juifs montréalais en tenant compte des cliva-ges ethno-linguistiques entre Sépharades et Ashkenazes, 2) les modalités d'imbrication entre les élites juives locales et celles de l'État israélien, 3) les processus de cristallisation d'une identité ethnique polycentrique. (Elbaz 1985b: 24)

Plusieurs étudiants/tes gradués/ées se préparent à rédiger des thèses sur les relations interethniques au Québec, entre autres : Ka-ren Dorval, Suzanne Marchand, Stefano Orioli, Mark Prentice, Victor Ramos. D'autres professeurs poursuivent des études sur les groupes ethniques : Nancy Schmitz (1968) sur les Irlandais et Anglophones [75] de Québec et Chalifoux sur les Anglophones de Québec. Trem-blay se prépare à soumettre au Secrétariat d'État un article de vulga-

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risation sur les enjeux ethniques d'un Canada multiculturel qui paraîtra d'ici une couple d'années (Tremblay 1989).

12. L'anthropologie de la santé, de la maladie et du vieillissement (Genest, Santerre, Tremblay)

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Ce champ d'étude est né de la convergence de trois traditions scientifiques particulières : l'ethnographie traditionnelle intéressée par les médecines indigènes, les études transculturelles sur la culture et la personnalité auxquelles ont collaboré anthropologues et psychia-tres et les actions associées à l'expansion des programmes internatio-naux de santé publique. Ces traditions ont en quelque sorte fait écla-ter le modèle bio-médical des explications de la maladie afin d'ajouter les facteurs psychologiques et socio-culturels susceptibles d'influer sur l'état de santé des individus.

Les anthropologues médicaux américains ainsi que les spécia-listes européens de l'ethnomédecine ont ais en relief des modè-les opératoires qui incarnent ces conceptions élargies de la san-té : ils proposent aux praticiens de la médecine occidentale une définition plus compréhensive de la santé, des démarches thé-rapeutiques qui tiennent compte du contexte socio-culturel de la dispensation des soins, des principes de réinsertion sociale qui respectent l'univers phénoménologique des patients ainsi que les systèmes d'attente de l'univers social plus large. (Tremblay 1982a: 253)

C'est cette problématique d'ensemble qui a inspiré les premiers travaux à Laval dans le domaine de la santé et de la maladie. Deux ar-ticles se rapportent aux travaux produits au Québec dans les perspec-tives de l'anthropologie : l'un d'eux fait l'inventaire des réalisations jusqu'à 1982 (Tremblay 1982a) et l'autre insiste sur les conditions

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socio-politiques de son émergence (Tremblay 1983a). Sans résumer les éléments contenus dans ces publications, il m'apparaît utile de men-tionner, à tout le moins, les principales études [76] qui ont été condui-tes au moment où l'anthropologie logeait encore au Département de sociologie. La première de ces études se rapporte à l'évaluation des ressources communautaires dans le conté de Portneuf susceptibles de légitimer l'établissement d'une agence de service social (Morin et Tremblay 1960). La seconde a porté sur l'instabilité du travailleur fo-restier et des tensions psychologiques qui découlaient d'un type parti-culier d'organisation du travail (Tremblay 1960). La troisième s'est constituée dans la foulée du Rapport Bédard (Bédard et al. 1962) sur les hôpitaux psychiatriques dans lequel il dénonçait l'ensemble des conditions sociales de l'enfermement des patients psychiatriques et les lacunes de l'intervention thérapeutique. C'est ce qui n'a amené, avec l'aide d'étudiants/tes du 2e cycle, à étudier l'asile en tant que système social favorisant une socialisation a la dépendance institution-nelle, le caractère vétuste des pratiques psychiatriques et les possibi-lités (plus théoriques que réelles) de réinsertion sociale des ex-patients psychiatriques une fois retournés dans leur communauté d'origine. En tant que directeur scientifique de L'Office de la Préven-tion et du Traitement de l'Alcoolisme et des autres Toxicomanies (l'OPTAT), j'ai dirigé quelques travaux d'étudiants/tes qui se rappor-taient soit à l'épidémiologie de l'alcoolisme, à l"historique et aux idéo-logies des mouvements antialcooliques, aux pratiques thérapeutiques, au processus de réadaptation de l'alcoolique aux techniques d'inter-vention et d'éducation de clientèles-cibles (Tremblay 1968b). Lucien Laforest a d'ailleurs rédige une thèse de doctorat portant sur l'épi-démiologie de l'alcoolisme dans la région du Bas-Saint-Laurent (Lafo-rest 1974). À ces travaux d'observation directe dans divers milieux, s'ajoutent des réflexions sur les fonctions du médecin de famille dans la santé mentale (Tremblay 1965), l'évolution des établissements de santé (Tremblay 1966), la participation des citoyens à l'administration et à la planification des soins et services de santé (Tremblay 1970), les nouvelles contraintes imposées par l'évolution sociale (Tremblay 1973), et un plan directeur des études en [77] anthropologie de la san-té (Tremblay 1975). Deux années plus tard, Gisèle Labrie présente, avec la collaboration de son directeur de recherche, un inventaire des

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études psychologiques et culturelles de l'alcoolisme (Labrie et Trem-blay 1977). L'année suivante Tremblay participe à un groupe de travail dont le mandat consiste à examiner l'état des recherches en matière de santé mentale (Collectif 1978a). Puis seront produits des docu-ments portant sur une perspective systémique de la santé (Tremblay 1982a) lequel constitue un des chapitres d'un livre à paraître sur La Santé des Québécois et, finalement, sur une évaluation des services psychiatriques depuis l'instauration de l'Assurance-maladie (Tremblay 1987).

Un autre collègue à s'intéresser au champ de la santé fut Serge Genest. Il orienta ses études dans le champ de l'ethnomédecine, c'est-à-dire, des médecines indigènes. Son premier terrain formel centré exclusivement sur ce sujet fut en 1979 quand il se rendit au Cameroun septentrional pour démarrer une étude chez les guérisseurs Mafa financée par le Conseil de recherches en Sciences humaines du Canada et qui s'est poursuivie jusqu'à 1985 (Genest 1981 et 1983). Mais il avait dès 1974, à l'occasion de travaux antérieurs de terrain, mis en route son projet doctoral sur le savoir traditionnel et la trans-mission des connaissances des forgerons mafa (Genest 1974 et 1976). Il s'intéressa également à la phytothérapie dans la médecine africaine (Genest 1979a et 1979b). Ses vastes connaissances sur l'ethnoméde-cine, ses problématiques, et ses outils d'observation sont reflétées dans un article qui fait autorité en la matière (Genest 1978). Tout ré-cemment, il a amorcé une étude sur le rituel chirurgical au Québec dans les traditions de la médecine de pointe en utilisant sensiblement un modèle ethnomédicinal et une perspective symbolique.

Renaud Santerre, pour sa part, s'est intéressé, dès le début des années soixante-dix, au vieillissement au moment de ses travaux [78] sur la transmission du savoir en Afrique. À l'occasion de ces études d'observation, il se rendit compte que les vieillards là-bas sont les dé-positaires d'un savoir et, que de ce fait, ils occupent un statut d'auto-rité qui est investi de prestige et de pouvoir. Le Québec rural tradi-tionnel accordait un statut et des privilèges qui ressemblaient à ceux qu'il avait observés en Afrique. Mais dans un Québec post-industriel, qui subit des mutations sociales profondes de ses institutions et des rôles associés à l'âge, la situation s'est profondément transformée.

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C'est cette constatation, entre autres, qui amena Santerre à s'inté-resser au processus de vieillissement et au statut accorde aux aînés québécois des deux sexes vivant seuls ou en institution (Santerre 1982b, 1982c). Il sent aussi qu'il a l'appui de la Faculté qui avait créé un Laboratoire de Gérontologie sociale en 1975, à la suite de son inca-pacité d'établir conjointement avec les Sciences de la santé un Centre interfacultaire de recherche qui regrouperait dans une seule unité les aspects gériatriques et ceux de la gérontologie sociale. Cette premiè-re initiative facultaire fut suivie d'une autre, soit le rattachement d'un certificat d'études en gérontologie qui fut « opérationnel » dès 1978 mais reçut l'accréditation du Conseil des Universités en 1982. Santerre deviendra, d'ailleurs, le directeur du Laboratoire en 1985, poste qu'il occupera durant deux ans. Les études de ce dernier sur le vieillissement se situent dans une continuité et se déploient selon trois axes différents. Une premier volet de son projet porte sur l'incidence du facteur ethnique sur le vieillissement. Il a donné lieu à des études sur le vieillissement dans des communautés ethniques, a favorisé la participation d'anthropologues de Laval et d'ailleurs et a donné lieu à deux colloques dont l'un fut tenu en février 1985 et l'autre, à l'au-tomne 1986. Les Actes de ce dernier colloque permettront la réalisa-tion d'un ouvrage collectif sur le sujet. Un deuxième aspect se rappor-te à des études dirigées par Ellen Corin (à ce moment-là rattachée au Laboratoire de gérontologie) portant sur l'influence du milieu dans le processus de vieillissement [79] prenant en compte les différences rurales-urbaines et celles reliées au milieu institutionnel (Foyer d'ac-cueil) par opposition au milieu familial. De 1980 à 1982 cinq étu-diants/tes ont effectué des travaux sur le terrain en vue de la rédac-tion d'un mémoire de maîtrise. Ceux-ci ont principalement permis la production d'études monographiques sur les milieux de résidence des personnes âgées. Le troisième volet s'inscrit, lui aussi, dans les tradi-tions de l'anthropologie culturelle américaine en ce sens qu'il est cen-tré sur les trajectoires de vie (récits de vie) d'aînés de sexe masculin cherchant à révéler l'impact de l'histoire professionnelle, en mettant l'accent sur le métier principal (bûcheron, agriculteur, pêcheur, mi-neur) de la personne âgée et sur la manière dont ceux-ci se représen-tent et vivent la vieillesse. Ce sont les étudiants/tes qui suivent les cours de Santerre sur l'anthropologie du vieillissement (lesquels re-

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crutent année après année de vastes clientèles) qui se chargent de cueillir les données nécessaires à la parution d'un ouvrage original sur le sujet.

L'ensemble des travaux sur le vieillissement de Santerre lui ont permis de coordonner, avec Ellen Corin, un numéro spécial d'Anthropo-logie et Sociétés sur le sujet (Vol. VI, No 3, 1982) dans lequel il a d'ailleurs produit deux articles (Santerre 1982b et 1982c) en plus de préparer d'importantes réflexions méthodologiques sur la question de l'utilisation des méthodes qualitatives en anthropologie (histoires de vie, entrevues centrées avec informateur-clef, observation-participante) et leur impopularité auprès des comités de pairs respon-sables de l'évaluation des projets de recherche auprès des organismes subventionnistes.

En terminant cette section sur le thème de l'anthropologie de la santé, il est aussi important de mentionner que plusieurs étudiants/tes aux cycles supérieures, dont la première thèse de doctorat (Bibeau 1979), ont préparé ou préparent présentement des [80] thèses qui se rapportent à ce domaine d'études qui prend une ampleur exceptionnel-le depuis quelques années en vertu du fait que des postes de recher-che comme d'intervention s'ouvrent dans ce domaine.

13. Conclusions sur la recherche anthropologique à Laval

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On constate a l'examen même sommaire de l'ensemble de ces réali-sations, qui sont loin d'être exhaustives, (aucune référence aux com-munications scientifiques résultant des travaux de recherche ; les pu-blications énumérées représentent, dans certains cas, des exemples à caractère limite) l'importance accordée à la recherche, tant théorique qu'empirique, par les membres de l'équipe professorale. Entreprises dans les premières années dans le cadre d'équipes importantes s'inté-ressant particulièrement à l'une ou l'autre des aires culturelles privi-légiées en anthropologie (Côte-Nord du Saint-Laurent et Inuit cana-

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diens, par exemple), les recherches se sont graduellement diversifiées au fur et à mesure que s'accroissaient l'équipe professorale et les ef-fectifs étudiants. Ces diversifications des intérêts de recherche ont coïncidé aussi avec la spécialisation des sous-disciplines anthropologi-ques et le fractionnement dans les orientations de recherche (Trem-blay 1980). Par contre,

[…] on peut retrouver, sous l'apparente diversité des projets spécifiques, un certain nombre de grands thèses (encadrés par une démarche théorique généralement assez bien définie) qui caractérisent la recherche actuelle (ainsi que les enseignements qui en découlent). (Dorais 1980: 7)

Le Plan triennal de développement (1979-1982) du département est assez explicite là-dessus (Voir, p. 4) quand il l'affirme explicitement.

[81]

À l'intérieur de deux grands cadres théoriques que nous vou-lons complémentaires [y lit-on] le structuraliste et le matéria-lisse historique, l'essentiel de nos enseignements et de nos re-cherches porte sur quatre thèses principaux : l'étude des mino-rités ethniques, l'analyse de la décomposition de la production primaire (chasse, pêche, trappe, agriculture), les phénomènes d'urbanisation et l'étude de la production symbolique et idéolo-gique ; l'analyse de ces thèses se concrétise au sein de plusieurs aires culturelles, soit les cinq aires traditionnelles (Québec français, Inuit, Amérindiens, Amérique latine, Afrique noire francophone) et des aires nouvelles, qui reflètent les champs de spécialisation des professeurs ; l'aire Caraïbe, le Nigéria, le Moyen-Orient, la Mélanésie, l'Indonésie, l'Amérique du Nord francophone et les minorités ethniques du Québec.

Depuis cette date, l'hégémonie des deux grands courants théori-ques s'est quelque peu atténuée pour laisser une place plus importante

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à d'autres courants conceptuels d'inspiration interdisciplinaire, tels l'approche systémique et la perspective féministe ou encore à des ap-proches influencées par l'utilisation de l'informatique (Maranda 1984). De plus, les champs de prospection s'élargissent pour permettre un arrimage aux champs prioritaires de certains organismes de subven-tion de recherche. Il existe, comme de bien entendu, plusieurs travaux de recherche qui ne nécessitent pas de dépenses financières. Cepen-dant il faut reconnaître que l'ensemble des travaux d'observation dont nous avons fait le recensement ont nécessité l'aide financière de plusieurs organismes de recherche dont les plus importants ont été pour notre département : le Conseil des Arts du Canada, le Conseil de recherches en Sciences humaines du Canada, le ministère de l'Éduca-tion du Québec par le biais de son programme de Formation de cher-cheurs et d'action concertée maintenant devenu FCAR, le Conseil qué-bécois de la recherche sociale ainsi que divers ministères et fonda-tions privées (la Donner Foundation, par exemple, pour les études amé-rindianistes). Le Laboratoire d'anthropologie, organisé dès les premiè-res recherches de terrain, a fourni l'infrastructure et les services d'appoint nécessaires à [82] la réalisation de ces travaux et à la pro-duction des rapports de recherche. Ce même Laboratoire

[...] administre et anime le centre de documentation en anthro-pologie ainsi que les importantes collections d'objets divers (vê-tements, outils, sculpture, etc.) qui constituent l'embryon d'un musée ethnographique. (Dorais 1980: 8)

Depuis cette date, on a ajouté un service permettant l'utilisation d'ordinateurs.

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[83]

L’anthropologie à l’Université Laval. Fondements historiques, pratiques académiques,

dynamismes d'évolution.

Chapitre 3

Organisation administrative, programmes de formation et clientèles étudiantes

1. Le profil démographique du département

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Le développement du département se caractérise par une croissan-ce d'abord relativement lente des effectifs étudiants à temps com-plet (Voir, Tableau 1, p. 85). À compter de l'automne 1972, cependant, le rythme d'accroissement s'accentue et le nombre des étudiants/tes qui s'inscrivent à ce programme d'études double quasiment à chaque année durant trois années consécutives. De 69, durant l'année acadé-mique 1971-1972, il se hausse à 470 en 1974-1975. Il [84] a atteint un plafond en 1976-1977 avec un total de 497 inscriptions. La population étudiante diminuera quelque peu l'année suivante (480) pour amorcer à compter de 1978-1979 une décroissance, d'abord spectaculaire, puis-que le nombre des personnes inscrits/tes s'affaisse à 276, puis de-meurera régulière jusqu'à ces toutes dernières années où le niveau de

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la population étudiante des trois cycles se stabilise autour de 200. Cette baisse des effectifs étudiants s'est effectuée exclusivement au dépens des clientèles du premier cycle car on observe une lente progression dans le nombre des étudiants/tes inscrits/tes aux cycles supérieurs. On peut affirmer, sans danger d'erreur, que cette dé-croissance des inscriptions au premier cycle et cet accroissement continu de celles aux 2e et 3e cycles ont permis à l'équipe professora-le de s'adonner sur une base régulière à la recherche, d'assurer des enseignements mieux étoffés et, surtout, d'offrir un type d'encadre-ment adéquat aux cycles supérieurs, une autre marque de commerce de notre département.

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[85]

Tableau 1 : Données historiques sur les populations étudiantes es anthropologie 10

70-71 71-72 72-73 73-74 74-75 75-76 76-77 77-78 78-79 79-80 80-81 81-82 82-83 83-84 84-85 85-86

1er cycle 48 56 54 112 220 269 256 214 180 140 133 144 118 107 97 76 2e cycle 21 21 27 30 28 36 46 52 61 59 52 3e cycle 2 8 5 11 11 15 19 24 19 19 23

temps complet

Total 48 56 54 112 220 292 285 246 221 179 184 209 194 187 175 151

1er cycle 6 10 20 18 23 17 26 24 36 26 26 24

2e cycle 17 27 28 43 42 21 25 29 29 33 17 16 20 19 20 15 3e cycle 2 6 6 5 5 10 5 6 6 6 5 6 5 8

temps partiel

Total 17 27 36 49 48 36 50 57 57 56 49 46 61 51 51 47

1er cycle 48 56 66 112 220 279 276 232 203 157 159 168 154 133 123 100

2e cycle 17 27 28 43 42 42 46 56 59 61 53 62 72 80 79 67 3e cycle 2 6 6 7 13 15 16 17 21 25 29 25 24 31

TOTAL

Total 65 83 90 161 268 328 335 303 278 235 233 255 255 238 226 198

10 Données obtenues auprès da bureau du Registraire de l'Université Laval 1915-1976 - 1985-1986 (le 21 octobre 1985). Les données sont pour le trimestre d'automne.

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[86]

Ce profil démographique n'est pas propre à l'anthropologie dans la mesure où, durant la même période, presque tous les autres départe-ments de notre Faculté ont connu une brusque croissance du nombre de leurs étudiants, suivie par une diminution marquée. Le Département des relations industrielles et celui des Science politique seraient les seuls, où n'existent pas de contingentement, à ne pas se conformer à ce profil-type. Notons, toutefois, que la croissance de l'anthropologie durant la quinquennie 1971-1976 fut plus accentuée que celle des au-tres unités pédagogiques en vertu du fait que les effectifs étudiants y étaient plus faibles au point de départ. Comme je le disais plus tôt, cette situation allait favoriser grandement les premiers professeurs en leur laissant plus de temps libre pour entreprendre des travaux de recherche.

Comment expliquer cette croissance dans les effectifs étudiants au début des années 1970, suivie d'un affaissement subit en 1978? Cette popularité pour l'anthropologie et les sciences sociales m'appa-raît liée d'une part à l'évolution des effectifs étudiants dans les CE-GEP, à une meilleure connaissance des sciences sociales et des champs d'application où les diplômés/ées peuvent oeuvrer et, en dernier lieu, dans le cas de l'anthropologie, à l'exotisme et à l'aventure qu'on at-tribuait à cette discipline. Mais cet engouement s'est affaissé brus-quement, dans le cas de l'anthropologie plus particulièrement, lors-qu'on se rendit compte des exigences académiques du programme et de l'incertitude des débouchés sur le marché du travail. Il est à re-marquer que l'étude, conduite sous l'égide de Simonis dans les années qui suivront, allait apporter des éclairages sur le marché de l'emploi pour les anthropologues et rectifier certaines fausses perceptions à ce sujet (Simonis 1982). Il faut plusieurs années de formation théori-que et d'expériences pratiques sur le terrain avant qu'une personne puisse acquérir la maturité nécessaire pour utiliser sciemment ses connaissances théoriques et son coffre à outil. D'autres facteurs, plus facilement identifiables, [87] ont pu exercer une influence sur les choix de carrière des étudiants/tes. Je pense, en particulier, au fait qu'à partir de l'automne 1974 on a supprimé du profil des prérequis pour l'inscription en sciences sociales les cours de mathématiques exi-

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gés jusque-là. Des facteurs aléatoires, impondérables, ont pu aussi jouer un certain rôle. Voyons comment ces changements dans les popu-lations étudiantes ont influé sur la taille du corps professoral.

Une augmentation proportionnelle du nombre des professeurs/res a suivi, avec un ou deux ans de retard, celle des effectifs étudiants (Voir, p. 98). Au moment de la départementalisation, il y avait cinq pos-tes à temps plein au département. Dans les quatre années subséquen-tes, le nombre de postes réguliers augmenta de huit et atteignit le niveau actuel de vingt-deux postes trois ans plus tard. Depuis ce temps, seuls les programmes d'étude attirant les masses étudiantes nouvellement inscrites et croissant à un rythme plus grand que celui de l'Université ont été en mesure d'obtenir des postes nouveaux. Comme l'indique Dorais, à la croissance du département a correspondu diffé-rents types d'aménagements administratifs

Sur le plan administratif, le département a connu plusieurs essais d'aménagement du cadre structurel imposé par l'Univer-sité. À partir de 1973, le grand nombre d'étudiants (plus de 200) ne permit plus la participation directe de tous à la vie dé-partementale, caractéristique des premières années de l'an-thropologie. Une solution originale fut trouvée : la nomination d'un, puis de deux directeurs-adjoints étudiants. Leur rôle d'in-termédiaire entre l'assemblée des professeurs et la masse étu-diante fut cependant jugé trop limité. En 1975-1976, on créa une Association des étudiants en anthropologie, afin de donner un poids plus décisionnel aux volontés étudiantes. Les postes de directeurs-adjoints disparurent. À l'automne 1976, on s'ache-minait vers la création d'un conseil départemental paritaire (professeurs et étudiants), mais la grève des professeurs et la signature d'une première Convention collective remirent en question le partage des pouvoirs. Les années qui suivirent furent caractérisées par le militantisme syndical et une certaine agita-tion de type politique, qui menèrent, entre autres, au retrait des étudiants de toutes [88] les instances (comité de program-me du premier cycle ; comité de programme des 2e et 3e cy-

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cles ; comité du laboratoire) auxquelles ils participaient déjà. (Dorais 1980: 4)

Il faudra quelques années avant le retour des étudiants/tes sur les comités de programme et c'est toujours un étudiant/te qui a présenté sa thèse de maîtrise ou qui s'affaire à sa rédaction qui remplit la fonction d'adjoint administratif au directeur. En dernier lieu, sur le plan des structures administratives, on peut mentionner que le Dépar-tement d'anthropologie a été un des tous premiers à établir des collè-ges électoraux (professeurs/res et étudiants/tes d'un côte et de l'autre, le personnel de soutien) pour procéder à l'élection du direc-teur ou de la directrice.

2. La conception du programme

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Comme je l'affirmais plus tôt, l'anthropologie fit son entrée au Dé-partement de sociologie de l'Université Laval à l'automne 1958 lorsque Tremblay offrit, pour la première fois, « Éléments d'anthropologie ». En 1961, à la suite de l'établissement d'un département d'anthropolo-gie à l'Université de Montréal, le Département de Laval est rebaptisé Département de sociologie et d'anthropologie. À ce moment-là, le pro-gramme est structuré de la manière suivante : (a) la première année d'inscription en est une de propédeutique et tous les étudiants/tes de la Faculté des Sciences sociales suivent les mêmes cours ; (b) à la se-conde année, les étudiants/tes entrent au Département de sociologie et d'anthropologie et reçoivent une formation commune, c'est-à-dire, qu'ils suivent les mêmes enseignements ; et (c) c'est seulement après deux années complètes d'études qu'ils s'inscrivent soit en sociologie ou en anthropologie. Par contre, sociologues et anthropologues conti-nuent de suivre certains cours de base en commun, même à ce niveau de spécialisation (Collectif 1970).

[89]

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L'année de propédeutique d'une année complète disparaîtra en 1965-1966 pour ne couvrir qu'un semestre seulement. Dans le cas du Département de sociologie et d'anthropologie, les étudiants/tes sui-vront des cours en commun durant les deux semestres suivants. C'est seulement au début du quatrième semestre d'inscription que l'étu-diant/te entrera de plein pied en anthropologie. Durant ses deux der-nières années de spécialisation (quatre semestres) l'anthropologue continuera a suivre des cours de base avec le sociologue. Ces cours de base en commun sont : Théorie sociologique générale, Histoire de la pensée sociologique et anthropologique, et Statistiques et Techniques de recherche. (Annuaire de la Faculté des Sciences sociales 1965-1966:26). En 1966-1967, la durée du baccalauréat sera ramenée à trois ans pour correspondre aux recommandations du Rapport Roy et dès la deuxième année d'inscription, les étudiants/tes opteront soit pour l'anthropologie ou la sociologie (Annuaire de la Faculté des Scien-ces sociales 1966-1967:40).

Voilà ce à quoi ressemblait le programme de cours durant l'année académique 1963-1964, tel qu'il apparaît dans l'Annuaire de la Faculté des Sciences sociales 1962-1963. La première année d'études compor-te des matières qui peuvent se répartir dans trois catégories : (a) les disciplines philosophiques et normatives (Conférences sur l'action so-ciale, Philosophie sociale et politique, Enseignement social de l'Église) ; (b) les sciences sociales positives (Sociologie I et II, Principes d'éco-nomie politique, Macro-économique, Évolution socio-politique de l'Occi-dent et Histoire des relations de travail I) ; et (c) l'initiation aux mé-thodes de recherche (Initiation au travail scientifique, Méthode sta-tistique et Mathématiques). La deuxième année est également une an-née commune, aux sociologues et aux anthropologues et elle favorise l'initiation des étudiants/tes à des disciplines de base utiles aux deux disciplines en plus d'offrir des cours plus proprement sociologiques ou anthropologiques. En sociologie, on offre les cours suivants : la Socio-logie [90] contemporaine, Séminaire de sociologie et Mouvements so-ciaux ; en anthropologie, Éléments d'anthropologie. Trois cours de psychologie sont offerts Psychologie générale, Psychologie clinique et Éléments de psychologie sociale. Les autres. cours sont centrés sur la recherche, soit : Techniques de recherche I, Statistiques : problèmes

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de mesure, Statistiques : analyse des relations, et Problèmes de re-cherche sur le Canada-français.

L'Option « anthropologie » (les deux dernières années) offre des cours qui se rapportent à la théorie sociologique (Théorie sociologique systématique, Sociologie et histoire des religions, Sociologie des rela-tions ethniques), a l'initiation à la linguistique (Les théories contempo-raines du langage, Introduction à la linguistique historique, Initiation a la linguistique générale, Phonétique générale et Linguistique descripti-ve), aux aires culturelles (Démographie et urbanisation des pays sous-développés, Géographie de l'Afrique, Ethnographie de l'Afrique fran-çaise, Systèmes politiques africains, et Ethnographie du Canada-français) et aux Techniques ethnographiques (Séminaire d'ethnogra-phie et Techniques de recherche il).

Comme ces cours de spécialisation s'offraient sur une base cycli-que, il était possible durant une année de concentrer sur une ou deux aires culturelles particulières et de rendre disponibles les cours sur les autres aires culturelles l'année suivante. Comme tous ces cours étaient obligatoires, il fallait que l'étudiant/te entreprenne ses étu-des au début d'une année académique, soit en septembre. C'était au tout début des enseignements anthropologiques. Si le curriculum était mince, les étudiants/tes avaient la possibilité, comme je l'ai signale, d'aller faire des études sur le terrain, cette expérience répétée com-blant en partie les lacunes structurelles du programme. Un analyse sommaire de l'Annuaire de la Faculté fait ressortir clairement qu'avec les années le nombre des cours [91] disponibles en anthropologie n'a cessé de croître avec la venue de nouveaux enseignant/tes. En contre-partie, on remarque qu'avec la croissance de l'équipe anthropologique, le nombre des invités, venant soit de la Faculté des Lettres ou de l'étranger, a diminué et que l'anthropologie cherchait à se distinguer et à se distancier de la sociologie. La rupture complète surviendra au moment de l'établissement du Département d'anthropologie en octo-bre 1970.

Tel que spécifié lors de sa création, le département a tou-jours centré ses activités pédagogiques sur l'enseignement de l'anthropologie sociale. Dès le début, le programme de premier

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cycle, qu'il s'agisse de la mineure, de la majeure ou du baccalau-réat spécialisé, fat conçu comme une introduction, plus ou zains approfondie selon le diplôme postulé, au fonctionnement des so-ciétés humaines. Cette introduction a toujours eu deux aspects complémentaires, l'un thématique, d'initiation aux différentes instances (économiques, politiques et idéologiques) de la struc-ture sociale, l'autre ethnographique, de prise de contact avec divers types de sociétés concrètes. Elle s'est accompagnée, la plupart du temps, d'une ouverture possible (grâce à des cours optionnels) sur d'autres champs de l'anthropologie : archéologie biologique, ethnolinguistique, ainsi que sur des disciplines auxi-liaires : démographie, muséologie, méthodes quantitatives, lan-gues amérindiennes (montagnais et inuit). Ce qui a pu varier, c'est l'éventail des cours contribuant à remplir cet objectif de base, ainsi que leur organisation. Dans les premières années, le petit nombre d'enseignants à plein temps (compensé, il est vrai, par l'engagement des professeurs invités et des chargés de cours) limitait, cela va de soi, la liste des enseignements offerts. À partir de 1973-1974, cependant, le choix de cours s'élargit beaucoup. Au point qu'on en arrive à une certaine anarchie, n'importe quel cours pouvant être suivi n'importe quand (certains s'inscrivaient même au cours d'intro-duction à l'anthropologie en troisième année du premier cycle seulement). C'est ce qui explique qu'à partir de 1975 on ait cherché à organiser l'enseignement de façon plus rationnelle, en établissant tout d'abord un « bloc d'introduction », qui devait être obligatoirement suivi pendant la première année. Les ré-flexions sur le programme de premier cycle se poursuivirent au cours des années suivantes, pour aboutir, en septembre 1980, à l'entrée en vigueur d'un « nouveau programme », composé de cinq modules obligatoires (quatre pour la majeure, complétés au baccalauréat spécialisé par dix cours optionnels),

[92]

Ces modules, dont chacun répond à un objectif spécifique, Sont les suivants : introduction générale ; introduction à l'an-

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thropologie sociale ; module thématique ; module théorique ; no-dule d'apprentissage pratique. Notons que ce dernier reprend une tradition (travaux pratiques et recherche sur le terrain dès le premier cycle) qui remonte à la fondation du département. D'abord individuelle, cette initiation à la recherche a été orga-nisée de façon collective à partir de 1977. Les études de deuxième et troisième cycles, qui existaient déjà au moment de la création du département, n'ont été orga-nisées de façon rigoureuse qu'à partir de 1974. Visant à la for-mation de chercheurs professionnels, elles se caractérisent par l'importance accordée aux travaux personnels de l'étudiant. C'est ainsi qu'une bonne partie des crédits octroyés suite à la rédaction d'un mémoire (maîtrise) ou d'une thèse (doctorat). Un comité tutorial (de deux ou trois personnes selon le cycle) assu-re l'encadrement du candidat. Notons que si les premières maî-trises en anthropologie ont été décernées bien avant 1970, le premier doctorat n'a été soutenu qu'en septembre 1979... Pres-que tous des mémoires et thèses ont été rédigés suite à une re-cherche originale sur le terrain (celui-ci étant obligatoire au doctorat). (Dorais 1980: 5-6)

Depuis que Dorais a rédigé cette synthèse sur le programme d'an-thropologie, deux changements majeurs sont survenus : l'un se rappor-te aux études de premier cycle et l'autre a trait au programme de se-cond cycle. Au premier cycle on a introduit des stages en deuxième année du cours pour permettre à ceux et celles qui désirent oeuvrer dans un champ de pratique particulier de choisir cette voie et d'obte-nir le type d'encadrement souhaitable tant dans l'institution ou le mi-lieu de pratique choisi qu'au département. Ces étudiants/tes peuvent, s'ils le désirent et s'ils rencontrent les exigences d'admission, s'ins-crire à un programme de type A au niveau de la maîtrise (c'est le deuxième changement adopté).

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Le cheminement de type À vise à former des praticiens de l'application des connaissances anthropologiques dans le domaine socio-culturel (Annuaire de la Faculté 1986-1987: 84)

[93]

... en permettant une formation sur les lieux mêmes où la pratique est susceptible de s'exercer et en favorisant une réflexion critique sur cette application. Cette dernière devient un critère d'importance dans l'évaluation des aptitudes du candidat ou de la candidate à trans-poser ses connaissances dans un contexte professionnel. Si nous éta-blissons un parallèle entre les personnes orientées en fonction de l'ac-tion et celles qui se dirigent vers la recherche, ces dernières sont in-vitées, dès leur deuxième année, à opter pour la voie recherche et à s'engager, dans le cadre d'une recherche en cours par l'un ou l'autre des professeurs/res, à entreprendre des démarches d'observation et d'analyse. Cet exercice doit donner lieu à la rédaction d'un rapport de recherche qui sert, dans un certain nombre de cas, aux travaux effec-tués dans le cadre d'une maîtrise en anthropologie de type B (orientée vers la recherche).

Les études de troisième cycle, pour leur part, conservent essentiel-lement les mêmes orientations que celles décrites plus tôt. Ce qui a changé depuis 1980, c'est le renforcement de l'encadrement accorde par le directeur ou la directrice de thèse et le comité de direction, ce qui suppose un suivi plus systématique des différentes démarches de l'étudiant/te d'une part, et l'obligation qu'il ou qu'elle a, d'autre part, de fournir des rapports semestriels sur les progrès accomplis durant les différentes phases de son cheminement académique. Le principal avantage dans le resserrement des modes de contrôle du progrès de l'étudiant/te se traduit dans une sécurisation de la démarche de re-cherche proprement dite et dans l'élimination des surprises au mo-ment du dépôt de la thèse doctorale. Un dernier changement, d'ordre pédagogique également, se rapporte aux différentes formules qui ont été utilisées jusqu'à maintenant dans l'organisation des séminaires de doctorat dans le but de déterminer avec une meilleure assurance celle qui permettrait d'assurer la meilleure qualité de formation anthropo-logique aux doctorants. Cette préoccupation a son importance puisque

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d'un côté, dans son plan de [94] développement, le département ac-corde une importance de plus en plus grande aux études avancées et tout particulièrement aux études doctorales et que de l'autre, un nombre croissant d'étudiants/tes entrant aux études doctorales pro-viennent d'autres institutions après avoir obtenu un diplôme de deuxième cycle en anthropologie ou dans une autre discipline des sciences humaines. Dans ce dernier cas, en particulier, le comité de programme du troisième cycle doit s'assurer que les exigences impo-sées avant l'entrée dans le programme doctoral proprement dit per-mettent un apprentissage satisfaisant aux perspectives théoriques et méthodes d'observation et d'analyse de l'anthropologie. Si ces exi-gences n'étaient pas par ailleurs respectées, nous exposerions les étudiants/tes concernés/ées à des difficultés quasi-insurmontables dans la réalisation de leurs objectifs personnels.

2.1 Le corps professoral et la répartition des tâches

2.1.1 Le corps professoral : ses débuts et son évolution

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Déjà au moment de la création du département, les qualifications académiques du corps professoral étaient de bonne qualité (en soi et par rapport aux autres départements de la Faculté). Ce fait n'est pas passé inaperçu aux yeux des rédacteurs du Mémoire soumis aux auto-rités compétentes au moment où l'anthropologie visait à se dissocier de la sociologie. Voici le passage qui y est consacré

Les qualifications académiques du corps professoral sont ex-cellentes et supérieures à celles de l'ensemble du corps profes-soral de la Faculté et de l'Université. Cinq professeurs sur six sont détenteurs de doctorats en anthropologie d'institutions aussi célèbres que la Sorbonne, la London School of Economic et

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Cornell University. Le sixième professeur a terminé sa scolarité doctorale et doit rédiger sa thèse durant la prochaine année. Cette réalisation est d'autant plus remarquable que les études doctorales en anthropologie sont longues, car elles nécessitent des études sur le terrain dans au moins une, sinon plusieurs so-ciétés. Les expériences nombreuses [95] et prolongées de ter-rain sont véritablement « la marque de commerce » des anthro-pologues. En cumulant les diverses expériences d'observation sur des terrains anthropologiques du corps professoral à plein temps et des assistants de recherche, nous obtenons respecti-vement 9 112 années et 6 années, soit un total de plus de quinze années d'expériences vécues scientifiquement dans diverses ci-vilisations situées dans l'une ou l'autre des trois aires culturel-les d'enseignement. (Collectif 1970: 9)

Ces expériences de recherche dans diverses civilisations du monde se sont poursuivies sensiblement selon les mêmes présupposés métho-dologiques et avec la même intensité avec l'accroissement du corps professoral, comme je l'ai documenté plus tôt dans la section traitant de la recherche dans les différentes aires de culture. Avec l'arrivée de nouvelles personnes, les trois aires culturelles de départ se sont consolidées. Mais il faut s'empresser d'ajouter que d'autres aires de civilisation sont en même temps devenues des champs privilégiés, à la fois pour les professeurs/res et les étudiants/tes. Cela ne veut pas dire que chacune de ces régions soit devenue de ce fait une aire cultu-relle de spécialisation. Comme on a pu le remarquer, au fur et à mesure que le corps professoral s'est élargi et que le département a consolidé ses assises, notre programme s'est plutôt orienté vers des grandes thématiques de recherche que les professeurs/res pouvaient appliquer dans l'aire de civilisation de leur choix. D'ailleurs, ces thèmes de re-cherche n'étaient pas exclusifs et tous les professeurs/res du dépar-tement n'étaient pas tenus/es de s'y intégrer. Ils furent établis pour souligner les points forts du département, pour mieux indiquer aux clientèles étudiantes les principaux intérêts de recherche des profes-seurs/res du département et pour définir avec un peu plus de préci-

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sion aux autorités universitaires les principaux pôles de développe-ment.

On se demande, peut-être, comment il se fait que cette tradition de recherche soit si fortement enracinée au département et [96] qu’elle se soit maintenue aussi solidement avec le temps, en dépit des restrictions budgétaires, des nouvelles obligations administratives des professeurs/res, et de contraintes de toutes sortes. Il est juste d'affirmer, il ne semble, que la survie de la discipline et la continuelle affirmation de sa spécificité sont ici en cause. Aux tout débuts de l'anthropologie, dans le cadre du Département de sociologie, les pre-miers anthropologues furent aidés dans leurs entreprises de recher-che par le faible nombre des inscriptions au programme d'anthropolo-gie, plus de temps pouvant être consacré à la recherche. Si ces pro-fesseurs avaient une charge d'enseignement plus lourde que celle d'aujourd'hui (jusqu'à dix et même douze heures/ semaine), ils n'étaient pas soumis aux mêmes règles qu'aujourd'hui dans leurs dé-marches pédagogiques et pouvaient, de ce fait, varier les expériences d'enseignement et de participation étudiante à leur gré. Ajoutons à cela que les premiers/ères étudiants/tes, peut-être un peu plus que ceux d'aujourd'hui, avaient le sentiment d'être des bâtisseurs et qu'ils étaient prêts à épauler le personnel enseignant dans tous les ef-forts que celui-ci consentait pour jeter les bases d'une tradition nou-velle. Il n'est pas exagéré de penser que cette conscience d'être des partenaires d'une aventure passionnante a permis à plusieurs de se rendre jusqu'au bout en dépit de circonstances pécuniaires plutôt ad-verses. Leur motivation d'alors ne s'est pas démentie avec le temps, puisque plusieurs d'entre eux/elles se sont taillés/ées des carrières enviables et sont devenus/es des personnes respectées dans leurs do-maines respectifs. Ils et elles ont été les principaux artisans/anes d'une meilleure compréhension de la société québécoise aux activités anthropologiques. Les étudiants/tes d'aujourd'hui, toutefois, ont à rencontrer d'autres défis sur le marché du travail en ce sens qu'il leur faut ouvrir d'autres secteurs d'application jusqu'alors fermés à l'an-thropologie. Afin de donner un meilleur aperçu du corps professoral qui a contribué à donner à notre département son visage actuel, il m'apparaît approprié de présenter la liste des professeurs/res régu-liers/ères [97] ayant enseigné, d'abord au Département de sociologie

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et d'anthropologie et, par après, au Département d'anthropologie en tant qu'entité administrative, autonome. Pour chacun des profes-seurs/res énumérés/ées, je fournis, le nom, l'année d'engagement, l'année de départ (s'il y a lieu) et quelques remarques se rapportant aux fonctions administratives internes.

[98]

Tremblay Marc-Adélard Collard Chantal 1956- 1974-1984 1969-1971 Vice-doyen à la recherche,

Faculté des Sciences socia-les

1970-1971 Directeur du Département d'anthropologie

1971-1979 Directeur, École des gra-dués

Doutreloux Albert Genest Sorge 1963-1969 1974- 1986-1989 Directeur du Départe-

ment d'anthropologie Schmitz Nancy 1966- 1983-1986 Directrice du Département

d'anthropologie

Charest Paul Chalifoux Jean-Jacques 1969- 1975- Beaucage Pierre Maranda Pierre 1968-1971 1975- 1989- Directeur du Départe-

ment d'anthropologie De Rohan-Csermak Gaza 1970-1972 Santerre Renaud Schwimmer Eric 1968- 1975- 1976-1980 Doyen, Faculté des Sciences

sociales

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Saladin d'Anglure Bernard Trudel François 1971- 1975- 1971-1974 :

Directeur du Département d'anthropologie

Breton Yvan Arcand Bernard 1971- 1976- 1974-1976 Directeur du Département

d'anthropologie

Bariteau Claude Mailhot Joué 1976- 1971-1972 Dorais Louis-Jacques Dagenais Huguette 1972- 1976- 1976-1978 Directeur du Département

d'anthropologie

Pothier Roger Elbaz Mikhaël 1972-1976 1976 Simonis Yvan Pilon-Lê Lise 1973- 1976- 1978-1981 Directeur du Département

d'anthropologie

Durand Pierre Gold Gerald L. 1977-1980 1974-1976 McNulty Gerald Labrecque Marie France 1974- 1977- 1981-1983 Directeur du Département

d'anthropologie

Couillard Marie-Andrée 1987-

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[99]

La qualité du corps professoral, a laquelle on faisait référence dans le Mémoire préconisant l'autonomie disciplinaire, s'est maintenue avec les années puisqu'en décembre 1987 dix-neuf professeurs/res sur les vingt-et-un en poste détiennent un doctorat, soit une proportion de 90%. Ce degré académique est devenu d'ailleurs une obligation pour quiconque envisage une carrière universitaire. Sept de ces doctorats ont été obtenus dans des universités canadiennes (3 à l'Université de Montréal, 2 à Laval, 1 à McGill et 1 à l'Université de la Colombie Bri-tannique) tandis que sept autres ont été obtenus dans des universités européennes (6 à Paris et 1 à Cambridge). Les autres détenteurs d'un doctorat l'ont obtenu dans cinq universités américaines différentes. Tout compte fait, cette répartition des docteurs/res entre les univer-sités européennes, américaines et canadiennes établit pour ainsi dire un équilibre entre les centres de la pensée anthropologique que sont l'Europe et les États-Unis et les universités périphériques du Québec et du Canada. D'autre part on peut y voir aussi, dans une certaine me-sure, la diversité des traditions qui ont alimenté les préoccupations théoriques et méthodologiques des professeurs/res du département dans leurs travaux de recherche et dans leurs écrits. Finalement, il n'est pas exagéré d'y voir jusqu'à quel point le Québec, en particulier, est au carrefour des traditions européennes et américaines en anthro-pologie : cette position épistémologique n'est certes pas étrangère au genre d'anthropologie qui s'y pratique et des particularismes qui s'y reflètent (Gold 1987). Sur le plan des perspectives théoriques, bien que le structuralisme et le matérialisme historique aient occupé une place de choix dans l'enseignement et les travaux empiriques de plu-sieurs professeurs/res, on retrouve dans les pratiques anthropologi-ques de l'ensemble du corps professoral l'éventail presque complet des perspectives théoriques maintenant en usage dans cette discipline (le modèle écologique, les études féministes, les études ethnohistori-ques, l'approche symbolique et sémiotique, la perspective systémique, entre autres).

[100]

La fonction de direction, comme il apparaît dans la liste présentée ci-devant, est considérée comme une fonction rotative puisque, après

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seize ans d'existence en tant qu'unité administrative autonome, nous en sommes à notre huitième titulaire. Chaque membre du corps pro-fessoral est appelé, en principe, à assumer cette tâche à un moment ou l'autre de sa carrière s'il en a les dispositions et le goût. D'après les Statuts de l'Université, le directeur d'une unité pédagogique est nome à la suite d'une consultation menée auprès des différentes composan-tes de l'unité concernée par un comité spécialement nome à cet effet. Dans la pratique, toutefois, comme nous l'avons vu plus tôt, le titulaire dans notre département est élu par trois collèges électoraux, soit ce-lui des professeurs/res, celui des étudiants/tes et celui du personnel de soutien. Il doit obtenir la majorité des voix dans chacun de ceux-ci pour qu'une recommandation positive soit acheminée auprès du comité consultatif officiel chargé de faire rapport au Conseil de l'Université. La direction départementale comporte un supplément administratif qui est plus que symbolique si l'on considère l'ensemble des tâches à as-sumer. A vrai dire, ceux et celle qui ont consenti jusqu'à maintenant à assumer cette charge l'ont fait dans le but de servir la communauté anthropologique (administration courante) et d'en surveiller les inté-rêts auprès des instances supérieures (faculté, rectorat). Comme on le voit, dans les universités francophones cette fonction est très diffé-rente de celle qui y est exercée dans les universités anglophones. D'ailleurs cette fonction comporte des variantes à l'intérieur des uni-versités francophones elles-mêmes : je pense à celles qui existent à Laval entre les sciences fondamentales et naturelles et les sciences humaines. Dans ces dernières, même depuis la syndicalisation des pro-fesseurs/res en 1976, la direction d'une unité d'enseignement et de recherche (autrefois, unité pédagogique et administrative) en est bien plus une de coordination et d'animation que d'administration. Par rap-port à la Convention collective, le titulaire de cette fonction de direc-tion [101] ne fait pas partie de l'unité syndicale. Mais il n'est pas un administrateur dans le sens où il prend toutes les décisions se rappor-tant à l'unité sans avoir à tenir des consultations préalables, ou s'il en tient, sans être tenu de les endosser obligatoirement. Dans notre dé-partement, en effet, ces décisions de la direction sans consultation préalable, ou à la suite d'une consultation, mais sans la respecter com-plètement, sont des cas exceptionnels et justifiables. Les réunions de l'UER, dans la pratique, donnent lieu à des prises de position qui se

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traduisent habituellement dans des pratiques quotidiennes. En ce sens, elle est une instance quasi-décisionnelle. À ce niveau, tous les sujets d'importance y sont largement débattus à l'occasion de nombreuses réunions épisodiques. Les étudiants/tes, pour leur part, ont leurs pro-pres structures de participation et les décisions qui y sont prises sont acheminées a la direction du département. Les tentatives pour établir et faire fonctionner sur une base régulière une assemblée départe-mentale, constituée de toutes les composantes de l'unité, n'ont pas obtenu jusqu'à maintenant de succès. Nous en sommes encore au stage des essais. Par contre il existe au département des comités mixtes (les comités de programme, le comité du Laboratoire, le comité des orientations, etc.) qui, dans les dernières années en tout cas, ont assez bien fonctionné.

Une des fonctions importantes de la direction du département est de distribuer la charge de travail des professeurs/res d'une manière équitable. Dans notre département, cette opération a toujours donné lieu à de nombreuses réunions et discussions, se rapportant tout au-tant aux fondements et principes de la répartition entre les membres du département de l'ensemble des responsabilités académiques et ad-ministratives à assumer qu'à l'assignation proprement dite des tâches à chacun des membres de l'unité. Ces deux questions qui ont alimenté les débats depuis une décennie (principes de la répartition et charge de travail) ont donné lieu à l'établissement [102] de comités spéciaux visant à mieux définir les principes à prendre en ligne de compte, la méthodologie a adopter pour obtenir une répartition de nature équita-ble et les instruments de mesure à utiliser pour apprécier le plus jus-tement possible les efforts de chaque membre qui sont arrimés aux responsabilités proprement dites de l'unité. L'avant-dernier de ces comités, le comité Maranda, a produit une grille d'analyse fort inté-ressante : celle-ci, toutefois, n'a pas suscité de consensus. Le dernier comité, le comité Arcand, vient à peine de soumettre son rapport. Nous en sommes toujours a la recherche de la grille d'analyse qui tien-drait compte de tous les éléments en prendre en considération. Entre-temps, l'unité doit assumer ses responsabilités et les professeurs/res doivent s'entendre, en suscitant le moins de heurts possibles, et as-sumer effectivement une charge qui n'apparaît toujours de plus en plus lourde. Le ou la responsable du département est le/la principal/e

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maître-d'oeuvre de cette délicate opération annuelle. En l'absence de positions claires de la part de l'Assemblée des professeurs/res au moment de la consultation, la personne responsable doit prendre des décisions, non sans avoir pris en considération, les desiderata du/de la professeur/re concerné/ée. Si celui-ci ou celle-ci n'est pas d'accord, il existe des recours de nature légale bien définis dans la Convention collective entre le Syndicat des Professeurs de l'Université Laval (le SPUL) et l'Administration de l'Université.

En consultant les données sur l'arrivée des professeurs/res au Dé-partement, on remarque que douze sont venus/es entre 1974 et 1977 et que durant une décennie, soit de 1977 à 1986, nous avons perdu un poste a la suite d'un départ. Durant cette période, il n'y eut donc au-cun sang nouveau : ce constat n'a peut-être pas encore posé de pro-blème sur le plan de la continuité dans le renouvellement des effectifs ni sur celui d'un meilleur équilibre dans la pyramide des âges, puisque le département est relativement jeune. En plus [103] longue période, toutefois, cela peut entraîner des conséquences graves, à la fois par rapport au rajeunissement du corps professoral et a son remplacement par des effectifs de qualité sans avoir a importer, comme ce fut le cas dans les années cinquante et soixante, des professeurs européens et américains."

En 1987, une jeune docteure, (Marie-Andrée Couillard) est venue combler un poste laissé vacant par un départ récent. Cela n'est pas suffisant pour assurer l'équilibre auquel je référais plus tôt. D'ail-leurs, de ce point de vue (le renouvellement de postes laissés vacants), l'anthropologie est dans une situation quelque peu vulnérable étant donné que le critère fondamental qui sert à l'attribution de nouveaux postes ne nous avantage pas puisque nous jouissons d'un ratio profes-seurs/res-étudiants/tes qui nous disqualifie, puisqu'il s'établit a peu près à un sur dix. Cette situation, sous l'administration du doyen Beaudoin, a donné lieu à de vifs débats ainsi qu'à des manifestations visant à empêcher le transfert de postes. Le discours de l'anthropolo-gie a toujours été le même, dans ces situations vues comme des contestations par les administrateurs universitaires mais considérées par nous comme des gestes de défense du statut véritable de « pro-fesseur d'université ». Quant à nous, l'outil utilisé pour mesurer la

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charge de travail du « professeur d'université » reposait sur une conception cégépienne de cette institution supérieure. On tient comp-te de la fonction enseignement et on néglige de prendre en considéra-tion la fonction recherche. Pourtant, c'est bien cette fonction qui fonde sa spécificité et assure sa raison d'être. L'anthropologie s'ap-puya donc sur cette prémisse pour mener sa lutte en vue de conserver ses postes même s'il y avait eu une diminution substantielle dans le nombre des personnes inscrits/es a ce programme d'études et que le ratio de l'anthropologie était nettement en-dessous de la moyenne du ratio facultaire. On jugeait, en effet, qu'il fallait accentuer les ef-forts de recherche (de ce point de vue l'anthropologie n'avait [104] rien a envier a d'autres programmes d'études facultaires) et qu'il fal-lait augmenter les inscriptions aux cycles de l'enseignement supérieur et accorder aux doctorants/tes un encadrement plus rigoureux. Ces orientations anthropologiques, à notre point de vue, compensaient am-plement le déficit des inscriptions au niveau du premier cycle. L'élec-tion du doyen Laforge en 1984 transforma le débat et l'anthropologie fut en mesure de conserver ses postes : elle avait réussi a faire la dé-monstration de l'importance de la recherche dans la comptabilisation des éléments constituant la charge professorale. La lutte n'est cepen-dant pas terminée puisque ce ratio traditionnel, et plus spécifiquement les « crédits-étudiants », demeurent le critère de base dans le finan-cement, par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, des universités québécoises. Ces considérations nous amènent naturel-lement à discuter des clientèles étudiantes au Département d'anthro-pologie, depuis ses débuts durant l'année académique 1970-1971.

3. Les clientèles étudiantes

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Dans cette section sur les clientèles étudiantes au Département d'anthropologie, je présenterai des données sur trois aspects diffé-rents : a) l'évolution des effectifs étudiants de 1970 à 1985 ; b) l'As-sociation des étudiants en anthropologie ; et c) la recherche par les étudiants au département.

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3.1. L'évolution dans les effectifs étudiants en anthropologie de 1970-1985

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En s'appuyant sur les données statistiques, rendant compte de l'évolution des effectifs étudiants, fournies par le registraire de l'Université à compter des années 1975-1976 jusqu'à 1985-1986 et sur celles compilées par le département avant cette date, un certain nombre de tendances émergent (Cf. : Tableau 1). En tout premier [105] lieu, dès que l'anthropologie se dissocia de la sociologie, le nombre de personnes qui s'inscrivirent au département s'est accru continuelle-ment jusqu'en 1976-1977 pour atteindre à ce moment-là le plus haut niveau d'inscription de son histoire, soit 335. Le taux d'accroissement fut de l'ordre de 15% à peu près durant les trois premières années, mais s'accentua rapidement par après pour être en 1973-1974 de l'or-dre de 44%, et en 1974-1975, de 40%. Par après, ce taux de croissan-ce s'affaissa à 18% en 1975-1976 et à 2% en 1976-1977, l'année du sommet. Par après, commença la décroissance graduelle jusqu'en 1985-1986 où les effectifs étudiants se stabilisèrent à 200 a peu près. Ce chiffre n'a rien d'affolant : il représente fort probablement une sur-production par rapport aux besoins réels du marché du travail. Ce ni-veau de besoin du marché du travail est un concept difficile à préciser dans des termes concrets puisque les indicateurs sur lesquels toute mesure se baserait seraient fort discutables selon les divers points de vue en présence. Si on examine cette question en se référant aux pos-tes traditionnels de l'anthropologie (enseignement, recherche, muséo-logie), il est certain qu'en ce moment les postes permanents dans ces domaines sont rares : pour autant le nombre de diplômés entrant sur le marché du travail à chaque année risque de surpasser la demande. Si par contre, on affiche un optimisme par rapport à l'avenir de l'anthro-pologie en tant que science-carrefour dans un très grand nombre d'équipes interdisciplinaires oeuvrant tout autant en recherche qu'en intervention dans un grand nombre de situations-problèmes, alors on réalise que les besoins sont nombreux et que nous réussissons à peine à diplômer les effectifs nécessaires pour combler ces besoins. Si, au

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lieu de se placer à l'une ou l'autre des extrémités de ce continuum « des besoins d'anthropologues sur le marché du travail » on se situe plus au centre, on réalise que nous sommes en train de former des candidats/tes capables de dénicher des postes nouveaux sur le marché du travail comme de devenir des éléments de relève dans les postes traditionnels où il existe des ouvertures.

[106]

Si on examine ces statistiques de plus près, cependant, on y relève, en second lieu, deux tendances qui n'apparaissent exercer des influen-ces importantes tant pour l'avenir du Département d'anthropologie par rapport à une vocation recherche qui s'affirme de plus en plus et par rapport à une ouverture de plus en plus confirmée pour un appren-tissage des étudiants/tes de deuxième cycle à l'intervention que pour l'avenir de l'anthropologie en tant que discipline académique et en tant que profession davantage orientée vers l'action et l'intervention. La première tendance à observer dans la courbe des effectifs, c'est qu'au fur et à mesure que le nombre des étudiants/tes du premier cy-cle s'est affaissé à compter de 1976-1977, a l'inverse le nombre des étudiants/tes du deuxième et du troisième cycles s'est accru. Cette croissance est plus forte au troisième cycle qu'au second. Les étu-diants/tes du troisième cycle sont passés de 13 à 31 sur une période de dix ans tandis que les effectifs du niveau maîtrise, durant l'a même période, ont évolué de 46 à 67. Pour mieux saisir la signification de cette évolution vers les études de troisième cycle, il faut se référer à plusieurs facteurs. L'un d'entre eux est la volonté politique de l'Uni-versité Laval et du département d'augmenter le nombre des candi-dats/tes à ce niveau pour mieux assurer le progrès de la recherche et des études supérieures à l'Université et ainsi justifier, avec plus de poids auprès des bailleurs de fonds, la qualité des études à Laval. Tou-tes les universités francophones du Québec sont en compétition entre elles pour se classer, en utilisant les indicateurs d'excellence, le mieux possible et ainsi attirer les meilleurs/res étudiants/tes. Un autre fac-teur a été la capacité de certains professeurs/res du département d'attirer des clientèles nouvelles ayant soit une formation en anthro-pologie ou dans une autre discipline, parfois même en provenance d'au-tres pays, pour s'inscrire au doctorat en anthropologie à Laval. Notre

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département étant celui qui, au Canada, a la plus forte concentration de professeurs en anthropologie sociale et culturelle, il n'est pas étonnant que [107] certains étudiants y sentent un attrait. Ajoutons à cela que nous sommes reconnus dans certains secteurs de spécialisa-tion (études amérindiennes et inuit, par exemple). Un dernier facteur se rapporte au fait que le doctorat est devenu sans contredit le diplô-me essentiel pour entreprendre une carrière de recherche à l'Univer-sité, dans un centre de recherche ou dans le secteur privé. La maîtrise demeure toujours un diplôme qui permet d'une part de se considérer comme anthropologue et, d'autre part, de se trouver un poste d'inté-rêt sur le marché du travail. Il y a sûrement d'autres facteurs qui ont amené l'un ou l'autre de nos doctorants/tes à choisir Laval plutôt qu'une autre université, mais ils n'ont pas le poids de ceux que je viens d'énoncer.

Du côté de la maîtrise, depuis une couple d'années, nous offrons un programme ayant une concentration du côté de l'application des connaissances anthropologiques à la solution de problèmes et à l'inter-vention. Les champs de pratique sont fort nombreux où l'anthropolo-gue a quelque chose d'original à proposer. Je pense, en particulier, au champ de la santé, y compris celui de la santé et de la sécurité au tra-vail, à celui de l'ethnicité et des minorités ethnoculturelles, à celui des groupes volontaires et de ceux qui se situent à la marge des instances officielles visant à défendre les intérêts des défavorisés et laissés pour compte, à celui de la réadaptation sociale et de la réinsertion dans les milieux naturels de vie, à celui de l'éducation et à combien d'autres encore. Voilà, je crois, qui constitue des horizons nouveaux à explorer et à investir d'une expertise nécessaire.

Une deuxième tendance, qui n'apparaît pas au tableau comme tel mais qui a un grande importance pour l'avenir de la discipline, concerne les rapports entre les effectifs masculins et féminins au département. Depuis 1975-1976, les femmes surpassent en nombre les hommes. Cet-te disproportion s'accentue légèrement à chaque année [108] durant la décennie pour devenir au niveau de la maîtrise le rapport suivant : 1.8 femmes pour un homme en 1985-1986. Au doctorat, on observe une tendance similaire mais elle est plus récente. En effet c'est seulement depuis 1984-1985 que le nombre des femmes surpasse celui des hom-

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mes, soit 13 femmes pour 11 hommes. L'année suivante, il y avait 1.6 femmes pour 1 homme. J'ai l'impression que c'est une tendance qui va se maintenir sinon s'affirmer encore davantage. Si on examine les chiffres sous cet angle aux études de deuxième cycle, on se rend compte que l'année 1975-1976, à ce niveau-là aussi, constitue un tour-nant et que les femmes, pour la première fois, surpassent les homes en nombre, soit 22 contre 20. Durant la décennie qui suit, cette tendance se confirme et s'accentue puisqu'en 1985-1986 on retrouve 1.8 fem-mes pour 1.0 homme. Ces données chiffrées ont tendance à illustrer que les filles ont la même persévérance scolaire que les garçons au ni-veau de la maîtrise à tout le moins puisqu'à ce niveau elles réussissent à maintenir le ratio qui existe au premier cycle. Elles ont, par ailleurs, été plus lentes que les garçons à s'affirmer au niveau des études de troisième cycle. Cependant depuis trois ans elles appartiennent à ce niveau à la catégorie numériquement la plus nombreuse et rien ne lais-se présager qu'il y aura un renversement de cette tendance dans les années à venir.

La féminisation de la discipline à Laval n'est pas singulière puisque je crois comprendre que des tendances analogues se manifestent dans les départements d'anthropologie nord-américains. Elle aura un impact sur la discipline de plus d'une manière. Ces jeunes docteures seront, dans les années à venir, de sérieuses concurrentes pour l'obtention de postes sur le marché du travail en général et a l'Université en particu-lier. Les études anthropologiques elles-mêmes vont acquérir une teinte nouvelle, pas uniquement dans le sens que les études sur les femmes vont devenir plus importantes mais aussi et surtout dans le sens que les études effectuées par les femmes comportent une sensibilité dif-férente de celle de leurs confrères. [109] L'anthropologie, qui avait été jusqu'à maintenant une science occidentale (en train de se désoc-cidentaliser), une science de colonisateurs (en train de fleurir dans des lieux périphériques qui n'ont pas de tradition impérialiste) et une science d'hommes (bien qu'il y ait eu dans le passé des anthropologues féminins qui ont fait leur marque) est en passe de subir deux autres mutations profondes. La première se rapporte à la féminisation de la profession ; la seconde, à l'orientation de plus en plus prononcée vers l'étude de nos propres sociétés, au lieu de concentrer tous nos ef-forts sur des sociétés éloignées très différentes des nôtres sur les

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plans de leurs histoires, de leurs systèmes symboliques, de leurs structures et de leurs organisations sociales. Cette quadruple trans-formation est évidement en cours : elle représente le défi majeur de celles et ceux qui demain chausseront nos souliers.

Les données historiques sur les « crédits étudiants », apparaissant au Tableau 2, (p. 111) fournissent les chiffres pour les années s'éche-lonnant de 1973-1974 à 1985-1986. On remarque que ces « crédits étudiants » qui accordent une importance primordiale à l'enseigne-ment, évoluent en fonction des clientèles étudiantes. Plus il y a d'étu-diants/tes prenant des cours en anthropologie, plus grand est le nom-bre de crédits accordés à notre département. C'est un critère qui nous désavantage comme l'a si bien démontré notre collègue Santerre dans plusieurs mémoires qu'il a rédigés à ce sujet. Tenons-nous en aux données officielles puisque mon commentaire doit porter sur elles. Il faut remarquer qu'en 1973-1974 ces crédits totalisent 4 831. C'est sur cette base que sont allouées les ressources départementales, c'est-à-dire, le nombre de postes de professeurs/res, le personnel de soutien, les subventions internes de recherche, l'allocation des espa-ces et le budget de fonctionnement du département. Ces « crédits étudiants » ont atteint leur plus haut niveau en 1975-1976, soit près de dix mille. Il est à remarquer que c'est durant ces années (le milieu des années soixante-dix) [110] qu'ont été recrutés plusieurs collègues de notre unité. Dans les deux années suivantes, le nombre des « cré-dits étudiants » descend a huit mille à peu près et la baisse continue régulièrement par après et suit assez fidèlement la courbe de la dé-croissance des effectifs étudiants. Il semble que le nombre de ces crédits se soit stabilisé à 6 500 à peu près ces dernières années. Si on compare ce niveau de rendement de notre unité pédagogique aux au-tres unités pédagogiques de la Faculté et que la comparaison s'effec-tue à partir d'un dénominateur commun (le nombre de « crédits étu-diants » divisé par le nombre de « professeurs réguliers » on se rend compte que notre département se situe nettement en bas de la moyenne facultaire. Est-ce que cela veut dire que les professeurs/res d'anthropologie ont une faible productivité? Bien au contraire! L'in-terprétation à donner à cette mesure, en dépit de ses lacunes indénia-bles, est que le département possède un abondance de ressources lorsqu'il est comparé aux autres départements. Mais les revendica-

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tions qui ont été faites par notre unité à ce sujet ont porté fruit : en effet, il est admis, au niveau de la direction de la Faculté, qu'une unité pédagogique puisse conserver ses ressources, même si celles-ci sont abondantes (en termes relatifs), en autant que celles-ci servent à des fonctions proprement universitaires, c'est-à-dire, la recherche, la pu-blication, l'encadrement des étudiants/tes des cycles supérieurs et ainsi du reste.

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Année 1er cycle 2e et cours

3e Re-cherche

cycles sous-total

Total trimes-

triel

1er cycle 2e et cours

3e Re-cherche

cycles sous-total

Total trimes-

triel

1er cycle 2e et cours

3e Re-cherche

cycles sous-total

Total trimes-

triel

Total annuel

1973-74 1 884 114 114 1 998 2 559 78 196 214 2 833 4 831 1974-75 3 71 71 74 3 687 144 131 275 3 962 3 837 158 221 379 4 216 8 252 1975-76 48 48 48 4 497 170 230 400 4 897 4 485 141 266 407 4 892 9 837 1976-77 6 5 57 62 68 4 128 135 273 408 4 536 3 000 107 222 329 3 329 7 933 1971-78 6 32 32 38 3 552 171 345 516 4 068 3 420 239 292 531 3 951 8 057 1978-79 18 18 20 38 « 56 3 333 194 417 611 3 944 3 147 254 299 563 3 700 7 700 1979-80 36 3 102 105 135 2 844 275 315 590 3 434 2 796 271 380 651 3 447 7 016 1980-81 21 18 151 169 190 2 916 237 423 660 3 576 3 018 240 455 695 3 713 7 479 1981-82 27 18 125 143 170 2 112 288 510 798 3 510 2 496 207 647 854 3 356 7 030 1982-83 75 16 254 272 347 2 550 324 673 997 3 547 2 340 303 716 1019 3 359 7 253 1983-84 402 24 410 434 836 2 406 240 753 993 3 399 2 004 303 738 1 041 3 045 7 280 1984-85 237 12 339 351 588 2 304 264 725 989 3 293 1 731 234 751 985 2 716 6 597 1985-86 552 15 451 466 1 018 2 127 297 658 955 3 882 2 196 234

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tableau 1: Domaines historiques sur les crédits étudiants en anthropologie 11

[111]

11 Données obtenues auprès du burent du registraire de l'Université Laval le 21 octobre 1985.

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[112]

3.2 L'Association des étudiants/tes en anthropologie

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Cette association existe depuis la fondation du département. Aupa-ravant les étudiants/tes de la Section d'anthropologie du Départe-ment de sociologie et d'anthropologie se réunissaient à l'occasion pour des fins bien précises, reliées la plupart du temps à des revendications particulières. Dès cette époque, en tant que groupe, ils et elles ont pris une part active dans les stratégies aises en place en vue d'obtenir un statut d'autonomie pour la Section. Depuis l'établissement d'un département d'anthropologie, l'Association des étudiants/tes en an-thropologie, jusqu'à son incorporation le 12 juin 1985, a toujours exis-té en tant que formule de regroupement ad hoc et elle tenait des ré-unions seulement quand le besoin s'en faisait sentir. C'est ainsi qu'elle devenait active surtout dans les moments de crise, que ceux-ci soient de nature pédagogique (cours : contenu, modes de contrôle, échéan-ces), de nature démocratique (participation active des étudiants/tes dans la direction du département et sur les comités de programme), ou encore de nature politique (revendications auprès du Gouvernement du Québec, (l'accessibilité des étudiants/tes à l'université quel que soit le niveau de fortune de leurs parents ou tuteurs, les bourses d'étude, le régime des impôts, etc.) et des plus hautes instances de l'Université (décanat et rectorat) pour l'obtention de ressources et de locaux. A ces occasions, l'exécutif de l'Association tenait des assemblées spé-ciales à l'occasion desquelles les sujets en litige étaient discutés. On prenait alors les décisions qui s'imposaient dans les circonstances et on les transmettait aux instances concernées. Cet exécutif était élu, selon les dispositions et volonté du moment. D'ailleurs, il changeait d'année en année et manquait de continuité et de rigueur dans ses ac-tions. A certains moments, l'action de l'Association était ambiguë à ce point que l'on pouvait à juste titre se demander quels étaient les ob-jectifs visés par une action particulière. En dehors des moments de crise, [113] l'Association existait nominalement mais n'avait à peu près

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aucune manifestation, à l'exception peut-être de soirées sociales et d'activités de loisirs organisés. C'est sans doute dans le but de corri-ger ces faiblesses et de devenir une organisation agissante qui aurait une action continue que l'Association des étudiants/tes de l'Université Laval Inc. est devenue une réalité juridique en vertu de la Loi sur les Compagnies, Partie III.

La démarche d'incorporation de l'Association a nécessité l'élabora-tion d'objectifs précis qui sont d'ailleurs clairement énoncés dans l'acte d'incorporation. Il m'apparaît nécessaire de les énumérer :

a) assurer aux étudiants/tes du Département d'anthropologie de l'Université Laval un organisme pouvant les représenter et dé-fendre leurs droits et intérêts ;

b) coordonner et soutenir les activités et organisations des étu-diants/tes du Département d'anthropologie ;

c) assurer une information adéquate aux étudiants/tes et aux gens du milieu ;

d) recevoir les griefs des étudiants/tes et les représenter devant les instances ;

e) s'occuper de l'organisation d'activités sociales, sportives et académiques au bénéfice des étudiants/tes du programme d'an-thropologie ; et

f) offrir divers services à l'usage général des étudiants/tes du programme d'anthropologie.

Les requérants/tes, c'est-à-dire, ceux et celles qui ont présenté une requête pour constitution en corporation et mémoire des conven-tions, furent Mark Prentice, Sylvain Marcotte, André Massicotte, Ma-non Boulianne, Josée Thivierge, Christine Veilleux, Karen Dorion-Coupal, Johanne Robinson et Isabelle Bergeron. Pour des raisons que j'ignore, mais qui sont probablement reliées à des [114] aspects tech-niques de la requête (oubli de mots dans les objectifs, par exemple) d'autres représentants/tes de l'Association projetée eurent à sou-mettre une nouvelle requête ayant les mêmes objectifs qui fut asser-

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mentée cette fois par un nouveau commissaire à l'assermentation (Da-ny Daigle, le précédent étant Liliane Chabot) sous le numéro 91 732 (en remplacement de 91 563) dans le district judiciaire de Québec, le quatorzième jour de novembre 1985. Les seules requérantes aux deux démarches d'incorporation furent Isabelle Bergeron et Christine Veil-leux : cela est dû, j'imagine, au remplacement d'un exécutif par un au-tre au début d'une nouvelle année académique.

Depuis l'incorporation, l'Association des étudiants et étudiantes en anthropologie de l'Université Laval a suivi des règles de fonctionne-ment mieux définies et s'est assurée d'une plus grande continuité dans ses orientations et actions. Par exemple, son exécutif se réunit à des intervalles réguliers ; l'assemblée générale de ses membres est convoquée une fois par session et on tient des assemblées spéciales, au besoin. L'action principale de l'Association se rapporte aux aspects pédagogiques. C'est ainsi qu'à chaque trimestre, on procède à l'évalua-tion des cours en utilisant un instrument d'évaluation qui a été perfec-tionné à l'usage répété. On s'assure que chaque enseignant/te, au dé-but de chaque trimestre, présente un syllabus détaillé de son cours ou séminaire qui devient en quelque sorte l'élément principal qui fonde le contrat pédagogique entre le/la professeur/e et l'étudiant/e et on s'intéresse à ce que l'apprentissage auquel ses membres sont soumis est adéquat et de qualité. L'Association voit encore à nommer ses re-présentants/tes sur les trois comités de programme (du premier, du second et du troisième cycles) et ceux-ci ou celles-ci font rapport à l'occasion de réunions de l'Association ainsi que sur le comité du Labo-ratoire et tout autre comité ayant des aspects pédagogiques ou admi-nistratifs. Enfin, l'exécutif de l'Association voit à ce que le départe-ment [115] offre des services pédagogiques de bonne qualité (salle de lecture, salle d'informatique, salle de documentation, services de re-prographie, etc.).

Les actions de l'Association débordent les aspects pédagogiques et celles-ci sont habituellement en relation avec les préoccupations étu-diantes sur tout campus universitaire. Ces dernières varient selon les années en fonction des revendications étudiantes du moment.

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3.3. Les champs de recherche des étudiants/es

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J'ai documenté plus tôt l'ensemble des recherches empiriques des professeurs/res du département sans toutefois mettre suffisamment en relief la contribution étudiante à ces travaux. D'ailleurs ils entre-prennent, dans certaines circonstances, des travaux qui, tout en étant sous la direction d'un/e professeur/re (habituellement le directeur de thèse), ne font pas à proprement parler partie de son programme de recherche. Bien que la liste des thèses ne soit pas l'outil qui tienne compte de tous les travaux de recherche que les étudiants/tes d'an-thropologie aient effectués au département, elle est d'une grande ri-chesse d'information quant à la diversité des thématiques étudiées et quant aux lieux où ces études ont été effectuées. Elle est encore si-gnificative du fait qu'elle représente les travaux les plus significatifs que les étudiants/tes aient effectués durant leur passage à Laval (Cf. : La liste des thèses à l'Annexe 1).

Les premières thèses d'anthropologie furent produites en 1962 : aussi tiendrais-je compte de la période 1962-1986 pour présenter ce profil des recherches étudiantes. Mais avant d'entrer dans le cœur du sujet, il est un témoignage qui doit être rendu à l'adresse des diverses générations d'étudiants/es qui se sont succédées [116] depuis ce quart de siècle. Au tout début de l'anthropologie, au moment où les profes-seurs/res d'anthropologie oeuvraient dans un nombre d'aires culturel-les limitées (Amérique du Nord, Afrique noire francophone, Aire lati-no-américaine) les étudiants/tes, en tant qu'assistants/tes de recher-che, ont permis la réalisation d'études importantes ainsi que le renou-vellement des subventions de recherche facilitant d'autant la conti-nuation de ces études lesquelles ont largement contribue à établir le sérieux de l'autonomie disciplinaire. Plus tard, une fois cette autono-mie accordée, ces recherches étudiantes, au niveau des cycles supé-rieurs surtout, ont consolidé ces acquis en appuyant l'équipe professo-rale dans ses travaux de recherche et ont permis, par les intérêts constamment renouvelés qu'elles manifestaient, à ouvrir de nouveaux champs de prospection et a élargir la vocation géo-politique du dépar-

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tement. Ce sont là deux contributions majeures qui font abstraction de celles reliées aux renouvellements conceptuels et méthodologiques qu'elles ont suscitées chez les enseignants/es du programme anthro-pologique. Si on se sert des titres des thèses 12 pour concevoir des descripteurs généraux qui les caractérisent et qu'on classe les élé-ments que ces titres traduisent par l'usage de deux et parfois trois descripteurs on obtient une image générale des champs de recherche les plus populaires des étudiants en anthropologie. Trois champs de recherche ont attiré les étudiants/tes au niveau de la maîtrise : l'an-thropologie économique (36 mentions), l'anthropologie politique (24 mentions) et l'ethnologie (16 mentions). D'autres champs ont été l'ob-jet des préférences d'un certain nombre d'étudiants/tes : la parenté, les idéologies, les rapports hommes-femmes, le champ de la santé et du vieillissement. Au niveau du doctorat, c'est le champ de l'anthropo-logie économique qui surpasse tous les autres (5 mentions). Les autres champs de recherche faisant l'objet de préférences, à l'exception de l'anthropologie politique et de [117] l'ethnomusicologie qui reçoivent deux mentions, n'obtiennent qu'une seule mention.

Si on examine maintenant les groupes et les lieux où se sont effec-tués ces travaux de recherche en vue de l'obtention d'une maîtrise, on se rend compte que le Québec français appartient à une catégorie à part (49 mentions). Viennent ensuite sur un pied d'égalité les Inuit et les Amérindiens (15 mentions chacun). Viennent, par après, l'Afrique (14 mentions) et l'Amérique latine (12 mentions). Au niveau doctoral, c'est le Québec (8 mentions) et l'Afrique (4 mentions) qui représen-tent les lieux de prédilection.

En conclusion à cette section sur les recherches étudiantes aux cy-cles supérieurs en vue de l'obtention d'un diplôme, on se rend compte qu'elles ont été poursuivies principalement dans les aires culturelles privilégiées dans le Mémoire d'anthropologie de 1970. De ce point de vue, il est remarquable de constater que le Québec a été le lieu de prédilection de ces travaux. Cela vient confirmer, il me semble, certai-nes tendances actuelles de l'anthropologie par rapport aux études de nos propres sociétés industrielles au fur et à mesure que celles-ci se 12 La liste des thèses de maîtrise apparaissant à l'Annexe 1, bien que substantielle,

est incomplète. L'analyse présentée ici est à caractère indicatif seulement.

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complexifient et deviennent pluralistes. Par contre, on remarque, en même temps, une tendance en émergence qui traduit l'élargissement des espaces géographiques où se poursuivent les travaux anthropologi-ques des étudiants/es de Laval. Une autre tendance frappe. Il n'est pas surprenant que l'anthropologie économique et l'anthropologie poli-tique aient été des domaines d'études privilégiés. Cela tient au fait que la matérialisme historique ait tenu une place de très grande impor-tance parmi les schèmes conceptuels en usage au département. Le structuralisme, un autre paradigme de préférence départementale, n'a pas donné lieu à un aussi grand nombre de travaux permettant l'obten-tion de diplômes.

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[119]

L’anthropologie à l’Université Laval. Fondements historiques, pratiques académiques,

dynamismes d'évolution.

Chapitre 4

La diffusion des connaissances et le rayonnement scientifique

1. La diffusion des connaissances

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Il existe deux revues au Département d'anthropologie. L'une d'en-tre elles, Anthropologie et Sociétés, est une revue départementale tandis que l'autre, Études/Inuit/Studies, comme je l'ai documenté plus tôt, est une revue de l'Association Inuksiutiit Katimajiit inc. dont les principaux animateurs sont des professeurs du département. C'est ce qui explique le fait qu'elle soit logée dans [120] des locaux de l'Uni-versité. La production de ces revues nécessite des ressources maté-rielles et humaines importantes pour assurer leur parution a des dates régulières. Le département fournit une partie de ces ressources dans le cas de la revue départementale, tandis que l'autre revue doit comp-ter sur les ressources fournies par l'Association qui la patronne. Dans le cas d'Anthropologie et Sociétés, le département nomme le rédac-teur et celui-ci est tenu de faire un rapport annuel à l'assemblée des professeurs. Les membres du comité de rédaction, au nombre de dou-

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ze et également répartis entre les deux sexes, dont la moitié provien-nent de Laval et l'autre moitié d'institutions québécoises, sont aussi nommés par les professeurs/res en assemblée.

Un comité international a également été constitué pour ap-porter un regard critique de l'extérieur sur la publication et pour conférer à celle-ci un plus grand rayonnement à l'exté-rieur. (André DESMARTIS, Le Fil des Événements, 8 octobre 1987, p.3).

Le rédacteur se voit déchargé de l'une de ses quatre tâches d'en-seignement pour assumer plus adéquatement sa fonction. Les espaces alloués à la revue sont pris à même ceux du département. Étu-des/Inuit/Studies pour sa part, doit se débrouiller avec ses propres revenus. Disons, enfin, que les deux revues reçoivent des subventions annuelles du Fonds de publication du FCAR.

1.1. Anthropologie, et Sociétés

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Dès les débuts de l'établissement du Département d'anthropologie, les professeurs alors en place songèrent à établir une revue qui serait la contrepartie de Recherches Sociographiques fondée au Départe-ment de sociologie en 1960. Après avoir fait un inventaire des articles qui pourraient paraître dans les deux premiers numéros, on se rendit vite compte que le bassin des recherches anthropologiques du dépar-tement serait incapable à lui seul de nourrir une revue [121] bi-annuelle. Aussi l'idée fut-elle abandonnée pour être reprise six ans plus tard.

Dans les tâches des professeurs de 1976-1977 (bref historique fourni par le premier rédacteur de la revue, Yvan Simonis), Louis-Jacques Dorais, le directeur du département à l'époque, avait confié à Yvan Simonis la responsabilité de l'édition au département d'anthro-pologie. Cette préoccupation de l'édition existait depuis quelque temps

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au département qui avait déjà publié un Cahier d'anthropologie en 1976, sous la direction de Dorais, et la revue Études/Inuit/Studies venait d'être lancée par l'Association Inuksiutiit Katimajiit inc. À l'au-tomne 1976, un responsable de la rédaction de la revue L'Homme vint rencontrer des membres du département pour leur proposer d'être partie à 50% de son comité de rédaction, de s'occuper de la collecte des articles en Amérique du Nord et de participer financièrement à la revue. Les discussions montrèrent rapidement que les choix et le contrôle réel resteraient à Paris et que si notre département souhai-tait développer son édition, il ne publierait plus que ce que l'Homme refuserait. Le projet échoua.

C'est dans ce contexte que Simonis lança l'idée d'une revue scien-tifique au département. Les deux premiers numéros parurent à l'au-tomne 1977 grâce à l'appui financier surtout de la Faculté des Scien-ces sociales. Son doyen d'alors, Renaud Santerre, et le secrétaire Paul-Émile Roy permirent l'utilisation de la machine multipoint que pos-sédait alors la Faculté (sous la responsabilité de Mme Monique Bri-deau). Cette décision fut pour la revue d'une aide précieuse. Nous étions en pleine crise économique, car les Presses de l'Université Laval étaient l'objet de critiques et l'Université commençait à encourager la gestion des projets d'édition par les responsables des revues. Le contexte étant favorable sur ce plan, la revue fut lancée et s'occupa de tous les métiers associés (dépliants, [122] campagnes d'abonne-ment, composition, impression, ventes, etc.).

Dès le début, la revue adopta une politique qui est restée la sienne : être ouverte à tous les courants théoriques de l'anthropologie, repré-senter ce qui se fait ici, promouvoir de nouveaux intérêts et insérer l'anthropologie d'ici dans le débat international. La composition du co-mité de rédaction reflétait cette diversité et, dès le début, a compté sur des représentants venus de tous les milieux anthropologiques du Québec. Le même principe a été respecté lorsqu'en 1982 il fut décide de se donner un Comité conseil international composé de dix membres. La revue favorise les numéros à thème confiés à des responsables sans oublier de laisser place à quelques articles hors thème dans chaque numéro. Il lui a semblé que l'implication de la profession était ainsi plus forte au service de la revue et que celle-ci rencontrerait mieux

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les attentes de ses lecteurs. La revue se distingue également par ses rubriques (Dossiers, Information, Débats) qui lui permettent une ani-mation plus diversifiée. Dès 1978, la revue a été subventionnée par le FCAR et le CRSHC et depuis lors la subvention a été renouvelée à cha-que année. Elle a été réévaluée trois fois par les organismes subven-tionnistes et les critiques sont restées plus que positives. Elle a su pu-blier à temps ses numéros et jouit de la confiance de ses 600 abonnés. Le professeur Simonis qui avait fondé la revue en 1977, est resté son rédacteur jusqu'au 1er septembre 1987. Notre collègue Mikhaël Elbaz, qui l'avait remplacé en 1983-1984 pendant une année sabbatique, a depuis lors repris cette tâche importante pour le département et l'an-thropologie au Québec. À l'automne 1987, la revue comptait dix ans d'existence et pour souligner cet événement, on a organisé un débat sur le thème « Participation, consultation, démocratie ». Ce colloque obtint un vif succès. À cette occasion, André Desmartis a établi un bilan des activités de la revue avec l'ancien rédacteur (Simonis) et le nouveau (Elbaz) qu'il a publié dans Le Fil [123] des Événements (8 oct. 87, p. 3). Les grands titres de l'article sont révélateurs : « Une revue de calibre international », « L'ambition : devenir un lieu de médiation pour les autres disciplines et pour les diverses minorités », « L'an-thropologue, un spécialiste des “minorités” », « Un rôle important à jouer dans les projets de développement », « Pour une réflexion pros-pective », et « Place aux débats ». Je référerai un peu plus loin aux deux dernières rubriques, car elles renferment les orientations de la revue pour les prochaines années.

Renaud Santerre (1981, 1983a et 1983b), en tant que membre du comité des revues du Conseil des publications savantes de l'Université Laval, a présenté deux rapports substantiels sur la revue Anthropolo-gie et Sociétés où il analyse la régie interne de la revue, son insertion dans l'unité pédagogique (anthropologie), son contenu et principale-ment l'évolution dans les thématiques couvertes de 1977 à 1983, ses collaborateurs, sa clientèle, la production matérielle et la spécificité de la revue. Le jugement d'ensemble qu'il porte est essentiellement positif. Voici ce qu'il affirme lorsqu'il discute de la spécificité de la revue et qu'il apprécie ses chances de survie dans une situation qui devient de plus en plus compétitive entre les revues anthropologiques

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étant donné les nouvelles politiques de subvention des agences qui, jusqu'à ce jour, ont largement contribué à son maintien :

Les évaluateurs de la revue (3 pour FCAC et 2 pour CRSHC), tous positifs, s'accordent à reconnaître qu'Anthropologie et Sociétés a réussi en peu de temps à se tailler une place enviable dans le marché international des revues d'anthropologie généra-le aux côtés de revues aussi prestigieuses que L'homme, The American Anthropologist et Current Anthropology. La scène ca-nadienne était déjà occupée par Anthropologica (bilingue) et par la Revue canadienne de sociologie et d'anthropologie (bilingue et bidisciplinaire). postérieurement à Anthropologie et Sociétés est apparue la revue Culture, organe de la Société canadienne d'ethnologie. D'autres revues multidisciplinaires, comme Re-cherches amérindiennes et la Revue canadienne des études afri-caines ou encore, plus récente, [124] études/Inuit/Studies, étaient ou sont disponibles à des anthropologues au Québec ou au Canada pour écouler leur production. Ce qui fait la spécificité d'Anthropologie et Sociétés, c'est le fait qu'elle soit une revue francophone, nord-américaine, d'anthropologie générale. L'ap-parition d'Anthropologie et Sociétés, au dire du rédacteur, non seulement n'a pas tari la source d'approvisionnement des autres revues analogues, sais a stimulé la production des anthropolo-gues du Département d'anthropologie de Laval et d'ailleurs. Si 17 des 22 professeurs d'anthropologie de Laval cet publié au soins un article dans la revue du département, cela ne les a pas empêchés, ainsi que leurs 5 autres collègues, de continuer à ali-menter d'autres revues plus spécifiquement &zées sur leurs in-térêts particuliers [...] Cette productivité ressort particulière-ment de l'enquête réalisée en 1978-1979 sur les publications à la Faculté des Sciences sociales de Laval qui situe le départe-ment d'anthropologie, parmi les sept de la Faculté, avec la meil-leure moyenne annuelle (1.7) de publications par professeur [...] Ces considérations n'empêchent pas certains évaluateurs de craindre pour Anthropologie et Sociétés le passage au second souffle, une fois le dynamisme initial un peu amorti et les cir-

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constances favorables du début envolées. On souhaite une plus grande diversification idéologique chez les collaborateurs et une pénétration plus profonde des et dans les milieux scientifiques anglophones » (1981: 15-16)

Dans son rapport annuel pour l'année 1984-1985, le rédacteur d'alors (Simonis 16 avril 1985b: 3) estime que la santé financière de la revue est excellente et qu'elle continuera de l'être en autant qu'elle recevra des subventions annuelles des deux agences qui l'ont appuyée financièrement jusqu'à maintenant (CRSHC et FCAR). Il ajoute encore que le prochain défi sera d'effectuer le passage à l'informatique dans la diffusion des connaissances, ce qui obligera les revues existantes a une meilleure concertation. Si cette dernière ne peut être suscitée, certaines des revues existantes auront de la difficulté à survivre. Il termine son rapport en affirmant :

[125]

Au-delà de ses contraintes de divers types, la revue sait que l'essentiel de son avenir repose plus encore sur la qualité de son contenu, son adéquation progressive aux besoins réels de la pro-fession d'anthropologue au Québec et son insertion dans les débats internationaux. Les thèses qui ont été traités dans la re-vue jusqu'à maintenant reflètent à la fois les intérêts anthropo-logiques de recherche de la communauté scientifique nord-américaine et européenne, sais aussi la spécialisation sous-disciplinaire des membres du département. Sans que ce soit ex-clusivement les professeurs du département qui aient assumé à tout coup chacun des numéros thématiques publiés, ils y ont joué un rôle primordial soit en assumant la direction de la pro-duction du numéro ou en y présentant les résultats de leurs tra-vaux. Voici une liste des thèses couverts jusqu'à maintenant : En 1977 L'agriculture au Québec » et « Les rapports homme-femme » ; en 1978 : « Minorités ethniques-nationalistes » et « Ethnobotanique-Ethnomédecine » ; en 1979 : « Parenté, Pou-voir, Richesse » et « L'Asie » ; en 1980 : « Problèmes urbains »,

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« L'usage social des enfants » ; en 1981 : « Les sociétés de pê-cheurs », « La dynamique biosociale » ; en 1982 : « Idéologies et Politiques » et « Imposer la bâtardise francophone » ; en 1983 : « Guerres et stratégie » et Été 83 (Anthropologie en liberté) ; en 1984 « Caraïbes » et « Comprendre et modifier » ; en 1985 : « Utopies », « Pouvoir local et crise économique » et « La paren-té au Québec » ; en 1986 : « Travail, industries et classes ou-vrières », « Les dynamiques à la marge » et « La construction politique de l'objet esthétique » ; en 1987 : « Discours et prati-ques des fesses » ainsi que « Indiens, Paysans et Femmes d'Amérique latine ».

Ces thèmes, comme on le voit, sont très diversifiés. À l'occasion du dixième anniversaire de la revue, qui fut également l'occasion de la transmission des pouvoirs, Julie Stanton, interrogea les deux rédac-teurs et fit un compte-rendu de sa rencontre qui parut dans Le Devoir (7 novembre 1987: D-2). Voici ce qu'elle dit au sujet de ces parutions thématiques de la revue :

[126]

Choisis deux ans à l'avance sur synopsis, les thèses retenus le sont en fonction de l'intérêt pressenti pour le phénomène ap-pelé à être examiné ici sous la loupe et par la lorgnette anthro-pologique, mais aussi avec le concours de sociologues, politicolo-gues, urbanistes et autres intervenants qui se sentent plus spé-cialement concernés par un sujet donné. Selon ses interlocu-teurs, le point de vue des fesses anthropologues serait considé-ré ici cotte essentiel, car « solidaires les unes des autres dans le domaine, les fesses ont imposé une anthropologie à voir multi-ples et l'on s'est vite rendu compte de la richesse de leur ré-flexion ». (Stanton 1987)

Tel que rapporté dans Le Fil des Événements, Mikhaël Elbaz, le nouveau rédacteur de la revue, introduit l'idée d'une réflexion pros-pective pour l'anthropologie quand il affirme :

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Mais l'anthropologie ne vent pas seulement se constituer en modèle de résistance contre la destruction des cultures et des spécificités ethniques. Elle entend, avec les autres sciences so-ciales, devenir le lieu d'une réflexion prospective. Pour cela [...] l'important est de poser les bonnes questions, le danger étant, là aussi, de réduire la réalité huitaine aux seules composantes techniques, économiques ou quantitatives, en oubliant que les comportements de l'Homme font échouer les meilleures prévi-sions [...] Cette nouvelle orientation de l'anthropologie amènera la revue [...] à faire une place de plus en plus large aux débats, conte celui actuellement en cours sur la participation et la consultation, un débat qui vise à réintroduire la dimension an-thropologique dans l'exercice de la démocratie et, en même temps, à réclamer une place pour l'anthropologue dans toute consultation.

1.2. Études/Inuit/Studies

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La revue Études/Inuit/Studies paraît elle aussi depuis une décen-nie. Comme j'en ai discuté plus tôt à l'occasion des études inuit au dé-partement, je me bornerai à mentionner quelques-unes des caractéris-tiques de son contenu. Ce travail m'est rendu d'autant plus facile qu'un index des dix premiers volumes (1977-1986) vient de paraître à Québec a l'automne 1987 (Lanouette et al. 1987). Les deux profes-seurs du département qui y ont publié un grand nombre [127] d'arti-cles sont Louis-Jacques Dorais et Bernard Saladin d'Anglure. Comme c'est une revue bilingue, la proportion des articles en français étant de 35%, un grand nombre de collaborateurs proviennent du milieu an-glophone. La thématique qui revient avec la plus grande fréquence dans la revue est la linguistique. L'histoire vient en second lieu mais une lar-ge distance numérique l'éloigne de la première catégorie. Elle est sui-vie de près par quatre autres thématiques à peu près d'égale impor-tance, soit : les revendications autochtones, la politique, l'archéologie

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et le symbolisme. Viennent, par après, situés au même niveau d'impor-tance relative, trois thèmes : la santé, les rapports inter-ethniques et l'économie. Suivent, dans l'ordre, aussi d'égale importance, la démo-graphie, le développement et l'ethnomusicologie. Les autres thèmes qui apparaissent dans la revue se rapportent au chamanisme, a la com-munication, a l'identité culturelle, au droit, à l'écologie, à la parenté, aux mines, a la muséologie, à l'organisation sociale, à la tradition orale, aux Samis, à la toponymie et à quelques autres qui reçoivent peu d'at-tention. Les rédacteurs de la revue sont Bernard Saladin d'Anglure et François Thérien.

2. Le rayonnement scientifique

2.1. La diversité du rayonnement

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Cette section portant sur la production scientifique et le rayonne-ment du personnel anthropologique revient presque à reprendre plu-sieurs des éléments qui ont déjà été analysés dans des sections anté-cédentes. Pour autant, les données seront regroupées d'une manière différente et présentées d'une façon succincte pour en dégager les grandes lignes et les tendances principales. On aura remarqué que l'anthropologie sociale et culturelle qui est le type d'anthropologie pratiquée au département, est fondée principalement sur la recherche empirique et que celle-ci nécessite de nombreux et fréquents [128] voyages sur le terrain, dans des civilisations la plupart du temps éloi-gnées des nôtres. À l'exception de l'Europe, où il n'existe pas encore de programme de recherche, les anthropologues du département ont mené ou mènent encore des études sur tous les autres continents de la planète. Ce fait, à lui seul, constitue un élément distinctif, qui nous différencie des autres départements de la Faculté. Les données récol-tées sont donc très diversifiées, ce qui oblige les collègues à publier les résultats de leurs travaux dans de nombreuses revues spécialisées publiées soit en français, en anglais, en espagnol, en allemand ou en langage syllabique (le cas des Inuit). Cette tradition de recherche

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s'accompagne d'une obligation, soit celle de se familiariser et d'ap-prendre les langues parlées par les groupes étudiés. Cet impératif ex-plique le très grand nombre de langues comprises et parlées parles professeurs qui sont allés dans des milieux exotiques. Les travaux an-thropologiques, si on fait exception des développements récents en informatique (Voir, par exemple, une monographie récente, Maranda 1984) sont surtout à caractère qualitatif. La Passion de l'Échange (Ge-nest 1985) ainsi que le Collectif publié par un ensemble de professeurs du Département (Collectif 1978b) témoignent largement de l'impor-tance d'une association très étroite, continue et prolongée entre l'ob-servateur et les observés. On y remarque aussi que l'observation-participante et l'entrevue à l'aide d'informateurs-clefs de même que le récit de vie y occupent une place importante.

Cette spécialisation des membres du département dans des aires culturelles différentes les amènent, comme de bien entendu, à devenir membre d'organisations et d'associations professionnelles régionales, à assister à un certain nombre de congrès et de colloques organisés ou patronnés par elles, à y présenter des communications. Ces participa-tions à des congrès et cette diffusion des résultats de travaux dans des revues spécialisées font naturellement partie d'activités à carac-tère. international, ce qui amène certains [129] collègues à être invités dans des universités étrangères. Il ne faut pas oublier également, comme je l'ai rapporté plus tôt, que la formation dans une université étrangère amène nécessairement l'établissement de contacts avec des spécialistes des autres universités, lesquels sont entretenus durant de nombreuses années subséquentes. Il n'est pas surprenant que l'Union Internationale des Sciences Anthropologiques et Ethnologiques ait décidé de tenir la première partie de son congrès (qui est tenu à tous les cinq ans) à l'Université Laval en 1983. Ce fut un événement qui consacrait en quelque sorte l'importance de cette discipline à Laval et la qualité des travaux qui s'y poursuivaient. Cette reconnaissance in-ternationale venait après celle que lui accordait le Professeur Claude Lévi-Strauss au moment de la réception d'un doctorat d'honneur à l'Université Laval en 1979 (Simonis 1985).

Il est aussi intéressant de noter que les travaux de recherche des professeurs du département ont parfois donné lieu à la réalisation de

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films sur les populations étudiées, ce qui assure un autre type de dif-fusion des résultats de la recherche auprès d'un public plus large et très souvent différent de celui qui lit les revues scientifiques. La par-ticipation et le rayonnement d'un/e professeur/re d'Université font en quelque sorte partie de la définition de son statut et de ses fonc-tions : recherches, publications, participation à des congrès, présenta-tion de communications, engagement dans les associations profession-nelles, participation à des comités de rédaction de revues scientifi-ques, demandes auprès d'organismes de subvention de fonds de re-cherche, participation en tant qu'évaluateur de la qualité scientifique des projets de recherche, invitation à présenter une série de cours dans une université, invitation à donner des conférences soit dans les universités ou dans des milieux professionnels, conseiller scientifique pour des agences gouvernementales, publiques ou privées, participation à des émissions radiophoniques ou télévisées, participation [130] sur l'exécutif d'associations savantes ou professionnelles, participation à des jury de bourses ou à des prix d'excellence et combien d'autres activités analogues font habituellement partie de l'ensemble des acti-vités universitaires dans lesquelles le/la professeur/e d'université participe. Ces activités et ces participations font tout autant partie de sa charge de travail que sa fonction de formation auprès d'étu-diants/tes dont il assume l'apprentissage. Elles témoignent d'ailleurs de leur engagement professionnel et social et, par leur participation, du rayonnement de l'Université dans la communauté plus large.

2.2. L'intervention anthropologique au département

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Si, à ses débuts, l'anthropologie a participé avec la sociologie, l'économique et les relations industrielles, principalement par le biais de la participation de Tremblay à des recherches qui avaient des ob-jectifs d'action et d'intervention, dans la mesure où ces recherches multidisciplinaires visaient à transformer la réalité sociale (l'insalubri-té des logements à Québec, l'instabilité des travailleurs forestiers, la pauvreté et la marginalité des villages agro-forestiers de l'arrière-

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pays de la région du Bas Saint-Laurent, l'endettement des familles salariées d'ascendance française, etc.), il y eut comme un temps d'ar-rêt dans ce genre d'activités vers le milieu des années soixante au moment où justement l'anthropologie tentait de s'établir comme dis-cipline académique et s'inspirait d'une anthropologie dite classique. On en aura compris la justification : il s'agissait d'abord et avant tout d'initier les apprentis-anthropologues aux aspects fondamentaux de la discipline. Aux États-Unis, en particulier, ceux qui préconisaient des orientations plus pragmatiques à la discipline aux débuts des années soixante avaient acquis une plus grande influence dans la profession. Celle-ci découlait en quelque sorte des pratiques professionnelles as-sociées aux programmes d'aide au développement des pays du Tiers-Monde [131] amorces durant la période d'Après-guerre ainsi qu'à ceux reliés à la promotion de la santé publique dans ces mêmes pays. Il y avait donc un nombre de plus en plus grand d'anthropologues améri-cains engagés dans ces programmes d'intervention. La tendance inver-se existait en Europe où l'anthropologie dite appliquée était tombée en discrédit après l'accession de nombreux pays d'Afrique à l'indépen-dance politique. Cette stratégie anthropologique de Laval du milieu des années soixante s'est avérée avec le temps celle qu'il fallait adopter car elle a permis d'asseoir les revendications de 1970 quant au droit de l'anthropologie à l'autonomie sur des bases solides. Cette orienta-tion de l'anthropologie à Laval était pour ainsi dire un préalable. En effet, il était impensable que l'on puisse développer une tradition d'application en anthropologie avant que la discipline elle-même soit bien établie. Une volonté de développer cette discipline, selon des rè-gles et des canons plus traditionnels, était donc existante.

Mais les circonstances se chargent parfois de redresser les cibles et de calibrer les efforts. Le Projet Côte-Nord, par exemple, après quelques années d'existence seulement, se rendit compte que la popu-lation étudiée non seulement voulait être mieux informée des résultats de la recherche mais aspirait à y prendre une part active. Les diri-geants du Projet durent en tenir compte dans les demandes de renou-vellement de leurs subventions. Les études inuit furent elles aussi confrontées aux mêmes attentes de la part des populations étudiées et durent en tenir compte dans leur développement. Il faut remarquer, toutefois, que dès ses débuts, les études au Nouveau-Québec Inuit

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accordaient une certaine importance à l'action et à la participation des Autochtones. Roger Pothier, au moment où il établissait un groupe de recherche sur les Amérindiens au début des années soixante-dix, envi-sageait également une participation active des Autochtones dans les activités de recherche du groupe. Il assumait d'ailleurs à ce moment-là l'enseignement de l'anthropologie [132] appliquée au département. Vers la même époque Gerald McNulty, encore rattaché au Centre d'Études nordiques, travaillait en étroite collaboration avec les Au-tochtones pour traduire des contes et rédiger des textes en Monta-gnais. Mais c'est pour ainsi dire vers le milieu des années soixante-dix, avec l'amorce du Projet Bellechasse, sous la direction d'Yvan Breton qui était également a la tête du département, qu'on observe une volon-té plus ferme de donner à l'aspect appliqué de l'anthropologie une plus grande visibilité. Le Projet Bellechasse, soutenu financièrement par le F.C.A.C. du ministère de l'Éducation, se déroula de 1974 à 1979. Com-me je le rappelais plus tôt, il visait à étudier la décomposition de la paysannerie québécoise dans un conté rural près de l'agglomération urbaine de Québec. Tout en favorisant l'apprentissage à la recherche, on voulait définir la situation socio-économique des producteurs agri-coles du conté de Bellechasse en utilisant, sur une base quasi-expérimentale, le cadre conceptuel du matérialisme historique. À ce premier objectif se greffaient d'autres intentions telles la participa-tion au débat entourant le concept de « petite production marchan-de », la vérification de l'utilité de ce concept dans l'approfondisse-ment d'une réalité régionale et l'expérimentation d'un processus d'animation sociale dans le milieu en vue de le transformer. Détaillons un peu plus ce dernier élément car il est justement l'aspect qui retient mon attention ici. Ces interventions dans le milieu sont variées et nom-breuses comme on le constatera à leur énumération : (a) la construc-tion de documents à tirage limité distribués dans le milieu ; (b) la ré-daction de rapports-synthèses sur les résultats de la recherche d'ob-servation dans les hebdomadaires régionaux ; (c) la réalisation d'un film « On a not' quota » et d'un vidéo « L'industrie laitière dans Belle-chasse » lesquels firent l'objet de projections publiques suivies de discussions avec les producteurs ; (d) la production de brochures sur le patrimoine de Bellechasse ; (e) l'organisation de sessions d'anima-tion avec des groupes d'étudiants du primaire dans le but de les sensi-

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biliser aux réalités patrimoniales et socio-économiques [133] du comte dans lequel ils vivent ; (f) l'élaboration d'un guide pédagogique à l'in-tention des élèves de quatrième année ; et (g) la constitution d'une exposition photographique sur le patrimoine de Bellechasse par les élèves du primaire.

Les retombées pour le milieu lui-même furent nombreuses, car en plus de ces activités formelles, Breton, un résidant du milieu, eut à répondre a plusieurs demandes de renseignements venant de sources multiples. Les retombées académiques et professionnelles furent éga-lement substantielles si on tient compte du fait que ces études donnè-rent lieu a la production de neuf thèses de maîtrise et qu'elles furent à l'origine de l'engagement de deux membres de l'équipe comme conseillers pédagogiques pour les Commissions scolaires locales. De plus on dut répondre à des demandes de participation dans des comi-tés consultatifs en vue de la création d'une municipalité régionale de conté (MRC) et s'impliquer dans la mise sur pied d'un vidéo par le Cen-tre Local de Service Communautaire (CLSC). On peut également attri-buer à cette recherche l'engagement de trois membres de l'équipe au ministère des Affaires culturelles (MAC), l'embauche de Breton (prêt de service) comme consultant durant une période de deux ans au MAC à l'occasion de laquelle il a développé des approches spécifiques d'ani-mation auprès des pêcheurs de la Gaspésie et de la Côte-Nord. C'est à l'occasion de son séjour au MAC que Breton concevra des brochures de vulgarisation en français, en anglais et en montagnais à l'intention des Nord-Côtiers se rapportant aux modes de vie et activités écono-miques de la région. Ces brochures furent particulièrement bien réus-sies, les personnes embauchées spécialement pour ce faire pouvant compter sur les données accumulées par la vingtaine de co-équipiers qui y avaient travaillé dans les années antérieures, sous la direction de Tremblay ou de Charest. Ces écrits ont aussi été particulièrement bien accueillis dans le milieu lui-même. Le projet Bellechasse, par sa visée double (académique et d'intervention), représente un tournant [134] important dans l'histoire du département dans la mesure où Breton fit la démonstration, en dépit des difficultés inhérentes à une telle en-treprise (Breton 1984), que ce genre d'approche était à la fois valable pour susciter l'avancement des connaissances et pour favoriser chez les observés la prise de conscience nécessaire aux transformations

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sociales désirables et désirées tout en permettant aux futurs diplô-més de se tailler une place sur le marché du travail en établissant la démonstration de leur compétence et de leur utilité. C'est un cas exemplaire de ce point de vue.

L'expérience d'intervention de Breton n'est pas unique car on pourrait tout aussi bien se servir d'autres cas pour illustrer l'intégra-tion de deux finalités complémentaires de l'entreprise de recherche, soit l'avancement des connaissances et l'utilisation des résultats de la recherche par ceux qui en sont les sujets. Le groupe d'études inuit, depuis maintenant plus de vingt-cinq ans, a lui aussi de nombreuses ré-alisations à son crédit. La participation de Paul Charest aux nombreu-ses initiatives du Conseil Attikamek-Montagnais en tant que conseiller scientifique mais aussi en tant qu'aviseur technique (surtout à ce tournant socio-historique des revendications territoriales, des deman-des de compensations financières réclamées pour des gestes discrimi-natoires posés à leur endroit par les autorités gouvernementales, de la confection de dossiers visant à faire la démonstration des effets né-fastes sur le mode de vie autochtone des mégaprojets de développe-ment du Nord prévus soit par les gouvernements ou les grandes corpo-rations multinationales et du projet d'entente constitutionnelle des peuples autochtones avec le gouvernement central), a elle aussi permis le développement de nouveaux enseignements mieux arrimés aux réali-tés concrètes autochtones, la participation de nombreux/ses étu-diants/tes à différents projets de recherche et l'ouverture de nou-veaux débouchés sur le marché du travail.

[135]

On pourrait encore se référer aux efforts de Santerre dans le domaine du vieillissement. Il a non seulement dirige un Laboratoire de gérontologie sociale et amorcé des travaux sur le processus de vieillis-sement tant dans les Centres d'accueil (CA) que dans la communauté, mais il a aussi participé à l'Université Laval comme dans les milieux régionaux intéressés à des enseignements dans le cadre du certificat en gérontologie. Au fur et à mesure que les résultats de ses travaux s'accumulent, il devient de plus en plus intéressé à les diffuser auprès des milieux les plus particulièrement intéresses afin que ceux-ci en tirent avantage dans leurs pratiques professionnelles. Tout en s'inté-

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ressant à un groupe social négligé par l'anthropologie du Québec (nos aînés ne sont-ils pas notre mémoire collective?), lequel suscite l'avan-cement de nos connaissances sur notre propre milieu, il devient de plus en mesure, dans des cas particuliers, de susciter des solutions. Celles-ci font partie de nouvelles politiques sociales a être développées à l'in-tention de cette catégorie d'âge. Celles développées au moment de la Révolution tranquille sont devenues désuètes car elles s'appuyaient sur une espérance de vie maintenant largement dépassée et qui continue de reculer (le quatrième âge).

Les travaux de Claude Bariteau aux Îles-de-la-Madeleine ont com-porté des retombées non négligeables. Ses études plus récentes sur certaines petites villes sont conçues pour produire des résultats à être utilisés par les intéressés. Il est un de ceux qui, au département, a préconisé un élargissement des intérêts pédagogiques pour accorder une certaine importance aux aspects appliqués de la discipline. Ses propos ne sont pas tombés dans les oreilles d'un sourd puisqu'au mo-ment de l'établissement d'une maîtrise orientée vers l'action, on lui confia la responsabilité de monter un dossier à ce sujet qui permet-trait à l'anthropologie de convaincre les autorités facultaires que les enseignements et stages projetés en ce domaine ne dédoublaient ceux du Service Social. Ce qui fut fait en [136] deux mouvements! Bariteau assuma, dès l'instauration de ce nouveau programme, la responsabilité des enseignements lies aux stages dans un milieu de pratique. Les re-cherches et interventions de Dorais et Pilon-Lê sur les immigrants de l'Asie du Sud-Est de même que celles d'Elbaz sur les Juifs montréa-lais sont aussi des démarches soucieuses d'apporter à ces minorités ethnoculturelles des informations susceptibles de les aider soit dans leur processus d'intégration sociale ou d'action sociale.

Les nombreuses études qui ont été effectuées dans le domaine de la santé et de la maladie depuis plus de vingt-cinq ans n'ont peut-être pas eu d'impact direct sur les milieux professionnels (institutions et professions), mais elles ont ouvert de nombreux postes aux nouveaux diplômés (CRUS, CSS, CLSC, DSC, établissements hospitaliers). C'est un champ de recherche qui, sans avoir été au cours des années à l'avant-plan, suscite un intérêt chez un grand nombre d'étudiants/tes. Parmi les étudiants/tes qui en ce moment rédigent une thèse de doc-

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torat sur le sujet, on remarque qu'ils et qu'elles ont été sur le marché du travail durant plusieurs années. Je pense, en particulier, aux per-sonnes que je dirige ou à celles dont je suis sur le comité de direction : Jean Merveille (Étude sur les représentations de la maladie chez les Attikamèques du Lac Rapide) ; Rose Dufour (L'impact des facteurs socio-culturels sur la production de l'otite moyenne chez les Inuit du Nouveau-Québec) ; May Clarkson (L'anomie sociale et la production de la violence) ; Patrick Fougeyrollas (La réhabilitation sociale des indivi-dus ayant subi un traumatisme cranio-cérébral grave) ; Jeanne-d'Arc Fortin (Le processus de prise en charge de la santé dans une commu-nauté isolée du Lac St-Jean) ; Clément Chabot (Le procès de produc-tion de la santé au Nord-est du Ghana) et, Nicole Tremblay, cette dernière de l'École de Psychologie (La symbolique en médecine tradi-tionnelle chinoise). Tous/tes ces candidats/tes au doctorat ont une longue expérience de pratique dans les milieux professionnels de la santé. Il faudrait [137] être aveugle pour ne pas saisir l'influence qu'exerceront ces futurs docteurs/res sur l'un ou l'autre des aspects du système québécois de santé.

L'engagement d'Huguette Dagenais et de Marie France Labrecque dans les études sur les femmes, la première, en Guadeloupe particuliè-rement mais aussi au Québec, la seconde, dans le contexte amérindien, sont d'autres sources d'influence sur le milieu. La participation d'Hu-guette Dagenais, à l'occasion d'un prêt de service, au Conseil du statut de la femme (condition féminine) de même que son engagement au GREMF sont encore d'autres expériences qui contribuent a bien enra-ciner le département dans la communauté à laquelle il appartient et à ne pas être étranger aux grands débats de notre société.

Claude Bariteau a produit, à l'occasion, des textes découlant d'une vision anthropologique des problèmes de l'heure qu'il fait paraître dans les journaux. Qu'il s'agisse des revendications autochtones (le groupe amérindianiste du département), des transformations sociales en cours dans notre société (le numéro spécial de la revue départe-mentale sur « Comprendre et modifier » leur accordait une place de choix), des débats linguistiques (les réflexions de Maranda sur l'abâ-tardissement de la francophonie québécoise dans la revue de notre département), des débats sur la crise du nationalisme québécois et de

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la crise d'identité culturelle des minorités ethniques (les réflexions d'Arcand (l'ethnocide), d'Elbaz, de Tremblay et de tous ceux et celles qui travaillent en ce moment sur les minorités culturelles), de la crise que traverse en ce moment l'agriculture québécoise (Breton, Pilon-Lê), des nouvelles technologies de la reproduction (Saladin d'Anglure), du marché de l'emploi pour les anthropologues (Simonis 1982) et de com-bien d'autres sujets d'actualité et importants pour l'avenir de notre société (pris dans un sens large), l'un ou l'autre des membres de l'équipe fait connaître ses [138] vues au grand public et parfois mine prend un engagement social. La série de quinze émissions par Radio-Canada portant sur le Département d'anthropologie de Laval a sûre-ment servi à mieux faire connaître notre discipline comme elle a pu familiariser le grand public aux travaux qui s'effectuent par les mem-bres du corps professoral. Cette initiative répond à des besoins nou-veaux de la part du public (le désir d'être mieux informé) comme elle souscrit à un désir chez les professeurs/res de voir leur action univer-sitaire acquérir une plus grande portée sociale. Elle répond aussi à la transparence et à l'imputabilité si largement réclamées par les bail-leurs de fonds.

Ce bref tour d'horizon met en relief les principales activités du corps professoral dans le domaine de l'action et de l'intervention. Mais il fait seulement référence à ce qui se fait au Québec. Les ac-tions à l'extérieur sont peut-être encore trop récentes pour que je sois en mesure de les évaluer à leur juste valeur. Il faudra, un jour ou l'autre, effectuer une analyse plus exhaustive et plus rigoureuse de l'ensemble des réalisations départementales dans ce domaine. Car il ne faut pas se le cacher, l'avenir de notre discipline (son utilité) de même que l'avenir de nos futurs/res diplômés/ées (marché du travail) repo-sent dans une bonne mesure sur ces nouvelles orientations.

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2.3. La participation aux groupes interfacultaires et interuniversitaires

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Nous avons vécu durant la période d'expansion, surtout depuis le milieu des années soixante-dix, une accentuation de la vie départemen-tale et de la spécialisation disciplinaire. Il nous apparaît de plus en plus que le pendule a peut-être trop basculé dans cette direction et qu'il faille maintenant songer a assurer une meilleure formation générale à nos étudiants/tes. Faisant abstraction de la qualité de la langue écrite, combien de fois n'avons-nous pas [139] déploré, en ce qui concerne notre discipline, l'absence chez nos étudiants/tes d'une formation adéquate en biologie et dans les sciences naturelles, en histoire, en philosophie et en géopolitique. Depuis que les mathématiques ne font plus partie du profil des cours obligatoires pour être admis dans notre département, je crois que nous avons encore délesté les conditions d'admission d'une exigence essentielle. Si on examine le corps profes-soral, le cas de l'anthropologie, me dira-t-on, est un cas d'exception en ce sens qu'il fallait mieux se concentrer sur la discipline afin de mieux assurer sa survie. L'intérêt pour l'interdisciplinarité qui avait existé au milieu des années cinquante et aux débuts des années soixante n'a pas trouvé de véritable résonance durant plusieurs an-nées, occupés que nous étions à assurer la meilleure qualité de forma-tion anthropologique possible à nos étudiants/tes. Mais cette pluridis-ciplinarité s'est comme imposée d'elle-même de l'extérieur par le fait qu'un certain nombre d'entre nous ont été engagés/ées dans des groupes de recherche et de réflexion, à l'intérieur de notre Universi-té comme à l'extérieur, dont la composition était à caractère multidis-ciplinaire. C'est une tendance qui s'amorce, mais comme elle est sus-ceptible de s'accentuer avec les années, j'ai cru bon d'y accorder une certaine attention.

En anthropologie de la santé, Genest et Tremblay font partie du Groupe de Recherche en Anthropologie Médicale et Ethnopsychiatrie (GIRAME) lequel réunit des chercheurs de quatre universités (Mon-tréal, McGill, UQAM, Laval, cette dernière n'ayant pas jugé bon de

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contribuer financièrement au budget de fonctionnement est un mem-bre associé), est responsable d'un programme d'études offert à Mon-tréal, présente des conférences de recherche à chaque mois, consti-tue une banque de données informatisées dans son champ d'expertise (y compris les toxicomanies). Le GIRAME vient de recevoir une impor-tante subvention de recherche du Conseil québécois de la Recherche sociale (CQRS) pour entreprendre une étude sur le caractère spécifi-que de [140] la recherche sociale dans les domaines de la santé menta-le et des toxicomanies. Toujours dans le domaine des groupes interuni-versitaires, Pierre Maranda est associé à un groupe de recherche sur l'intelligence artificielle à l'Institut canadien des recherches avan-cées (ICRA/CIAR). C'est une université de recherche qui est édifiée sur la notion de réseau et qui recrute les chercheurs les mieux quali-fiés sur les campus nord-américains pour développer des études de pointe pouvant assurer un certain leadership au Canada. Tremblay a participé a ce même Institut à un groupe interdisciplinaire sur les va-leurs visant à définir le champ de recherche à privilégier au Canada. Il siège également à cette même institution sur un comité aviseur devant orienter les études dans le domaine de la santé des populations, un groupe-réseau ayant été constitué sur ce sujet. Arcand et Saladin d'Anglure font partie d'un groupe international de discussion sur les chasseurs-cueilleurs qui se réunit à intervalles réguliers. Eric Schwimmer, qui est certes un des spécialistes mondialement reconnus de l'approche symbolique, appartient lui aussi à un réseau international visant à promouvoir ce type d'analyse de la réalité. On peut dire sensi-blement la même chose de Maranda pour la sémiotique et de Simonis pour le structuralisme (Simonis 1985a). D'autres collègues ont égale-ment des champs de spécialisation qui les obligent à garder des contacts constants avec ceux et celles qui partagent les mêmes inté-rêts. Mentionnons, entre autres, Breton et Charest (l'anthropologie maritime) ; Santerre (l'anthropologie du vieillissement) ; Elbaz (l'eth-nicité urbaine) ; Dagenais et Labrecque (les études féministes) ; Ge-nest (l'ethnomédecine) ; Trudel (l'ethnohistoire) ; McNulty et Dorais (l'ethnolinguistique) ; Schmitz (les arts, les traditions populaires et la muséologie) ; Pilon-Lê (les études rurales) ; Bariteau (l'anthropologie économique et le développement) ; Chalifoux (les minorités) ; et, Ma-rie-Andrée Couillard (l'anthropologie du développement). Je suis cons-

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cient que chaque professeur/re-chercheur/re fait partie de plusieurs réseaux et qu'il/elle doit contribuer aux débats qui s'y poursuivent. Dans le [141] cadre de cet exposé, il m'est toutefois impossible de les reconstituer ou d'en énumérer les principales activités.

Sur le plan intérieur, les professeurs/res du département font également partie de groupes et de comités. Si je prends le rapport annuel de 1984-1985, je constate que le département est représenté au SPUL par deux de ses professeur/re, l'une en tant que vice-présidente du syndicat et l'autre en tant que vice-président de la Sec-tion sociologie, anthropologie et science politique. Un de nos collègues siège à la Commission des Affaires étudiantes, un autre préside en tant que membre le Comité-conseil de la Bibliothèque générale et un autre fait partie du Comité des doctorats d'honneur de l'Université. Un membre du corps professoral est responsable de la conception de la section anthropologique du Musée didactique de l'Université Laval, un autre est devenu le responsable de l'Accord-cadre UAM-Laval et un troisième siège sur le comité des collections. Sept de nos collègues assurent une représentation anthropologique à des groupes de recher-che interfacultaires : le GREMF, le CIRB (bureau de direction et comi-té de concertation), le CEN, le CELAT, le Groupe de recherche en éthique médicale et le comité de déontologie de l'Université Laval. C'est un professeur du Département (Saladin d'Anglure) qui assure la présidence d'un nouveau groupe interdisciplinaire de recherche en sciences humaines sur l'Arctique qui vient d'être établi a la mi-novembre 1987. Le Groupe d'Études Inuit et Circumpolaires (le GÉ-TIC) vise à asseoir une vieille tradition de recherche dans un cadre nouveau 13. Il faut savoir, en effet, que le Centre d'Études Nordiques (le CEN) a conçu un plan triennal de développement qui exclut les sciences humaines. Il fallait, donc, que les spécialistes nordiques des sciences humaines se regroupent pour revitaliser leur action. C'est une initiative qui est promise, me semble-t-il, à des développements pro-metteurs les grandes [142] puissances s'intéressant de plus en plus à l'Arctique et le Gouvernement canadien ayant l'intention de protéger sa souveraineté sur les territoires nordiques. D'ailleurs ce regroupe-

13 Pour plus de détails sur le GÉTIC, il faut consulter l'article d'André Desmartis

du 19 novembre 1987 dans La Fil des Événements, p. 12.

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ment était devenu nécessaire pour profiter pleinement des retombées éventuelles du rapport du fédéral sur la science polaire (Roots et al. 1987). Toutes ces activités et ces participations extra-curriculaires sont enrichissantes et constituent un facteur de rayonnement pour l'Université et pour notre discipline.

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[143]

L’anthropologie à l’Université Laval. Fondements historiques, pratiques académiques,

dynamismes d'évolution.

CONCLUSION

par Éric Schwimmer 14

La singularité de l'anthropologie (au Québec et ailleurs):

les travaux, la critique, la pulsion de mort

Retour à la table des matières

Le doyen Beaudoin (Faculté des Sciences sociales) a adressé à no-tre département des critiques sévères. L'objet de ce rapport n'est pas de répondre à ces critiques car le département a confié à d'autres comités cette tâche de nature polémique. Celle du comité [144] (sur le fond), dont le rapport provisoire fait état ici, est plutôt d'aller au-delà de cette polémique et au-delà de la baisse des effectifs étu-diants, et de nous interroger sur la situation de l'anthropologie en gé-néral, au Québec et ailleurs, et de définir notre rôle pour l'avenir.

14 Rapport préliminaire du Comité des orientations du Département d'anthropolo-

gie, présidé par Eric Schwimmer et présenté en 1984. Les autres membres de ce comité furent : Claude Bariteau, François Chabot, Polly Dritsas, Jean-Pierre Gar-neau, Claude Lanouette, Chantale Lunardi, Bernard Saladin d'Anglure et Marc-Adélard Tremblay.

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Ce problème de décroissement a frappé toutes les sciences socia-les, mais il a plus durement frappé l'anthropologie ; d'autre part, l'his-toire particulière de l'anthropologie à l'Université Laval a empiré les choses ici. Cependant, on a vécu ici à Laval le même paradoxe qui a été vécu ailleurs dans le monde : tandis que notre discipline connut une chute relative en popularité, mesurée par le nombre de nos étudiants, et tandis qu'elle connut simultanément une crise épistémologique dis-cutée ci-dessous, sa productivité scientifique et son développement théorique furent plus riches qu'en aucune décennie par le passé.

En cherchant à définir notre rôle futur, il ne s'agit pas de recher-cher une singularité québécoise, car on retrouve le même processus un peu partout en Amérique du Nord et en Europe, mais de dégager les bases d'une anthropologie qui ressort à peine des secousses d'une cri-se épistémologique profonde à Laval.

Ce rapport décrira très brièvement les acquis scientifiques de no-tre département et des chercheurs/res de Laval depuis les 30 derniè-res années. Nous n'avons nullement l'ambition de présenter ici une thèse ou même un article savant ; il ne s'agit que d'un rappel rapide des données connues de nos collègues et partiellement documentées dans la littérature savante. La bibliographie cite quatre résumés de l'histoire de l'anthropologie au Québec (Gold et Tremblay 1982, 1983 ; Tremblay 1977 ; Tremblay et Gold 1976). Ces exposés ne concernent en effet que les recherches par des Québécois se rappor-tant au Québec. Cependant, ils font le point d'une bonne [125] partie des travaux de la majorité des chercheurs travaillant sur le Québec. Dans un jugement équilibré, les auteurs démontrent que les années 1960 nous ont donne surtout des recherches collectives, assez généra-les, de la paysannerie québécoise et des Autochtones. Les réussites les plus voyantes furent en génétique des populations et en anthropo-logie du développement. Après 1970, ces mêmes préoccupations ont stimulé des oeuvres moins générales, mais plus sophistiquées, utilisant les dernières théories et méthodes. On a commencé aussi l'anthropo-logie urbaine, les recherches sur les minorités ethniques, l'anthropolo-gie de la santé et du vieillissement.

Nous ne nous attarderons pas trop sur ces exposés car notre rap-port n'est pas rédigé dans le but de faire l'apologie du département.

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Tremblay et Gold, remarquons-le, veulent surtout accentuer les réus-sites de l'anthropologie du Québec pendant ces 20 dernières années. Ils font valoir que le volume et l'envergure des études effectuées donnent à l'anthropologie du Québec une identité unique (1983:80). Ils ne manquent pourtant pas de souligner la faiblesse des anthropologues québécois qui laissèrent passer leur chance d'être les critiques so-ciaux et les commentateurs de la culture et de la société québécoise (Idem: 79-80).

Certaines autres publications nous aident à voir que le département connut, même en 1976, de sérieuses difficultés épistémologiques. Cel-les-ci mirent en question le projet tout entier de l'anthropologie et peut-être même celui des sciences sociales en général. Elles minèrent la cohérence de notre programme global ainsi que l'enthousiasme du corps étudiant, en dépit du fait que la pédagogie et les cours aient connu une amélioration constante et que le niveau de la production étudiante soit devenu supérieur à ce qu'il était.

[146]

Ces difficultés épistémologiques ne furent pas ressenties qu'au Québec. La remise en question de l'anthropologie fut l'un des grands mouvements internationaux des années 1970, qui se manifesta presque simultanément en France (Leclerc 1972, Copans 1975), en Angleterre (Asad 1973) et aux États-Unis (Hymes 1972) par la publication de re-cueils engageant des écoles de savants souvent de tendance marxiste. Les thèmes principaux : décolonisation de l'anthropologie, la position de classe et la complicité des ethnographies, leurs « garants », leur incapacité de « construire leurs objets de recherche » au-delà du co-lonialisme (Bourdieu 1976) ainsi que leur tendance à interpréter com-me égalitaires des rapports sociaux où le rapport dominant/dominé exerce en vérité un rôle de première importance. Cette critique enleva à l'anthropologue son statut favori d'observateur « scientifique », en insistant sur toutes ses insuffisances comme instrument d'enquêtes « objectives ». Leclerc (1979) a décrit l'histoire de l' « observateur de l'homme » comme s'il ne s'agissait que de l'histoire du colonialisme (externe et interne) des sociétés capitalistes, c'est-à-dire, comme s'il ne s'agissait pas du tout de l'accumulation des savoirs par une prati-que scientifique.

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Tandis que ces critiques ont profondément marqué la pratique de l'anthropologie dans tous les pays de l'Occident, elles frappèrent de plein fouet un département comme celui de l'Université Laval dont les membres étaient plutôt jeunes (donc moins pris dans les habitudes d'une ère révolue), gauchistes (donc très ouverts à ces formes de cri-tique), québécois (donc très sensibles au colonialisme) et francophones (donc en contact immédiat avec les anthropologues français qui ont en grande mesure inspiré ce mouvement). Or, la critique peut devenir dangereuse là où elle ne rencontre absolument pas de résistance, car toute critique a sa limite d'applicabilité et il se trouve dans la commu-nauté scientifique des conservateurs qui se chargent en règle générale de la défense des idées démodées. [147] S'ils sont trop nombreux, ceux-ci peuvent bien gêner le développement, mais s'ils sont présents dans un dosage approprié, ils peuvent définir convenablement les limi-tes d'applicabilité des critiques radicales.

Dans notre jeune département, ces forces d'équilibre firent dé-faut, car la petite minorité de chercheurs « séniors » en poste ne s'opposait pas à ces critiques radicales. Personne n'a jamais regretté ce manque d'équilibre, car nous sommes bien capables nous-mêmes d'apprendre à naviguer notre navire.

Une manifestation intéressante de cette critique radicale se trou-ve dans le magnum opus du département en 1976 : un « programme de recherche » de 294 pages sur « les populations nordiques du Québec-Labrador face à l'intervention étatique et à l'industrialisation » (PRO-PONORD) (Collectif 1976). La production de ce document fut surtout un travail communautaire de tous les membres du département, ainsi que de plusieurs consultants invites de l'extérieur. Presque tous les collègues se rencontrèrent très régulièrement pour en élaborer la pensée. Ces réunions avaient souvent l'air de séminaires en anthropo-logie marxiste où on enseignait, dans toutes ses modalités, un modèle plutôt puissant du « capitalisme périphérique ». Pour le développement du département, cette activité collective était toute aussi importante que le document qui en résulta.

Ce programme préconisa une approche renouvelée « de type néo-marxiste » (p. 35) qui réduisit tous les concepts de toutes les sciences sociales a un seul : celui de « mode de production ». Ainsi, il s'opposa

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au « cloisonnement réciproque entre disciplines », à la « spécialisation à outrance », à l'« hégémonie disciplinaire ou sous-disciplinaire ». Il proposa que toutes les sciences sociales se fusionnent dans une seule science marxiste qui ferait [148] la critique de l'intervention de l'État auprès des populations nordiques.

Sur le plan de l'organisation universitaire, ce programme provoqua un rapport asymétrique entre l'anthropologie et les autres sciences sociales. Car le marxisme ne manquait pas d'appuis dans les autres sciences sociales, qui étaient pourtant moins susceptibles de se plain-dre du « cloisonnement réciproque entre disciplines ». Ainsi, les socio-logues marxistes continuaient à faire la sociologie avec ses méthodes habituelles, même si elle absorbait les concepts et les modèles du marxisme. On pourrait en dire autant des politicologues et des écono-mistes. Leurs disciplines restaient « cloisonnées » tandis que l'anthro-pologie s'aventurait dangereusement dans un immense espace scienti-fique dont elle ne pouvait pas connaître tous les pièges.

Pour les anthropologues, le décloisonnement que véhiculait l'appro-che marxiste a favorisé la recherche d'appâts scientifiques complé-mentaires à l'axe anthropologique. Comme le fait remarquer Claude Bariteau dans un commentaire récent, plusieurs de nos chercheurs ont fait oeuvre de débordement disciplinaire, allant a l'encontre du cloi-sonnement disciplinaire de la Faculté des Sciences sociales à Laval.

Cependant, ces chercheurs ne réussissaient pas a susciter une col-laboration dans les autres départements. L'éclatement de la perspec-tive anthropologique à Laval s'est bute sur un renfermement discipli-naire. Ceci a sans doute contribué a l'effondrement du PROPONORD, et ce problème reste tout entier, car même le programme d'un renou-veau anthropologique proposé ci-dessous repose sur l'idée de la répar-tition des tâches entre les disciplines. Car on fera valoir dans les pa-ges suivantes que le rôle principal de l'anthropologie se situe sur le plan de la communication entre les cultures [149] et entre les systè-mes fermés. Notre rôle sera donc toujours de susciter et d'analyser, de rechercher, en tous le sens du mot, ces échanges et l'échange avec les autres disciplines fera partie de ce projet. Sans doute pourrions-nous aller plus loin par l'avenir en manifestant une ouverture au dialo-

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gue. Nous ne voulons que faire remarquer ici que PROPONORD consti-tua une telle ouverture et que celle-ci échoua.

Il ne faut pas sous-estimer le découragement qui résulta quand on dut abandonner le PROPONORD. Par la suite, le département n'a ja-mais développé des idées de cette envergure. Comme le démontrent bien les articles de Tremblay et Gold, l'anthropologie s'était dévelop-pée en 1976 au Québec jusqu'au point où cette discipline aurait pu jouer un rôle majeur dans la vie québécoise. En 1976, ce rôle n'était certes pas encore comparable à celui de la sociologie, de la science politique et de l'économique, mais le PROPONORD aurait pu le définir davantage comme la discipline d'une critique de fond de nos institu-tions et de nos habitudes exploitatives inavouées. L'échec du PROPO-NORD mit fin, en douce, à ces ambitions pourtant difficiles à rempla-cer.

Dans une esquisse d'histoire très lapidaire comme celle-ci, en conclusion, on ne peut que procéder d'un document témoin à un autre, choisi plus ou moins par hasard. Deux documents de 1978 nous indi-quent les développements post-PROPONORD. Le premier de ces docu-ments fut essentiellement l’œuvre de nos étudiants qui avaient organi-sé des « Journées anthropologiques » surtout dans le but de faire la critique radicale de l'anthropologie. La contribution des étudiants à ce volume était plutôt discrète, mais elle véhicula, par son choix de cita-tions, une attitude très négative envers l'anthropologie comme scien-ce. On trouve, dans l'introduction, une citation de Foucault qui dit que toutes les sciences sociales ont échoué « au seuil des formes scientifi-ques ». Le message de leur recueil est [150] surtout que l'anthropolo-gie n'est pas une science. Ce message est articulé le plus clairement dans la contribution de Jean Copans (pp. 32a-33) qui exprime sa « mé-fiance à l'égard de tout département d'anthropologie », car l'anthro-pologie serait toujours le « savoir social du pouvoir ». La lutte des classes pour l'anthropologue, « c'est tout à la fois la destruction de l'impérialisme et de l'anthropologie ». On se rappellera que cette phrase fut pour plusieurs années (et est peut-être encore aujourd'hui) le credo de la plupart de nos étudiants.

Avant de quitter ce recueil, nous voulons toutefois mentionner brièvement un petit article de Claude Bariteau, « Entre la gêne et la

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honte » (pp. 44-44a) qui rappelle que « l'anthropologie n'a d'avenir que dans ses limites », ce qui implique que, pour cet auteur, l'anthropologie a quand même un avenir. Elle peut servir « à construire l'imaginaire et former la différence ». On n'accordait peut-être pas, à ce projet mo-deste, toute l'importance qu'il méritait. La critique de Copans, par contre, a marqué profondément la pensée de nos étudiants/tes qui en-visageaient donc, avec beaucoup de plaisir, la destruction - ou plutôt l'autodestruction - de leur sujet d'études, l'anthropologie. Peut-on même dire que la pensée de tous nos enseignants/tes était tout à fait libre, a cette époque, de cette pulsion de mort professionnelle?

Quand on s'écrie « C'est mieux que je meure », il y a toujours l'écho qui répond « meurs ». on n'aime pourtant pas écouter cet écho et encore moins quand c'est le doyen qui le répercute. Malheureuse-ment, ces inconvénients ne suffisent souvent pas pour résoudre une crise épistémologique. Même la décroissance du nombre de nos étu-diants ne suffit pas nécessairement à nous en guérir.

Inutile d'entrer ici dans le débat avec Jean Copans. Car comment trancher si notre objet s'identifie en fin de compte, oui [151] ou non, à la lutte des classes? Comment décider si on peut faire de l'anthropo-logie sans participer à la « reproduction de la domination »? Pourrait-on soulever les mêmes objections contre les professions de musicien, d'écrivain, d'artiste? Les dangers contre lesquels Jean Copans veut nous sensibiliser sont bien réels, mais peut-on y survivre? Les individus peuvent trancher ces questions en ce qui les concerne, mais une équipe comme la nôtre ne peut pas en statuer collectivement.

Car la crise épistémologique ne se situe pas qu'au plan moral. Ceux qui se demandent si l'anthropologie est « scientifique » ont raison : notre capacité d'observer « objectivement » le comportement de l'Homme et d'interpréter sa pensée est très limitée, voire, très incer-taine. On se demande pourtant si on peut jamais décider, sur de tels principes, si une certaine pratique universitaire est « scientifique », oui ou non. Car le scientifique n'est pas celui qui possède beaucoup de connaissances sûres, mais celui qui limite ses conclusions selon son de-gré d'ignorance. Sans doute l'anthropologie doit apprendre à se limi-ter aux objets qui sont connaissables autrement que comme opinions, comme intérêts, comme croyances. Cet apprentissage ne fait que

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commencer et il s'avérera assez dur. La question plus épineuse est ce-pendant sur un autre plan : l'anthropologie peut-elle encore trouver des objets d'étude de très grand intérêt si elle se limite à ce qu'elle peut vraiment connaître? Peut-elle toujours offrir les perspectives éblouissantes qui ont permis sa genèse et son épanouissement? Ces perspectives étaient-elles jamais plus que des illusions?

L'anthropologie ne peut survivre que si elle a un projet valable, un projet d'ensemble qui organise les divers aspects de la discipline, « purs » ainsi qu'appliqués, et qui constitue un champ d'engagement valable pour ceux qui y participent. Cependant, c'est très difficile pour un comité de proposer à une communauté de professeurs [152] quelle est la meilleure voie à suivre. Nous croyons que nous sommes bien dans l'obligation de vous faire une proposition, même si cette proposition ne peut servir que comme point de départ d'un débat. Nous ne proposons pas notre solution comme la meilleure, mais comme une voie possible et utile à la discussion. Nous n'avons aucune certitu-de autre que la survie du département dépend d'une définition conve-nable de notre objet global. Nous acceptons volontiers que c'est une mauvaise chose qu'un groupe d'enseignants soient réduits à cette né-cessité de définir leur objet - comme si cet objet n'était pas défini une fois pour toutes dans les universités dont nous sommes issus. Mal-heureusement, la crise épistémologique est bien réelle : il nous faut bien changer d'objet. Cela ne se fera pas sans beaucoup de débats dont ce document n'est qu'un début. La proposition qui suivra ne veut pas unir le département autour d'un concept théorique ou autour d'une philosophie particulière. Elle ne veut surtout pas entraver l'individua-lisme qui s'est installé au département parmi les étudiants ainsi que parmi les enseignants et qui est, en somme, un élément positif. Cet in-dividualisme ne s'exprime pas que dans le choix des aires culturelles ; mais aussi dans ce que Yvan Breton a appelé, dans un commentaire ré-cent « un éclecticisme dans les sujets de recherche sur le Québec » qui continue malgré nos initiatives de concertation telles Anthropolo-gie et Sociétés et les conférences du Laboratoire.

Cependant, comme le fait justement remarquer Yvan Breton, notre individualisme - signe de notre maturité comme chercheurs/res - ne devrait pas nous rendre insensibles « à la nécessité que le départe-

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ment présente une cohérence plus grande au plan recherche vis-à-vis la société plus large ». Yvan Breton a bien raison d'utiliser le mot « nécessité », car notre survie comme département dépend évidem-ment de deux conditions : il faut d'abord que notre département transmette des savoirs et des méthodes particulières qui ne fassent pas partie du dispositif d'autres disciplines universitaires ; [153] et il faut deuxièmement que la société plus large sente le besoin de s'en prévaloir. Il serait pourtant vain de se réclamer de savoirs et de mé-thodes spécifiques si on n'en possède pas ou si les savoirs et les mé-thodes en question ne nous appartiennent pas en propre.

Il serait tout aussi vain de prétendre que tous les travaux que nous faisons se fondent, dans tous leurs éléments, sur ces qualités distinc-tives. Car il existe un grand nombre de problèmes que nous avons en commun avec d'autres disciplines, et chacune des disciplines des sciences sociales puise beaucoup dans les savoirs et dans les méthodes des autres. L'anthropologie cannibalise, en outre, très souvent certai-nes disciplines des sciences humaines. Il faut donc distinguer entre ce que nous avons en commun avec les autres, et ce qui nous est particu-lier.

Si ces qualités se réduisaient à un certain corpus de concepts ou de données que nous serions les seuls capables de manier, le problème de notre identité comme discipline ne se serait jamais présenté. Nous ne pouvons pas, non plus, poser comme détenteurs uniques de certaines doctrines ou de certaines grandes théories. Car celles-ci ne sont ja-mais particulières à l'anthropologie, ni partagées par toute notre équi-pe. Nous croyons que notre discipline a bien son principe unificateur, mais on ne peut pas le trouver sans y réfléchir un peu, ce qui peut jus-tifier ce long mémoire.

Premièrement, on ne trouvera pas ce principe unificateur dans no-tre plan directeur triennal 1983-86. Ce plan définit dans les termes suivants la mission de notre département : il « axe ses enseignements et ses recherches a l'intérieur des grandes orientations théoriques de l'anthropologie sociale et culturelle dans une perspective critique » (1982, Tableau B). Cette phrase, émise le 26 [154] octobre 1982, pas-se sous silence tous les doutes qui persistent au département, sur ce que seraient ces « grandes orientations ».

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Deuxièmement, on ne trouvera pas ce principe unificateur dans nos travaux. Pour des raisons évoquées ci-dessus, nous nous distinguons de d'autres départements en Amérique du Nord par une représentation assez forte de la pensée marxiste et structuraliste, et par notre habi-tude de penser dialectiquement, qui est plutôt rare en Amérique du Nord. Mais nous pratiquons aussi beaucoup l'écologie culturelle et nous ne dédaignons pas totalement le fonctionnalisme structurel. Aussi la phénoménologie a parmi nous ses avocats, parmi les professeurs ainsi que dans le corps étudiant. La synthèse et la cohérence ne va donc pas de soi dans notre département.

Troisièmement, ce principe unificateur (si on peut le trouver) ne doit pas trop bousculer nos programmes actuels. Ces programmes ex-priment nos perspectives actuelles qui ne peuvent changer que très graduellement. Le cadre conceptuel nous aidera cependant à élaborer nos futurs plans directeurs, à augmenter ou à réduire la fréquence de certains cours déjà prévus, à formuler des projets de recherche qui y correspondent et finalement a assurer nos étudiants et nous-mêmes que nous avons vraiment un avenir comme discipline. Notre objectif immédiat est en effet de rétablir cette assurance.

Considérons maintenant l'apport principal de la crise épistémologi-que des années 1970. L'anthropologie d'avant 1970 était en effet pen-sée comme discipline « universelle » qui établirait donc des lois socia-les universellement valables ; les systèmes de pensée tribaux, natio-naux, même régionaux n'y figuraient donc que comme des objets d'étude doués en principe d'une « scientificité » moindre que la scien-ce supposément universelle de l'anthropologie. Une telle position 'épis-témologique est probablement juste s'il s'agit d'une pratique scienti-fique suffisamment rigoureuse, mais il est désormais [155] très clair que l'anthropologie d'avant 1970 ne satisfaisait pas à ces critères. L'apport principal de la crise épistémologique fut en effet de remet-tre en question le rôle de l'observateur de l'Homme comme biaisé en principe par ses engagements de classe et de culture de naissance. Étant donné que cette limitation ne peut pas disparaître, nous avons quand même la possibilité, donc le devoir, de la réduire par un contrôle épistémologique supplémentaire. Ce contrôle, qui est désormais de plus en plus répandu en anthropologie, ne prend pas seulement comme objet

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d'études une ethnie ou un groupe social qu'on veut « connaître », mais inclut l'histoire des rapports (la « dialectique » si on veut) entre ce groupe et le groupe social du chercheur.

Dans ce rapport, le chercheur et le groupe étudié se présentent donc comme des égaux, chacun avec son idéologie, ses constructions d'identité collective, ses opinions, ses intérêts, ses croyances. La confrontation de ces deux systèmes n'est évidemment pas possible sans l'interposition d'un autre chercheur. Cependant, cette critique de la position du chercheur nous donne en principe une meilleure approxi-mation que la précédente. Toute notre prétention épistémologique se réduit donc à celle de trouver la meilleure approximation possible de la vérité.

Cette critique de l'observateur remet en question aussi un certain « internationalisme » de l'anthropologie ; une tendance de sous-évaluer l'importance des frontières culturelles, tant pour les sujets que pour les observateurs (Lévi-Strauss 1983). Nous proposons ici de centrer le projet de l'anthropologie, en grande mesure, dans l'échange d'informations entre le groupe de chercheur et celui des « informa-teurs ». Cet échange d'informations s'inscrit surtout dans l'histoire des rapports entre les deux groupes en question, car l'observateur hérite des présuppositions erronées reproduites au sein de sa propre société à l'endroit du groupe étudié, mais aussi [156] des présupposi-tions, souvent cruelles, parfois déformantes, dont se nourrit le groupe étudié à notre endroit. C'est donc la destinée de l'ethnographe de su-bir dans son travail quotidien toute l'histoire de mésententes, de cruautés, d'exploitations réciproques de mensonges et de tromperies dont a consisté le contact entre ces deux ethnies. On comprend donc bien que l'histoire est l'une des préoccupations de choix de l'anthro-pologie. Comme le fit remarquer Bernard Saladin d'Anglure, dans un commentaire récent, l'histoire est ce moment par quoi une société se révèle telle qu'elle est. Il appartient donc à l'ethnographe d'étudier l'idée que chaque société se fait de sa propre histoire, sans quoi il ne saurait atteindre à la communication transculturelle véritable.

Cependant, cette idée que l'anthropologie est une communication entre des égaux implique aussi que c'est une communication entre

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deux ethnies, plutôt qu'entre une ethnie et un interlocuteur dont la pensée se prétend internationale ou universelle.

Nous admettons donc librement que les informations recueillies parmi nos instructeurs étrangers seront utiles à notre communauté nationale. Dans la belle formulation de Claude Bariteau, on pourrait dire qu'elles servent à « construire l'imaginaire et former la différen-ce ».

Nous ne pouvons pas développer dans ce papier toutes les implica-tions de cette formulation subtile, mais disons brièvement ici que les terrains nous montrent toujours comment on peut vivre autrement, comment on peut affronter une problématique autrement ; et deuxiè-mement, les terrains peuvent nous montrer aussi quelques possibilités de rapatrier ces nouvelles idées présentées à l'imagination, de les adapter et de leur permettre de « faire la différence » ici.

[157]

Cette anthropologie accepte donc une vision d'abord nationaliste de la production intellectuelle. Au sein de la nation, elle assume le râle de communicateur avec l'autrui culturel. Ce rôle aurait donc en princi-pe trois moments : le moment de la découverte externe, celui de la sensibilisation interne (donc, à l'intérieur de la société du chercheur), et le moment de la réflexion épistémologique (l'analyse comparative).

L'anthropologie serait donc essentiellement une science des ter-rains - ailleurs et ici. Ce dernier principe fut, par ailleurs, à l'origine de la création même de notre département. Parlant des années 1969-1975, Tremblay et Gold (1976: 21-22) rappellent : « Tous les étudiants devaient aller sur le terrain ». Ils commentent

Ainsi peut-on dire que l'apprentissage à la recherche plutôt que le développement d'une perspective théorique constitue la pierre angulaire du programme d'anthropologie à Laval. Cette vocation théorique appartenait plutôt aux sociologues qui, sous la direction de Fernand Dumont, s'adonnèrent en grand nombre aux analyses idéologiques et historiques.

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Ce constat est d'un grand intérêt historique. Pour analyser ses im-plications, remarquons d'abord que le théorique est comme le naturel : chassez-le, il revient au galop. Si les premiers architectes de notre département voulaient vraiment construire un programme d'ethnogra-phie pure (et appliquée) sans théorie, et laisser la théorie aux sociolo-gues, ils se trompaient car notre département tombait dans une crise épistémologique après moins d'une décennie. On doit pourtant suppo-ser que telle n'était en effet pas leur intention. Une communication récente de Marc-Adélard Tremblay nous apprend que les premiers an-cêtres de notre département avaient des théories bien à eux, qui n'étaient pas celles de Fernand Dumont et de la sociologie d'alors et qui nourrissaient le grand débat Rioux-Garigue sur la nature de la so-ciété traditionnelle québécoise. Ces idées insistaient sur la première nécessité de l'ethnographie du [158] Québec et l'utilisation de cadres conceptuels. Afin de les cerner de plus près, regardons donc l'histoire des pratiques de notre département.

Nous n'avons nullement l'intention de contester les propos de Tremblay et Gold (1976: 26) qui parlent de « l'esprit provincialiste de l'Université Laval », un esprit qui se retrouverait parmi les étudiants ainsi que chez les professeurs (ibid., p. 24). Cependant, les auteurs reconnaissent que l'anthropologie lavalloise ne pouvait pas rester in-sensible à l'ouverture vers l'extérieur qui a toujours fait partie de la tradition anthropologique dans le monde. Ils font remarquer que :

À la fin des années soixante, l'anthropologie à Laval était définitivement centrée sur le Québec et l'aire culturelle latino-américaine constituait un pôle comparatif, (ibid., p. 24)

Sans doute ce pâle comparatif fut regardé au début comme se-condaire. On pourrait presqu'en dire autant de l'importance accordée à nos recherches en Afrique, en Mélanésie et ailleurs, même aujour-d'hui. Cependant, il reste qu'une bonne partie de nos professeurs se sont trouvés une « deuxième patrie » dans un pays lointain où ils ont fait leurs recherches ; qu'ils ont prolongé leurs contacts avec ces deuxièmes patries bien après la rédaction de leurs thèses ; qu'ils ont

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attiré, en plus, des étudiants originaires de ces deuxièmes patries ; que ceux-ci ont certainement bousculé le provincialisme du passé ; que notre revue « Anthropologie et Sociétés » a accentué davantage cet internationalisme en herbe ; et finalement que même les recherches faites à l'intérieur du Québec ont fortement subi l'influence des ex-périences des chercheurs travaillant à l'extérieur.

[159]

Ceci est évident surtout dans les recherches stimulées par Yvan Breton sur la paysannerie et sur les pêcheurs de l'Amérique latine et du Québec, car ces recherches étaient complémentaires les unes aux autres en dépit de l'ampleur des différences culturelles des commu-nautés observées. On peut y découvrir une certaine séquence épisté-mologique partagée par plusieurs projets du département. L'expérien-ce de l'Amérique latine servit à remettre en question les présupposi-tions « provincialistes » des chercheurs qui ont appris à regarder leur pays de naissance « autrement ». Ce regard nouveau leur permit d'ana-lyser ensuite, et d'une façon inattendue, la paysannerie, les pêcheurs, etc. du Québec. Ce modèle épistémologique s'applique d'ailleurs aussi et surtout à l'anthropologie appliquée. Un article d'Yvan Breton sur « la diffusion et l'utilisation des résultats de recherche dans Belle-chasse » (1984) démontre que ce projet d'anthropologie appliquée connut quelques difficultés initiales avant qu'on eût pris conscience du rapport chercheurs/paysans en tant qu'un rapport entre deux cultures différentes, celles de la paysannerie et de l'université. On élaborera par la suite des instruments de communication pour stimuler l'échange transculturel d'information. La tâche de notre département aurait donc été de développer les principes de cet échange d'informations. Breton pense que ce modèle pourrait bien être pertinent à l'anthropo-logie appliquée tout entière,

Il ne s'agit pas ici, de toute évidence, d'importations exotiques d'un mode de pensée sans pertinence au Québec. Car, comme l'ont si bien souligné Tremblay et Gold, ces chercheurs étaient venus « à l'Université ayant en tête des problèmes de recherche très spécifi-ques urgents se rattachant à l'évolution sociologique de leurs villages et comtés d'origine » (ibid., pp. 26-27). Ils avaient en effet exporté d'abord ces problèmes. Ils avaient sans doute abordé au début les

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problèmes de la paysannerie latino-américaine avec certaines présup-positions « provincialistes » qu'ils ont corrigées [160] ensuite. Ils ana-lysent désormais les deux types de situations (québécoises et latino-américaines) par le même modèle général, tout en restant très cons-cients des différences et tout en travaillant de très près avec les in-tellectuels latino-américains.

L'anthropologie lavalloise se situe donc à mi-chemin entre deux tendances notoires : celle des départements des sciences sociales qui se limitent pour l'essentiel à la définition du Soi national, et celle des départements d'anthropologie très répandus dans le monde qui se limi-tent à la contemplation de l'Autre sans s'occuper sérieusement du Soi. Sans doute, cet équilibre intéresse d'autres écoles d'anthropologie aussi bien que la nôtre, mais nous croyons que nous sommes les pre-miers qui aient proposé de construire un modèle de l'anthropologie sur cette dialectique. Car nous avons fait l'expérience d'une anthropologie qui passe par deux ruptures épistémologiques, plutôt que la seule - le « choc culturel » - si bien documentée dans la littérature. Nous ad-mettons toujours cette première, c'est-à-dire une sorte d'autocriti-que faite lors de nos « terrains », mais nous y ajoutons une deuxième : la rupture subie quand l'ethnographe retourne à sa « première pa-trie », son milieu d'origine, et quand il doit raviser en profondeur la vision qu'il en avait avant de faire son terrain « externe ».

Avant de développer toutes les implications de cette idée et de démontrer qu'elle peut vraiment fonder une anthropologie et que cet-te anthropologie pourrait être pleine d'intérêt et intégrer nos activi-tés courantes d'enseignement et de recherche, nous voulons d'abord documenter la proposition de base qu'une telle perspective anthropo-logique existe en effet à l'heure actuelle à l'Université Laval. Cette documentation est, heureusement, déjà disponible.

Serge Genest a recueilli un livre de textes d'anthropologues qué-bécois qui porte sur la pratique du terrain en anthropologie. [161] Do-cument précieux sur nos attitudes envers le « terrain » ; ce livre pré-sente l'image d'une « anthropologie chaude axée sur la nécessité et la satisfaction d'entretenir des rapports intenses avec d'autres hu-mains ». (p. 7). L'auteur se montre bien conscient de la crise épistémo-logique précipitée par la fin du colonialisme classique. Il trouve pour-

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tant peu de traces de cette attitude colonialiste parmi les chercheurs lavallois qui auraient, selon lui, « privilégié des rapports de type égali-taire » et « insisté sur l'échange avec les gens chez qui ils ont travail-lé » (p. 14). D'autre part, il propose que l'originalité de l'anthropologie se trouve dans le terrain et dans « la réflexion sur la signification du terrain » (pp. 7-8).

La situation actuelle de notre département nous oblige, en effet, à pousser plus loin cette réflexion, et de poser deux questions précises : (1) Étant donné que le terrain est une sorte de dépaysement et d'échange, pourquoi devrait-on y voir aussi une pratique scientifique distinctive? ; (2) Même dans le cas où il s'agit d'une pratique scientifi-que, quelle importance aurait-elle pour le Québec?

La première de ces questions est la moins difficile parce qu'il exis-te déjà une grande littérature sur la théorie du terrain. Cette littéra-ture est pourtant fort indécise sur l'essentiel du débat : ceux qui ac-ceptent le positivisme n'accorderont pas de valeur au « terrain » comme tel, mais seulement aux données valables qui peuvent en résul-ter. La valeur scientifique du « terrain » est, par contre, tout à fait évidente pour ceux qui s'apparentent à la phénoménologie ou à l'her-méneutique (l'école de Paul Ricoeur) car ceux-ci regardent le « ter-rain » comme le lieu de la « traduction », de l'échange entre l'inter-prète et l'interprété, donc comme le seul champ d'activités vraiment scientifique en anthropologie. La plupart [162] de nos chercheurs ne sont pourtant ni des positivistes ni des épigones de Paul Ricoeur.

Il existe en effet un nombre de théories en sciences sociales, no-tamment celle de Pierre Bourdieu en France et de Anthony Giddens (1979) en Angleterre, qui insistent sur certains critères d'objectivité - structuralistes ou marxistes ou un mélange de ces deux - et qui ne dédaignent pas pour autant d'interpréter l'intentionalité des sujets actants et donc d'entretenir avec eux des rapports intenses comme partie d'un projet scientifique. On peut donc supposer que les mem-bres de notre département peuvent bien regarder le « terrain » com-me une pratique scientifique, et donc emprunter certaines méthodes herméneutiques sans pour autant sombrer dans un subjectivisme dé-mesuré. Il semble en effet que l'approche préconisé par Serge Genest

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suit de très près la formulation herméneutique suivante de deux an-thropologues américains :

The interpretive act, conceived as a process of translation in a continuing dialogue between interpreter and interpreted, de-pends on the explicit examination of one's bias and preunders-tandings as a basic, positive step of analysis that moves forward in a dialectical way. (Marcus and Cushman 1982: 38)

Tandis que cette approche au « terrain » semble être presque une constante de l'anthropologie d'ici, les méthodes d'objectivation va-rient beaucoup d'un membre du département à un autre. Cette objec-tivation ne se confond pas à l'autocritique dont parlent Bariteau, Ma-randa et Genest (dans le recueil de celui-ci) et l'article de Marcus-Cushman, car cette autocritique sert à corriger la conscience du su-jet-chercheur tandis que nos méthodes d'objectivation servent à ré-véler certaines conditions d'action non-reconnues par l'acteur qui peu-vent avoir des conséquences non prévues par celuici (Giddens 1979: 56).

[163]

Tandis que ce. n'est donc pas difficile de démontrer que nos « ter-rains » sont « scientifiques », ce n'est pas évident d'emblée pourquoi nos pratiques pourraient jouer un rôle important dans le développe-ment de la culture québécoise. Le public en général semble nous concé-der un rôle particulier dans nos travaux avec les Autochtones et peut-être avec les immigrants, c'est-à-dire dans les domaines ou ces tra-vaux ont été jusqu'ici les plus « visibles ». Le même public a beaucoup moins remarqué nos contributions, pourtant considérables (et décrites en détails dans les articles de Tremblay et Gold mentionnés ci-dessus), parmi les Québécois francophones. Ceci peut étonner dans une période où les Québécois ont pourtant un goût considérable d'auto-description et d'auto-analyse.

On ne peut en effet pas très bien nier que certaines autres disci-plines, telles la sociologie, la science politique, l'histoire, étaient plus proches à cette époque des besoins immédiats d'une population cher-

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chant avant tout, dans les sciences sociales, une définition acceptable de son identité nationale. Quand Fernand Dumont définit la sociologie comme une science qui s'occupe avant tout des conflits entre les idéo-logies (1974b: 156), il combla ainsi les vœux des Québécois, qui cher-chaient précisément une discipline qui pouvait leur expliquer le conflit idéologique entre les cultures francophone et anglophone. Cette même construction théorique commença donc à dominer pendant les années 1960-1980, le discours de toutes les sciences sociales - sauf l'anthro-pologie. Notre discipline ne s'occupait ni du retour aux sources ni des représentations de l'identité nationale. Il n'y avait rien de folklorique par exemple, dans la description donnée par les anthropologues de la paysannerie de Bellechasse ou des pêcheurs de la Côte-Nord. On se servait plutôt de certains modèles qui s'appliquaient d'une façon pas trop différente en Amérique Latine. Les anthropologues ne s'oppo-saient pas au nationalisme, loin de la, mais leur forme de nationalisme était un peu à contre-courant.

[164]

Dans le Québec, en relation aux autres disciplines universitaires, nous jouerons donc le rôle du dépaysement, du regard sur l'extérieur, de l'information transculturelle. On apprendra comment faire des « terrains », quels modèles se sont développés pour vivre « autre-ment ». On y gagnera une nouvelle conscience de soi-même et de sa société. On aidera cette société à mieux comprendre ses habitudes véritables ainsi que ses goûts, ses choix esthétiques et à mieux com-prendre aussi ce qui nous distingue des autres et en quels aspects de nous-mêmes nous ressemblons à certains autres. Ces « terrains » à l'extérieur et chez nous-mêmes nous permettent de jouer un rôle mo-deste et limité - le rôle d'ouvrir des fenêtres quand il y a une odeur de renfermé dans la maison. On devrait faire le bilan des fenêtres que notre département a déjà ouvertes et de celles qu'il est en train d'ou-vrir ; ce serait un travail intéressant à faire, mais qui dépasse la visée de ce mémoire.

Dans le monde universitaire, on accentuera surtout que l'anthropo-logie est seule compétente à traiter certains types d'informations. Nous n'avons pas besoin de nous retirer de ce que nous faisons déjà, mais plutôt d'accentuer les aspects où nous sommes forts. Regardons

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encore le cas de Bellechasse, puisque nous en avons déjà parlé, mais il y a beaucoup d'autres exemples qu'on devrait cataloguer et analyser. À Bellechasse, donc, notre équipe a étudié l'économique et l'agricultu-re. -Ce sont des sujets qu'on étudie aussi dans d'autres départements de l'Université. Afin d'aider les paysans de Bellechasse, on a pourtant besoin d'autres connaissances aussi - il faut savoir échanger avec les hommes qui font l'agriculture à Bellechasse et comprendre leur situa-tion. On a donc besoin de l'anthropologie pour s'insérer dans cette charnière. On le fait déjà dans les contacts avec les Montagnais et les Inuit et avec les immigrés. On commence à démontrer que la marginali-té est un phénomène beaucoup plus répandu et que cette marginalité pose des problèmes de traitement d'informations où nous sommes spécialisés. Il [165] faudra surtout accentuer que ces informations ne se rapportent pas toujours aux questions de la survie, mais aussi de la qualité de la vie, des goûts et des choix esthétiques.

Notre rôle dans le champ international devrait aussi être explicité. Nous ne jouons pas encore le rôle qui nous revient dans l'échange culturel avec l'Afrique, avec les Caraïbes et avec les autres pays qui sont les partenaires du Québec au Tiers-Monde. Je crois que cela pourrait changer quand nous aurions défini nos véritables champs de compétence.

Peut-être cette définition semblera trop « générale » pour inté-resser les étudiants qui cherchent une université pour leurs travaux gradués. Il faudra donc préciser davantage comment nos programmes s'articulent autour de cette définition générale. Car celle-ci ne peut pas être plus qu'une ambiance, qu'un climat à l'intérieur duquel nous pourrons travailler. À l'heure actuelle, la plupart de nos enseignants ont des compétences qu'ils n'utilisent guère parce que les programmes ne le permettent pas. La définition générale offerte ici rendra « com-municables » les champs de leur expertise véritable. Le « test » le plus convaincant d'un « principe unificateur » - celui que nous avons propo-sé, ou un autre qui nous plaira plus - c'est qu'il devrait exploiter plei-nement nos ressources de connaissances, ou tout au moins : qu'il de-vrait les exploiter davantage. Pour faire ce « test », il faudrait consul-ter un par un tous les membres de notre département.

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[167]

L’anthropologie à l’Université Laval. Fondements historiques, pratiques académiques,

dynamismes d'évolution.

ANNEXE

1. Liste des thèses de maîtrise produites au Département

Retour à la table des matières

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2. Liste des thèses de doctorat produites au Département

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