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P HYTOTHÉRAPIE Thérapie 2006 Mars-Avril; 61 (2): ??–?? DOI: 10.2515/therapie:2006023 c 2006 Société Française de Pharmacologie Botanicus et Phytotox : base de données de toxicologie végétale. Intérêt en toxicologie d’urgence et en phytovigilance Souad Skalli, 1 Jean-Marc David, 2 Gilles Palmer 3 et Rachida Soulaymani 1 1 Centre Antipoison et de Pharmacovigilance du Maroc, Rabat, Maroc 2 Centre Antipoison, Marseille, France 3 Centre de Recherche et Développement en Informatique Médicale, Bordeaux, France Texte reçu le 14 octobre 2004 ; accepté le 28 mars 2005 Mots clés : problèmes des vernaculaires ; toxicologie végétale ; phytovigilance ; base de données ; Botanicus ; Phytotox Résumé – L’objectif de la base de données Botanicus & Phytotox est double : - Botanicus regroupe et identifie plus de 279 plantes toxiques avec des équivalents de 2294 noms communs français, arabe et amazigh. - Phytotox permet d’évaluer le risque toxique de 120 plantes rencontrées en région méditerranéenne. Cette base de données est destinée principalement aux services d’urgence, aux centres antipoison et de pharmacovigilance, en particulier du Maghreb et des pays francophones. Keywords: vernacular problematic; plant toxicology; phytovigilance; database; Botanicus; Phytotox Abstract – Botanicus & Phytotox: Data Base of Plant Toxicology. Interest in Emergency Toxicology and in Phytovig- ilance. The purposes of this project were to summarize more than 279 standard botanical names and their 2294 vernacular ones (French common names, Arabic common names and Moroccan common names) for the first part of database named “Botanicus”. The second part of this data base named “Phytotox”, concerns relevant toxic data of 120 plants available in Mediterranean region. The database will be useful for emergency physicians, particularly of Maghreb and French- speaking countries. Botani- cus and Phytotox permit to assist them in providing fast and appropriate answers to questions concerning adverse eects associated with plant use. 1. Introduction Devant des populations souvent peu informées des questions de santé, en absence de législation stricte et en absence de contrôle de l’ecacité des plantes, l’usage de celles-ci, pour ces popula- tions, reste une solution facile, naturelle et “ sûre ”. Nombre de ces plantes peuvent être toxiques; leur mésusage, que ce soit à but thérapeutique, accidentel, criminel ou suicidaire, abouti à des intoxications graves, voire mortelles. [1–3] Lors d’une intoxication ou d’un eet indésirable, dès que l’origine végétale est soupçonnée, se pose un double problème : d’abord celui des appellations vernaculaires (méconnaissance, mauvaises auditions, mauvaises prononciations, influences des cultures voisines, même nom pour plusieurs plantes, etc. . . ) et de la dénomination scientifique qui leur corres- pond ; [4, 5] ensuite, lorsque la plante est identifiée, il faut, et rapidement, connaître sa toxicité afin d’évaluer le risque toxique et la conduite à tenir face à l’intoxication ou à l’eet indésirable. Rassembler en un outil maniable, sous forme d’une base de données que nous avons subdivisée en deux parties, Botanicus (pour les noms latins et les noms vernaculaires communs [et leur

Botanicus et Phytotox : base de données de toxicologie ... urgence et en phytovigilance Souad Skalli,1 Jean-Marc David,2 Gilles Palmer3 et Rachida Soulaymani1 1 Centre Antipoison

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PHYTOTHÉRAPIEThérapie 2006 Mars-Avril; 61 (2): ??–??

DOI: 10.2515/therapie:2006023

c© 2006 Société Française de Pharmacologie

Botanicus et Phytotox : base de donnéesde toxicologie végétale. Intérêt en toxicologied’urgence et en phytovigilanceSouad Skalli,1 Jean-Marc David,2 Gilles Palmer3 et Rachida Soulaymani1

1 Centre Antipoison et de Pharmacovigilance du Maroc, Rabat, Maroc2 Centre Antipoison, Marseille, France3 Centre de Recherche et Développement en Informatique Médicale, Bordeaux, France

Texte reçu le 14 octobre 2004 ; accepté le 28 mars 2005

Mots clés :problèmesdes vernaculaires ;toxicologie végétale ;phytovigilance ;base de données ;Botanicus ;Phytotox

Résumé – L’objectif de la base de données Botanicus & Phytotox est double :- Botanicus regroupe et identifie plus de 279 plantes toxiques avec des équivalents de 2294 noms communs français, arabeet amazigh.- Phytotox permet d’évaluer le risque toxique de 120 plantes rencontrées en région méditerranéenne.Cette base de données est destinée principalement aux services d’urgence, aux centres antipoison et de pharmacovigilance,en particulier du Maghreb et des pays francophones.

Keywords:vernacular problematic;plant toxicology;phytovigilance;database;Botanicus;Phytotox

Abstract – Botanicus & Phytotox: Data Base of Plant Toxicology. Interest in Emergency Toxicology and in Phytovig-ilance. The purposes of this project were to summarize more than 279 standard botanical names and their 2294 vernacularones (French common names, Arabic common names and Moroccan common names) for the first part of database named“Botanicus”. The second part of this data base named “Phytotox”, concerns relevant toxic data of 120 plants available inMediterranean region.The database will be useful for emergency physicians, particularly of Maghreb and French- speaking countries. Botani-cus and Phytotox permit to assist them in providing fast and appropriate answers to questions concerning adverse effectsassociated with plant use.

1. Introduction

Devant des populations souvent peu informées des questionsde santé, en absence de législation stricte et en absence de contrôlede l’efficacité des plantes, l’usage de celles-ci, pour ces popula-tions, reste une solution facile, naturelle et “ sûre ”. Nombre deces plantes peuvent être toxiques ; leur mésusage, que ce soit àbut thérapeutique, accidentel, criminel ou suicidaire, abouti à desintoxications graves, voire mortelles.[1–3]

Lors d’une intoxication ou d’un effet indésirable, dès quel’origine végétale est soupçonnée, se pose un double problème :

– d’abord celui des appellations vernaculaires (méconnaissance,mauvaises auditions, mauvaises prononciations, influencesdes cultures voisines, même nom pour plusieurs plantes,etc. . . ) et de la dénomination scientifique qui leur corres-pond ;[4, 5]

– ensuite, lorsque la plante est identifiée, il faut, et rapidement,connaître sa toxicité afin d’évaluer le risque toxique et laconduite à tenir face à l’intoxication ou à l’effet indésirable.

Rassembler en un outil maniable, sous forme d’une base dedonnées que nous avons subdivisée en deux parties, Botanicus(pour les noms latins et les noms vernaculaires communs [et leur

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2 Skalli et al.

Tableau I. Transcription phonétique adoptée des noms arabes et amazighs.

correspondant français – arabe – amazigh]), et Phytotox (traitantde la toxicité aiguë chez l’homme et chez l’animal), reste une pre-mière pour répondre aux problèmes des vernaculaires et une so-lution de choix pour l’étude des intoxications et des effets indési-rables par les plantes.

2. Matériel et Méthodes

Le programme de la base de données Botanicus & Phytotox,a été réalisé en Visual Basic (VB) et l’ensemble des données estgéré dans une base Access (Système de gestion de base de don-nées relationnelles) créée depuis l’environnement VB.[6]

2.1. Botanicus

La présentation que nous avons choisie, en raison de safacilité de consultation, est l’ordre alphabétique des noms desplantes : soit selon les noms communs vernaculaires (français –arabe - amazigh), soit selon la dénomination scientifique.

La transcription des noms arabe et amazigh adoptée est celleprésentée dans le tableau I. Plusieurs entrées sont possibles :

• entrée par une liste alphabétique des noms scientifiques, desnoms français, des noms arabes et des noms amazighs. Quatresous entrées sont alors possibles : latin/français - arabe- ama-zigh ; français/latin - arabe- amazigh ; arabe/latin – français- amazigh ; amazigh/latin – français - arabe. Une fois que lenom de la plante recherchée est trouvé, apparaissent tous lesautres noms lui correspondant.

• entrée par saisie au clavier du nom latin, français, arabe ouamazigh de n’importe quelle plante de la base de données for-mant le lexique Botanicus. Là encore se retrouvent les quatresous entrées suscitées. Il suffit d’entrer les premières lettres dunom de la plante recherchée pour avoir la liste des noms quilui correspondent (Figure 1).

2.2. Phytotox

La deuxième partie de la base de données que nous avonsnommé Phytotox est formée par un répertoire de fiches de toxi-cité des plantes (Figure 2 et figure 3). Chaque fiche comporte,outre une photographie de la plante traitée (permettant la recon-naissance de celle-ci), le nom latin et la famille botanique, les par-ties toxiques, la nature du composé toxique, la symptomatologiede l’intoxication aiguë, le traitement à instaurer en cas d’intoxi-cation et une bibliographie concernant le contenu de la fiche. Achaque fois que cela a été possible, nous avons rapporté la dosetoxique ou létale du végétal traité, et le risque toxique pour lesanimaux a été également précisé.

Les différentes rubriques de Botanicus & Phytotox ont étécomplétées à partir des données du Centre Antipoison et de Phar-macovigilance du Maroc (CAPM), de nos travaux personnels etde données scientifiques actualisées.

3. Résultats et discussion

Face au danger, parfois mortel, que présentent certains vé-gétaux, et devant les multiples difficultés que rencontrent les

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Botanicus et Phytotox : base de données 3

Fig. 1. Botanicus : nomenclature botanique et noms vernaculaires (français – arabe - amazigh) des plantes – cas du Cannabis sativa L.

médecins des services des urgences, nous avons tenté d’apporterune réponse avec la base de données Botanicus & Phytotox.

La première partie de cette base, unique en son genre, quiporte le nom de Botanicus, a été envisagée comme un outil pra-tique et décisionnel de correspondance entre terminologie de sys-tématique botanique et noms vernaculaires des plantes toxiques.

L’accès au lexique botanique se fait par saisie au clavier den’importe quel nom (latin – français – arabe - amazigh) de Bota-nicus.

Les données de Botanicus sont saisies et modifiées par lestrois boutons de la mise à jour : ajouter, modifier et supprimer.

Par une mise à jour régulière, Botanicus sera peu à peu com-plété aussi bien qualitativement que quantitativement.

Botanicus permettrait :

• de faciliter l’identification botanique rapide de la plante re-cherchée et, par suite, une prise en charge thérapeutique pré-coce et plus efficace de l’intoxiqué ;• d’éviter des recherches toxicologiques inutiles et les dépenses

qui en découlent ;• de déterminer plus précisément les plantes à l’origine d’in-

toxications ou d’effets indésirables.

La transcription phonétique choisie, bien que plus pratiquepour l’usage de Botanicus dans le domaine des intoxications végé-tales d’urgence, ce qui est d’ailleurs notre principal objectif, resteune transcription non rationnelle si l’on veut respecter le principe« un seul son pour une seule lettre, une seule lettre pour un seulson ».[7] En effet, pour une détermination de systématique bota-nique souvent nécessairement rapide dans Botanicus, l’utilisateurn’est pas obligé d’organiser ses recherches en tenant compte detoutes les variantes phonétiques et graphiques pouvant se formerà partir des noyaux radiculaires et qui nécessitent une connais-sance spécialisée dans le domaine (du moins en ce qui concerneles professionnels de santé des services d’urgence, des centres an-tipoison et de pharmacovigilance -phytovigilance- dont la forma-tion en botanique et en toxicologie végétale reste insuffisante). Deplus, les noms arabes et amazighs sont transcrits dans ces deuxlangues afin de permettre une utilisation et une diffusion plus largede Botanicus.

Botanicus doit être considéré pour ce qu’il revendique réel-lement : à savoir un fichier, un lexique ou encore un répertoirenomenclatural pratique des plantes toxiques.

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4 Skalli et al.

Fig. 2. Fiche de toxicité de Myristica fragrans Houtt. de Phytotox (partie supérieure de la fiche).

Fig. 3. Fiche de toxicité de Myristica fragrans Houtt. de Phytotox (partie inférieure de la fiche).

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En ce qui concerne la deuxième partie de notre base de données,

Phytotox a été conçue dans un but d’étudier la toxicité des planteset de donner par conséquent les renseignements nécessaires àl’évaluation du risque toxique en cas d’ingestion ou de contact.

Phytotox présente de multiples avantages dont principale-ment :

• rapidité et simplicité d’utilisation ;• utilité pour une réponse rapide, dans les services d’urgence et

les centres antipoison et de phytovigilance notamment. Phy-totox regroupe en un seul outil, des informations venant desources multiples et pluridisciplinaires (toxicologie, chimie,botanique, médecine, thérapeutique, vétérinaire, etc. . . ) ;• enfin, et point particulièrement important, Phytotox reste un

système ouvert avec possibilité de réactualisation et d’ajoutde fiches.

4. Conclusion

La base de données Botanicus & Phytotox, dans une formequi rende rapide, facile, pratique et agréable son utilisation, pour-rait être d’une grande utilité particulièrement pour les servicesd’urgence, les centres antipoison et les centres de pharmacovi-gilance souvent confrontés aux intoxications et aux effets indési-rables des plantes.

L’identification de la plante, et par la même l’évaluation durisque toxique, devraient conduire à un diagnostic rapide et uneaction thérapeutique plus appropriée, buts de cette base de don-nées.

Références1. Becker G. Plantes toxiques. Paris: Grund, 19842. Bruneton J. Plantes toxiques Végétaux dangereux pour l’homme et les ani-

maux. Paris: Technique & Documentation, 19963. Skalli S, Alaoui I, Pineau A, et al. L’intoxication par le chardon à glu

(Atractylis gummifera L.) ; à propos d’un cas clinique. Bull Soc Pathol Exot2002; 4: 284-6

4. Bellakhdar J. Médecine traditionnelle et toxicologie Ouest- SahariennesContribution à l’étude de la pharmacopée marocaine. Rabat: TechniquesNord- Africaines, 1978

5. Bellakhdar J. La pharmacopée marocaine traditionnelle Médecine arabe anci-enne et savoir populaires. Paris: Ibis Press, 1997

6. Abbasbhay H, Kocher GL, Liger F, et al. Microsoft Visual Basic 5. Paris:Micro Application, Grand livre, 1998

7. Monteil V. Contribution à l’étude de la flore du Sahara occidental. Paris:Larose, 1953

Correspondance et offprints : Souad Skalli, Centre Antipoison et de Pharma-covigilance du Maroc, Rue Lemfedel Cherkaoui, Rabat Instituts MadianteAl Irfane, BP 6671, Rabat, Maroc.E-mail : [email protected]

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