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Revue de Pneumologie clinique (2010) 66, 145—153 ENSEIGNEMENT PRATIQUE Conduite à tenir devant une lésion excavée du poumon Practical approach to an excavated pulmonary lesion N. Paleiron a,, A. Pegorie a , G. Quéré b , M. André a , F. Natali a , F. Grassin a a Service de pneumologie, hôpital d’instruction des armées Clermont-Tonnerre, rue du Colonel-Fonferrier, 29200 Brest, France b Département de médecine interne — pneumologie, CHU La Cavale Blanche, 2, avenue Maréchal-Foch, 29200 Brest, France Disponible sur Internet le 15 mars 2010 MOTS CLÉS Cancer bronchique ; Tuberculose ; Abcès ; Excavation ; Wegener Résumé Le but de cette synthèse est de proposer une conduite à tenir pratique face à la découverte d’une image excavée du poumon sur une radiographie de thorax. Il s’agit d’une situation classique pour le pneumologue, l’interniste, mais également le médecin urgentiste ou généraliste. Après avoir écarté les principaux diagnostics différentiels, une démarche diagnos- tique rigoureuse s’impose. Les causes principales sont le cancer bronchique, la tuberculose et les abcès du poumon. L’endoscopie bronchique occupe une place centrale dans la démarche, bien qu’elle puisse être prise en défaut. Le diagnostic d’une lésion excavée du poumon n’est pas toujours simple. Il doit être rapidement établi pour une prise en charge la plus précoce possible. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Lung cancer; Tuberculosis; Abscess; Excavation; Wegener Summary The aim of this article is to suggest a practical approach when faced with an exca- vated lesion in a chest X-ray. This is a classic situation both in general practice and in emergency units. A rigorous diagnostic approach is necessary after eliminating the main differential diag- nosis. The main diagnoses consist of lung cancer, tuberculosis and abscess. Bronchial endoscopy is essential, but can be misleading. The diagnosis of an excavated pulmonary lesion is not always easy. It must be established rapidly and treated as soon as possible. © 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (N. Paleiron). Introduction La découverte d’une image excavée du poumon sur une radiographie thoracique est une situation classique. Plusieurs hypothèses doivent être évoquées : cancer, tuber- 0761-8417/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.pneumo.2010.01.001

Conduite à tenir devant une lésion excavée du poumon

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  • Revue de Pneumologie clinique (2010) 66, 145153

    ENSEIGNEMENT PRATIQUE

    Conduite tenir devant une lsion excavedu poumon

    Practical approach to an excavated pulmonary lesion

    N. Paleirona,, A. Pegoriea, G. Qurb,M. Andra, F. Natali a, F. Grassina

    a Service de pneumologie, hpital dinstruction des armes Clermont-Tonnerre, rue duColonel-Fonferrier, 29200 Brest, Franceb Dpartement de mdecine interne pneumologie, CHU La Cavale Blanche, 2, avenueMarchal-Foch, 29200 Brest, France

    Disponible sur Internet le 15 mars 2010

    MOTS CLSCancer bronchique ;Tuberculose ;Abcs ;Excavation ;Wegener

    Rsum Le but de cette synthse est de proposer une conduite tenir pratique face ladcouverte dune image excave du poumon sur une radiographie de thorax. Il sagit dunesituation classique pour le pneumologue, linterniste, mais galement le mdecin urgentiste ougnraliste. Aprs avoir cart les principaux diagnostics diffrentiels, une dmarche diagnos-tique rigoureuse simpose. Les causes principales sont le cancer bronchique, la tuberculose etles abcs du poumon. Lendoscopie bronchique occupe une place centrale dans la dmarche,bien quelle puisse tre prise en dfaut. Le diagnostic dune lsion excave du poumon nestpas toujours simple. Il doit tre rapidement tabli pour une prise en charge la plus prcocepossible. 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits rservs.

    KEYWORDS Summary The aim of this article is to suggest a practical approach when faced with an exca-

    Lung cancer;Tuberculosis;Abscess;

    vated lesion in a chest X-ray. This is a classic situation both in general practice and in emergencyunits. A rigorous diagnostic approach is necessary after eliminating the main differential diag-nosis. The main diagnoses consist of lung cancer, tuberculosis and abscess. Bronchial endoscopyis essential, but can be misleading. The diagnosis of an excavated pulmonary lesion is not alwaysExcavation;Wegener easy. It must be established rapi 2010 Elsevier Masson SAS. All r

    Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (N. Paleiron).

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    0761-8417/$ see front matter 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droitsdoi:10.1016/j.pneumo.2010.01.001dly and treated as soon as possible.ights reserved.ntroduction

    a dcouverte dune image excave du poumon surne radiographie thoracique est une situation classique.lusieurs hypothses doivent tre voques : cancer, tuber-

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    Ldptuendmie tuberculeuse peuvent permettre une orientation.

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    igure 1. TDM thoracique. Emphysme bulleux avec niveauydro-arique.

    ulose, abcs du poumon en premier lieu, voire maladie deegener dans des cas plus rares. Lobtention dune preuveistologique ou bactriologique doit tre la plus rapide pos-ible. Le but de ce travail est de prsenter une conduite enir pratique.

    finition

    ne image excave est une opacit parenchymateuse pul-onaire de taille variable, plus ou moins arrondie, contenutrogne, renfermant en son sein une hyperclart avecu sans niveau hydro-arique, entoure dune coque paroilus ou moins paisse. Cet aspect correspond une zone

    e destruction tissulaire rcente en plein parenchyme. Celaiffrencie les lsions excaves des bulles (qui nont pase paroi propre) et des kystes (dont la paroi est trs fine,nfrieure 2mm) [1].

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    igure 2. A. Radiographie thoracique de face. Opacit avec niveau hydrhoracique de profil. Mme opacit avec niveau hydro-arique rtrocardN. Paleiron et al.

    Cette dfinition exclut :les dilatations des bronches kystiques : elles peuventcomporter un niveau hydro-arique, notamment en casde surinfection. Le diagnostic repose sur les antcdentsde dilatation des bronches et sur la tomodensitomtrie(TDM) thoracique ;les bulles demphysme : elles ralisent des hyperclartslocalises, souvent au niveau des apex ou en paramdias-tinal. Elles sont dpourvues de paroi proprement parler.Un niveau hydro-arique est possible en cas de surinfec-tion (Fig. 1) ;les poches pleurales, ventuellement infectes dansle cadre dun empyme. Elles ont des caractristiquespropres : leur forme est ovode (diamtre diffrentdans les plans frontal et sagittal) et leur paroi se rac-corde angle ouvert avec la paroi thoracique. Ellespeuvent comprimer le parenchyme pulmonaire adjacent.La plvre se rehausse aprs injection de produit decontraste sur la TDM thoracique ;la hernie hiatale : opacit rtrocardiaque, dont la limiteinterne nest pas visible sous le diaphragme, tmoignantde son caractre intra-abdominal (signe de liceberg)(Fig. 2A et B) [2] ;les maladies multikystiques pulmonaires : lymphan-giolomyomatose chez la femme en ge de procrer,histiocytose cellules de Langherans chez le jeunefumeur, pneumopathie interstitielle lymphode en cas demaladie auto-immune ou dinfection par le VIH [3] ;les pneumatocles : ce sont des lsions paroi fine,transitoires, au dcours dun pisode aigu.

    marche tiologique

    interrogatoire recherche les lments classiques du modee vie (conditions socioconomiques, emploi et expositionsrofessionnelles, tabagisme, alcoolisme) mais ils ne sont pasoujours discriminants. Un contexte dimmunodpression,n contage tuberculeux rcent ou un retour de zone de forteUn tableau clinique subaigu avec altration de ltatnral, toux, hmoptysie, sans fivre ni syndromenflammatoire biologique majeur fait voquer un can-er, alors quun tableau franc et brutal avec fivre

    o-arique situe en arrire du cur, hernie hiatale. B. Radiographieiaque, hernie hiatale.

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    LLhicLavCttrop centrale, le prlvement ramenant du pus) [15]. LaConduite tenir devant une lsion excave du poumon

    leve, polynuclose neutrophile franche et CRP trsleve oriente vers un abcs du poumon. Des formesplus atypiques sont possibles : dyspne fbrile en casde cancer surinfect ou lie la tumeur elle-mme(20% des tumeurs solides se compliquent dinfection [4]),ou absence de fivre lors dun abcs dcapit par uneantibiothrapie inadapte. Labsence de contexte sous-jacent chez un sujet jeune incite rechercher unemaladie plus rare, notamment une maladie de Wege-ner.

    Lexamen clinique cardiorespiratoire value surtout latolrance et ltat fonctionnel respiratoire sous-jacent.Lexamen extrarespiratoire recherche des comorbidi-ts.

    La TDM permet dcarter les diagnostics diffrentielsdans les cas douteux et danalyser en dtail limage exca-ve. Sont analyss : son caractre autonome ou au seindun foyer alvolaire, ses contours externes (lisses, spi-culs, ou parfois noys dans lalvolite), ses contoursinternes (rguliers ou anfractueux), lpaisseur de lacoque, laspect de lhyperclart et particulirement la pr-sence dun niveau hydro-arique (traduisant un drainagebronchique), les autres hyperdensits parenchymateusesassocies (nodulaires ou infiltratives), le mdiastin ( larecherche dun syndrome tumoral) et la paroi thora-cique.

    lissue de cet examen, le diagnostic peut tre dembleorient, mais le plus souvent une preuve anatomopatho-logique est ncessaire en raison de la crainte dun cancerbronchique. Elle peut tre obtenue par diffrents moyens.Le choix entre ces techniques repose sur laccessibilit de lalsion sur la TDM et sur la prsence ou non dadnomgaliesmdiastinales : endoscopie bronchique avec biopsie bronchique (sen-

    sibilit 80 %, IC95 5197%), lavage bronchoalvolaire(sensibilit 68 %, IC95 2790%) ou brosse bronchique (sen-sibilit 72 %, IC95 4494%) [5] ;

    ponction ganglionnaire transbronchique laiguille deWang (sensibilit de 62% pour les cancers petites cel-lules et 48 % pour les cancers non petites cellules)[6,7], sous cho-endoscopie ou ponction transsopha-gienne [8]. Ces deux dernires techniques semblent avoirune rentabilit quivalente. Le choix dpend des habi-tudes de loprateur et des aires ganglionnaires suspectes[9] ;

    ponction transparitale choguide ou scanno-guidepour les masses priphriques, dont le principal risqueest le pneumothorax iatrogne [10] ;

    mdiastinoscopie [8]. Elle permet lexploration sous anes-thsie gnrale des loges ganglionnaires mdiastinales.La mortalit est faible (0 1 % selon les sries), ainsique la morbidit (0,5 4 %). Les complications sont liesdans un tiers des cas au geste (hmorragie par plaie desgros vaisseaux, lsion de la trache, de lsophage, dunerf rcurrent gauche ou de la plvre, infection) et dansdeux tiers des cas au contexte mdical sous-jacent. Lesindications sont varies. Chez le patient oprable, ellesregroupent la suspicion dune tumeur bronchique non-

    chirurgicale, ou dune extension ganglionnaire N2 ou N3.Chez le patient non oprable, elle sera indique chaquefois quune preuve histologique est susceptible de modi-fier la thrapeutique. La dernire indication concerne le

    sums

    igure 3. Proposition darbre diagnostique devant une lsionxcave du poumon en labsence dhypothse tiologique vidente.

    diagnostic des tumeurs du mdiastin et des lymphomes[11] ;biopsie dune adnomgalie priphrique ou dune mta-stase accessible ;biopsie pulmonaire chirurgicale. Elle est utile pour lesnodules de plus de 5mm, localiss moins de 2 cm dela plvre viscrale. Elle est ralise par vidothoracosco-pie, ou par minithoracotomie en cas de symphyse pleuraleou de topographie particulire [12].

    ypothses diagnostiques

    a Fig. 3 est une proposition darbre diagnostiquen labsence dhypothse tiologique vidente. Cettemarche est marque par la crainte du cancer. Les diag-ostics voquer sont rsums sur la Fig. 4. Les causesont domines par les tumeurs malignes et les infectionsosmopolites, qui reprsentent 86 % des cas dans une sriee 50 dossiers [14].

    es plus redoutes, les causes noplasiques

    es tumeurs bronchiques primitivesaspect radiologique le plus classique est celui duneyperdensit contours externes spiculs, limite internerrgulire, anfractueuse, contenu htrogne, et asso-ie des adnomgalies mdiastinales (Fig. 5A et B).excavation nest pas rare et lobtention dune preuvenatomopathologique peut tre difficile, ltude des prl-ements ne montrant que de la ncrose. Dans la srie de Lehevalier et al., sur 19 tumeurs malignes, la cytoponctionransthoracique ne retrouvait quun faux-ngatif (aiguilleituation la plus dlicate est celle dun patient prsentantne lsion excave froide (sans fivre ni syndrome inflam-atoire biologique majeur), trs vocatrice de cancer, maisans preuve histologique. Dans ce cas, trois situations diff-

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    igure 4. Principales cause de lsions excaves du poumon (fr-uences issues dune srie de 50 dossiers [13]).

    entes peuvent tre individualises :la tumeur est a priori oprable (lsion pulmonaire uniquesans adnomgalie mdiastinale suprieure 1 cm sur laTDM thoracique). Il faut alors raliser un bilan dextensioncomplet par TDM abdominopelvienne, TDM ou IRM cr-brale et tomodensitomtrie par mission de positons(TEP) [15]. En cas de lsion localise suspecte sanspreuve histologique, sans envahissement local majeur(paroi thoracique ou mdiastin), sans atteinte ganglion-naire mdiastinale, une chirurgie doit tre raliseavec prlvement local, examen anathomopathologiqueextemporan, puis selon les rsultats lobectomie et

    curage ganglionnaire systmatique ;en cas de doute sur les ganglions mdiastinaux (taillesuprieure 10mm en petit axe ou hyperfixation modresur la TEP), leur tude peut tre ralise par cytoponctiontransbronchique, transsophagienne, ou par mdiastino-

    LrndE

    igure 5. A. Opacit excave du lobe infrieur gauche (noter le signeronchique sur les biopsies bronchiques. B. Mme image sur la TDM, notauche.igure 6. Proposition darbre dcisionnel devant une suspicion deancer bronchopulmonaire sans preuve histologique.

    scopie. En effet, les stades clinical N2 (cN2) peuventdans certains cas bnficier dune chimiothrapie no-adjuvante pour les rendre accessibles une chirurgie(down-staging) [16] ;la tumeur est a priori inoprable (atteinte N3 sur la TDMou la TEP ou mtastase distance). Dans ce cas, il fautobtenir une preuve histologique pour dterminer le proto-cole de chimiothrapie adquat. Labsence de mtastase distance et une extension locale modre font discuterune radiochimiothrapie concomitante [17] (Fig. 6).

    es mtastases

    es mtastases pulmonaires de cancers dautre origine sontarement excaves. Laspect le plus habituel est celui deodules arrondis et bien limits, souvent multiples (lchere ballon), mais elles peuvent tre irrgulires et spicules.lles sigent le plus souvent au niveau du tiers externe du

    de la silhouette) bords pais et limite interne festonne. Cancerer les contours spiculs de lhyperdensit et ladnopathie hilaire

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    Figure 7. A. Radiographie thoracique de face. Opacits excavTuberculose typique, diagnostic lexamen direct des crachats. B. Tdu lobe suprieur gauche avec excavation. Tuberculose pulmonaire

    poumon. La mtastase pulmonaire peut tre initiale (can-cers du rein, de la tte et du cou, du testicule, mlanomes,sarcomes, choriocarcinomes, carcinomes thyrodiens et sur-rnaliens), survenir aprs une premire localisation le plussouvent hpatique (ce qui est le cas le plus frquent dansles cancers digestifs), ou survenir simultanment dautreslocalisations secondaires (cancer du sein, de la vessie oude lutrus, qui mtastasent par voie lymphatiques ou vei-neuse) [18].

    Les lymphomesLes lymphomes hodgkiniens ou non hodgkiniens peuventprendre laspect de lsion excaves [19,20].

    Les sarcomesLexcavation est frquente en cas de sarcome pulmonaire etde carcinome sarcomatode (69 % dans la srie de Venissacet al.) [21].

    Les causes infectieuses

    La tuberculoseQuarante-cinq 50% des tuberculoses pulmonairessaccompagnent de cavitation. Laspect radiologique estsouvent trs vocateur : les images sont situes dans lessegments apicaux et postrieurs des lobes suprieurs, etdans le segment apical des lobes infrieurs (segment deFowler), la paroi de la cavit est souvent paisse, desopacits infiltratives en plage ou nodulaires homo- oucontrolatrales sont souvent associes. On observe parfoisune lobite excave et un niveau hydro-arique estprsent dans 25 % des cas, tmoignant du drainage dans unebronche [22,23] (Fig. 7A et B).

    Le diagnostic bactriologique est ais en cas de lsionexcave (examen des crachats ou tubages gastriques rp-

    ts trois jours daffile, prlvement in situ au coursdune endoscopie bronchique). Lexamen direct est souventpositif, au contraire des tuberculoses fermes. La nga-tivit des prlvements doit faire remettre en cause lediagnostic [24]. Il sagit de tuberculoses contagieuses nces-

    la

    u lobe suprieur droit associes un infiltrat rticulonodulaire.horacique. Infiltrat rticulo-micronodulaire du segment postrieurence de Mycobacterium tuberculosis lexamen direct du LBA.

    itant lisolement. La PCR et la culture confirment le typeycobacterium tuberculosis et permettent ltude de laensibilit aux antibiotiques. Les dlais ncessaires pour laulture et lantibiogramme sont actuellement ramens nviron 15 jours par lutilisation de la technologie radiom-rique (technique BACTEC).

    es mycobactries atypiqueslles surviennent dans des contextes particuliers (immu-odpression, VIH, certains travaux, tabagisme, alcoo-isme, maladie respiratoire sous-jacente). Leur incidencennuelle entre 2001 et 2003 varie entre 0,72 et 0,74 par00 000 habitants en France. La clinique est souvent moinsruyante mais un syndrome cavitaire est classique [25]. Lesultures sont rsultat plus tardif, do lintrt de la PCRi lexamen direct est positif, afin de mettre en videnceycobacterium xenopi, avium ou kansasii le plus souvent.e traitement doit tre adapt lantibiogramme [26].

    es abcs du poumonls se rencontrent schmatiquement dans trois situations :a pneumopathie abcde (avec une porte dentre res-iratoire), labcs par migration dun embol septique artir dun foyer dentaire, sinusien, cutan ou valvulaire,t labcs derrire une stnose bronchique tumorale.Le tableau clinique le plus classique est celui dune

    yspne fbrile associe un syndrome inflammatoire bio-ogique important, mais il peut galement tre plus torpide.ans une srie de 46 patients, la fivre ntait prsente queans 13 cas, sans diffrence significative de prsentationntre les patients immunodprims et non immunodprims27]. Laspect radiologique est vocateur : lopacit exca-e est la plupart du temps unique, avec une limite internegulire et une limite externe non visible car noye au seinun foyer de pneumopathie. Dans les embols septiques,

    opacit est souvent plus limite et entoure dune discrtelvolite [28] (Fig. 8A, B et C).Quelques formes particulires doivent tre signales :les bulles staphylococciques sont des abcs souvent mul-tiples avec atteinte plurilobaire. Leur paroi est fine et

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    igure 8. A. Radiographie thoracique de face. Opacit excavecanner ne retrouvant quune inflammation locale, rgression sousxternes spiculs. C. Absence de fixation sur la tomographie par m

    elles sont associes dans 50 % des cas un panchementpleural (Fig. 9A et B) ;les pneumopathies ncrosantes Staphylococcus aureusscrtant la leucocidine de Panton-Valentine, voquesdevant une pneumonie abcde daggravation rapide,avec rythodermie et leucopnie, chez un sujet jusquicien bonne sant [29] ;pour mmoire, la classique staphylococcie pleuropul-monaire du petit enfant dans les pays en voie dedveloppement ;

    la pneumopathie excave avec bombement des scissures,lies Klebsiella pneumoniae ;les pneumopathies Legionella pneumophila, qui peuventse compliquer dabcdation, notamment chez le patientsous corticothrapie.

    svasc

    be suprieur droit entoure dun foyer dalvolite. Ponction sousbiothrapie. B. Sur la TDM : hyperdensit homogne aux contoursn de positons, dcouverte fortuite dun carcinome thyrodien.

    Le principal problme de cette situation est le choix deantibiothrapie, qui repose sur lisolement du germe. Lesnarobies sont trs souvent en cause (Peptostreptococcus,usibacterium, Bacteroides. . .), et doivent donc toujourstre pris en compte. Ils sont frquemment associs unecond germe, notamment un staphylocoque ou un bacilleGram ngatif.Lendoscopie bronchique a un intrt fondamental pour

    ffectuer les prlvements vise bactriologique, et pourechercher une forme associe un obstacle bronchique,

    ouvent noplasique. Dans les cas difficiles (lsion exca-e sans preuve histologique de malignit), le traitementntibiotique dpreuve se justifie parfois, avec nces-it absolue de surveiller le malade distance (TDM deontrle).

  • Conduite tenir devant une lsion excave du poumon 151

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    Figure 9. A. Radiographie thoracique de face. Opacit excavesur lanalyse bactriologique de la fibro-aspiration. Complication dfine, avec niveau hydro-arique.

    LaspergilloseUne aspergillose peut venir se greffer de manire oppor-tuniste sur un poumon malade (tuberculose surtout, maisaussi sarcodose [30], dilatation des bronches, fibrose,emphysme. . .). Dans ce contexte, la srologie aspergillaire,la recherche dagglutinines anti-aspergillus et les prlve-ments endoscopiques fournissent un faisceau darguments.Limagerie est trs vocatrice en cas daspergillome : opa-cit centrale, arrondie et dclive au sein dune cavit(image en grelot ), ou clart arciforme priphriquemoulant lopacit intracavitaire (image en mnisque ).Laspergillose chronique ncrosante peut se manifes-ter par laggravation de lsions cavitaires prexistantes[31,32].

    Les abcs non bactriensBien que rares, ils sont voqus dans certaines circons-tances : hydatidose : elle ralise une opacit bien limite,

    sigeant le plus souvent dans les lobes infrieurs.Lhyperosinophilie est inconstante. Le diagnostic reposesur la srologie et lexamen de la pice opra-toire. Lorsque le kyste est rompu, on observe uneimage en nnuphar , avec hyperdensit arrondie,surnageante, silhouette par lair dans sa partieimmerge ;

    amibiase : on lvoque devant un abcs rsistant auxantibiotiques et le contexte gographique. Le diagnosticrepose sur la srologie. La ponction, si elle est ralise,ramne un liquide couleur chocolat ;

    histoplasmose : elle est rpandue sur le continent am-ricain et notamment en Guyane. La clinique est proche

    de celle de la tuberculose. Le diagnostic repose sur lasrologie et lexamen direct [33] ;

    coccidiodomycose : cette mycose est endmique dans lesrgions arides du continent nord-amricain. Le diagnosticsappuie sur la culture et la srologie [34].

    leer

    be infrieur droit, paroi fine. Bulle staphylococcique, diagnosticaplasie post-chimiothrapie. B. Sur la TDM : lsion excave paroi

    t si ctait une maladie de Wegener ?

    l sagit dune vascularite ncrosante systmique des vais-eaux de petit calibre, selon la classification de Chapel Hill13].Bien que rare, elle doit rester lesprit du clinicien.

    atteinte pulmonaire est, avec latteinte oto-rhino-aryngologique, latteinte la plus frquente de cetteffection (70 100% des cas). Latteinte rnale se manifestear une hmaturie, une protinurie puis une insuffisancenale tmoignant dune glomrulonphrite extracapillaire.lle est constante dans lvolution de la maladie et en fait leronostic. Latteinte dautres organes est inconstante maisvocatrice (manifestations oculaires, articulaires, neurolo-iques ou cutanes notamment).Laspect radiologique est vocateur : les nodules sont fr-

    uents, excavs dans 36 44% des cas. Ils sont multiplestrois quatre, parfois jusqu dix), situs surtout en pri-hrie du parenchyme, contours irrguliers voire spiculst parfois entours dune plage en verre dpoli lie unemorragie alvolaire. Lexcavation concerne surtout lesodules de plus de 20mm [35,36] (Fig. 10). Les plages deondensation de type alvolaires sont quasi constantes etxcaves dans 30 % des cas. Elles voluent vers la rgressiont parfois une zone de fibrose rtractile.La rapparition de lsion excave fait voquer une

    echute, qui a souvent les mmes caractristiques que laousse initiale, ou une complication et en particulier unbcs chez un patient immunodprim par le traitement37,38].Le diagnostic a t rvolutionn par le dosage des

    nticorps anti-cytoplasme des polynuclaires de spcificitnti-PR3 (c-ANCA). Leur sensibilit est de 91% et leur sp-ificit de 99% pour les formes diffuses de la maladie dans

    a mta-analyse de Rao et al. [39]. Cependant avant misen route dun traitement lourd, une preuve histologiquest tout de mme souhaitable et une atteinte extrarespi-atoire priphrique peut offrir lopportunit de biopsies

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    igure 10. TDM thoracique. Hyperdensit excave dans le lobeoyen droit, paroi paisse. Endoscopie normale, c-ANCA levs.aladie de Wegener.

    aciles. Dans ce cas de figure, lendoscopie bronchiqueecherche surtout des lsions stnosantes sous-glottiquespar hypertrophie muqueuse ou granulomes) et une hmor-agie alvolaire sur le lavage bronchoalvolaire. La prise enharge sappuie sur un plan national de diagnostic et de soine la Haute Autorit de sant [40].

    utres diagnostics possibles

    lissue de cette dmarche, des causes rares contexteien spcifique sont voques : maladie rhumatode, sili-ose, o lapparition dune masse ncrose fait suspectern cancer ou une tuberculose, granulome bronchocen-rique (compliquant une aspergillose bronchopulmonairellergique), nodules pulmonaires amylodes, uniques ouultiples, endomtriose pulmonaire chez la femme entre0 et 50 ans, nocardiose chez limmunodprim, sarco-ose, pneumatocle post-traumatique [40], actinomycosehez lthylique chronique [41], squestration pulmonairereconnue grce sa vascularisation systmique) [1].

    onclusion

    a dcouverte dune lsion excave du poumon est uneituation classique pour le pneumologue ou linterniste.lle requiert une dmarche claire, guide par la crainte duancer. Lendoscopie bronchique garde une place fondamen-ale. La TEP et les prlvements sous endoscopie offrente nouvelles possibilits pour le diagnostic. Un traitementpreuve reste parfois ncessaire, avant denvisager uneiopsie chirurgicale.onflit dintrt

    ucun.

    [

    N. Paleiron et al.

    frences

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    Conduite tenir devant une lesion excavee du poumonIntroductionDefinitionDemarche etiologiqueHypothses diagnostiquesLes plus redoutees, les causes neoplasiquesLes tumeurs bronchiques primitivesLes metastasesLes lymphomesLes sarcomes

    Les causes infectieusesLa tuberculoseLes mycobacteries atypiquesLes abcs du poumonL'aspergilloseLes abcs non bacteriens

    Et si c'etait une maladie de Wegener?Autres diagnostics possibles

    ConclusionConflit d'intertReferences