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Conduite automobile chez le cérébrolésé : simplier le bilan neuropsychologique ? Driving after brain injury: Can the neuropsychological assessment be simplied? Service de neurologie, hôpital Delafontaine, 2, rue du Dr-Delafontaine, 93200 Saint-Denis, France L e problème de la capacité à reprendre la conduite automobile après un acci- dent neurologique tel qu'un infarctus ou une hémorragie cérébrale ou encore un trau- matisme crânien, de même que dans le cours de l'évolution d'une maladie neurologique dégénérative comme une maladie de Parkin- son ou une maladie d'Alzheimer, se pose sou- vent en pratique de neurologie générale. Le bilan comprend le plus souvent une évaluation médicale (neurologue ou médecin de réédu- cation fonctionnelle), un bilan ophtalmolo- gique plus ou moins poussé, un bilan neuropsychologique et une expertise ergothé- rapique. Une évaluation en conditions écologiques intervient ensuite avant une consultation de synthèse permettant de pro- poser un avis d'expert à la commission médi- cale préfectorale du permis de conduire. Si les conclusions sont relativement aisées dans le cadre d'une pathologie entraînant un handicap physique important sans trouble cognitif ou dans la maladie épileptique, elles le sont beaucoup moins dans les pathologies touchant les capacités cognitives comme les accidents vasculaires cérébraux ou les T. de Broucker Adresse e-mail : thomas.debroucker@ch-stde nis.fr Figure 1. Courbes ROC correspondant aux valeurs optimales de cut-off pour chaque test prédictif de succès au test routier. Figure issue de l'article Aslaksen PM, Ørbo M, Elvestad R, Schäfer C, Anke A. Prediction of on-road driving ability after traumatic brain injury and stroke. Eur J Neurol. 2013 ; 20 : 12271233. Reproduite avec l'autorisation de reproduction. Pratique Neurologique FMC 2013;4:277278 Focus © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.praneu.2013.10.007 277

Conduite automobile chez le cérébrolésé : simplifier le bilan neuropsychologique ?

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Page 1: Conduite automobile chez le cérébrolésé : simplifier le bilan neuropsychologique ?

Pratique Neurologique – FMC 2013;4:277–278 Focus

Conduite automobile chez lecérébrolésé : simplifier le bilanneuropsychologique ?

Driving after brain injury: Can the neuropsychologicalassessment be simplified?

T. de Broucker

Service de neurologie, hôpital Delafontaine, 2, rue du Dr-Delafontaine,93200 Saint-Denis, France

e problème de la capacité à reprendre neuropsychologique et une expertise ergothé-

L la conduite automobile après un acci-dent neurologique tel qu'un infarctus ou

une hémorragie cérébrale ou encore un trau-matisme crânien, de même que dans le coursde l'évolution d'une maladie neurologiquedégénérative comme une maladie de Parkin-son ou une maladie d'Alzheimer, se pose sou-vent en pratique de neurologie générale. Lebilan comprend le plus souvent une évaluationmédicale (neurologue ou médecin de réédu-cation fonctionnelle), un bilan ophtalmolo-gique plus ou moins poussé, un bilan

Figure 1. Courbes ROC correspondant aux valeurs

succès au teFigure issue de l'article Aslaksen PM, Ørbo M, Elvedriving ability after traumatic brain injury and stroke.

avec l'autorisation

© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.http://dx.doi.org/10.1016/j.praneu.2013.10.007

rapique. Une évaluation en conditionsécologiques intervient ensuite avant uneconsultation de synthèse permettant de pro-poser un avis d'expert à la commission médi-cale préfectorale du permis de conduire.Si les conclusions sont relativement aiséesdans le cadre d'une pathologie entraînant unhandicap physique important sans troublecognitif ou dans la maladie épileptique, ellesle sont beaucoup moins dans les pathologiestouchant les capacités cognitives commeles accidents vasculaires cérébraux ou les

Adresse e-mail :[email protected]

optimales de cut-off pour chaque test prédictif dest routier.stad R, Schäfer C, Anke A. Prediction of on-roadEur J Neurol. 2013 ; 20 : 1227–1233. Reproduitede reproduction.

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Figure 2. Grooved Pegboard (Lafayette Instrument Company).

T. de BrouckerFocus

séquelles de traumatismes crâniens. Des batteries de testsphysiques, psychométriques et neuropsychologiques sont pro-posées pour ces évaluations. Ces batteries sont longues, peu-vent être éprouvantes, et ne sont pas standardisées.L'équipe norvégienne de Tromsø, multidisciplinaire (rééduca-tion, psychologie et médecine), a testé l'hypothèse qu'unebatterie réduite de tests bien choisis permettrait de détermineravec une certitude suffisante les patients qui échoueraientà l'épreuve pratique utilisée pour l'autorisation à la conduiteautomobile (Aslaksen et al., 2013).Les auteurs ont évalué des patients cérébrolésés au moyend'une batterie neuropsychologique complète et ont recherchéparmi les tests utilisés ceux qui expliquaient le mieux le succèsou l'échec des patients lors de l'épreuve pratique de conduitepar une démarche de régression logistique. La populationtestée comprenait des patients ayant fait un infarctus ouune hémorragie cérébrale et des patients ayant subi un trau-matisme crânien (n = 78). Ces patients ont aussi tous subi uneépreuve pratique de conduite automobile (43 succès,35 échecs).L'association de trois tests simples : Trail Making Test-A (TMT-A), Grooved PegBoard (épreuve chronométrée de dextéritémanuelle et d'attention) et CalCAP (temps de réaction infor-matisé en conditions multiples) permettait de prédire avecfiabilité l'échec des patients à l'épreuve pratique de conduite(Fig. 1). Les valeurs de cut-off étaient de 46s pour le TMT-A, de97,5s pour le Grooved Pegboard Test (moyenne des deuxmains, cf. Fig. 2) et de 395ms pour le CalCAP.La démarche des auteurs norvégiens est intéressante et pour-rait permettre, si elle est reproduite en France, de simplifier,voire de normaliser, les procédures de sélection de candidatsaux épreuves pratiques de conduite automobile dans les sui-tes d'une agression cérébrale de type neurovasculaire outraumatique. La même démarche pourrait être envisagée dansle cadre de pathologies neurodégénératives comme la mala-die de Parkinson voire dans le cadre du grand âge sanspathologie particulière.

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Déclaration d'intérêtsL'auteur déclare ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cetarticle.

RÉFÉRENCE

Aslaksen PM, Ørbo M, Elvestad R, Schäfer C, Anke A. Prediction ofon-road driving ability after traumatic brain injury and stroke. Eur JNeurol 2013;20:1227–33.