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Analyse écologique des déterminants de la participation électorale municipale au Québec JÉRÔME COUTURE Université Laval et INRS-UCS SANDRA BREUX Institut National de Recherche Scientifique LAURENCE BHERER Université de Montréal INTRODUCTION Le déclin de la participation électorale est une préoccupation importante depuis deux décennies au Canada comme à létranger. Or, les élections municipales canadiennes ont été peu touchées par la baisse de la participa- tion électorale puisque la présence aux urnes y a toujours été faible. En effet, la participation électorale municipale au Canada demeure généralement moins élevée quaux autres paliers de gouvernement (Nakhaie, 2006). 1 Ce phénomène est également observable aux États- Unis (Hajnal et Lewis, 2003). La faible participation électorale nest donc pas le résultat dun processus de démobilisation des électeurs mais représente bien une caractéristique forte de la démocratie locale. Les raisons susceptibles dexpliquer cette faible mobilisation au niveau local sont encore mal connues. Cela tient tout dabord aux défis que pose lexplication de la participation électorale, et ce, quel que soit le niveau Jérôme Couture*, Candidat au doctorat, Assistant de recherche, Université Laval et INRS-UCS, 385, rue Sherbrooke Est, Montréal (Québec), H2X 1E3 Canada. Email: [email protected], Tel: 514-499-4059, *Auteur à contacter / Corresponding author Sandra Breux, Professeur-chercheur, Institut National de Recherche Scientifique, Centre Urbanisation Culture et Société, 385, rue Sherbrooke Est, Montréal (Québec), H2X 1E3 Canada. Email: [email protected], Tel: 514-499-4059 Laurence Bherer, Professeure Université de Montréal, Département de science politique Pavillon Lionel-Groulx C. P. 6128, succ. Centre-ville, Montréal (Québec) H3C 3J7, E-mail: [email protected], Téléphone: 514-343-6111 #0744 Canadian Journal of Political Science / Revue canadienne de science politique 47:4 (December / décembre 2014) 787812 doi:10.1017/S0008423914001152 © 2015 Canadian Political Science Association (lAssociation canadienne de science politique) and/et la Société québécoise de science politique

Couture 2014

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RésuméAu Canada, la participation électorale à l’échelle municipale est plus faible qu'aux autres échelles de gouvernement et les raisons susceptibles d'expliquer ce moindre engagement sont encore mal connues. À partir des taux de participation à la mairie aux élections de 2005 et de 2009 dans l'ensemble des municipalités du Québec (n = 949), la recherche teste 15 hypothèses explicatives de la participation électorale municipale. Les résultats montrent que quatre facteurs expliquent en grande partie la participation électorale municipale et ses variations. Il s'agit de la taille de l’électorat, de la présence d'un électorat âgé, de la marge victorieuse et du nombre de candidats en lice. Ces résultats permettent de mieux cerner le coût du vote à l’échelle municipale, tout en soulignant la nécessité de réaliser davantage d'enquêtes monographiques sur cet objet au Canada, notamment dans les plus grandes municipalités où la participation électorale y est plus faible.AbstractIn Canada, voter turnout at the municipal level is lower than in elections at other levels of government. The reasons that might explain this low turnout are still unclear. The research tests 15 hypotheses to explain municipal electoral participation based on the case of the province of Québec (mayoral elections in 2005 and 2009 in all municipalities in the province, n = 949). The results show that four factors explain voter turnout and its variations: the size of the electorate, the presence of elderly voters, the margin of victory, and the number of candidates. These results improve our understanding of the cost of voting at the municipal level and they stress the need for conducting additional monographic investigations on this topic in Canada, especially in larger municipalities where voter turnout is often lower.

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Analyse écologique des déterminants de laparticipation électorale municipale au Québec

JÉRÔME COUTURE Université Laval et INRS-UCSSANDRA BREUX Institut National de Recherche Scientifique

LAURENCE BHERER Université de Montréal

INTRODUCTION

Le déclin de la participation électorale est une préoccupation importantedepuis deux décennies au Canada comme à l’étranger. Or, les électionsmunicipales canadiennes ont été peu touchées par la baisse de la participa-tion électorale puisque la présence aux urnes y a toujours été faible. Eneffet, la participation électorale municipale au Canada demeuregénéralement moins élevée qu’aux autres paliers de gouvernement(Nakhaie, 2006).1 Ce phénomène est également observable aux États-Unis (Hajnal et Lewis, 2003). La faible participation électorale n’est doncpas le résultat d’un processus de démobilisation des électeurs maisreprésente bien une caractéristique forte de la démocratie locale.

Les raisons susceptibles d’expliquer cette faible mobilisation au niveaulocal sont encore mal connues. Cela tient tout d’abord aux défis que posel’explication de la participation électorale, et ce, quel que soit le niveau

Jérôme Couture*, Candidat au doctorat, Assistant de recherche, Université Laval etINRS-UCS, 385, rue Sherbrooke Est, Montréal (Québec), H2X 1E3 Canada. Email:[email protected], Tel: 514-499-4059, *Auteur à contacter / CorrespondingauthorSandra Breux, Professeur-chercheur, Institut National de Recherche Scientifique, CentreUrbanisation Culture et Société, 385, rue Sherbrooke Est, Montréal (Québec), H2X 1E3Canada. Email: [email protected], Tel: 514-499-4059Laurence Bherer, Professeure Université de Montréal, Département de science politiquePavillon Lionel-Groulx C. P. 6128, succ. Centre-ville, Montréal (Québec) H3C 3J7,E-mail: [email protected], Téléphone: 514-343-6111 #0744

Canadian Journal of Political Science / Revue canadienne de science politique47:4 (December / décembre 2014) 787–812 doi:10.1017/S0008423914001152© 2015 Canadian Political Science Association (l’Association canadienne de science politique)and/et la Société québécoise de science politique

de gouvernement à l’étude (Blais, 2006). Si, pour certains, il n’existe pas demodèle explicatif général de la participation électorale (Van Ham et Smets,2012 ; Geys, 2006), d’autres ont toutefois développé des modèles mettanten évidence l’importance de certaines variables sur d’autres (Riker etOrdeshook, 1968 ; Franklin, 2004 ; Mayer, 2007).

L’étude de la participation électorale pose toutefois des défissupplémentaires à l’échelle municipale. Premièrement, les modèles de par-ticipation existants aux échelons supérieurs ne s’importent pas facilement àl’échelle municipale (Caren, 2007). Les quelques rares recherches traitantde la participation électorale municipale démontrent que le contexte institu-tionnel local et les procédures électorales sont les principales variables quiinfluencent la participation (Wood, 2002). Ce résultat contraste avec lemodèle dominant aux échelons supérieurs, qui met l’accent sur lescaractéristiques individuelles. Par exemple, des facteurs particulièrementinfluents comme l’éducation ou le niveau de revenu auraient beaucoupmoins de poids à l’échelon local (Caren, 2007). Deuxièmement, la construc-tion des données électorales municipales n’est pas sans poser de problèmesaux chercheurs. Le très grand nombre de municipalités, les disparitésimportantes entre les institutions représentatives municipales, de mêmeque la non-simultanéité des élections dans certains contextes, rendent lacueillette de données difficile (Caren, 2007). L’absence de centralisationdes données électorales constitue également une difficulté supplémentaire(Marschall et coll., 2011) car cela signifie bien souvent que les chercheursdoivent faire la cueillette des données eux-mêmes auprès de chaquemunicipalité (Trounstine, 2009). L’ensemble de ces éléments explique larareté des études de sociologie électorale municipale (Hajnal et Lewis,2003) et des analyses longitudinales (Hajnal et Trounstine, 2013).

Si la situation tend à changer aux Etats-Unis depuis une dizaine années,en raison de la présence de certaines initiatives pour construire des bases dedonnées plus robustes (Marschall et coll., 2011), rien de semblable n’existepour l’instant au Canada. La province du Québec constitue toutefois une ex-ception2. En effet, l’introduction en 2005 de la simultanéité des électionsdans toutes les municipalités a permis et facilité la collecte et la centralisa-tion des données électorales municipales par le Ministère des AffairesMunicipales et de l’Occupation du Territoire (MAMROT), rendant possiblela réalisation d’enquêtes de plus grande envergure.

Notre article vise ainsi à profiter de l’existence de cette base dedonnées sur les élections municipales québécoises depuis 2005 pour appro-fondir l’enjeu de la participation électorale municipale canadienne. Dans unpremier temps, nous détaillerons les deux grandes familles de causesgénéralement explicatives de la participation électorale municipale, avantde décrire l’état des lieux des recherches sur cet objet dans le contexte can-adien. Dans un deuxième temps, nous testons plusieurs hypothèses suscep-tibles d’expliquer la participation électorale municipale, en prenant pour cas

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d’étude la participation électorale à la mairie aux élections de 2005 et de2009 dans l’ensemble des municipalités du Québec. Dans un derniertemps, la présentation des résultats permettra d’une part de mettre enévidence la prégnance de certains facteurs et d’autre part d’élaborer quel-ques éléments explicatifs de la spécificité de la scène électorale municipale.

1. REVUE DES ÉCRITS : LES DÉTERMINANTS DE LAPARTICIPATION ÉLECTORALE MUNICIPALE

Dans le contexte nord-américain, deux approches sont généralementprivilégiées pour appréhender les déterminants de la participationélectorale, et ce, que ce soit à un niveau d’analyse individuelle ou encoreagrégée. Il s’agit d’une part du contexte sociospatial et socio-démographique et d’autre part, de l’environnement institutionnel et del’offre électorale.

Il convient de préciser que les études électorales municipales repre-nnent souvent des variables testées aux autres paliers politiques. Celatient à deux raisons. Premièrement, le modèle de l’électeur rationnel, quivote en effectuant une analyse coûts-bénéfices sur la base de l’informationqu’il détient, semble particulièrement bien adapté à l’échelle municipale(Oliver et coll., 2012; Elmendorf et Schleicher, 2012). Cette dernière prop-osition n’a toutefois pas fait l’objet d’une véritable analyse systématique.Certaines caractéristiques de la dynamique électorale municipale pointent

Résumé. Au Canada, la participation électorale à l’échelle municipale est plus faible qu’auxautres échelles de gouvernement et les raisons susceptibles d’expliquer ce moindre engagementsont encore mal connues. À partir des taux de participation à la mairie aux élections de 2005 etde 2009 dans l’ensemble des municipalités du Québec (n = 949), la recherche teste 15hypothèses explicatives de la participation électorale municipale. Les résultats montrent quequatre facteurs expliquent en grande partie la participation électorale municipale et ses variations.Il s’agit de la taille de l’électorat, de la présence d’un électorat âgé, de la marge victorieuse et dunombre de candidats en lice. Ces résultats permettent de mieux cerner le coût du vote à l’échellemunicipale, tout en soulignant la nécessité de réaliser davantage d’enquêtes monographiques surcet objet au Canada, notamment dans les plus grandes municipalités où la participationélectorale y est plus faible.

Abstract. In Canada, voter turnout at the municipal level is lower than in elections at other levelsof government. The reasons that might explain this low turnout are still unclear. The research tests15 hypotheses to explain municipal electoral participation based on the case of the province ofQuébec (mayoral elections in 2005 and 2009 in all municipalities in the province, n = 949). Theresults show that four factors explain voter turnout and its variations: the size of the electorate,the presence of elderly voters, the margin of victory, and the number of candidates. Theseresults improve our understanding of the cost of voting at the municipal level and they stress theneed for conducting additional monographic investigations on this topic in Canada, especially inlarger municipalities where voter turnout is often lower.

cependant dans une telle direction. Ainsi, un taux de participation électoralefaible permet de résoudre en partie le paradoxe du vote (Downs, 1957). Deplus, l’électeur à l’échelle municipale dispose bien souvent d’une informa-tion limitée notamment à propos des réalisations des candidats sortants.Cela valide dans une certaine mesure la thèse de l’ignorance rationnelle(Downs, 1957). À ce sujet, plusieurs hypothèses sont d’ailleurs avancéespour expliquer la faible capacité de sanction électorale des votants auniveau local : la faible couverture médiatique, l’absence de partis politiqueset en corollaire l’absence de repères idéologiques permettant aux électeursd’identifier les coalitions en place, ainsi que la méconnaissance descompétences dédiées aux municipalités (Cutler et Matthews, 2005). Dansun tel contexte d’information limitée, se rendre aux urnes à l’échelle munic-ipale peut donc représenter un coût assez élevé pour l’électeur. Les ressour-ces dont disposent ceux-ci, par exemple l’éducation ou le revenu, neseraient donc pas suffisantes pour combler ce déficit informationnel.

Deuxièmement, l’environnement institutionnel et politique desmunicipalités est tellement différent des autres paliers de gouvernementqu’il n’est pas facile d’y transposer des modèles explicatifs similaires(Oliver et coll., 2012). Trounstine (2009) explique cela en soulignant :« It is a mistake to assume that the constraints, patterns, and processesthat have been explained well at the national level will directly translateat the local level, pursing local research can be difficult and time consum-ing—as if starting from scratch. It is not enough to just “use” cities as cases,because cities may well be different ». Les caractéristiques des électionsmunicipales sont en effet bien uniques. À titre d’exemple, on peut citerun environnement partisan absent ou très peu organisé, une confusion surles critères à partir desquels les candidats sortants sont punis ourécompensés par les électeurs, ainsi que des enjeux de mobilisationélectorale difficiles à identifier car fortement liés au contexte propre àchaque municipalité. Un modèle de participation électorale « municipale» reste donc encore à élaborer. Notre objectif est pour l’instant moins ambi-tieux et vise à tester un ensemble d’hypothèses inférées sur la base de quel-ques rares études de sociologie électorale municipale. Nous espérons quecela nous permettra – ainsi qu’à d’autres – de réfléchir à un cadre explicatifde la participation électorale spécifique à l’échelle municipale.

1.1 L’effet du contexte sociospatial et sociodémographique

Pour Troustine (2009), Oliver et Ha (2007) ainsi qu’Oliver et coll. (2012),plus la taille d’une municipalité est grande, plus la participation électoraleest faible. Ce raisonnement est principalement basé sur l’idée qu’au seind’une municipalité populeuse, l’électeur a moins l’impression que sonvote fera la différence. Il aurait ainsi davantage tendance à s’abstenir.Cette thèse a toutefois été largement discutée. Pour certains, une telle

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idée néglige de nombreux aspects et la taille de la municipalité ne permetpas à elle seule d’expliquer la participation électorale (Kelleher etLowery, 2004). Caren (2007) montre d’ailleurs que l’effet statistique dela taille est plutôt négligeable lorsque l’on s’intéresse seulementaux grandes villes. En ce sens, Tavares et Carr (2012) insistentparticulièrement sur le rôle positif que peut jouer la densité sur la participa-tion. La densité aurait pour effet de créer des liens entre les citoyens et lesinciter à se mobiliser, atténuant ainsi les effets de la grande ville.

D’autres études s’intéressent aux attributs individuels de l’électeurplutôt qu’au contexte sociospatial. Rugh et Trounstine (2011) soulignenten effet que les élections locales sont souvent des élections peucompétitives où la participation électorale est faible. Dans ce contexte, lesvotants sont généralement des propriétaires, plus âgés, plus riches et pluséduqués que la moyenne3. Ces constats vont dans le même sens que ceuxd’Oliver et al. (2012), qui pour leur part insistent sur le caractère décisifdu niveau d’éducation et du fait d’être propriétaire comme déterminantde la participation électorale municipale. Toujours concernant les attributsindividuels de l’électeur, Nakhaie (2006) montre que c’est surtout l’âgede celui-ci qui aurait un impact important sur la participation électorale àl’échelle municipale au Canada, et ce de façon encore plus prépondérantequ’aux autres niveaux de gouvernement.

1.2 L’effet du contexte institutionnel et de l’offre électorale

La majorité des recherches met en évidence ce que plusieurs nomment lecontexte institutionnel du vote. De façon plus précise, cette famille de fac-teurs a trait à l’organisation du système électoral et à la compétitionélectorale qui en résulte. Par exemple, Wood (2002) souligne que dansles municipalités où l’élection est partisane selon un système dereprésentation territorialisée par districts électoraux, la participationélectorale est généralement plus élevée que dans les municipalités dont leconseil municipal est élu par l’ensemble de la population et le mairechoisi par et parmi les membres du conseil municipal. Cette dernièrehypothèse a également été confirmée empiriquement par Caren (2007)qui dans une étude longitudinale sur 38 villes américaines a aussidémontré que la participation électorale est plus élevée lorsque la margevictorieuse est petite. En outre, elle montre que la participation électoraleest plus faible lorsqu’un candidat sortant est aspirant à sa propre succession.Ainsi, la compétitivité de l’élection et le choix qui s’offre aux électeurspourraient bien avoir une influence sur le niveau de participation.

Enfin, d’autres considèrent que l’absence de partis politiques à cetteéchelle de gouvernement défavorise la participation électorale. Il existeà ce sujet un discours antinomique, relativement ancien, quant à lanécessité d’avoir ou non des partis politiques à l’échelle locale. Ainsi,

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pour certains, il est nécessaire d’avoir des formations partisanes pour aug-menter la participation électorale (Elmendorf et Schleicher, 2012). D’autresaffirment au contraire que les enjeux locaux ne sont pas suffisammentimportants pour être en mesure de générer une vie municipale partisane(Peterson, 1981). Les recherches empiriques qui testent ce lien se contredi-sent. Certaines soulignent que l’absence de parti tend à diminuer la partic-ipation (Williams et Adrian, 1959 ; Schaffner et coll., 2001 ; Schaffner etStreb, 2002) alors que pour d’autres, les partis politiques n’ont aucunimpact sur le vote (Wood, 2002).

En somme, les rares études de sociologie électorale municipaledemeurent fragmentaires et souvent contradictoires. Cela tient sans douteau caractère assez récent du champ des études électorales locales. Leurmérite est toutefois de poser les cadres de l’interrogation sur les électionsmunicipales. Premièrement, les élections municipales sont distinctes desélections nationales (Oliver et coll., 2012 ; Caren, 2007), principalementparce que le poids des variables sociodémographiques serait beaucoupmoins important qu’il ne l’est aux échelons supérieurs. L’environnementinstitutionnel expliquerait davantage la participation électorale municipale.Deuxièmement, les facteurs sociospatiaux tels que la taille d’unemunicipalité ou sa densité seraient particulièrement importants pour com-prendre la dynamique électorale à ce niveau de gouvernement. Cesétudes concernent avant tout les États-Unis alors qu’au Canada, lesrecherches sur la participation électorale municipale se font encore plusrares.

1.3 La participation électorale municipale au Canada : des résultatsparcellaires

Au Canada, les recherches sur la participation électorale à l’échelle munic-ipale sont très peu nombreuses. En 1974, Sproule-Jones (1974) affirmait : «Very little is known about the nature and extent of political participation atlocal level in Canada » page?. Quelques quarante années plus tard, leconstat demeure sensiblement le même (Dostie-Goulet et coll., 2013). Demême à l’instar des constats réalisés aux États-Unis, les études existantesportent sur une ville spécifique (Kushner et coll., 1997, Sproule-Jones,1974) ou sur une catégorie spécifique de la population (Dostie-Goulet etcoll., 2013).

Trois thématiques principales se dégagent des études existantes : l’ab-stentionnisme, le rôle de la politisation et de l’information et enfin l’impor-tance de l’âge. Ainsi, dans leur analyse de la ville de St-Catharines(Ontario), Kushner et Siegel (2006) notent que l’abstentionnisme est reliéà deux éléments : « When non-voters were asked why they did not vote,the most frequent reason was lack of information about candidates andthe poor quality of the candidates ». Cette question de l’information

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disponible revient très souvent au sein des écrits (Taylor, 2011 ; Milner,1997 ; Cutler et Matthews, 2005). Stanwick (2000), dans son étude de laville de Toronto, précise en effet que le taux de participationparticulièrement élevé en 1997 était le résultat d’une méga campagneélectorale.

Dans un même ordre d’idées, Cutler et Matthews (2005) fontl’hypothèse que la participation électorale plus faible à l’échelle municipales’explique par une quantité et une qualité d’informations largementinférieures à celles que reçoivent les votants lors des élections nationales.Selon ces auteurs, ce déficit informationnel est en partie dû à la quasi-absence de partis politiques à cette échelle. Il y aurait donc, selon eux, unlien entre la présence de partis politiques, la qualité et la quantité d’informa-tions divulguées et la participation électorale. Enfin, pour Dostie-Goulet etcoll. (2013), l’enracinement dans la communauté ainsi que l’âge sont sus-ceptibles de jouer un rôle déterminant. Ces auteurs montrent en effet quecertains jeunes (de 18 à 35 ans) qui votent à l’échelle fédérale ont tendanceà s’abstenir à l’échelle municipale. L’enracinement des jeunes dans leurcommunauté peut cependant venir changer la donne.

1.4 La disponibilité des données électorales municipales au Canada

Les quelques études présentées ici sont des pionnières dans le champ de laparticipation électorale municipale. Leurs analyses demandent toutefois àêtre approfondies, notamment en raison de leur base empirique relativementlimitée en matière de participation électorale. Kushner et Siegel (2006),Cutler et Matthews (2005), Taylor (2011) et Sproule-Jones (1974)s’intéressent en effet à une seule élection dans une seule municipalité.L’étude de Milner (1997) est spéculative alors que celle de Dostie-Gouletet coll. (2013) analyse les résultats d’un sondage pour une catégorieprécise d’électeurs, soit les jeunes montréalais, et non directement desdonnées électorales.

Il faut dire que la particularité du système municipal canadien rend dif-ficile les enquêtes. Le Canada rassemble en effet 13 systèmes municipauxindépendants en comptant les trois territoires fédéraux que sont le Yukon,les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut. Une étude transversale de laparticipation électorale à cette échelle est donc difficile à réaliser(Sancton et Young, 2009). Comme nous l’avons souligné plus haut, iln’y a pas de tradition de centralisation des données électorales municipalesà l’échelle provinciale (Milner, 1997). De plus, il manque plusieurs infor-mations systématiques sur le système politique municipal qui aideraient àinterpréter les résultats électoraux. Nous pensons notamment à l’absencede recensement des partis politiques municipaux, un enjeu empiriquesouligné par Joyce et Hossé il y a déjà plus de 40 ans : « A considerablenumber of Canadian cities have one or more political groups fitting the

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definition of a municipal party […] municipal parties are much morecommon than is realized generally. In many cities, the people interviewedexpressed surprise that groups similar to their own existed in other cities» (1971, page?). Ce constat est encore d’actualité et il n’existe à notre con-naissance aucun portrait contemporain des partis politiques canadienslocaux.

Le Québec constitue toutefois une exception. Premièrement, depuis2005 à l’initiative du MAMROT, les données électorales pour l’ensembledes municipalités du Québec (soit 1 100 municipalités) sont centraliséesen une seule base de données, accessible aux chercheurs. Deuxièmement,le fait que depuis 2005, toutes les élections se déroulent le même jourtous les quatre ans permet de comparer les résultats électoraux et deposer les prémisses d’études longitudinales des données électorales munic-ipales. Troisièmement, le Québec est la seule province canadienne à s’êtredotée d’une loi encadrant la création des partis politiques à l’échelle locale4.Cette reconnaissance législative des partis politiques municipaux depuis1978 a été accompagnée d’un registre des partis politiques qui permet decompiler certaines données. Cet article vise à profiter de la disponibilitédes données électorales et des données du recensement pour faire pourune première fois une analyse globale de la participation électorale munic-ipale dans le contexte canadien.

2. CADRE THÉORIQUE

En lien avec les écrits présentés plus haut, notre proposition repose surl’idée que la participation électorale municipale est fonction du contextesociospatial, des facteurs sociodémographiques, de l’environnement institu-tionnel et de l’offre électorale. L’équation suivante résume notre modèleexplicatif :

Participation�electorale(%) ¼ aþ b1(densit�e)þ b2(magnitude)

þ b3(revenum�edian)þ b4(Propri�etaires)

þ b5(Universitaires)þ b6(Sansdiplomes)

þ b7(jeunes)þ b8(ag�es)þ b9(Margevictorieuse)

þ b10(District�electoraux)þ b11(partispolitiques)

þ b12(nombredecandidats)þ b13(femmecandidate)

þ b14(jeunecandidat)þ b15(Candidatsortant)

Il est à noter que la participation électorale renvoie ici à des données de pop-ulation, c’est-à-dire aux municipalités qui sont plus ou moins participativeset non à la participation électorale individuelle. En effet, il n’existe pas de

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données individuelles du même type que celles des Études électorales can-adiennes pour les élections municipales québécoises. Nous proposons doncquatre grands types d’hypothèses : les hypothèses liées au contexte socio-spatial (hypothèses 1 et 2), les hypothèses qui ont trait aux facteurssociodémographiques (hypothèses 3 à 8), les hypothèses associées au con-texte institutionnel (hypothèses 9 à 11) et les hypothèses liées à l’offreélectorale (hypothèses 12 à 15). En plus de tenir compte des résultats desétudes sur la participation électorale municipale, nous avons égalementtenu compte de certains des facteurs les plus probants testés aux échelonssupérieurs et qui se sont aussi révélés statistiquement significatifs dansdes études électorales municipales. Le nombre d’hypothèses est élevémais il s’agit pour nous de dresser un premier portrait d’une réalitéencore méconnue.

2.1 Le contexte sociospatial

La participation électorale devrait varier avec la densité de la population. Eneffet, une concentration plus importante de la population, en favorisant lesliens sociaux, devrait susciter la participation électorale. De plus, une plusgrande proximité du bureau de vote diminue le coût de déplacement pouraller voter (Blais et coll., 2003). À l’inverse, la taille de l’électorat devraitêtre corrélée négativement avec la participation électorale (Oliver et Ha,2007). En effet, la valeur marginale d’un vote, au sens de la probabilitéde pouvoir faire la différence lors du scrutin, diminue lorsque la taille del’électorat augmente. Les électeurs dont le vote vaut moins devraientdonc avoir une plus faible propension à se déplacer vers les urnes.

2.2 Les facteurs sociodémographiques

Les écrits soulignent également l’existence d’une corrélation entre la partic-ipation électorale et le niveau d’éducation (Blais, 2000 ; Oliver et coll.,2012). Par exemple, un électorat présentant un fort taux d’universitairesdevrait participer davantage que celui présentant un taux élevé de sansdiplômes. La participation électorale devrait également dépendre de lapyramide des âges des citoyens d’une municipalité (Blais, 2000 ; Dostie-Goulet et coll., 2013). Ainsi, les municipalités présentant un taux élevéde jeunes électeurs devraient voter en moins grande proportion alors queles municipalités présentant un fort taux de personnes plus âgées devraientvoter davantage.

Par ailleurs, bien que cette réflexion soit absente de notre revue desécrits sur la participation électorale municipale, il est possible de penserque la participation devrait être corrélée négativement avec le revenumédian d’une municipalité. Une telle relation peut sembler surprenante,mais il existe un lien entre la participation et la redistribution de la richesse

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(Mahler, 2008). Dans le contexte municipal, la principale assiette fiscale estconstituée de la taxe foncière qui est un système de taxation dégressif. Binetet Pentecôte (2004) ont montré dans le contexte français que ce mode detaxation a un effet sur le comportement de l’électeur. Il est donc cohérentque l’on retrouve davantage de participation dans les municipalités oùl’électeur médian est moins fortuné. En effet, celui-ci a davantage intérêtà voter étant donné l’impact plus important de la taxe foncière sur sonrevenu disponible.

Parallèlement à cela, comme la taxe foncière est directement facturéeaux propriétaires, le statut de propriétaire constitue un facteur incontourn-able au niveau local (Manturuk et coll., 2009). Par l’entremise de leurcompte de taxes, les propriétaires disposent de plus d’informations queles locataires sur la manière dont est gérée une municipalité. De plus, lavaleur de leur propriété peut être affectée par les décisions des éluslocaux. Ceux-ci sont ainsi davantage disposés à participer au scrutin.Il est donc cohérent de retrouver un taux de participation plus importantlorsque le taux de propriétaire est plus élevé, comme l’a déjà démontréOliver (2000). Par ailleurs, il est à noter que King (1997) nous prévientdu potentiel d’erreur écologique que posent les facteurs sociodémo-graphiques lorsque nous travaillons sur des données de population. Toutparticulièrement, nous devons nous garder d’inférer des comportementsindividuels en se fondant sur la simple analyse de caractéristiques individ-uelles agrégées mesurées auprès d’une population. Toutefois, King (1997)souligne que ce type d’inférence ne doit pas d’emblée être invalidé. Ladécouverte de relation significative invite plutôt à raffiner l’analyse àpartir de données individuelles.

2.3 L’effet de l’environnement institutionnel

Les hypothèses 9 à 13 sont liées à l’organisation du système électoral et dela compétition électorale. Nos variables se concentrent sur le degré decompétitivité, sur la présence de partis politiques et sur la divisionélectorale territoriale. Tout d’abord, la participation devrait être plusélevée lorsque l’élection est serrée, c’est-à-dire lorsque la marge victorieuseest plus faible (Blais, 2000). Cela signifie que la valeur marginale d’un voteaugmente lorsque le nombre de votes séparant le gagnant de celui quitermine second diminue. Ensuite, la présence d’au moins un parti politiquedevrait favoriser la mobilisation des électeurs (Schaffner et coll., 2001).Finalement, même si notre étude se concentre sur la participationélectorale à la mairie et que le représentant à ce poste électif est toujoursdésigné au suffrage universel lors des élections municipales québécoises,nous pensons que la division électorale territoriale pourrait avoir unimpact sur la mobilisation des citoyens. La multiplication des enjeux àl’échelle du district devrait inciter davantage d’électeurs à se déplacer. La

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participation devrait être plus importante lorsque le territoire est divisé endistricts électoraux (Wood, 2002).

2.4 L’offre électorale

La participation électorale devrait être plus importante dans lesmunicipalités où il y a plusieurs candidats en lice par rapport à celles oùil n’y a que deux candidats qui s’opposent. En effet, un nombre plus impor-tant de candidats permet d’augmenter la probabilité que les électeurs entrouvent un qui est conforme à leur préférence et auquel ils pourraient s’ide-ntifier (Lightbody, 2006). Dans une même mesure, la présence d’au moinsune femme candidate ou encore d’un jeune candidat devrait favoriser la par-ticipation électorale car elle contribue à augmenter la représentativité descandidats. En effet, il s’agit de deux groupes généralement sous-représentés dans les candidatures pour des postes électifs, ce qui augmentedonc la probabilité que les électeurs trouvent un candidat conforme à leurpréférence. Finalement, la présence d’un candidat sortant devrait êtrecorrélée négativement avec la participation électorale (Caren, 2007).La course devient alors plus stimulante en présence de deux challengersne bénéficiant pas de prime à l’urne. En effet, dans le cas d’un mairesortant quittant la vie politique, le niveau de conflictualité lié à de nouvellesdonnes politiques est plus important. L’augmentation de cette compétitivitédevrait donc stimuler la participation électorale.

3. MÉTHODOLOGIE

La définition précise de chacune des variables qui permettront de tester cesdifférentes hypothèses se retrouve en annexe du présent texte. La base dedonnées a été construite à partir de deux sources, soit les bases dedonnées sur les élections municipales du MAMROT pour 2005 et 2009ainsi que le profil des communautés 2006 de Statistiques Canada. La distri-bution de ces mêmes variables se retrouve au tableau 2. Notre variabledépendante est le taux de participation qui est mesuré par le ratio dunombre de votes exprimés sur le nombre d’électeurs inscrits. Cette variableest exprimée en pourcentage. Nous allons tester chacune des hypothèses àpartir d’analyses de régression portant sur la participation électorale à lamairie dans les municipalités québécoises en 2005 et 2009. Nous devonslimiter notre analyse à la mairie puisque les données sociodémographiquesne sont pas disponibles à l’échelle des districts électoraux pour les postes deconseillers municipaux. Par ailleurs, deux hypothèses ne peuvent êtretestées à la fois pour 2005 et 2009 pour des raisons de disponibilité desdonnées. Il s’agit de l’hypothèse des districts électoraux (hypothèse 10)qui n’est testable que pour l’élection de 2005 et celle de la présence d’un

Analyse écologique des déterminants de la participation 797

candidat sortant (hypothèse 15) qui n’est disponible que pour 2009. Ladéfinition des variables et la matrice de corrélation entre les différentes var-iables se trouvent en annexe.

Il y a eu 1 035 cas d’élection à la mairie en combinant les exercices de2005 et de 2009 alors qu’il y a plus de 1 100 municipalités au Québec. Il yaurait donc dû y en avoir plus du double. Cet écart provient du nombreimportant d’élections par acclamation, un phénomène récurrent au niveaumunicipal, notamment dans les plus petites municipalités comme lemontre le tableau 1. Au total, c’est 55 % des maires qui ont été élus sansopposition en 2005 et 50 % en 2009. Par ailleurs, la présence de donnéescomplètes pour l’ensemble des variables est nécessaire pour réaliser uneanalyse de régression. De ces 1 035 élections à la mairie, nous disposonsde données complètes pour 949 d’entre elles qui se sont déroulées dans668 municipalités différentes. Plus précisément, notre étude porte sur 454élections pour l’année 2005 et 495 élections pour l’année 2009. Au total,il y a 296 municipalités dont nous analyserons à la fois les résultats pour2005 et 2009 alors que 372 municipalités n’offrent des résultats que pourune seule année, soit 2005, ou encore seulement pour 2009.

Notre devis de recherche est donc un panel sur série chronologiquepuisque nos données sont organisées selon une coupe transversale et unecoupe longitudinale. En effet, nous nous intéressons à la participationélectorale à la mairie dans les municipalités québécoises (Panel = 668municipalités) lors des élections de 2005 et de 2009 (Temps = 2 annéesd’élection). Un tel devis nous empêche d’utiliser une analyse derégression de type OLS (Ordinary Least Square). Il y aurait alors unrisque que les termes d’erreur de nos estimations soient affectés par laprésence d’autocorrélation et d’hétéroscédasticité. Cela aurait donc pourconséquence de contaminer les tests de signification statistique de nos esti-mations. En outre, la forte présence d’élection par acclamation nousempêche également de présenter un panel équilibré, puisque pour certaines

TABLEAU 1.Nombre et pourcentage d’élus sans opposition à la mairielors des élections de 2005 et de 2009 selon la taille de la municipalité.

Taille de la municipalité (N)2005 %2005 (N)2009 %2009

Moins de 2 000 hab. 455 62,6 412 56,7De 2 000 à 4 999 hab. 100 47,4 88 43,8De 5 000 à 9 999 hab. 28 38,9 24 32,9De 10 000 à 49 999 hab. 19 26,4 22 28,2De 50 000 à 99 999 hab. 3 33,3 1 11,1De plus de 100 000 hab. 0 0,0 1 11,1Total 605 55,0 548 50,0

Source : MAMROT 2005 ; 2009

798 JÉRÔME COUTURE ET AL.

municipalités, il n’y a pas eu de participation électorale pour l’une ou l’autredes élections.

Un panel qui n’est pas équilibré ne permet pas d’utiliser la méthodeOLS avec PCSE (Panel Corrected Standard Error) qui est recommandéepar Beck et Katz (1995) pour des devis en panel sur série chronologique.

Pour corriger nos estimations, nous allons plutôt utiliser la méthode derégression OLS avec RCVE (Robust Cluster Variance Estimator), qui estune procédure recommandée entre autres par Wooldridge (2002) pour cor-riger les problèmes liés au panel. De plus, nous allons ajouter une variablefactice qui permettra de contrôler l’effet de l’année de l’élection. En somme,notre analyse se divisera en trois modèles. Le premier modèle (A) évalueseulement l’élection de 2005, le second modèle (B) évalue l’élection de2009 et le troisième modèle (C) concerne l’ensemble des cas de ces deuxélections. Il est à noter que les points méthodologiques présentés plushaut ne concernent que le dernier modèle (C). En effet, les modèles A etB ne présentent qu’un seul cas d’élection par municipalité. Les estimationsne sont donc pas affectées par les problèmes mentionnés plus haut. Lesestimations pour les modèles A et B seront donc réalisées à partir d’unerégression de type OLS. La présence de ces deux modèles se justifie parle fait que les hypothèses 10 et 15 ne peuvent pas être testées à la fois

TABLEAU 2 :Analyse descriptive

Moy. Min. Max. Écart-type Asym. Aplat.

Corrélation avecla participation(coefficient de

Pearson)

Participation (%) 58,96 25,43 100,00 12,34 0,06 −0,24 –Femme candidate 0,33 0 1 0,47 – – 0,01Jeune candidat 0,12 0 1 0,33 – – −0,06Parti politique 0,19 0 1 0,39 – – −0,29***2 candidats 0,75 0 1 0,44 – – 0,06Districtsélectoraux

0,43 0 1 0,50 – – −0,27***

Candidat sortant 0,73 0 1 0,44 – – 0,02Marge victorieuse 26,09 0,02 91,40 19,59 0,92 0,36 −0,12***Log densité 1,37 −0,70 3,71 0,80 0,59 0,27 −0,46***Log taille électorat 3,26 1,99 6,05 0,58 1,09 1,90 −0,60***Log revenu 4,76 4,49 5,19 0,26 0,53 1,36 −0,39***% Propriétaires 80,21 34,39 100,00 10,77 −0,91 1,13 0,26***% Sans diplômes 25,06 0,00 68,18 11,24 0,58 0,73 0,32***Log universitaire 1,13 0,24 1,89 0,26 0,01 0,46 −0,32***% jeunes (20-34) 15,24 5,36 29,93 3,14 −0,18 0,60 −0,25***% âgés (+ 70 ans) 10,30 0,00 24,81 3,77 0,35 0,28 0,20***

*** p < 0,001

Analyse écologique des déterminants de la participation 799

pour les deux années d’élection pour des raisons de disponibilité desdonnées. Les trois modèles de régression sont présentés dans le tableau 3de la section suivante.

4. RÉSULTATS

Le tableau 2 présente la distribution des différentes variables de notre étude.Nous remarquons que la moyenne des taux de participation électorale à lamairie dans les municipalités québécoises est de près de 59,0 %. Par ail-leurs, la variation dans ces taux est très importante, se situant entre 25,4et 100,0 % de participation électorale5. Ces chiffres peuvent paraître sur-prenants compte tenu des taux moyens de participation municipaux officielsqui estiment la participation municipale plutôt autour de 45,0 %(Champagne et Patry, 2004 ; Champagne, 2007). Ces chiffres officiels netiennent pas compte du poids relatif plus important des grandes villes surle calcul du taux effectif de participation au niveau municipal. Parconséquent, cela cache l’importante variation existant entre les différentesmunicipalités, notamment entre celles de plus petite taille et celles deplus grande taille. Le diagramme de dispersion présenté au graphique 1montre justement ce lien fort et négatif entre le nombre d’électeursexprimé de façon logarithmique et la participation électorale à partird’une analyse bivariée (b =−12,64 ; bêta =−0,60 ; R2 = 0,36 ; sig :p < 0,001). D’après le R2, c’est donc 36,0 % de la variation dans la partic-ipation électorale municipale qui pourrait s’expliquer simplement par lataille de l’électorat selon la droite de régression linéaire estimée à partirde ce diagramme de dispersion. Toujours selon ce schéma bivariée et en uti-lisant le coefficient de régression standardisé (bêta)6, cela signifie quel’effet marginal correspond à un changement de 0,60 point dans la partici-pation électorale pour un changement d’un point dans la taille de l’électorat.

Le tableau 2 montre également à la dernière colonne les coefficients decorrélation de Pearson entre les différentes variables de notre modèle et laparticipation électorale. On peut constater que la plupart des variables sontassociées à notre variable dépendante à l’exception des caractéristiques con-cernant l’offre électorale. En effet, la présence d’une femme candidate, laprésence d’un jeune candidat, la présence d’un candidat sortant et laprésence de seulement deux candidats en lice ne seraient pas corrélées àla participation électorale. Par ailleurs, d’autres variables sont associéesdans le sens inverse de nos prédictions. C’est notamment le cas de laprésence d’un parti politique, de la scolarité, de la densité de la populationainsi que de la division en districts électoraux.

Ces constats posent deux questions : 1) cette variation importante dansles taux de participation peut-elle s’expliquer par autre chose que la taille del’électorat telle que l’offre électorale ou l’effet de l’environnement

800 JÉRÔME COUTURE ET AL.

TABLEAU 3 :Analyse de régression

Variables dépendantes

A)Participation (%)

2005

B)Participation (%)

2009

C)Participation (%)2005 et 2009

Signe attendu entre () B (E.T.) b (E.T.) b (E.T.)

Constante 91,10** (33,72) 118,57*** (34,75) 104,49*** (30,80)Variables indépendantes1) Log densité (+) −0,48 (0,90) −1,15 (0,88) −0,78 (0,67)2) Log taille électorat (−) −12,53*** (1,43) −12,82*** (1,30) −12,69*** (1,06)3) Log revenu méd. (−) 1,86 (7,04) −4,75 (7,22) −1,39 (6,28)4) % Propriétaires (+) −0,03 (0,06) −0,02 (0,06) −0,03 (0,05)5) % Sans diplômes (−) 0,01 (0,06) −0,03 (0,07) −0,01 (0,06)6) Log universitaire (+) −2,49 (2,70) 0,25 (2,48) −0,96 (2,08)7) % jeunes (−) 0,24 (0,20) 0,23 (0,20) 0,23 (0,17)8) % âgés (+) 0,45** (0,17) 0,60*** (0,17) 0,52*** (0,15)9) Marge vict.(−) −0,08*** (0,02) −0,10*** (0,02) −0,09*** (0,02)10) Districts électoraux (+) 0,66 (0,98)11) Parti pol. (+) 0,43 (1,74) 0,86 (1,10) 0,94 (0,89)12) Deux candidats (−) −1,54 (1,08) −1,61 (0,98) −1,50* (0,68)13) Femme cand. (+) 0,27 (0,95) 0,19 (0,91) 0,18 (0,70)14) jeune cand. (+) −0,003 (1,31) 0,47 (1,30) 0,25 (0,87)15) Candidat sortant (−) 1,57 (0,96)16) Élection 2005 1,53** (0,51)(n) (454) (495) (949)F 20,90*** 26,33*** 36,95***R2 0,40 0,43 0,42

*p < 0,05 ; **p < 0,01 ; ***p < 0,001

Analyse

écologiquedes

déterminants

dela

participation801

institutionnel et 2) d’autres facteurs permettent-ils d’expliquer le lien fortliant la taille de l’électorat avec la participation, notamment lescaractéristiques sociodémographiques et sociospatiales qui distinguentgénéralement bien les petites villes des grandes Autrement dit, la relationliant la taille de l’électorat et la participation électorale disparaît-elle ouencore s’affaiblit-elle si l’on fait intervenir d’autres variables ? Lesréponses à ces questions se retrouvent dans les analyses de régressionmultivariée au tableau 3.

Celui-ci présente nos trois modèles de régression7. Respectivement, lesmodèles A et B testent nos différentes hypothèses de recherche sur lesélections de 2005 et de 2009. Étant donné le peu d’écart existant entreles modèles A et B avec les résultats du modèle C, qui reprend lesmêmes hypothèses mais cette fois pour les deux élections, nous allonssurtout concentrer l’analyse des résultats sur ce dernier modèle. Lesdifférences se limitent à montrer que la présence de seulement deux candi-dats en lice a un effet statistiquement significatif dans le modèle C alors quecette variable n’a pas d’effet dans les deux autres modèles. Par ailleurs,l’hypothèse concernant les districts électoraux (hypothèse 10) testéeuniquement dans le modèle A et l’hypothèse concernant les candidats sor-tants (hypothèse 15) testée seulement dans le modèle B ne sont pas signifi-catives. En somme, malgré une différence dans la composition des

GRAPHIQUE 1:Participation électorale (2005, 2009) et la taille de l’électorat exprimée defaçon logarithmique

802 JÉRÔME COUTURE ET AL.

échantillons, la stabilité des résultats dans les trois modèles nous rassure surleur fiabilité.

Ainsi, le modèle C permet de prédire plutôt bien la participationélectorale municipale au Québec en 2005 et 2009 (R2= 0,42 ; F =36,95 ;sig : p < 0,001) en expliquant 42 % de la variance à partir des variablesindépendantes. Toutefois, seulement quatre de nos 13 variables dumodèle ont un effet statistiquement significatif sur la participation, et cedans le sens de nos attentes théoriques. À cela, il faut ajouter l’effet de lavariable contrôlant l’année d’élection. Toute chose étant égale par ailleurs,

TABLEAU 4 :Définition des variables et sources

Définition Source

Participation (Votes exprimés / nombre d’électeurs inscrits)X 100

Résultats électoraux 2005et 2009

MAMROTFemme candidate 1 = présence d’au moins une candidate ;0 = seulement des candidats masculins

Jeune candidat 1 = présence d’au moins un candidat de moinsde 40 ans ;

0 = les candidats ont tous 40 ans ou plusParti politique 1 = présence d’au moins un parti politique ;

0 = absence de partis politiquesdeux candidats 1 = seulement 2 candidats en lice ;

0 = plus de 2 candidats en liceMarge victorieuse (% de vote du gagnant –% de vote du second

candidat)Districtsélectoraux

1 = élection des conseillers par district0 = élection des conseillers au suffrage

universelCandidat sortant 1 = présence d’un candidat sortant en lice

0 = absence d’un candidat sortant en liceLog taille électorat Logarithme (nombre d’électeurs inscrits)Log densité Logarithme (habitants / Km2) Profil des communautés

2006Statistique Canada

Log revenu Logarithme revenu médian des ménages

% propriétaires (nombre de logements possédés / total deslogements) × 100

% sans diplômes (nombre de personnes de plus de 15 ans sansdiplômes / total des personnes de plus de 15ans) × 100

Log universitaire Logarithme ((nombre de personnes de plus de15 ans ayant au moins un certificat univer-sitaire / total des personnes de plus de 15ans) × 100)

% jeunes (20–34) (Nombre de personnes âgées de 20 à 34 ans /population totale) × 100

% âgés (+70 ans) (Nombre de personnes âgées de plus de 70ans / population totale) × 100

Analyse écologique des déterminants de la participation 803

TABLEAU 5 :Matrice de corrélation de Pearson

Variables Part. Dens. Magn. Revenu Proprio S.diplo Univers. jeunes âgés Marge Districts Partis 2cand. Femme J.cand Sortant

Participation – −0,46 −0,60 −0,39 0,26 0,32 −0,32 −0,25 0,20 −0,12 -0,27 −0,29 0,06 0,01 −0,06 0,02Log densité *** – 0,71 0,58 −0,43 −0,54 0,49 0,32 −0,09 0,01 0,40 0,42 −0,07 −0,03 0,07 0,03Log taille élect. *** *** – 0,51 −0,53 −0,46 0,47 0,34 −0,09 −0,04 0,46 0,47 −0,22 0,01 0,13 0,03Log revenuméd.

*** *** *** – -0,07 −0,64 0,62 0,34 −0,41 −0,03 0,25 0,31 −0,05 −0,06 0,03 0,02

% Propriétaires *** *** *** * – 0,04 −0,06 −0,32 −0,27 −0,12 −0,26 −0,08 0,12 0,04 −0,11 0,02% Sansdiplômes

*** *** *** *** n.s. – −0,71 −0,11 0,16 0,07 −0,21 −0,29 0,04 0,03 −0,01 0,03

Loguniversitaire

*** *** *** *** * *** – 0,01 −0,11 −0,10 0,20 0,31 −0,08 −0,04 −0,00 −0,02

% jeunes (20-34)

*** *** *** *** *** ** n.s. – −0,51 0,09 0,21 0,07 0,04 −0,01 0,06 0,03

% âgés ( +70) *** ** ** *** *** *** ** *** – 0,02 −0.10 −0,16 −0,05 −0,04 0,03 −0,09Marge vict. *** n.s. n.s. n.s. *** * ** ** n.s. – 0,04 −0,11 0,11 −0,05 0,06 −0,00Districts élect. *** *** *** *** *** *** *** *** * n.s. – 0,32 −0,12 −0,02 0,04 –Partis politiques *** *** *** *** * *** *** * *** ** *** – −0,11 0,07 0,07 0,03Deux candidats n.s. * *** n.s. *** n.s. * n.s. n.s. ** ** ** – −0,18 −0,10 0,11Femme cand. n.s. n.s. n.s. n.s. n.s. n.s. n.s. n.s. n.s. n.s. n.s. * *** – 0,04 −0,03Jeune cand. n.s. * *** n.s. ** n.s. n.s. n.s. n.s. n.s. n.s. * ** n.s. – 0,04Candidat sortant n.s. n.s. n.s. n.s n.s. n.s. n.s. n.s. * n.s. n.s n.s. * n.s n.s. –

804JÉRÔMECOUTURE

ET

AL.

la participation électorale a été plus élevée de 1,53 point de pourcentage en2005 qu’en 2009. Cette différence est significative au seuil de 1 pour cent.En outre, il y a au moins une variable statistiquement significative pourchacune de nos catégories du cadre théorique. Voyons plus précisémentcomment se présentent ces résultats.

Pour ce qui est des facteurs sociospatiaux (hypothèses 1 et 2) etsociodémographiques (hypothèses 3 à 8), il s’avère que la relation entrela taille de l’électorat et la participation électorale reste forte et négative(b =−12,69 ; bêta = 0,60 ; sig : p < 0,001) malgré l’ajout de plusieurs var-iables permettant généralement de distinguer les villes selon leur tailletelle que la densité, le taux de propriétaire, le revenu médian et lesniveaux de scolarité. En effet, aucune de ces variables n’est statistiquementliée à la participation électorale dans l’analyse multivariée. Ainsi, seule lavariable mesurant la proportion de personnes âgées de plus de 70 ansest corrélée positivement avec la participation électorale (b = 0,52 ;bêta = 0,16 ; sig : p < 0,01). L’augmentation d’un point de pourcentagedans la proportion de personnes âgées de 70 ans et plus augmente la partic-ipation de 0,52 point de pourcentage. D’après le coefficient de régressionstandardisé (bêta), cette relation s’avère près de quatre fois moins impor-tante que celle liant la taille de l’électorat avec la participation électorale.Ce résultat doit s’interpréter par rapport à la participation de la populationâgée entre 35 et 69 ans. À ce sujet, la proportion de jeunes âgés entre 20 et34 ans n’est pas liée statistiquement avec la participation électorale. Engardant en tête le potentiel d’erreur écologique, ce résultat pourrait quandmême signifier que la participation électorale municipale des jeunes n’estpas différente de celle de la population des gens âgées entre 35 et 69 ans.

Quant aux variables liées au contexte institutionnel (hypothèses 9 à11), seulement la marge victorieuse (b =−0,09 ; bêta =−0,14 ; sig : p <0,001) est liée statistiquement avec la participation électorale. L’intensitéde cette relation s’avère à peu près dans les mêmes grandeurs statistiquesque celle découverte avec la proportion de personnes âgées de plus de 70ans en comparant les coefficients standardisés (bêta). Plus précisément, ilfaut une augmentation de 11 points de pourcentage dans la marge victor-ieuse pour faire diminuer la participation électorale d’un point de pourcent-age. En outre, la présence d’un parti politique et une division électoraleterritoriale n’ont pas d’effet sur le niveau de participation.

L’offre électorale (hypothèses 12 à 15), a également un léger effet sur laparticipation. En effet, la participation est de 1,50 point de pourcentage moinsimportante lorsque seulement deux candidats sont en lice. Cette relation estsignificative au seuil de 5 pour cent. Toutefois, la présence d’au moins unefemme candidate, la présence d’au moins un jeune candidat de moins de40 ans et la présence d’un candidat sortant n’ont pas d’effet sur le taux departicipation. En somme, c’est d’abord et avant tout la taille de l’électoratqui explique la variation dans la participation électorale. S’ajoutent à cela

Analyse écologique des déterminants de la participation 805

la présence d’un électorat âgé, le degré de compétition électorale expriméepar la marge victorieuse et le nombre de candidats en lice.

5. DISCUSSION

Les résultats présentés ci-dessus mettent en évidence un élément important.Parler de la participation électorale municipale au Québec nécessite deporter attention d’abord et avant tout à la taille de la municipalité. Eneffet, dans les plus petites localités qui représentent la majorité desmunicipalités au Québec8, lorsqu’il y a une élection, la participationélectorale est généralement plus élevée. Elle dépasse la plupart du tempsle taux moyen de participation et peut même dépasser les taux de participa-tion électorale des autres échelles de gouvernement. Toutefois dans lesgrandes villes, la participation électorale est beaucoup plus faible. Letaux moyen de participation est ainsi affecté par le poids des grandesvilles. Le fait que près de la moitié de la population de la province soitconcentrée dans les 10 plus grandes villes détermine donc en grandepartie l’influence de ce facteur sur le score moyen de participationélectorale municipale et par le fait même notre perception de la situationde ce phénomène à l’échelle municipale.

Le cas du Québec confirme les constats de Caren (2007) : «Unfortunately, the cities experiencing the largest growth in population arealso those with the lowest rates of participation. As more people will beliving in these apathetic cities, national rates of participation in local politicswill continue to decrease » page?. Notre étude accrédite également la thèsed’Oliver (2000) selon laquelle la taille de l’électorat est un facteur plusdéterminant pour expliquer la participation électorale que la plupart des fac-teurs sociodémographiques.

Comment expliquer cette prégnance de la taille de l’électorat sur toutesles autres variables testées dans notre modèle ? Que signifie ce résultat ?Qu’est-ce que l’enjeu de la taille de l’électorat nous dit sur le rapport descitoyens à la scène politique municipale ? Une première remarque seraitde souligner que la taille cache peut-être des mécanismes qui demandentà être mieux identifiés. On peut penser à l’instar de Goldsmith et Roseque la taille de l’électorat n’explique pas tout ou du moins dissimule uneautre réalité : « There is no single or universal size effect. The effect, tothe extent it exists, appears rather to be a conditional (contingent) effect de-pendent on a number of additional factors relating to such matters as insti-tutional settings and the characteristics of specific political phenomena ofinterest » (Goldsmith et Rose, 2002 page?).

À la lumière des résultats de notre étude, il est donc très plausible quela taille entre en ligne de compte dans le calcul stratégique des électeurs.C’est-à-dire que plus la taille augmente, plus une part importante des

806 JÉRÔME COUTURE ET AL.

électeurs vont juger que leur vote supplémentaire ne fera pas la différencesur les résultats de l’élection. Ces électeurs décideront par conséquent de nepas voter. Toutefois, cette hypothèse a ses limites car elle sous-entend queles électeurs devraient alors voter moins à l’échelle nationale qu’à l’échellelocale. Les chiffres présentés à la note de fin « i » démontrent plutôt quec’est souvent l’inverse qui se produit. Il y a donc des facteurs spécifiquesà l’échelon municipal qui ne se retrouvent pas aux autres échelons et quiexpliqueraient mieux la participation électorale.

Des hypothèses formulées au Canada et aux États-Unis sur lesélections locales peuvent nous aider à identifier ces facteurs spécifiques.Ces hypothèses ont trait à la difficulté pour l’électeur de s’informer àl’échelle locale (Elmendorf et Schleicher, 2012). Selon cette perspective,les campagnes électorales locales se caractériseraient par un niveau d’infor-mation très bas, d’où le nom d’élection à information limitée (low-informa-tion election). C’est surtout vrai dans les grandes villes où l’enjeu pour lescandidats est surtout de se faire connaître par l’électorat 9(Oliver et coll.,2012). Pourquoi une telle situation ?

Tout d’abord, la couverture médiatique des évènements locaux estmince, en raison du grand nombre de municipalités à couvrir, du faiblenombre de journalistes affectés à ces nouvelles et du peu de moyens dontils disposent. De même, les citoyens ont généralement une connaissancetoute relative des compétences dévolues à l’échelle locale (Cutler, 2008).Enfin, les partis politiques et les candidats municipaux sont à la fois peunombreux et difficiles à distinguer. En effet, ils n’affichent souventaucune couleur politique. Ils ont des programmes très divers dans leursformes et leurs propositions sont parfois difficilement différenciables lesunes des autres. En lien avec cette proposition sur les élections à informa-tion limitée, l’hypothèse articulant taille et participation électorale peut êtreformulée ainsi : plus la taille de l’électorat est importante, plus il est difficilepour les électeurs de connaître les candidats. En d’autres termes, plus le défide s’informer est grand, moins les électeurs votent. Au Canada, ceshypothèses ont été soulevées par plusieurs auteurs (Breux et Bherer, 2011 ;Cutler et Matthews, 2005 ; Kushner et Siegel, 2006 ; Milner, 1997 ;Taylor, 2011) mais n’ont pas vraiment été vérifiées de façon empirique àl’échelle locale. Notre étude démontre la nécessité de creuser davantagel’effet de ce déficit informationnel local pour expliquer plusieursphénomènes politiques locaux, dont le lien entre la taille, le niveau d’infor-mation et la faible participation électorale.

Les résultats confirment également que lorsque la marge victorieuse estmince, l’électorat tend à se déplacer davantage que dans le cas contraire.Autrement dit, quand la victoire d’un candidat semble assurée, l’électoratne se rend pas aux urnes. Il faut donc en quelque sorte qu’il y ait uneréelle compétition pour que l’électorat se déplace. Ce résultat va dans lesens de l’étude de Holbrook et Wienschenk (2013), qui a montré que lors

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de l’élection à la mairie la compétitivité du scrutin a un impact majeur sur laparticipation électorale. Ce résultat est également congruent avec celui quenous avons trouvé concernant le nombre de candidats en lice, qui est unautre indicateur de la compétitivité d’une élection. En effet, nos résultatsdémontrent que la participation est plus faible lorsque seulement deux can-didats sont en lice. Ainsi, outre la taille de l’électorat, notre enquête invite àcreuser davantage le rôle de l’information et l’impact des campagnesélectorales sur la mobilisation à cette échelle.

Quant à l’influence de l’âge sur le comportement électoral à l’échellemunicipale, ce constat dans le cas du Québec est semblable à celui élaboré àl’échelle provinciale (Gélineau et Morin-Chassé, 2009) selon lequel lesélecteurs âgés votent davantage que les électeurs plus jeunes. Nakhaie(2006) a d’ailleurs trouvé un résultat semblable sur des données individu-elles en comparant la participation aux différents paliers de gouvernement.Ces résultats mettent toutefois à l’avant-plan l’importance du cycle de viesur le comportement électoral, élément absent des études actuelles sur lecomportement politique à l’échelle municipale. Il n’est pas si surprenantque les jeunes votent moins que leurs aînés aux élections municipalespuisque les municipalités ont été souvent associées à des enjeux liés à l’ha-bitation. Cette situation a souvent été résumée par l’expression « unedémocratie de propriétaires » ou par l’idée que les municipalités offrentavant tout « des services à la propriété » tel que le déneigement, la cueillettedes matières résiduelles et la voirie. Ce qui est plus étonnant est le fait juste-ment que la variable «propriétaire» n’a pas d’effet statistique sur la partic-ipation électorale. Cela peut donc indiquer que c’est plutôt l’enracinementdans une communauté (Dostie-Goulet et coll., 2013) ou la stabilité dans lelieu de résidence (Geys, 2006), plus que le statut de propriétaires ou de loca-taires, qui serait un incitatif à la participation. Une étude portant sur desdonnées individuelles permettrait de clarifier ce point qu’il n’est pas possi-ble de résoudre en travaillant simplement sur des données de population.

6. CONCLUSION

Certes, notre enquête ne nous permet pas de dresser un profil complet del’électeur au niveau municipal mais elle a l’avantage de tirer quelquestraits caractéristiques de cet électorat. Ainsi, notre analyse montre que lataille de l’électorat, la présence d’un électorat âgé, la marge victorieuse etle nombre de candidats en lice sont susceptibles d’entrer en ligne decompte dans la décision des électeurs de se rendre ou non aux urnes. Cesrésultats confirment en partie les études réalisées aux États-Unis, c’est-à-dire que l’environnement institutionnel est particulièrement importantpour déterminer le niveau de mobilisation électorale. En contexte canadien,cela s’exprime par le degré de compétition électorale. Le poids de l’électorat

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âgé est toutefois différent des résultats aux États-Unis où le facteur ethniqueest plus déterminant (Hajnal et Trounstine, 2013). Finalement, la questionde la taille de l’électorat demeure toujours un facteur important, qui a faitcouler beaucoup d’encre au Canada, aux États-Unis et ailleurs, mais dontles effets sur la structuration de la scène politique locale demeurent malcompris. Les études pionnières au Canada tendent à penser qu’il fautdavantage creuser les liens entre contexte informationnel déficient et partic-ipation, une avenue également avancée aux États-Unis.

NOTES

1 Par exemple, les Québécois ont voté à 62,9% aux élections fédérales de 2011 (ÉlectionCanada, 2011), à 71,4% aux élections provinciales de 2014 (DGEQ, 2012) et à 47,0 %aux élections municipales de 2013 (MAMROT, 2013). L’écart est donc d’au minimum14 points et d’au maximum près de 24 points de pourcentage lorsqu’on compare la par-ticipation des Québécois aux différents paliers. En Ontario, l’écart entre la mobilisationélectorale provinciale et municipale est presque nul mais il demeure de plus de 11 pointsde pourcentage lorsqu’on compare les résultats des élections fédérales et municipales.61,5% des électeurs ontariens se sont déplacés aux urnes lors des élections fédéralesde 2011 (Élection Canada, 2011), 52,1% aux élections ontariennes de 2014 (ElectionsOntario, 2014) et 49,1% aux élections municipales de 2010 d’après une estimationtirée d’un sondage auprès des directeurs municipaux (AMCTO, 2011). Même si ceschiffres ne concernent que des élections récentes dans deux provinces canadiennes,ils illustrent bien la réalité canadienne telle que dépeinte par plusieurs observateurs dediverses provinces canadiennes (Cutler et Matthews, 2005).

2 À titre d’exemples, au Manitoba et en Colombie-Britannique, les résultats des électionsmunicipales sont souvent en ligne, à l’initiative par exemple d’associations demunicipalités. Ces résultats doivent cependant être centralisés, et bien souventuniformisés et complétés d’un scrutin à l’autre (les informations présentes ne sont pastoujours les mêmes d’un scrutin à l’autre ou alors elles sont incomplètes). Il n’y adonc pas encore de réelle centralisation des données. Par ailleurs, en Ontario, si certainesmunicipalités ont mis en ligne les résultats électoraux sur leur site, d’autres ne l’ont pasfait. Bref, la situation est variable d’une province à l’autre et la centralisation à l’échelledu Canada est inexistante.

3 Les auteurs ajoutent également le critère racial en soulignant que les votants sontgénéralement blancs.

4 Ce qu’il faut comprendre c’est que les partis politiques locaux peuvent exister dans lesautres provinces mais ils n’ont aucune reconnaissance officielle. Au Québec, la loi enca-drant la formation de partis politiques locaux s’appelle la Loi sur les Élections et lesRéférendums et fut adoptée en 1978. On dénombre aujourd’hui quelques 120 partispolitiques dans la province.

5 La participation minimum (25,4 %) est pour la municipalité de Westmount en 2005 quicomptait alors 14 158 électeurs et dont la marge victorieuse du maire a été de 78,9 %. Sixautres municipalités ont des scores de participation sous les 30,0 % et 55 autresmunicipalités se retrouvent sous la barre des 40,0 % dont Gatineau en 2009 ainsi queMontréal, Laval et Longueuil à deux reprises en 2005 et en 2009. La participationmaximum (100,0 %) est pour la municipalité de Godbout qui comptait alors 239électeurs et dont la marge victorieuse du maire a été de seulement 1,3 %. Lamunicipalité de Bristol en 2009 (99,4 %) se démarque également puisque seulementquatre des 642 électeurs ne se sont pas présentés aux urnes alors que la marge victorieuse

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du maire y a été relativement élevée à 16,4 %. Deux autres municipalités ont eu une par-ticipation électorale supérieure à 90,0 % et 25 autres ont eu une participation supérieureà 80,0 %. Le nombre d’électeurs dans ces dernières municipalités se situe entre 287 et 1773 électeurs.

6 Les coefficients de régression standardisés ne sont pas rapportés dans le tableau derégression par souci d’économie d’espace. Toutefois, ils sont rapportés dans le textepour permettre une comparaison entre les variables.

7 Malgré l’existence d’une corrélation entre plusieurs de nos variables indépendantes, lamulticolinéarité ne constitue pas un problème pour la validité des modèles. En effet, lescoefficients de tolérance et les VIF calculés pour chacune de nos variables respectent lesseuils acceptés soit d’un minimum de 0,20 pour l’indice de tolérance et d’un maximumde cinq pour les VIF. Par exemple pour la variable log taille électorat, qui est celle ayantle plus de corrélation avec les autres variables du modèle, le coefficient de tolérance dansle modèle C est de 0,32 et le VIF de 3,09.

8 Sur les 1 111 municipalités qui la composent, la province compte 723 municipalités demoins de 2 000 habitants regroupant près de 7,6% de la population du Québec.Parallèlement à cela, les 10 plus grandes villes (soit celles de plus de 100 000 habitants)rassemblent près de 46% de la population de la province.

9 Plusieurs témoignages d’élus municipaux entendus à la Commission parlementaire Loimodifiant la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités en matière definancement, au printemps 2013, confirment qu’il s’agit du principal enjeu lors des cam-pagnes électorales municipales. Pour plus de renseignements, consultez http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-26-40-1.html (17 décembre2013).

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