20

Democratie culturelle cgt_chsct

Embed Size (px)

DESCRIPTION

 

Citation preview

Page 1: Democratie culturelle cgt_chsct
Page 2: Democratie culturelle cgt_chsct

Supplément au Peuple n° 1638

Som

ma i re

Démocratie culturelleJean-Pierre Burdin

Intr

oduc

tion

3

Pour une démocratie culturelle

Document d’orientation48econgrèsDo

cum

ent

d’or

ient

atio

n

19

Des perspectives exaltantesFranck Guillaumet16

5

2

Pour l’essor de la cultureAgnès Naton

ORGANEOFFICIEL

DE LA CGT

Représentant légalPrésident du conseil

d’administrationDirecteur de publication :

Daniel PradaRédactrice en chef :Françoise Duchesne

Secrétariat de rédaction :Sabine Ferry

Christophe BaretteMaquette :

Séverine Calippe

Le Peuple case 43293514 Montreuil Cédex

Tél . rédaction/administration : 0148 18 83 05

Tél. abonnement : 01 48 18 8306

Télécopie : 01 48 59 28 31e-mail : [email protected]

[email protected]ément au Peuple n°1638

85e année (n° 8474)ce numéro a été tiré à 25

000 exemplairesCommission paritaire N° 0408 S

06460 dépôt légal - Novembre 2006

Cgt - Politique Culturelle Confédérale263, rue de Paris 93 516 Montreuil Cedex

01 48 18 86 89. [email protected] www.cgt.fr

Dessins : Fred Sochard

Page 3: Democratie culturelle cgt_chsct

A son 48econgrès, en avril 2006, àLille, la Cgt a acté qu’elle entendait

prendre toute sa place dans la construction d’unedémocratie culturelle : chemin de l’émancipationdu salarié-citoyen, du libre choix d’intervenir sursa vie et son devenir, en rupture avec une visionélitiste de la culture.

Cet engagement prolonge et renouvelleles combats constants de la Cgt pour l’essor de laculture dont avec les travailleurs du spectacle etde la culture, et aux côtés de ceux qui la font

3Supplément au Peuple n° 1638

Préf

ace

elle

Pour l’essorde la culture

Page 4: Democratie culturelle cgt_chsct

vivre, elle a partagé les luttes tout au long de son histoire.Aujourd’hui, lorsque nous parlons, avec beaucoup d’au-

tres, de démocratie culturelle, nous affirmons une conception dela culture qui permette à chacun de s’inscrire dans le partage etle développement de la culture commune. Se cultiver c’est biensortir de sa culture propre. Ce n’est pas faire sécession, c’estentrer en partage d’un monde commun. La culture n’est pas uncontinent à part, si essentiel soit-il. Elle se reçoit dans l’accueilde belles diversités qui irriguent le « tout-monde » et qui, commel’évoque Edouard Glissant, sont appelées à inventer un peuple.

Permettre à chacun de se fonder et de se développercomme être de culture, dans son individualité la plus singulière etdans l’hospitalité qu’il offre à la culture d’autrui pour rassemblersans uniformiser, est bien aussi une tâche syndicale.

Elle appelle à renouveler notre vision du travail, à enmesurer ses capacités (culturelles) transformatrices, à avoirconfiance dans les capacités d’affranchissements des salariés,dès lors que leurs dynamiques sont reconnues, rendues visibles,mises en culture. C’est tout le travail de l’art et des activités pro-prement émancipatrices d’ouvrir sur les polysémies du réel.

Articuler dans un document de congrès, dans la structura-tion même du texte, démocratie culturelle et démocratie sociale,est une avancée considérable. Considérer qu’elles s’appuient etse conjuguent l’une l’autre élargit notre vision du syndicalisme,nos conceptions et possibilités de rassemblements, enrichit nospropositions de transformations sociales, nous met en positionmeilleure pour défendre les créations et institutions culturelles,porter des exigences envers les pouvoirs publics, le patronat.

Comment agir, syndicalement, mais aussi avec d’autres, àce que s’affermisse ce qui n’est encore qu’une intuition balbu -tiante ? Nous savons que nous sommes nombreux à partager les

Supplément au Peuple n° 16384

Page 5: Democratie culturelle cgt_chsct

mêmes préoccupations, à vouloir croiser les réflexions et à por-ter des ambitions communes.

En Juillet dernier en Avignon, nous avons reposé cettequestion, au moment où nous fêtions le soixantième anniversairedu festival. Le document donné à cette occasion, qu’on va lire ici,est né de rencontres et d’échanges auxquels ont participé les mili-tants de la Cgt, en beaucoup de lieux, avec d’autres amis dumouvement associatif, du monde du travail, des artistes, deschercheurs, des animateurs de l’éducation populaire, durant cesdeux dernières années1. C’est un mélange. Ce texte tente de don-ner cohérence à ces réflexions. Nous les versons au débat. Il s’ins-crit dans l’aventure culturelle de la Cgt2 et les met en perspectivedes décisions de notre 48econgrès.

Il s’agit d’un travail commun de l’activité confédérale depolitique culturelle répondant à une demande collective pres -sante de capitaliser l’acquis d’une réflexion. Il ne clôt pas. Ilouvre. Il est maintenant à mettre en dispute, en discussion. C’estun point, pas un point final, mais un point de situation, qui a étédonné en Avignon parce que ce festival demeure, aux yeux debeaucoup, un des lieux prestigieux pouvant accueillir le renouvel-lement d’une pensée, ici syndicale, sur la culture et le travail. Unepensée pour agir.

Secrétairede la Cgt

Agnè

s Nat

on

5Supplément au Peuple n° 1638

Page 6: Democratie culturelle cgt_chsct

Parler du rapport qu’entretient unpeuple avec la culture, les cultu-

res et singulièrement avec sa création artisti-que, à Avignon, c’est inscrire le propos dansune dynamique historique. Cela oblige àmodestie et exigences. Nul lieu ne peut êtreplus symbolique, emblématique pour la Cgtpour poser cette question au lendemain d’uncongrès qui l’engage à rassembler pour unedémocratie culturelle.

Retour sur un festivalLa dynamique d’Avignon

Le festival d’Avignon, est né dans ladynamique de grandes conquêtes sociales et

économiques de la Libérationque portait, en prémisses,

dix ans plus tôt, le frontpopulaire. Ces projets stoppéspar la guerre auront pourtanttrouvé maturité dans les ras-semblements nés au cœur dela nuit de l’occupation, enrésistance à l’envahisseur nazi :protection sociale, affer-missement des servicespublics et de la fonctionpublique, maîtrise nationalede secteurs économiquesdéterminants, institution des

comités d’entreprise, émer-

6 Supplément au Peuple n° 1638

Inve

nter

et c

onst

ruir

een

sem

ble.

..Démocratieculturelle

Page 7: Democratie culturelle cgt_chsct

gence de politique culturelle publique etdécentralisation théâtrale, nouvel essor del’éducation populaire.

Citoyenneté, solidarité, émancipationdessinaient alors comme un horizon com-mun. Le propos de Jean Vilar : « Le TNP estdonc au premier chef un service public. Tout commele gaz, l’eau, l’électricité. » illustre bien l’am-pleur de l’ambition. Le festival d’Avignon estemblématique de telles volontés, que l’ondira politiques, qui trouveront leur incarna-tion à la Libération. Il concentre, rassemble,en quelque sorte ces résolutions. Pour Vilarle théâtre (et le festival, donc !) est indisso-ciablement artistique, social et politique. Ilest donc du temps présent.

Pour ces raisons, dés l’origine, la Cgt aentretenu avec le festival de fortes complici-tés. Elle s’est sentie de plain pied avec lesobjectifs de son fondateur, Jean Vilar et dePaul Puaux, qui devait lui succéder. Il n’y apas lieu, du tout, d’idéaliser la chose. Ni lesluttes, ni les succès. Tout simplement direque ces batailles dans la culture qu’ont étéAvignon et l’aventure du TNP, ont étéconduites, avec beaucoup de ténacité, maisaussi avec pas mal de difficultés et de fragili-tés, en connivence et amitiés avec les initia-teurs. Elles ont marqué durablement les rap-ports du monde du travail et de la culture.

Bien entendu, la Cgt a soutenu solidaire-ment le travail et les actions des artistes et destechniciens qui « font » le festival en exer-çant leurs talents au service du théâtre et du

spectacle vivant. Elle a permis que beaucoupde comités d’entreprise, avec leurs syndicats,s’engagent dans cette aventure en conju-guant leurs énergies à l’action des mouve-ments d’éducation populaire. Tout celadonne le courage pour entreprendre maisaussi oblige à inventer puisque nousrevendiquons notre part d’un héritagesocial et « spirituel » qui comme le disaitRené Char, autre fondateur du Festival, n’estprécédé d’aucun testament.

En effet, II nous faut aujourd’hui releverles défis d’un monde qui a bien changé, auxpossibilités inouïes et démultipliées mais quel’aggravation des inégalités sociales et bienplus gravement encore culturelles, bride.Ces failles sociales dans la culture bloquentles perspectives de transformations émanci-patrices et entravent non seulement lesefforts de diffusion des œuvres, mais assè-chent le nécessaire renouvellement des écri-tures et des formes.

Le rapport de la création et de la sociétéfut porté avec beaucoup de volonté par ceuxqui fondèrent le festival d’Avignon, dans lesproblématiques et selon les idéaux de leur

7Supplément au Peuple n° 1638

Si l’on ne comprendpas que le travail

et le culturel ont toutà faire ensemble,on ne peut appréhender nil’un ni l’autre. ..

Nicolas Frize

«

Page 8: Democratie culturelle cgt_chsct

époque. « Le public d’abord, le reste suit » disaitVilar. Cette question des publics a hanté lefestival depuis qu’il a été crée. Elle garde sapertinence et pourtant se renouvelle.

Notre aujourd’hui…mutations et fractures

N’entrons pas en départage des causes,au contraire mêlons. Suspendons, pour untemps, notre jugement et brossons, à grandstraits, dans ses contradictions, notre quoti-dien: évolutions industrielles, scientifiques,techniques, transformations des modes deproduction, des temps sociaux, des hiérar-chies, du travail ; fragmentation du salariat etdu corps social ; bouleversement des rap-ports sociaux ; transmission et partage desconnaissances ; élaboration et parcellisationdes savoirs ; financiarisation de l’économie etmarché globalisé ; extension du marché de laculture ; fragilisation des institutions et desformations sociales ; pratiques sociales etcomportements culturels nouveaux ; exten-sion du domaine des communications et del’information ; mosaïque urbaine d’identitésculturelles qui se frottent, s’échangent, semétissent. Tout cela se conjuguant avec lesmouvements esthétiques, idéologiques, poli-tiques dans la relative autonomie de leurssphères respectives. N’allons pas énumérerdavantage et n’ouvrons pas ici l’expertise dela fracture sociale tout autant que culturellequi s’accroît. De nombreux documents Cgttentent, modestement, d’évaluer ce rapportqu’entretient notre société avec la culture.Nous renvoyons à ceux qui abordent les

questions principalement sous l’angle de laculture3.

Le partage du sensibleen question

Observés sous l’angle des pratiques etaspirations culturelles, ces évolutions et leurseffets sont très contradictoires. C’est rapide,violent et, sans doute pour cela même,effrayant, fascinant, sidérant, alors que, enmême temps, fortement discriminatoire,injuste et douloureux, bousculant pratiqueset comportements culturels, anciennes etclassiques légitimités, écornant les sensibili-tés, cassant les frontières artistiques etmêlant les disciplines.

De ce chaos naît cependant de l’inédit etde l’inventivité langagière, technique,sociale, artistique. De fortes synergies sedéploient même. Des expériences semènent. Des femmes et des hommes imagi-nent et composent de nouvelles façonsd’être au monde, et c’est aussi le rôle desartistes, de ceux qui écrivent, de nous lesrévéler.

Pour beaucoup pourtant, la grandemajorité même, la vie est si agressée, lesconditions de l’existence sont si insupporta-bles et le travail si malade, les savoir-faire etfaçons de travailler si heurtés et si peu recon-nus, les trajectoires si blessées, que rêves,révoltes et aspirations n’arrivent plus à sedire avec « les mots à soi » et à se mettre enpartage.

8 Supplément au Peuple n° 1638

Page 9: Democratie culturelle cgt_chsct

Question : Comment avoir ses pro-pres mots pour inventer dans sa proprelangue dans la déperdition esthétique, lamisère symbolique asphyxiante ? On estcomme perdu dans une forêt de signes,traces, mots, sons, goûts qui font difficile-ment sens, en tout cas sens commun etqui peuvent faire peur, dont on se sentexclus, qui sont « les signes des autres ».Alors beaucoup d’entre-nous s’abîment,dans les eaux tièdes de la consommationstandardisée. Ce dénuement-là s’étendbien plus largement et plus vite encoreque le cercle de la pauvreté et de l’exclu-sion sociale, qui grandit si rapidement.Cette pauvreté culturelle « empoisonne »tout le champ social, bien au-delà de lacomposante ouvrière la plus précarisée,fragilisée ou exclue du travail salarié. Lescatégories professionnelles de l’encadre-ment, voire de directions, qui par leurinsertion professionnelle participent dedécisions économiques, qu’elles viventparfois comme un divorce d’avec leurâme, ne sont pas moins touchées d’êtreécartées du travail du sensible.

C’est la société tout entière qui ne peutplus imaginer son devenir, inventer l’avenir.Oui le désert croît. Avec Michel Serres rap-pelons que la sensation inaugure l’intelli-gence. L’esthésie guérit de l’anesthésie.

C’est qu’il ne suffit pas d’être savant,d’être « dépositaire » de savoirs, souventparcellarisés d’ailleurs. Il faut encore être misen capacité de les penser, à partir de sa pro-

pre expérience, de leur donner sens, des leslier et relier, de les mettre en perspectived’une société émancipée, prospère, hospita-lière, ouverte au tout-monde et d’y trouverun horizon de bonheur possible pour tous etchacun. Voilà notre utopie, c’est-à-dire notremoteur.

Nous avons besoin d’entrer dans cetteforêt de symboles, d’abord pour respirer,savourer, érotiser et poétiser notre vie, lavivre gravement et pourtant avec légèreté.Ensuite « pour sortir de l’état de minorité, pourfaire société, communiquer avec tous dans un espacecommun, n’être pas seulement des êtres de plainteou de cri mais des êtres de raison et de discoursconstruisant leur action comme une démonstra-tion », ainsi que l’évoque Jacques Rancière,et de partager le sensible.

Evaluationdes politiques culturelles4

Généralement l’examen des politiquespubliques culturelles porte une doublepréoccupation. La première est celle despublics, des amateurs, des connaisseurs,voire des consommateurs et de leurs com-portements.

On parle alors d’élargissement et derenouvellement des publics, de proximité,de « non publics » ou de publics empêchés,de pratiques amateurs, d’éducation popu-laire, de diffusion… On se livre à des enquê-tes de fréquentation, aux statistiques surl’équipement des ménages et sur les prati-

9Supplément au Peuple n° 1638

Page 10: Democratie culturelle cgt_chsct

l’on évoque, ici aussi, les publics, c’est aunom de l’exigence d’un « élitisme pourtous » ou pour opposer la culture et l’art auvil divertissement.

Ces schémas sont aujourd’hui entrés encrise en même temps que les pratiques cul-turelles et artistiques elles-mêmes. Sous lecoup des transformations sociales, sociétaleset culturelles profondes, c’est la conceptionmême de la culture et de la politique d’orga-nisation publique que nous en avons qui estaujourd’hui appelée à se renouveler.

Le temps est venu d’estimer nos politi-ques culturelles en regard de l’accomplisse-ment des hommes dans le mouvement deleurs civilisations. Se dégager du comptable,du statistique, non pas pour fuir contrainteset astreintes budgétaires, mais bien plutôtpour penser le souffle de l’indispensable gou-vernement de la chose publique. Ouvrir ausens qui manque tant à l’architecture de nospolitiques.

La conception que notre société a de laculture, la place qu’elle lui offre, doit êtreaujourd’hui réévaluée, réinterrogée. Cela enregard des impasses économiques, sociales etsociétales actuelles.

Les relations que notre société entretientavec la création artistique sont aujourd’huifortement ébranlées. Ce qui se révèle ainsidans la sphère culturelle porte un éclairagesur la gravité des blocages économiques etsociaux que nous connaissons.

10 Supplément au Peuple n° 1638

L’émancipationdes travailleurs

c’est leur sortie de l’étatde minorité, c’est prouverqu’ils appartiennent bienà la société, qu’ils communi-quent bien avec tousdans un espace commun ;qu’ils ne sont pas seulementdes êtres de besoin, de plainteou de cri, mais des êtresde discours, qu’ils peuventopposer raison à raisonet construire leur actioncomme unedémonstration […]...

«

ques culturelles des populations. On débat del’accès pour tous à la culture, des objets cul-turels, de la rotation des produits, de la« culture jetable ».

La seconde concerne l’art, la création,les créateurs.

On parle ici de la vitalité de l’art, de sonrenouvellement, de ses nouveaux territoires,de cultures patrimoniales, institutionnellesou émergentes, d’équipements publics,d’événementiels, d’exigences artistiques, depluralités esthétiques, de politiques publiquesd’achat, de transparence des choix, de cote-ries, de mécénat, de soutien à la création. Si

Page 11: Democratie culturelle cgt_chsct

Changer de regardDans un tel paysage, continuer d’évaluer

les actions publiques en matière de cultureavec le même regard conduit à ne rien voirde la profondeur de la crise. Les politiquespubliques, au niveau de l’État comme à celuides collectivités territoriales, qui financentde plus en plus la culture, patinent. Elless’épuisent dans leur volonté d’élargissementdes publics et ne parviennent pas à investirsuffisamment de nouveaux champs créatifs.

En l’état, nos critères d’appréciation sontinopérants. Ce qui les sous-tend relève d’uneconception restrictive, étriquée de la culture.Ils laissent paresseusement trop de choseshors champ. Le territoire balayé est tropexclusivement celui des beaux-arts et desbelles lettres. Celui-là même que dessine his-toriquement le ministère de la culture. Nousavons besoin d’une autre intelligence, plusglobale, de la culture.

Ne pas voir cela conduit à mésestimerl’apport riche et singulier des arts (et dessciences) à la culture. Cela les fragilise. Lesreconsidérer dans un rapport large, politiquesi l’on veut, à l’ensemble des activités humai-nes qui ne sont généralement pas reconnuescomme composant de la culture, c’est, toutau contraire, les ouvrir à tout l’humain, lesouvrir à l’arrachement créatif.

Elargir notre conceptionde la culture

Notons que, du même coup, est évacuée

toute réelle réflexion sur l’économie de laculture, sur le poids des industries culturel-les, et bien plus encore sur les cohérencesstratégiques des entreprises et l’imbricationde la culture, de l’art avec l’industrie et lecommerce, avec le management, la commu-nication, le design. C’est dans cette perspec-tive qu’il faudrait expertiser les questions dumécénat, du rapport à l’industrie du tou-risme, des équipements, particulièrementpatrimoniaux, les évènements et produc-tions artistiques !

Il y a là des continents entiers à explorer.Les concepts pour le faire nous manquent carla culture est vue politiquement en sépara-tion du corps (ici social) et de l’esprit (lesarts). C’est ce procès-là qu’il convient d’ou-vrir pour apprécier et structurer nos politi-ques publiques.

La contribution historique et constantede nombreux acteurs, telle que celle de

... S’émanciperce n’est pas faire sécession,c’est s’affirmer commeco-partageant un espacecommun […] Le cheminétroit de l’émancipationpasse entre l’acquiescementaux mondes séparéset l’illusion du consensus.

Jacques Rancière

Supplément au Peuple n° 1638 11

Page 12: Democratie culturelle cgt_chsct

l’éducation populaire, est gravement sous-évaluée, non seulement quant à la diffusion,mais dans l’élaboration même des savoirs etdans la constitution des démarches artisti-ques. L’impasse est aussi faite sur le travail dela culture, ses métiers. Il aura fallu le durconflit social lié à l’intermittence dans lespectacle vivant et enregistré (toujours nonréglé) et les luttes d’autres secteurs de la cul-ture pour que le travail artistique trouve de lavisibilité publique, là même où il restait mas-qué.

Pourtant, toute politique culturelle ne sedevrait-elle pas d’évaluer et de soutenir lesconditions d’exercice des métiers artistiqueset de la culture, le statut de ceux qui s’y exer-cent, qu’ils soient salariés ou pas, de droitsprivés ou publics. Garantir la pérennité etl’indépendance des structures et des démar-ches pour que des risques artistiques puissentse prendre conditionne pour beaucoup l’es-sor d’une société.

Dire cela n’est pas renier les mérites etles efforts des politiques publiques si

importantes dans notre pays. La Cgt et lemouvement ouvrier ont pris leur part danscette belle histoire. Consolider ces acquis etavancées historiques, dépasser les limitesrencontrées impose de renouveler notreapproche et d’élargir notre vision de la cul-ture.

Il faut se mettre en capacité de jauger etd’évaluer une politique culturelle en fonc-tion du mouvement de la société, dans tou-tes ses composantes et dans l’ensemble deses champs d’activité et de les faire entrer encorrespondance avec l’art. Il ne s’agit pas detout confondre, mais de penser articulation,métissage, partage, relation, rencontre,hybridation.

L’éloignement du public et de l’œuvreest souvent évoqué. Parfois avec condescen-dance, voire avec une certaine compassion.L’appauvrissement pour l’écriture, pour lacréation, pour sa matière même, quand ellene se frotte pas à la grammaire et au vocabu-laire de notre temps, est rarement mesuré.En retour, là où nous forgeons notre langue,où nous faisons culture, faisons sens, noussommes comme privé d’abécédaire. De là,vient que la partie de la jeunesse exilée dansl’archipel des banlieues, n’ayant plus les motspour dire, ni même pour vraiment penser ensoit contraint à danser sa révolte dans le feu.Les gestes ont leur être éloquences, précé-dent les paroles, qui ensuite les accompa-gnent. (Rap, Slam…) Mais comment anti-ciper, comprendre, partager, comment sortirde notre cécité, de notre surdité ?

12 Supplément au Peuple n° 1638

Page 13: Democratie culturelle cgt_chsct

Alors qu’il faudrait considérer l’articula-tion « développement des publics » et« exigence artistique » de façon dialectique,nous les séparons trop souvent et nous nousprivons d’examiner comment ils se fécon-dent l’un l’autre. Une telle restriction duchamp de vision s’accompagne d’un aplatis-sement du réel qui empêche les forces socia-les de le soulever.

La question du travail5

C’est dans ce cadre général qu’il faut par-ler encore et encore du monde de l’entre-prise, du monde du travail comme structu-rant et façonnant durablement les êtres.Nous résisterons aux ricanements de ceuxqui nous reprochent de tout confondre, denous enferrer dans notre obsession à posercette question du rapport du travail aux pro-ductions artistiques.

Le travail, le soin qu’on lui porte devraitêtre une préoccupation constante des pou-voirs publics et de toutes les forces sociales,de l’ensemble des partenaires sociaux. Tropde choses sociales, culturelles, pas seulementtechniques et scientifiques, mais aussi esthéti-ques, sensibles, se nouent là, pour que ce ter-ritoire soit déserté et seulement recherchélorsqu’il est livré à la friche. Aujourd’huiencore le travail est le principal vecteur decréativité et de civilisation. Tautologie, carenfin l’essence du travail est de faire civilisa-tions. Lieu de brassage, de métissage, de par-tages des sensibilités, de rencontres des cul-tures.

Ceci n’est pas un repliement sur unevaleur travail que d’aucuns, dans le sillage duMedef, louent aujourd’hui, après l’avoir bra-dée hier. C’est d’ouvrir la culture et l’art àtout l’empan des activités humaines, dont ils’agit. Et pour cela d’avoir une vision anthro-pologique et culturelle du travail. Le travailreste une énigme difficile à saisir. N’avons-nous pas du mal à nous délivrer de représen-tations naturalistes du travail ? Il s’agit dudévoilement de son sens, de sa portée trans-formatrice de l’être au monde. Cette tâchene s’accomplit jamais mieux que dans la ren-contre de la création, de l’écriture toujourssingulière qui tente de s’y confronter, del’explorer, de libérer la parole du carcan desmots qui l’enserrent.

Le libéralisme n’est pas qu’un rapportéconomique. C’est du symbolique à l’oeu-vre. Il nous faut saisir les potentialités cultu-relles du travail si nous ne voulons résister,anticiper, compter, être, oui tout simple-ment, être.

C’est, avec l’école et l’enseignementartistique qui devrait s’y conduire, là où le

13Supplément au Peuple n° 1638

L’histoire du travaila forgé l’histoire

des hommes. Elle se fondavec les changementsles plus profonds de notrehistoire comme peuple.

François Bon (Labeur)

«

Page 14: Democratie culturelle cgt_chsct

travail est bien vivant, tout à la fois en souf-france et en bonheur, qu’il faut investir cultu-rellement. Là où il invente et est moteur, làoù il souffre parce que nié. C’est de là quedoit naître une parole nouvelle.

Il faudrait évaluer les pratiques culturellesdes salariés et les confronter aux pratiquesprofessionnelles, rechercher leurs attentes etaspirations, mesurer et conforter les inter-ventions, les initiatives culturelles des syndi-cats, des comités d’entreprise ou associationsplus ou moins similaires. C’est leur vocationde provoquer le collectif de travail à la parole,de permettre l’intervention solidaire, de rap-procher des pratiques professionnelles, socia-les et culturelles, d’ouvrir à l’apport de cul-tures, de langues et de coutumes encoreétrangères, d’élaborer et de croiser dessavoirs, d’entrer en partage esthétique, sensi-ble.

Il faut aussi que les organisations dumonde du travail puissent procéder à l’éva-luation de leurs propres politiques, de leursactions, en regard du développement écono-mique et social de l’entreprise et des straté-gies qu’elle développe. Cela suppose deréévaluer les droits et les moyens dont ellesdisposent. Ils sont aujourd’hui obsolètes etinadaptés face aux nouvelles configurationsdes entreprises et à la situation extrêmementdégradée que connaît le travail. Ellesdevraient être aussi en capacité d’expertiserles politiques publiques et patronales, en cequi concerne la culture. La chose n’estaujourd’hui pas facile. C’est justement l’obli-

gation qui nous est faite de l’entreprendre.

Nous sommes obligés de constaterqu’aucun ministre de la Culture, depuis denombreuses années, n’a su comprendrel’ampleur de cette question, forger une doc-trine, et donc bien évidemment impulserune réelle politique, malgré l’insistance de laCgt, hélas souvent un peu seule. Les timidesengagements et les expérimentations initiéespar Mme Catherine Trautmann, alors minis-tre de la Culture, n’ont jamais été réelle-ment évalués ni franchement consolidés. Ilsn’ont pas été suivis d’effets. Il est vrai qu’unetelle politique nécessiterait de prendre desrisques et du temps, le nouveau devant trou-ver son chemin. Cela demanderait aussid’engager résolument des partenariatspublics, état, collectivités territoriales, auniveau des sites, des territoires et de réexa-miner courageusement les transversalitésministérielles, pour parvenir à mobiliser tousles acteurs sociaux, patronat compris.

La question rebondit cruellement quandil s’agit des publics empêchés, en fait dupublic exclu, souvent d’abord du travail.Personnes incarcérées, hospitalisées, handi-capées, mais aussi vivant dans des quartiersen grandes difficultés. Notre société soignebeaucoup et sans doute pas encore assez. Elleréprime, normalise et censure aussi mais ellerefuse de soigner le travail, de le recréer.Notre conviction est que l’attention singu-lière qui doit être portée au travail est unedes clés pour lever les blocages que rencon-trent nos politiques culturelles. Nous pen-

14 Supplément au Peuple n° 1638

Page 15: Democratie culturelle cgt_chsct

nités du réel et le transformer, aimer àpleine vie, ouvrir sur l’universel. Elle est l’af-firmation d’une liberté et d’une hospitalitéirrépressible dans tous les temps de la vie.Elle est la respiration : temps de travail ettemps de loisirs, qui sont deux temps à libé-rer.

Rendre toute sa place au travail dans laconstruction des politiques culturelles enl’ouvrant au tout de la culture est la contri-bution spécifique d’un syndicalisme Cgtconfédéré et rassembleur à l’essor de cul-ture. Les rencontres, les réflexions menéestoutes ces années concrétisent cette ambi-tion. Les travaux du congrès et ce documenten témoignent. •

Quelques proximités etcomplicités. Echos de

lectures, de regards etd’écoutes pour inviter à larencontre. François Bon,Hervé Brisse, Yves Clôt,Nicolas Frize, EdouardGlissand, Bernard Lubat,Charles Tordjman, AgnèsVarda, Michel Vinaver,Marcel Trillat, YvesSchwartz.

«

Supplément au Peuple n° 1638 15

sons aussi que notre société ne retrouveratoute sa dynamique sociale que si le mondedu travail entre en partage culturel. Cela par-ticipe de l’instauration d’une véritable démo-cratie culturelle. Penser la culture sans pen-ser son rapport au travail est une impasse.Penser le travail sans le fonder dans la cul-ture, c’est conduire à la misère sociale. Cettequestion de la place faite au travail, à sonsens, à sa visibilité, au soin qu’on lui porte estrefoulée, depuis bien longtemps. Il semblebien qu’historiquement nous n’ayons pas suvoir ensemble, à temps, le travail autrementque comme un terrain en friche, qu’il fau-drait acculturer en apportant la lumière, sansprendre mesure les faire et imaginaire qui ygerment et s’y inventent, y compris dansl’activité syndicale, par exemple.

La culture est une présence radicale ettotale au monde, là où nous y sommes insé-rés, pour l’entendre, pour saisir les opportu-

1) On se rappellera les deux séminaires organisés en 2005 « culture et création » et« culture et responsabilités publiques » ainsi que le colloque de clôture qui les a suivis.(Voir note 3)2) « L’Aventure Culturelle de la Cgt ». Marius Bertou, J-Michel Leterrier. V.O. édi-tions. 1995. On relira aussi avec profit« Culture au travail » de J-Michel Leterrierdont la réédition est annoncée chez L’harmattan. Préface de Gérard Astor. Numéro 4des cahiers de Convergences. Décembre 20063) On se reportera à trois documents (à commander [email protected] ) :- Thématiques NVO « la France a-t-elle besoin de culture ? » (janvier 2004)- Le Peuple compte rendu 48econgrès. Supplément au numéro 1632 (juin 2006)- NVO spécial 48econgrès, n° 3217 du 14 Avril 2006 Politiques culturelles et mondedu travail.Echos d’une réflexion (juillet 2005) disponible sur www.cgt.fr4) J-P.Burdin« Crise d’Horizon ». Opus 3 de culture publique 20055) Voir J-P.Burdin, revue Mouvement 16. Avril, Juin 2002 : « L’art au travail ».

Conseiller confédéralPolitique culturelle

Jean

-Pie

rre

Burd

in

Page 16: Democratie culturelle cgt_chsct

La culture est trop souventconfinée, par les institutions

et pouvoirs publics, à ce qui pourraits’apparenter à une sorte de vestibule, oùelle serait reléguée, de salon, certes àpeu près confortable, à l’atmosphère unpeu feutrée, et au fond assez étouf-fante. Elle n’est là, en quelque sorte,convoquée qu’à l’heure de faire brillerles beaux arts et les belles lettres. Pour lereste, elle ne devrait résonner qu’au tra-vers des tuyaux d’orgue des industries

culturelles et du prisme marchand.

On s’en doute, ce que propose la Cgt à tous lesacteurs de la culture, comme à l’ensemble du mondedu travail est aux antipodes de cette conception dela culture.

C’est tout le sens de la 15e décision du docu-ment d’orientation adoptée au 48e congrès deLille, en avril dernier, de s’engager dans laconstruction « d’une nouvelle démocratie cultu-relle ». Cette décision constitue un atout considéra-ble pour asseoir et poursuivre la démarche syndicalede toute la Cgt et de son activité confédérale dePolitique culturelle.

La crise profonde qui touche toutes les sphèresde notre société - crise de repères et crise de sens avecles conséquences dramatiques d’aliénation et desouffrance sociale -, exige de la Cgt de prendre réso-lument le parti du renouveau démocratique. Nous

devons dire ensemble : ce renouveau démocratiquesera culturel ou ne sera pas !

Y aurait-il des cultures« empêchées » d’exis-ter, des cultures condamnées au silence et à l’oubli ?Nous ne sommes pas prêts à accepter cette dériveeffrayante. Si nous nous refusons à livrer clés enmain une définition de la culture, nous travaillonsà faire émerger une autre conception, ouvragée deséchanges, du partage, faite de solidarités, de ladiversité des cultures.

Bouger ces lignes pour changer la société, pré-tendre à des temps nouveaux où se conjuguent leslibertés et l’émancipation, nous en revendiquonsl’idéal et l’action. C’est ce chemin qu’il nous fauttracer, chemin difficile et annonciateur de combatsexaltants. Mais nous ne venons pas de nulle part,loin s’en faut. Les 2e rencontres Cgt « Travail, cul-ture, syndicalisme », organisées à Montpellier enfévrier 2003, ont ouvert quatre champs deréflexions et d’actions.

• L’entreprise, la culture et le travail.Plus que jamais nous sommes convaincus que le tra-vail, sa complexité et son sens ont directement à voiret interagissent avec la culture et la création artis-tique. Le travail est donc bien l’un des paramètresmajeurs de l’équation que nous tentons de résoudrepour l’essor d’une « nouvelle démocratie cultu-relle». Analyser et repenser les interventions etinteractions à l’entreprise dans la culture et dansl’art, questionner les rôles des différents acteurs

16 Supplément au Peuple n° 1638

Des perspectivesEx

alta

ntes

Page 17: Democratie culturelle cgt_chsct

(patronat, comités d’entreprise, syndicats, associa-tions) c’est ce que nous réaffirmons.

• Les territoires, les sites et culture. Laglobalisation de l’économie, l’accélération de larentabilité et de la rotation des capitaux, les délo-calisations et les concentrations d’ entreprises font fides frontières, ruinent sans états d’âme les territoi-res, en imposant de nouvelles cartographies des pou-voirs et des dominations. Au contraire nous voulons« cultiver » les territoires, leurs potentialités cultu-relles, leurs singularités économiques, industrielleset sociales, en s’appuyant sur leur richesse, leurmémoire, leur capacité créative. Nous voulonsouvrir les territoires, les décloisonner.

• Les politiques culturelles et les res-ponsabilités publiques.Plus personne ne se ris-que vraiment à nier l’affaiblissement des responsa-bilités publiques en matière de culture. Près de 50ans après sa création, le ministère de la Culture aperdu le cap de «la démocratisation de l’accès à laculture» et connaît un désengagement auquel nousne nous résignons pas Les collectivités territoriales,et notamment les régions qui font beaucoup plusque par le passé peinent, faute de moyens, à prendrele relais et à assumer des politiques culturelles inno-vatrices. Les politiques publiques dans leur ensemblese montrent incapables de trouver un second souffleet de repenser leurs missions fondatrices.

Là encore, la décision du 48e congrès d’enga-ger une vaste campagne pour l’adoption d’une loid’orientation et de programmation pour la culture,garante de l’exception culturelle et de droits sociauxpour l’ensemble des travailleurs du spectacle et de la

culture, est une incitation et un point d’appui pourimpulser une action confédérée.

• Pour la culture de tous, partout dansle monde. Dans le cadre de la mondialisationéconomique le libéralisme a parfaitement comprisqu’il peut tirer un immense profit du développe-ment des industries culturelles. Il agit donc sur desleviers puissants qui concourent à l’uniformisationet à la standardisation de la culture. Faire grandirl’exigence de la diversité culturelle n’est-ce pas déjàébranler cette machine en apparence bien huilée.

Nous sommes résolus à nous rassembler, avec denombreux partenaires au plan européen comme auplan international, pour l’instauration de nouvel-les règles protectrices et la ratification par les étatsde la charte de l’Unesco portant sur la diversitéculturelle. De ce point de vue, la constitution d’unenouvelle confédération syndicale internationale,dont la Cgt est partie prenante, appelle à ne pascéder aux tentations de replis et à agir pour préser-ver les richesses culturelles de tous, et à libérer, par-tout, des énergies créatrices.

Toutes les rencontres auxquelles nous sommesinvités ou que nous organisons valident la perti-nence de ce cadre de travail pour construire desmobilisations et desactions. Un cadrepour agir ! •

17Supplément au Peuple n° 1638

Membre de la commissionculturelle confédérale

Fran

ck G

uilla

umet

Page 18: Democratie culturelle cgt_chsct

LaCgt entend prendre toute sa place dans la construction d’une véritabledémocratie culturelle.

Il s’agit d’afficher notre volonté de rompre avec une vision élitiste de la cul-ture. Il n’y a de démocratie culturelle que par le développement et le partage descultures de tous. Celles qui s’élaborent au travail doivent être reconnues dansleurs apports à la transformation sociale et à l’essor d’une société de progrès.Il ne peut y avoir de démocratie culturelle et de pérennité de l’exception cultu-relle sans la reconnaissance de droits sociaux pour l’ensemble des travailleursdu spectacle et de la culture.

Nous revendiquons en même temps l’accès des salariés, des privés d’emploi, desretraités et de leurs familles aux oeuvres du patrimoine et de la création artistique etscientifique. Nous n’acceptons pas que des couches entières de la population soientsoumises aux seuls choix que leur propose l’industrie audiovisuelle et du loisir,aujourd’hui régie par le seul Diktat de l’audimat.

A l’heure de la révolution de l’information et de la connaissance, les nouvellestechnologies ne conduisent pas automatiquement à la démocratie culturelle. La sur-abondance de produits et de services va de pair avec la standardisation. Garantir ladiversité culturelle implique l’accès à la création de l’ensemble des catégories popu-laires.

Supplément au Peuple n° 163818

Document d’orientationLi l les 2006- 48 e congrès

La démocratie au cœur des enjeuxde transformation du travail et de la société

Pour une démocratieculturelle

«

Page 19: Democratie culturelle cgt_chsct

19Supplément au Peuple n° 1638

ion

Lecture et écriture, pratiques musicales, théâtrales et artistiques sont à promou-voir à toutes les étapes de la vie, de l’éducation et dans les différentes sphères socia-les.

La Cgt revendique la démocratie culturelle, le libre épanouissement des salariés,le droit à choisir, à critiquer, à intervenir sur sa vie et son devenir de salarié et d’in-dividu. C’est le chemin de l’émancipation.

Pour gagner cette autonomie, il faudra mobiliser le système éducatif et les servi-ces publics culturels, il faudra associer les mouvements d’éducation populaire avecune exigence toute particulière pour les Comités d’entreprise, renforcer des politi-ques publiques en direction de la création, garantir l’avenir du service public del’audiovisuel grâce à un financement public accru, assurer la pérennité de la presse,sa pluralité et son indépendance grâce à des moyens nouveaux.

Il faudra porter des exigences fortes vis-à-vis des pouvoirs économiques maisaussi vis-à-vis de l’État et des collectivités territoriales dont les budgets doivent êtreà la hauteur des enjeux.

Décision

Le congrès décide de fairede l’exigence d’une « nouvelledémocratie culturelle » un axede construction revendicativeet de mobilisation, et d’enga-ger une vaste campagne pourl’adoption d’une loi d’orienta-tion et de programmation pourla culture garante de l’excep-tion culturelle et de droitssociaux pour l’ensemble destravailleurs du spectacle et dela culture.

Page 20: Democratie culturelle cgt_chsct