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Communication Deuxième partie - Autres contributions Classification (OMS) multi-axiale des troubles psychiatriques chez l’enfant et l’adolescent A. Danion-Grilliat 1 *, D. Marcelli 2 1 Professeur de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, hôpitaux universitaires de Strasbourg, 1, place de l’Hôpital, 67091 Strasbourg cedex, France ; 2 professeur de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, CHS Henri Laborit, 370, avenue Jacques Cœur, BP 587, 86021 Poitiers cedex, France Résumé – La classification multi-axiale des troubles psychiatriques chez l’enfant et l’adolescent a été élaborée et publiée en 1996, sous l’égide de l’OMS, par une équipe dirigée par Sir M. Rutter, à partir de la classification des troubles mentaux et du comportement de la CIM-10. La traduction française vient d’être publiée en 2001 et elle est maintenant accessible aux pédopsychiatres français. Les auteurs en font la présentation dans ce texte, en soulignant ses spécificités et l’intérêt de son utilisation pour l’enfant. Ils en montrent aussi les limites, en particulier pour la psychopathologie des très jeunes enfants. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS enfant / CIM-10 / classification multi-axiale / adolescent / troubles psychiatriques Summary – Multi-axial classification of psychiatric disorders in children and adolescents. The multi-axial classi- fication of psychiatric disorders in children and adolescents has been published in 1996 under the heading of WHO by a team directed by Sir M. Rutter. It is based on the ICD-10 classification of mental and behavioural disorders. A French translation has been published in 2001 and is now accessible to French child psychiatrists. We present this classification and emphasize its specificities and its interest. We also show its limitations, particularly with regards to disorders of very young children. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS child / adolescent / ICD-10 / multiaxial classification / psychiatric disorders La classification multi-axiale pour les troubles mentaux et du comportement de l’enfant et de l’adolescent, telle que nous la connaissons aujourd’hui, prend sa place dans une suite de propositions successives qui s’affinent progressivement. Dans les années 1970, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) propose une première approche multi- axiale des troubles mentaux pour les enfants, en met- tant en exergue trois axes : les syndromes cliniques psychiatriques, le niveau des fonctions intellectuelles et les facteurs associés et étiologiques (physiques et/ou dus à l’environnement). En 1975, elle publie une classification en quatre axes [3]. En 1975, la Grande-Bretagne présente un modèle multi-axial issu de la CIM-9, avec un axe supplémen- taire dédié aux troubles spécifiques du développement et en ajoutant une référence à des situations psychoso- ciales, encore relativement simplifiée. Dans les années 1990, les composantes psychoso- ciales de la classification multi-axiale de 1975 sont reprises selon le principe de la CIM-10 psychiatrique, mais avec une définition plus détaillée des critères uti- lisés pour le codage. En 1996 enfin, l’OMS publie, sous la direction de Sir Mikaël Rutter, la classification multi-axiale des troubles mentaux pour l’enfant et l’adolescent, dans sa version *Correspondance et tirés à part. Ann Méd Psychol 2002 ; 160 : 235-41 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0003448702001658/FLA

Deuxième partie - Autres contributionsClassification (OMS) multi-axiale des troubles psychiatriques chez l’enfant et l’adolescent

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Communication

Deuxième partie - Autres contributions

Classification (OMS) multi-axiale des troublespsychiatriques chez l’enfant et l’adolescent

A. Danion-Grilliat1*, D. Marcelli21 Professeur de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, hôpitaux universitaires de Strasbourg, 1, place del’Hôpital, 67091 Strasbourg cedex, France ; 2 professeur de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, CHS HenriLaborit, 370, avenue Jacques Cœur, BP 587, 86021 Poitiers cedex, France

Résumé – La classification multi-axiale des troubles psychiatriques chez l’enfant et l’adolescent a été élaborée etpubliée en 1996, sous l’égide de l’OMS, par une équipe dirigée par Sir M. Rutter, à partir de la classification des troublesmentaux et du comportement de la CIM-10. La traduction française vient d’être publiée en 2001 et elle est maintenantaccessible aux pédopsychiatres français. Les auteurs en font la présentation dans ce texte, en soulignant sesspécificités et l’intérêt de son utilisation pour l’enfant. Ils en montrent aussi les limites, en particulier pour lapsychopathologie des très jeunes enfants. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS

enfant / CIM-10 / classification multi-axiale / adolescent / troubles psychiatriques

Summary – Multi-axial classification of psychiatric disorders in children and adolescents. Themulti-axial classi-fication of psychiatric disorders in children and adolescents has been published in 1996 under the heading of WHO bya team directed by Sir M. Rutter. It is based on the ICD-10 classification of mental and behavioural disorders. A Frenchtranslation has been published in 2001 and is now accessible to French child psychiatrists. We present thisclassification and emphasize its specificities and its interest. We also show its limitations, particularly with regards todisorders of very young children. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS

child / adolescent / ICD-10 / multiaxial classification / psychiatric disorders

La classification multi-axiale pour les troubles mentauxet du comportement de l’enfant et de l’adolescent, telleque nous la connaissons aujourd’hui, prend sa placedans une suite de propositions successives qui s’affinentprogressivement.

Dans les années 1970, l’Organisation mondiale de lasanté (OMS) propose une première approche multi-axiale des troubles mentaux pour les enfants, en met-tant en exergue trois axes : les syndromes cliniquespsychiatriques, le niveau des fonctions intellectuelles etles facteurs associés et étiologiques (physiques et/ou dusà l’environnement).

En 1975, elle publie une classification en quatre axes[3].

En 1975, la Grande-Bretagne présente un modèlemulti-axial issu de la CIM-9, avec un axe supplémen-taire dédié aux troubles spécifiques du développementet en ajoutant une référence à des situations psychoso-ciales, encore relativement simplifiée.

Dans les années 1990, les composantes psychoso-ciales de la classification multi-axiale de 1975 sontreprises selon le principe de la CIM-10 psychiatrique,mais avec une définition plus détaillée des critères uti-lisés pour le codage.

En 1996 enfin, l’OMS publie, sous la direction de SirMikaël Rutter, la classification multi-axiale des troublesmentaux pour l’enfant et l’adolescent, dans sa version*Correspondance et tirés à part.

Ann Méd Psychol 2002 ; 160 : 235-41© 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservésS0003448702001658/FLA

actuelle « Multiaxial Classification of Child and Adoles-cent Psychiatric Disorders » [4].

Cette classification multi-axiale est traduite en fran-çais par un groupe coordonné par Daniel Marcelli1,en 2001 [2]. Les trois premiers axes reprennent lescodes de la CIM-10 du chapitre V, et n’ont pas été,pour la plupart, retraduits [1]. En revanche, le groupede traduction a traduit les items de l’axe IV absents de laCIM-10 (troubles mentaux et du comportement) etl’essentiel de l’axe V et l’axe VI puisqu’il est ici beau-coup plus détaillé que dans la CIM-10.

Cette classification est issue de la dixième révision dela Classification internationale des maladies (CIM-10)pour les troubles mentaux et du comportement. Rap-pelons que la CIM-10, pour le chapitre V (codes F)dédié aux troubles mentaux et troubles du comporte-ment, a été traduite et publiée en français sous ladirection de Charles Pull, en 19942.

La classification multi-axiale concernant les troublespsychiatriques chez l’enfant et l’adolescent comportesix axes, de I à VI (nous les détaillerons plus loin).

INTÉRÊTS DU CADRE MULTI-AXIAL

Cette classification multi-axiale permet un codage mul-tiple. Ses auteurs insistent sur le fait que ce type decodage permet de rendre compte de la complexité d’undiagnostic psychiatrique qui renvoie à des plans diffé-rents :– le type de trouble mental ;– l’existence ou non d’un retard mental ;– l’existence ou non de maladie(s) neurologique(s) ouautre(s) associée(s).

Le système multi-axial permet d’éviter l’impasse sou-vent rencontrée d’un non-codage. En effet, un non-codage peut avoir plusieurs explications : la conditionpeut avoir été repérée mais avoir été évaluée sans impor-tance ; elle peut ne pas être codée, par oubli, alorsqu’elle était considérée comme importante ; elle peutenfin ne pas exister, donc ne pas être codée alors querien ne signale sa non-existence. Le système multi-axialoblige la cotation et permet de prendre en comptel’absence d’un élément qui sera codée en tant que telle.Cela clarifie grandement cette question.

Les auteurs de la classification estiment que troiscritères sont à respecter pour que les données soienttraitées correctement et qu’elles soient comparables :

– un nombre identique d’éléments pour le diagnosticdoit être codé, quels que soient les individus. Ici, cenombre est déterminé par six axes distincts ;– les codages font référence aux mêmes éléments dudiagnostic ;– les éléments sont toujours présentés dans le mêmeordre.

Le choix des axes retenus (alors qu’il en existe beaucoupd’autres possibles) est fonction de leur utilité en cli-nique pour le plus grand nombre de sujets et de l’infor-mation claire qu’ils véhiculent.

Enfin, en ce qui concerne la psychiatrie de l’enfant etde l’adolescent, un certain nombre de critères spécifi-ques à cette catégorie d’âge ont permis que six axessoient sélectionnés.– Axe I : syndromes cliniques psychiatriques ;– Axe II : troubles spécifiques du développement psy-chologique (en particulier troubles du langage, troublesspécifiques de la lecture, etc.) ;– Axe III : niveau intellectuel (qui peut être normal,légèrement retardé ou gravement retardé) ;– Axe IV : autres affections classées dans la CIM-10,souvent associées à des troubles mentaux et du compor-tement (paralysie cérébrale, anomalie génétique, asthmeou encore maladie de l’appareil respiratoire) ;– Axe V : situation psychosociale associée (comme unemaltraitance, un placement, une mésentente familiale,etc.) ;– Axe VI : évaluation globale de l’incapacité sociale(supérieur, bon, modéré, ou gravement perturbé).

ORIGINE DES AXES

Les trois premiers axes (syndromes cliniques, troublesspécifiques du développement psychologique et niveauintellectuel) correspondent aux même catégories que laCIM-10, c’est-à-dire tous les codages numériques F.Cependant, ils sont rangés dans des ordres différents, lescritères pertinents pour les enfants étant mis en avant(troubles envahissants du développement et troublesémotionnels apparaissant dans l’enfance ou l’adoles-cence).

Le quatrième axe, qui correspond à ce que l’on pour-rait appeler les problèmes médicaux, est codé de Ajusqu’à Y, en excluant bien sûr les F qui correspondentaux troubles mentaux et les Z qui correspondent auchapitre XXI de la CIM-10, c’est-à-dire aux facteursinfluant sur l’état de santé ainsi qu’aux motifs de recoursau service de santé, et qui sont codés dans l’axe V.

Le cinquième axe, celui des situations psychosociales,est codé de 00 (absence de distorsion ou d’inadapta-tion) à 9. Il correspond à certains des codes Z du cha-pitre XXI de la CIM-10 (tous ceux correspondant auxZ00, Z02, Z03, Z04, c’est-à-dire examens, mise en

1 Équipe de traduction : Daniel Marcelli, Anne Danion-Grilliat,Pascal Lenoir, Jean-Philippe Raynaud, Hélène Rose-Reinhardt,Paris : Masson, 2001.2 CIM-10, Troubles mentaux et du comportement. Équipe detraduction dirigée par Ch. Pull, Paris : Masson, 1994.

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observation, et aux Z50, c’est-à-dire les soins impli-quant une rééducation, ne sont pas repris dans la clas-sification multi-axiale). De ce chapitre XXI, laclassification multi-axiale ne reprend que les difficultéspsychosociales. En ce qui concerne les codes en Z quisont repris de la CIM-10, la liste des situations est icilargement précisée par une aide au codage très précise etdétaillée.

Le sixième axe, correspondant à l’évaluation globalede l’incapacité psychosociale est codé de 00 (bon, excel-lent) à 8 (incapacité sociale profonde). Cet axe estabsent de la CIM-10 ou en tout cas seulement inclus àl’essai. Il est intéressant de noter qu’il est fondé sur« l’Échelle d’évaluation globale des incapacités psycho-sociales » issue du DSM-III-R qui est adaptée à l’enfant.Notons que l’OMS accorde beaucoup d’importance àl’évaluation des incapacités et que très probablementcette échelle sera reprise dans des révisions ultérieuresde la CIM-10.

EN CE QUI CONCERNE LE CODAGE, LES AUTEURSINDIQUENT QU’IL DOIT ÊTRE RIGOUREUXET SYSTÉMATIQUE

Dans la mesure où il s’agit d’une classification multi-axiale, le codage des différents éléments du diagnosticdoit se faire sur des axes séparés.

Chaque axe doit comprendre au moins un codage, etl’absence d’anormalité doit être codée dans chacun desaxes lorsqu’elle existe. Pour les axes I, II, III et IV, cetteabsence est codée XX, pour l’axe V, elle est codée 00, etpour l’axe VI, 0.

Les six axes sont toujours codés de la même manièreet dans un ordre identique, ce qui permet, pour larecherche en particulier, une récupération et une ana-lyse facilitée.

La classification multi-axiale se fait selon un modèledescriptif et non théorique. En effet, l’objectif est derepérer l’existence ou non de situations cliniques, sanspréjuger d’un lien de causalité avec le problème psy-chiatrique. Pour M. Rutter [4], il s’agit d’une procédurenécessaire pour « éviter des discussions théoriques sansfin à propos de l’importance relative des facteurs biolo-giques, psychosociaux ou cognitifs dans l’étiologie ». Ilrevendique donc son caractère athéorique.

Le codage est ainsi déterminé par la situation et lestroubles du patient, à un moment donné. En revanche,le caractère réversible ou non de la pathologie n’est paspris en compte. Le codage ne caractérise pas l’individuet n’est pas suffisant pour prendre toutes les décisionsadministratives et thérapeutiques appropriées.

AXE I : SYNDROMES CLINIQUESET PSYCHIATRIQUES

Il s’agit du chapitre V de la dixième révision de la CIMpour les troubles mentaux et les troubles du comporte-ment. Cet axe I ne prend pas en compte les troublesspécifiques du développement (qui seront dans l’axe II)et les retards mentaux (qui seront dans l’axe III) de cechapitre V de la CIM-10.

Les troubles envahissants du développement (F84)sont placés dans l’axe I « syndromes cliniques », et nondans l’axe II « troubles spécifiques du développementpsychologique ». Or, dans la CIM-10, les troubles enva-hissants du développement sont classés dans le chapitre« troubles spécifiques du développement psychologi-que ». Ce changement correspond aux usages des pédo-psychiatres, qu’ils soient cliniciens ou chercheurs.

Les troubles du comportement et troubles émotion-nels apparaissant habituellement durant l’enfance ou àl’adolescence et correspondant aux codes F90-F98 sontplacés au début de l’axe I, alors que dans la CIM-10 ilssont à la fin du chapitre V.

L’ordre des codages numériques et les descriptionsdiagnostiques sont pour le reste identiques à ceux de laCIM-10.

Le principe de base de la CIM-10 est conservé, c’est-à-dire qu’il n’est pas fait de différence dans la classifica-tion en fonction de l’âge. Ainsi, l’axe I contient certainscodages peu pertinents pour l’enfant, comme parexemple la maladie d’Alzheimer, mais aussi plus oumoins la schizophrénie. L’ordre initial de la CIM-10 estle plus souvent conservé en dehors de la mise en tête dedeux sections très spécifiques aux enfants : « troublesenvahissants du développement » et « troubles du com-portement et émotionnels apparaissant habituellementdurant l’enfance ou à l’adolescence ». Cela conduit àremarquer que des catégories peu pertinentes pour lejeune enfant peuvent arriver assez tôt dans la classifica-tion, comme par exemple les démences ou les troublesdus à des substances psycho-actives (en revanche,celles-ci peuvent être pertinentes pour les adolescents).

Lorsque les catégories sont peu pertinentes, elles sontprésentées en liste, sans ou avec une très brève descrip-tion d’aide au codage.

Lorsque les troubles de l’enfant sont identiques à ceuxrencontrés dans des pathologies adultes, la même clas-sification doit être utilisée. Ainsi, les troubles del’humeur sont codés de la même façon pour un enfantet un adulte.

Un trouble peut en revanche être codé de deux façonsdifférentes : ainsi, en ce qui concerne le trouble dû àl’anxiété, il sera soit codé dans la section F40-F48,intitulée « troubles névrotiques, troubles liés à des fac-teurs de stress, troubles somatoformes », car il est sus

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ceptible d’apparaître à tous âges. Mais il pourra égale-ment être codé dans la section F93 qui correspond au« trouble émotionnel débutant spécifiquement dansl’enfance », à la condition toutefois que tous les critèressoient pertinents. En effet, la définition en est précise etle fait que le trouble soit présenté par un enfant ne suffitpas à le coder dans la section F93.

La section « troubles spécifiques de la personnalitéadulte » est maintenue dans cette classification des trou-bles de l’enfant, dans la mesure où elle peut être perti-nente dès la fin de l’adolescence.

Sections de codage dans l’axe I

– XX : « pas de trouble spécifique du développementpsychiatrique » ;– F84 : « troubles envahissants du développement »,qui comprennent l’autisme infantile, l’autisme atypique,le syndrome de Rett, les autres troubles dégénératifs del’enfance, l’hyperactivité associée à un retard mental, lesyndrome d’Asperger, les autres troubles envahissantsdu développement, et les troubles envahissants du déve-loppement sans précisions ;– F90-F98 : « troubles du comportement et troublesémotionnels apparaissant habituellement durantl’enfance ou l’adolescence. » Ils comprennent les trou-bles hyperkinétiques, les perturbations de l’activité et del’attention, les troubles des conduites, les troubles émo-tionnels débutant spécifiquement dans l’enfance,l’angoisse de séparation, les troubles anxieux, la rivalitédans la fratrie, les troubles du fonctionnement socialdébutant spécifiquement durant l’enfance ou à l’adoles-cence, le mutisme, les tics, l’énurésie, l’encoprésie, lesmouvements stéréotypés, le bégaiement, le bredouille-ment, etc. ;– F00-F09 : « troubles mentaux organiques, y comprisles troubles symptomatiques. » Ils comprennent, enparticulier, démence de la maladie d’Alzheimer,démence vasculaire associée à d’autres maladies classéesailleurs, syndrome amnésique organique, delirium, etc.,troubles de la personnalité et du comportement d’unemaladie, une lésion ou un dysfonctionnement céré-bral ;– F10-F19 : « troubles mentaux et troubles du com-portement liés à l’utilisation de substances psychoaffec-tives. » Pour chaque catégorie de substances (de l’alcoolà la cocaïne en passant par le café, le tabac et le canna-bis), une subdivision de la cotation de 0 à 9 permet dedistinguer intoxication aiguë, utilisation nocive pour lasanté, syndrome de dépendance, syndrome de sevrage,troubles psychotiques, troubles résiduels, etc. ;– F20-F29 : il s’agit de la catégorie « schizophrénie,troubles schizotypiques et troubles délirants ». Nous neles reprendrons pas plus avant, car ils sont connus ;

– de même pour la catégorie F30-F39 qui suit, et quicorrespond aux « troubles de l’humeur (affectifs) » quicomprennent épisode maniaque, hypomanie, manie,troubles de l’humeur (affectifs sans précisions), épisodesdépressifs, légers, moyens, sévères et autres troublesdépressifs ;– la catégorie F40-F48 correspond aux « troublesnévrotiques, troubles liés à des facteurs de stress ettroubles somatoformes » qui comprennent les troublesanxieux phobiques, les autres troubles anxieux, les trou-bles obsessionnels compulsifs, les réactions à un facteurde stress, les troubles dissociatifs (de conversion), lestroubles somatoformes, les dysfonctionnements neuro-végétatifs, et vont jusqu’aux troubles névrotiques sansprécisions ;– la catégorie F50-F59 correspond aux « syndromescomportementaux associés à des perturbations physio-logiques et à des facteurs physiques ». Il s’agit :

• des troubles de l’alimentation, avec anorexie, bou-limie,• des troubles du sommeil comprenant les insom-nies, les hypersomnies, le somnambulisme, les ter-reurs nocturnes, les cauchemars, etc.,• des dysfonctionnements sexuels, les troubles men-taux et du comportement associés à la puerpéralité,les abus de substances n’entraînant pas de dépen-dance, mais aussi d’antidépresseurs, de laxatifs, d’anal-gésiques, de vitamines, de stéroïdes et hormones,etc. ;

– la catégorie F60-F69 renvoie aux « troubles de lapersonnalité et du comportement chez l’adulte ».Encore une fois, ils peuvent avoir une pertinence pourles adolescents, puisqu’ils correspondent aux troublesspécifiques de la personnalité, comme la paranoïa, per-sonnalité schizoïde, associale, histrionique, anxieuse,dépendante, etc. On retrouve aussi dans cette catégorieles troubles mixtes de la personnalité, les modificationsdurables de la personnalité, les troubles des habitudes etdes impulsions, avec en particulier le jeu pathologique,la pyromanie, la cleptomanie, etc., les troubles de l’iden-tité sexuelle, les troubles de la préférence sexuelle, lestroubles psychologiques et comportementaux associésau développement sexuel et à l’orientation sexuelle,etc. ;– enfin, la catégorie F99 renvoie à la catégorie « troublemental, sans autre indication ».

AXE II : TROUBLES SPÉCIFIQUESDU DÉVELOPPEMENT PSYCHOLOGIQUE

Les codages sont descriptifs et non étiologiques.Des retards spécifiques sont codés dans cet axe II,

sans tenir compte de leur étiologie. Par exemple, untrouble du langage, entrant dans le cadre d’un autisme,

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sera codé dans l’axe II et l’autisme dans l’axe I. Enrevanche, lorsqu’un enfant présentera un retard globalsévère mais une absence de retard spécifique dans undomaine particulier comme le langage ou les acquisi-tions scolaires, on codera absence de trouble spécifiquedu développement psychologique, c’est-à-dire XX.

Sections de codage dans l’axe II

Les codes utilisés sont :XX qui correspond à l’ « absence de trouble spéci-

fique du développement psychologique » et F80-F83 etF88-F89 qui correspondent aux « troubles du dévelop-pement psychologique » et concernent le développe-ment de la parole et du langage, les troubles del’articulation, les troubles du langage de type expressif,de type réceptif, une aphasie acquise avec épilepsie(syndrome de Landau-Klefner), les troubles spécifiquesdes acquisitions scolaires, en particulier au niveau de lalecture, l’orthographe, l’arithmétique, etc. Ils concer-nent également les troubles du développement psycho-moteur et les autres troubles du développementpsychologique.

AXE III : NIVEAU INTELLECTUEL

Là encore, il s’agit d’un codage descriptif, sans implica-tion étiologique ou pronostique. Le codage prend encompte le niveau actuel du développement de l’enfantet de son fonctionnement intellectuel.

Le retard mental doit être codé dans l’axe III, sanstenir compte de sa cause, comme par exemple un troubleenvahissant du développement, une maladie génétiquecomme une trisomie 21 ou une privation socio-affective.

Les codes de l’axe III sont les codes F70-F79 duchapitre V de la CIM-10.

Le codage est déterminé de façon clinique ou psycho-métrique, indépendamment du fonctionnement socialqui est codé sur l’axe VI ou en comorbidité sur l’axe I.

Sections de codage dans l’axe III

Les éléments qui sont codés vont de XX lorsque leniveau intellectuel est dans les limites de la normaleà F70-F79, pour un retard mental léger, moyen, grave,profond, ou sans précisions.

AXE IV : AUTRES AFFECTIONS CLASSÉESDANS LA CIM-10 SOUVENT ASSOCIÉESÀ DES TROUBLES MENTAUX ET À DES TROUBLESDU COMPORTEMENT

Cet axe permet le codage des éléments médicaux qui nerelèvent pas directement du domaine psychiatrique. Il

code une maladie actuelle. Il est à noter qu’un antécé-dent médical ne peut être enregistré que s’il est associé àune pathologie actuelle codifiable. Toute maladieactuelle doit être codée même si elle ne semble pas enlien avec la pathologie psychiatrique.

Une liste abrégée des principaux groupes de patholo-gies, issue des chapitres I à XXII en excluant le chapi-tre V de la CIM-10, est présentée dans cet axe. Enrevanche, la liste et l’aide au codage sont plus détailléespour les pathologies pouvant atteindre les enfants et lesadolescents consultant en psychiatrie. C’est le cas parexemple pour le diabète, la syphilis congénitale, l’épi-lepsie, les médicaments psychotropes, les maladies géné-tiques, etc.

Les conduites d’automutilation dues à un troublepsychiatrique sont codées dans l’axe IV (lésions auto-infligées correspondant aux codes X60-X84) avec lesmêmes codes X que dans le chapitre XXII de la CIM-10.

Les affections sont répertoriées dans les chapitressuivants

– chapitre I code A00-B99 : certaines maladies infec-tieuses et parasitaires ;– chapitre II C00-D48 : tumeurs ;– chapitre IV E00-E90 : maladies endocriniennes,métaboliques et de la nutrition ;– chapitre VI G00-G99 : maladies du système ner-veux ;– chapitre VII H00-H59 : maladies de l’œil et desannexes ;– chapitre VIII H60-H95 : maladies de l’oreille et del’apophyse mastoïde ;– chapitre IX I00-I99 : maladies de l’appareil circula-toire ;– chapitre X J00-J99 : maladies de l’appareil respira-toire ;– chapitre XI K00-K99 : maladies de l’appareil diges-tif ;– chapitre XII L00-L99 : maladies de la peau et dutissu cellulaire sous-cutané ;– chapitre XIII M00-M99 : maladies du système ostéo-articulaire, des muscles et du système conjonctif ;– chapitre XIV N00-N99 : maladies de l’appareilgénito-urinaire ;– chapitre XV O00-O99 : grossesse, accouchement,puerpéralité ;– chapitre XVI P00-P96 : certaines situations débu-tant dans la période périnatale ;– chapitre XVII Q00-Q99 : malformations congéni-tales et anomalies chromosomiques ;– chapitre XVIII R00-R99 : symptômes, signes etrésultats d’examens cliniques et de laboratoire nonclassés ailleurs ;

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– chapitre XIX S00-T98 : lésions traumatiques, empoi-sonnement et certaines autres conséquences de causesexternes ;– chapitre XX V00-Y98 : causes externes de morbiditéet de mortalité (lésions auto-infligées, agressions, dro-gues, médicaments et substances biologiques ayant pro-voqué des effets indésirables au cours de leur utilisationthérapeutique, et enfin séquelles de morbidité et demortalité).

AXE V : SITUATIONS PSYCHOSOCIALESANORMALES ASSOCIÉES

Il s’agit de la prise en compte de situations psychoso-ciales anormales en rapport possible avec la cause d’unproblème psychiatrique repéré chez un enfant. Cessituations psychosociales anormales sont importantes àprendre en compte dans la mesure où elles peuventjouer un rôle dans le projet thérapeutique. Même si ellesne semblent pas être la cause du problème psychia-trique, elles doivent être codées car elles peuvent avoirune utilité ultérieure. Cela est légèrement contradic-toire avec l’approche athéorique de cette classification.

Sections de codage dans l’axe V

Le codage se fait de 00 à 9, avec une subdivision chiffréepour chaque niveau. Le codage en Z du chapitre XXIde la CIM-10 a été transformé en chiffres qui permet-tent une nouvelle distribution et de nouveaux regrou-pements des catégories auparavant définies. De plusl’aide au codage est extrêmement détaillée :– 0 : « absence de distorsion ou d’inadaptation del’environnement psychosocial » ;– 1 : « perturbations des relations intra-familiales » ren-voie aux items « manque de chaleur affective dans lesrelations parents/enfant, discordes familiales entre lesadultes, hostilité envers un enfant désigné comme boucémissaire, sévices physiques, abus sexuels intra-familiaux » ;– 2 : « trouble mental, déviance ou handicap dansl’entourage immédiat de l’enfant » comprend en parti-culier trouble mental ou déviance parentale, handicap-incapacité parentale, incapacité dans la fratrie et autres ;– 3 : « communication intrafamiliale inadéquate oudistordue » prend en compte les items message contra-dictoire, absence de parole et d’échanges entre les per-sonnes, querelles vaines, secrets familiaux, dénis ourefus d’affronter les difficultés, etc. ;– 4 : « modes anormaux d’éducation » comprend enparticulier les situations de surprotection parentale,surveillance et contrôle parental inadéquats et excessifsde l’enfant, privation d’expériences pour l’enfant, pres-sion parentale inappropriée, etc. ;

– 5 : « environnement immédiat anormal » comprendl’éducation en institution, les situations parentales anor-males comme famille d’accueil, éducation assurée parles grands-parents, oncles ou tantes, frères ou sœurs,parent seul, enfant illégitime éduqué par un coupleautre que ses parents biologiques, parents adoptifs,éducation par une mère après conception par insémi-nation artificielle avec donneur, éducation par couplehomosexuel ou par un parent homosexuel et l’autrenon, éducation par un couple vivant séparé, etc., autresconditions, familles isolées avec manque de contactssociaux, de relation amicale parentale ;– 6 : « événements de vie aigus » renvoie aux itemsperte d’une relation d’amour ; retrait du foyer en parti-culier un placement dans une famille ou une institutiond’accueil ; hospitalisation répétée ; modèle altéré derelations familiales liées en particulier à l’arrivée d’unenouvelle personne dans la famille, ce qui peut avoir deseffets négatifs importants sur les modes relationnels del’enfant avec sa famille ; événements entraînant la pertede l’estime de soi comme un échec de l’enfant, ladécouverte ou l’annonce à un enfant d’un événementconsidéré comme honteux, une humiliation publique,perte de confiance ou de respect pour une personneaimée ; la perte d’estime de soi associée à une grossessenon désirée ; les abus sexuels extra-familiaux font partiede cette catégorie (notons que les abus sexuels intra-familiaux sont codés en « 1 » dans l’axe V) ; les expé-riences personnelles effrayantes terminent enfin cechapitre des événements de vie aigus ;– 7 : « stress sociaux » comprend persécution ou discri-mination hostile, migration ou transplantation sociale,et autres ;– 8 : « stress interpersonnel chronique lié au milieuscolaire ou professionnel » renvoie aux items troublesde la relation avec les pairs, désignation comme boucémissaire d’un enfant ou d’un adolescent par les ensei-gnants ou les supérieurs du milieu professionnel, etenfin malaise en situation scolaire et / ou profession-nelle ;– 9 : « événements ou situations stressantes résultantd’un trouble / d’une incapacité propre à l’enfant » com-prend l’éducation en institution, le retrait du foyerentraînant un risque de dommage significatif pourl’enfant, un événement entraînant la perte de l’estimede soi ou autres (tous ces items étant directement liés autrouble de l’enfant).

AXE VI : ÉVALUATION GLOBALE DE L’INCAPACITÉSOCIALE

Cet axe prend en compte le fonctionnement psycholo-gique, social et comportemental du patient au momentde l’examen. La ou les incapacités survenues à la suite

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d’un trouble psychiatrique, d’un trouble spécifique dudéveloppement psychologique ou d’un retard mentalsont donc codées dans l’axe VI.

En revanche, les troubles liés aux limitations physi-ques ou environnementales ne sont pas codés dansl’axe VI.

Il est à noter que les formulations sont les mêmes dansl’axe VI et dans le DSM-IV. En revanche, il n’y a pas deréférence aux symptômes spécifiques (qui sont codésdans l’axe I) dans la classification multi-axiale, etl’importance donnée aux problématiques sociales y estplus importante.

Sections de codage dans l’axe VI

– 0 : fonctionnement social bon ou excellent ;– 1 : fonctionnement social moyen ;– 2 : incapacité sociale légère ;– 3 : incapacité sociale modérée ;– 4 : incapacité sociale importante ;– 5 : incapacité sociale importante et envahissante ;– 6 : incapacité totale à fonctionner dans la plupart desdomaines ;– 7 : incapacité sociale majeure et envahissante ;– 8 : incapacité sociale profonde et envahissante.

CONCLUSION

La classification multi-axiale des troubles psychiatri-ques chez l’enfant et l’adolescent a la particularité derecentrer la classification internationale des troublesmentaux et des troubles du comportement sur l’enfantet l’adolescent et de la présenter sous la forme de six axesdistincts (ce qui est le cas pour une seule des multiplesformes de la CIM-10 pour les troubles mentaux) quipermettent de différencier les situations à prendre encompte pour établir un diagnostic psychiatrique com-plet. Les critères spécifiques ainsi individualisés sont :les syndromes psychiatriques, le niveau mental de

l’enfant, les troubles spécifiques du développement psy-chologique comme le langage, les acquisitions scolaireset cognitives, etc., l’existence de maladies actuelles etenfin les situations psychosociales anormales et l’inca-pacité psychosociale.

Comme le DSM-IV et la CIM (générale), elle reven-dique son caractère athéorique et uniquement des-criptif. Elle ne prend aucunement en compte la notionde structure psychique. Elle ne permet pratiquementpas, comme la CIM-10, de tenir compte de la psycho-pathologie du très jeune bébé.

Enfin, soulignons pour terminer que le PMSI, quimet en avant la nécessité d’utiliser la CIM-10, ne prendpas en compte cette classification multi-axiale, alors quel’évaluation de l’incapacité sociale et les situations psy-chosociales anormales (beaucoup plus explicites ici et /ou absentes de la CIM-10) serait des facteurs perti-nents. Mais la prise en compte de cette classificationintroduirait de fait une distinction dans le codage entreenfants / adolescents et adultes, ce qui est d’ailleurs entrain de se réaliser avec les modifications demandées parles psychiatres pour enfants.

REFERENCES

1 Organisation mondiale de la santé. CIM-10/ICD-10. Classifi-cation internationale des troubles mentaux et du comporte-ment. Descriptions cliniques et directives pour le diagnostic,traduction de l’anglais coordonnée par C.B. Pull. Paris : Mas-son ; 1994. 305 p.

2 Organisation mondiale de la santé. Classification multi-axialedes troubles psychiatriques chez l’enfant et chez l’adolescent ;classification CIM-10 des troubles mentaux et des troubles ducomportement de l’enfant et de l’adolescent, traduction del’anglais coordonnée par D. Marcelli. Paris : Masson ; 2001.269 p.

3 Rutter M, Shaffer D, Sherpherd M. An evaluation of a proposalfor a multi-axial classification of child psychiatric disorders.Genève : World Health Organization Monograph. WorldHealth Organization ; 1975.

4 World Health Organization. Multiaxial Classification of childand adolescent psychiatric disorders, 1996.

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