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Table ronde © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Archives de Pédiatrie 2014;21:309-310 309 Épidémiologie récente des méningites à méningocoque en pédiatrie Observatoire GPIP/ACTIV C. Levy a,b,c, *, F. Madhi d , R. Cohen a,b,c,e , S. Béchet b , S. Bonacorsi f , M.-K. Taha e Édouard Bingen, in memoriam a GPIP (Groupe de pathologie infectieuse pédiatrique) de la SFP (Société française de pédiatrie), 27, rue Inkermann, F94100 Saint-Maur-des-Fossés, France b ACTIV (Association clinique et thérapeutique infantile du Val-de-Marne), 27, rue Inkermann, F94100 Saint-Maur-des-Fossés, France c CRC, CHI Créteil, 40, avenue de Verdun, 94000 Créteil, France d Service de pédiatrie, CHI Créteil, 40, avenue de Verdun, 94000 Créteil, France e Service de néonatologie, unité court séjour, petits nourrissons, CHI Créteil, 40, avenue de Verdun, 94000 Créteil, France f Service de microbiologie, hôpital Robert-Debré, 48, boulevard Sérurier, 75019 Paris g CNRM, Institut Pasteur, 25-28, rue du Docteur-Roux, 75724 Paris Cedex 15, France *Auteur correspondant. e-mail : [email protected] Vaccins méningococciques (GPIP) L es méningites à méningocoque représentent en France plus de 40 % des méningites bactériennes de l’enfant, et l’in- cidence des infections invasives à méningocoque (IIM) est maximale dans la première année de vie : en France, en 2012, chez les enfants de moins de 1 an, elle était évaluée à 9/100 000 [1,2]. Le Comité technique des vaccinations et le Haut conseil de santé publique recommandent depuis avril 2009 une dose de vaccin conjugué anti-méningococcique C pour tous les sujets âgés de 1 à 24 ans [3]. Les dernières analyses des données de l’échantillon généraliste des bénéficiaires (EGB) CnamTS/InVS estimaient en 2013 une couverture vaccinale de 50 % pour les enfants âgés de 1 à 4 ans et elle diminuait dans les autres groupes d’âge [1]. Pour le méningocoque du groupe B, la vaccinologie inverse a permis le développement d’un vaccin recombinant anti-méningocoque B qui a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne en janvier 2013, mais qui n’est pas actuellement recommandé en France, sauf dans certaines zones d’hyperendé- mie et pour les patients à risque [4,5]. L’objectif de ce travail est de décrire les caractéristiques des méningites à méningocoque en 12 années de surveillance. 1. Patients et méthode De janvier 2001 à décembre 2012, 233 services de pédiatrie répartis dans toute la France et 168 services de microbiologie ont participé à l’Observatoire. Ils devaient inclure tous les malades âgés de 0 à 18 ans ayant une méningite à méningo- coque documentée. Le diagnostic reposait sur l’association d’un syndrome méningé fébrile avec une culture de liquide céphalo- rachidien (LCR) positive et/ou la présence d’antigènes solubles positifs dans le LCR et/ou une PCR positive dans le LCR et/ou une hémoculture positive associée à une pléiocytose (≥ 10 cellules/ mm 3 ). À chaque inclusion, un questionnaire était rempli par le pédiatre référent, puis transmis à ACTIV. Plusieurs fois par an, les cliniciens étaient contactés (courrier, courrier électronique et/ou téléphone) afin de compléter éventuellement leurs déclarations ou au contraire d’affirmer l’absence de cas. 2. Résultats 2.1. Épidémiologie De 2001 à 2012, 233 services ont inclus 4 808 cas de méningites, dont 1 991 à méningocoque (41,4 %). Le tableau 1 montre la répartition des sérogroupes en fonction des années. Le sérogroupe B est le plus fréquent, 63,9 %, suivi du sérogroupe C, 24,5 % des cas. Le diagnostic microbiologique est fait dans la majorité des cas par un examen direct ou par une culture positive du LCR (70,1 %) associée ou non à une réaction cellulaire. En cas de culture négative, une antibiothérapie 24 heures avant la PL est retrouvée dans 62 % des cas. L’âge moyen est de 4,4 ans (± 4,8, médiane à 2,4 ans) et la grande majorité des cas survient chez des enfants de moins de 5 ans (69 %) : 1,4 % sont des nouveau-nés, 43,6 % ont entre 1 et 12 mois, 21 % ont entre 12 mois et 2 ans, 34,1 % sont âgés de 2 à 5 ans. Entre 2001 et 2012, le nombre de méningites à méningocoque C a diminué de 87 %. Un cas de méningite à méningocoque C est survenu chez un enfant de 7,5 ans vacciné par un vaccin conjugué à l’âge

Épidémiologie récente des méningites à méningocoque en pédiatrie Observatoire GPIP/ACTIV

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© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.Archives de Pédiatrie 2014;21:309-310

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Épidémiologie récente des méningites à méningocoque en pédiatrieObservatoire GPIP/ACTIVC. Levya,b,c,*, F. Madhid, R. Cohena,b,c,e, S. Béchetb, S. Bonacorsif, M.-K. Tahae

Édouard Bingen, in memoriamaGPIP (Groupe de pathologie infectieuse pédiatrique) de la SFP (Société française de pédiatrie), 27, rue Inkermann, F94100 Saint-Maur-des-Fossés, France bACTIV (Association clinique et thérapeutique infantile du Val-de-Marne), 27, rue Inkermann, F94100 Saint-Maur-des-Fossés, France cCRC, CHI Créteil, 40, avenue de Verdun, 94000 Créteil, France dService de pédiatrie, CHI Créteil, 40, avenue de Verdun, 94000 Créteil, France eService de néonatologie, unité court séjour, petits nourrissons, CHI Créteil, 40, avenue de Verdun, 94000 Créteil, France fService de microbiologie, hôpital Robert-Debré, 48, boulevard Sérurier, 75019 Paris

gCNRM, Institut Pasteur, 25-28, rue du Docteur-Roux, 75724 Paris Cedex 15, France

*Auteur correspondant. e-mail : [email protected]

Vaccins méningococciques (GPIP)

Les méningites à méningocoque représentent en France plus de 40  % des méningites bactériennes de l’enfant, et l’in-cidence des infections invasives à méningocoque (IIM) est

maximale dans la première année de vie : en France, en 2012, chez les enfants de moins de 1 an, elle était évaluée à 9/100 000 [1,2]. Le Comité technique des vaccinations et le Haut conseil de santé publique recommandent depuis avril 2009 une dose de vaccin conjugué anti-méningococcique C pour tous les sujets âgés de 1 à 24 ans [3]. Les dernières analyses des données de l’échantillon généraliste des bénéficiaires (EGB) CnamTS/InVS estimaient en 2013 une couverture vaccinale de 50 % pour les enfants âgés de 1 à 4 ans et elle diminuait dans les autres groupes d’âge [1]. Pour le méningocoque du groupe B, la vaccinologie inverse a permis le développement d’un vaccin recombinant anti-méningocoque B qui a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne en janvier  2013, mais qui n’est pas actuellement recommandé en France, sauf dans certaines zones d’hyperendé-mie et pour les patients à risque [4,5]. L’objectif de ce travail est de décrire les caractéristiques des méningites à méningocoque en 12 années de surveillance.

1. Patients et méthode

De janvier  2001 à décembre  2012, 233  services de pédiatrie répartis dans toute la France et 168  services de microbiologie ont participé à l’Observatoire. Ils devaient inclure tous les malades âgés de 0 à 18  ans ayant une méningite à méningo-coque documentée. Le diagnostic reposait sur l’association d’un

syndrome méningé fébrile avec une culture de liquide céphalo-rachidien (LCR) positive et/ou la présence d’antigènes solubles positifs dans le LCR et/ou une PCR positive dans le LCR et/ou une hémoculture positive associée à une pléiocytose (≥ 10 cellules/mm3). À chaque inclusion, un questionnaire était rempli par le pédiatre référent, puis transmis à ACTIV. Plusieurs fois par an, les cliniciens étaient contactés (courrier, courrier électronique et/ou téléphone) afin de compléter éventuellement leurs déclarations ou au contraire d’affirmer l’absence de cas.

2. Résultats

2.1. Épidémiologie

De 2001 à 2012, 233 services ont inclus 4 808 cas de méningites, dont 1 991 à méningocoque (41,4 %).Le tableau 1 montre la répartition des sérogroupes en fonction des années. Le sérogroupe B est le plus fréquent, 63,9 %, suivi du sérogroupe C, 24,5 % des cas. Le diagnostic microbiologique est fait dans la majorité des cas par un examen direct ou par une culture positive du LCR (70,1 %) associée ou non à une réaction cellulaire. En cas de culture négative, une antibiothérapie 24 heures avant la PL est retrouvée dans 62 % des cas.L’âge moyen est de 4,4  ans (±  4,8, médiane à 2,4  ans) et la grande majorité des cas survient chez des enfants de moins de 5 ans (69 %) : 1,4 % sont des nouveau-nés, 43,6 % ont entre 1 et 12 mois, 21 % ont entre 12 mois et 2 ans, 34,1 % sont âgés de 2 à 5 ans.Entre 2001 et 2012, le nombre de méningites à méningocoque C a diminué de 87 %.Un cas de méningite à méningocoque  C est survenu chez un enfant de 7,5  ans vacciné par un vaccin conjugué à l’âge

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C. Levy et al. Archives de Pédiatrie 2014;21:309-310

(CNR) des méningocoques, qui montrent qu’après une baisse de l’incidence des infections invasives à méningocoque C (IIMC) entre 2002 et 2010, on note une augmentation en 2011 et 2012, en particulier chez les nourrissons de moins de 1 an et chez les enfants de plus de 14  ans  [1]. L’absence d’augmentation des cas dans les données de l’Observatoire peut être liée au fait que l’Observatoire rapporte uniquement les cas de méningite. Concernant le méningocoque B (64,1 % des cas des méningites à méningocoque), il est important de noter que les cas chez les moins de 1 an ne sont pas rares (17 % des cas parmi les enfants de moins de 1 an).

Références[1] Barret AS, Deghmane AE, Lepoutre A, et al. Les infections inva-

sives à méningocoques en France en 2012 : principales caracté-ristiques épidémiologiques. Bull Épidémiol Hebd 2014;1-2:25-31.

[2] Levy C, de La Rocque F, Cohen R. Actualisation de l’épidémiologie des méningites bactériennes de l’enfant en France. Med Mal Infect 2009;397-8:419-31.

[3] Avis du HCSP relatif à la vaccination par le vaccin méningococ-cique conjugué de sérogroupe  C. 2009. www.hcsp.fr/explore.cgi/hcspa20090424_meningC.pdf

[4] www.ema.europa.eu/docs/fr_FR/document_library/EPAR_Summary_for_the_public/human/002333/WC500137857.pdf, 2013.

[5] www.hcsp.fr/Explore.cgi/Telecharger?NomFichier=hcspa20130207_vaccmenbnpintrobexsero.pdf, 2013.

de 1  an (1  dose). Cinq enfants ont déclaré une méningite à méningocoque  B  : 14  : P1.7,16 alors qu’ils étaient vaccinés par MENBVAC®. Ils sont originaires de la région Haute-Normandie, âgés de 21,1 mois à 16,4 ans et ont reçu entre 3 et 4 doses du vaccin norvégien MENBVAC® (dirigé contre une souche B : 15  : P1.7,16) dans le cadre de la campagne locale de vaccination (sauf un patient âgé de 2 ans qui n’avait reçu que 2 doses). Dans tous les cas, l’évolution a été favorable.Il n’a pas été détecté de résistance de N. meningitidis aux bêta-lactamines, mais 33  % des souches testées entre 2001 et 2012 présentaient une sensibilité diminuée à la pénicilline  G ou à l’amoxicilline (1  mg/L  ≥  CMI  ≥  0,125  mg/L pour la pénicil-line G). Cette proportion semble être en diminution en 2011 et 2012 (27 % et 21 % respectivement). Les principaux antibiotiques d’intérêt prophylactique (rifampicine, ciprofloxacine) restent actifs, malgré l’isolement occasionnel de souches résistantes (0,2  % des souches pour chacun des ces 2  antibiotiques entre 2001 et 2012).Le taux de mortalité était de 5,9 % : 5,3 % pour le sérogroupe B et 8,9 % pour le sérogroupe C.

3. Discussion

Les données de l’Observatoire montrent une diminution globale des cas de méningites à méningocoque, plus marquée pour le sérogroupe C (87 %). Cependant, cette baisse doit être nuancée par les données de l’InVS et du Centre national de référence

Tableau IDistribution des méningites bactériennes de l’observatoire de 2001 à 2012 (n = 4 808)

n (%)Total n = 4 808

2001n = 453

2002n = 420

2003n = 453

2004n = 381

2005n = 438

2006n = 410

2007n = 411

2008n = 420

2009n = 388

2010n = 342

2011n = 352

2012n = 338

Neisseria meningitidisn = 1 991 (41,4)

200(44,2)

189(45)

230 (50,8)

159(41,7)

196(44,7)

206(50)

173 (42,1)

174(41,4)

138(35,6)

110 (32,1)

109 (30,9)

107 (31,9)

Nm groupe Bn = 1 272 (63,9)

104(52)

90(47,6)

131(57)

102(64,2)

124(63,3)

133(64,9)

118(68,2)

121(69,9)

96(69,6)

79 (71,8)

87(79,8)

86(80,4)

Nm groupe Cn = 488 (24,5)

67(33,5)

76(40,2)

72(31,3)

41(25,8)

44(22,5)

49(23,9)

42(24,3)

36(20,2)

24(17,4)

17(15,5)

11(10,1)

9(8,4)

Nm groupe Wn = 48 (2,4)

3 (1,5)

9 (4,8)

7 (3)

4(2,5)

4 (2)

6 (2,9)

0 2 (1,2)

5 (3,6)

3 (2,7)

0 5 (4,7)

Nm groupe Yn = 16 (0,8)

2 (1)

1 (0,5)

2 (0,9)

0 0 1 (0,5)

3 (1,7)

0 1 (0,7)

2 (1,8)

3 (2,8)

1 (0,9)

Nm non grou-pables et autres sérogroupesn = 167 (8,4)

24 (12)

13 (6,9)

18 (7,8)

12 (7,5)

24 (12,2)

17 (8,3)

10 (5,8)

15 (8,6)

12 (8,7)

9 (8,2)

8 (7,3)

6 (5,6)