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Rev. Stomatol. Chir. Maxillofac., 2005; 106, 5, 316-320 © Masson, Paris, 2005. 316 PERSPECTIVES Évaluation des réactions tissulaires locales à l’implantation de matériel d’ostéosynthèse résorbable en chirurgie maxillo-faciale Essai prospectif randomisé de stratégie thérapeutique P. Bouletreau (1), P. Jurdic (2), M. Mazzorana (2), P. Breton (1), M. Freidel (1) (1) Service de Stomatologie, Chirurgie Maxillo-Faciale et Plastique de la Face, Centre Hospitalier Lyon-Sud - Hospices Civils de Lyon, 165, chemin du Grand Revoyet, 69495 Pierre-Bénite. (2) École Normale Supérieure de Lyon, Unité CNRS - UMR 5161. Tirés à part : P. Bouletreau, à l’adresse ci-dessus. E-mail : pierre.bouletreau@chu-lyon.fr Ce projet d’étude concernant l’évaluation des réactions tissulaires locales à l’implantation de matériel d’ostéosynthèse résorbable en chirurgie maxillo-faciale est complémentaire d’un second essai prospectif randomisé développé dans le cadre du Projet Hospitalier de Recherche Clinique (PHRC) national 2004. Ce PHRC multicentrique (Lyon, Toulouse, Clermont-Ferrand) portant sur plus de 300 patients a pour ambition d’évaluer la qualité de contention, l’ergonomie et la tolérance clinique du matériel résorbable dans le cadre d’interventions de traumatologie maxillo-faciale ou de chirurgie orthognathique. Le projet d’essai clinique présenté ici permettra d’apporter un éclairage « biologique », très peu évalué dans la littérature au vu de son importance, dans le cadre de l’utilisation des matériaux d’ostéosynthèse résorbable en chirurgie maxillo-faciale. Ce projet a été financé en majorité par l’association « Les Gueules Cassées » lors de l’appel à projets annuel 2004. Un complément de budget a été obtenu grâce au Prix Antonin Poncet 2004. Cette étude a débuté en décembre 2004 et durera environ 24 mois. INTRODUCTION Le traitement des fractures du massif repose principale- ment sur l’ostéosynthèse par plaques miniaturisées vis- sées en titane (PMVT). Bien que ce point soit extrêmement discuté dans la littérature, de nombreux chirurgiens procèdent à l’ablation systématique du maté- riel d’ostéosynthèse en titane, environ un an après sa pose, que ces PMVT soient symptomatiques ou pas. Dans l’optique de réduire la morbidité liée aux réinterventions pour ablation du matériel d’ostéosynthèse titane, l’ostéo- synthèse résorbable s’est progressivement développée depuis une vingtaine d’années en chirurgie orthopédique puis cranio-maxillo-faciale. Le matériau actuellement uti- lisé et qui semble faire l’unanimité parmi les fabricants est un copolymère d’acide L-polylactique (PLLA) et d’acide polyglycolique (PGA). Le PLLA est un polymère hydro- phobe se dégradant lentement et apportant donc une certaine tenue mécanique au matériau. Le PGA est plus hydrophile et se résorbe plus rapidement. En fonction des contraintes biomécaniques du site d’ostéosynthèse, les fabricants font varier les proportions de PLLA et PGA dans le copolymère, apportant ainsi plus ou moins de résistance au matériel d’ostéosynthèse. La résorption de ces copolymères se fait par un double mécanisme d’hydrolyse et de résorption macrophagique. Le délai de résorption complète varie selon les produits disponibles sur le marché entre 9 mois et 3 ans. Tous les produits offrent une tenue mécanique optimale d’au moins 8 semaines, ce qui assure une contention suffisante dans le cadre de la consolidation des fractures du massif facial. De nombreuses études expérimentales et cliniques ont validé l’utilisation des copolymères PLLA/PGA tant en Europe qu’aux États-Unis. Bien que quelques articles récents rapportent des résul- tats satisfaisants dans le cadre de la chirurgie orthognathi- que et de la traumatologie [1-4], les réactions biologiques tissulaires au contact de ces matériaux d’ostéosynthèse résorbable ont été très peu étudiées chez l’homme [5]. Il nous semble donc important de s’assurer de manière objective que la dégradation des matériaux résorbables ne compromet pas les conditions du micro-environnement fracturaire (variations du pH, trouble de la néo-angioge- nèse, réactions inflammatoires explosives ?) dans la mesure où cette technique représente une thérapeutique d’avenir dans notre spécialité [6]. OBJECTIFS DE L’ÉTUDE ET MÉTHODOLOGIE L’objectif principal de cette étude est d’évaluer les réac- tions tissulaires locales liées à la contention des fractures ou ostéotomies du massif facial moyen ostéosynthésées par du matériel résorbable PLLA/PGA ; et dans un second temps, d’évaluer la tolérance clinique du matériel résorbable.

Évaluation des réactions tissulaires locales à l’implantation de matériel d’ostéosynthèse résorbable en chirurgie maxillo-faciale

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Page 1: Évaluation des réactions tissulaires locales à l’implantation de matériel d’ostéosynthèse résorbable en chirurgie maxillo-faciale

Rev. Stomatol. Chir. Maxillofac., 2005; 106, 5, 316-320© Masson, Paris, 2005.

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PERSPECTIVES

Évaluation des réactions tissulaires locales à l’implantation de matériel d’ostéosynthèse résorbable en chirurgie maxillo-facialeEssai prospectif randomisé de stratégie thérapeutique

P. Bouletreau (1), P. Jurdic (2), M. Mazzorana (2), P. Breton (1), M. Freidel (1)

(1) Service de Stomatologie, Chirurgie Maxillo-Faciale et Plastique de la Face, Centre Hospitalier Lyon-Sud - Hospices Civils de Lyon, 165, chemin du Grand Revoyet, 69495 Pierre-Bénite.(2) École Normale Supérieure de Lyon, Unité CNRS - UMR 5161.Tirés à part : P. Bouletreau, à l’adresse ci-dessus.E-mail : [email protected]

Ce projet d’étude concernant l’évaluation des réactions tissulaires locales à l’implantation de matériel d’ostéosynthèse résorbable en chirurgie maxillo-faciale estcomplémentaire d’un second essai prospectif randomisé développé dans le cadre du Projet Hospitalier de Recherche Clinique (PHRC) national 2004.Ce PHRC multicentrique (Lyon, Toulouse, Clermont-Ferrand) portant sur plus de 300 patients a pour ambition d’évaluer la qualité de contention, l’ergonomie etla tolérance clinique du matériel résorbable dans le cadre d’interventions de traumatologie maxillo-faciale ou de chirurgie orthognathique.Le projet d’essai clinique présenté ici permettra d’apporter un éclairage « biologique », très peu évalué dans la littérature au vu de son importance, dans le cadrede l’utilisation des matériaux d’ostéosynthèse résorbable en chirurgie maxillo-faciale.Ce projet a été financé en majorité par l’association « Les Gueules Cassées » lors de l’appel à projets annuel 2004. Un complément de budget a été obtenugrâce au Prix Antonin Poncet 2004. Cette étude a débuté en décembre 2004 et durera environ 24 mois.

INTRODUCTION

Le traitement des fractures du massif repose principale-ment sur l’ostéosynthèse par plaques miniaturisées vis-sées en titane (PMVT). Bien que ce point soitextrêmement discuté dans la littérature, de nombreuxchirurgiens procèdent à l’ablation systématique du maté-riel d’ostéosynthèse en titane, environ un an après sapose, que ces PMVT soient symptomatiques ou pas. Dansl’optique de réduire la morbidité liée aux réinterventionspour ablation du matériel d’ostéosynthèse titane, l’ostéo-synthèse résorbable s’est progressivement développéedepuis une vingtaine d’années en chirurgie orthopédiquepuis cranio-maxillo-faciale. Le matériau actuellement uti-lisé et qui semble faire l’unanimité parmi les fabricants estun copolymère d’acide L-polylactique (PLLA) et d’acidepolyglycolique (PGA). Le PLLA est un polymère hydro-phobe se dégradant lentement et apportant donc unecertaine tenue mécanique au matériau. Le PGA est plushydrophile et se résorbe plus rapidement. En fonction descontraintes biomécaniques du site d’ostéosynthèse, lesfabricants font varier les proportions de PLLA et PGAdans le copolymère, apportant ainsi plus ou moins derésistance au matériel d’ostéosynthèse. La résorption deces copolymères se fait par un double mécanismed’hydrolyse et de résorption macrophagique. Le délai derésorption complète varie selon les produits disponiblessur le marché entre 9 mois et 3 ans. Tous les produits

offrent une tenue mécanique optimale d’au moins8 semaines, ce qui assure une contention suffisante dansle cadre de la consolidation des fractures du massif facial.De nombreuses études expérimentales et cliniques ontvalidé l’utilisation des copolymères PLLA/PGA tant enEurope qu’aux États-Unis.

Bien que quelques articles récents rapportent des résul-tats satisfaisants dans le cadre de la chirurgie orthognathi-que et de la traumatologie [1-4], les réactions biologiquestissulaires au contact de ces matériaux d’ostéosynthèserésorbable ont été très peu étudiées chez l’homme [5]. Ilnous semble donc important de s’assurer de manièreobjective que la dégradation des matériaux résorbables necompromet pas les conditions du micro-environnementfracturaire (variations du pH, trouble de la néo-angioge-nèse, réactions inflammatoires explosives ?) dans lamesure où cette technique représente une thérapeutiqued’avenir dans notre spécialité [6].

OBJECTIFS DE L’ÉTUDE ET MÉTHODOLOGIE

L’objectif principal de cette étude est d’évaluer les réac-tions tissulaires locales liées à la contention des fracturesou ostéotomies du massif facial moyen ostéosynthéséespar du matériel résorbable PLLA/PGA ; et dans unsecond temps, d’évaluer la tolérance clinique du matérielrésorbable.

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Vol. 106, no 5, 2005 Évaluation des réactions tissulaires locales à l’implantation de matériel d’ostéosynthèse résorbable

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Matériel

Le matériel d’ostéosynthèse résorbable utilisé pourl’ostéosynthèse du massif facial moyen sera :

— Le système « Lactosorb® » : commercialisé par lasociété Walter Lorenz© et distribué par la société AllegreChirurgie©. Il s’agit de copolymères d’acide poly-L-lacti-que (82 %) et d’acide polyglycolique (18 %) ayant obtenul’agrément FDA et le marquage CE pour leur utilisation enchirurgie cranio-faciale en 1996.

— Le système « Delta® » : Commercialisé et distribuépar la société Stryker-Leibinger©. Il s’agit de copolymèresd’acides poly-L lactide (85 %), poly-D lactide (5 %) et gly-colide (10 %) ayant obtenu l’agrément FDA et le mar-quage CE pour leur utilisation en chirurgie crâniofaciale.

Le matériel d’ostéosynthèse en titane utilisé sera le sys-tème commercialisé par la société Walter Lorenz© etdistribué par la société Allegre Chirurgie© (plaquestitane 1.0 mm accompagnées de la visserie titane 5.0 et7.0 mm). Ce système est utilisé depuis plusieurs annéesdans notre unité.

Méthodologie

Les patients présentant une fracture du massif facialmoyen ou une ostéotomie de type Lefort I dans lecadre de la chirurgie orthognathique nécessitent l’ostéo-synthèse des quatre piliers principaux du massif facial :une plaque d’ostéosynthèse sur chaque pilier canin (droitet gauche), et une plaque sur chaque pilier molaire, soit4 plaques d’ostéosynthèse.

Chez chaque patient, l’ostéosynthèse se fera grâce à2 plaques titane et 2 plaques résorbables. De manièrerandomisée, les plaques résorbables seront posées soitau niveau des piliers canins (fig. 1 — Groupe I), soit auniveau des piliers molaires (fig. 2 — Groupe II).

Les patients seront ré-opérés systématiquement à un anpostopératoire pour aller retirer le matériel titane. À cetteoccasion, et par la même voie d’abord, des biopsies serontprélevées au niveau des tissus réactionnels recouvrant lesplaques d’ostéosynthèse titane et résorbable.

Critère de jugement principal

L’évaluation des réactions tissulaires locales liées à la con-tention des fractures ou ostéotomies du massif facial moyensera réalisée à partir de biopsies tissulaires prélevéesau contact du matériel d’ostéosynthèse titane et résor-bable.

Critère de jugement secondaire : tolérance clinique du matériel

Des fiches standardisées recueilleront les éléments sui-vants à chaque consultation de contrôle : la douleur,l’inflammation locale, la cicatrisation des voies d’abord,l’infection, la palpation sous-cutanée ou sous-muqueusedes plaques. Les consultations de contrôle serontréalisées systématiquement à J1, J21, J45, 6 mois et 1 anpostopératoire.

Critères d’inclusion et d’exclusion

Cinquante patients seront choisis pour être inclus danscette étude selon les critères suivants :

— Critères d’inclusion• Patient informé verbalement et par écrit de la méthodo-

logie et des objectifs de l’étude, et acceptant d’y participer.• Consentement éclairé signé.• Patient âgé de 18 à 50 ans.• Patient présentant une fracture du massif facial

moyen de type Lefort I ou devant bénéficier d’une procé-dure de chirurgie orthognathique maxillaire (ostéotomie

Figure 1 : Groupe I. L’ostéosynthèse est réaliséepar 2 plaques résorbables aux piliers canins et2 plaques titane aux piliers molaires.

Figure 2 : Groupe II. L’ostéosynthèse est réaliséepar 2 plaques titane aux piliers canins et 2 plaquesrésorbables aux piliers molaires.

1 2

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P. Bouletreau et coll. Rev. Stomatol. Chir. Maxillofac.

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de Lefort I) requérant une contention chirurgicale par4 plaques d’ostéosynthèse.

— Critères d’exclusion• Patient ayant déjà subi une intervention chirurgicale

sur le même site opératoire.• Patient souffrant d’une affection chronique interférant

avec la consolidation osseuse.• Patient prenant un traitement corticostéroïde, immu-

nosuppresseur, anticonvulsivant ou antibiotique au longcours.

• Patiente enceinte ou allaitant. Patient inconscient.• Patient risquant de ne pas se présenter aux consulta-

tions de contrôle postopératoire.Une fois inclus dans l’étude, les patients seront assignés

à un des deux groupes thérapeutiques suivants, demanière randomisée, le jour de l’intervention :

— Groupe expérimental I : ostéosynthèse par matérielrésorbable PLLA/PGA au niveau des piliers canins et parmatériel titane au niveau des piliers molaires.

— Groupe expérimental II : ostéosynthèse par matérieltitane au niveau des piliers canins et par matériel résorba-ble PLLA/PGA au niveau des piliers molaires.

— Groupe contrôle : Les patients étant leur propre con-trôle, cette étude ne nécessite pas de groupe contrôlespécifique.

Le blocage maxillomandibulaire (BMM) représentant unmoyen de contention externe des foyers d’ostéotomie oude fracture, sa durée sera standardisée :

— Ostéotomies ou fractures isolées du massif facialmoyen : BMM métallique de 2 jours suivi d’un BMM élas-tique intermittent (déblocage uniquement au momentdes repas principaux) pendant 3 semaines.

— Ostéotomies ou fractures du massif facial bimaxillai-res : BMM métallique de 4 jours suivi d’un BMM élastiqueintermittent (déblocage uniquement au moment desrepas principaux) pendant 3 semaines.

Les suites opératoires seront les mêmes pour tous lespatients, quel que soit le type de chirurgie : antalgiquessimples (classe I) à la demande, bains de bouche (de typeEludril®) après chaque repas pendant 15 jours, alimenta-tion liquide pendant 4 jours, puis mixée pendant6 semaines.

Évaluation des résultats

Évaluation de l’objectif principal

L’évaluation des effets tissulaires induits par la résorptiondu matériel sera réalisée dans le laboratoire de biologieosseuse, à l’École Normale Supérieure de Lyon : Labora-toire de Biologie Moléculaire de la Cellule, Départementd’Endocrinologie Moléculaire et Différenciation Hémato-poïétique et Osseuse, Dr Jurdic - CNRS UMR 5161, École

Normale Supérieure de Lyon, 46, Allée d’Italie, 69364LYON Cedex 07.

— Étude préalable in vitroLa capacité des 2 matériels (titane et copolymères

résorbables) à servir de support aux cellules osseuses,ostéoblastes et ostéoclastes mais aussi macrophages,sera analysée. Des fragments de ces matériels serontdéposés au fond de puits de boites de culture en pré-sence de milieu de culture. Seront ensuite déposésdessus :

• Des ostéoblastes en présence de bêta-glycerophos-phate et acide ascorbique pour favoriser la minéralisation.Nous évaluerons et comparerons l’adhérence des ostéo-blastes sur les biomatériaux et leur capacité à se différen-cier et à minéraliser.

• Des monocytes humains (prélèvements obtenus parl’Établissement de Transfusion du Sang (ETS) de Lyonselon l’agrément en cours entre l’ETS et l’équipe Jurdic) enprésence des cytokines M-CSF et RANK, nécessaires à ladifférenciation ostéoclastique. Nous évaluerons, par destests colorimétriques, la capacité des monocytes à se dif-férencier d’abord en macrophages puis en ostéoclastessur les supports. Pour tester leur éventuelle capacité àrésorber nous utiliserons la lignée ostéoclastique murineRAW exprimant le gène de l’actine fusionné à la GFP(Green Fluorescent Protein) et visualiserons au microscopeconfocal inversé la formation, ou non, des anneauxd’actine caractéristiques des ostéoclastes résorbants.

— Analyse histologique des biopsiesPour évaluer la qualité de la reformation osseuse à par-

tir des biomatériaux et pour ne pas avoir à effectuer debiopsies osseuses sur les patients, nous ferons une ana-lyse cytologique des tissus mous présents autour des pla-ques. Les biopsies seront fixées, coupées puis coloréespour détecter la présence de cellules inflammatoireséventuelles mais surtout d’ostéoblastes (révélation par laphosphatase alcaline, ALKP) et d’ostéoclastes (révéléspar la phosphatase acide résistante au tartrate, TRAP).Une bonne reformation osseuse devrait être accompa-gnée d’une vascularisation importante et la présence devaisseaux sanguins sera recherchée.

Évaluation de l’objectif secondaire

La tolérance du matériel résorbable sera évaluée clinique-ment lors des consultations de contrôle programmées.L’interrogatoire recherchera des douleurs diffuses ou loca-lisées et l’examen clinique des signes inflammatoires ouinfectieux locaux. La cicatrisation muqueuse et/ou cutanéedes différentes voies d’abord sera évaluée cliniquement etd’éventuels signes de désunion cicatricielle seront recher-chés. Enfin la palpation sous-cutanée ou sous-muqueusedes plaques d’ostéosynthèse sera appréciée. Les donnéesseront consignées sur une fiche pré-imprimée.

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Vol. 106, no 5, 2005 Évaluation des réactions tissulaires locales à l’implantation de matériel d’ostéosynthèse résorbable

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FAISABILITÉ DE L’ÉTUDE ET PROGRAMME DE TRAVAIL (tableau I)

Le matériel d’ostéosynthèse résorbable à base de copoly-mères PLLA/PGA est utilisé en pratique courante depuisplusieurs années en chirurgie orthopédique et depuisquelques années en chirurgie maxillo-faciale. Son inno-cuité semble avérée en clinique humaine, comme entémoignent les agréments obtenus auprès de la FDA amé-ricaine et des instances de contrôle européennes (mar-quage CE). L’utilisation de ce type de matériaux est donctout à fait possible dans le cadre de notre projet. D’autrepart, le recrutement de traumatologie maxillo-faciale(environ 200 patients par an) et de chirurgie orthognathi-que (environ 150 patients par an) observé dans notreunité nous assure de pouvoir réunir le nombre de patientsnécessaires pour assurer une puissance suffisante à notreétude. Des évaluations trimestrielles du rythme d’inclusionseront réalisées (fig 3).

L’analyse biologique des biopsies réalisées au contactdes matériaux d’ostéosynthèse titane et résorbable seraréalisée dans l’unité CNRS UMR 5161 du Dr Jurdic, àl’École Normale Supérieure de Lyon. Il s’agit d’un labora-toire de biologie osseuse de réputation internationale quipossède une expertise reconnue dans le domaine des bio-matériaux et de la consolidation osseuse. Cette étude seramenée sur 2 ans, 1 an étant dévolu au recrutement despatients, et 1 an au suivi clinique de patients.

BÉNÉFICES ATTENDUS

Cette étude a pour but principal d’apporter un éclairagenouveau, biologique, sur l’utilisation des matériauxd’ostéosynthèse résorbable en chirurgie maxillo-faciale. Laconsolidation osseuse met en effet en jeu une cascade decytokines ostéoinductrices permettant la restitutionad integrum du tissu osseux lésé. Le microenvironnementfracturaire participe aux conditions locales de consolida-tion osseuse et la dégradation, par hydrolyse principale-ment, des copolymères PLLA/PGA participe aux variationsde ce microenvironnement [6]. Il nous semble doncimportant d’évaluer les réactions tissulaires locales, refletdes variations du microenvironnement fracturaire, au con-tact de ces copolymères biodégradables.

Si ce matériel s’avérait performant et propice à la conso-lidation osseuse, cela permettrait d’éviter chaque annéede nombreuses interventions (environ 150 interventionspar an) pour ablation de matériel d’ostéosynthèse. Le coûtdu matériel d’ostéosynthèse résorbable, qui reste encoreun obstacle à sa large diffusion, est contrebalancé parl’absence de seconde intervention chirurgicale pour abla-tion du matériel. Par ailleurs, l’évolution actuelle semble sefaire vers une réduction rapide des coûts du matérield’ostéosynthèse résorbable.

Pour les patients, l’avantage principal de l’ostéosynthèserésorbable est celui d’éviter une seconde intervention chi-rurgicale. La morbidité et le coût additionnel propre aux

Tableau I

Programme de travail.

Période Actions

Préopératoire— Information du patient — Inclusion des patients — Bilan clinique et radiologique

J0 préopératoire— Randomisation et assignation du patient au groupe I ou II

J1 postopératoire — Bilan clinique et radiologique

J21 — Bilan clinique

J45

— Bilan clinique et radiologique — Ablation des arcs de blocage maxillo-mandibulaire sous anesthésie locale en ambulatoire (groupe traumatologie)

6 mois postopératoire

— Bilan clinique

1 an postopératoire

— Bilan clinique et radiologique final — Réintervention des patients pour ablation du matériel d’ostéosynthèse titane et biopsies tissulaires.— Analyse histologique des biopsies tissulaires.

0

10

20

30

40

50

60

0 M3 M6 M9 M12

Patients

Mois après le début de l’étude

Figure 3 : Diagramme du rythme d’inclusion prévisionnel des patientsdans l’étude.

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P. Bouletreau et coll. Rev. Stomatol. Chir. Maxillofac.

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réinterventions pour ablation du matériel d’ostéosynthèsejustifient que soient développées les techniques d’ostéo-synthèse résorbable en chirurgie maxillo-faciale.

BUDGET

Le budget de cette étude a été construit ainsi :— Surcoût lié à l’achat du matériel résorbable (plaques,

vis, et ancillaire de pose).— Frais d’analyse biologique et histologique (École Nor-

male Supérieure).— Frais divers (secrétariat, publications, congrès).

RÉFÉRENCES1. Yerit KC, Enislidis G, Schopper C, Turhani D, Wanschitz F,

Wagner A, et al. Fixation of mandibular fractures with biodegra-

dable plates and screws. Oral Surg Oral Med Oral Pathol OralRadiol Endod, 2002;94:294-300.

2. Landes CA, Kriener S, Menzer M, Kovacs AF. Resorbable plateosteosynthesis of dislocated or pathological mandibular fractu-res: a prospective clinical trial of two amorphous L-DL-lactidecopolymer 2-mm miniplates systems. Plast Reconstr Surg,2003;111:601-10.

3. Cheung LK, Chow LK, Chiu WK. A randomized controlled trialof resorbable versus titanium fixation for orthognathic surgery.Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod, 2004;98:386-97.

4. Norholt SE, Pedersen TK, Jensen J. Le Fort I miniplate osteosyn-thesis: a randomized, prospective study comparing resorbablePLLA/PGA with titanium. Int J Oral Maxillofac Surg, 2004;33:245-52.

5. Mollaoglu N, Cetiner S, Alpaslan C, Gültekin SE, Alpar R. Theearly tissue response to titanium and Lactosorb screws. DentTraumatol, 2003;19:139-44.

6. Bouletreau P. Interactions cellulaires en microenvironnementfracturaire osseux. Thèse de Science, Université Claude BernardLyon I, 2003, 120 p.

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