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Article original Existe-il une instabilité piso-triquétrale après une neurolyse du nerf médian au poignet ? Étude rétrospective à propos de 55 cas Is there pisotriquetral instability after carpal tunnel release? Retrospective study of 55 cases A. Caubère a, * , C. Butin a , K. Guilhem a , M. Levadoux a , R. Legré b , M.-K. Nguyen a, * a Service de chirurgie orthopédique et traumatologique, HIA Sainte-Anne, BP 600, 83800 Toulon Naval, France b Service de chirurgie réparatrice et chirurgie de la main, hôpital de la Conception, Marseille, France Reçu le 26 janvier 2011 ; reçu sous la forme révisée le 16 février 2014 ; accepté le 28 mai 2014 Résumé L’objectif de cette étude était de chercher la présence d’une instabilité piso-triquétrale après une neurolyse du nerf médian au poignet. Cinquante-cinq patients opérés pour un syndrome du canal carpien sur une période allant de décembre 2005 à mars 2009 ont été inclus. Il s’agissait d’une étude rétrospective. La technique consistait en une chirurgie à ciel ouvert sous anesthésie locale par abord antérieur du poignet. L’évaluation pour chercher une instabilité était à la fois clinique et radiologique par mesure de l’angle piso-métacarpien. La population étudiée avait un âge moyen de 61 ans et le recul moyen était de 42 mois. Seuls 9 % des patients présentaient des douleurs du bord ulnaire et les valeurs moyennes de l’angle piso-métacarpien mesurées sur l’ensemble des poignets opérés et des poignets non opérés étaient équivalentes. Il ne semble pas exister d’instabilité piso-triquétrale après la neurolyse du nerf médian. # 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Syndrome canal carpien ; Neurolyse médian au poignet ; Instabilité ; Piso-triquétrale Abstract The aim of this study was to determine if pisotriquetral instability is present after neurolysis of the median nerve in the wrist. Fifty-five patients who underwent carpal tunnel release between December 2005 and March 2009 were included in this retrospective study. The surgical procedure consisted of cutting the transverse carpal ligament under local anesthesia through an anterior approach. Instability was evaluated clinically and radiologically by measuring the pisometacarpal angle. The mean patient age was 61 years and the mean follow-up 42 months. Only 9% of patients complained of pain on the ulnar side of wrist. The pisometacarpal angle in all the operated wrists was the same as in the non-operated wrists. Our findings suggest there is no pisotriquetral instability after median nerve neurolysis. # 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Carpal tunnel syndrome; Median nerve neurolysis; Instability; Pisotriquetral 1. Introduction L’instabilité piso-triquétrale a été évoquée dans la littérature dans le cadre de la pathologie dégénérative. C’est une notion relativement nouvelle pour cette articulation qui suscite actuellement un intérêt. En dehors des éléments « intrinsèques » : capsule articulaire, ligaments piso-métacarpien, piso-hamatal et piso-triquétraux, il existe des éléments « extrinsèques » dont le rétinaculum des fléchisseurs (RF). Ce RF est sectionné sur toute sa hauteur lors de la neurolyse du nerf médian au poignet. La section de ce rétinaculum soulève la question suivante : existe-il une Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com Chirurgie de la main xxx (2014) xxxxxx * Auteurs correspondants. Adresses e-mail : [email protected] (A. Caubère), [email protected] (M.K. Nguyen). + Models CHIMAI-888; No. of Pages 5 Pour citer cet article : Caubère A, et al. Existe-il une instabilité piso-triquétrale après une neurolyse du nerf médian au poignet ? Étude rétrospective à propos de 55 cas. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.05.005 http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.05.005 1297-3203/# 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Existe-il une instabilité piso-triquétrale après une neurolyse du nerf médian au poignet ? Étude rétrospective à propos de 55 cas

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Article original

Existe-il une instabilité piso-triquétrale après une neurolyse du nerf médianau poignet ? Étude rétrospective à propos de 55 cas

Is there pisotriquetral instability after carpal tunnel release? Retrospective study of 55 cases

A. Caubère a,*, C. Butin a, K. Guilhem a, M. Levadoux a, R. Legré b, M.-K. Nguyen a,*a Service de chirurgie orthopédique et traumatologique, HIA Sainte-Anne, BP 600, 83800 Toulon Naval, France

b Service de chirurgie réparatrice et chirurgie de la main, hôpital de la Conception, Marseille, France

Reçu le 26 janvier 2011 ; reçu sous la forme révisée le 16 février 2014 ; accepté le 28 mai 2014

Résumé

L’objectif de cette étude était de chercher la présence d’une instabilité piso-triquétrale après une neurolyse du nerf médian au poignet.Cinquante-cinq patients opérés pour un syndrome du canal carpien sur une période allant de décembre 2005 à mars 2009 ont été inclus. Il s’agissaitd’une étude rétrospective. La technique consistait en une chirurgie à ciel ouvert sous anesthésie locale par abord antérieur du poignet. L’évaluationpour chercher une instabilité était à la fois clinique et radiologique par mesure de l’angle piso-métacarpien. La population étudiée avait un âgemoyen de 61 ans et le recul moyen était de 42 mois. Seuls 9 % des patients présentaient des douleurs du bord ulnaire et les valeurs moyennes del’angle piso-métacarpien mesurées sur l’ensemble des poignets opérés et des poignets non opérés étaient équivalentes. Il ne semble pas existerd’instabilité piso-triquétrale après la neurolyse du nerf médian.# 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Syndrome canal carpien ; Neurolyse médian au poignet ; Instabilité ; Piso-triquétrale

Abstract

The aim of this study was to determine if pisotriquetral instability is present after neurolysis of the median nerve in the wrist. Fifty-five patientswho underwent carpal tunnel release between December 2005 and March 2009 were included in this retrospective study. The surgical procedureconsisted of cutting the transverse carpal ligament under local anesthesia through an anterior approach. Instability was evaluated clinically andradiologically by measuring the pisometacarpal angle. The mean patient age was 61 years and the mean follow-up 42 months. Only 9% of patientscomplained of pain on the ulnar side of wrist. The pisometacarpal angle in all the operated wrists was the same as in the non-operated wrists. Ourfindings suggest there is no pisotriquetral instability after median nerve neurolysis.# 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Carpal tunnel syndrome; Median nerve neurolysis; Instability; Pisotriquetral

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

Chirurgie de la main xxx (2014) xxx–xxx

1. Introduction

L’instabilité piso-triquétrale a été évoquée dans la littératuredans le cadre de la pathologie dégénérative. C’est une notion

* Auteurs correspondants.Adresses e-mail : [email protected] (A. Caubère),

[email protected] (M.K. Nguyen).

Pour citer cet article : Caubère A, et al. Existe-il une instabilité piso-trétrospective à propos de 55 cas. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10

http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.05.0051297-3203/# 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

relativement nouvelle pour cette articulation qui susciteactuellement un intérêt.

En dehors des éléments « intrinsèques » : capsule articulaire,ligaments piso-métacarpien, piso-hamatal et piso-triquétraux,il existe des éléments « extrinsèques » dont le rétinaculum desfléchisseurs (RF). Ce RF est sectionné sur toute sa hauteurlors de la neurolyse du nerf médian au poignet. La section dece rétinaculum soulève la question suivante : existe-il une

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Fig. 1. Grinding Test ou manœuvre de ballottement de Dumontier (Examenclinique des traumatismes ligamentaires du poignet. Maîtrise Orthopédiqueno 49 – décembre 1996).

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instabilité piso-triquétrale après la neurolyse chirurgicale dunerf médian ?

2. Anatomie

Le pisiforme est un des huit os du carpe. C’est le seul os ducarpe qui reçoive des insertions tendineuses. Sa position estantérieure aux autres os du carpe. Il a la forme d’une demi-sphère. Sa face postérieure est légèrement concave, elle estrecouverte de cartilage et s’articule avec le triquétrum, dont lasurface articulaire est ovalaire à grand axe vertical, légèrementconvexe et déjetée en avant. Cette articulation est de typeellipsoïde et ne possède pas de stabilité primaire. La faceantérieure du pisiforme est convexe et elle est complètementrecouverte d’attaches fibro-tendineuses. Ces structures incluentle flexor carpi ulnaris (FCU), le RF, l’abductor digiti minimi(ADM), le rétinaculum des extenseurs, le ligament piso-métacarpien (PM), le ligament piso-hamatal (PH) et le ligamentpiso-triquétral (PT).

Le tendon du FUC et le muscle ADM forment une structurecontinue. Avec le RF et le rétinaculum des extenseurs, ilsfusionnent pour former une nappe fibreuse couvrant entière-ment la face antérieure du pisiforme [1].

Le ligament PH apparaît beaucoup plus court, plus épais etplus solide que le ligament PM. Son insertion dans la partiedistale du pisiforme est plus latérale que celle du ligamentPM. Ses fibres sont orientées vers le bas et latéralement [1,2].Le ligament PM est plus long et plus fin que ligament PH.Il est dans un plan plus profond que l’ADM, il prend sonorigine à la face postérieure et distale du pisiforme et setermine distalement à la base du 5e métacarpien [1,2]. Cecomplexe ligamentaire PH et PM fait l’objet de variationsanatomiques [3].

Le RF est une structure résistante. Du côté radial, il s’insèresur le tubercule du scaphoïde et le tubercule du trapèze ; ducôté ulnaire, il s’insère sur le pisiforme, l’hamulus del’hamatum et le ligament PH qui les unit. Il participe aurenforcement de la capsule de l’articulation piso-triquétrale enavant et en arrière. En effet, cette capsule articulaire est unestructure lâche qui forme la pièce maîtresse sur laquelles’appuient la plupart des insertions ligamentaires. Ceséléments ligamentaires participent à la stabilité du pisiformelors des mouvements du poignet dans les différents plans del’espace. De plus, le RF contribue à lutter contre la traction duFCU, qui tend à déplacer le pisiforme proximalement etmédialement. Une section du RF pourrait donc être à l’origined’une instabilité de l’articulation piso-triquétrale, tant dans leplan frontal que le plan sagittal.

3. Patients et méthode

Il s’agit d’une étude rétrospective de 45 patients opérés d’unsyndrome du canal carpien sur une période allant dedécembre 2005 à mars 2009. Dix patients présentaient uneforme bilatérale, 31 avaient un syndrome du canal carpien ducôté dominant et 4 avaient été opérés du côté non dominant. Dixpatients avaient été opérés des deux côtés, il y avait donc

Pour citer cet article : Caubère A, et al. Existe-il une instabilité piso-trétrospective à propos de 55 cas. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10

55 poignets disponibles pour l’étude. La technique consistait enune neurolyse du nerf médian sous anesthésie locale à ciel ouvert.

Les données cliniques avaient été recueillies au plus grandrecul par l’interrogatoire cherchant une douleur spontanée dubord ulnaire du poignet opéré, une douleur à l’appui palmaire,la présence des paresthésies dans le territoire ulnaire.

L’examen clinique cherchait une douleur à la mobilisationpar la manœuvre de ballottement de Dumontier ou GrindingTest (Fig. 1) ; ce test consiste à réveiller une douleur parballottement du pisiforme, le poignet étant en légère flexion etinclinaison ulnaire (détendant ainsi le FCU) [4].

Les éléments paracliniques comprenaient des clichésstandards de poignet en position de face neutre, de face eninclinaisons radiale et ulnaire.

Les angles piso-métacarpiens décrits par Fabre et al. [5]étaient mesurés sur ces clichés de la manière suivante (Fig. 2) :la référence était l’axe du 3e métacarpien, centré à mi-distancede ses corticales ; cet axe venait couper la ligne d’inclinaison dela surface carpienne du radius dans le plan frontal, tracéetangentiellement à la berge antérieure de l’épiphyse radiale ;enfin, le centre du pisiforme était relié au point précédemmentdécrit. L’écart angulaire maximal était évalué par la différenceentre les valeurs extrêmes des angles piso-métacarpiens.

Les autres critères radiologiques étaient ceux définis parVasilas et al. [6] sur un cliché de poignet en profil avec unesupination de 308. Ce type de cliché permettait de dégagerl’interligne piso-triquétral. Leurs critères pour qualifier unesubluxation étaient les suivants : un espace piso-triquétralsupérieur à 4 mm, une perte de parallélisme des surfacesarticulaires supérieure à 208, un décalage des surfaces articulairessupérieur à 15 % de leur surface en distal ou en proximal.

Les critères d’inclusion des patients étaient : l’absence detraumatisme du poignet, l’absence de syndrome douloureux

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Fig. 2. Calcul de l’angle piso-métacarpien en inclinaisons ulnaire (a), neutre (b), et radiale (c) (d’après A. Fabre, La Main 1999). La flèche noire indique l’angle piso-métacarpien.

Tableau 1Angles piso-métacarpiens du côté opéré.

Positionneutre

Déviationradiale

Déviationulnaire

Écartangulaire

Moyenne 62 54 53 11Écart-type 11 11 10 6

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régional complexe, une neurolyse du nerf médian au poignetpar la chirurgie à ciel ouvert.

4. Résultats

4.1. Résultats cliniques

Il s’agissait d’une étude rétrospective de 45 patients opérés dedécembre 2005 à mars 2009. Dix patients (22 %) présentaientune forme bilatérale, 31 (69 %) avaient un syndrome du canalcarpien du côté dominant et 4 (9 %) avaient été opérés du côté nondominant. Il y avait 55 poignets disponibles pour l’étude, dont48 féminins, 41 dominants (75 %) et 14 non dominants (25 %).L’âge moyen était de 61 ans et 4 mois. Le recul moyen était de42,38 mois (3–180). La technique consistait en une neurolyse dunerf médian sous anesthésie locale à ciel ouvert.

Sur le plan clinique, seulement 9 % des patients (5 cas sur 55)présentaient au recul des douleurs spontanées du bord ulnaire ducôté opéré. La douleur provoquée à l’appui représentait 8 cas sur55 (14,5 %). Il n’existait de paresthésies dans le territoire ulnairechez aucun patient. À l’examen, le ballottement du pisiformedécrit par Dumontier [4] réveillait une douleur dans 8 cas sur 55(14,5 %). La flexion contrariée avec inclinaison ulnaire n’étaitdouloureuse qu’une fois sur 55 (2 %).

4.2. Analyse des radiographies de face

Les valeurs moyennes de l’angle piso-métacarpien mesuréessur l’ensemble des poignets de notre série étaient les suivantes :

� en position neutre : 62 � 78 ;� en déviation radiale : 54 � 88 ;� en déviation ulnaire : 53 � 68.

L’écart moyen entre la valeur la plus élevée et la valeur laplus basse des trois secteurs angulaires pour un même patient

Pour citer cet article : Caubère A, et al. Existe-il une instabilité piso-trétrospective à propos de 55 cas. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10

était de 11 � 58. La moyenne était équivalente à celle de la sériede poignets sains décrite par Fabre et al. [5]. Aucune valeur n’adépassé la limite de 218 décrite par les mêmes auteurs.

Les valeurs moyennes de l’angle piso-métacarpien mesuréessur l’ensemble des poignets opérés et des poignets non opérésdans notre série étaient équivalentes (Tableaux 1 et 2).

La moyenne de l’écart angulaire entre la valeur la plusélevée et la valeur la plus basse des trois secteurs étaitéquivalente à celle de la série des poignets sains décrite parFabre et al. [5] (Tableau 3).

4.3. Analyse des radiographies de profil

Pour l’ensemble de la série, l’épaisseur de l’interligne piso-triquétral était inférieure ou égale à 2 mm. Le parallélisme dessurfaces articulaires était respecté dans 100 % des cas et iln’existait aucun décalage proximal ou distal des surfacesarticulaires. Trois cas présentaient de l’arthrose piso-triquétrale : deux cas sur poignets opérés, un cas sur poignetnon opéré.

5. Discussion

L’instabilité de l’articulation piso-triquétrale a été évoquéedans la littérature dans le cadre de la pathologie dégénérative[7–14]. Récemment, Rayan a abordé le thème de l’instabilitépiso-triquétrale dans le cadre du pisiform ligament complexsyndrome (PLCS) et de l’arthrose piso-triquétrale [14].

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Tableau 2Angles piso-métacarpiens du côté non opéré.

Positionneutre

Déviationradiale

Déviationulnaire

Écartangulaire

Moyenne 61 55 55 10Écart-type 11 10 9 5

Tableau 3Comparaison des angles piso-métacarpiens et des écarts angulaires.

Positionneutre

Déviationradiale

Déviationulnaire

Écartangulaire

Moyenne côté opéré 62 54 53 11Moyenne côté opéré

avec douleurmobilisation

63 58 56 7

Moyenne côté nonopéré

61 55 55 10

Série Fabre 58 52 50 10

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L’instabilité piso-triquétrale peut être définie comme la pertetransitoire et temporaire des rapports physiologiques entre lesdeux surfaces articulaires du pisiforme et du triquétrum aucours des mouvements du poignet. Cette articulation est de typeellipsoïde, ce qui met le pisiforme en position d’instabilitérelative sur le socle carpien. Il est stabilisé par une chapecomplexe capsulo-tendino-ligamentaire assurant son amarrageaux plans sous-jacents [1–3]. Le FCU induirait une instabilitéavec une tendance à déplacer le pisiforme proximalement etmédialement. La présence du RF, structure la plus importantedu versant latéral du pisiforme [2], contribue à compenser latraction du FCU. Il a été décrit [10,15] des casd’ « augmentation de mobilité » du pisiforme après sectiondu RF, voire une subluxation du pisiforme, sans que cetteaugmentation de mobilité ait été mesurée. La rupture desligaments distaux (PM, PH et PT) au décours d’un traumatismede la main ou de microtraumatismes répétés pourrait induireune instabilité piso-triquétrale [16,17].

La douleur centrée sur le pisiforme est le maître symptômetrouvé dans toutes les pathologies piso-triquétrales. La douleurpeut être localisée sur l’aire pisiformienne ou située pluslargement sur le bord ulnaire du poignet [14]. Outre la douleur,des paresthésies ulnaires peuvent être l’expression de cetteinstabilité [14] ; dans notre série, aucun patient ne présentait deparesthésies ulnaires.

L’examen cherchait une douleur spontanée ou provoquée parl’appui ou par la mobilisation du pisiforme avec la manœuvre deballottement décrite par Dumontier [4], pour diagnostiquer lePLCS [14]. Cette manœuvre est intéressante pour juger d’uneinstabilité symptomatique piso-triquétrale. Cependant, elle n’estpas un critère pathognomonique, du fait de la richesseanatomique de cette région. Aucun signe n’a été décrit commeassocié à cette pathologie dans la littérature compte tenu de sarareté. Nous avons choisi d’utiliser des critères qui sontcouramment utilisé en orthopédie pour juger de l’instabilitéd’autres articulations (douleur et testing ligamentaire). Dans

Pour citer cet article : Caubère A, et al. Existe-il une instabilité piso-trétrospective à propos de 55 cas. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10

notre série, cinq poignets (9 %) étaient douloureux spontanémentet huit poignets (14,5 %) étaient douloureux au testing.

Sur le plan radiographique, compte tenu de la positionantérieure du pisiforme et de la concavité antérieure du massifcarpien, l’articulation piso-triquétrale échappe aux incidencesclassiques de face et de profil. En 1960, Vasilas et al. [6]proposaient une étude à partir d’une série de 48 poignets sains.L’interligne piso-triquétral était dégagé par un profil du poignetassocié à 308 de supination [18] ; Gardner-Thorpe et Giddinsdéfinissaient ainsi les critères cités plus haut pour qualifier unesubluxation du pisiforme.

En 1999, Fabre et al. proposaient une étude sur une série de30 poignets sains [5]. Leur étude consistait à mesurer lessecteurs angulaires entre l’axe du 3e métacarpien qui venaitcouper la tangente à la surface carpienne du radius dans le planfrontal en un point d’intersection et l’axe passant par ce pointd’intersection et le centre du pisiforme (Fig. 2). Ils mesuraientcet angle piso-métacarpien sur les trois incidences : de face enposition neutre, de face avec déviation radiale et de face avecdéviation ulnaire. Ces auteurs ne proposaient pas de retenir nonpas les valeurs angulaires de ces trois déviations, car il existaitune certaine variabilité. Pour qualifier une course physiolo-gique du pisiforme comme normale, ils proposaient de retenirun écart angulaire entre les valeurs extrêmes, qui devait êtreinférieur à 218. Dans la même série, les auteurs avaient mesurésur ces poignets sains les critères de Vasilas et les avaientconfirmés [5].

Dans notre série, pour l’ensemble des poignets opérés et nonopérés, tous les critères de Vasilas étaient normaux. L’interligneavait une épaisseur inférieure à 4 mm, un parallélisme conservéet il n’existait pas de décalage proximal ou distal. Concernantles angles piso-métacarpiens, pour les trois déviations, nosvaleurs étaient supérieures à celles rapportées par Fabre et al.[5] pour l’ensemble des incidences, mais l’écart angulaire desvaleurs extrêmes était normal (< 218) pour l’ensemble dessituations : patients opérés ou non, présence de douleur à lamobilisation au recul (Tableau 3). Les résultats de cette sériemontraient que, selon les critères de Vasilas et al. et ceux deFabre et al., il n’existait pas d’instabilité radiologique induitepar la neurolyse du nerf médian au poignet.

Rayan [14] évoquait trois stades radiologiques pourl’instabilité PT sur l’incidence de profil défini selon Vasilaset al. [6] :

� stade I : absences de modifications radiologiques ;� stade II : avec lésions, mais sans subluxation ;� stade III : luxation PT.

Cette classification pourrait nous faire évoquer la possibilitéd’une relative instabilité induite par la neurolyse du nerfmédian au poignet sans que ce phénomène soit visible ni sur lesclichés de profil à 308 de supination, ni sur l’écart angulaire desangles piso-métacarpiens.

Certains auteurs [19,20] ont étudié la cinétique du pisiformein vivo, mais les mesures obtenues étaient millimétriques etdifficilement reproductibles pour étudier une série de patients.

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6. Conclusion

Au terme de notre étude, il semble ne pas exister d’instabilitépiso-triquétrale après une neurolyse du médian au poignet. Lescritères retenus par ces auteurs pour qualifier une instabilitépiso-triquétrale étaient restés normaux. Rayan [12] estimenéanmoins qu’il peut exister un « pisiform ligament complexsyndrome » infraradiologique. Ce syndrome serait une entitépathologique du complexe piso-triquétrale s’étendant del’instabilité jusqu’à l’arthrose piso-triquétrale.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

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Pour citer cet article : Caubère A, et al. Existe-il une instabilité piso-trétrospective à propos de 55 cas. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10

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