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TEODORA CRISTEA

GRAMMAIRE FRANAISELE NOM ET LE GROUPE NOMINAL LE VERBE ET LE GROUPE VERBAL Deuxime dition

Descrierea CIP a Bibliotecii Naionale a Romniei

CRISTEA, TEODORAGrammaire franaise: le nom et le groupe nominal, le verbe et le groupe verbal. / Teodora Cristea. Bucureti, Editura Fundaiei Romnia de Mine, 2005 284 p.; 20,5 cm Bibliogr. ISBN 973-725-469-4 811.133.136(075.8) 811.133.1367.622(075.8) 811.133.1367.625(075.8)

Editura Fundaiei Romnia de Mine, 2006

Tehnoredactor: Marcela OLARU Coperta: Marilena BLAN Bun de tipar: 25.01.2006; Coli tipar: 17,75 Format: 16/6186 Splaiul Independenei, Nr. 313, Bucureti, S. 6, O. P. 83 Tel./Fax.: 316 97 90; www.spiruharet.ro e-mail: [email protected]

UNIVERSITATEA SPIRU HARETFACULTATEA DE LIMBI I LITERATURI STRINE

TEODORA CRISTEA

GRAMMAIRE FRANAISELE NOM ET LE GROUPE NOMINAL LE VERBE ET LE GROUPE VERBALDeuxime dition

EDITURA FUNDAIEI ROMNIA DE MINE Bucureti, 2006

SOMMAIRE

Avant propos ...........................................................................PREMIRE SECTION

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LE NOM ET LE GROUPE NOMINAL1. LE NOM 1. 0. Fonctions rfrentielles et communicatives du Nom .. 1.1. La catgorie des noms communs .................................. 1.2. La catgorie de nom propre ......................................... 2. LE GROUPE NOMINAL 2.0. La structure du Groupe Nominal .................................. 2.1. La constellation du noyau nominal .............................. 2.2. Les prdterminants du nom ......................................... 2.3. Les indices nominaux ................................................... 2.4. Les articles (quantifiants bipolaires) ............................ 2.4.0. Larticle dfini .................................................... 2.4.1. Larticle indfini ................................................. 2.4.2. Larticle zro ...................................................... 2.4.3. Les dmonstratifs ............................................... 2.4.4. Les possessifs ..................................................... 2.4.5. Les quantifiants .................................................. 2.4.6. Les identifiants .................................................. 2.4.7. Les prdterminants interro-exclamatifs ........... 2.4.8. Le prdterminant relatif .................................... 24 25 25 28 31 33 39 52 61 66 76 84 88 895

12 13 16

2.5. Le Groupe Nominal tendu ......................................... 2.5.0. Caractristiques du GN tendu ........................... 2.5.1. Types de qualifiants nominaux ........................... 2.5.2. Relativisation et pithtisation ........................... 2.5.3. La proposition relative ....................................... 2.5.4. Le GN pithtique .............................................. 2.5.5. Lpithte dtache ............................................. 2.5.6. Lpithte prpositionnelle ................................. 2.5.7. Le nom pithte: le GN appositionnel ................ 2.5.8. Le GN prpositionnel: le complment du nom .. 2.5.9. Le GN conjonctionnel ....................................... 2.5.10. Le GN infinitival ............................................. 3. LES SUBSTITUTS DU GROUPE NOMINAL 3.0. La classe des pronoms ................................................ 3.1. Substituts diaphoriques/substituts dictiques ............... 3.2. Les pronoms personnels .............................................. 3.2.0. Traits morphosyntaxiques des pronoms personnels .......................................................... 3.2.1. Les formants du pronom personnel franais ...... 3.2.2. Le statut des pronoms personnels franais ......... 3.3. Les pronoms dmonstratifs ........................................ 3.3.0. Les formants des pronoms dmonstratifs ........... 3.3.1. La distribution des pronoms dmonstratifs ........ 3.3.2. Les fonctions des pronoms dmonstratifs .......... 3.3.3. Les valeurs des pronoms dmonstratifs .............. 3.4. Les pronoms possessifs ................................................ 3.4.0. Les formants des pronoms possessifs ................ 3.4.1. Emplois des pronoms possessifs ........................ 3.5. Les pronoms interrogatifs ............................................. 3.5.0. Les formants des pronoms interrogatifs ............. 3.5.1. Emplois des interrogatifs .................................... 3.6. Les pronoms relatifs ..................................................... 3.6.0. Les formants des pronoms relatifs ..................... 3.7. Les pronoms quantifiants .............................................6

94 94 95 96 97 103 120 122 123 124 131 134

139 139 141 141 143 144 164 164 165 169 170 171 171 172 172 172 175 177 177 183

3.7.0. Les quantifiants numriques .............................. 3.7.1. Les quantifiants non numriques ........................ 3.8. Les pronoms identifiants .............................................. 3.8.0. Les valeurs rfrentielles des identifiants .......... 3.8.1. Les identifiants comparatifs ............................... 3.8.2. Les indfinis .......................................................

183 184 186 186 186 187

DEUXIME SECTION

LE VERBE ET LE GROUPE VERBAL1. LE VERBE 1.0. Le systme verbal franais ........................................... 1.0.0. Le sous-systme fondamental: modes et temps .. 1.0.1. Le sous-systme priphrastique ......................... 2. LES CATGORIES VERBALES 2.0. Les catgories spcifiquement verbales ....................... 2.1. Laspect ........................................................................ 2.1.0. Laspect grammatical ......................................... 2.1.1. Laspect lexical ................................................... 2.2. Le temps ....................................................................... 2.2.0. La reprsentation du temps ................................. 2.2.1. Temps dictiques/temps anaphoriques ............... 2.2.2. Valeurs temporelles fondamentales des temps verbaux de lindicatif .......................................... 2.2.3. Distribution relationnelle des temps verbaux ..... 2.3. Le mode ....................................................................... 2.3.0. Mode et modalit ................................................ 2.3.1. Les formes modales ............................................ 208 209 209 213 217 217 220 221 227 238 238 240 193 193 206

7

2.4. La voix (la diathse) .................................................... 2.4.0. La catgorie de la voix ......................................

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3. LA CLASSIFICATION SYNTAGMATIQUE DES VERBES FRANAIS 3.1. Traits contextuels du verbe franais ............................ 270

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AVANT - PROPOS

S'attachant l'tude des deux constituante fondamentaux de la phrase franaise, le Groupe Nominal et le Groupe Verbal, le prsent manuel essaie de rendre compte de la varit des expressions, mais aussi de la rgularit des esembles. Un choix mthodologique a t fait ds le dpart: pas danalyse grammaticale sans recours au sens, un rle prpondrant revenant, dans lapprentissage, la comprhension des structures significatives. Aussi, a-t-on insist sur les formes et leurs valeurs dans le systme, aussi bien que sur leur emploi dans des units de rang suprieur. Divis en deux sections correspondant aux deux constituants analyss: le GN et le GV, le manuel prsente une structure qui rpond une dmarche dductive: chaque chapitre souvre par une partie qui prend pour point de dpart les donnes fondamentales, pour aboutir la mise en vidence des rapports qui sinstaurent entre les lments constitutifs du groupe analys; les ides retenir donnent lessentiel de ce que lon doit apprendre et servent daide-mmoire; des rfrences bibliographiques spcialises compltent chaque chapitre en vue de faciliter les investigations personnelles. Lanalyse que nous proposons est essentiellement oriente vers la solution des difficults souleves par lacquisition des structures spcifiques du franais contemporain. Dune manire gnrale, elle vise dvelopper la connaissance des sous-systmes et de leur fonctionnement dans le discours, en contribuant ainsi une meilleurs utilisation de la langue franaise.9

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PREMIRE SECTION

LE NOM ET LE GROUPE NOMINAL

1. LE NOM Dfinition: syntaxiquement, le nom est le centre (la tte) du Groupe Nominal; rfrentiellement, le nom est un signe qui renvoie des tres (enfant, chat), des choses (maison, crayon) des actions (arrive, dpart), des sentiments (amour, fidlit), des ides, des facults psychiques (imagination, pense), des qualits (beaut, intelligence), des phnomnes (orage, pluie), des vnements (rvolution, guerre); smantiquement, le nom est caractris par des traits inhrents de nature oppositionnelle runissant un terme positif et un terme ngatif: Nom Trait [ Commun] [ Collectif] [ Anim] [ Humain] [ Sexu] [ Mle] [ Masculin] [ Matriel] [ Dnombrable] + table troupeau chien tudiant biche lapin livre table chaise Marie vache table chat carpe hase gomme bont beurre

Certains de ces traits sont redondants, en ce sens que la prsence dun trait implique ncessairement la prsence dun autre trait; on peut par consquent appliquer les rgles de la rduction de la redondance. Ainsi, le trait [+ humain] implique le trait [+anim], etc.11

Le rgime des dterminants nominaux et des substituts est command par ces traits inhrents du substantif: ainsi, lopposition dnombrable/indnombrable dcide du choix du prdterminant nominal: un substantif caractris par le trait [ dnombrable] ne permet pas lemploi des quantitatifs numriques, lopposition humain/non humain rgit le choix entre le possessif et en, ou entre le pronom personnel tonique et en, y, etc. Lappartenance du substantif lune ou lautre des classes smantiques mentionnes se manifeste aussi par des contraintes syntaxiques au niveau des constituants de la proposition: la fonction grammaticale nest pas indiffrente la nature thmatique du substantif. Ainsi, si le locuteur dispose dun substantif anim et dun substantif non anim, il fera figurer le plus souvent le premier de ces deux substantifs dans le groupe nominal primaire (sujet) et le second dans le groupe secondaire (complment) (J. DUBOIS et L. IRIGARAY, 1966). 1.0. Fonctions rfrentielles et communicatives du Nom Le GN renvoie un objet de la ralit; cette fonction est la fonction dnominative, qui est une relation signe chose et en tant que telle elle est une composante de la fonction rfrentielle ou tout simplement de la rfrence. Le rfrent sinstitue comme un intermdiaire entre un lment du monde extralinguistique dnomm par lentit linguistique GN et cet lment. La relation entre les entits linguistiques et les objets du monde, rels ou imaginaires, concrets ou abstraits, est une ralit mdiate, car la rfrence nest pas faite un objet rel mais un objet de pense, cest un concept mdiateur entre lexpression linguistique et la chose : Limage acoustique table voqe seulement une reprsentation schmatique de la chose. Si je dis : Demain je vais acheter une table, je ne sais pas encore comment sera exactement la table que jachterai. Table voque la catgorie. Et si je dis. Hier jai achet une table, je sais bien moimme, comment est cette table en ralit, mais mon interlocuteur ne le sait pas, et, dans son esprit, nest voque que la catgorie (K. BALDINGER, 1984 :5). Dans le premier cas, si lon nvoque que la catgorie, on parle de rfrence virtuelle et dans le second de rfrence actuelle. Dans la12

bibliographie spcialise on fait une distinction trs nette entre lopration de dnomination et celle de dsignation. Pour quil y ait relation dnominative, il faut quun lien durable et constant sinstaure entre les deux entits mises en relation per lintermdiaire du rfrent. Cette association rfrentielle est obligatoire, une fois instaure lintrieur dune langue naturelle donne, les sujets qui parlent cette langue sont obligs de nommer lobjet par lunit linguistique Y. Une table ne peut tre appele table si lobjet en question na pas t nomm au pralable table. La dsignation ne se soumet pas cette contrainte, elle peut tre momentane et contingente : on peut dsigner une table par le meuble le plus prciseux de tous les meubles de cette maison. Outre cette perspective dsignative essentiellement discursive, le GN peut fonctionner diffremment suivant la stratification de la langue : il existe ainsi des dnominateurs marqus du point de vue socioculturel : voiture (fr. courant) / bagnole (fr. familier), pomme de terre (fr. courant) / patate (fr. familier) etc. 1.1. La catgorie des noms communs Les noms communs sorganisent smantiquement suivant les oppositions qui peuvent tre reprsentes par le schma v.p. 14. La distinctions entre noms dnombrables (comptables) et indnombrables (non comptables, massifs) est fonde sur deux proprits: la proprit de division homogne (dans le cas des noms massifs) et non homogne (dans le cas des noms comptables) : si lon prlve une certaine quantit deau cest toujours de leau, si lon prlve la partie dune voiture (les roues, le volant, les pneus) ce nest plus une voiture; la proprit daddition homogne (pour les massifs) et non homogne (pour les comptables) : si lon ajoute de leau de leau cest toujours de leau, si lon ajoute une voiture une autre voiture, cest deux voitures. Deux situations doivent tre prises en compte, avec des consquences distinctes sur lemploi de larticle: le transfert du massif au comptable:13

14

On peut retenir comme exemples des objets dsigns par la matire dont ils sont fabriqus; le nom tant accompagn de larticle dfini ou indfini, au singulier ou au pluriel: Des sucres morceaux de sucre Les nickels dune voiture Des porcelaines (vases, assiettes en porcelaine) Placer des fers au bout de ses semelles pour les protger (DFC) Fer repasser, friser les cheveux, fer cheval, fer de lance, etc. Le nom conserve le genre initial, ce qui pourrait justifier la thse suivant laquelle la base dune mtonymie il y a une ellipse: boire un cognac, boire une prunelle. le transfert du comptable au massif, avec emploi correspondant de larticle massif. Cest le cas, par exemple, du taxme des viandes de boucherie : du veau, du boeuf, du mouton, etc. Les noms comptables employs mtonymiquement donnent lieu plusieurs interprtations : ainsi, le nom indique: une proprit spcifique: Il y avait de la paysanne en elle (Simenon) une pluralit indfinie: Il y avait du soldat dans les rues. une quantit indfinie: Il y avait du scandale en lair un objet broy (une bouillie homognisante) (G.KLEIBER, 1994: 107). Il y a de loeuf sur ta cravate. une massification qualitative: a cest de la bagnole! (mlioratif) Dans certains cas il y a transfert successif du comptable au massif et du massif au comptable: un vison (animal) du vison (fourrure) un vison (manteau de vison) Lopposition concret/abstrait traduit linguistiquement la distinction ce qui est peru par les sens (concret) ce qui nest pas peru par les sens. Les noms concrets rfrent des objets physiques, tandis que les noms abstraits dnotent des entits idologiques.15

Ces oppositions se manifestent sur le plan grammatical dans les combinaisons avec la catgorie du nombre et le choix des prdterminants; les noms abstraits, en tant quindnombrables, refusent le pluriel et admettent le partitif: Il faut du courage. Il a de la patience. Par emploi mtonymique, les abstraits peuvent tre recatgoriss et admettre un article discontinu (indfini) et mme un dnombrant: Ctait une vraie beaut. Le convoi qui allait Bruxelles a rencontr le ntre. Rien deffrayant comme les deux rapidits qui se ctoyaient. (Hugo) Au pluriel, les noms massifs expriment la grande quantit (les sables mouvants, les eaux, les neiges) ou la diversit (les viandes, les soies). 1.2. La catgorie de nom propre Le principal critre invoqu pour dfinir les noms propres a t lunicit du rfrent. Mais on a fait observer que les dictiques (Admirez cette toile) et les descriptions dfinies (Lactuel prsident de la Rpublique) renvoient un rfrent unique et ne sont pas pour autant des noms propres. S.KRIPKE (1972) a propos une nouvelle conception du nom propre grce laquelle on peut le distinguer des dictiques et des descriptions dfinies. S.KRIPKE dsigne par le terme de dsignateur accidentel une expression dont le rfrent varie avec le monde de rfrence. Ainsi, lexpression le prsident de la Republique peut sappliquer aussi bien Mitterrand qu Chirac, Cest donc une expression qui ne dsigne pas la mme personne dans tous les mondes possibles. Le dsignateur rigide est une expression dont le rfrent est le mme quel que soit le monde envisag : le rfrent de Mitterrand ou celui de Chirac ne varient pas. Les noms propres sont donc des dsignateurs rigides. La classe des noms propres ou des noms que lon considre comme des noms propres est assez htrogne, elle runit sous la mme tiquette des dsignateurs rigides (anthroponymes ou toponymes), des prolongements des noms propres (noms de produits)16

et certains dictiques qui par leurs comportement syntaxique se rapprochent des noms propres. Ces diffrentes catgories de noms propres peuvent tre reprsentes par le schma suivant :Noms propres [+Anim] [+Collectif] non dictiques [-Collectif] dictiques (appellatifs) [+Espace] [-Anim] [+Temps] [+Institution]

non dictiques

dictiques

Les Valois Les Bonaparte Les Dubois

Marie

Papa

Paris

Marc

Maman

La France La Bretagne

La Renaissance Le Moyen Age

Lundi

OTAN

Septembre Nol Pques

CNRS

Legrand

Tonton

CGT

Du point de vue grammatical, les noms propres se caractrisent par des particularits concernant lemploi de larticle. Une sous-classe de noms propres ne demandent pas la combinaison avec un article pour pouvoir tre intgrs dans une phrase: Hlne mattendait la porte de latelier. (Beauvoir) Rennes, aprs Tours et Besanon, a accueilli dans les locaux de la nouvelle Facult de droit un institut dt pour professeurs de franais aux Etats-Unis. (Le Franais dans le Monde) Midi tait comme une fte, sur le boulevard. (Boileau-Narcejac) Juin passa sans nouvelles. Septembre a t bien triste cette anne.17

Lopposition /vs/Pd est conditionne, dans le cas des noms autodfinis, par des facteurs dordres diffrents. Elle peut apparatre comme obligatoire tant dicte par le thme du substantif, comme une variation smantique, grammaticale (contextuelle) ou stylistique (registre de langue). Elle revt des aspects diversifis suivant le trait inhrent du nom considr. Pour ce qui est des noms propres de personnes, lopposition /vs/Pd se prsente de la manire suivante : cest une opposition dicte par le thme du nom. Il existe ainsi des noms de personnalits, le plus souvent dorigine italienne, qui sont obligatoirement accompagns par un article dfini : Le Dante, Le Tasse, La Patti, Le Corrge, La Callas, etc.; cest une opposition smantique Employ avec article, un nom de personne peut devenir nom commun pour indiquer un produit ou une uvre: une Renault, un Larousse, un Farman, etc. Employs au pluriel, avec un article dfini, les noms de personnes indiquent les membres dune famille : les Dupont, les Goncourt, les Bourbons, etc. : Il ntait pas question de faire un scandale chez les Noland. (Simenon) Devant un nom propre clbre, larticle indfini peut marquer la constitution de toute une classe : Le matre devenait alors un Platon, un Snque. (Maurois) Larticle indfini devant un nom propre de personnage clbre peut avoir une valeur emphatique : Savoir quun Marc-Aurle, un Goethe, un Victor Hugo ont vcu grandement vous aidera vous-mme viser haut. (Maurois) cest une opposition grammaticale La prsence dun dterminant non obligatoire auprs dun nom propre de personne entrane ncessairement la prsence dun Pd : James Dean fut le Shelley de la culture de masse. (Maurois)18

Et elle sassit auprs de ce Patrick qui semblait si mu, si empress. (Boileanu-Narcejac) cest une opposition de registre de langue Dans le style familier et populaire, les noms propres semploient souvent avec un article dfini : Y a Gabriel qua gard la Zazie! (Queneau) On distingue deux groupes demplois mtonymiques des noms propres de personne : celui des noms qui dsignent les actes et les vnements typiques pour un individu familier au locuteur : Cette plaisanterie cest du Marie tout crach. celui o le nom propre dsigne loeuvre : Il joue du Mozart. Il lit du Colette. On voit par les exemples ci-dessus que le genre basique de ces noms nexerce aucune influence sur le genre du nom mtonymique. Lemploi du masculin est expliqu par la recatgorisation du nom en inanim, ce qui entrane le genre arbitrare, le masculin. Quant lopposition massif/comptable, elle nest pas totalement arbitraire ; la musique et loeuvre littraire sont perues comme des entits homognes, massives et lon a plutt du Mozart, du Balzac tandis que loeuvre artistique est perue comme une entit dnombrable et lon a plutt un Matisse, un Rodin (G. KLEIBER 1994 : 95). Les noms propres gographiques connaissent les mmes diffrenciations daprs lopposition /vs/Pd : opposition dicte par le thme du nom. Il existe ainsi plusieurs sous-classes de noms gographiques qui prsentent des particularits demploi des prdterminants : les noms de villes Ces noms ne saccompagnent pas normalement dun article ou dun autre Pd : Derrire les arbres, Paris jetait au ciel un immense reflet rose. (Boileau-Narcejac)19

Il existe pourtant certains noms de villes qui sont prcds dun article dfini : Le Havre, La Havane, Le Caire, Les Laumes, La Haye, La Rochelle etc. : De la, un avion Transall a assur le retour de Ramss II au Caire. (Nouvelles de France) les noms de montagnes, de rivires, de lacs, de caps sont toujours prcds dun article dfini : les Carpates, la Seine, le Lman, le Horn, etc. : La zone de moyenne montagne (...) contient des essences adaptes au sol et au climat : chnes pubescents dans les Cvennes, pins sylvestres en Haute Loire, dans le Cantal et dans les Vosges, sapins et picas dans le Jura. (Nouvelles de France) Sa terre tient comme un crin le cours de la Garonne. (Femmes daujourdhui) les noms des continents et des pays doivent tre prcds dun article dfini : lAfrique, lAsie, lEurope, etc., la France, le Japon, la Hongrie, la Suisse, etc. : LEurope telle quon tente de lamnager est donc un mythe. (Bulletin critique du livre franais) Le Danemark, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg font lobjet dune analyse gnrale comme lIrlande, la Grande-Bretagne dune analyse par rgions. (Bulletin critique du livre franais) Aprs la prposition de, il existe parfois variation libre /article dfini : Les sommets, les grandes Alpes de Suisse, dItalie, de France se situent au cur mme de ce livre (Bulletin critique du livre franais) les noms darchipels, de grandes les et certains noms dles situes hors dEurope semploient avec un article dfini; les Hawai, la Sicile, la Crte, la Sardaigne, lIslande, la Guadeloupe, la Martinique, la Jamaque, la Nouvelle Zlande, la Nouvelle-Guine, etc. : une expdition qui a pour but de traverser du sud au nord la Nouvelle-Guine nerlandaise (Bulletin critique du livre franais)

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Certains noms dles ne semploient pas avec un article dfini : Chypre, Cuba, Java, Madagascar (ou le Madagascar), Malte, Sumatra, Rhodes, etc. : ceux qui veulent connatre et visiter Chypre (Bulletin critique du livre franais) Rhodes vous attend. opposition grammaticale dicte par la prsence /vs/ labsence dun dterminant non obligatoire. Comme pour les noms propres de personnes, la prsence dun Dt non obligatoire entrane ncessairement larticle : Le Paris daot sentait les vacances. (Simenon) Tant que Rome a t la Rome des hros, elle est reste florissante. (Maurois) Tahiti tient la plus grande place et les photos qui lui sont consacres sont parmi les plus belles, surtout celles des paysages. Mais la Tahiti moderne tient peu de place, sans doute cause de son manque de pittoresque (Bulletin critique du livre franais) Linterprtation mtonymique des noms propres gographiques est guide par la prsence de larticle massif ou par les articles dfini ou indfini. Le toponymique dsigne des produits : des vins et des boissons : du bordeaux, du champagne, du cognac, du calvados, du bourgogne etc. des fromages : du gruyre, du brie, du roquefort, du camembert, etc. des tissus : du cachemire, du tulle, du jersey, etc. des objets fabriqus : un vieux Svres, de la faence, etc. Les noms dfinis dans la circonstance sont des dictiques, en ce sens que leur dcodage dpend des instances du discours. Parmi ces noms il faut distinguer les noms de personnes appellatifs et des noms qui expriment des divisions du temps. Les appellatifs : papa, maman, tonton, tata, monsieur, madame, mademoiselle, etc. semploient sans article lorsquils renvoient aux conditions du message : Maman est venue (la maman du celui qui parle) Si ces noms sont accompagns dun article, ils ne sont plus des dictiques et deviennent des noms communs :21

La maman du petit Georges est venue. Les noms qui indiquent des divisions du temps, les noms des mois de lanne, des jours de la semaine, les substantifs midi, minuit sont des dictiques et en tant que tels ils nont pas besoin dun Pd pour constituer un syntagme nominal : Janvier fut trs froid cette anne. Minuit a sonn. Nol tombe un samedi cette anne. Lopposition /article correspond dans le cas de cette sousclasse de noms une opposition smantique : devant les noms des jours de la semaine, larticle dfini exprime la rptition, tandis que lindfini a le rle dindiquer une date indtermine : Le muse est ferm le lundi. (tous les lundis) Je serai chez moi un lundi. (un lundi quelconque). Fonctions et classes smantiques du Nom Ides retenir Le Nom est linstrument de la dnomination, opration par laquelle une expression linguistique est mise en relation avec un OBJET extralinguistique, par lintermdiaire du rfrent. Ces rfrents appartiennent au monde physique (objets concrets) ou au monde idologique (objets abstraits). La rfrence peut tre actuelle si le nom renvoie un objet prcis ou virtuelle si cest la classe tout entire qui est voque. Le Nom est caractris par des traits inhrents (smanticosyntaxiques) qui sorganisent en couples oppositionnels, qui ont des rpercussions grammaticales (contraintes dans le choix des articles et dans la pronominalisation). La distinction entre noms dnombrables (comptables) et indnombrables (non comptables, massifs) est fonde sur la proprit de division et daddition homogne pour les massifs et non homogne pour les dnombrables. Cette opposition se manifeste sur le plan grammatical par la combinaison avec le morphme de nombre (les indnombrables, concrets ou abstraits refusent le pluriel numrique et larticle indfini : ils admettent le partitif : du sable, du courage). Les noms peuvent tre recatgoriss : il y a ainsi transfert du massif au comptable (du sucre des sucres, du cuivre des cuivres)22

et du comptable au massif (un veau du veau). La combinaison dun nom massif avec le pluriel correspond des valeurs smantiques particulires : grande quantit (les eaux, les neiges, les sables mouvants) ou la diversit (les viandes, les soies). Le nom propre est un nom rfrent unique, stable, qui dsigne le mme objet, quel que soit le monde possible envisag. Cest un dsignateur rigide ; la diffrence du dsignateur rigide, le dsignateur accidentel est une expression dont le rfrent varie avec le monde de rfrence (le prsident de la Rpublique est un dsignateur accidentel, Mitterrand, Chirac sont des dsignateurs rigides). La classe des noms auxquels on attribue le statut de nom propre est htrogne : elle comprend des dsignateurs rigides (anthroponymes et toponymes), des prolongements de ces noms propres (produits, oeuvres artistiques), certains dictiques (appellatifs, noms des divisions temporelles, de ftes). La principale caractristique des noms propres de personnes et de certains toponymes est labsence de prdterminant. La prsence du Pd devient obligatoire si le Groupe Nominal est tendu (le Picasso de la priode bleue). Elle correspond aussi des oppositions smantiques (mtonymies ; une Renault, emphase : un Victor Hugo, etc.). Il existe des catgories de noms propres gographiques qui nont pas darticles : les noms de villes, de certaines les loignes, mais le Pd devient obligatoires si le GN est tendu : la Rome des hros. Les toponymes peuvent devenir des noms communs par mtonymie : du Calvados, un vieux Svres. Certains dictiques (appellatifs, divisions temporelles, noms de ftes) sont traits comme des noms propres et ne comportent pas de Pd. Devant les noms des jours de la semaine, larticle dfini marque la rptition (le lundi le magasin est ferm) ou une date indtermine (Je serai chez moi un lundi).RFRENCES BIBLIOGRAPHIQUES Baldinger, K., 1984, Vers une smantique moderne, Paris, Klincksieck Kleiber, G., 1994, Nominales.Essais de smantique rfrentielle, Paris, PUF Molino, G., 1982, Le nom propre dans la langue, Langages, no.66, p. 5-30 Recanati, F., 1983, La smantique des noms propres : remarques sur la notion de dsignateur rigide, Langue Franaise, no.5, p. 106-118 23

2. LE GROUPE NOMINAL

2.0. La structure du Groupe Nominal La structure du GN peut tre simple (GN minimal) ou complexe (GN tendu). Rduit sa plus simple expression le GN est un nom : Marie est partie hier. Paris est la capitale de la France. Il est ingnieur. Le plus souvent le nom este accompagn dun prdterminant (article, dmonstratif, possessif, indfini, quantitatif etc.) : un jardin, mon jardin, ce jardin quelques personnes, plusieurs personnes Le GN complexe (tendu) est constitu dun nom centre (le dtermin) et dun adjoint (ou dterminant) qui peut tre : un adjectif : un beau soleil les dernires feuilles mortes un autre nom, de construction directe ou prpositionnelle : Bucarest, la capitale de la Roumanie les murs du jardin les feuilles dor une proposition relative : les rochers qui dominent la mer le soleil qui monte un infinitif : le sentiment davoir rusai une proposition conjonctionnelle : Il naimait pas lide quil stait tromp.

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Le GN, quil soit simple ou complexe, peut occuper dans la phrase diffrentes positions correspondant aux diffrentes positions syntaxiques caractristiques : sujet : Le paysage est magnifique. objet direct : Il admire le paysage. objet prpositionnel : Il parle de ce magnifique paysage. complment dun autre nom : la beaut du paysage. 2.1. La constellation du noyau nominal Le GN est une squence ordonne qui runit autour dun noyau nominal des lments qui remplissent deux fonctions essentielles : ce sont des marqueurs dextensit qui dterminent le noyau du point de vue de sa valeur gnrale (extensit large) ou particulire (extensit troite) : ce sont des prdeterminants nominaux. On peut distinguer des GN dfinis qui renvoient un rfrent individualis dans le contexte : Je nai pas lu ce livre et des GN indfinis qui dsignent un ou plusieurs rfrents indiffrencis et appartenant la classe spcifie par le nom: Sur ltagre il y avait un livre et des magazines. ce sont des marqueurs qui servent restreindre lextension du noyau nominal en lintgrant une sousclasse : ce sont des caractrisants : Sur ltagre il avait des livres relis en cuir. 2. 2. Les prdterminants du nom Le franais, comme les autres langues romanes, connat une classe spciale de substituts, les prdterminants nominaux, dont les plus importants, du point de vue de la frquence et des fonctions quils sont appels remplir, sont les articles. Ces units permettent au substantif de fonctionner dans le discours comme syntagme nominal. Linventaire des prdterminante franais comprend les units suivantes : le, ce, mon, du, des, un, aucun, certain, chaque, deux (trois, quatre etc.), diffrents, divers, nul, plusieurs, quelques, tel, tout, maint, force, quel et leurs variantes de genre, de nombre et25

syntagmatiques. A cette liste on pourrait ajouter les prdterminants composs du type je ne sais quel, nimporte quel. Dieu sait quel qui ont les mmes fonctions et les mmes positions que les autres units mentionnes cidessus. Nous devons galement prciser que maint et force sont aujourdhui plus rares dans le discours et appartiennent la nuance littraire du franais contemporain. Syntagmatiquement, les prdterminants (Pd) du nom se caractrisent par les traits suivants : a) leur position antnominale obligatoire : N b) ils ont la facult de fonctionner aussi comme pronoms, avec ou sans modification formantielle : Prdterminants le, la, les un, une du, de la, de, des mon (et var.) ce, cet, cette, ces certain (s) chaque plusieurs aucun nul tout quelque (s) divers, diffrents deux, trois quel, lequel tel Pronoms le, la les, un, une en, des (fam)* le mien (et var.) celui, celle, ceux certains chacun, chaque (fam.et.pop.) plusieurs aucun nul tout quelquun, quelques uns deux, trois lequel, qui, que, quoi tel

* Des apparat comme pronom dans le langage familier : Si jen ai des bloudjinzes, je veux que jen aie. Jen ai mme DES qui sont positivement inusables. (Queneau) 26

c) ces units sont commutables, cest--dire elles peuvent figurer dans le mme point de la chane et lexception de tout, quelques et des prdterminants numriques dfinis qui se combinent avec le, ce, mon (et leurs variantes), les autres sexcluent dans le contexte. 2.2.1. Du point de vue de la fonction quils remplissent, les prdterminants nominaux oprent comme des marques de genre et surtout de nombre, le substantif franais tant, dans la plupart des cas, dpourvu de marques intrinsques. Les reprsentants de lcole guillaumienne voient dans les prdterminants nominaux les instruments de la catgorie de lextensit : leur rle serait en premier lieu celui dexprimer lune des deux valeurs oppositionnelles de cette catgorie : a c t u e l/v i r t u e l. Le substantif comporte en langue une certaine comprhension, en rapport avec la notion quil signifie. Mais son utilisation dans le discours exige un ajustement occasionnel, conforme ce qui est requis pour les besoins de lexpression, de son smantisme de langue. Cet ajustement est appel par G. Guillaume lapprhension du substantif, apprhension extensive ou restrictive () En franais, et en gnral dans les langues romanes, et dans un grand nombre de langues modernes non romanes, lapprhension sexplicite par des pronoms spciaux, adjectivs qui ne substituent pas le substantif, mais seulement certains de ces caractres. Ce sont les articles : larticle proprement dit, qui signifie la dfinition du nom en discours sous le rapport de lextensit, cest--dire de sa saisie en valeur gnrale ou particulire; larticle possessif, qui signifie la rfrence du substantif au systme de la personne : larticle dmonstratif, qui signifie la rfrence du substantif une certaine position spatiale par rapport au locuteur (); certains autres mots pronominaux signifient dautres aspects de lextensit du substantif, chaque, tout, quelque, autre (G.MOIGNET, 1954 : 1415). Il nen est pas moins vrai que cette fonction sest obscurcie en franais contemporain, car le mme prdterminant anaphorique27

(article dfini ou indfini) est apte exprimer lactuel aussi bien que le virtuel : Jai reu hier la visite dUN jeune homme de votre ge (Maurois) UN maire actif fait une ville propre (Maurois) 2. Outre le rle de permettre au substantif dtre intgr dans le discours, les prdterminants expriment par eux-mmes des traits smantiques quils possdent en propre. 2.3. Les indices nominaux Parmi les prdterminants nominaux il existe un groupe dunits, plus restreint, qui sisole par les traits syntagmatiques suivants : a) elles ont des formants spcifiques de pluriel qui consistent en une variation de la base ou de la finale, variation sensible aussi bien dans le code crit que dans le code oral : le, la/les un, une/des du, de la/des ce, cet, cette/ces mon, ma/mes notre/nos b) elles peuvent figurer la deuxime place dans une chane qui renferme le dterminant tout et la premire place devant quelques : tout (et var.) ______ _______ quelques toute LA rgion (toute MA rgion, toute CETTE rgion) CES (MES, LES) quelques livres Ces units, qui prsentent des traits de structure morphologique et syntagmatiques similaires, sont dsignes dans la bibliographie spcialise par le terme di n d i c e s n o m i n a u x, dnomination que leur a valu leur fonction de marquer aussi le genre et le nombre des substantifs dans le discours. On sait que le systme des marques a subi dans le substantif une dgradation qui fait que le substantif28

franais porte rarement des formants intrinsques de genre et de nombre dans le code oral. Du point de vue de leurs formants, les indices nominaux (articles, dmonstratifs, possessifs) prsentent des phnomnes de phontique combinatoire, selon quils sont suivis dun segment initiale vocalique ou dun segment initiale consonantique. En grammaire classique, ces phnomnes sont dsigns par les termes de liaison et lision. Le nombre de variantes rsultes, qui thoriquement est de huit pour larticle et le dmonstratif, se rduit pratiquement six, parce quau pluriel lopposition de genre est annule : Singulier Pluriel + segment vocalique 1 Masculin 2 Fminin 5 Masculin et fminin + segment consonantique 3 Masculin 4 Fminin 6. Masculin et minin

En raison des rgles de la prononciation de le muet (instable, caduc) : si lintrieur dun groupe le muet est prcd dune seule consonne prononce, il tombe, sil est prcd de deux consonnes prononces, il reste les prdterminants le, ce, de se rduisent la consonne non seulement devant les mots qui commencent par une voyelle, mais aussi devant les mots initiale consonantique : Chez le [1] docteur. Dans le [1] verre. Passemoi le[1] pain. Il ny a pas de [d] lait. Il ny a jamais de [d] lait. Il y a beaucoup de [d] monde. Il y a assez de [d] monde. Prenez ce [s] verrel. (M. LON) Les variantes antconsonantiques peuvent apparatre aussi devant certains segments initiale vocalique, dont le nombre rduit permet de dresser linventaire exhaustif.29

Ainsi, la liaison et llision ne se produisent pas devant les substantifs : uhlan, ululation, ululement, onze, eonzime, un, une et devant les noms qui dsignent les lettres vocaliques : LE uhlan. LE onze de ce mois. Il est LE onzime de sa classe. LE un de cette rue est une maison inhabite. Ces vnements se partagent les honneurs de LA une. Dans certains mots anglais on redouble LE o. Devant les noms qui commencent par une semiconsonne on emploie gnralement la variante antconsonantique du Pd ou de lindice nominal : le yacht, le yard, le yatagan, la yole, le yod, le Yemen, la Yugoslavie, etc.; la huit, la huitaine, le oui, le weekend, etc. On signale pourtant un usage flottant dans le cas du substantif ouate : on dit indiffremment louate ou la ouate. Il en va da mme de certains segments substantivaux commenant par une semiconsonne et qui se combinent toutefois avec la variante antvocalique de lindice nominal : les yeux. Les substantifs qui commencent par le graphme h constituent une zone dhsitation. Les mots qui commencent par un h aspir et qui forment une classe ferme se combinent avec la variante antconsonantique du Pd : la haie [la ] / les haies [1 ] le haricot [l ariko] / les haricots [1 ariko] la hauteur [la otoer] / les hauteurs [1 otoer] le hall [la o1] / les halls [1 o1] En langue familire, les locuteurs manifestent la tendance faire entrer ces mots dans la classe la plus nombreuse des segments initiale vocalique : des haricote [d ariko]> [d z ariko] Il existe aussi certains mots o les deux variantes sont galement possibles, mme dans la langue cultive : la hyne ou l hyne30

2.4. Les articles (quantifiants bipolaires) En franais moderne, il existe un systme binaire de larticle dans le cadre duquel lindfini et le partitif sopposent au dfini comme des marques de la non rfrence un syntagme antrieur ou postrieur, comme des antisubstituts des substituts. La distinction en deux classes darticles est rvle par lapplication de plusieurs preuves ou tests1, qui dmontrent que les suites du, de la, de l, des se comportent tantt comme des dfinis (variantes prpositionnelles amalgames de larticle dfini), tantt comme des indfinis quantitatifs : DES bateaux on nen voit plus que les feux arrire. (DES = article dfini) (Bombard) DES bateaux on nen voit jamais dans ces zones de locan. (DES = article indfini) (Bombard) Les preuves auxquelles on soumet les articles pour tester leur comportement syntagmatique sont les suivantes : a) la transposition au ngatif : Il a du papier. Il na pas de papier Il a un papier. Il a le papier. Il a les papiers. Il na pas le papier Il na pas les papiers

b) la pronominalisation : Il a du papier. Il a un papier. Il a des papiers. Il a le papier. Il a les papiers.1

Il en a (un).

Il la Il les a

V.H. Frei, Tranches homophones, in Word, no.3, 1960, p.3442. 31

c) la construction avec un verbe impersonnel : Il est arriv une lettre. Il est arriv des lettres. mais : *Il est arriv la lettre. * Il est arriv les lettres. d) la neutralisation de lindfini et du partitif au pluriel dans la forme des, qui nest pratiquement ni le pluriel de un (e), ni celui de du, de la de, l. Comme il rsulte de lapplication de ces preuves, larticle indfini et le partitif de la grammaire classique se comportent de manire similaire, tandis que le dfini peut figurer sans aucune modification formantielle dans les transpositions au ngatif et ne tolre ni la pronominalisation par en, ni la prsence dun verbe impersonnel. Le systme de larticle franais comporte aussi un lment zro : labsence de tout article ou prdterminant correspond la suppression du syntagme nominal (le nom tant intgr un autre syntagme) ou la suppression de toute rfrence. Certains substantifs franais ne demandent pas la dtermination par un article ou un autre prdterminant nominal, tant, par leur nature smantique mme, des autodfinis. Les articles ont une double fonction : actualiser le nom en lui permettant de sinscrire dans le discours; assigner au nom une extensit minimale ou maximale : Larbre du jardin est maintenant dpouill de ses feuilles (extensit minimale). Larbre est le frre immobile de lhomme (extensit maximale). Un aveugle demandait laumne au coin de la rue (extensit minimale). Il marchait comme un aveugle (extensit maximale).

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2.4.0. Larticle dfini 2.4.0.0. Les formants de larticle dfini Genre Nombre Masculin Fminin

Sing.

Plur.

la le la femme, la maison le garon, le jardin article contract : du : le livre du garon au : Il donne un livre au garon l (forme lide) lemploy, lavion lactrice, laile les les garons, les avions les femmes, les actrices articles contracts : des, aux les livres des garons lactivit des femmes sadressser aux envoyer des fleurs employs aux actrices

Larticle dfini prsente au singulier masculin antconsonantique et au pluriel pour les deux genres des formes dites contractes, rsultant dun amalgame de larticle avec une prposition (de, ). La forme rsulte de la contraction de larticle avec la prposition en ne subsiste plus quau pluriel s et seulement dans des syntagmes automatiss : licenci s lettres, bachelier s arts, licenci s sciences, agir (dcider) s qualits, remettre s mains de. La contraction de larticle peut se produire mme devant les noms qui expriment un titre douvrage ou une citation : Lauteur DU Misanthrope Lauteur DU Soulier de Satin Le succs DES Misrables Lusage est de contracter larticle mme si le titre contient un verbe : La mise en scne DU Roi samuse (in A. Thomas, Dict.)33

Si le titre contient un lment de coordination, plusieurs possibilits se prsentent : a) faire la contraction avec le premier article de la srie : La chapitre VII DU Rouge et le noir b) faire la contraction avec les deux articles : La fable DU Singe et DU chat c) ne pas faire la contraction : La fin DU Le rouge et le noir (Duhamel, in Grevisse, LBU, p. 232) La contraction se fait toujours avec les noms propres qui commencent par un article dfini : Aller AU Havre Laroport DU Bourget Ce quartier DU Caire 2.4.0.1. Les fonctions de larticle dfini. Les articles dfinis sont les formes adjectives correspondant aux pronoms personnels de la troisime personne (J. DUBOIS, 1965 : 190). Si distributionnellement les deux units se diffrencient entre elles par la prsence obligatoire du substantif centre pour larticle, il existe des cas o le statut darticle est plus difficile attribuer, tels les groupes adjectivaux. En analysant le clbre vers de la Fontaine La raison du plus fort est toujours la meilleure, et en prenant comme point dappui les syntagmes constitus dun pronom dmonstratif + adjectif du type celles actuelles, H. YVON (1949) considre que dans les suites du plus fort et la meilleure, les lments du et la sont des centres, des parties autour desquelles se groupent dautres mots, des pivots. Mais tandis que du est un nominal, la est un reprsentant. Le statut de substitut est galement accord larticle dfini par J. DUBOIS : Larticle est un substitut comme les autres adjectifs pronominaux : le (la, les) suppose la rfrence un segment antrieur, dont il reprend certaines marques; il anticipe sur un segment; il peut se rfrer un lment situ hors des interlocuteurs, comme le pronom il. (I. DUBOIS, 1965 : 149).

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Il rsulte que larticle a une double valeur fondamentale, en langue : a) il individualise un substantif en impliquant la notorit; (rfrence spcifique),donc il isole un singleton; b) il reprsente lespce, en puisant la classe dobjets auxquels il se rfre (rfrence gnrique duniversel ou de virtuel). Larticle opre comme un morphme de la notorit, cest dire il fait valoir les traits individuels de la personne ou de la chose (objet) qui est prsente comme unique dans la circonstance. Larticle peut renvoyer non seulement un segment antrieur connu des interlocuteurs, mais aussi un lment de la situation et fonctionner dans ce cas comme un dictique (exprience acquise). Cest pour cette raison que les noms accompagns de larticle se prtent souvent une ellipse du dterminant dans les descriptions dfinies : Je vais LA facult (de philosophie de Bucarest). Je viens de parler AU professeur (danglais de mon fils). Devant les noms de la srie dnombrables, larticle dfini peut fonctionner comme linstrument de lunicit : Andr, LE chausseur sachant chausser Devant les noms de la srie indnombrable, larticle dfini peut ajouter une ide de quantit, mais le dfini a ceci de particulier quil puise la quantit de la situation : Passezmoi LE pain. On ira chercher LE lait. Cette valeur est particulirement sensible au pluriel, larticle traduit dans ce cas la totalit dans la circonstance : Hlne tait assise toute seule devant LES verres vides. (Beauvoir) Une ide de totalit puise est dcelable aussi dans lemploi distributif de larticle dfini (le = chaque) : Il a pay ces pommes dix francs LE kilo. Le muse est ferm LE lundi. Il est pay LA journe.35

Larticle dfini, comme nous lavons dj remarqu, peut renvoyer un lment de la situation, auquel cas il a un force actualisante trs grande, car il fonctionne comme un dmonstratif (le = ce) : Lide plaira peuttre nos amis Pour LE moment il nest pas l. Il y restera tout Lhiver. Vous voyez dici LE tableau. (in G. Mauger, Gramm, p. 97) Une valeur dictique est galement dcelable dans les emplois affectifs du dfini: Oh! LA jolie robe! Oh! LE toupet! Vous connaissez Lindividu! Le dfini et le possessif peuvent se faire concurrence dans certains contextes o le dfini peut renvoyer au possesseur. On emploie un article dfini la place du possessif dans les cas suivants : a) le rapport dappartenance est vident et lon fait conomie dune marque plus coteuse : Il est mort pour LA patrie. b) sil sagit dune possession inalinable (partie du corps ou vtements ports, facults de lesprit): Il perd LA raison. Il a perdu LA vie dans un accident de la route. Il sest sali LA chemise. Cette construction est frquente avec les verbes de mouvement: ouvrir les yeux, baisser les yeux, fermer la bouche, tourner la tte, hausser les paules, tendre les bras etc. : Elle a ouvert LES yeux, elle a ouvert LES lvres, de nouveau elle tait prs de moi. (Beauvoir) Je relevais la tte et je recontrai le regard dun jeune ouvrier qui dtournait vite LES yuex. (Beauvoir) Si le rapport de possession est marqu par le pronom complment dobjet second (le datif possessif), la prsence de larticle est la rgle:36

Il ma pris LE bras. Elle lui souleva LE menton. (BoileauNarcejac) Elle lui posa LA main sur LE bras. (BoileauNarcejac) Larticle apparat aussi dans le cas du datif possessif rflchi : Il sessuie LES yeux. Le douanier se frappe lES mains sur LES flancs. (Simenon) Larticle apparat galement comme seule marque de la possession dans les constructions absolues (les complments dits dattitude) qui constituent des squences inscables : Il se tenait LES bras croiss. Je marcherai dans la rue, LA tte haute, LES mains vides. (Beauvoir) La probabilit doccurrence de larticle est plus grande et par consquent la quantit dinformation sen trouve diminue, de sorte que le possessif reste disponible pour des emplois particuliers (v.ci-dessus). En change, l o lapparition du possessif est la plus probable, comme cest le cas des noms de parent, cest la prsence de larticle dfini qui se colore de nuances particulires: LE pre en dcidera (nuance affective de respect). Larticle dfini peut reprsenter lespce, cestdire il peut voquer une chose ou une personne en tant quelle symbolise la classe tout entire laquelle elle appartient : Je luttais contre LE remords et LA faute. (Beauvoir) Ses doigts sentaient LE bois brl, LA mandarine et LE tabac. (Beauvoir) Or, cette qualit dobjectivit, qui implique un esprit lucide et froid, LE chef doit la combiner avec une ardeur passionne. (Maurois) Et son rire sonnait LA peur. (Simenon)37

Malheur L tre strile qui reste seul et perdu sur la terre (R. Rolland) Cette valeur se manifeste galement dans des squences automatises, o le nom est intgr au syntagme verbal : dclarer LA guerre, faire Lexercice, faire LA noce, prendre LE lit, mettre LE feu etc. : Il naurait jamais fait LA noce si les autres ne lavaient pas entran (Simenon) Jeune homme, il a men LA grande vie Paris. (Simenon) La mme valeur est prsente dans certains emplois techniques du langage spcialis du commerce et des finances pour indiquer la totalit : LE franc remontait. (Simenon) LA cerise est en hausse. (in Rougerie, Gramm. cit., p. 154) Lemploi du dfini devant ces noms ayant le trait inhrent [ dnombrable ( abstrait)] confre au nom la mme valeur universelle, virtuelle: Je ne pouvais pas me tailler un sort juste dans un monde injuste. Je voulais LA justice. (Beauvoir) Cette toffe tache Leau. Larticle dfini devant les noms propres. Les noms propres sont en gnral des noms autodfinis par leur statut spcial. Il existe pourtant des classes smantiques de noms propres qui saccompagnent obligatoirement de larticle. Dans les autres cas, lopposition article dfini/article zro est une opposition smantique. Les noms propres qui doivent tre accompagns dun article sont les suivants: a) les noms propres de personnes employs au pluriel pour dsigner les membres dune famille : LES Dupont, LES Goncourt,38

LES Bourbons etc. ainsi que certains noms de famille et des noms clbres : LE Corrge, LE Dante, LE Tasse, LA Patti, LA Callas, etc. b) le noms propres gographiques dsignant des montagnes, des fleuves ou rivires, des lacs, des caps : LES Carpates, LA Seine, LE Lman, LE Horn etc. des archipels, de grandes les et dautres noms dles situes hors dEurope : LES Hawai, LA Sicile, LA Crte, LA Sardaigne, LIslande, LA Guadeloupe, LA Martinique, LA Jamaque, LA Nouvelle Zlande, LA Nouvelle Guine etc. certains noms de villes: LE Havre, LA Havane, LE Caire, LES Laumes, LA Haye, LA Rochelle etc. les noms de pays et de continents : LA France, LE Japon, LES tatsUnis, LAsie etc. c) les noms de ftes : LA Saint Jean etc. La prsence dun dterminant (dune description dfinie) auprs du nom propre entrane ncessairement la prsence de larticle : LE Paris des monuments historiques Lhistoire de LA France contemporaine LE Dupont que jai connu lanne dernire 2.4.1. Larticle indfini 2.4.1.0. Les formants de larticle indfini Genre Nombre Sing. Plur. Sing. ou Plur. Masculin un un garon, un avion Fminin

une une femme, une aile, une hlice des des garons, des avions des femmes, des ailes de de grands garons de grosses femmes beaucoup de garons beaucoup de femmes Il na pas de livre (s)

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Larticle indfini connat aussi la variante de (T. CRISTEA, 1968). Ce segment est dsign dans les grammaires traditionnelles par le terme de prposition, quel que soit le contexte o il figure1. Or, dans certains syntagmes nominaux, cette dnomination nest plus justifie que sur le plan diachronique. De, variante grammaticale, smantique ou stylistique des articles un (e), du, de la, de l, des, sest intgr au systme de larticle franais. Les contextes o apparat cette variante de larticle indfini, qui est appele aussi forme rduite de larticle pour lopposer la forme pleine, sont les suivants a) DE + adjectif + substantif: DE nouveaux disques DE larges avenues Dautres livres DE telles histoires Tu as cueilli DE jolies fleurs (Beauvoir) Elle tait habille de noir, avec des cheveux blonds, DE molles joues roses et blanches et une bouche. orange. (Beauvoir) Vous rendesvous compte des rpercussions que DE pareils drames peuvent avoir ? (Simenon) En langue moderne, cette rgle de constitution du syntagme nominal nest observe que dans la langue cultive et mme dans cette nuance du franais, la forme pleine de larticle, des, rapparat dans les cas suivants : dans les suites de forte cohsion qui nadmettent pas linsertion dun autre lment entre ladjectif et le nom dtermin (noms composs) : DES basreliefs, DES fauxpas, DES petits pois, DES petits pains, DES grosses lgumes (pop.) etc.Pour une discussion plus ample v. M. WILMET, 1986, La dtermination nominale, Paris, PUF, p. 112, sqq. 401

avec les adjectifs trs usuels : petit, grand etc. Rien quun rverbre cent mtres de la gare, parmi DES grands arbres. (Simenon) DES petits points lumineux dans le brouillard. (Simenon) DES petites gens qui ont leur logement des deux cts dun long couloir (Simenon) Ce sont presque DES jeunes gens. (H. Bazin) Lemploi de larticle de comme variante de du dans le syntagme nominal contenant un adjectif est dun emploi assez rare, mme en langue littraire. Tel homme cultiv qui parle sans hsiter de boire du bon vin ne dira jamais voir des beaux pays (F. BRUNOT, 1926:115). On constate donc une hirarchie dans lextension de la forme pleine de larticle indfini dans ces groupes : en premier lieu on utilise la forme du et ensuite des : Il y aura DU vrai champagne. Lusage tend gnraliser lemploi de la forme pleine, moins que lon veuille tirer de lopposition de formants une distinction smantique d f i n i/i n d f i n i : Apporteznous DE meilleur vin. (indfini) Apporteznous DU meilleur vin. (dfini notoire) Lemploi de la variante rduite restitue ladjectif sa valeur premire, indpendante ; le syntagme ne fonctionne plus alors comme une lexie fige: Il aimait dans le pass de trs grands potes et de trs grands musiciens, qui ntaient pas DE petits saints. (R. Roland) b) quantitatif + de + substantif: Aprs les mots marquant la quantit on emploie le segment de, qui confre lensemble la valeur dun prdterminant quantitatif: de a dans ces suites une valeur de partitif qui isole une certaine quantit du nom qui suit ; le segment quantitatif qui prcde peut tre interprt aussi comme un substitut anticipant marquant la quantit isole.41

Ces quantitatifs sorganisent smantiquement daprs les oppositions suivantes: comparatif/non comparatif Parmi les comparatifs ( g a l i t a i r e s / n o n g a l i t a i r e s) il faut noter : autant de/ plus de, moins de: Nul ne dpensait AUTANT Dargent que lui, pour souscrire des publications. (R. Rolland) Et ils nen avaient que PLUS DE tendresse lun pour lautre. (R. Rolland) Les non comparatifs se divisent leur tour en d t e r m i n s / i n d t e r m i n s. Au cadre des dfinis il faudra distinguer ceux qui indiquent la g r a n d e q u a n t i t de ceux qui indiquent la p e t i t e q u a n t i t : beaucoup, bien, trop, tant (excl.), que (excl.) quantit, nombre etc. / peu: Il savait pourquoi il avait mis TANT DE temps. (Simenon) Le mari navait pas le temps. La femme avait TROP DE temps. (R. Rolland) BEAUCOUP Dhommes de mon ge sont ports louer le temps de leur jeunesse. (Maurois) Comme NOMBRE DE gens en France qui nont pas appris, il avait le don du style. (R. Rolland) PEU DE gens savaient pourquoi il avait quitt brusquement la police officielle. (Simenon) Avec le quantitatif bien on se sert de la forme pleine de larticle: Il y a BIEN DES traces de pattes sur le sol. (Simenon) Il avait vu BIEN DES choses tristes et sales dans sa petite enfance. (R. Rolland)42

Mais on dit bien dautres. Il existe ensuite une srie de syntagmes nominaux constitus dun nom collectif de sens gnral qui fonctionne comme une tiquette quantitative prcd dun article et dont le dterminant est introduit par de : ces suites servent marquer des quantits numriques (avec approximation) ou non numriques : un tas de, une foule de, une dizaine de, une centaine de etc.: Un petit TAS DE poussire dore presque impalpable. (Beauvoir) Une COHORTE Denfants passa devant nous. (Beauvoir) Des CENTAINES DE milliers de Parisiens vont profiter de la semaine anglaise (Simenon) Avec le collectif isolant la plupart on emploie la forme pleine de larticle: LA PLUPART DES magasins taient ferms. (Beauvoir) LA PLUPART DU temps il ne se dcide pas. (Simenon) La prsence de la forme pleine de larticle devant ces quantitatifs, prcds ou non dun article, est le signe de la notorit et elle est de rgle si le nominal dterminant du nom est dtermin: BEAUCOUP DES tudiants de la premire anne ont particip la runion. De mme, si ltiquette nominale quantitative est prcde dun article dfini ou dun autre actualisateur dfini, la forme pleine est possible: La cohorte DES enfants Le quantitatif indfini est linterrogatif combien + de: COMBIEN en atelle reu DE lettres? COMBIEN DE journaux atelle anchets ? c) verbe ngatif +de + substantif (GN2) Dans les communications ngatives, larticle de entre en rapport de substitution avec dautres prdterminants nominaux : un, aucun, etc. De apparat dans ces contextes comme une variante smantique de ces Pds, lopposition de contenu quon exprime de cette manire tant: quantit dtermine/quantit indtermine (de) :43

Je nai pas UN poste metteur. (Bombard) Je nai pas DE poste metteur. (Bombard) De apparat comme une variante combinatoire ou smantique des articles du, de la, de l, des ; avec des substantifs indnombrables, ce segment est la variante des formes pleines du singulier, avec les dnombrables pluriels, de est la variante de des et avec les dnombrables singuliers il est la variante de un (e): SN2 Verbe (P) + Indnombrables singuliers du, de la, de l Dnombrables singuliers un (e) DE pluriels des

De est variante combinatoire dans les cas suivants: dans les structures o figure un verbe transitif ou des phrases elliptiques: Mais je navais pas Dallumettes (Simenon) Toujours pas DE bateau. (Bombard) aprs le verbe tre construit avec le pronom neutre il, auquel cas le verbe a une valeur quantitative et non plus quatante: Il nest pas Dle dans la peste. (Camus) dans la ngation restrictive, si lobjet direct prcde le restrictif que : La smiologie ne peut avoir Dunit quau niveau des formes. (Barthes) Chacun ne devait attendre DE lumire que de soi. (R. Rolland)44

La comtesse quil adore en silence na Dyeux que pour un capitaine en retraite. (Simenon) Mais dans le cas contraire, si le GN2 suit que on emploie obligatoirement la forme pleine : On na que DES ennuis. (Beauvoir) Rien que DE Lherbe. (Simenon) dans les phrases ngatives o la chane est une structure de coordination ralise au moyen de ni et dont le premier nominal est introduit par de: Il ny a pas DE bont ni Damour. (Camus) Mais : Ce ntaient ni DES prires ni DES ordres. (Beauvoir) De apparat comme variante smantique des formes pleines: aprs le prsentatif ce nest pas (et variantes de nombre, de temps et de mode), lopposition de / du (et. var.) traduisant alors lopposition smantique q u a n t i t / q u a l i t : Ce nest pas DE veine. (Bombard) Ce ntait pas DE LA mfiance. (Simenon) dans des structures o le substantif est complment dun infinitif rgi par un verbe transitif ngatif, avec la mme opposition de contenu q u a l i t (forme pleine) / q u a n t i t (de): Je nai pas voulu te faire DE peine (Beauvoir) Je ne veux pas faire DES critures, ni DES discours. (Beauvoir) dans les chanes qui contiennent une expansion du complment dobjet ou du groupe verbal: lopposition forme pleine/forme rduite de larticle sert marquer lopposition smantique n g a t i o n a b s o l u e (de) n g a t i o n r e l a t i v e (du, de l, de la) :45

Je ne bois pas DE vin (ngation absolue) Je ne bois pas DU vin que vous avez apport (ngation relative : Je bois du vin, mais pas de celuici) Ne me fais pas DE LA psychologie dalcve (Sagan) Vous nauriez pas DE lalcool 90 degrs? (Simenon) dans les communications interrongatives, lopposition de/du (et.var.) correspond lopposition p r s o m p t i o n e n f a v e u r de la ngation/prsomption en faveur de l a f f i r m a t i o n: Ny atil pas eu DES socits de loisir? (rponse prsume affirmative) (Maurois) Ne taije pas rapport DE Largent ? (Calef) aprs la prposition de sens ngatif sans, la forme rduite de larticle indfini exprime la ngation absolue, mais cette distinction est en train de seffacer : Il parle sans faire DE(S) fautes. Fuir sans laisser DE traces (Simenon) La grammaire classique numre ces classes de contextes o apparat la variante de sans faire aucune diffrenciation quantitative (frquence) ou qualitative. Une analyse syntagmatique attentive rvle pourtant des particularits demploi pour chacun des trois contextes type mentionns. Les distinctions stablissent en fonction de deux facteurs : a) le premier est de nature syntaxique : la rpartition du GN dans les positions du GN1 (sujet) ou du GN2 (objet). b) le second est de nature smantique : le trait inhrent du nom dtermin [ dnombrable]. En vertu de ces deux distinctions on constate des comportements diffrents pour les trois cas mentionns cidessus : la suite de + adjectif + N implique le singulier indnombrable et le pluriel dnombrable, ce dernier tant beaucoup plus frquent :46

DU noir dfilait derrire les vitres. (Simenon) DE petites vapeurs blanches se droulaient contre le fond sombre du ciel. (Beauvoir) la suite quantitatif + de + N prsente la mme restriction: Tant DE VIN / Tant DOBJETS diffrents dans les noncs ngatifs, lemploi de de est li la position de GN2 (objet direct) ; aucune restriction quant la combinaison trait inhrent + nombre nentre plus en ligne de compte, en ce sens que de apparat avec des indnombrables singuliers ou des dnombrables singuliers ou pluriels indiffremment, souvent avec neutralisation de lopposition de nombre : Il ny a pas DE LIT, pas DE RESSORTS. (Bombard) Il existe aussi une hirarchie des trois contextes mentionns, qui peuvent se combiner entre eux, quant au choix de larticle : la suite de + adjectif + N impose la form rduite de, mme si la ngation est restrictive : .. . nous ne ferons ici QUE DE BRVES allusions (Barthes) De mme, ladverbe bien impose la forme pleine de larticle indfini, mme sil existe un adjectif qualificatif prcdant le nom : Jai pass BIEN DES BELLES soires avec eux. Les substantifs qui sont prcds de larticle indfini se laissent tous pronominaliser par le pronom en, mais les squences qui rsultent de la pronominalisation diffrent entre elles par les rsidus de la pronominalisation : a) larticle indfini singulier ne sefface pas comme suite de la pronominalisation: Il achte UN journal. Il EN achte UN b) larticle indfini pluriel sefface complment : Il achte DES journaux. Il EN achte47

c) si le GN prcd de larticle indfini contient un Dt adjectival, celuici est conserv aprs la pronominalisation, au singulier aussi bien quau pluriel : Elle avait UNE robe BLEUE. Elle EN avait UNE BLEUE. Au pluriel et au singulier massif on utilise devant le Dt adjectival la variante de en langue littraire et la variante pleine, du, de la, de l, des dans le langage courant: Elle a DE jolies fleurs. Elle EN a DE jolies. Jai achet DES livres plus rcents. JEN ai achet DE plus rcents. Il a achet DES fleurs. Il y en avait de toutes les couleurs, DE(S) blanches, DE(S) rouges, DE(S) JAUNES Jai achet DU(DE) bon vin. JEN ai achet DU(DE) bon. le buvard na pas retenu dempreintes digitales. Sur le sousmain, on EN a relev DE multiples. (Simenon) d) le quantitatif qui introduit la variante de de larticle ne sefface pas par la pronominalisation: Elle a achet BEAUCOUP DE livres. Elle EN a achet BEAUCOUP. 2.4.1.2. Fonctions et valeurs de larticle indfini Larticle indfini a pour fonction essentielle de participer la constitution du syntagme nominal en supprimant toute rfrence un segment ou un lment de la situation. (J. DUBOIS, 1965: 151). Cest en ce sens que lon affirme que larticle indfini est le morphme de la non notorit: Jai parl avec LE professeur de mon fils./Mon fils a UN nouveau professeur de franais. Les valeurs contextuelles de lindfini oscillent entre deux points extrmes : valeur g n r i q u e / valeur q u a n t i t a t i v e (objet isol).48

Larticle indfini un(e) peut servir dsigner un spcimen isol, une unit prleve sur un ensemble de la mme espce. Dans cette acception, lindfini rejoint sa valeur initiale de numral : Il prit UN livre sur le rayon. Elle tenait la main UN bouquet de violettes. (Beauvoir) Larticle indfini un(e) peut exprimer la qualit dfinitoire dun objet, les traits communs toute la classe : UNE mre peutelle har son enfant ? Mais UNE vie, pour que ce soit intressant, il faudrait que a ressemble UNE ascension. (Beauvoir) Il navait pas lair dUN ouvrier, ni dUN bourgeois, ni dUN type du quartier latin. (Beauvoir) Cette mme valeur se retrouve dans des emplois emphatiques de lindfini un(e), surtout dans des constructions prdicat nominal : Cest UN journaliste., (un vrai journaliste) Plus de fils Blomart ; rien quUN homme, UN homme vrai et sans tache. (Beauvoir) Vous croyez que cest UNE vie, a ? (fam.) Larticle indfini un(e) peut ensuite classer un objet en le rapportant un groupe plus restreint lintrieur de la classe donne (description dfinie) : UN ciel sans nuages Je navais quUNE peur, cest quil sen saist. (Simenon) A cette valeur se rettache galement lemploi de larticle indfini dans des noncs exclamatifs pour exprimer lintensit: Cest dUN comique ! Et il est dUN bte avec a. (Queneau) Larticle peut marquer la constitution de toute une classe devant des noms propres clbres : Si UN Voltaire surgissait ! Cest UN Harpagon.49

Le pluriel de larticle indfini des est disjoint smantiquement du singulier un(e) dans le sens gnrique, parce que des nest pas apte exprimer la totalit; le syntagme de qui entre dans la constitution de cet article est un inverseur de totalit (G. GUILLAUME) : UNE mre est toujours indulgente pour ses enfants. *Des mres sont toujours indulgentes pour leurs enfants. Des sert prsenter plusieurs units de la mme espce : DES robes fleuries flottaient au vent, sur le chemin de halage, DES bicyclettes passaient silencieusement. (Beauvoir) Avec des noms exprimant des divisions du temps, des peut marquer la grande quantit (intensif) : Il la attendue pendant DES heures et DES heures. Il y a DES annes quon ne sest (pas) vus. Il y a DES semaines que a dure. Avec des noms dtermins ou autodfinis, des acquiert des valeurs apprciatives: Cet enfant rentre DES une heure du matin. (in Mauger, Gramm., p. 100) Larticle du (de la, de l) est le plus souvent employ devant des noms de choses indnombrables. Cet emploi devant les noms de choses amorphes lui a valu la dnomination darticle massif. Larticle massif est une espce dindfini (v. supra) et ce nest un partitif que dans la mesure o il ne peut jamais exprimer la totalit, car il incorpore linverseur de totalit ou dextension de. Cet article est utilis: a) devant les noms ayant les traits inhrents [ dnombrable (+concret)] : Vous prendrez DU whisky ou DE LA prunelle ? Dans le sousmain, il y avait DU papier blanc. . . (Simenon) b) devant les noms [ dnombrable (concret)] : Continue faire DE LA philosophie. (Beauvoir)50

Un thtre qui tait DU thtre . . . (Beauvoir) Sil y a DU vilain cest lui qui ira en prison. (Simenon) c) devant les noms [+ dnombrable (+concret)] pour indiquer le collectif global: Il y a DU sanglier dans cette fort. d) devant les noms [+humain], lindfini du (et variantes) indique le trait caractristique: Il y avait DE Laptre en lui. e) devant les noms propres de personnes avec les verbes lire, jouer, entendre, couter . . . pour indiquer loeuvre dun crivain ou dun artiste : lire DU Vigny, lire DU Colette, jouer DU Chopin etc. Le tableau cidessous rend compte des valeurs des articles franais: V i r t u e l S i n g. P l u r.+dnombr

Le

dnombr e s

+dnombr p

Un

dnombr

+dnombr

Du

dnombr

extensif Totalit objet unique (connu)

c e antiextensif

AS c i t n u g. e l

quantit puise dans la circonstance

un seul objet (intgral)

objet isol dans une classe

P l u r.

totalit dans la circontance

diversit

plusieurs objets de la mme espce

diversit

collectif global trait caract ristique

quantit indter mine

51

Larticle connat un double mouvement, de gnralisation et de particularisation et les valeurs contextuelles reprsentent les diffrentes saisies de ce mouvement dans ces points (G. GUILLAUME, 1945), le mouvement est inverse dans les deux articles: dfini (particulier gneral) / indfini (gnral particulier). 2.4.2. Larticle zro Dans un trs grand nombre de contextes du franais contemporain, la relation que contracte le Pd avec le nom est une relation obligatoire, dinterdpendance Pd N. Labsence de Pd est possible en franais dans un nombre relativement rduit de suites segmentales qui constituent le champ de la dtermination zro. Labsence de Pd correspond soit une valeur smantique particulire, soit la suppression du syntagme nominal dans ses fonctions primaires de sujet et dobjet. Pour tablir les conditions de lapparition dun article zro, il faudra distinguer entre les noms propres et les noms communs. Les noms propres de personnes, les noms gographiques, les noms dobjets uniques sont des noms autodfinis qui ne demandent pas expressment lemploi dun article pour figurer en position de GN1 ou GN2. Lemploi dun Pd auprs de ces substantifs implique une certaine exploitation smantique ou stylistique: Lopposition / article peut correspondre: a) une opposition nom propre / nom commun Le nom propre est employ par mtonymie pour indiquer un produit ou une oeuvre: UNE Renault, UN Larousse, Un Farman etc. b) une opposition stylistique de niveau de langue, style neutre / style familier : LA Zazie, LA Marie etc. Y a Gabriel qua gard LA Zazie avec lui (Queneau) c) une variation libre devant des noms propres gographiques qui semploient normalement avec un article: Les vins DEspagne = Les vins DE LEspagne Lusage veut que lon dise Lhistoire de France mais La gographie de LA France.52

d) une opposition grammaticale: larticle est obligatoire dans les descriptions dfinies, ce qui correspond la prsence dun dterminant auprs du nom autodfini: LE Paris dautrefois Dans le cas des noms communs, il faudra distinguer une srie de noms qui peuvent tre des dfinis dans la circonstance et fonctionner comme des dictiques: ce sont des embrayeurs, dont le sens est dcod par la rfrence aux conditions du message. Parmi ces noms il faut noter: a) les noms des mois de lanne : Il reviendra en JUILLET. b) les noms des jours de la semaine: Je serai chez moi LUNDI. Avec larticle dfini ces noms indiquent la rptition : Le muse est ferm LE lundi. c) les substantifs midi, minuit : MINUIT a sonn Il reviendra vers MIDI. d) les appellatifs: papa, maman, tonton, tata, monsieur, madame, mademoiselle etc. ; Maman est venue. (la maman du locuteur) En gnral ces noms accompagns dun article deviennent des noms communs. e) les noms en apostrophe qui sont actualiss par la circonstance extralinguistique. Cher AMI . . . La prsence dun article auprs des noms en apostrophe au pluriel est obligatoire en franais courant: Il faut partir, LES amis ! LES enfants ! Prenez chacun une valise (H. Bazin)

53

Devant les noms communs qui ne sont pas dfinis dans la circonstance, larticle zro assure en franais contemporain deux fonctions : a) une fonction rfrentielle: supprimer toute extensit (virtuel). b) une fonction grammaticale : supprimer le syntagme substantival pour lintgrer, en fonction du constituant domin (d terminant), soit un autre syntagme nominal soit un groupe prdicatif comme circonstant, prdicat nominal, ou un autre Dt verbal. Souvent les deux fonctions se superposent et il faut reconnatre dans bien des emplois de circonstant ou de Dt verbal une valeur de virtuel : avoir raison, avoir peur etc. Si lon pense que le rle essentiel de larticle est celui de substitut (voquer un objet dont il a t ou non question), il apparat tout naturel que labsence de celuici supprime toute forme dactualisation. Le texte est plac hors situation (J. DUBOIS, 1965 : 149). Les contextes o larticle zro apparat sont les suivants: rference virtuelle : a) les noms employs comme leur propre dnomination (mtalangage), recouvrant peu prs le domaine de la notion : TABLE est un substantif du genre fminin b) les substantifs employs souvent avec un cas non marqu de la forme verbale (le prsent) dans un nonc de sens ngatif ou interrogatif: Il nest ERREUR quil ne commette. (in G. Gougenheim, Syst., p.134) Louis XIV ne se refusait aucun plaisir, aucun luxe et jamais SOUVERAIN ne fut plus respect. (Maurois) c) les noms employs comme des chantils (deuxime terme dune comparaison): croire dur comme FER, blanc comme NEIGE, noir comme JAIS, vivre comme CHIEN et CHAT etc. d) dans des proverbes, dictons et phrases sentencieuses : Petite PLUIE abat grand VENT. A quelque chose MALHEUR est bon. COMPARAISON nest pas RAISON.54

rfrence actuelle : a) les numrations, plurielles o lensemble a une valeur globale non diffrencie, la diffrence des phrases o lon insiste sur chacun des lments de lnumration: CAHIER, LIVRES, FEUILLES DE PAPIER, tout tait par terre. LE cahier, LES livres, LES feuilles de papier taient tombes par terre. Cette vipre () je la brandis encore et je la brandirai toujours quel que soit le nom quil te plaise lui donner : HAINE, POLITIQUE du pire, DSESPOIR ou GOT du malheur. (H. Bazin) b) les titres et les enseignes : DICTIONNAIRE des difficults de la langue franaise. La prsence de larticle dfini dans le titre dun ouvrage ajoute linformation smantique objet unique, supriorit qualitative: LE dictionnaire des sciences Dans le titre dun article de journal, lopposition article / Pd corespond lopposition de contenu dtermin / nondtermin : RGLEMENT de comptes dans le quartier/ LE rglement de comptes du quartier c) des messages abrgs : LETTRE suit. Le Pd zro peut avoir la fonction de supprimer le statut de nom et doctroyer llment nominal ainsi employ un statut adjectival ou adverbial, en lincorporant un constituant en position de dterminant. Cest la satellisation du nom (M. WILMET, 1986 : 81). Cette fonction se retrouve : a) dans des syntagmes nominaux (constructions prpositionnelles) o cest la prposition qui marque lassiette du nom dans le discours: Une clef EN OR Une bote EN CARTON Une tasse A CAF Un flacon DE PARFUM vide Un ciel DT55

Un feu DE.BOIS Si le nom centre est introduit par un article dfini, il peut y avoir variation libre entre larticle ou zro devant le complment du nom: La bote / AUX lettres Par contre, la prsence dun article indfini devant le nom centre impose le Pd zro devant le substantif dterminant: UNE bote lettres. Dans les suites formes au moyen de la prposition de, labsence dun Pd confre au complment du nom une valeur trs gnrale, voisine de celle dun adjectif qualificatif: Un chef DORCHESTRE Une robe DE JEUNE FILLE Une robe de MARIE L encore, la prsence dun dterminant qui actualise le nom centre ou une valeur de notorit (rfrent connu) entrane obligatoirement larticle : Le chef DE LORCHESTRE DU GRAND THTRE La robe DE LA MARIE tait vaporeuse. Les noms en apposition sont intgrs en structure superficielle dans un syntagme nominal, construction qui correspond une structure sous-jacente syntagme verbal (proposition relative). La soudure plus forte de deux noms apposs implique labsence de toute pause ou dun lment de relation et ces suites connaissent un article devant le dterminant nominal (appositions conjointes): Policesecours Assurancevie Des livres compagnons (Maurois) Dans les appositions spares par une pause ou un lment de relation (appositions disjointes), larticle nest pas employ si le nom indique une qualit, une profession, une dfinition: . . . les Mmoires du Cardinal de Retz et ceux de Saint Simon, MODLES de style. (Maurois) Le chien jaune, ROMAN de Georges Simenon Monsieur X, PROFESSEUR la Facult des Lettres.56

Larticle zro et larticle sont en variation libre devant un nom en apposition auprs dun pronom tonique: Nous, (LES) ROUMAINS Nous autres DMOCRATIES OCCIDENTALES (Maurois) Devant les autres substantifs en apposition, on peut se servir de larticle ou de zro suivant le sens que lon veut accorder lidentification appositionnelle: Zola, CRIVAIN franais qui a dcrit la vie des mineurs (= apposition explicative). Zola, UN CRIVAIN franais qui a dcrit la vie des mineurs ( = apposition dfinitoire). Zola, LCRIVAIN franais qui a dcrit la vie des mineurs ( = apposition anaphorique, dvocation). Dans les syntagmes verbaux, le nom peut tre intgr comme : nom prdicatif (prdicat nominal) objet circonstant a) Employ comme prdicatif, le nom de qualit a le comportement dun adjectif et se dispense de Pd : Jean est PROFESSEUR. Nous ntions pas vraiment FRRE et SOEUR. (Simenon) Le rgime de larticle est command par la nature du sujet, par la prsence dun autre dterminant actualisateur, par les traits inhrents du nom prdicatif et par le sens que lon veut attribuer la construction. Ainsi, si le sujet est dtermin, on peut se servir de larticle ou de larticle zro en variation smantique : larticle indfini exprime lemphase, la qualit dfinitoire + lapprciation. Sois UN professeur. ( = un vrai) Il a t UN soldat. Cest UN monsieur. Mais tu nes pas UN peintre, ditelle, pas plus que je ne suis UN crivain. (Beauvoir)57

larticle dfini exprime lunicit de lobjet evoqu (un singleton): Il est LE chef. La prsence dun autre dterminant attire mcaniquement la prsence dun Pd auprs du prdicatif: Il est MON professeur dhistoire. Il est LE professeur de ma fille. Si le sujet est ralis par le dmonstratif neutre ce dans le prsentatif cest (et.var) le Pd est obligatoire : Cest LE chef. Cest UN professeur rput. On peut avoir un article zro si le nom en position de prdicatif a le trait inhrent [+ abstrait]: Tout cela cest pure INVENTION. Le tableau ci-dessous rend compte du rgime des articles devant les noms prdicatifs: Article Prdicat Il est . . . cest . . . qualit profession dfinition + nom abstrait Un emphase identification apprciative + Le dtermination unicit (singleton) +

b) En position de syntagme objet, le nom apparat souvent en prsence dun article zro, dans des locutions figes : avoir mal, avoir peur etc. Ces locutions verbales reproduisent un ancien moule syntaxique, un mode de formation ferm; pour sen rendre compte il suffit de comparer avoir mal et *avoir douleur, demander pardon et *demander permission. Certaines de ces formations sont compltement automatises : jeter feu et flammes remuer ciel et terre, suer sang et eau, promettre monts et merveilles etc. Une preuve que le nom sans Pd est intgr au GV et quil forme un tout avec le verbe auprs duquel il apparat cest que ces locutions admettent des dterminations58

que le substantif seul nadmettrait pas : Jai tellement faim que, Jai si faim que, etc. Dans certaines locutions verbales de ce type, larticle et larticle zro se trouvent en variation smantique: Avoir raison / Avoir une raison ( = avoir un motif) Donner raison / Donner la raison (justifier) Parler franais (accidentel) / Parler le franais (permanent). Il est remarquer que l aussi la rgle suivant laquelle la prsence dun autre Dt attire la prsence dun article est applique, quel que soit le degr dautomatisation de la squence : Avoir peur / Avoir une peur bleue. Avoir mal / Avoir le mal du pays (de lair). Livrer bataille / Livrer une bataille acharne. Faire part / Faire la part du feu. Chanter victoire / Chanter la victoire dun conqurant. c) Dans les expansions circonstancielles, le Pd est trs frquent, indiffremment de la rection : les circonstants de rection directe sont le plus souvent sans article : JOUR ET NUIT, des agents prouvs (. . . ) gardaient Gilbert. (Leblanc) TTE nue, il fit cinq ou six fois le chemin de lhtel de lAmiral son officine. (Simenon) les complments prpositionnels prsentent frquemment un article zro, dont la prsence sexplique par le fait que les fonctions du nom sont explicites par la prposition, ce qui permet labsence de Pd. Il y article zro obligatoirement dans les squences introduites par force de, pour cause de, en raison de, etc.: Le magasin est ferm pour CAUSE DE DCS. Il a prsent sa dmission pour CAUSE DE SANT. Il russira FORCE DE persvrance. De mme, le Pd est en gnral absent dans les circonstants introduits par en, qui repousse la prsence dun article dans la grande majorit des constructions courantes:59

Rouler EN auto, Aller EN prison Voyager EN chemin de fer La crmonie a eu lieu EN prsence du prsident de lassociation. (Brves Nouvelles) Mais certaines suites en fonction des Dt verbaux introduits par en rclament la prsence dun article : En lhonneur de . . ., En labsence de . . . , En la personne de . . . , En lespce, En la matire, En la circonstance, En loccurrence, En lhtel de . . ., En lglise de . . ., Regarder en lair, Laisser les choses en ltat, En de nombreux endroits, En cet endroit perdu, En ce sicle etc. Le Pd zro apparat souvent aussi aprs dautres prpositions : Jai envie de vous parler coeur ouvert. (Simenon) Maigret (. . .) acheva de shabiller SANS fivre. (Simenon) La foule maintenant se tenait distance. (Simenon) Quand Lonard reconnut, AVEC stupeur, que Christophe tait atteint, il ne sintressa plus lui. (R. Rolland) Do une France dsunie, dchire, qui aborda la Seconde guerre mondiale SANS foi ni force. (Maurois) Ne quittez pas la ville JUSQU nouvel ordre. Je vous dis cela POUR mmoire. Il a agi PAR gnrosit. Lopposition / Pd peut traduire une opposition smantique : aprs la prposition dans devant un substantif dsignant une division temporelle et dterminant un verbe employ le plus souvent au futur, larticle indique le terme de laction, tandis que larticle indique la dure: Vous partirez dans trois jours ( = au bout de ces trois jours) Vous partirez dans les trois jours ( = au cours de ces trois jours).60

Aprs la prposition sur, cette opposition peut exprimer la distinction temps/lieu: Sur place (temps) / Sur la place (lieu). Fonctions de larticle zro : Non constitution du syntagme nominal Intgration un GN Intgration un G. Prd sentences appositions prdicatifs comparaisons conjointes objets (GN2) phrases ngatives, disjointes circonstants interrogatives Dt du nom locutions b) actuelle numrations titres messages abrgs 2.4.3. Les dmonstratifs Ayant surtout le rle dindiquer la distance spatiotemporelle par rapport lnonciation ou ses protagonistes, les dmonstratifs sont des dictiques cestdire des lments qui ne peuvent tre dcods que par rapport au contexte situationnel du message. A la diffrence des autres langues romanes, le franais ne connat plus que le dmonstratif de deux degrs : la p r o x i m i t et l l o i g n e m e n t rapports aux deux agents du message (locuteur et auditeur) ou au moment de lnonciation. Il sagit par consquent dune opposition bidimensionnelle simple qui ne prsente aucune diffrenciation entre la distance rapporte au locuteur et celle rapporte lauditeur. Le systme du dmonstratif franais repose sur une double srie doppositions: a) une opposition de nature grammaticale, syntagmatique, en vertu de laquelle on distingue entre les formants adjectifs et ceux qui sont des pronoms.61

Rfrence a) virtuelle

Les premiers jouent le rle de prdterminants (indices) nominaux, car ils participent la constitution du syntagme nominal en portant les marques de genre et de nombre du nom centre. Les seconds peuvent tre aussi des constituants de phrase ou de syntagme, apparaissant en position de GN1 ou de GN2. b) une opposition smantique de nature dictique : p r o x i m i t / l o i g n e m e n t ralise par les indices ci/l, devenus ncessaires au moment o les deux sries se sont disjointes smantiquement. 2.4.3.0. Les formants des prdterminants dmonstratifs Genre Nombre Singulier Fminin Masculin ce cet cette ce sac cet acteur cette femme cet homme cette actrice cette harmonie ces garons ces hommes ces ces femmes ces actrices

Pluriel

La forme [s t] est utilise la fois comme forme du fminin et comme forme du masculin si le segment qui suit commence par une voyelle. Graphiquement on fait la diffrence entre cet (masculin) et cette (fminin): CET arbre CET homme CETTE attaque CETTE horloge Les prdterminants dmonstratifs peuvent tre accompagns des particules adverbiales ci et l que lon place aprs le substantif en les rattachant celuici par un trait dunion dans le code graphique: Ce livreCI / CE livreL CES joursCI / CES joursL Si le nom est accompagn dun adjectif, lemploi des particules nest pas possible au cas o cet adjectif est postpos au nom centre : *CE livreCI intressant62

Dans la langue familire ou populaire, cette restriction nexiste pas, car ladjectif postpos est considr comme faisant corps avec le nom et reoit la marque dictique : CE crayon rougeCI CETTE maison blancheL De ces deux indices adverbiaux, cest la forme ci qui apparat comme le cas marqu, car l couvre aussi les emplois de ci dont la probabilit doccurrence est plus faible. On dira aujourdhui: cest cette toffel que je choisis aussi bien et mme plutt que cette toffeci (R. GEORGIN, 1952: 152). Dans les nuances familire et populaire du franais les particules ci et l, en train de saffaiblir au point de vue de lopposition de distance, annule en faveur de l, sont renforces par ici et lbas qui rtablissent lopposition proximit/loignement: CETTE maison ICI / CETTE maison LBAS Le systme articulation binaire du dmonstratif franais est devenu asymtrique cause de lextension de l qui marque aussi bien lloignement que la proximit. Un troisime dmonstratif dictique sest dgag, lbas, pour spcifier lloignement. Le franais est donc en train de se constituer un systme ternaire, synchroniquement bien attest tant par les emplois que par les frquences et qui entre en concurrence avec le systme ancien: systme ancien binaire, articulant les deux formes selon lopposition pertinente / proximit / et qui fonctionne toujours lintrieur de certaines limites; systme contemporain ternaire, articulant deux formes polaires marques, ici vs. lbas, et une forme neutralise de grande extension (J. DERVILLEZBASTUJI, 1982 : 366). Les formes simples du dmonstratif et celles composes laide de ci et de l se trouvent soit en variation conditionne par le thme du nom quelles accompagnent, ou par le registre de langue, soit en variation libre: a) dans le registre de lnonc (temps rapport au moment de lnonciation = temps o lon parle): les particules adverbiales sont exclues avec les noms rfrent temporel de 24 heures : matin, aprsmidi, soir, nuit etc : ce matin, ce soir, cet aprsmidi, cette nuit etc.63

lemploi de ci est obligatoire pour la rfrence au moment zro avec des noms de sens temporel indtermin: jour (pluriel), temps (pluriel), heure, mois etc.: A cette heureci, ces joursci, en ces tempsci, ce moisci etc. les formes simples et composes sont en variation libre avec les noms : semaine, anne, moment : Cette semaine (ci), cette anne (ci), en ce moment (ci) et avec les noms qui expriment des divisions temporelles dtrmins par tous: Tous ces temps (ci), tous ces mois (ci) etc. b) pour laxe du rcit, lemploi de la particule l est obligatoire avec les substantifs dsignant des divisions temporelles: Ce matinl, ces joursl etc. 2.4.3.1. Les fonctions des prdterminants dmonstratifs. Les prdterminants dmonstratifs notent tout dabord la distance spatiotemporelle par rapport aux deux participants du message. Cette fonction du dmonstratif est troitement lie aux conditions du message, lacte de lnonciation mme. Dans les communications courantes, les sens du dmonstratif est dcod laide de la situation ou du geste: Fermez CETTE porte. Passezmoi CE cahier. Allo, Lon ! cria gaiement Antoine. Un peu de cognac pour CES gaillardsL ! (R. Martin du Gard) Surveillez CE petit, Mademoiselle (H. Bazin) Dans le cas de la rfrence la situation, le dmonstratif opre comme un dictique, son sens ne pouvant tre compris que par la connaissance des conditions du message: Pas CET aprsmidi, cest le jour de consultation du docteur. . . (Martin du Gard) Nayez pas peur je reviendrai vous voir CE soir. (Beauvoir)

64

Lorsquils se rfrent un message antrieur, les prdterminants dmonstratifs sont des substituts, des vocateurs qui ont cess dtre des dictiques, ce sont des anaphores: Elle avait trois cent mille francs de dot. Trois cent mille francsor (. . .). Mon pre, qui avait aim une petite camarade protestante (. . .) pousa CETTE dot . . . (H. Bazin) Si je napercevais rien j