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220 Congrès STC 2014 20 Hypoglycémie sévère sous -bloquants M. Evrard 1,, C. Kebbabi 1,2 , L. Occhio 1,2 , J. Manel 1 1 Centre antipoison et de toxicovigilance, CHU de Nancy, 54000 Nancy, France 2 Université de Lorraine, 54000 Nancy, France Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. Evrard) Introduction Les -bloquants regroupent une famille de médi- caments antagonistes compétitifs sélectifs des récepteurs - adrénergiques périphériques et centraux. En liens direct ou indirect avec leur action pharmacologique sur les -récepteurs, de nom- breux effets indésirables sont observés tels que bradycardie, hypotension, troubles du rythme, bronchospasme, syndrome de Raynaud, hypoglycémies... Le cas d’une hypoglycémie sévère durable chez un enfant traité par nadolol est rapporté. Méthodes Documentation et description du cas clinico- biologique. Analyse des cas recensés dans le système d’information des centres antipoison, analyse bibliographique. Résultats À 6h45, un enfant, 8 ans, 20 kg, est retrouvé, par ses parents dans son lit en hypotonie avec clonies des membres supérieurs. À l’arrivée des secours, la glycémie capillaire est quan- tifiée à 0,3 g. L 1 , qui motive l’administration immédiate de 10 mL d’une solution glucosée à 30 % puis d’une perfusion de glucose à 10 % jusqu’à normalisation (1,05 g. L 1 ). L’enfant est hospitalisé pour hypoglycémie sévère cétotique avec malaise et convulsions inaugurales. L’interrogatoire a révélé un syndrome du QT long, diag- nostiqué 4 mois auparavant et traité par nadolol (posologie 20 mg : 1—0—1). On note la survenue, 15 jours plus tôt, d’un épisode de malaise sans convulsion, étiqueté vagal. À son entrée, le patient est conscient et orienté (score de Glasgow 15), hypothermique (35,2 C), sans autre particularité. Le bilan biologique initial, réalisé à la prise en charge à domicile, confirme une hypoglycémie sévère à 0,18 g. L 1 , une hyperleucocytose de démarginalisation à 29 G. L 1 ; l’ionogramme, les bicarbonates, la NFS, le BHC, les CPK, la CRP, et la PCT sont normaux. Le bilan étiologique n’a pas objectivé d’origine endocrinienne. L’intoxication éthylique aiguë et le surdo- sage en nadolol sont exclus. La seule particularité relève, la veille, d’une absence de prise de collation à 16heures et d’un dîner léger, hypocalorique (portion de salade de carotte avec jambon accompa- gnée d’eau), soit un jeûne relatif de 19 heures Il n’a pas été observé d’autre épisode d’hypoglycémie. Discussion et Conclusion Bien que rarement observé à dose thérapeutique, mais plus fréquemment en situation toxique, l’hypoglycémie est un effet de classe des -bloquants, notamment lié à leur action sur les récepteurs -2 adrénergiques, provoquant une diminution du rétrocontrôle positif hépato-pancréatique de la glycémie par inhibition de la glycogénolyse et de la néoglucoge- nèse hépatique. Ainsi, des hypoglycémies sévères (< 0,2 g.L 1 ) avec retentissement neurologique ont été rapportées. Des situations par- ticulières influant sur le métabolisme glucidique (jeûne, activités physiques...) en favorisent la survenue. L’éducation thérapeutique du patient ou de son entourage en prévention de cette iatrogénie médicamenteuse peut en limiter la survenue et les conséquences. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. http://dx.doi.org/10.1016/j.toxac.2014.09.023 21 Diméthylfumarate (DMFu) F. Flesch 1,, C. Solal 2 1 Centre antipoison et de toxicovigilance, Nouvel hôpital Civil, 67000 Strasbourg, France 2 Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), 94701 Maisons-Alfort, France Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (F. Flesch) Introduction Le DMFu est une substance chimique utilisée en tant que principe actif médicamenteux dans certains pays européens ; il a également été utilisé en dehors de l’U.E. comme antifon- gique d’articles chaussants, canapés, fauteuils, échappant ainsi au champ d’application de la Directive « Biocides » 98/8/EC (transfor- mée depuis en Règlement sur les produits biocides n o 528/2012). Discussion Suite à la survenue d’une série de cas d’atteintes cuta- nées sévères après contact avec ces articles, un arrêté, publié au JO de décembre 2008, a suspendu l’importation et la mise sur le marché de sièges et articles contenant du DMFu. Le 15 mai 2012, le règlement (UE) n o 412/2012 a interdit l’utilisation et la mise sur le marché d’articles dont la concentration en DMFu était supérieure à 0,1 mg/kg. L’InVS, prévenue de la survenue des premiers cas en 2008, a transmis l’alerte aux CAPTV et a sollicité la DGCCRF pour confirmer la pré- sence de DMFu dans les articles incriminés. La DGS a, par ailleurs, adressé une saisine au comité de coordination de toxicovigilance (CCTV) pour solliciter la réalisation d’un bilan sur le DMFu (cas recensés par les CAPTV et le réseau Revidal Gerda). Un rapport finalisé le 10 janvier 2009 fait état de 118 cas de dermatite dont 97 pour lesquels la responsabilité du DMFu était au moins plausible. Dans 25 cas la sensibilisation à la substance a été confirmée par des tests épicutanés. Des personnes regroupées en association, se plaignant de problèmes de santé récurrents malgré le retrait des produits contaminés, ont sollicité le ministre de la santé afin que des mesures de DMFu au sein de leur logement soient réalisées. L’Afsset (actuellement Anses), a réalisé dès 2009 des campagnes de mesure afin d’évaluer la contamination pouvant subsister dans les logements de personnes préalablement exposées et se plaignant de troubles de santé réma- nents. Ces investigations ont permis de confirmer la présence de DMFu au sein de matériaux textiles dans 6 logements sur 14. En raison de la poursuite des plaintes et ce malgré le retrait des articles contaminés, il a été réalisé un nouveau recensement des cas symptomatiques notifiés entre le 1 er janvier 2009 et le 28 février 2010. 107 cas ont été enregistrés dont 84 d’imputabilité au moins plausible. La détection des nouveaux cas a été poursuivie à partir de la base des cas d’intoxication des CAPTV (Sicap). Ainsi, de janvier 2012 à juillet 2014, 195 cas d’imputabilité non nulle ont été colligés dont 67 en rapport avec des articles chaussants, 55 avec des articles meu- blants et 44 avec des articles d’habillement. La responsabilité du DMFu n’a été confirmée que dans 1 cas par un test épicutané positif. Néanmoins, l’imputabilité de l’agent dans la genèse des symptômes était probable dans 31 cas, possible dans 93, douteuse dans 48 et indéterminable dans 22. Il se pose donc le problème de la nature de la substance en cause dans ces articles. Seule l’analyse per- mettrait d’appréhender ce problème ; or celle-ci n’est que très rarement réalisée, ce qui constitue certainement l’écueil majeur dans la surveillance de l’événement. Conclusion Malgré l’interdiction d’utilisation du DMFu en tant que traitement antifongique de marchandises provenant de l’étranger, les CAPTV continuent d’enregistrer des plaintes, ce qui soulève le problème de l’analyse des articles afin d’identifier la(les) substance(s) en cause. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. http://dx.doi.org/10.1016/j.toxac.2014.09.024

Hypoglycémie sévère sous β-bloquants

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220 Congrès STC 2014

20Hypoglycémie sévère sous �-bloquantsM. Evrard 1,∗, C. Kebbabi 1,2, L. Occhio 1,2, J. Manel 1

1 Centre antipoison et de toxicovigilance, CHU de Nancy, 54000Nancy, France2 Université de Lorraine, 54000 Nancy, France∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (M. Evrard)

Introduction Les �-bloquants regroupent une famille de médi-caments antagonistes compétitifs sélectifs des récepteurs �-adrénergiques périphériques et centraux. En liens direct ou indirectavec leur action pharmacologique sur les �-récepteurs, de nom-breux effets indésirables sont observés tels que bradycardie,hypotension, troubles du rythme, bronchospasme, syndrome deRaynaud, hypoglycémies. . . Le cas d’une hypoglycémie sévèredurable chez un enfant traité par nadolol est rapporté.Méthodes Documentation et description du cas clinico-biologique. Analyse des cas recensés dans le système d’informationdes centres antipoison, analyse bibliographique.Résultats À 6h45, un enfant, 8 ans, 20 kg, est retrouvé, parses parents dans son lit en hypotonie avec clonies des membressupérieurs. À l’arrivée des secours, la glycémie capillaire est quan-tifiée à 0,3 g. L−1, qui motive l’administration immédiate de 10 mLd’une solution glucosée à 30 % puis d’une perfusion de glucose à10 % jusqu’à normalisation (1,05 g. L−1). L’enfant est hospitalisépour hypoglycémie sévère cétotique avec malaise et convulsionsinaugurales. L’interrogatoire a révélé un syndrome du QT long, diag-nostiqué 4 mois auparavant et traité par nadolol (posologie 20 mg :1—0—1). On note la survenue, 15 jours plus tôt, d’un épisode demalaise sans convulsion, étiqueté vagal. À son entrée, le patientest conscient et orienté (score de Glasgow 15), hypothermique(35,2 ◦C), sans autre particularité. Le bilan biologique initial, réaliséà la prise en charge à domicile, confirme une hypoglycémie sévèreà 0,18 g. L−1, une hyperleucocytose de démarginalisation à 29 G.L−1 ; l’ionogramme, les bicarbonates, la NFS, le BHC, les CPK, laCRP, et la PCT sont normaux. Le bilan étiologique n’a pas objectivéd’origine endocrinienne. L’intoxication éthylique aiguë et le surdo-sage en nadolol sont exclus. La seule particularité relève, la veille,d’une absence de prise de collation à 16 heures et d’un dîner léger,hypocalorique (portion de salade de carotte avec jambon accompa-gnée d’eau), soit un jeûne relatif de 19 heures Il n’a pas été observéd’autre épisode d’hypoglycémie.Discussion et Conclusion Bien que rarement observé à dosethérapeutique, mais plus fréquemment en situation toxique,l’hypoglycémie est un effet de classe des �-bloquants, notammentlié à leur action sur les récepteurs �-2 adrénergiques, provoquantune diminution du rétrocontrôle positif hépato-pancréatique de laglycémie par inhibition de la glycogénolyse et de la néoglucoge-nèse hépatique. Ainsi, des hypoglycémies sévères (< 0,2 g.L−1) avecretentissement neurologique ont été rapportées. Des situations par-ticulières influant sur le métabolisme glucidique (jeûne, activitésphysiques. . .) en favorisent la survenue. L’éducation thérapeutiquedu patient ou de son entourage en prévention de cette iatrogéniemédicamenteuse peut en limiter la survenue et les conséquences.Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir deconflits d’intérêts en relation avec cet article.

http://dx.doi.org/10.1016/j.toxac.2014.09.023

21Diméthylfumarate (DMFu)F. Flesch 1,∗, C. Solal 2

1 Centre antipoison et de toxicovigilance, Nouvel hôpital Civil,67000 Strasbourg, France

2 Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), 94701Maisons-Alfort, France∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (F. Flesch)

Introduction Le DMFu est une substance chimique utilisée en tantque principe actif médicamenteux dans certains pays européens ;il a également été utilisé en dehors de l’U.E. comme antifon-gique d’articles chaussants, canapés, fauteuils, échappant ainsi auchamp d’application de la Directive « Biocides » 98/8/EC (transfor-mée depuis en Règlement sur les produits biocides no 528/2012).Discussion Suite à la survenue d’une série de cas d’atteintes cuta-nées sévères après contact avec ces articles, un arrêté, publié auJO de décembre 2008, a suspendu l’importation et la mise sur lemarché de sièges et articles contenant du DMFu. Le 15 mai 2012, lerèglement (UE) no 412/2012 a interdit l’utilisation et la mise sur lemarché d’articles dont la concentration en DMFu était supérieure à0,1 mg/kg.L’InVS, prévenue de la survenue des premiers cas en 2008, a transmisl’alerte aux CAPTV et a sollicité la DGCCRF pour confirmer la pré-sence de DMFu dans les articles incriminés. La DGS a, par ailleurs,adressé une saisine au comité de coordination de toxicovigilance(CCTV) pour solliciter la réalisation d’un bilan sur le DMFu (casrecensés par les CAPTV et le réseau Revidal Gerda). Un rapportfinalisé le 10 janvier 2009 fait état de 118 cas de dermatite dont97 pour lesquels la responsabilité du DMFu était au moins plausible.Dans 25 cas la sensibilisation à la substance a été confirmée par destests épicutanés.Des personnes regroupées en association, se plaignant de problèmesde santé récurrents malgré le retrait des produits contaminés, ontsollicité le ministre de la santé afin que des mesures de DMFuau sein de leur logement soient réalisées. L’Afsset (actuellementAnses), a réalisé dès 2009 des campagnes de mesure afin d’évaluerla contamination pouvant subsister dans les logements de personnespréalablement exposées et se plaignant de troubles de santé réma-nents. Ces investigations ont permis de confirmer la présence deDMFu au sein de matériaux textiles dans 6 logements sur 14.En raison de la poursuite des plaintes et ce malgré le retrait desarticles contaminés, il a été réalisé un nouveau recensement descas symptomatiques notifiés entre le 1er janvier 2009 et le 28 février2010. 107 cas ont été enregistrés dont 84 d’imputabilité au moinsplausible.La détection des nouveaux cas a été poursuivie à partir de la basedes cas d’intoxication des CAPTV (Sicap). Ainsi, de janvier 2012 àjuillet 2014, 195 cas d’imputabilité non nulle ont été colligés dont67 en rapport avec des articles chaussants, 55 avec des articles meu-blants et 44 avec des articles d’habillement. La responsabilité duDMFu n’a été confirmée que dans 1 cas par un test épicutané positif.Néanmoins, l’imputabilité de l’agent dans la genèse des symptômesétait probable dans 31 cas, possible dans 93, douteuse dans 48 etindéterminable dans 22. Il se pose donc le problème de la naturede la substance en cause dans ces articles. Seule l’analyse per-mettrait d’appréhender ce problème ; or celle-ci n’est que trèsrarement réalisée, ce qui constitue certainement l’écueil majeurdans la surveillance de l’événement.Conclusion Malgré l’interdiction d’utilisation du DMFu en tantque traitement antifongique de marchandises provenant del’étranger, les CAPTV continuent d’enregistrer des plaintes, ce quisoulève le problème de l’analyse des articles afin d’identifier la(les)substance(s) en cause.Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir deconflits d’intérêts en relation avec cet article.

http://dx.doi.org/10.1016/j.toxac.2014.09.024