Imaginaire de La Grenouille

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L'univers des reprsentations ou l'imaginaire de la grenouille

Mensuel N 128 - Juin 2002 Les reprsentations mentales

L'univers des reprsentations ou l'imaginaire de la grenouilleJEAN-FRANOIS DORTIER

Notre univers mental est fait de reprsentations. De l'ide de grenouille l'image du bonheur, les reprsentations possdent quelques rgles d'organisation et de fonctionnement qui en font des outils essentiels pour penser, orienter nos actions, communiquer avec autrui, et imaginer... Quel point commun y a-t-il entre un hamburger, Jsus-Christ et une petite grenouille ? Outre le fait qu'ils se mangent tous les trois (1), ils possdent une autre particularit commune, qu'ils partagent d'ailleurs avec les ours en peluche, la schizophrnie, la tour Eiffel, le chiffre sept, le Pre Nol ou l'existentialisme. Tout ces mots voquent quelque chose en nous : une image, un souvenir, un fantasme, une ide plus ou moins vague... Bref, tous existent l'tat de reprsentation mentale. En psychologie, la reprsentation est dfinie gnralement comme un ensemble de connaissances ou de croyances, encodes en mmoire et que l'on peut extraire et manipuler mentalement. Ainsi la reprsentation mentale de votre cousin Maxime renvoie-t-elle un ensemble d'informations, d'images, de sentiments associs sa personne. Et cette reprsentation permet de l'identifier, de le dcrire, de l'apprcier, et de se comporter son gard de telle ou telle faon (faut-il l'inviter ou non votre mariage ?). Ces reprsentations ne sont pas seulement de petites tiquettes mentales qui nous servent dcrypter notre environnement. On les utilise aussi pour communiquer avec autrui, pour rver, imaginer, planifier et orienter nos conduites. Les reprsentations structurent notre paysage mental et ce titre, elles sont devenues l'un des thmes d'tude privilgis des sciences humaines. De la psychologie l'anthropologie, de l'histoire la smiologie, la plupart des sciences humaines se sont penches sur le sujet. Si ces tudes sont loin de constituer un champ de recherche unifi, il n'est pas impossible d'y reprer quelques tendances convergentes et mcanismes communs dans leur organisation et leur fonctionnement.

Qu'est-ce qu'une grenouille ?http://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (1 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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Prenons un exemple de reprsentation mentale parmi d'autres : la grenouille. Pour un psychologue cognitif, l'image courante que l'on se fait de la grenouille se rsume un schma assez simple : c'est un petit animal quatre pattes, qui fait des bonds, coasse, et vit auprs des mares. Mais comment s'y prend-on pour rsoudre mentalement un problme du type : La grenouille a-t-elle des lvres ? La question peut paratre sans grand intrt, mais ce type de problme est au coeur d'un des dbats les plus importants en psychologie cognitive : pense-t-on avec des images ou par concepts ? (voir l'encadr, p. 26) Pour un spcialiste de psychologie sociale, la grenouille sera galement un intressant objet de rflexion. Car l'image de la grenouille varie d'une socit l'autre. En tmoigne le fait que les Franais jugent bon de la cuisiner, ce qui choque beaucoup leurs voisins (2). Cela nous rappelle que les grenouilles, comme bien d'autres choses, sont aussi le produit d'une socit qui leur donne sens. Les reprsentations mentales sont aussi des faits de socit : l'historien peut facilement nous en convaincre. L'hellniste Pierre Lvque a d'ailleurs rdig un joli petit livre sur Les Grenouilles dans l'Antiquit (3). Il nous montre que pour les Grecs ou les Egyptiens, la petite bte tait associe plusieurs divinits, et que ses reprsentations trouvaient leur place dans des sanctuaires. Ainsi chez les Grecs, la desse-mre Artmis tait lie la grenouille, tout comme, en Egypte, le desse des naissances Hqet ; en Inde, la grenouille figurait dans des rituels de gurison... Il existe donc une symbolique de la grenouille. A ce titre, d'ailleurs, une psychanalyse de la grenouille n'est pas impossible. Plusieurs lments nous y engagent. La grenouille n'a-t-elle pas souvent t associe au sexe fminin ? L'ethnopsychiatre Georges Devereux (1908-1985) a mme crit tout un livre sur ces figures de femmes ou de desses dites Baubo (4), places dans une position obscne dite de la grenouille , les cuisses largement cartes pour montrer leur sexe (5)... Cette petite exploration de l'imaginaire de la grenouille nous montre dj les multiples facettes de ce que l'on nomme reprsentations . Les grenouilles (ou tout autre objet) peuvent tre traites tour tour comme des schmas cognitifs (images, concepts), des reprsentations sociales (diffrentes selon les milieux et les poques), comme des forts de symboles vhiculant un imaginaire fantasmatique et suscitant des vocations multiples. Il en va des grenouilles comme des canards, des serpents, des dragons, des parapluies, des maisons, des les dsertes, du cousin Maxime, des pompiers, des hommes politiques, du bonheur, des stars et des dieux : l'univers des reprsentations forme un vaste ensemble d'objets mentaux qui peuplent nos esprits. De cet ensemble foisonnant, les sciences humaines sont cependant parvenues dgager quelques logiques et mcanismes communs. Rsumons-les autour de quelques ides-forces : 1) les reprsentations mentales sont organises ; 2) elles sont stables ;

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3) elles sont utiles ; 4) elles sont vivantes.

L'organisation des idesLes reprsentations mentales sont structures selon des lois qui leur sont propres. Une des premires qutes des chercheurs en sciences cognitives, dans les annes 60, fut de savoir sous quelles formes le cerveau humain encodait les reprsentations mentales. Une premire hypothse fut de considrer notre lexique mental sur le modle d'un dictionnaire, o chaque reprsentation est dfinie par une liste de proprits. Par exemple : 1) Les grenouilles ont quatre pattes ; 2) Ce sont des batraciens ; 3) Elles pondent des oeufs qui se transforment en ttards ; 4) Les ttards se transforment en grenouilles , etc. Chacune de ces propositions peut se dcomposer en propositions plus simples et lmentaires. En combinant les propositions entre elles par des rgles d'infrence, on peut aboutir des dductions du type : si Monica est une grenouille, alors Monica vit prs d'un tang, elle pond des oeufs qui se transformeront en ttards, etc. Cette vision des reprsentations mentales sous forme propositionnelle a connu de nombreux dveloppements (proprits, prdicats, rseaux smantiques). Le but tait de formaliser les connaissances humaines sous forme d'arbres et de graphes, ou rseaux smantiques, et de les transposer en programme informatique. Mais l'espoir de retranscrire toutes les reprsentations mentales sous forme d'un langage symbolique a t du. En effet, si notre cerveau fonctionnait selon les rgles strictes de la logique des propositions, il serait immdiatement pris en dfaut face des situations atypiques. Une grenouille trois pattes, par exemple, viole une des propositions de base du lexique mental, qui veut que les grenouilles sont de petits animaux quatre pattes . En toute logique, notre pauvre grenouille handicape doit tre exclue de la catgorie des grenouilles. De mme, nous serions incapables d'identifier la petite Rheobratacus silus. Cette petite grenouille australienne a tous les caractres de ses espces cousines, part le fait d'incuber ses oeufs dans son estomac avant de les recracher sous forme de petites grenouilles compltement formes ! Ici encore, une rgle habituelle de reconnaissance des grenouilles (elles librent des oeufs qui se transforment en ttards) suffirait l'exclure de la catgorie pour un esprit rgi par des rgles formelles (6). Or, il est vident que nous ne procdons pas ainsi pour nous reprsenter le monde. Face ces cas limites (une grenouille trois pattes ou qui crache ses petits), nous savons tout de suite identifier l'animal comme membre de la catgorie (7). Pourquoi ? Parce que nous identifions un objet, un animal, ou tout autre chose, parhttp://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (3 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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ressemblance avec un prototype de rfrence et non en tablissant une liste plus ou moins longue de ses proprits. Ainsi, un btiment est reconnu comme une maison (et non un chteau, une glise ou une HLM) parce qu'il possde un air de famille avec le modle courant de rfrence. Cette thorie dite des prototypes a t labore dans les annes 70 par la psychologue amricaine Eleanor H. Rosch (8). Elle a apport un nouveau regard sur les reprsentations mentales. Une reprsentation (d'un objet, d'un tre vivant, etc.) n'est pas constitue d'une minibase de donnes exhaustive sur le sujet. Elle se prsente comme le prototype le plus courant de sa catgorie. Dans les annes 70 vont surgir d'autres thories des reprsentations mentales, bties sur le mme principe. Les thories des schmas, des scripts, des frames, des modles mentaux et autres Mops (voir mots-cls, p. 31). Ils ont tous en commun de considrer les reprsentations mentales partir d'un pattern (patron, canevas, configuration) de rfrence. Ainsi, la thorie des schmas, reprise du psychologue anglais Frederick Bartlett (1886-1969) (9), suppose que notre mmoire encode les informations (souvenirs d'vnements, lecture d'un livre, coute d'un expos...) non pas comme une liste d'informations dsordonnes, mais en les rassemblant autour de schmas simples, cohrents et familiers. La vision des reprsentations mentales organises en petits noyaux de sens est l'une des thses centrales de la psychologie sociale. (voir l'encadr, p. 28). Serge Moscovici a montr que la rception de la psychanalyse, en se diffusant auprs du grand public, se rduisait de plus en plus un schma simple et grossier (psychanalyse = inconscient + complexe d'OEdipe). Bien d'autres travaux sont venus confirmer par la suite ce phnomne de rduction des reprsentations mentales un petit noyau stable. On la retrouve en philosophie des sciences avec les notions de thmatas, de paradigmes. Toutes les thories cognitives contemporaines des reprsentations mentales (schmas, Mops, prototypes, frames, strotypes...) envisagent celles-ci comme un formatage des informations par des modles ou cadres de rfrence. Mais d'o viennent alors la force et la prgnance de ces modles, de ces ides fixes ?

Les reprsentations ont la vie dureLes reprsentations mentales sont organises autour de ples de rfrence. Et ces points d'ancrage sont trs stables. Nos opinions sur la psychanalyse, nos amis, la mondialisation ou la cuisine ne varient pas au gr des informations qui nous parviennent. Sans quoi nous changerions d'opinion politique aprs chaque dbat, en fonction des interventions des uns et des autres. Or, on ne change pas de reprsentation comme on change de chemise ; les reprsentations ont la vie dure, elles sont stables et robustes. Pourquoi ? Du fait d'un triple ancrage - psychologique, social et institutionnel -, repr par plusieurs disciplines des sciences humaines. - L'enracinement psychologique profond des reprsentations mentales est li la formation de schmes de perception et de comportement acquis tt dans l'enfance (Jean Piaget), ou encore des formeshttp://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (4 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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(Gestalt) impliques dans notre systme perceptif. Edgar Morin dsigne sous le nom d' imprinting culturel ce faonnage trs prcoce qui s'inscrit crbralement ds la petite enfance par la stabilisation slective des synapses, inscriptions premires qui vont marquer irrversiblement l'esprit individuel dans son monde de connatre et d'agir [10]. Certains anthropologues et psychologues volutionnistes pensent mme que notre esprit organise le monde partir de modules et d'archtypes invariants hrits de notre pass volutif. Bien sr, il n'existe pas de module hrditaire spcialement ddi la reprsentation des grenouilles, pas plus qu'il n'en existe pour reconnatre les rfrigrateurs ou les brosses dents. Mais la capacit cataloguer les choses en objets inertes , tres vivants , et classer ces derniers en catgories stables, serait, elle, bel et bien programme. Les neurosciences nous en apportent une preuve. Des patients, atteints de lsions du cerveau trs spcifiques, prouvent des difficults reconnatre des objets familiers, des animaux ou des visages... - Un ancrage social vient s'ajouter l'enracinement psychologique des reprsentations. Les routines mentales, les mcanismes d'influence et de subordination aux normes de groupe assurent tout d'abord une stabilit des reprsentations dans la vie quotidienne ou le travail (voir l'article de M. Ball, p. 36). Mais si une reprsentation s'installe et perdure dans un groupe, ce n'est pas du seul fait du poids des habitudes et de l'inertie mentale. Certaines reprsentations s'enracinent plus que d'autres, parce qu'elles assument d'autres fonctions que celle de dcryptage du monde. Les reprsentations sociales en donnent un bon exemple. Selon Jean-Claude Abric, elles possdent quatre fonctions essentielles : une fonction cognitive, une fonction d'orientation de l'action, une fonction de justification des pratiques et une fonction identitaire. Cette dernire a t particulirement tudie propos des strotypes et reprsentations sociales des groupes. Les prjugs des supporters de foot de Marseille l'gard des Parisiens (ou inversement) ne sont pas simplement une reprsentation grossire, caricaturale et stupide. C'est un lment d'identit du groupe. Les reprsentations sociales permettent un groupe de se dfinir par rapport un autre et de s'valuer positivement ou ngativement son gard. Ce racisme ordinaire, dans le sport, la politique, l'entreprise, les relations interethniques, est l'un des penchants les plus profonds de la pense en socit. Denise Jodelet en donne un exemple dans la belle enqute qu'elle a mene sur les reprsentations de la folie Ainay-le-Chteau, un petit village du Cher. Cette agglomration a la particularit de possder une institution psychiatrique qui pratique depuis longtemps le placement des malades mentaux auprs des familles. Or, malgr la proximit des malades avec les habitants, les reprsentations des fous (qu'on appelle ici les bredins ) tendent se rduire quelques catgories de base, assez grossires ( le crtin , le maboul , le drang ). Le maintien de ces catgories pjoratives permet aux gens du village non seulement de domestiquer l'trange , mais aussi de se dmarquer des fous, d'affirmer leur identit et de se reconnatre comme normauxhttp://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (5 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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et en bonne sant face aux gens du dehors [11]. - L'assise institutionnelle est un autre facteur de stabilit des reprsentations. L'image que nous avons de la France, des malades mentaux ou des Eglises ne se forge pas dans le seul creuset d'un cerveau solitaire ou dans le cnacle de petits groupes. Les reprsentations se reproduisent et sont vhicules par le biais d'institutions de toute sorte : l'cole, les partis politiques, l'Etat, les mdias. Ce phnomne d'inscription institutionnelle des reprsentations a t dcrit par des anthropologues comme Maurice Halbwachs (Les Cadres sociaux de la mmoire, Albin Michel, rd. 2000), Mary Douglas (Comment pensent les institutions ?, La Dcouverte, 1999), Benedict Anderson (L'Imaginaire national, La Dcouverte, 2002). Les historiens s'intressent dsormais beaucoup aux conditions dans lesquelles une socit traite de son pass, met en scne ou efface de sa mmoire collective. Ils observent comment un vnement (la Rvolution franaise, la Premire Guerre mondiale, le rgime de Vichy, la guerre d'Algrie...) est rapport et transmis via les manuels scolaires, le cinma, les commmorations, les monuments et autres lieux de mmoire. L'histoire des reprsentations est devenue un champ de recherche part entire (voir l'encadr, p. 30). Depuis peu, la gographie aussi s'occupe de ces questions de reprsentation. A travers les cartes, les manuels scolaires, les albums, les guides de voyage, la publicit, les documentaires, on se construit une vision d'un pays ou d'une rgion. L'image que l'on se fait des Alpes, de l'Irlande ou de l'Inde soulve des enjeux qui ne sont pas purement cognitifs. Ces reprsentations de l'espace dterminent l'orientation des choix des vacanciers. Dans un monde o le tourisme est en passe de devenir la premire industrie mondiale, le poids des reprsentations se mesure parfois en millions de dollars... Si les reprsentations mentales tendent s'organiser autour de petit schmes cognitifs de base, c'est que leur rle ne se borne pas dcrire la ralit. Elles nous servent aussi valuer les objets et agir. Elles sont utiles et fonctionnelles. Revenons notre grenouille. Notre vision du petit batracien ne se rduit pas une description neutre et objective. L'animal peut tre juge sympathique, laid, dgotant ou comestible. Ce marquage affectif de la reprsentation dtermine nos liens avec la grenouille : peut-on la prendre dans la main ? Est-elle dangereuse ? Peut-on en manger ? On le voit : les reprsentations ne sont pas que des images de la ralit. Elles vhiculent aussi de vritables petits modes d'emploi du monde ; les reprsentations de la grenouille, du tube de dentifrice ou de la cigarette nous disent galement comment il faut se comporter leur gard. Cette dimension valuative et pratique des reprsentations mentales a t souligne par plusieurs courants de recherche. La psychologie sociale, on l'a vu, nous dit que les reprsentations sont des guides pour l'action : elles construisent nos gots et nos dgots l'gard de notre environnement.http://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (6 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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Imaginaire, fantasmes, prjugs, thories...Notre rapport la grenouille, comme tout autre objet du monde, est donc finalis . C'est ce que la philosophie de l'esprit dsigne sous le terme d'intentionnalit . L'intentionnalit - la notion est issue de la phnomnologie (Franz Brentano, Edmund Husserl, Maurice Merleau-Ponty) - signifie que les ides qui nous servent penser le monde passent par des reprsentations qui sont orientes par nos dsirs et nos projets. Notre vision de la grenouille, par exemple, est relie d'une faon singulire notre statut d'tre humain. Pour un enfant, la grenouille sera un objet de curiosit, pour un savant, un objet d'tude, pour un gourmet, un objet de dlices... Bref, il n'existe pas de reprsentations des choses sans intention , ou projet . Il en va ainsi de la plupart des reprsentations : du coq au vin comme du bonheur, de Jsus-Christ comme du hamburger. Les reprsentations sont donc organises, stables et utiles. Faut-il concevoir ce stock de reprsentations comme une bote outils mentale, forme de petits modules fonctionnels destins dcoder notre environnement, grer nos conduites et organiser nos activits ? C'est en partie vrai. Mais en partie seulement. D'abord parce que tout en tant stables, les reprsentations sont tout de mme changeantes. Elles varient au cours du temps, basculent parfois d'une conception une autre, totalement opposes. Un des sujets de rflexion de l'histoire des ides et des reprsentations consiste d'ailleurs essayer de comprendre comment et pourquoi se transforment les reprsentations (12). Un point de vue original en la matire rside dans les thories pidmiologiques de la diffusion des ides.

Un processus de filtrage cognitifLe biologiste Stephen Dawkins a labor une thorie des mmes , destine rendre compte de la diffusion et de la transformation des ides humaines. Chaque reprsentation (de la grenouille l'ide de Dieu) est conue comme un petit module mental, nich au coeur de notre cerveau et destin guider nos conduites au quotidien. Certains mmes sont plus adapts que d'autres grer nos conduites et donc plus prgnants. Ainsi, le mme du Petit Chaperon rouge s'implante mieux dans notre esprit que la philosophie de Hegel, parce que sa simplicit est mieux adapte notre structure mentale (plus sensible aux rcits qu'aux rflexions trop abstraites). Mais en se transmettant d'un cerveau un autre, certains mmes subiraient des mutations, comparables aux mutations gntiques : des dfauts de rplications en quelque sorte. Pour Dan Sperber, auteur de La Contagion des ides (Odile Jacob, 1996), ouvrage qui se prsente comme une tentative d'pidmiologie des reprsentations , la mutation des reprsentations est lie un mcanisme plus fondamental et profond que la simple erreur de reproduction. Toute reprsentation, en passant d'un cerveau un autre, est soumise un processus de filtrage cognitif qui dforme et rinterprte les informations changes dans les catgories nouvelles. Il est un autre lment qui explique la vitalit des reprsentations, leurs transformations permanentes. Lahttp://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (7 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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grenouille peut aiguiller, par le jeu des renvois, vers tout un univers de significations : la grenouille de bnitier, l'homme-grenouille, le grenouillage politique, la grenouille du Muppett Show, etc., et, par extension et glissements de sens, l'image d'un tang, la dissection, au baromtre... Le monde mental de la grenouille est sans fin. Cette ouverture du sens a t mise en lumire par la smiologie - science des signes. En smiologie, la reprsentation d'un objet ou d'une ide (par l'intermdiaire d'un signe, une icne, ou d'un symbole) n'est jamais rductible une signification unique. Tout est toujours porteur de sens potentiellement multiples. Comme l'explique Umberto Eco dans Smiotique et philosophie du langage (Puf, 1992), il n'y a pas de clture du sens. Les tentatives thoriques pour rduire une reprsentation - signe, icne, symbole - un sens unique ont t des checs. Voil pourquoi l'image de la grenouille peut prendre dans notre esprit des formes aussi diverses : de l'image d'un animal inoffensif, en passant par celles d'une divinit ou d'un fantasme sexuel, celle d'un messager de la pluie. L'animal rel, lui, reste inchang. Ce que rsumait sa faon Jean Rostand (1894-1977), grand biologiste : Les ides passent, les grenouilles restent.

quoi ressemble une ide ?Quelles formes les reprsentations mentales prennent-elles dans le cerveau : celles de petites images ou celles d'un assemblage de symboles ? Pense-t-on par images ou par concepts ? Une controverse importante oppose les psychologues ce sujet depuis les annes 80. A l'poque, la thse dominante est celle dfendue par Jerry Fodor et Zenon W. Pylyshyn. Ces deux professeurs de l'universit de Rutgers (New Jersey) soutiennent que nos connaissances sont stockes sous forme d'une suite de propositions ( Jules aime les fraises , Rome est la capitale de l'Italie , il pleut ). Ces propositions sont traduites en symboles abstraits et lies par des rgles logiques permettant de dcrire le monde et de raisonner sur celui-ci. Toutes nos ides seraient donc traites, comme dans un programme informatique, sous forme de symboles abstraits, et les images que l'on croit avoir en tte ne sont, selon Z. Pylyshyn, que des piphnomnes. Stephen Kosslyn, un des pionniers de l'tude de l'imagerie crbrale, soutient un point de vue contraire. La plupart de nos penses et reprsentations prennent la forme de petites images intrieures. Le chercheur de Harvard a mis au point plusieurs expriences destines le montrer. Si on demande un sujet de se reprsenter mentalement une le (comme sur l'illustration ci-dessous) et qu'on lui demande de sehttp://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (8 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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dplacer en pense d'un point l'autre de cette le, on constate que le temps de raction mental pour un dplacement est proportionnel la distance qui spare ces points. Tout se passe donc comme si le sujet lisait visuellement une carte intrieure, et sa pense prend donc le temps du trajet imaginaire. Ce constat a t confirm par les expriences menes grce aux techniques d'imagerie crbrale fonctionnelle. Lorsqu'un sujet pense son le imaginaire et que des questions lui sont poses sur la place de certains lments sur cette le ( O est la maison ? , par exemple), les zones des aires visuelles crbrales s'activent ; ces mme zones qui sont impliques dans la vision directe. Des mots aux images Que se passe-t-il maintenant si on voque devant un sujet des mots abstraits (libert, adverbe, silence, puissance...). Comment seront-ils reprsents mentalement ? Allan Paivio soutient la thorie du double codage : les mots abstraits sont cods sous forme verbale, et les mots concrets du vocabulaire (maison, poire, gomme, etc.) sont cods la fois sous forme verbale et sous celle d'images mentales. Ces conclusions semblent galement confirmes par les expriences d'imagerie crbrale : si on demande un sujet plac dans le noir de se reprsenter un objet (une chaise par exemple), on constate que les aires du langage et les aires visuelles sont toutes deux actives. Les premires sans doute pour dcoder la demande (qui est formule sous forme verbale) et les secondes pour se reprsenter mentalement la chaise. Il est donc de plus en plus admis qu'une part de nos penses sont traites sous forme d'images et non de mots. JEAN-FRANOIS DORTIER

Les reprsentations sociales Les pompiers sont des gens courageux, qui font un mtier difficile. Le sport, c'est bon pour la sant (1) . Les hommes politiques sont corrompus. Voil le type de lieu commun que l'on peut entendre tout propos. Le propre de ces reprsentations courantes est de fonctionner comme des clichs , qui rduisent une ralit complexe quelques lments saillants (pas toujours faux d'ailleurs) et de s'en servir comme guide de lecture du monde. L'tude de ces opinions, strotypes, prjugs, a t l'un des thmes fondateurs de la psychologie sociale. Elle s'est largie aux reprsentations sociales, qui couvrent un champ d'tude plus large : les reprsentations de la maladie, de l'entreprise, de l'environnement, de l'alimentation, de la chasse, etc.http://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (9 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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Dans les pays francophones, une tradition particulire de recherche s'est noue partir d'une recherche fondatrice mene par Serge Moscovici en 1961 (2) . Cette recherche a port sur l'image de la psychanalyse dans le grand public. De cette enqute fondatrice sont sorties quelques ides centrales, largement exploites par la suite. - Les reprsentations sociales sont bties autour d'un noyau (certains auteurs parlent de schmas cognitifs de base ou de systme central ). Ce noyau correspond quelques principes directeurs. Ainsi, dans la recherche sur la psychanalyse, S. Moscovici a mis en vidence qu'en se diffusant largement, la thorie de Freud se rduisait deux ides simples : l'existence de l'inconscient et du complexe d'OEdipe, lments accepts ou rejets en bloc. Autour de ce noyau de base s'agrgent des lments priphriques . - Les reprsentations socia-les sont ancres au sein d'un groupe et du systme de valeur qui lui est propre. Dans son enqute, S. Moscovici a montr qu' l'poque, les presses communiste et catholique ont donn chacune des interprtations trs diffrentes de la psychanalyse, lies leur vision particulire de l'individu et de la socit. Une fois ancre , la reprsentation sociale joue un rle de filtre cognitif. Toute information nouvelle tant interprte dans les cadres mentaux prexistants. NOTES 1 Oui, mais sa pratique intensive (qui ne concerne plus qu'une petite lite de la population) provoque aussi de nombreux dcs (1 500 morts par arrt cardiaque chez les coureurs de fonds, par accident d'alpinisme, de moto, de ski...), des blessures, des dfaillances, des maladies, des mutilations chroniques, etc. 2 S. Moscovici, La Psychanalyse. Son image et son public, Puf, 2e dition, 1976. JEAN-FRANOIS DORTIER

De l'histoire des mentalits l'histoire des reprsentations- Lucien Febvre (1878-1956) et Marc Bloch (1886-1944) avaient voulu faire de l'histoire deshttp://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (10 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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mentalits un des axes de l'cole historique des Annales. Nous tions au dbut des annes 30, et il s'agissait alors de rompre avec une histoire des ides coupe de ses bases sociales et de penser les reprsentations d'une socit. L. Febvre va appliquer cette approche dans un livre clbre : Le Problme de l'incroyance au xvie sicle. La religion de Rabelais . Dans cet essai, l'historien a dmontr que l'athisme souvent attribu Rabelais n'est pas pensable son poque. L'outillage mental de la socit franaise du xvie sicle ne permet pas alors de concevoir un monde sans dieu. Rabelais pouvait tre anticlrical, agnostique, librepenseur, diste... mais certainement pas athe. - Dans les annes 60, l'histoire des mentalits prend la forme d'une psychologie historique dont Robert Mandrou et Jean-Pierre Vernant se rclament (en se rfrant au projet du psychologue Ignace Meyerson). Chez J.-P. Vernant, il s'agit de reconstruire la place que tient la raison dans la pense grecque. Ses travaux sont, l'poque, fortement influencs par l'esprit du structuralisme. Mais globalement, les Annales des annes 1960-1980 s'intressent davantage aux soubassement conomiques et sociaux du pass qu'aux ides et reprsentations. - L'histoire des mentalits sera un des tendards de la nouvelle histoire partir de 1978. Les travaux de Philippe Aris (sur la mort, les conceptions de l'enfance), ceux de Michel Vovelle, Jacques Le Goff, Alain Corbin, Jean Delumeau et Paul Veyne sont enrls sous la bannire. L'histoire des mentalits est un concept largi, utilis par J. Le Goff pour dsigner des tudes diverses qui relvent de l'histoire des attitudes face la mort (M. Vovelle, P. Aris), de l'imaginaire du Moyen Age (Georges Duby, J. Le Goff). - En 1989, Roger Chartier lance un manifeste pour une histoire des reprsentations ( Le monde comme reprsentation , dans Les Annales , 1989). Le terme est repris l'anne suivante par l'Italien Carlo Guinsburg dans un article de la mme revue ( La reprsentation, le mot, l'ide , 1990). La mme anne, l'historien des sciences Geoffrey Lloyd lance un pav dans la mare : Pour en finir avec les mentalits . Au fond, les trois auteurs dfendent leur manire une ide commune. Il s'agit de se dmarquer d'une histoire qui enferme les mentalits d'une poque dans un cadre mental unique et englobant. Or, les reprsentations d'une poque sont toujours multiples et donnent lieu sans cesse des rinterprtations, des luttes de reprsentations. C'est la raison pour laquelle Paul Ricoeur pense que l'on est pass d'une histoire des mentalits une histoire des reprsentations (P. Ricoeur, La Mmoire, l'histoire, l'oubli , Seuil, 2001). - Au dbut des annes 2000, l'histoire des reprsentations ne s'est pas impose comme un courant de

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recherche homogne et unifi. On peut y intgrer les travaux d'histoire culturelle , comme ceux d'histoire des ides, les travaux de Louis Maurin sur l'iconographie religieuse ou ceux de Jean-Franois Sirinelli sur l'histoire des intellectuels, en passant par les recherches d'Annette Becker sur les reprsentations de la guerre de 1914-1918. Un champ d'tude vaste et htrogne, dont le seul commun dnominateur est de considrer que les reprsentations ont une histoire, et que l'histoire en dpend. JEAN-FRANOIS DORTIER

FrameTerme propos par Marvin Minsky (1975), l'un des pionniers de l'intelligence artificielle, le frame est proche de la notion de schma ou de script. C'est un cadre de rfrence qui dcrit les traits essentiels relatifs une situation ou un objet donn. Par exemple, le frame dcrivant une pice d'appartement est compos d'informations du type : une pice contient une porte, des fentres, un sol, des meubles. Chaque lment (porte, fentre...) fait ensuite l'objet d'une description plus prcise, toujours rapporte un cadre de rfrence, comme le frame du rectangle peut signifier la fois fentre ou porte. La prsence d'un rideau sera un lment (slot) qui spcifie la fentre.

Forme (ou Gestalt)Selon Max Wertheimer (1880-1943), Kurt Kofka (1886-1941) et Wolfgang Khler (1887-1967), les principaux reprsentants de ce courant de la psychologie, la perception visuelle organise les donnes de l'environnement partir de formes (Gestalt = forme) trs prgnantes (les bonnes formes ). Percevoir, c'est donc projeter sur la ralit des formes ou des configurations connues. Par exemple, une forme en croissant de lune est vue comme un cercle (bonne forme) ampute d'une de ses parties, plutt que comme un objet entier. De mme, les carrs, triangles, rectangles sont des bonnes formes par rapport aux autres polygones irrguliers

Images mentaleshttp://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (12 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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Pour Jean Piaget, la production d'images mentales par l'enfant est l'une des manifestations de l'apparition de la pense symbolique. Elle survient vers 2 ans. Les images mentales (reprsentation d'une maison, d'un parent, etc.) sont conues comme une vision intriorise de l'objet. J. Piaget distingue deux types d'images mentales : les images reproductrices , qui voquent les objets ou personnes absentes, et les images anticipatrices , qui consistent concevoir des situations nouvelles. Un des dbats de la psychologie cognitive concerne le rle de ces images dans la pense. Sont-elles ou non des supports ncessaires aux oprations mentales abstraites ?

InfrenceOpration logique qui permet de passer d'une proposition une autre, par dduction, induction, gnralisation.

Modles mentaux Je vais au cinma. Cette action renvoie implicitement toute une srie de squences typiques : faire la queue pour acheter un billet, s'asseoir dans un fauteuil dans une grande salle devant un cran, voir un film. Voil ce qu'on peut appeler un modle mental . C'est le portrait typique correspondant une reprsentation schmatique d'un objet ou d'une situation. Selon le psychologue britannique Philip Johnson-Laird, nombre de nos raisonnements en situation sociale s'appuient principalement sur la mobilisation de modles mentaux implicites et non sur un raisonnement purement logique.

PropositionEn grammaire, on appelle proposition une phrase pourvue de sens, qui peut tre vraie ou fausse, par exemple : Il pleut ; Jacques est fou . De manire plus gnrale, les philosophes analytiques appellent proposition tout tat mental ayant un contenu qui peut tre dit vrai ou faux.

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PrototypeLe terme a t propos par la psychologue amricaine Eleanor H. Rosch. Le prototype est un exemplaire de rfrence qui sert dfinir un mot, une catgorie. Par exemple, le moineau est le prototype de l'oiseau, plutt que la poule ou l'autruche. C'est par la plus ou moins grande ressemblance avec ce prototype que la pense commune identifie les objets de son environnement.

Rseau smantiqueLa notion de rseaux smantiques a t cre par Ross Quillian en 1966. Ce sont des instrument logique de mise en forme des connaissances, fonctionnant sur la base d'un rseau de concepts lis entre eux. Les concepts sont des tiquettes reprsentant un objet ou une ide. A chaque tiquette sont associes plusieurs informations (par exemple : la chaise est un meuble, les oiseaux sifflent, etc.). Des connaissances nouvelles sont susceptibles d'tre produites par infrence (c'est--dire par dduction). Par exemple, si la machine a appris que Minou est un chat et que les chats miaulent , alors la machine peut en dduire que Minou miaule .

SchmaLa thorie du schma est issue des travaux du psychologue anglais Frederick Bartlett. Elle est proche de la thorie de la forme applique la mmoire. L'ide gnrale est que la mmoire a tendance organiser les informations autour de structures connues, familires, routinires. Lorsqu'on demande des sujets de restituer une histoire longue et tortueuse qui leur a t raconte, on constate qu'ils tendent simplifier et schmatiser le scnario autour de quelques pisodes significatifs, et y introduire un sens global qui leur permet de mieux en saisir la signification, quitte parfois inventer (inconsciemment) des lments qui ne s'y trouvaient pas. Le concept de schma a t repris par Marvin Minsky (1975), pour la reprsentation des connaissances danshttp://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (14 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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les programmes d'intelligence artificielle, et par David E. Rumelhart (1980) pour la reprsentation des connaissances en psychologie cognitive. L'ide gnrale est que les connaissances sont reprsentes en mmoire dans le cadre de formes (schmas) connues et strotypes.

Script, Mop, Top...La notion de script (proche de celle de schma) a t cre par le linguiste Roger Schank et utilise comme technique de reprsentation des connaissances en traduction automatique et en intelligence artificielle. Le modle canonique du script est celui du restaurant. Le script du restaurant dsigne la srie d'pisodes caractristiques d'un repas au restaurant : rception du client, commande, repas, paiement, etc. Chacun de ces pisodes se divise son tour en miniscnarios btis sur un modle de rfrence, par exemple : un repas = entre + plat de rsistance + dessert + caf. La faon de manger un plat (poisson, soupe...) est elle-mme soumise des miniscnarios structurs. Dans Scripts, Plans, Goals and Understanding, Roger Schank et Robert P. Albeson (1977) emploient les termes Mop (pour memory organisation packet) et Top (pour thematic organisation packet) pour indiquer un niveau d'organisation des reprsentations d'une plus ou moins grande gnralit par rapport aux scripts.

SmantiqueDomaine de la linguistique qui tudie le sens (la signification) des mots.

StrotypeEn psychologie sociale, les strotypes, ce sont les images figes que l'on applique un groupe humain (les Amricains sont individualistes, les Franais rleurs, les infirmires dvoues, etc.).

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NOTES 1 Presque tout le monde - part Jos Bov - a mang des hamburgers, les Franais sont connus pour dguster les cuisses de grenouilles, et les catholiques mangent symboliquement leur dieu lors de l'eucharistie ( Prenez et mangez, ceci est mon corps ). 2 Carl von Linn a nomm la grenouille verte commune en Europe Rana esculenta, ce qui signifie grenouille comestible... 3 P. Lvque, Les Grenouilles dans l'Antiquit. Cultes et mythes des grenouilles en Grce et ailleurs, d. de Fallois, 1999. 4 Du nom de la servante de la desse Dmter, qui la faisait rire en lui montrant son sexe. G. Devereux, Baubo. La vulve mythique, d. Godefroy, 1983. 5 On trouve des images de femmes en position de la grenouille sur certaines parois graves prhistoriques, dans la statuaire indienne... 6 La grenouille offre un sujet de rflexion particulirement intressant pour les naturalistes et thoriciens de l'volution. C'est, parmi les vertbrs, l'animal qui prsente la plus grande diversit de modes de reproduction. La plupart pondent des oeufs qui deviennent des ttards indpendants, mais certaines incubent les oeufs l'intrieur de la bouche ou de l'estomac. Chez certaines espces, c'est le mle, chez d'autres, c'est la femelle qui incube. Parfois l'incubation se fait dans une poche ventrale ou dorsale. Voir Stephen Jay Gould, La Foire aux dinosaures, Seuil, 1993. 7 Sans avoir crer une foule de sous-catgories supplmentaires : les grenouilles trois pattes, les grenouilles en carton, etc. 8 E.H. Rosch, Natural categories , Cognitive Psychology, n 4, 1973. 9http://www.scienceshumaines.com/articleprint2.php?lg=fr&id_article=2411 (16 sur 17)21/01/2010 17:53:35

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Pour une biographie de F. Bartlett, voir Mary Douglas, Comment pensent les institutions ?, La Dcouverte, 1999. [10] E. Morin, La Mthode, T. IV : Les Ides, leur habitat, leur vie, leurs moeurs..., Seuil, 1991. [11] D. Jodelet, Folies et reprsentations sociales, Puf, 1989. 10 C. Guimelli (dir.), Structures et transformations des reprsentations sociales, Delachaux et Niestl, 1994 ; J.-C. Abric, Pratiques sociales et reprsentations, Puf, 1994.

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