AutreTerre AT No # 482014

ImpossibleRévolution

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Elle chante la liberté la RévolutioneJuste avant de t’arrêter, la Révolutione.

Sans pitié, ni scrupule, avec toutes les audacesOn dirait un garçon, c’est une garce

Elle est plutôt jolie, elle a même de l’humourC’est pour mieux t’étouffer qu’elle te fait l’amour.

On raconte qu’elle est née la RévolutioneD’une flaque sur un pavé la Révolutione.

Tout autour de la terre elle a fait des enfantsQui crachent sur leur mère quand ils sont grands

Elle est rouge, elle est noire, de toutes les couleurs

Jacques GuyonnetIl ne faut pas t’étonner si je ramène la Revolución1 à un merveilleux dessinateur de BD : George Pichard. A priori, absurde ! Mais… d’une part il n’est pas prudent

de parler trop sérieusement de révolution, ceux qui s’y sont essayés sont tous morts sans y avoir réussi quoique ce soit. De l’autre, commençons avec Bécaud. et bien entendu avec Delanoë le poète. La Révolution c’est une garce. Tout est dit :

Elle mélange la musique et le son du canonLes discours prophétiques et les chansons

En octobre à Moscou, hier à VarsovieElle aime par-dessus tout l’air de Paris

1 C’est plus beau en espagnol !

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Parmi ses partisans devenus sagesMême quand elle est enterrée, la Révolutione

On la voit ressusciter, la Révolutione.

Malgré ce qu’on en dit il faudrait l’inventerC’est comme une maladie qui rend la santé

Comme les mauvais rêves dont on sort délivréComme un orage qui crève au ciel d’été

Tu crois qu’elle t’a oublié La Révolutione ?Mais elle dort une bombe au pied, La Révolutione.

Un très beau texte, une superbe interprétation. La révolution ? Elle est impossible aujourd’hui ? Impossible, je suis d’accord. Sauf pour un poète, ils se font rares.Je n’y pensais pas souvent.

Messagère de l’espoir et de la peurElle te crie fraternité, la RévolutioneAvant de te fusiller, la Révolutione.

Qu’elle s’appelle Convention, ou Soviet ou CommuneElle remplit les prisons, les fosses communes

Au matin troubadour, le même soir soldatDe Rosa Luxembourg à Guevara.

Elle te laisse la terre brûlée, la RévolutioneAu nom de l’humanité, la Révolutione.

Elle va mourir debout, seule au milieu des ruinesSe battant jusqu’au bout en héroïne

Ou vieillir en rêvant du temps de son jeune âge

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Je l’avais faite, à mon niveau, en musique, dans l’équipe des pionniers des années 1950-1985. C’était un combat esthétique, les idées pleuvaient, le sang ne coulait pas. Ça n’intéressait pas grand’monde. Par la suite j’ai vibré devant certaines images. Par exemple Havana2, ce beau film avec Robert Redford et Lena Olin. Il y a une séquence finale où l’on voit la foule sortir en liesse dans les rues de Cuba. Le dictateur est vaincu ! Nous sommes libres ! Tu vas sourire… Je me souviens encore de mes réactions d’un soir, le 7 mai 2012 à la place de la Bastille… On y croyait. C’était comme dans Havana ! Mais la grande fête populaire. le grand soir, ça s’éteint vite. Et vient la honte et la colère quand on sait ce qui suit. C’était beau de voir ça, je crois que sur le moment ce fut une réalité. Elle n’a pas beaucoup duré, les révolutionnaires deviennent rapidement des dictateurs, sous forme militaire ou démocratique.Plus tard j’ai rencontré Alina Gomez au DF3et j’ai partagé son engagement idéaliste

2 Sidney Pollack, 1990.3 Centre de la ville de Mexico.

et sa passion de Revolucion ! L’image de droite résume assez bien son discours de jeune fille indignée.

- Je suis conne ? Oui, mais j’ai une passion ! La Revolucion ! Quand je vois ce que les hommes font du monde…

Je ne sais pas encore, en ce moment. que ce mot

« Revolucion »

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ne désigne que la jeunesse et le féminin.Alina se passionnait pour les opprimés mexicains, participait à des réunions politiques dans les universités mexicaines. Sport dangereux.Arrêtée dans une manif estudiantine elle passa une semaine dans les geôles du pouvoir. Dans le style Guantanamo.

Comment des hommes osent-ils traiter ainsi une jeune femme ?Enchaînée comme une criminelle

dans une cage de pierre, sans pouvoir détendre ses muscles douloureux, sans lumière, harcelée sexuellement, à peine nourrie.Ces traitements renforcèrent son caractère, elle ne céda pas. Elle refusait de parler. Elle comparut devant des tribunaux masculins. Elle y apprit la détestation

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de l’homme. Sa famille paya la rançon, elle fut libérée.

Plus tard encore, elle partit pour le Chiapas voir le fameux Sub-Comandante Marcos et en revint cruellement déçue.À son arrivée on l’avait considérée comme une sale bourgeoise. Et pire, une intello.Il n’était pas rare qu’elle soit menacée par des hommes armés. Elle croyait naïvement que la force des hommes résidait dans leur pénis mais elle apprit vite qu’ils usaient d’instruments de substitution.Elle se dévoua pour les paysans du Chiapas. Après tout Marcos n’était pas le CHE, il avait

tout juste le prestige de sa cagoule.Quand elle voulut savoir pourquoi on n’en donnait pas au peuple l’argent que, dans diverses opérations paramilitaires on avait pu amasser, elle se heurtait toujours à la même réponse :- « Secret militaire ».

Le sub comandante Marcos n’était pas le héros du peuple qu’elle croyait avoir enfin rencontré. Un jour il se montra à visage découvert : c’était un petit prof de la UNAM, personne, il avait abusé de son aspect terrifiant. Sa Revolucion se défit.

Elle voyagea au Chili, à Cuba et dans diverses provinces de son Mexique natal. La revolucion ? Plus personne ne

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savait ce que c’était. Le pays était tenu par des militaires et par le cartel de la drogue. Tous ces hommes régnaient par la terreur. Alors que la Revolucion… c’eut été de cesser les hostilités.

Nous avions de longues conversations, je lui disais que la Revolucion était une image, un désir, la jeunesse, le besoin des femmes de

se libérer, quelque chose qui n’avait peut-être jamais existé que dans l’esprit de quelques poètes et musiciens.

Elle rêvait d’emmener avec elle les gens simples, d’aller loin des contraintes. Sa jeunesse l’y autorisait. Tout changer ou ne rien changer du tout ? Tel était le thème de nos veillées romantiques.

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Je lui jouais deux études dites de la Révolution, celle de Chopin, en do mineur et celle de Scriabine, en sol dièse mineur. Elles avaient des ressemblances dans leur véhémence. Curieusement les deux étaient des études pour la main gauche…Nous parvenions à saisir que la révolution n’était autre que le désir collectif d’échapper au système répressif qui s’était mis en place dès la fin de la révolution française.

Nous étions tous tombés dans le piège de la révolution… industrielle.Beaucoup plus tard je suis tombé sur ces images de Pichard qui parlent de tout ça avec talent ! Que la révolution soit impossible il le savait. nous l’apprenions. Mais son personnage féminin me toucha. Une fille - aujourd’hui on dirait un boudin - avec beaucoup d’illusions, de candeur, une fille aux formes anachroniques qui découvre la nature masculine. Blanche Épiphanie est bien plus réelle que Marianne ! On a envie de la suivre sur son île aux collines de femme !Je n’avais jamais vu ce dessinateur français sous cet angle. Autour de moi, tout le monde hausse les épaules. Je m’en fous, je vois Pichard, mas allà4 de ses dessins, porté par une grande vision de la femme exploitée, la femme jeune et innocente, je le vois croquer des hommes avec toute la laideur qui est la leur, je me retrouve dans ses personnages, je j’avais grandement sous-estimé !

4 esp : au-delà de ses dessins

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La seule Revolucion - si l’on veut continuer à aimer ce mot en espagnol - sera celle de la femme.

Pas pour mettre les hommes en captivité. Simplement pour gérer la violence de ces animaux malades5.

Car malade, la femme ne l’est pas.

Moscou, Varsovie, Cuba, Paris, le Portugal aussi, tout le monde croit la connaître. Jean Yanne en a donné, avec le talent et le cynisme qu’on lui connaît, une version à la française6.5 Nietzsche : « L’homme est un animal malade ».6 In « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ». 1972. Un bouquet de belles musiques aussi.

C’est sans appel : « la révolution, c’est bidonné, c’est un truc de journalistes pour vendre leur foutue prose »

Finalement, le seul qui s’en est tiré c’est le CHE : il est mort, encerclé par l’armée bolivienne à la solde des Américains. Pas glorieux pour eux, ils organisent la présentation de sa dépouille mortelle aux médias du monde et le font entrer dans l’histoire et le cœur des jeunes de tous pays.Ils se sont mis à cent contre un pour tuer un homme malade dont la légende leur faisait peur. La musique

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Quand les femmes cesseront d’être des allégories.Pour le reste rêve et oublie. La revolucion populaire ne sera pas. Les conditions la rendent impossible. Elle serait vite récupérée par des hommes laids et corrompus. Qu’ils achèvent de se détruire eux-mêmes.

Le seul espoir, je te l’ai nommé en début de page 16.

Crois-moi !

est toujours là, elle aime la révolution. Ça donnera une belle chanson avec Nathalie Cardone.Elle tiendra, dans son clip, à se montrer les armes à la main, une Kalachnikov bien sûr, la compagne du révolutionnaire.Je me suis demandé pourquoi l’imagerie populaire associait la révolution à une jeune femme ?

Une Marianne par exemple.

J’ai trouvé quelques idées dans un blog intéressant :