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Infection a VIH et risque cardiovasculaire En 2006, comment lutter contre I'augmentation du risque cardiovasculaire des patients s~ropositifs traitds par antir~troviraux (ARV) ? Tel ~tait le th~me d'une r~union d'experts de ce risque propos~e par le laboratoire Bristol-Myers Squibb. S i I'apparition progressive d'une pharma- copee reellement active sur I'infection & VIH & partir de 1996 a peu & peu modifie le pronostic du VIH-sida, le passage de I'infec- tion du statut de maladie constamment mor- telle & celui de maladie chronique a peu & peu rev61e la face cachee de cette transition epi- demiologique : des 2000, on reperait un taux anormalement eleve de complications cardio- vasculaires chez les sujets sous ARV. L'exces de risque cardiovasculaire de ces patients a ~te estime a. 200/0 pour les hommes et & 59°/0 pour les femmes ! On n'avait pas de raison particuliere de se preoccuper des facteurs de risque cardiovas- culaire dont les patients traites etaient poro teurs: hyperlipidemie, tabagisme, HTA, voire syndrome metabolique ou obesite. Or il appa- rait que certaines molecules utilisees dans les schemas therapeutiques du VIH-sida consti- tuent des ~boosters,, de I'expression patho- g~ne des facteurs de risque, notamment du syndrome metabolique, qui toucherait 260/0 des hommes et 22°/o des femmes. Selon I'etude APROCO (2003), la frequence du tabagisme, de I'obesite abdominaleet des dyslipidemies (hyperTG, hypoHDL) chez les patients trait~s par anti-prot6ases est plus 6le- vee que dans la population gen6rale. II en est de m6me pour le syndrome metabolique. De I& & insister sur la necessite de concevoir un bilan et un suivi cardiovasculaire, biolo- gique et clinique, des seropositifs traites par ARV, c'est evident. Sur le plan de la sant6 publique, les campagnes dites de ,, lutte contre les facteurs de risque ,, doivent aussi concer- ner cette frange de la population & laquelle les ARV permettent une survie prolong6e, cer- tes, mais non exempte de risques ajoutes. Le risque lie au syndrome metabolique peut ~tre consider6 comme un risque emergent, a notamment soulign~ cette reunion. Une 6tude menee en Espagne et publiee I'an dernier [Diabetes Care 28 (2005) 292-298] a per- mis d'etablir que le risque li~ au syndrome m6tabolique est different selon la nature du protocole th6rapeutique utilis6. ,A efficacite ARV comparable, il est pref6rable de choisir les molecules associees & un risque minimum de complications metaboliques. Par ailleurs, 1'6tude de 2003 a mis en lumiere une augmentation du risque proportionnelle & la duree de la tritherapie. Choisir les molecules associ~es & un risque reduit de complications, c'est optimiser le trai- tement avec les molecules les mieux tolerees chaque fois que possible, ce qui garantit I'ob- servance en evitant I'apparition de r6sistan- ces par rupture de celle-ci. Ainsi, les Iongues survies assur~es par les tri- therapies justifieraient aujourd'hui des recom- mandations sur le suivi medico-biologique des patients et le depistage des complications tel- les celles qui decoulent de I'evolution du syn- drome metabolique. J,-M. M, 14 Revue Francophone des Laboratoires, septembre-octobre 2006,N ° 385

Infection à VIH et risque cardiovasculaire

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Infection a VIH et risque cardiovasculaire En 2006, comment lutter contre I'augmentation du risque cardiovasculaire des patients s~ropositifs traitds par antir~troviraux (ARV) ? Tel ~tait le th~me d'une r~union d'experts de ce risque propos~e par le laboratoire Bristol-Myers Squibb.

S i I'apparition progressive d'une pharma- copee reellement active sur I'infection &

VIH & partir de 1996 a peu & peu modifie le pronostic du VIH-sida, le passage de I'infec- tion du statut de maladie constamment mor- telle & celui de maladie chronique a peu & peu

rev61e la face cachee de cette transition epi-

demiologique : des 2000, on reperait un taux anormalement eleve de complications cardio- vasculaires chez les sujets sous ARV. L'exces

de risque cardiovasculaire de ces patients a ~te estime a. 200/0 pour les hommes et & 59°/0 pour les femmes !

On n'avait pas de raison particuliere de se preoccuper des facteurs de risque cardiovas- culaire dont les patients traites etaient por o

teurs: hyperlipidemie, tabagisme, HTA, voire syndrome metabolique ou obesite. Or il appa-

rait que certaines molecules utilisees dans les schemas therapeutiques du VIH-sida consti-

tuent des ~ boosters,, de I'expression patho- g~ne des facteurs de risque, notamment du syndrome metabolique, qui toucherait 260/0

des hommes et 22°/o des femmes.

Selon I'etude APROCO (2003), la frequence du tabagisme, de I'obesite abdominale et des dyslipidemies (hyperTG, hypoHDL) chez les

patients trait~s par anti-prot6ases est plus 6le- vee que dans la population gen6rale. II en est

de m6me pour le syndrome metabolique.

De I& & insister sur la necessite de concevoir un bilan et un suivi cardiovasculaire, biolo-

gique et clinique, des seropositifs traites par ARV, c'est evident. Sur le plan de la sant6 publique, les campagnes dites de ,, lutte contre

les facteurs de risque ,, doivent aussi concer- ner cette frange de la population & laquelle

les ARV permettent une survie prolong6e, cer-

tes, mais non exempte de risques ajoutes.

Le risque lie au syndrome metabolique peut

~tre consider6 comme un risque emergent, a notamment soulign~ cette reunion. Une 6tude

menee en Espagne et publiee I'an dernier [Diabetes Care 28 (2005) 292-298] a per-

mis d'etablir que le risque li~ au syndrome m6tabolique est different selon la nature du protocole th6rapeutique utilis6. ,A efficacite

ARV comparable, il est pref6rable de choisir

les molecules associees & un risque minimum

de complications metaboliques.

Par ailleurs, 1'6tude de 2003 a mis en lumiere une augmentation du risque proportionnelle

& la duree de la tritherapie.

Choisir les molecules associ~es & un risque reduit de complications, c'est optimiser le trai- tement avec les molecules les mieux tolerees chaque fois que possible, ce qui garantit I'ob- servance en evitant I'apparition de r6sistan-

ces par rupture de celle-ci.

Ainsi, les Iongues survies assur~es par les tri- therapies justifieraient aujourd'hui des recom- mandations sur le suivi medico-biologique des

patients et le depistage des complications tel- les celles qui decoulent de I'evolution du syn-

drome metabolique.

J,-M. M,

14 Revue Francophone des Laboratoires, septembre-octobre 2006, N ° 385