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CAS CLINIQUE Intoxication volontaire et mortelle par voies percutanée et rectale : à propos d’un cas et revue de la littérature Lethal self-poisoning by percutaneous and rectal routes: About a case, and review of the literature C. Houssaye a, * , R. Cornez b , V. Hedouin b , M. Lhermitte c , D. Gosset b , G. Tournel b,c a Po ˆ le urgences investigations, unite ´ de me ´decine le ´ gale, centre hospitalier de Dunkerque, 130, avenue Louis-Herbeaux, BP 6-367, 59385 Dunkerque cedex, France b Centre hospitalier re ´ gional universitaire de Lille, institut de me ´decine le ´gale et de me ´ decine sociale de Lille, place de Verdun, 59045 Lille cedex, France c Centre de biologie pathologie, centre hospitalier re ´ gional universitaire de Lille, institut de biochimie et biologie mole ´ culaire toxicologie et ge ´ nopathies, avenue Oscar-Lambret, 59037 Lille cedex, France MOTS CLÉS Toxicologie ; Fentanyl ; Midazolam ; Suicide ; Voie percutanée ; Voie intrarectale Résumé L’intoxication volontaire est la première forme de tentative d’autolyse en France. Les études récentes montrent que la méthode préférentielle est l’ingestion par voie orale. Les auteurs présentent un cas d’intoxication mortelle par voies alternes, percutanée et intrarectale combinées. Dans le cas rapporté, la victime a fait usage de patchs de Durogesic 1 et d’Hypnovel 1 par voie rectale. Une revue exhaustive de la littérature médicale leur permet de caractériser les différences entre l’usage qui peut être fait des patchs percutanés de fentanyl dans les cas d’intoxications mortelles accidentelles, suicidaires et addictives. Par ailleurs, ils montrent le caractère inhabituel de l’utilisation de la voie intrarectale. # 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Toxicology; Fentanyl; Midazolam; Suicide; Transdermal route; Intrarectal route Summary Self-poisoning is the first manner of attempted suicide in France. Recent studies show that the preferred method is oral ingestion. The authors present a case of fatal poisoning by alternate and combined, transdermal and intrarectal, routes. In the case report, the victim used patches of Durogesic 1 associated to intrarectal administration of Hypnovel 1 . An exhaustive review of medical literature allows them to characterize the differences between the uses made of transdermal fentanyl patches in cases of fatal accidental, suicidal or addictive poisoning. They also show the unusual nature of intrarectal route use. # 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. La revue de médecine légale (2012) 3, 7985 * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Houssaye). Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com 1878-6529/$ see front matter # 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.medleg.2012.02.002

Intoxication volontaire et mortelle par voies percutanée et rectale : à propos d’un cas et revue de la littérature

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La revue de médecine légale (2012) 3, 79—85

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

CAS CLINIQUE

Intoxication volontaire et mortelle par voiespercutanée et rectale : à propos d’un cas etrevue de la littérature

Lethal self-poisoning by percutaneous and rectal routes: About a case,and review of the literature

C. Houssaye a,*, R. Cornez b, V. Hedouin b, M. Lhermitte c,D. Gosset b, G. Tournel b,c

a Pole urgences investigations, unite de medecine legale, centre hospitalier de Dunkerque, 130, avenue Louis-Herbeaux, BP 6-367,59385 Dunkerque cedex, FrancebCentre hospitalier regional universitaire de Lille, institut de medecine legale et de medecine sociale de Lille, place de Verdun,59045 Lille cedex, FrancecCentre de biologie pathologie, centre hospitalier regional universitaire de Lille, institut de biochimie et biologie moleculaire —toxicologie et genopathies, avenue Oscar-Lambret, 59037 Lille cedex, France

MOTS CLÉSToxicologie ;Fentanyl ;Midazolam ;Suicide ;Voie percutanée ;Voie intrarectale

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : Cedric.Houssaye@

1878-6529/$ — see front matter # 20doi:10.1016/j.medleg.2012.02.002

Résumé L’intoxication volontaire est la première forme de tentative d’autolyse en France.Les études récentes montrent que la méthode préférentielle est l’ingestion par voie orale. Lesauteurs présentent un cas d’intoxication mortelle par voies alternes, percutanée et intrarectalecombinées. Dans le cas rapporté, la victime a fait usage de patchs de Durogesic1 et d’Hypnovel1

par voie rectale. Une revue exhaustive de la littérature médicale leur permet de caractériser lesdifférences entre l’usage qui peut être fait des patchs percutanés de fentanyl dans les casd’intoxications mortelles accidentelles, suicidaires et addictives. Par ailleurs, ils montrent lecaractère inhabituel de l’utilisation de la voie intrarectale.# 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSToxicology;Fentanyl;Midazolam;Suicide;Transdermal route;Intrarectal route

Summary Self-poisoning is the first manner of attempted suicide in France. Recent studiesshow that the preferred method is oral ingestion. The authors present a case of fatal poisoning byalternate and combined, transdermal and intrarectal, routes. In the case report, the victim usedpatches of Durogesic1 associated to intrarectal administration of Hypnovel1. An exhaustivereview of medical literature allows them to characterize the differences between the uses madeof transdermal fentanyl patches in cases of fatal accidental, suicidal or addictive poisoning. Theyalso show the unusual nature of intrarectal route use.# 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

ch-dunkerque.fr (C. Houssaye).

12 Elsevier Masson SAS. Tous droi

ts réservés.

[(Figure_2)TD$FIG]80 C. Houssaye et al.

Introduction

En France, sur les 10 000 à 12 000 décès attribuables chaqueannée au suicide, l’intoxication volontaire et mortelle ouautolyse médicamenteuse, constitue le deuxième mode desuicide toute population confondue et le premier mode desuicide dans la population féminine au même rang que lapendaison [1]. L’intoxication médicamenteuse est de loin lepremier mode de tentative de suicide au sein de la popula-tion française (80 % des 160 000 tentatives annuelles) [2].Mais si l’intoxication volontaire médicamenteuse estfréquente avec une administration du (des) toxique(s) prin-cipalement par voie orale, elle est au contraire beaucoupplus rare lorsque la voie d’administration utilisée est dif-férente, à plus forte raison pour les voies percutanée ourectale [3]. Le cas que nous présentons fait donc figured’exception puisqu’il relate un suicide combinant l’adminis-tration de toxiques à la fois par les voies percutanée etrectale.

Figure 2 Patchs thoraciques (2) et abdominaux (3).

[(Figure_3)TD$FIG]

Cas clinique

Un après-midi du mois de février, le corps sans vie deMadame B., âgée de 50 ans, était découvert à son domicilepar son père, sans nouvelles depuis plusieurs jours.

Lors de sa découverte le cadavre était bien conservé, avecun délai postmortem estimé entre deux et cinq jours. Il étaithabillé d’un T-shirt, d’une culotte et partiellement recou-vert par une couverture. Il était en position de décubituslatéral gauche sur le lit, la tête reposant sur des oreillers(Fig. 1).

L’examen externe réalisé au cours de la levée de corpsmettait en évidence la présence de 11 patchs de Durogesic1

100 mg fentanyl par heure (deux disposés au thorax, trois àl’abdomen, trois au bras gauche, un à la jambe droite et deux

[(Figure_1)TD$FIG]

Figure 1 Vue générale du corps avant mobilisation.

à la jambe gauche), un point de ponction contus récent audos de la main gauche, un corps de seringue introduit dansl’anus et un cathéter implanté dans le réseau veineux du dosdu pied gauche (Fig. 2—4). Aucune lésion de violence n’étaitobservée. Enfin, un syndrome asphyxique franc associant unecyanose en pèlerine, une acrocyanose, une hyperhémieconjonctivale bilatérale et des écoulements hématiquesnarinaires et buccaux en moyenne abondance, imprégnantla literie, était constaté.

Figure 3 Patchs sur la jambe droite (2) et cathéter sur le dosdu pied droit.

[(Figure_4)TD$FIG]

Figure 4 Patch sur la jambe gauche (1).

Intoxication volontaire et mortelle par voies percutanée et rectale 81

L’étude de l’environnement proche du cadavre permet-tait de trouver :

� u

n appareil de perfusion et sa tubulure, deux corps deseringue montés avec aiguille, aux contenus non identifia-bles, un corps de seringue sous blister, six cathéters sousblisters et un garrot, disposés sur une table de chevetattenante au bord gauche du lit sur lequel le corps a ététrouvé ; � u ne bouteille de vodka et une brique de jus de fruit

entamées, deux verres et une tasse, tous vides et usagés,disposés sur une table de chevet attenante au bord droitdu lit ;

� d

Tableau 1 Protocole d’extraction des échantillons.

Extraction enmilieu alcalin

Sang/eau distillée de rinçage 1 mLMéthylclonazépam (étalon interne) 0,1 mLAcide acétique 1 % —Tampon borate saturé pH 9,0 0,5 mLMélange d’extractiona 5 mL

a Mélange d’extraction : dichlorométhane/ether/hexane/isoa-mylalcool (300/500/200/5).

eux corps de seringue montés avec aiguille, trois aiguil-les sous blister et une canette d’eau gazeuse vide conte-nant des cathéters, disposés sur le sol à proximité du borddroit du lit.

Quant au corps de seringue introduit en intrarectal, ilcorrespondait à une seringue de gavage de 60 mL, au contenunon identifiable, non entièrement poussé et dont le pistonétait bloqué en regard de la graduation 49 mL.

Aucun produit n’était identifiable sur les lieux, si ce n’estla bouteille d’alcool contenant de la vodka.

Aucuns autres blisters ou emballages médicamenteuxn’étaient découverts, y compris et surtout lors de la fouilledes différentes poubelles du logement.

Les premiers éléments d’investigation judiciaire rappor-taient que Madame B. exerçait la profession de pharmacienet qu’elle était en arrêt maladie pour un syndrome dépressifattribué à un conflit professionnel évoluant depuis plusieursannées. De plus, plusieurs écrits d’intention suicidaire etnotes assimilées étaient retrouvés dans un bureau adjacent àla chambre où gisait le corps sans vie.

Au vu de l’ensemble de ces constatations, l’hypothèse d’unsuicide était immédiatement retenue par les enquêteurs,raison pour laquelle l’indication à la réalisationd’uneautopsie

médicolégaleétait réfutéepar lemagistrat.Desprélèvementssanguins étaient néanmoins réalisés à sa demande, afind’étayer l’hypothèse d’un décès par intoxication médicamen-teuse aiguë.

Matériel et méthodes

Lors de la levée de corps, quatre tubes de sang périphériquesous-clavier étaient prélevés, ainsi que la seringue intrarec-tale et son contenu, l’appareil de perfusion et une seringueusagée. L’ensemble était placé sous scellés et envoyé aulaboratoire de toxicologie du centre hospitalier régionaluniversitaire de Lille.

Réactifs

Tous les solvants utilisés sont de qualité High PerformanceLiquid Chromatography (HPLC) grade. Le tampon boratesaturé et l’isoamylalcool proviennent de chez Merck(France), le dichlorométhane de Carlo Erba (France),l’acétonitrile de chez JT Baker (France), l’éther de chezPanreac (France), le formate d’ammonium de Sigma-Aldrich(Saint-Quentin-Fallavier, France), l’hexane de Scharlau(France) et l’étalon interne de chez Roche (France).

Équipement

La recherche de l’alcool éthylique a été effectuée parchromatographie en phase gazeuse par injection en espacede tête (méthode officielle) en utilisant un étalon interne. Lescreening des xénobiotiques a été effectué sur un UltraPerformance Liquid Chromatography (UPLC)/Triple Quadri-pôle Detector (TQD) commercialisé par la société Waters1.La séparation chromatographique a été réalisée sur unecolonne Acquity HSS C18 1,8 mm Waters1 (2,1 � 150 mm)éluée par un gradient de phase mobile composée d’acétoni-trile et de tampon formate d’ammonium pH 3,0.

Le spectromètre de masse TQD (Waters1) permet d’iden-tifier les xénobiotiques présents grâce à leurs spectres demasse en mode Mass Spectrometer (MS) simple ou grâce àdeux transitions Multiple Reaction Monitoring (MRM) en modeMS Tandem (MS/MS).

Préparation des échantillons

Prétraitement : la seringue et l’appareil de perfusion sontrincés par 1 mL d’eau distillée. Les échantillons sont extraitsselon le protocole décrit au Tableau 1.

Tableau 2 Analyses toxicologiques des prélèvements desang périphérique sous-clavier.

Substances détectées Concentrations

Alcool 0,65 g/LFentanyl 38,8 ng/mLMidazolam 39,4 ng/mLZolpidem 49,4 ng/mLPhénobarbital 11 500 ng/mL

82 C. Houssaye et al.

Après agitation au Vortex pendant trois minutes, lesmélanges sont centrifugés pendant cinq minutes à 4000 tourspar minute. Les phases organiques sont récupérées puisséchées sous azote à 40 8C. Les extraits obtenus sont reprispar 100 mL de phase mobile ; 15 mL sont injectés.

Résultats

Comme cela était attendu, du fentanyl à une concentrationmortelle de 38,8 ng/mL a pu être mis en évidence dans leprélèvement de sang sous-clavier (Tableau 2). Les analysesont par ailleurs permis d’identifier le contenu des seringuesretrouvées aux côtés du corps, avec la détection de mida-zolam à 5,2 mg/mL ; la seringue introduite dans l’anus étaitégalement remplie du même composé. Le matériel de per-fusion s’est quant à lui révélé contenir du thiopenthalsodique (Penthotal1) (Tableau 3). L’administration de thio-penthal sodique et de midazolam a effectivement pu êtrevérifiée par leur présence dans les échantillons sanguins,quoiqu’à des concentrations thérapeutiques, ainsi quel’alcool éthylique à 0,65 g/L, de façon concordante avecla présence de vodka sur les lieux. Si les concentrations deces trois dernières substances étaient donc, prises isolé-ment, infralétales, leur association entre elles et surtout àla dose élevée en dérivé morphinique a pu avoir un effet depotentialisation de l’effet dépresseur du système nerveuxcentral et de l’appareil respiratoire, communs à toutes cessubstances. Par ailleurs, aucune substance illicite n’étaitdétectée dans les prélèvements sanguins.

Discussion et revue de la littérature

Les constatations de l’examen externe de levée de corps,puis surtout de l’analyse toxicologique, ont permis d’établirque la cause du décès était une intoxication massive parfentanyl, potentialisée par la prise concomitante de dépres-seurs du système nerveux central : midazolam (Hypnovel1)par voie rectale transmuqueuse et thiopenthal sodique

Tableau 3 Analyses toxicologiques du contenu des serin-gues et de l’appareil de perfusion.

Scellés Substancesdétectées

Concentrations

Seringue intrarectale Midazolam 5,2 mg/mLSeringue usagée Midazolam —Appareil de perfusion Thiopental 90 mg/mL

(Penthotal1) par voie veineuse. Plus que les effets del’association et de l’interaction des différents toxiquesretrouvés, qui ont effectivement été à l’origine de la mortdans ce cas, c’est l’originalité des voies d’administrationpharmacologiques qui peut être ici discutée.

La voie percutanée

Intoxications par patchs de fentanylLe fentanyl est un analgésique morphinomimétique se liantde façon préférentielle aux récepteurs m. Ses principauxeffets thérapeutiques sont des effets analgésiques et séda-tifs. Sa prescription est indiquée dans le traitement desdouleurs chroniques d’origine cancéreuse, intenses ou rebel-les aux autres antalgiques, en cas de douleurs stables.L’étude bibliographique montre que l’effet analgésique dufentanyl est obtenu dès lors qu’une concentration sérique de1 à 2 ng/mL est atteinte, mais que chez le sujet naïf, lesconcentrations sanguines efficaces sont comprises entre0,3 et 1,5 ng/mL. Les concentrations sanguines thérapeuti-ques sont comprisesentre 1à 10 ng/mL.Les effets secondaireschez le sujet naïf peuvent être constatés à partir de concen-trations de 2 ng/mL et, dans les cas mortels, les concentra-tions sériques sont observées entre 3 et 20 ng/mL, un effetpharmacologique anesthésique apparaissant dès que laconcentration sérique atteint 10 à 20 ng/mL [4].

Dans le cas présenté, la forme galénique utilisée est unpatch cutané ; ce patch se présente sous la forme d’unrectangle transparent composé de quatre couches : unecouche de silicone, une couche gélatineuse contenant lefentanyl dilué dans un gel alcoolique, une membrane etune surface autocollante poreuse. La société Janssen-Cilagcommercialise des patchs de Durogesic1 à différentesconcentrations : 25, 50, 75 et 100 mg fentanyl par heure.

Sur le plan pharmacodynamique, les patchs permettentune délivrance systémique continue du produit par libéra-tion lente. Le principe actif s’accumule dans le derme, puisest libéré progressivement dans la circulation sanguinejusqu’à l’atteinte d’un plateau de concentration en 24 à72 heures.

Les effets secondaires indésirables provoqués par le fen-tanyl sont identiques à ceux provoqués par la morphine. Unsurdosage provoque notamment une somnolence et unedépression respiratoire d’origine centrale qui, en l’absencede prise d’antidote (naloxone), peut conduire à un décèsdans un tableau d’asphyxie terminoterminale [3].

Il existe d’autres formes galéniques. Historiquement, lapremière est la forme injectable utilisée en anesthésiedepuis les années 1950. La forme la plus récente est unesucette (Actiq 4001) utilisée dans le traitement des accèsalgiques paroxystiques chez des sujets préalablement traitéspar morphiniques. La diffusion rapide dans ce cas se fait parvoie transmuqueuse. Enfin, de nombreux dérivés du fentanylsont classés comme stupéfiants : les plus rencontrés parmi ladouzaine de dérivés de synthèse sont l’alpha-méthyl-fenta-nyl et le 3-méthyl-fentanyl, plus connus sous le nom de ChinaWhite en Amérique du Nord, où ils provoquent régulièrementdes épidémies d’overdose dans la population toxicomane. Sila littérature, notamment nord-américaine, est riche en casd’intoxications par les dérivés stupéfiants, peu de cas mor-tels d’usage de patch sont rapportés [5,6].

Intoxication volontaire et mortelle par voies percutanée et rectale 83

Pourtant, selon Martin et al., 55 % des décès provoqués parfentanyl seraient directement liés à l’usage de patchs [7]. Ils’agit principalement de surdosages accidentels, suicidairesou d’usages détournés de patchs par des toxicomanes. Ainsi,Coopman et al. rapportent le cas d’un suicide d’une personnede 78 ans atteinte d’un cancer du rein métastasé, ayant faitusage de dix patchs de Durogésic1 100 [8] ; Martin et al.illustre son étude sur 112 cas observés entre 2000 et 2002, parle suicide d’un sujet de 45 ans dépressif et atteint de douleurschroniques, qui a fait usage de huit patchs de Durogésic1 75[7] ; enfin, plus récemment, Wiesbrock et al. rapportent lecas d’un homme de 63 ans qui a utilisé 20 patchs de fentanylqui faisaient partie du traitement de son épouse, décédéeun an plus tôt d’un cancer [9].

Les cas répertoriés de mésusage des patchs de fentanylsont uniquement décrits chez des toxicomanes connus. Ilsmontrent l’inventivité de ces derniers dans leur quête du« flash ». La littérature rapporte par exemple plusieurs casmortels d’injections intraveineuses de décoctions de patchs[10—12], d’ingestions orales de patchs qui, dans ce cas, nesont pas avalés mais mâchés, permettant ainsi la diffusionrapide et massive de fentanyl par voie transmuqueuse buc-cale [12—15] — avec un cas décrit d’ingestion accidentelle etmortelle [16] — ou encore d’inhalation de fentanyl parnébulisation de patchs [17]. Enfin, un cas non mortel d’intro-duction intrarectale de trois patchs de Durogésic1, permet-tant la diffusion rapide de fentanyl par voie transmuqueuserectale, a été rapporté par Coon et al. [18].

Plus localement, la consultation des données du centreantipoison (CAP) de Lille entre 1999 et 2008, a permis decolliger 35 cas non mortels d’intoxication par patchs defentanyl (dont sept cas d’évolution inconnue). Parmi cescas, on dénombre une intoxication volontaire chez un toxi-comane, quatre tentatives d’autolyse et un accidentdomestique ; les autres cas relevaient d’accidents oud’erreurs thérapeutiques. Parmi les intoxications à but sui-cidaire, sont rapportés une utilisation de dix patchs dosés à75 mg fentanyl par heure, une utilisation de trois patchs dosésà 50 mg fentanyl par heure, une utilisation de trois patchs dedosage non connu et une utilisation d’un patch dosé à 75 mgfentanyl par heure.

Après revue de la littérature, il semble donc que les cas desuicide soient caractérisés par l’utilisation d’un nombreimportant de patchs fortement dosés. A contrario, les into-xications d’allure accidentelle sont caractérisées par laprésence d’un nombre peu élevé de patchs de concentrationsvariables et sont favorisées lors de certaines phases d’untraitement antalgique employant le fentanyl : l’introductiondu traitement, le changement de dosage des patchs ou leursubstitution par d’autres composés [4,19].

Enfin, dans les cas d’intoxications addictives, l’usagedérivé des patchs est prédominant. Cela s’explique par lavolonté des toxicomanes d’obtenir un effet de « flash » quine peut être atteint qu’avec une forte concentration demorphinique. Or, si le fentanyl a normalement la capacitéd’apporter cet effet sur le plan pharmacologique, laprésentation sous forme de patch, avec un mode de résorp-tion lente par voie percutanée, ne le permet pas en pra-tique. Par ailleurs, si le mode d’accès aux patchs estsouvent connu dans les cas d’accident et de suicide(traitement antalgique chez les sujets atteints de cancer),il s’agit en revanche, pour la plupart du temps, d’une

obtention inconnue ou illicite dans les cas d’addictionaux opiacés [10—18].

Sur le plan toxicologique, l’interprétation des résultatsest difficile en particulier dans les intervalles de concentra-tion suprathérapeutique. Elle doit tenir compte de l’histoiredu sujet et notamment de l’exposition préalable au fentanyl,de la prise concomitante de dépresseurs centraux à l’effetpotentialisateur, du nombre et de la concentration de patchsutilisés et surtout des phénomènes de redistribution qui sontparticulièrement importants dans le cas de ce principe actif.Ainsi, des études préalables ont montré qu’il était possible,dans ce dernier cas, de doser à de fortes concentrations dufentanyl dans le liquide gastrique de sujets intoxiqués parvoie percutanée, sans aucune prise orale concomitante oupréalable [9,20,21]. Par ailleurs, le passage transdermiquedu fentanyl administré en patchs est encore opérant mêmeaprès le décès, puisqu’il s’agit d’un mode de diffusionpassive. Les données pharmacocinétiques indiquent que lefentanyl commence à être détecté dans la circulation san-guine environ deux heures après la pose d’un patch ; àl’équilibre, la totalité de la dose du principe actif est déli-vrée en 72 heures environ, 50 % de la dose étant absorbée en24 heures, 80 % en 48 heures et finalement 95 % en troisjours. Lors de l’administration transcutanée de fentanyl, lesconcentrations sanguines augmentent progressivementdurant les 12 premières heures et atteignent un plateauentre 24 à 72 heures chez la plupart des sujets. Pour cecas, il n’a pas été possible de se prononcer sur la durée del’agonie et de dire si la victime est décédée avant ou aprèsque ce plateau de concentration sanguine n’ait été atteint.Cependant, étant donné cette incertitude, il est possible depenser que la concentration sanguine de fentanyl objectivéepar les analyses toxicologiques n’était pas nécessairement lereflet exact de la concentration effectivement létale, aumoment du décès, la durée de l’intervalle postmortemayant, de toute façon, laissé le temps à la dose totale defentanyl administrée d’être délivrée. En effet, ici l’inter-valle postmortem était estimé entre deux et cinq jours, cequi donne à penser que toute la dose ou la presque totalité dela dose disponible du dérivé morphinique a pu diffuser,même postmortem, pour aboutir à la concentration sanguine« plateau » relevée, de 38,8 ng/mL.

Il apparaît donc, sur ces données bibliographiques et leurapplication pratique au cas présenté, qu’une analyse multi-disciplinaire impliquant une confrontation des observationsmédicolégales et des analyses toxicologiques est un préa-lable indispensable à toute conclusion sur le caractère létalde l’intoxication par fentanyl et sur de mode du décès(suicide, accident, overdose).

Intoxications par d’autres principes actifs distribuéssous formes de patchsIl existe un nombre limité d’autres principes actifs dis-ponibles sous forme de patchs pour une diffusionpercutanée ; les plus connus sont les traitements hormo-naux substitutifs de la ménopause, les contraceptifs, latrinitrine, la scopolamine, la buprénorphine et la nicotine.Les propriétés de tous ces produits autorisent leur admi-nistration à visée curative dans des traitements de longuedurée, sous forme d’une diffusion contrôlée et continue duprincipe actif. Dans leur présentation en patchs, le dosageest généralement faible, puisqu’il s’agit de traitements ne

84 C. Houssaye et al.

nécessitant que de faibles taux plasmatiques pour avoirune efficacité.

Leur toxicité reste relative comme le confirme les don-nées bibliographiques puisque seulement deux études rap-portent des risques toxiques par un usage de patchs denicotine [22,23]. De façon plus anecdotique, il existe plu-sieurs cas cliniques d’intoxications accidentelles non mor-telles par la clonidine rapportés dans la littérature nord-américaine [24,25]. Cependant, ce produit sous forme depatch n’est disponible en France que sous autorisation tem-poraire d’utilisation ce qui implique une surveillance accruedes sujets traités et en limite considérablement la prescrip-tion et donc les cas d’intoxication.

La voie intrarectale

Dans le cas présenté, le sujet a fait usage d’une injectionintrarectale de midazolam. Ce principe actif semble néan-moins avoir été introduit par d’autres voies (voie veineuse ?).Mais surtout, les concentrations sanguines étaient thérapeu-tiques, ce produit n’a donc pas eu une létalité directe mais apu potentialiser les effets dépresseurs centraux du fentanyl.L’éventualité d’un décès lié à une interaction fentanyl—mida-zolam, plutôt qu’à un surdosage exclusif par l’une ou l’autrede ces substances, est par ailleurs étayée par Bailey et al., quiattirent l’attention sur l’existence d’un excès d’incidenced’épisodes d’hypoxémie et d’apnée et de leurs conséquencespotentiellement létales, lors de l’association de ces deuxsubstances à des concentrations sanguines pourtant thérapeu-tiques [26]. Enfin, L’hypothèse d’un décès résultant d’uneinteraction toxique apparaît d’autant plus vraisemblable quel’administration concomitante de phénobarbital, comme celaa été le cas ici par voie intraveineuse, et de midazolam a pourrésultat un effet dépresseur respiratoire central de typesynergistique, avec cumulation et potentialisation des pro-priétés pharmacodynamiques de ces deux molécules.

La voie intrarectale est une voie d’abord rarement utiliséeen thérapeutique. Ses principaux avantages résident enl’absence de dégradation gastrique du principe actif, enune relative rapidité de diffusion facilitée par la granderichesse du réseau veineux hémorroïdal inférieur et en uneffet de premier passage limité. Ces propriétés, associées àune facilité d’emploi, en font une voie préférentielle enpédiatrie d’urgence. Néanmoins, peu de produits sont dispo-nibles sous cette galénique et en conséquence la littératureinternationale est pauvre en cas rapportés d’intoxication parvoie rectale. Si l’on exclut dès lors les cas décrits de toxicitélocale par utilisation de lavements caustiques [27], les cas desurdose chez les « body packers » et les accidents médicauxnotamment pédiatriques [28—33], seuls quelques cas rap-portés illustrent la toxicité systémique par voie intrarectale.L’un de ces articles a été cité précédemment puisqu’il s’agitde l’intromission rectale volontaire de patchs de Durogesic1

[18] ; un autre « case report » fait référence à une intoxicationnon mortelle après répétition sur plusieurs jours de lavementsà l’aspirine, qui ont été responsables d’une toxicité indirectepar trouble de l’équilibre acidobasique. Le même procédé,utilisé cette fois dans un but suicidaire, et où un lavementunique avait été effectué avec une dissolution de700 comprimés d’aspirine, a également été décrit, par Watsonet al. [34]. Plusieurs autres cas d’intoxication aiguë à viséeautolytique par voie rectale apparaissent de façon sporadique

dans la littérature, que cette voie soit utilisée seule ou enassociation, comme l’illustrent Koseoglu et al., en rapportantle cas d’un sujet ayant effectué une tentative d’autolysemédicamenteuse par suppositoires de mésalazine, à la foisintroduits par voie rectale, mais aussi ingérés en excès [35].D’autres exemples d’administration rectale de toxiques àvisée autolytique existent, mais avec l’emploi de substancesnon médicamenteuses tels que des insecticides ou des pesti-cides organophosphorés [36—38]. Comme précédemment, cescas viennent questionner l’efficacité de la voie transrectaleemployée seule, puisqu’aucun ne s’est avéré létal en dépit dela rapidité de résorption du toxique employé.

Le caractère assez exceptionnel de cette voie d’abordrectale peut s’expliquer non seulement par une praticabilitédifficile, l’intromission n’étant possible a priori que par sup-positoires ou lavements, mais aussi par les aspects culturel etpsychologique qui assignent à la région périnéale un caractère« impur ». Cependant, malgré cette perception ou peut-être àcause d’elle, et grâce aussi à la plus grande facilité dedissémination qu’octroie cette voie d’administration, de nou-velles pratiques d’usage volontaire de substances stupéfiantespar voie transrectale se sont développées ces dernièresannées, et ont pu être décrites. Ce mode d’administration,encore connu sous le nom de « booty bump » ou « keistering » anotamment fait l’objet de deux publications rapportant descasd’intoxicationsnon létales à laméthamphétaminepar voietransrectale, avec dans l’un de ces cas notamment, la des-cription de l’intromission anale d’un tampon imbibé de CrystalMeth, dispositif visant à limiter les risques de pertes liées àl’écoulement du liquide [39,40].

Conclusion

Les éléments de la levée de corps mais surtout les analysestoxicologiques ont permis de conclure dans le cas présentéque la mort résultait d’une intoxication aiguë médicamen-teuse par surdosage en fentanyl potentialisé par des dépres-seurs centraux. Ce cas vient compléter les études sur leseffets mortels du fentanyl.

Il se dégage de ce travail la possibilité d’une interpréta-tion médicolégale dans les cas de décès impliquant l’utilisa-tion de patchs de fentanyl basée sur les constatations et leshabitus du sujet. Ainsi, dans les cas de suicides, les patchsretrouvés sur les corps seront nombreux, fortement dosés etle sujet aura un accès facilité aux produits (patients, per-sonnels médicaux) ; dans les cas d’accidents thérapeutiques,le sujet aura un à deux patchs de dosage variable et onretrouvera dans l’histoire récente, soit l’initiation du trai-tement, soit un changement de dosage du traitement, ainsique la prescription d’un ou deux dépresseurs centrauxpotentialisateurs ; enfin, dans le cas de surdosages addictifs,un usage détourné du patch sera plus fréquemment observéet des antécédents de toxicomanie devront être recherchés.Cette analyse devra cependant être confirmée sur une étudeprospective associant médecins légistes, réanimateurs etCAP. Compte tenu du faible nombre de cas, cette étudedevra impliquer plusieurs centres géographiques.

Enfin, et surtout, on pourra regretter l’absence d’autop-sie dans le cas présenté, ce qui est en contradiction avec larecommandation R(99).3 sur l’harmonisation européennedes règles en matière d’autopsie médicolégale [41].

Intoxication volontaire et mortelle par voies percutanée et rectale 85

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

Remerciements

M. Mathieu-Nolf : centre antipoison et de toxicovigilance deLille.

E. Tguyeni : pharmacie centrale du CHRU de Lille.J.-F. Wiart et L. Humbert : laboratoire de toxicologie,

centre de biologie et pathologie, CHRU de Lille.

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