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Semestre : 1 Module : Introduction en Sc. Juridiques et Sociales Elément : Droit Privé Enseignant : Mme Meryam BENNIS Introduction au Droit Privé La règle du Droit Les sources du Droit L'évolution du Droit Privé marocain Les Droits Subjectifs Eléments du cours www.COURS-FSJES.blogspot.com

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Semestre : 1 Module : Introduction en Sc. Juridiques et Sociales Elément : Droit Privé Enseignant : Mme Meryam BENNIS

Introduction au Droit Privé La règle du Droit Les sources du Droit L'évolution du Droit Privé marocain

Les Droits Subjectifs

Eléments du cours

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INTRODUCTION GENERALE

e droit est ensemble de situations dans lesquelles il y’a du droit, du juridique. Il y a des règles sociales de sanctions, auxquelles sont astreints de se conformer les individus vivant ensemble. S’ils y contreviennent, ils s’exposent à être frappé de sanctions.

Or ce mot droit est porteur de deux désignations, qu’il convient de ne pas confondre mais qu’il convient de mettre en relations.

Divers sens du mot droit :

Le mot droit est un ensemble de règles de conduite qui dans une société donnée et plus ou moins organisée, régit les rapports entre les hommes. A cet ensemble, on applique l’expression de droit objectif. Il est constitué par l’ensemble des règles imposées par l’autorité publique pour régir l’organisation même de la société et la situation qui est faite dans cette société aux individus. Le droit objectif est donc l’ensemble des règles qui régissent la vie en société et qui sont sanctionnées par la puissance publique. Le droit réglemente les rapports qui se forment entre la collectivité publique et les particuliers dans le cadre de la famille (droit de la famille) ou en matière de contrats (droit civil). Les règles présidant à ces rapports de droits sont donc des règles de conduite absolument nécessaires car sans ces règles, la vie en société serait synonyme d’anarchie. Elles sont revêtues d’un caractère essentiel puisqu’elles sont générales et impersonnelles c'est-à-dire qu’elles ont vocation à s’appliquer à tous les individus placés dans une situation déterminée (exemple : article 137 du code de statut personnel fixe à 18 ans l’âge de majorité légale : cette règle s’appliquera à tous les marocains et marocaines).

Ces règles, générales et impersonnelles, constituent le droit objectif c'est-à-dire un droit qui se définit par son seul objet à l’exclusion de tout autre considération personnelle.

Les droits ce sont les prérogatives que le droit objectif reconnaît à un individu ou groupe d’individus et dont ceux-ci peuvent se prévaloir dans leurs relations avec les autres en invoquant au besoin, la protection et l’aide des pouvoirs publics, disons au sens large, de la société : Droit de propriété, de vote ou de créance. Ainsi le titulaire du droit attributaire d’une prérogative est appelé le sujet de droit.

Les droits subjectifs se définissent ainsi par la personne déterminée qui en est le titulaire. S’agissant du droit de créance, il permet à son titulaire (le créancier) de traduire le débiteur devant la justice compétente pour obtenir le remboursement de la dette.

Ces deux notions présentent des caractères bien distincts. Si le droit objectif s’applique de façon générale, le droit subjectifs se définissent par la personne déterminée qui en est le titulaire. S’agissant du droit de créance, il permet à son titulaire (le créancier) de traduire le débiteur devant la juridiction compétente pour obtenir le remboursement de la dette.

Ces deux notions présentent des caractères bien distincts. Si le droit objectif s’applique de façon générale, le droit subjectif ne bénéficie qu’à une personne déterminée.

Toutefois, un lien étroit relie ces deux notions car c’est le droit objectif qui permet à chacun d’entre nous d’invoquer un certain nombre de droits subjectifs. Ainsi un père qui se trouve dans le besoin est en mesure de réclamer à son fils plus aisé, une pension alimentaire et en cas de refus, diligenter une action en justice. Il exerce un droit subjectif mais il n’est à même d’exiger le paiement de la pension qu’en vertu et sur la base des règles de droit objectif, règles se rattachant aux articles 124 et 130 de la moudaouana.

En raison de l’importance tant théorique, que pratique, de cette distinction, nous étudierons dans le cadre d’une première partie, la règle de droit. En effet le droit objectif est celui qui soulève le plus de difficultés. Il désigne l’ensemble des règles de droit qu’elles soient publiques ou privé. Dans le cadre d’une seconde partie, nous aborderons les mécanismes qui sont le fondement de cette règle de droit. Nous rechercherons quels sont les autorités et

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organismes habilitées à élaborer le droit objectif. Cette partie sera ainsi consacrée aux sources du droit qu’elles soient modernes ou traditionnelles. Dans le cadre d’une troisième partie, nous étudierons les règles de droit privé, celles qui régissent les rapports entre particuliers. Enfin, nous aborderons les pouvoirs et les prérogatives reconnus aux particuliers c'est-à-dire les droits subjectifs.

Les études de droit peuvent se repartir en trois grandes catégories de disciplines :

- Les disciplines extérieures au droit : l’économie et la science politique.

- Les disciplines auxiliaires au droit : l’histoire du droit comparé ou la sociologie juridique.

- Les disciplines juridiques proprement dites qui se répartissent en deux grandes branches : droit privé et public.

I – Disciplines extérieures au droit :

A – L’économie politique :

Le facteur économique et contrairement à certaines idées reçues (l’économie à un caractère descriptif : elle se borne à étudier des faits ou à décrire des phénomènes économiques comme la baisse ou hausse des prix alors que le droit à un caractère normatif et ce à travers les règles de conduites édictées et appelées normes) est parfois très étroitement imbriqué au facteur juridique et joue un rôle non négligeable dans l’élaboration du droit.

Ainsi lorsque l’état décide d’orienter les activités économiques, il met sur pied un plan qui a valeur de document juridique. En effet les buts économiques tels que fixés par le plan ne sont réalisables que par le recours à des mesures juridiques qui prennent la forme de textes législatifs ou réglementaires. Par exemple lutter contre l’inflation suppose l’élaboration de textes prévoyant l’encadrement du crédit, la réglementation et le contrôle des prix. Le droit à cet égard, l’un des instruments de la politique économique.

B – La science politique :

Elle s’intéresse à la vie réelle de la société par le biais d’études, de sondages ou d’enquêtes afin de prendre le pouls de la société que ce soit au travers des phénomènes d’opinion ou de ses mœurs. Elle révèle quels sont les besoins d’une société et permet de savoir si la règle de droit est adaptée aux besoins sociaux. Elle permet de mettre à jour l’existence de groupes de pression, les intérêts parfois contradictoires des forces sociales de la nation et qui tentent d’influencer l’action de l’Etat. Il s’agit de mettre en exergue le groupe social le plus influent ou celui qui est le plus à même d’exercer réellement le pouvoir pour élaborer selon les cas, un droit novateur ou conservateur.

II – Disciplines auxiliaires du droit :

A – L’histoire du droit :

Il s’agit de comparer à travers le temps, le droit qui à cours actuellement et que l’on appelle le droit positif au droit qui était appliqué autrefois. La doctrine est unanime pour considérer que l’histoire du droit est le plus précieux auxiliaire de la science juridique. (Comparaison du droit marocain sous le protectorat : prépondérance de la législation française et depuis l’indépendance, on s’achemine vers de nouveaux horizons qui prennent en compte les spécificités de la législation marocaine).

B – Le droit comparé :

Il s’agit de confronter le droit positif marocain (définition du droit positif : ensemble des règles juridiques posées par un Etat à un moment donné et qui sont en vigueur et applicables à une société déterminée : ainsi par droit positif marocain, il faut comprendre l’ensemble des règles juridiques en vigueur à l’heure actuelle au Maroc) aux droits qui sont pratiqués dans d’autres contrées. La perception du droit varie selon les pays ou les continents, de l’occident

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à l’orient. On sait à quel point peut être important l’influence de la religion, des données politiques ou linguistiques.

L’histoire du droit et le droit comparé permettent de mieux comprendre le droit positif national : c’est pourquoi quand le législateur décide de modifier ou d’abroger (autrement dit anéantir pour l’avenir une mesure législative ou réglementaire par un acte implicitement ou explicitement contraire) la législation existante, elle se réfère souvent aux reformes entreprises dans les autres pays ainsi qu’aux enseignements de l’histoire des institutions juridiques. A titre d’illustration, le législateur marocain s’est largement inspiré en 1997 lors de la promulgation du code de commerce marocain, de la loi française du 25 janvier 1985 relative aux entreprises en difficulté.

C – La sociologie juridique :

Elle révèle l’effectivité et l’efficacité de la règle de droit : est-elle appliquée ? comment ? répond elle à l’objectif poursuivi ? une réforme est-elle souhaitable ?

Elle permet donc au législateur, de connaître le comportement des citoyens devant les règles de droit. A cette fin et pour ce faire, il a recours à la jurisprudence (solutions suggérées par un ensemble de décisions suffisamment concordantes et homogènes rendues par les juridictions sur une question de droit), aux sondages, enquêtes qui lui permet de se faire une opinion sur les pratiques suivies et le cas échéant prendre les mesures adéquates en vue de les modifier, les assouplir, ou d’adapter le fait au droit.

L’intérêt de la sociologie juridique est d’assurer l’adéquation d’une législation adaptée aux exigences et attentes sociales.

II – Les disciplines juridiques :

C’est à partir de deux sortes de distinctions que s’ordonne notre système juridique. Il convient de distinguer les divisions du droit et les ordres de juridictions.

A – Divisions du droit :

Elles se subdivisent en deux grandes catégories : le droit privé et le droit public. Chacune de ces deux branches comprend un droit interne et un droit international.

On recense d’une part le droit privé interne et le droit international privé et d’autre part, le droit public interne et le droit public international.

L’essentiel de l’analyse sera axée sur la distinction droit privé / public.

1 – Distinction droit privé / public :

D’après les conceptions classiques, le droit interne se divise en deux branches, le droit public et le droit privé. Ainsi on n’envisage pas de la même manière les règles régissant les rapports entre les particuliers et l’Etat, l’administration, les collectivités publiques, et les règles applicables à la sphère des relations privées des particuliers. De là se dégagent quelques idées d’ensemble.

Le droit public comprend l’ensemble des règles qui dans un Etat donné, ont pour objet l’organisation même de cet Etat et des collectivités publiques (régions, provinces, préfectures et communes) et qui gouvernent leurs rapports avec les particuliers.

Le droit public se subdivise en plusieurs branches :

- Le droit public constitutionnel qui détermine les règles relatives à la forme de l’Etat, à la constitution des gouvernements et des pouvoirs publics. Il fixe les compétences des organes de l’Etat que sont le pouvoir législatif, exécutif et judiciaire.

- Le droit administratif qui réglemente l’organisation des collectivités publiques et des services publics (enseignement, énergie ou transport), ainsi que leurs rapports avec les particuliers.

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- Le droit financier qui comprend les règles relatives aux finances publiques c'est-à-dire aux ressources et aux dépenses de l’Etat, des collectivités publiques et services publics : le budget, impôts, taxtes.

Par conséquent, le droit public englobe tous les rapports de droits qui mettent en rapport l’Etat et l’un de ses démembrements.

Le droit privé est l’ensemble des règles qui gouvernent les rapports des particuliers entre eux ou avec les collectivités privées que les sociétés, les associations. C’est le droit civil et le DOC (Dahir portant Code des Obligations et des Contrats) qui constitue l’essentiel de ces règles. Le droit privé ne s’intéresse qu’aux rapports des personnes privées entre elles. C’est le cas des questions relatives à ce que l’on appelle le statut personnel, familial et successoral comme la réglementation des mariages, la liquidation des successions. Il en va de même des questions qui relèvent du droit des contrats et des obligations : la vente, le contrat de bail ou contrat de location. Toutes ces situations engendrent des rapports de droit qui mettent en cause les particuliers entre eux.

Au vu de ces définition, quels sont dès lors les critères distinctifs qui président à la différentiation de ces deux branches du droit ?

2 – Critères de la distinction :

Notons trois séries de différences d’ordre technique entre le droit public et privé :

En premier lieu :

Le droit privé est régi par un principe en vertu duquel nul ne peut se faire justice à soi même ; Un particulier n’est pas à ce titre et en vertu de ce principe, autorisé à se faire justice lui-même sans le concours des autorités compétentes (le créancier doit saisir au préalable la juridiction compétente pour faire reconnaître l’existence de la créance détenue contre son débiteur et ce n’est que muni de la décision de justice rendue qu’il pourra diligenter les voies d’exécution).

Or en matière de droit public, l’administration a un droit contre un particulier tel le paiement d’un impôt, elle est en mesure de faire jouer le privilège d’exécution d’office (pouvoir d’assurer l’exécution physique de ses décisions reconnues à l’administration par la loi ou par la jurisprudence administrative) : autrement dit, elle est habilitée à se faire justice elle-même. Elle peut contraindre le contribuable au paiement des impôts sans être astreinte de diligenter au préalable une action en justice et ce, nonobstant toute contestation par le contribuable de la régularité des sommes réclamées. Ce n’est qu’après désintéressement complet de l’administration, que l’intéressé pourra exercer un recours devant la juridiction compétente.

En seconde lieu :

Une autre différence d’ordre technique réside dans l’exécution des décisions de justice :

En droit privé, l’exécution des jugements est assurée par le biais des voies d’exécution qui sont des mesures de contraintes susceptibles de déboucher en cas de carence du débiteur à la saisie des biens de ce dernier et le cas échéant à la vente forcée de ses biens.

Dans le cadre du droit public, il est inconcevable de saisir un bien appartenant à l’Etat. Ainsi les voies d’exécution sont elles en cette matière, bannies.

Enfin notons que s’agissant de la compétence des tribunaux, la législation marocaine n’opérait aucune distinction entre le droit public et privé et ce jusqu’à l’avènement de la loi n° 41-90.

Tous les litiges étaient jugés par les tribunaux judiciaires sans distinction aucune selon la nature du litige (privé ou administratif). Or pour assurer la garantie des droits et libertés individuels ainsi qu’un contrôle de la légalité administrative, ont étés institués des

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juridictions administratives autonomes, distinctes des juridictions judiciaires. Le modèle établi permet aux tribunaux administratifs d’être sous le contrôle de la chambre administrative de la cour suprême.

B – Applications pratiques de la distinction droit public / droit privé :

1 – Matières de droit public :

Il s’agit du droit public interne et du droit international public.

Droit public interne :

Il s’agit du droit en vigueur dans un Etat déterminé, ayant des sources, des organes et des sanctions propres à cet Etat, réglementant les rapports sociaux qui se produisent à l’intérieur de cet Etat, sans qu’un élément relevant d’un autre Etat intervienne dans ces relations.

Ce peut être le droit constitutionnel dont la source principale réside dans la constitution elle-même et les lois organiques qui en découlent et qui comprend l’ensemble des règles déterminant l’organisation politique de l’Etat. De même le droit administratif relève de la sphère du droit public interne et il a pour objet l’organisation et le fonctionnement des personnes morales administratives telles que les communes, préfectures, provinces, régions et établissements publics. Pour l’heure retenons surtout que l’organisation et le fonctionnement des administrations et services publics sont dominés par l’idée de puissance publique (l’ensemble des personnes publiques c'est-à-dire la collectivité publique : l’Etat, établissements publics, collectivité locale), idée qui vise à faire prévaloir les intérêts de la société sur ceux des intérêts particuliers.

Enfin le droit public interne englobe le domaine des libertés publiques qui déterminent les droits de l’individu et leur sauvegarde au sein de la société (liberté d’expression, de réunion, de presse).

Droit international public ou droit des gens :

Dans une analyse classique, on considère que le droit international public réglemente les rapports des Etats entre eux. Il s’attache également au statut des organisations internationales ou régionales tel l’ONU, ligue arabe, l’union européenne. Il comporte des sources supra nationales : les conventions ou traités internationaux, la coutume internationale, les principes généraux du droit reconnus par les nations civilisés. Il n’est pas démuni d’institutions : assemblée générale des nations unies, conseil de sécurité, cour international de justice de la Haye.

2 – Matières de droit privé :

Il s’agit essentiellement du droit civil et du droit commercial

Droit civil :

C’est la matière incontournable et fondamentale du droit privé. C’est le droit civil qui constitue l’essentiel de ces règles. En effet, depuis le droit romain, toutes les connaissances juridiques se réduisaient au droit civil et accessoirement au droit commercial. A notre époque, les règles de droit civil (droit des contrats et obligations) ont vocation à recevoir application dés lors qu’un texte spécifique fait défaut. Il est donc ce que l’on dénomme le droit privé commun, applicable à tous sauf lorsque certains rapports sont régis par des dispositions particulières.

Du point de vue terminologique et dans le cadre spécifique de la législation marocaine très imprégnée des règles d’origine religieuse, les termes de droit privé peuvent apparaître plus appropriés que ceux de droit civil. En effet, la notion de droit civil implique l’existence d’un droit distinct de la religion (laïcisé), ce qui n’est pas le cas au Maroc.

Le domaine d’application de ce droit est très étendu :

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- Il régit tous les rapports juridiques entre particuliers au sein de la société.

- Il réglemente les éléments qui permettent d’individualiser les personnes (nom, état civile et le domicile).

- Il réglemente aussi toutes les questions inhérentes au code du statut personnel (mariage, filiation, répudiation).

- Il réglemente aussi les droits subjectifs : prérogatives reconnus aux particuliers et qui portent soit sur des choses : ce sont les droits réels tels que le droit de propriété soit qui s’exercent contre une personne : ce sont les droits personnels ou de créance tels que le droit de créance ou de propriété.

- Enfin il concerne bien évidemment l’un des domaines les plus vastes du droit civil : le droit des obligations et des contrats.

Néanmoins il est à préciser que l’histoire du droit à notre époque, montre qu’à partir du droit civil, des branches du droit privé se sont plus au moins éloignées de lui pour acquérir leur autonomie. En tenant compte des branches du droit privé qui ont conquis celle-ci, on peut en définitif définir le droit civil comme le droit régissant les rapports privés, mais seulement en tant qu’ils n’ont rien de spécifiquement commercial, industriel, social et abstraction faite des règles relatives à la réalisation judiciaire du droit. Mais nonobstant les retranchements qu’il a subis, le droit civil conserve son aptitude originelle à régir les rapports de droit privés.

Droit commercial :

A acquis son autonomie au regard du droit civil au 17 siècle et cette mutation s’explique par les considérations liées aux pratiques commerciales. Le monde des affaires se caractérise par la promptitude des opérations commerciales et des transactions conclues. Ces dernières étant fondées sur le crédit et la confiance réciproque, elles doivent de ce fait s’effectuer avec souplesse et célérité. Or les règles traditionnelles du droit civil sont gouvernées par d’autres impératifs et se caractérisent par leur formalisme, longévité des délais. Or ces considérations sont antinomiques avec les us et coutumes de la profession commerciale.

Le droit commercial réglemente la profession commerciale ainsi que les actes et effets de commerce comme la lettre de change, billet à ordre.

Cette matière est conjointement régie par le code de commerce, par la loi sur les sociétés et loi sur les groupements d’intérêts économiques.

3 – Matières mixtes :

Droit pénal :

Il faut distinguer :

- Le doit pénal général qui comprend les règles générales s’appliquant à toutes les infractions et leurs sanctions ainsi qu’aux conditions de la responsabilité pénale.

- Le droit pénal spécial qui traite des règles qui régissent chacune des infractions en particuliers.

- Procédure pénale qui concerne l’organisation, déroulement et jugement du procès pénal.

Le droit pénal est une matière de droit public si l’on prend en compte l’objet même du droit pénal puisque destiné à déterminer les agissements contraires à l’ordre social établit et à organiser la répression de ces infraction. En effet les peines infligées et mesures modernes de rééducation sont toujours prononcées au nom de l’Etat.

En revanche, il est une matière de droit privé si l’on considère la technique usitée par le droit pénal. C’est que de nombreuses règles de droit pénal constituent la garantie et la sanction des droits reconnus aux particuliers et que l’on appelle les droits subjectifs. L’un des buts

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essentiels de la loi pénale consiste précisément à protéger les biens et l’intégrité des personnes (en réprimant le délit de vol, le droit pénal défend le droit de propriété). Le droit pénal se préoccupe tout autant de la sauvegarde des droits et libertés de l’individu poursuivi, présumé innocent tant qu’un jugement définitif n’aura pas constaté sa culpabilité. Il s’agit de garantir les droits de la défense, en permettant à l’accusé de se défendre librement, de faire appel à un avocat.

De plus ce sont les mêmes juridictions (Tribunal de première instance et Cour d’appel) qui rendent à la fois la justice pénale et civile.

Procédure civile ou droit judiciaire privé :

Procéder en justice c’est accomplir les formalités nécessaires (action) pour porter devant la juridiction compétente à cet effet, la connaissance d’une affaire (litige) et obtenir d’elle une décision (jugement). La procédure civile peut être définie comme un corps de règles gouvernant la justice civile et régissant la marche du procès qui permettent au parties d’obtenir la reconnaissance et la sanction de leurs droits.

Le caractère mixte de cette discipline s’explique par le fait que les dispositions concernant l’organisation et le fonctionnement des tribunaux relèvent du droit public et celles intéressant l’action en justice, intimement liée au droit du plaideur, se rattache au droit privé.

Droit international privé :

Si on l’envisage par rapport à la distinction droit public/privé, on constate qu’il s’agit d’une discipline mixte :

- Relevant du droit public en ce qui concerne la nationalité (il s’agir de se demander quelles sont les conditions d’acquisition ou d’attribution de la nationalité marocaine) et la condition des étrangers (déterminer les conditions de leur séjour au Maroc et les droits dont ils peuvent bénéficier).

- Relevant du droit privé en ce que les conflits de lois (conflit qui oppose la loi nationale à une ou plusieurs lois étrangères en raison de la nationalité de l’une des parties, du lieu de situation des biens revendiqués : par exemple un mariage entre un marocain et une étrangère sera-t-il régi par la loi marocaine ou étrangère ?).

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LA REGLE DE DROIT

ue l’on parle de phénomènes juridiques ou de situations juridiques, l’on observe la fréquence d’utilisation du mot droit dans ses deux sens possibles : ensemble de règles de conduite régissant dans une société donnée, les rapports entre les hommes (droit

objectif) et prérogatives que le droit reconnaît à un individu ou groupe d’individus et dont ceux-ci peuvent se prévaloir dans leurs relations avec les autres (droits subjectifs).

Si la réalisation du droit repose sur une adéquation satisfaisante de ces composantes, il reste que la préoccupation majeure du juriste, consistera à distinguer la règle de droit de toutes les autres règles de conduite. En effet le comportement humain n’est pas exclusivement tributaire de normes juridiques, mais peut obéir à des impératifs d’ordre religieux et moraux.

Nous aborderons, pour ce faire, dans le cadre d’un premier chapitre, l’objet même du droit puis dans un second temps, nous nous interrogerons sur justifications de la règle de droit.

Enfin, est il possible de remettre en cause la règle de droit sachant que celle-ci est une œuvre humaine qui peut ne pas être exempte de critiques ? C’est le problème du fondement du droit.

CCHHAAPPIITTRREE II :: LL’’OOBBJJEETT DDEE LLAA RREEGGLLEE DDEE DDRROOIITT

La règle de droit régissant les rapports entre individus au sein de la société est une règle de conduite qui impose, prohibe ou permet tel ou tel comportement. Par exemple en droit civil, le débiteur doit s’acquitter de ses dettes et si tel n’est pas le cas, ses biens feront l’objet d’une vente forcée suite au jugement de condamnation. De même, en droit pénal, on ne doit pas voler ou détourner les biens de ses semblables.

La règle de droit est un commandement qui peut selon les cas, prendre la forme d’un ordre positif ou consister en une simple défense. On parle d’ordre positif lorsque la loi nous fait obligation d’accomplir des actes déterminés (obligation de contracter une assurance automobile préalablement à la mise en circulation). Il s’agit d’une simple défense quand la loi nous invite à ne pas commettre ou à s’abstenir de commettre est donc une règle de conduite mais d’autres règles de conduite peuvent découler de notre environnement familial, de la religion, de la morale.

C’est pourquoi aux fins de distinguer clairement la règle de droit des autres règles de conduite, il est nécessaire de mettre en relief au préalable les caractères essentiels dont elle est revêtue.

I – Caractères essentiels de la règle de droit :

La règle de droit est à la fois obligatoire et elle est de ce fait sanctionnée par l’autorité publique si les justiciables y contreviennent.

Ce sont ces deux caractères qui permettent de distinguer la règle de droit de toutes les autres règles de conduite.

A – La règle de droit a un caractère obligatoire :

La règle de droit est une émanation (expression ou manifestation) de l’Etat car c’est l’autorité publique qui élabore la règle de droit qu’elle impose aux citoyens.

La règle de droit est obligatoire en principe car édicte de véritables commandements.

Néanmoins il existe des degrés dans cette force obligatoire. Si certaines règles sont impératives, d’autres en revanche sont supplétives ou interprétatives.

LLooiiss iimmppéérraattiivveess dd’’oorrddrree ppuubblliicc ::

Elles s’imposent de façon absolue à tous (particuliers et tribunaux) qui ne peuvent y déroger. C’est une règle impérative que les particuliers ne peuvent se dispenser d’appliquer, et c’est

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la cas de la majorité des dispositions légales du droit public et du droit pénal. Par exemple, en droit pénal, l’euthanasie tombe sous le coup de la répression.

En droit civil, les règles impératives sont plus rares. Ainsi si une dot n’a pas été prévue dans le cadre du contrat du mariage, ce dernier n’est pas valable (article 5 de la moudouana) et tout accord des parties ayant pour but d’éluder cette obligation légale est nul de plein droit. D’ailleurs le mari ne peut contraindre l’époque à la consommation du mariage avant paiement de la dot (article 21 du même code).

Les règles impératives sont en définitive des dispositions qui traduisent des principes fondamentaux ou des valeurs que notre société considère comme étant sacrées et c’est pour cela qu’elles s’imposent de façon absolue.

LLooiiss ssuuppppllééttiivveess oouu iinntteerrpprrééttaattiivveess ::

Ne s’imposent pas de façon impérative car les particuliers peuvent les écarter en manifestant une volonté en ce sens.

Ces lois supplétives se proposent de combler à l’avance le silence éventuel observé par les auteurs d’un contrat. Faute de temps et de connaissances juridiques, les parties n’aménagent pas toujours toutes les modalités de leur transaction. Le législateur y remédie à titre préventif mais tout en leur laissant la possibilité d’adopter lors de la rédaction de leur convention, des clauses différentes.

Il s’agit d’interpréter la volonté des particuliers concernés par un rapport de droit. Le législateur pose une règle mais il laisse les particuliers libres de l’observer ou de l’écarter.

Fréquentes en droit des contrats (par exemple : vente portant sur un objet mobilier : le DOC prévoit que la livraison par l’acheteur se fait au lieu où la marchandise se trouvait lors de la conclusion du contrat c'est-à-dire au magasin du commerçant : mais les parties restent libres d’opter en faveur d’un autre lieu de livraison tel le domicile de l’acheteur : c’est ce qui découle de l’article 502 DOC).

Toutefois si les parties n’ont pas manifesté une volonté contraire, la livraison en cas de silence des parties, doit se faire obligatoirement au lieu fixé par l’article 502 c'est-à-dire au magasin du vendeur.

B – La règle de droit est sanctionnée par l’autorité publique :

La puissance publique doit faire respecter les règles de droit par le biais de sanctions qui sont destinées à assurer la pérennité ou la permanence du droit.

1 – Sanctions civiles :

SSaannccttiioonnss cciivviilleess ddeessttiinnééeess àà aassssuurreerr llaa rrééppaarraattiioonn ::

L’inobservation de la règle de droit dans les relations entre particuliers provoque un déséquilibre que les sanctions civiles se proposent de rectifier, en prévoyant la nullité des actes juridiques viciés ou des dommages intérêts.

LLaa nnuulllliittéé : Prive pour l’avenir, un acte contraire à la loi de tout effet et efface rétroactivement les effets produits par cet acte (146 moudouana : actes de gestion accomplis par les personnes en état de démence ou de prodigalité sont inefficaces).

DDoommmmaaggeess eett iinnttéérrêêttss : Tout dommage causé à autrui engage la responsabilité de son auteur. Ce dernier doit donc réparer le préjudice qu’il a occasionné en allouant à la victime une somme d’argent ou des dommages-intérêts.

SSaannccttiioonnss cciivviilleess pprroodduuiissaanntt uunnee ccoonnttrraaiinnttee ::

Certaines sanction civiles exercent une contrainte directe sur la personne elle-même. L’occupant sans droit ni titre (occupation du local sans justifier d’un contrat) risque de faire l’objet d’une mesure d’expulsion.

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D’autres produisent une contrainte indirecte : la sanction s’exercera contre les biens et non contre la personne (carence du débiteur qui refuse de payer ses dettes peut aboutir à la saisie de ses biens et vente forcée aux enchères publiques).

2 – Sanctions pénales :

La législation pénale détermine tous les comportements qui troublent l’ordre social conformément au principe de la légalité et les auteurs de ce trouble s’exposent à des peines dont l’importance est fonction de la gravité des faits commis.

- CCrriimmeess : infractions les plus graves et les peines varient de la dégradation civique, réclusion perpétuelle (meurtre avec préméditation) ou à temps ou peine de mort (guet apens).

- DDéélliittss : Peuvent être des délits correctionnels ou de police.

Les premiers font appel à des peines d’emprisonnement de 2 à 5 ans (code pénal 494 :punit de 1 à 5 ans et d’une amende, l’enlèvement par fraude, violence ou menaces d’une femme mariée.

Les secondes font l’objet de peines allant minimum de 1 mois et d’un maximum égal ou inférieur à 2 ans et d’une amende supérieure à 1200 DH (outrage public à la pudeur : article 483 code pénal).

Contraventions : Infractions les moins graves donnant lieu à des sanctions légères : amende de 30 à 1200 DH et ou une courte détention. (Stationnement illicite)

C’est l’autorité judiciaire qui est en charge de la mise en œuvre des sanctions précitées lesquelles peuvent selon la gravité de l’infraction, être extrêmement graves pour l’honneur, intégrité, liberté, vie et biens de la personne.

II – La règle de droit et les autres règles de conduite :

Les législations européennes distinguent la religion de la morale et du droit contrairement aux pays à forte tradition islamique.

A – Le droit, la morale et le religion dans le cadre des législations européennes :

1 – Le droit et la morale :

Si le but général du droit consiste à préserver l’ordre social, il doit s’élargir pour englober certaines règles morales tel le devoir d’assistance. C’est ce à quoi a procédé le législateur français en droit pénal.

Ainsi la non assistance à personne en danger (infraction imminente : le viol ou tentative d’assassinat, noyade, incendie ou erreur judiciaire) est réprimé par le droit pénal.

L’utilité sociale et l’efficacité de ces incriminations jouent un rôle préventif car il est très utile que le législateur préserve un minimum de solidarité entre les hommes. Le droit marocain réprime également l’abstention de porter secours à une personne en danger. (Article 378, 430 et 431 du code pénal de 1962).

En droit civil, certaines règles de droit ont une coloration morale. En droit français, les donations entre concubins doivent être annulées chaque fois que ces libéralités sont destinées à inciter au concubinage ou à le maintenir : il s’agit de décourager ceux qui veulent se complaire dans des situations contraires aux bonnes mœurs.

Le droit marocain est autrement plus restrictif car l’existence de relations sexuelles n’ayant point pour support le mariage entre le testateur et le légataire, doit rendre le testament nul et de nul effet. Notre code pénal réprime le concubinage et l’adultère.

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2 – Le droit et la religion dans les pays européens :

La règle religieuse se distingue difficilement à première vue dans les pays de civilisation européenne de la règle de droit : l’une et l’autre postule en faveur des mêmes commandements et prescriptions : ne pas tuer, ne pas voler. De même, la règle religieuse est obligatoire et susceptible d’entraîner sanction : la personne de confession catholique qui ne respecte pas certains commandements religieux, risque d’âtre frappée d’excommunions (rejet du contrevenant en dehors de l’église : Ne pourra pas se marier religieusement ni recevoir les derniers sacrements).

S’il existe une grande similitude entre la règles religieuse et de droit (caractère obligatoire et existence de sanctions), il faut préciser que la sanction religieuse dans un Etat laïque procède non à l’autorité publique mais de l’autorité ecclésiastique.

Seulement depuis la révolution de 1789, le code napoléonien de 1804 et loi du 09 décembre 1905 sur la séparation de l’Etat et de l’église, la religion est ignorée par le droit français.

Au Maroc, la situation diffère dans la mesure ou le pouvoir spirituel se confond avec le pouvoir temporel, le chef de l’Etat étant une autorité religieuse.

B – Législations de tradition musulmane :

Le Maroc est resté fidèle à la loi coranique et tout en tenant compte de l’évolution de la société moderne et de besoins nouveaux qu’elle engendre, le législateur a introduit des reformes d’inspiration européennes en matière pénale, commerciale et droit des contrats.

Ainsi l’article 505 du code pénal prévoit à l’encontre de l’auteur du vol, non pas l’amputation de la main droite mais une peine de 1 à 5 ans. Les rédacteurs des codes marocains ont suivi de très près la législation française. Par exemple le droit de contrainte matrimonial a été supprimé. Le père n’a plus le droit d’imposer le mariage à ses enfants. Mais à l’exception de certaines innovations que l’on retrouvera avec l’étude des sources du droit, la Moudouana a réaffirmé les principes fondamentaux de la loi islamique et tes enseignements du rite malékite.

On en déduit que les marocains musulmans sont régis par un droit essentiellement religieux. (en matière de statut personnel et successoral).

En résumé, au Maroc, le droit, la morale et la religion forme un tout et sont fortement imbriqués, les règles de droit positif étant souvent imprégnées de préceptes religieux.

Mais après tout, les règles de droit ne sont que le produit du milieu social et le législateur retranscrit les aspirations de ce milieu en affirmant son attachement à certaines valeurs qu’il estime essentielles.

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En effet, le droit étant le produit de l’œuvre humaine, il comporte nécessairement des imperfections, incohérences et contradictions et c’est pourquoi il convient de s’interroger sur les justifications de la règle de droit et sur les buts qu’il faut lui assigner.

I – Le problème de justification de la règle de droit et les controverses doctrinales

A – Doctrines positivistes

1 – Positivisme juridique ou étatique

Tout repose sur l’idée qu’il n’y a pas de droit autre que celui qui résulte de la réalité positive c'est-à-dire un droit qui s’applique effectivement à un moment dans une société donnée. C’est le droit positif.

Le droit repose exclusivement sur la volonté de l’Etat. Ce droit est constitué par les lois et règlements. Or ces textes sont élaborés par les organes étatiques (pouvoir législatif et pouvoir exécutif).

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2 – Positivisme sociologique

La règle de droit procède de la société. A travers les coutumes, usages et mœurs, c’est la société qui se trouve à l’origine des normes juridiques. Le rôle de l’Etat consistera non à créer le droit mais à traduire dans les faits la solidarité sociale.

B – Doctrine idéaliste ou droit naturel

Cette conception tient pour certaine l’existence du droit naturel qui est un ensemble de règles idéales de conduite humaine, supérieures aux règles du droit positif, qui s’impose à tous, y compris aux législateurs.

Ces règles sont supérieures au droit positif et la règle de droit n’est justifiée que si elle est conforme à un idéal supérieur dont elle est inspirée. Les grandes principes de cette doctrine :

- Le droit naturel est universel et immuable : exemple : respect de la parole donnée.

- Le droit positif doit être conforme à la justice naturelle.

- Si le législateur ne respecte pas le droit naturel, on se trouve en présence d’une loi injuste que les particuliers ne sont pas tenus de suivre. La résistance à la loi injuste est une résistance légitime.

En vertu de la conception du droit naturel le domaine du droit naturel se réduit à des principes généraux : il s’agit de règles admises à toutes époques et par toutes civilisations comme l’obligation de ne faire tort à personne, respect de la parole donné, obligation d’attribuer à chacun ce qui lui revient.

C – Problème du fondement de la règle juridique dans le cadre du droit marocain

Au Maroc, le droit est fondé sur la religion. En théorie, les rapports du droit et de la religion peuvent prendre trois directions.

La séparation ou la laïcité semble une solution peu réaliste dans un pays comme le notre où les nationaux restent attachés aux valeurs ancestrales.

La confusion totale est contestable à notre époque. Il faut tenir compte des mutations de la société, et c’est ainsi que le statut juridique de la femme ne peut plus être ce qu’il était il y’a 14 siècles.

Certaines sanctions pénales telles l’amputation de la main droite du voleur sont inconcevables à une époque où l’on s’efforce d’assurer la rééducation, formation et reclassement social des délinquants.

Entre ces deux positions, il faudrait plutôt considérer que s’il est naturel dans une société traditionnelle attachée à la religion que la règle de droit soit imprégnée de préceptes religieux, il faut tout autant prendre en compte l’évolution sociale qu’il convient d’adapter aux exigences du monde moderne.

II – Buts de la règle de droit

Le but du droit consiste à se préoccuper de la sécurité des individus et de la stabilité des situations établies.

La sécurité peut être matérielle (ex : en droit des contrats, un système de responsabilité a été mis en place

Pour assurer la réparation des dommages causés à autrui) ou juridique (la règle doit dans ce cas là être conçue en termes clairs et précis pour permettre aux particuliers d’agir ou de conclure une convention en connaissance de cause).

Quant à la stabilité, elle peut se situer à différents niveaux : C’est le cas par exemple de l’article 4 de la constitution que la loi ne peut avoir d’effet rétroactif, ce qui signifie que les lois nouvelles n’ont vocation à s’appliquer que pour l’avenir, à partir du jour de leur entrée en vigueur. Elles ne peuvent remettre en cause les situations établies ou acquises.

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Pour dégager les buts de la règles de droit, il faut donc se demander comment, il convient d’organiser la vie en société et aménager les rapports entre l’Etat et les individus. En effet, l’élaboration du droit est dominé par deux conceptions : l’une de nature libérale ou individualiste et l’autre de conception sociale ou socialiste (A).

Par suite, il s’agira d’examiner les différents facteurs qui interviennent dans la formation du droit (B).

A – Différentes conceptions dominant l’élaboration du droit

1 – Conception individualiste du droit

Selon cette conception, c’est l’individu qui constitue la finalité ultime du droit et cela se traduit au sein du système juridique par la protection et l’épanouissement des intérêts de l’individu. Toutes contraintes qui peuvent peser sur les individus sont réduites, pour leur accorder le maximum de liberté. Cette conception individualiste a des conséquences juridiques (rôle prépondérant de la volonté individuelle et à sa principale expression qui est le contrat ; celui-ci constitue la loi des parties.), politiques, et sociales (l’action de l’homme a plus de valeur que celle des pouvoirs publics, donc l’Etat doit se garder d’intervenir dans le secteur économique ; il ne peut et ne doit encourager que l’initiative privée. C’est le jeu de la libre concurrence.)

2 – Conception socialiste ou sociale du droit

Les intérêts particuliers selon les partisans de cette conception, doivent céder face à l’intérêt général. L’explication réside dans l’idée de solidarité sociale. Parmi les principes qui dominent cette conception, on peut relever l’idée de justice sociale. Les pouvoirs publics doivent donc intervenir pour réduire les inégalités sociales. Cette action ne peut produire ses effets que dans la mesure où les pouvoirs de l’Etat seront développés au maximum ce qui implique comme conséquence directe, des contraintes imposées aux individus. Par exemple, selon cette conception, l’Etat pratiquera dans le domaine économique une politique d’économie dirigée en intervenant lui-même dans tous les circuits de la vie économique.

B – Les facteurs qui interviennent au niveau de l’élaboration du droit

Ces facteurs sont :

1 – Facteur humain

L’élaboration de la norme juridique tient compte de la nature de l’homme avec tous ses éléments constitutifs d’ordre physique, physiologique ou même psychologique.

Ainsi en droit français et dans le cadre de la médecine légale, on relève l’existence d’une technique qui permet d’identifier les empreintes génétiques humaines. Cette technique est admise comme moyen de preuve devant les tribunaux et elle permet de révéler à travers des recherches minutieuses, que chaque individu est génétiquement unique.

En droit musulman classique, on peut faire état de la théorie de l’enfant endormi c'est-à-dire de l’enfant qui séjourne dans le ventre maternel pendant un certain nombre d’années, ce qui permettait de rattacher au mari, l’enfant né plusieurs années par la dissolution du mariage par décès ou répudiation (rite malékite : 5 à 7 ans et pour les hanafites : 2 ans). Cette théorie est bien entendu une fiction car les délais retenus ne correspondent pas à ceux universellement admis à la suite d’observations scientifiques. Mais, peut être, peut-on expliquer cette théorie de l’enfant endormi par des considérations d’ordre social : restreindre le nombre des naissances illégitimes.

Le facteur humain joue un rôle important dans la formation du droit au niveau de deux évènements qui marquent le point de départ et la fin de la personnalité juridique. Il s’agit de

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la naissance (le droit marocain fait remonter le point de départ de la personnalité juridique à la conception) et du décès (vise à assurer la transmission des droits et obligations du défunt).

2 – Le milieu géographique

Le législateur se réfère à certains facteurs d’ordre géographiques lors de l’élaboration de la règle d droit. Il tiendra compte du milieu naturel, conditions climatiques. Ainsi l’âge matrimonial n’est pas fixé de façon abstraite puisque l’on s’est aperçue que les individus sont corporellement plus précoces dans les pays chauds que sous un climat tempéré et c’est ce qui explique que l’âge matrimonial soit plus élevé dans les pays nordiques que dans les pays méridionaux.

3 – Le milieu social

Le législateur se doit de bien connaître le milieu social et ses aspirations, pour promouvoir une législation adéquate et qui corresponde aux besoins de ses destinataires.

Un peu partout, les mœurs et les traditions morales et religieuses exercent toujours une grande influence et c’est en vertu de ces préceptes religieux, que certaines législations interdisent ou admettent l’avortement (par exemple).

Il en va de même en cas de polygamie licite au sein de certains pays et prohibée par d’autres. Les pays musulmans ne sont pas encore parvenus à adopter une solution uniforme : en Tunisie, la polygamie est prohibée et des sanctions pénales à l’encontre des contrevenants, amende et emprisonnement sont prévues. Au Maroc, le mariage avec plusieurs femmes est toujours théoriquement possible, quoique sévèrement restreint dans le cadre de la nouvelle moudouana.

4 – Le facteur économique

Le droit est un facteur de réforme d’ordre économique. En effet, l’économie politique s’occupe de la production, circulation, distribution et consommation des biens. La législation d’un pays, évolue au rythme de son économie, ce qui explique l’incidence juridique des transformations économiques ou sociales. C’est ainsi que la politique de privatisation a donné lieu au Maroc, à une refonte totale de la législation fiscale et du droit des affaires, préalable incontournable à la mondialisation économique. Le facteur économique joue par conséquent un rôle très important dans l’élaboration du droit.

S’achèvent les développements consacrés à l’étude de la règle de droit. Il nous faut nous interroger présentement sur l’origine de ce droit et les mécanismes qui donnent naissance à la règle de droit : C’est le problème des sources du droit.

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LES SOURCES DU DROIT

l s’agit de connaître les autorités et procédés techniques qui donnent naissance à ces règles générales dont l’ensemble forme le droit objectif.

La loi constitue la principale source de ce droit objectif et ce qu’il s’agisse de la loi proprement dite (celle qui est votée par le parlement : ces lois sont désignées par les termes : textes législatifs) ou des règlements ou textes réglementaires qui émanent du pouvoir exécutif.

Les principales sources de droit marocain étant les lois et règlements, on peut légitiment se demander s’il existe d’autres sources en droit positif.

Ainsi peut on se demander si la coutume qui n’émane pas d’un corps constitué mais de simples pratiques populaires est elle une source de notre droit ? De même, au Maroc la religion n’étant pas séparée de l’Etat, peut on considérer les principes traditionnels du droit musulman comme des sources de droit ? Pour répondre à ces question, nous serons conduit à distinguer à travers deux chapitres, les sources traditionnelles et les sources modernes du droit marocain.

CHAPITRE I : SOURCES TRADITIONNELLES

I – Le droit musulman

La vie moderne ne cessant d’engendrer des besoins nouveaux, on pourrait croire que la loi islamique n’est plus tout à fait adaptée aux conditions de vie actuelle des marocains. A l’exception de la Turquie ou de l’Albanie qui ont laïcisé leur droit et remplacé la loi coranique par des codes européens, la plupart des pays musulmans continuent à proclamer leur attachement à l’islam et au droit musulman dans leur codes, constitution ou lois (cas de la constitution marocaine du 7 octobre 1996 « royaume du Maroc est un Etat musulman et l’islam est religion d’Etat »). Malgré ce courant favorable au droit musulman, il reste que les régimes islamiques s’efforcent aux droits européens. S’agissant du droit marocain, la loi marocaine d’unification du 26 janvier 1965 a introduit d’importantes réformes et a réduit le domaine d’application du droit musulman classique. Si le droit musulman traditionnel constitue encore une source fondamentale de notre droit positif, c’est surtout en matière de statut personnel, familial et successoral et dans le cadre des immeubles non immatriculés que cette assertion peut se vérifier.

A – Principales innovations introduites par le code du statut personnel en 1957-1958 et en 1993

A deux reprises, la moudouana a fait l’objet de réformes : déjà en 1957-1958, puis en 1993 où les innovations introduites répondaient au souci d’améliorer davantage la condition juridique de la femme et des enfants mineurs.

Mais ce n’est que le 16 janvier 2004 qu’un nouveau code est adopté à l’unanimité par le parlement et un mois plus tard, il sera publié au bulletin officiel et son entrée en vigueur est immédiate. Mohamed VI dans son discours du 10 octobre 2003, abolit par un texte novateur des dispositions consacrant plusieurs siècles d’inégalités entre les hommes et les femmes.

1 – Innovations introduites en 1957-1958

a – Age matrimonial et le consentement au mariage

Age matrimonial :

Les rédacteurs ont voulus mettre fin aux mariages précoces qui risquent de nuire à la santé et scolarité de l’enfant. Ce sont ces préoccupations qui ont incité le législateur de 1957 à substituer au critère archaïque de la puberté (degré de développement corporel ou physique

I

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de l’individu), la notion d’âge moderne matrimonial (capacité de contracter mariage à 18 ans pour l’homme et 15 ans révolus pour la femme)

Consentement au mariage :

Le consentement des futurs époux est exigé de sorte que le père ne peut imposer le mariage à ses filles à n’importe quel âge. Donc le mariage n’est plus valable si ceux qui ont décidé de s’unir n’ont pas donné leur propre consentement.

b – Polygamie :

La femme a le droit de demander que son mari s’engage dans l’acte de mariage à ne pas lui adjoindre de coépouse et à lui reconnaître le droit de demander la dissolution du mariage au cas ou cet engagement serait violé. Si elle ne s’est pas réservée ce droit d’option et que le mari contracte un nouveau mariage, elle peut saisir le juge pour apprécier le préjudice que lui cause la nouvelle union.

c – Dot :

La dot est la propriété exclusive de la femme qui en a la libre disposition. Les biens dotaux ne sont donc plus attribués au père de la future épouse. De même, l’époux n’est pas fondé à exiger de sa future, un apport quelconque de meubles, literies ou effets vestimentaires en contrepartie de la dot convenue.

d – Tutelle dative :

Dans le cadre du droit musulman la tutelle peut être légale (exercée de plein droit par le père et à son décès par le cadi), ou testamentaire (désignation du vivant du père et par testament d’un tuteur à ses enfants incapables). L’innovation introduite par le code réside dans la suppression de l’exercice de la tutelle légale par la cadi et son remplacement par une tutelle dative. Autrement dit, la gestion des biens du mineur doit être assurée dans le cadre familial par un proche parent et non par le tuteur datif (mouquadam).

e – La répudiation :

Le législateur prive d’effet la réputation conditionnée par l’ivresse, la contrainte ou colère irrésistible, par l’accomplissement d’acte positif ou abstention.

De même, consacre la fin de la répudiation multiple ou répudiation innovée par trois. Ce sont celles qui se réalisent par une seule formule : elles sont prohibés ou ne valent que comme répudiation unique.

Enfin, en matière de dissolution de mariage, le législateur au sein de l’article 52 bis de la moudouana, à instauré une indemnité (don de consolation), dont le montant est fonction des ressources du ménage et du tort causé par le mari qui aura abusé de l’usage du droit de rompre unilatéralement le lien conjugal. Ce don est obligatoire.

f – Durée de grossesse :

La durée de grossesse est limitée à 1 an à compter du jour de la répudiation ou décès. Le législateur n’a pas non plus totalement abandonné la théorie de l’enfant endormie car en cas de doute, l’article 76 permet de prolonger la durée de grossesse mais cette prolongation ne sera accordée que par voie de justice ou suite à une expertise médicale.

g – Testament obligatoire :

Vise le cas de l’enfant qui décède avant le père ou en même temps que lui tout en laissant des descendants. Or les petits enfants n’ont aucun droit sur la succession du grand père. Ils ne peuvent revendiquer des droits successoraux que leur propre père n’avait pas reçus. Pour résoudre cet obstacle, le droit positif dans certains pays musulmans, a fait appel à une fiction juridique qui est celle du testament obligatoire.

On présume que le grand père manifesterait la volonté de disposer d’une partie de ses biens au profit de ses petits enfants. En effet tout musulman a le droit de disposer par testament

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du tiers de sa fortune et l’innovation consiste à faire de ce legs facultatif un legs obligatoire destiné aux enfants du fils précédé.

2 – Les innovation introduites en 1993

En 1993 la moudouana a fait l’objet d’une nouvelle réforme ; le défunt roi Hassan II ayant souligné que la femme marocaine jouit de l’opportunité de prendre part de façon plus active au développement durable de la société.

a – Les conditions du mariage

La femme majeure dont le père est décédé, peut contracter mariage sans l’intervention du tuteur et le consentement de la future épouse est assorti de sa signature au bas de l’acte de mariage dressé par deux adouls. Obligation est faite aux époux de produire lors de la conclusion du mariage, un certificat médical attestant qu’ils sont indemnes des maladies contagieuses (MST).

b – Représentation légale des enfants :

La mère est pour la première fois investie de la tutelle légale mais cette tutelle est conditionnée car elle n’est admise à faire valoir cette tutelle qu’en cas de décès du père ou s’il est empêché pour cause d’aliénation mentale ou autre. De même, elle est limitée du fait que la mère ne pourrait aliéner valablement les biens de ses enfants mineurs que si elle obtient au préalable, l’autorisation du juge, gardien des intérêts matériels des enfants mineurs.

c – Garde des enfants :

Ce droit est partagé à égalité durant le mariage. Mais après la dissolution de ce dernier ou en cas de divorce, la garde revenait en priorité à la mère, à la grande mère maternelle ou autre selon l’ordre établi par la loi. Le père occupant le 13e rang. En 1993, tout en confirmant la priorité de la mère, la moudouana reconnaît au père la prééminence dans ce domaine sur les autres titulaires potentiels de ce droit en particulier la grande mère maternelle. La loi dans le même temps, permet à l’enfant de choisir le bénéficiaire de sa garde : dés 12 ans pour le garçon et 15 ans pour la fille.

d – Entretien des enfants :

La pension alimentaire est à charge du père ou de la mère si le père est insolvable et la mère fortunée ou lorsqu’il s’agit d’un enfant naturel.

Cette pension est fonction des ressources du débiteur et des usages du milieu du bénéficiaire. L’abandon pécuniaire de la famille est réprimé par le code pénal (art 479-480 : 1 mois à 1 an de prison et amende de 200 à 2000 DH ou l’une de ces deux peines).

e – Divorce :

Les dispositions combinées des articles 179 et 5 du code de procédure civile et 48 de la moudouana, font du juge le conciliateur obligé entre les époux en cas de mésentente grave. La tentative de réconciliation constitue une étape judiciaire gracieuse indispensable. D’où l’autorisation du divorce par le juge ne peut avoir lieu que si la tentative de conciliation s’avère infructueuse. Dans ce cas le juge ordonne la consignation au tribunal d’une caution en garantie des obligations pécuniaires quoi découlent de la décision de divorce (pension alimentaire et don de consolation).

f – Création d’un conseil de famille :

L’article 156 bis prévoit auprès du juge, un conseil de famille pour l’assister dans sa mission relative aux affaires familiales. Le conseil de famille assure l’arbitrage en vue de dissiper les discordes graves entre époux si le divorce, répudiation sont à craindre. Emet des avis en matière de mariage, dissolution, pension alimentaire, représentations légales et procédures de statut personnel prévues par le code de procédure civile.

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B – Nouvelles reformes :

Mohamed VI a révolutionné le statut de la femme marocaine qui va – presque – devenir l’égale de l’homme. Ce nouveau code rapprochera la femme marocaine de la tunisienne libérée et l’éloignera du monde algérien. Sur ce sujet sensible, qui fracture la société marocaine entre traditionalistes et « modernistes », le roi a tranché clairement en faveur de ces derniers. Le nouveau Code de la famille régit quatre grandes périodes de la vie conjugale : avant le mariage, le mariage, le divorce et ses suites. Il nous faut les décortiquées pour mieux cerner les réelles avancées mais aussi les lacunes des propositions de la commission.

1 – Avant le mariage :

Age du mariage, égalité sans concession.

En effet, l’âge légal du mariage qui était de 15 ans jusqu’alors pour les filles, vient d’être fixé à 18 ans, consacrant ainsi l’égalité entre sexes. Dorénavant, un père désirant marier sa fille avant 18 ans, devra en formuler la demande auprès du juge du tribunal familial et justifier la nécessité de cette union.

Quant les femmes deviennent majeures !

La fin de la tutelle (wilaya), consacre l’entrée de la femme dans le monde des adultes. Majeure, cette citoyenne à 100%, jouira désormais d’une identité pleine et entière. A ce titre, elle pourra, dès sa majorité, être maîtresse de ses choix, exercer sa propre volonté et son libre consentement. Corollaire de cette majorité arrachée de haute lutte, plus besoin de la signature du père ou, si elle est orpheline, de son frère ou de son oncle pour se marier.

2 – Le mariage :

Egalité des droits et devoirs :

Contracté devant le juge du tribunal familial, et non plus devant l’adoul ce dernier se voyant reléguer au rang de simple « rédacteur » jusqu’à présent, le mariage était défini comme « un contrat légal par lequel un homme et une femme s’unissent en vue d’une vie conjugale commune et durable », placée « sous la direction du mari » Dorénavant, la formule proposée parle d’un contrat légal par lequel un homme et une femme consentent à s’unir en vue d’une vie conjugale commune et durable » et ce, « sous la direction des deux époux ». Le changement de formule, lourd de conséquences, institue de fait, une égalité de droits et de devoirs entre conjoints.

Qu’est-ce à dire des Droits et des devoirs, pour l’un comme l’autre

C’en est fini de la notion « d’obéissance de l’épouse au mari ». La notion d’autorité ou de soumission tombe. Dorénavant, la femme a droit à la parole, être informé des décisions engageant le couple ou les enfants. Conséquence immédiate de cette nouvelle philosophie égalitaire, la suppression du devoir de « prise en charge » pour l’époux (l’épouse ne pourra plus invoquer cette raison comme motif de divorce). On parle dorénavant de responsabilité mutuelle ».

Deux chefs pour une même famille

Les deux conjoints sont dorénavant responsables, au même titre. Ainsi, la bonne marche du foyer, tout comme l’éducation des enfants, incomberont à M. et Mme.

Du partage des biens

Autre nouveauté, l’institution du régime de la communauté pour les biens acquis pendant le mariage. Le rédacteur a introduit la possibilité pour les époux de se mettre d’accord, dans un document séparé de l’acte de mariage, sur la répartition des biens acquis au cours de leur union. Le but de cet acte séparé est de « définir un cadre pour la gestion et la fructification des biens acquis durant le mariage ». Ainsi, pour la première fois, une femme pourra

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récupérer, en cas de divorce, les biens qu’elle aura achetés. Tout le problème sera de prouver qui a acheter quoi. Or, l’avant-projet évoque, en l’absence d’accord, le fait de recourir pour le juge « aux moyens généraux de preuve, tout en prenant en considération le travail de chacun des époux et les efforts qu’il a accomplis en vue du développement des biens de la famille ».

Mais qu’est-ce que cela signifie ? à titre d’exemple, le juge considèrera-t-il le travail de la femme au foyer comme une contribution à l’enrichissement du couple ? Rien n’est moins sûr, puisqu’en parlant de « moyens généraux de preuve », il est ici clairement fait référence au Dahir des Obligations et Contrats (DOC). Or, ce dernier ne parle pas de « contribution morale » mais seulement matérielle. La règle étant qu’un justificatif, une facture ou un témoin doit être produit pour chaque somme supérieure à 250 DH. Ainsi, tout reposerait sur la bonne volonté de monsieur à mettre au nom de madame certains biens acquis, pour que celle-ci, dans le cas où elle n’a pas de ressources propres, puisse les garder après le divorce.

Le polygamie toujours de mise

Interdite ou pas ? En fait, ni l’un ni l’autre. Disons que cette atteinte flagrante à la dignité de la femme va se trouver soumise à des conditions draconiennes telles, que sa pratique en sera rendue difficile. Tout d’abord et dans tous les cas de figure, le polygame devra en demander l’autorisation au juge des Affaires familiales. Autorisation qui lui sera donnée s’il arrive à prouver la nécessité qu’il a de prendre une seconde épouse ou si le juge établit qu’il a les moyens d’entretenir les deux épouses, et donc de garantir à chacune tous ses droits, dont l’égalité de traitement, la pension alimentaire et le logement. La polygamie est également interdite si le mari s’est engagé, lors du mariage, à ne pas le faire. Ces conditions précitées visent donc à mettre un sérieux frein à une pratique, déjà tombée en désuétude.

Quoi qu’il en soit, si l’époux indélicat est « exigible » à la polygamie, le juge est tenu de justifier l’autorisation qu’il a accordé. Cette décision n’est pas susceptible de recours. Le rédacteur, voulant limiter autant que possible le recours à cette pratique anachronique, a cependant prévu une procédure stricte. Entre autres, la convocation par le juge de la première épouse comme de la future afin de les informer de leurs nouvelles destinées. L’épouse originelle peut alors demander le divorce pour « préjudice subi » et l’obtiendra assorti d’un montant correspondant à ses droits et à ceux de ses enfants.

3 – Le divorce :

Quand l’homme veut divorcer : Il peut quand il veut, et cela s’appelle encore répudiation. Changement notable, ce n’est pas vers un adoul qu’il doit se diriger, mais vers un tribunal et ce sera au juge de donner l’autorisation pour que l’acte de divorce soit consigné par des adouls. Avant de statuer, le juge doit impérativement convoquer l’épouse pour une tentative de réconciliation mais il n’est à aucun moment mentionné que le mari doit justifier sa demande de répudiation. Dans la nouvelle version, l’homme se voit obligé de s’acquitter de « tous les droits dus » à l’épouse et aux enfants, avant l’enregistrement du divorce, et s’il n’en a pas les moyens, il devra renoncer à la répudiation.

Quand la femme veut divorcer : Pour la femme, il n’est toujours pas question de « répudier » son mari – sauf si le droit d’option (al isma) a été stipulé sur le contrat de mariage. Donc, si la femme a le droit d’option – ce qui est donc exceptionnel – elle peut elle aussi s’adresser au juge, qui essaiera de réconcilier les deux conjoints. Si la tentative de réconciliation échoue, le tribunal autorise l’épouse à demander la consignation du divorce et statue sur ses droits et ceux de ses enfants stipulés dans l’article 84.

Quels autres recours a l’épouse en cas de volonté de séparation ?

Les mêmes qu’avant, et c’est toujours aussi compliqué : pour avoir son divorce, il faut qu’il y ait préjudice. Lequel ? Là aussi, flou total : « Est considéré comme préjudice justifiant le divorce tout acte ou comportement infamant émanant de l’époux ou contraire aux bonnes

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mœurs portant un dommage matériel ou moral à l’épouse la mettant dans l’impossibilité de continuer la vie conjugale », dit-on dans l’article 94. Le harcèlement moral est-il un « comportement infamant » ? Le viol conjugal ? L’alcoolisme ? La violence ? Rien n’est précisé, d’autant plus que plus loin, et là aussi rien n’a changé, la femme est dans l’obligation de prouver qu’il y a eu préjudice. Sauf que, et il est important de le signaler, la proposition a quand même ouvert une brèche : il est stipulé clairement que dans le cas de l’impossibilité de prouver le tort, l’épouse peut « recourir à la procédure de désunion » (Chiqaq), qui lui permet de ne pas avoir à prouver quoi que ce soit mais de se dire dans l’impossibilité de continuer de vivre avec son mari.

Dans quels autres cas la femme peut-elle demander le divorce ?

En cas de manquements à une des conditions stipulées dans le contrat de mariage par les deux conjoints (la polygamie par exemple) et autre nouveauté de taille avancée dans le projet, l’épouse ne peut demander le divorce pour défaut d’entretien que si elle-même est dans l’incapacité financière. Logique, puisque le nouveau texte la consacre définitivement comme un être majeur capable de se prendre en charge elle-même et que de ce fait, elle n’est plus dépendante moralement et financièrement de son mari.

Le divorce consensuel :

Les conjoints ont à se présenter devant un juge et lui faire part de leur volonté de rompre leur union sacrée. Il essaiera alors, pour la forme, de les réconcilier, et si sa tentative ne marche pas, il enregistrera le divorce. Reste que le divorce « consensuel » moyennant compensation est maintenu. Ce qui signifie, de ce fait, qu’on continue à reconnaître à l’homme le droit de monnayer la demande de divorce de sa femme. Quant à elle, elle continuera à payer le prix fort pour sa liberté. Seul changement dans l’histoire : si la femme n’est pas d’accord sur la somme demandée par le mari – qui peut atteindre des millions –, elle peut en référer au tribunal, qui, lui, évaluera la contrepartie du divorce en fonction du montant de la dot, de la durée du mariage, des raisons justifiant la demande du « khol ». Sauf qu’une fois de plus, si le mari n’est pas d’accord sur la somme proposée par le tribunal, il peut toujours se rétracter et refuser le divorce.

4 – Après le divorce :

Un habitant décent et correspondant à leur niveau de vie doit être obligatoirement assuré à la mère et à ses enfants avant l’enregistrement du divorce. La commission a décidément tenu à ce que l’intérêt de l’enfant soit pris en considération. Et pour preuve :

A la séparation de ses parents, l’enfant ayant l’âge de 15 ans révolus, a la possibilité de choisir d’être confié soit à son père soit à sa mère et ce, qu’il soit fille ou garçon.

Grande révolution pour les mères divorcées : la femme conserve la garde de son enfant même après son remariage. En effet, son remariage n’entraîne pas la déchéance de son droit de garde.

Paternité : « Si la fiancée donne des signes de grossesse, l’enfant est rattaché au fiancé, pour rapports sexuels par erreur ». Pour que l’enfant soit rattaché au fiancé, il faut que les familles des fiancés soient au curant des fiançailles de leurs rejetons, qu’il soit établi que la « fauteuse » est tombée enceinte lors de la période des fiançailles et que le « fauteur » reconnaisse avoir semé des grains d’amour dans le ventre de sa promise. Dans le cas contraire, et grande nouveauté, celle-ci peut recourir aux « moyens de preuve légale » pour prouver sa filiation.

Héritage : une brèche est ouverte

En effet, la proposition veut que les petits-enfants du côté de la fille héritent de leur grand-père au même titre que les petits enfants du côté du fils.

MRE : Marocains Ressortissants Etrangers : Vers un mariage civil ?

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La réforme de la Moudouana prévoit en effet que les MRE peuvent conclure leur mariage « en conformité avec les procédures administratives locales ». Seule contrainte : la présence de deux témoins musulmans. Qu’est ce à dire ? Pour que le mariage soit valide, le jeune couple disposera de 3 mois pour déposer une copie de l’acte auprès des services consulaires dont relève la circonscription où l’acte a été conclu ou, s’il n’y a pas de consulat, envoyer cette copie au ministère des Affaires Etrangères.

Adouls : Les nouveaux aides judiciaires

La création rapide des tribunaux de famille et la mise en place d’une formation spéciale pour ces juges des affaires familiales est plus que jamais mise en avant dans le cadre de la réforme. Or, la principale fonction des adouls était de juger de la conformité des actes à la charia. Ainsi les référentiels religieux demeurent mais en instituant des tribunaux, certains estiment que l’on passe d’une prégnance du religieux à une sécularisation douce. Pour d’autres encore, les adouls ne seront plus que des aides judiciaires, de simples exécutant en charge de la rédaction des actes. L’avenir et l’application de ce nouveau code nous le diront.

B – Permanence du droit musulman classique :

1 – Traits caractéristiques de la moudouana :

Famille :

La seule famille légitime, reconnue et protégée par le droit positif se réduit à la famille légitime fondée sur les liens de sang ; ce qui revient à exclure de la famille, les enfants naturels et adoptifs.

Filiation naturelle :

L’enfant naturel bénéficie de droits importants dans le cadre des législations européennes, ce qui rapproche son statut de celui de l’enfant légitime. La moudouana ne rattache pas pour sa part, l’enfant à son père et aucun des effets découlant normalement de la filiation légitime. C’est dire que l’enfant naturel ne peut ni se présenter à la succession ni réclamer quoi que ce soit à son père. Les autres effets de la filiation sont aussi exclus : droits et devoirs du père envers l’enfant, droit de rechercher le père.

La seule concession faite par la moudouana aux naissances irrégulières, concerne les rapports de l’enfant avec sa mère : « la filiation illégitime rattache l’enfant à sa mère comme la filiation légitime en raison du lien naturel » art 83 alinéa 2.

Adoption :

En droit marocain, l’enfant adoptif n’est pas lié à ses parents adoptifs par les liens di sang. L’adoption n’a aucune valeur juridique et n’entraîne aucun des effets de la filiation.

Cette position de principe est légèrement atténuée par une pratique qui consiste par testament à disposer librement d’une partie de ses biens (limité au tiers disponible) en faveur de l’enfant adopté : c’est ce que l’on appelle l’adoption de récompense ou testamentaire.

Kafala ou prise en charge des enfants abandonnés :

Est considéré comme susceptible de bénéficier des faveurs de la loi, l’enfant qui n’a pas atteint 18 ans et qui se trouve :

- Nés de parents inconnus, et avoir été retrouvé en un lieu quelconque.

- Etre orphelin et ne disposant pas de moyens légaux de substance.

- Avoir des parents incapables d’en assurer protection et éducation pour des raisons de force majeure indépendantes de leur volonté.

- Avoir des parents dissolus n’assumant pas leur responsabilité de protection et d’orientation en vue de les conduire dans la bonne voie.

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La kafala des enfants déclarés abandonnés par jugement est confiée soit à des institutions publiques chargées de la protection de l’enfance ou à des organismes de caractère social reconnus d’utilité publique, soit à des époux musulmans mariés depuis au moins 3 ans et remplissant les conditions de moralité, santé et de solvabilité. Ces entités ou personnes bénéficiaires de la kafala, sont tenus de par la loi, de veiller à l’exécution des obligations relatives à la protection de l’enfant abandonné en assurant son éducation et en subvenant à ses besoins essentiels jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de 20 ans.

Dissolution du mariage (se reporter aux dispositions prévues par la moudouana dernière mouture).

Dévolution successorale :

- Le part héréditaire de la fille est de moitié inférieure à celle du garçon.

- De même, les droits successoraux de la mère suite au décès de l’un de ces enfants sont souvent inférieurs à ceux du père.

- La part de la veuve ne dépasse pas de moitié la part dévolue au veuf.

2 – Evolution du domaine d’application du droit musulman :

Aujourd’hui ce n’est plus la doctrine mais la loi positive qui constitue la principale source du droit musulman. Au Maroc, notre code de nationalité de 1958, tout en réservant le cas des israélites marocains a décidé que le code du statut personnel régissant les marocains musulmans s’applique à tous les nationaux. Le champ d’application du droit musulman tend de plus en plus à s’étendre à tous les nationaux, abstraction faite de leur confession.

Quant aux étrangers résidant au Maroc, s’ils sont de confession islamique, le dahir du 24 avril 1959 décide que les étrangers musulmans résidant au royaume ne peuvent être régis que par la moudouana. C’est ce qui résulte d’une jurisprudence constante de la cour suprême. Les autres étrangers qui ne sont pas de confession musulmane, restent soumis à leur propre loi de statut personnel et cette loi étrangère ne peut être appliquée au Maroc que par des tribunaux marocains.

Ainsi en matière successorale, de statut personnel et de droit familial, le droit musulman est une source essentielle de notre droit positif mais aussi une source dont le domaine d’application s’est élargie. Seulement cette conclusion est moins vrai en ce qui concerne d’autres matières (le droit des contrats, droit commercial ou la législation pénale) ou le droit musulman semble au contraire accuser une régression au profit de la législation dite moderne.

II – Droit coutumier

Source la plus vivante et qui traduit au mieux les besoins et aspirations des citoyens : elles procèdent directement et spontanément des pratiques populaires.

La coutume ou orf est une règle de droit découlant d’une pratique ancienne, d’un usage qui s’était prolongé dans le temps. La coutume comporte donc un élément matériel : c’est la pratique prolongée dans le temps et un élément psychologique : c’est la croyance populaire au caractère obligatoire de l’usage. La règle se transmet de façon orale et c’est pourquoi on présente le droit coutumier comme un droit non écrit. D’ailleurs le DOC ou la moudouana se réfèrent souvent à la coutume, orf, us et coutumes et usages des gens de la région ou du milieu social dans lequel on vit.

Dans toutes ces hypothèses, c’est la loi positive qui donne droit de cité à la coutume.

CCHHAAPPIITTRREE IIII :: SSOOUURRCCEESS MMOODDEERRNNEESS

Elles sont constituées par les dispositions qui émanent du pouvoir législatif (lois stricto sensu) et les dispositions prises par le pouvoir exécutif (les règlements).

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Avant d’envisager l’étude de ces dispositions, il faut présenter sommairement la distinction du droit international et les sources du droit national.

Sources du droit international :

Il faut distinguer les sources formelles, les moyens auxiliaires de la détermination des règles de droit et autres sources du droit international.

Sources formelles :

Traités : la convention de vienne du 23 mai 1969 définit le traité comme étant un accord international conclu par écrit entre Etats et régi par le droit international. De plus en cas de conflit entre la législation international et interne, la supériorité du droit international sur la loi interne est reconnu unanimement par de nombreux pays. En droit marocain, le code de nationalité marocaine du 6 septembre 1958 affirme la supériorité du traité sur la loi interne.

Coutume internationale : Règle de droit non écrite qui se forme spontanément et progressivement.

Principes généraux de droit : Ce sont ceux reconnus par les nations civilisées. Ils sont de deux sortes :

- Les principes communs aux ordres juridiques internationaux (cas du respect des droits de la défense, caractère obligatoire des engagements).

- Les principes généraux propres au droit international (respect de l’indépendance et de la souveraineté de l’Etat, bonne foi dans les relations internationales).

L’équité : permet à des Etats souverains de reconnaître au juge ou à l’arbitre un pouvoir exorbitant, celui de statuer selon l’équité.

Moyens auxiliaires de détermination des règles de droit :

Jurisprudence : Il s’agit des solutions dégagées par les juridiction internationales avec leur tête les décisions de la cour international de justice dont les arrêts bénéficient d’une grande autorité. Il s’agira aussi des décisions arbitrales et des jurisprudences nationales.

Doctrine : Les opinions doctrinales exercent une influence certaine sur la formation et l’évolution du droit des gens. Cette contribution se manifeste aussi bien au stade de la création des règles de droit qu’au niveau de leur interprétation et de leur mise en œuvre par les juridictions internationales.

Autres sources du droit international :

Normes impératives :

La convention de vienne définit la norme impérative (visent à protéger l’humanité contre des fléaux tels que traite des esclaves, génocide) comme « une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des Etats dans son ensemble, en tant que norme à laquelle aucune dérogation n’est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère ».

Ce texte sanctionne par la nullité le traité conclu en violation d’une norme impérative du droit international général.

Actes unilatéraux des Etats et organisations internationales :

Il faut distinguer :

Les actes unilatéraux des Etat : un Etat peut prendre des engagements produisant effet dans le cadre du droit international. (Discours du ministre des affaires étrangères, conférence de presse d’un chef d’Etat).

Les actes unilatéraux des Etats et organisations internationales : Il n’existe pas de législateur international habilité à édicter des règles juridiques générales s’imposant aux Etats. Mais les recommandations, résolutions participent à la formation des règles de droit international.

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Sources du droit national :

Il s’agit d’examiner les rapports de la loi et du règlement sous l’empire des différentes constitutions marocaines (section I) avant d’aborder des questions plus générales et relatives à la force obligatoire de la loi (section II), au domaine d’application de la loi dans le temps (section III) et enfin aux méthodes d’interprétation de la loi (section IV).

I – La loi et le règlement

Le régime marocain est défini comme un régime de monarchie constitutionnelle, démocratique et sociale. La souveraineté appartient donc à la nation qui l’exerce directement par voie de referendum et indirectement par l’intermédiaire des institutions constitutionnelles. Cette dernière expression se réfère au parlement.

De même, est affirmé le principe de séparation des pouvoirs législatifs et exécutif. Le pouvoir législatif est attribué au parlement, le pouvoir réglementaire est dévolu au gouvernement. L’ensemble de ces principes ont étés formellement affirmée par les constitutions du 9 octobre 1992 et 7 octobre 1996.

A – Distinction de la loi et règlement en période normale

1 – Les organes compétents :

De qui émane la loi ?

La loi est l’œuvre du pouvoir législatif : la loi est votée par le parlement (art 45 de la constitution de 1996). Ce principe n’est pas absolu, car il subit un certain nombre d’exceptions. En effet dans deux cas, c’est le pouvoir législatif lui-même qui peut déléguer au pouvoir exécutif le droit de légiférer.

La première hypothèse, prévue par l’article 45, apparaît comme une délégation volontaire de pouvoir. En vertu de cette disposition, le parlement peut autoriser le gouvernement pendant un délai limité et en vue d’un objectif déterminé, à prendre par décret des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. Ces décrets entrent en vigueur dés leur publication mais ils restent soumis au contrôle du parlement qui sera nécessairement appelé à les ratifier à l’expiration du délai fixé par la loi d’habilitation (ex : loi autorisant le transfert d’entreprises publiques au privé : cette loi a habilité le gouvernement dans un délai de 6 mois à compter de sa publication au bulletin officiel, à prendre par décrets des mesures législatives telles que les modalités juridiques et financières des transferts et le régime fiscal qui leur est applicable).

La deuxième hypothèse où la loi émane d’un autre organe que le parlement résulte de l’article 55 de la constitution : c’est une délégation du droit de légiférer mais c’est une délégation qui joue de plein droit, de façon automatique. Ainsi dans l’intervalle des sessions, le gouvernement peut de lui-même et sans l’autorisation du parlement, prendre des décrets lois. Toutefois, ici aussi les décrets lois ne peuvent être pris qu’avec l’accord des commissions parlementaires intéressées et doivent être soumis à la ratification du parlement au cours de la session ordinaire qui suit.

Il existe un troisième cas où la loi peut être adoptée par un autre organe que le parlement. C’est le cas où la loi émane directement du peuple à la suite du référendum. En effet si le monarque peut toujours soumettre au referendum tout projet ou proposition de loi, il perd cette faculté lorsque le texte aurait été adopté ou rejeté à la majorité des deux tiers des membres composant la chambre des représentants.

Quatrième hypothèse : l’article 27 de la constitution de 96 prévoit que « le roi peut dissoudre les deux chambres du parlement ou l’une d’elle seulement ». Après cette dissolution, l’élection du nouveau parlement ou de la nouvelle chambre doit intervenir au plus tard dans les 3 mois qui suivent. Durant cette période, l’article 72 alinéa 2 permet au roi d’exercer

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pour pallier le vide « outre les pouvoirs qui lui sont reconnus par la présente constitution, ceux dévolus au parlement en matière législative ».

La constitution de 1996 au terme de l’article 107 a prévue que « jusqu’à l’élection des chambres du parlement prévues par la présente constitution, la chambre des représentants actuellement en fonction, continuera d’exercer ses attributions notamment pour voter les lois nécessaires à la mise en place des nouvelles chambres du parlement sans préjudice de l’article 27 ». C’est ce qui s’est d’ailleurs produit durant le mois d’octobre 1997 : maintien du parlement bien que l’élection de la future chambre représentants ait été annoncée pour le 14 novembre qui suit.

De même le roi peut être conduit à prendre en main l’exercice du pouvoir législatif lorsque le mandat du parlement arrive normalement à expiration. Si les circonstances politiques ne permettent pas de procéder à temps à l’élection des deux nouvelles chambres, l’article 19 de la constitution permet au roi en tant que représentant suprême de la nation et garant de la pérennité et de la continuité de l’Etat, de prendre les textes législatifs nécessaires, au moins les mesures qui ne présentent pas un caractère fondamental.

De qui émane les règlements ?

Ils émanent exclusivement du pouvoir exécutif, des autorités administratives. Il s’agit de dispositions variées et d’importance inégale :

- Au premier rang : le dahir de souverain

- A un échelon intermédiaire : les décrets du premier ministre. Ces actes sont parfois qualifiés de décrets gouvernementaux.

- A un échelon inférieur, on rencontre les arrêtés ministériel ; il s’agit de textes réglementaires pris par les membres du gouvernement.

Les dahirs :

Au terme de l’article 29 de la constitution de 96, le roi exerce par dahir les pouvoirs qui lui sont expressément réservés par la constitution. Par l’emploi du terme dahir, il s’agit de marquer la supériorité ou prééminence des décisions royales sur celles de la chambre des représentants, la supériorité du dahir sur la loi : il est le représentant suprême de ma nation ce qui signifie que les députés ne peuvent prétendre être les seuls représentants de la nation. L’institution monarchique est hiérarchiquement supérieur au parlement. Par conséquent les décisions royales (dahirs), ont juridiquement plus de valeur que les lois votées par le parlement.

Les décrets gouvernementaux et les arrêts ministériels :

Aujourd’hui le premier ministre exerce le pouvoir réglementaire sous forme de décrets qu’on appelle aussi décrets gouvernementaux.

Quand aux arrêtés, ils sont réservés aux décisions administratives prises par les ministres et rarement par le premier ministre. En effet l’article 64 de la constitution de 1996 affirme expressément que le premier ministre peut déléguer certains de ses pouvoirs aux ministres. Les arrêtes se limitent souvent à assurer l’exécution des règles générales posées par le chef de l’Etat et le premier ministre. Ils ne constituent pas directement des sources de droit.

2 – Le domaine législatif et réglementaire :

Il s’agit de déterminer les matières qui sont de la compétence du pouvoir exécutif et celles qui relèvent de la compétence du pouvoir exécutif.

a – Le domaine de la loi :

Cette énumération fournie par l’article 46 et accessoirement par d’autres articles de l’actuelle constitution, se regroupe autour des axes suivants :

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Droits politiques, économiques et sociaux des citoyens

Il s’agit en premier lieu selon l’article 46 précité de tous les droits individuels ou collectifs énumérés au titre premier de la constitution. La constitution réserve à la compétence exclusive du parlement un certain nombre de droits et ce pour mettre les droits individuels et garanties accordées au citoyen pour l’exercice des libertés publiques à l’abri de l’arbitraire éventuel du pouvoir exécutif.

C’est le cas de tous les droits politiques du citoyen (liberté d’expression, de circuler, liberté d’association, de réunion).

C’est le cas aussi de tous les droits économiques et sociaux du citoyen (droit à l’éducation, au travail, à la grève, et droit de propriété).

En deuxième lieu, c’est la loi qui régit la situation du citoyen ayant la qualité de fonctionnaire (statut général de la fonction publique et statut des magistrats). La loi détermine aussi les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires.

En troisième lieu, le domaine législatif englobe des questions qui présentent un grand intérêt pour les citoyens au niveau des entités territoriales décentralisées (régime électoral des assemblées et conseils des collectivités locales ainsi que la création de collectivités locales nouvelles).

Matières pénales, civiles et commerciales

Les articles 45 et 46 de l’actuelle constitution fixent comme suit la compétence législative :

- Détermination des infractions et peines qui leur sont applicables. - La procédure pénale. - Procédure civile. - Le régime des obligations civiles et commerciales.

Cette liste réalise un élargissement appréciable des attributions du parlement et cette orientation se justifie par l’importance des matières de droit pénal et de procédure pénales vis-à-vis des intérêts de la personne poursuivie, de sa liberté, de son honneur ou même de sa vie.

C’est pourquoi la constitution marocaine réserve au parlement la détermination de toutes les infractions. Elle a aussi rangé parmi les matières législatives, la procédure civile car il s’agit de protéger les droits et biens de l’individu dans le cadre du procès civil.

Matières d’ordre économique, financier ou social :

Ce troisième groupe de matières législatives comprend :

- La création d’établissements publics (art 46). - Nationalisation d’entreprises et transferts d’entreprises du secteur public au privé (art

46). - Les lois cadres (art 46). - Lois de finances (art 50). - L’approbation du projet de plan (art 50). - Le vote de la loi de finance qui est l’une des principales attributions du parlement.

La présentation de la loi de finance est l’occasion d’un large débat sur la politique poursuivie par le gouvernement dans les secteurs de la vie économique. Ainsi conformément à l’article 51 de la constitution, les propositions et amendements des députés ne doivent pas conduire à une diminution des recettes ou à une aggravation des charges publiques.

Les traités :

L’article 31 après avoir posé le principe général que c’est le souverain qui signe et ratifie les traités, précise que les traités engageant les finances de l’Etat ne peuvent être ratifiés sans avoir été préalablement approuvés par la loi. Le parlement ayant la maîtrise des matières

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budgétaires et financières, il est naturel qu’il exerce un contrôle sur les traités et les conventions internationales qui peuvent avoir des incidences financières : obligations qui entraînent une charge effective ou une charge future ou bien réduction des ressources de l’Etat.

Lois organiques :

Soumises par l’article 58 à une procédure spécifique et surtout au contrôle obligatoire du conseil constitutionnel. L’intervention de ce dernier se justifie par le fait que c’est la constitution elle-même qui décide que certaines de ses dispositions seront précisées ou complétées par des lois organiques.

Révision de la constitution :

L’initiative de la révision appartient à la fois au roi, à la chambre des représentants et aussi depuis 1996 à la chambre des conseillers (art 103).

b – Le domaine du règlement :

Au terme de l’article 29 de la constitution de 1996, le roi exerce par dahir les pouvoirs qui lui sont expressément réservés par la constitution. La compétence royale présente donc un caractère exceptionnel. A l’opposé, c’est le premier ministre qui exerce en vertu de l’article 63 le pouvoir réglementaire. Il a désormais une compétence de droit commun.

c – Sanctions du partage des compétences :

La distinction d’un domaine réservé au parlement et d’un domaine réservé au gouvernement risque d’entraîner des conflits entre les deux pouvoirs. Les membres de la chambre des représentants et de la chambre des conseillers peuvent déposer des propositions de loi ou des amendements qui empiètent sur le domaine réglementaire. De leur côté, les projets gouvernementaux sont susceptibles de porter atteinte au domaine législatif. Seulement les constitutions marocaines successives, n’ont envisagées que la première hypothèse en prévoyant une technique procédurale permettant de défendre le domaine réglementaire contre les empiétements du pouvoir législatif. L’article 53 permet au gouvernement d’opposer l’irrecevabilité à toute proposition ou amendement qui n’est pas du domaine de la loi. Une fois cette exception soulevée, la discussion du texte doit être normalement suspendue. Mais si la chambre des représentants ou des conseillers maintient sa position estimant que la matière est bien une matière législative, le différend est tranché par le conseil constitutionnel dans un délai de 8 jours à la demande du parlement ou du gouvernement. Cette procédure permet au gouvernement de contrecarrer tout débordement sur son domaine réglementaire.

3 – L’autorité de la loi et du règlement :

Il s’agit de savoir dans quelle mesure la loi et le règlement s’impose aux particuliers et aux tribunaux. Il faut à cet égard distinguer les deux catégories de texte :

- En ce qui concerne les lois, il s’agit de vérifier si elles sont conformes ou non à la constitution. C’est le problème du contrôle de constitutionnalité des lois.

- Pour ce qui est des règlements, il est nécessaire de vérifier s’ils sont ou non, conformes à la loi. C’est le problème du contrôle de la légalité des règlements.

a – Le contrôle de la constitutionnalité des lois :

Il faut vérifier si les lois sont conformes ou non à la constitution et quel est l’organisme habilité à effectuer ce contrôle.

Les tribunaux ordinaires ne sont pas habilités à se prononcer sur la constitutionnalité d’une loi ou d’un décret (article 25 alinéa 2 du code de procédure civile du 28 septembre 1974). En effet le rôle des tribunaux ordinaires se limite à interpréter la volonté du législateur et non vérifier si le parlement a ou non respecté la constitution. De plus compte tenu de ses

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incidences, le contrôle de la constitutionnalité des lois, ne peut être exercé que par une juridiction suprême ou cour constitutionnelle habilité à annuler la loi inconstitutionnelle. Au Maroc, ce contrôle de la constitutionnalité est conçu de façon très restrictive. C’est ce qui résulte de l’examen des dispositions du dahir du 9 mai 1977 portant loi organique relative à la chambre constitutionnelle de la cour suprême. Précisons que deux séries d’attribution, ne mettent pas en cause la constitutionnalité de la loi.

- C’est le cas du contentieux de l’élection des représentants de la nation : électeurs et candidats sont recevables à contester une élection.

- Le contrôle de la régularité des opérations du referendum.

b – Elargissement des attributions de la juridiction constitutionnelle dans le cadre des révisions constitutionnelles de 1992 à 1996 :

La juridiction constitutionnelle est l’instrument par lequel l’Etat de droit assure la conformité des lois, expression à la constitution. Le contrôle de la constitutionnalité des lois garanti le respect des principes, droits et libertés consacrés par la constitution, fondement du mandat donné par les citoyens à leurs représentants au parlement, en vue d’édicter des règles juridiques, pénales, civiles.

La révision constitutionnelle de 92 a donc triplement innové sur 3 points :

1er point : L’article 78 de l’actuelle constitution dispose qu’il est institué un conseil constitutionnel. L’article 79 précise que ce conseil comprends 6 membres désignés pour 9 ans et 6 membres désignés pour la même durée, moitié par le président de la chambre des représentants moitié par le président de la chambre des conseillers après consultation des groupes ; chaque catégorie de membres est renouvelable par tiers tous les 3 ans.

Le président du conseil constitutionnel est choisi par le roi parmi les membres qu’il nomme et son mandat ainsi que celui des membres du conseil constitutionnel n’est pas renouvelable.

2e point : Attributions du conseil constitutionnel : Exerce les attributions qui lui sont dévolues par la constitution ou par des dispositions de lois organiques. Statue sur la régulation de l’élection des membres des deux chambres constituant le parlement et sur la régularité des opérations du referendum. Approuve les lois organiques et règlements établis par les deux chambres. Les lois ordinaires sont soumis à son contrôle tant qu’elles n’ont pas étés promulguées par le roi car l’acte de promulgation purge les loi de tout vice et exclu tout contrôle constitutionnel.

La loi organique permet aux présidents des deux chambres et au premier ministre (acteur privilégié du processus législatif) le droit de présenter au conseil, des observations au sujet de la question dont est saisi le conseil. Le renvoi d’une loi au conseil constitutionnel a comme conséquence de suspendre immédiatement le délai de 30 jours imparti à l’opération de promulgation. Enfin les décisions du conseil sont définitives, inattaquables, et opposables aux pouvoirs publics.

3e point : Jurisprudence du conseil : A rendu pléthore de décisions relatives au contentieux électoral ou contrôle de lois organiques. Il en ressort un contrôle s’exerçant sur les textes législatifs au stade de leur élaboration.

c – Le contrôle de la légalité des règlements :

Les tribunaux peuvent ils vérifier la conformité d’un texte réglementaire à la loi ? Au Maroc, il existe pour ce faire, le recours pour excès de pouvoir (procédé direct de contrôle de la légalité : dans les deux mois qui suivent la publication d’un règlement, un particulier peut le soumettre à la juridiction administrative et demander son annulation pour illégalité : si le tribunal lui donne raison, le texte sera annulé).

Dans cette perspective, est il concevable de soumettre les dahirs (émanent du pouvoir réglementaire du roi) au contrôle juridictionnel ? Ou faut il exclure tout contrôle

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juridictionnel sur les décisions royales, le roi n’étant pas une simple autorité administrative ? La jurisprudence de la CS est constante : il n’existe aucune disposition constitutionnelle qualifiant le roi d’autorité administrative et par conséquent, comme il n’est pas une autorité administrative, ses décisions ne sauraient faire l’objet d’un contrôle juridictionnel. Cela se justifie par la notion traditionnelle d’autorité royale à la fois temporelle et spirituelle, incompatible avec celle d’autorité administrative pouvant agir arbitrairement. Toutefois il est possible d’adresser au roi un recours gracieux pour qu’il révise lui-même les dahirs.

B – La confusion de la loi et du règlement en période exceptionnelle :

1 – Motifs et effets de la proclamation de l’Etat d’exception :

Il s’agit d’un danger, d’un péril d’ordre intérieur (évènements graves pouvant remettre en cause le fonctionnement des institutions constitutionnelles) ou extérieur (intégrité territoriale nationale menacée). Au niveau des révisions constitutionnelles de 92 et 96, l’article 35 réaménagé dispose que « l’état d’exception n’entraîne plus dissolution de la chambre des représentants ».

2 – Les incidences des pouvoirs exceptionnels sur l’existence de la constitution :

La constitution subsiste malgré l’état d’exception et l’article 35 accorde au souverain une compétence générale à la fois limitée et indéterminée, ce qui lui permet de suspendre toute règle de droit, même constitutionnelle.

3 – L’état d’exception et la distinction de la loi et du règlement :

A la faveur des nouvelles dispositions constitutionnelles, la confusion de la loi et du règlement sera avec le maintien du parlement limitée et ponctuelle.

II – Force obligatoire de la loi

A – Entrée en vigueur de la loi :

Marquée par deux formalités :

Promulgation de la loi : Ne concerne que la constitution elle-même et les lois votées par le parlement. C’est l’une des attributions du chef de l’Etat qui promulgue la loi dans les 30 jours qui suivent la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée. Il s’agit de constater dans un délai de rigueur fixé à 30 jours que la loi a été régulièrement votée par le parlement et ordonner l’exécution de cette loi.

Publication : Concerne les lois et les règlements. La publication s’impose car il faut mettre les particuliers en mesure de connaître les textes législatifs et réglementaires. C’est la maxime « nul n’est censée ignorer la loi ».

Au Maroc il n’existe pas de texte réglementant la publication si ce n’est des dispositions légales et une jurisprudence bien établie.

1 – Publication des textes est-elle obligatoire ?

Bien qu’existe le bulletin officiel du royaume du Maroc, aucune disposition générale, légale ou réglementaire n’a imposé la publication au BO des textes marocains. La jurisprudence de la cour suprême décide que la publication est une condition nécessaire pour qu’une loi ou règlement devienne obligatoire et soit opposable aux particuliers. C’est pourquoi la cour suprême estime que le bulletin officiel du gouvernement constitue la seule garantie pour porter à la connaissance de tous, les textes législatifs. Il est de plus impossible pour les tribunaux d’appliquer les textes dont ils n’ont pas pris connaissance au préalable à travers la publication au BO.

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2 – Modalités de la publication :

a – Procédé normal de publication :

L’insertion des textes au bulletin peut soulever 3 séries de difficultés :

Problème de délais : Les textes publiés entrent en vigueur le même jour dans l’ensemble du royaume. En principe, une loi ou un règlement est exécutoire dés sa publication au bulletin officiel.

Problème des erreurs commises au BO : C’est le problème de savoir s’il faut donner la préférence au texte originairement publiée ou bien à celui qui à été rectifié ?

Les rectificatifs sont dangereux car ils ont un effet rétroactif : la rectification s’impose aux particuliers et tribunaux, le jour où le texte originaire a été publié.

Publication des textes en plusieurs langues : Le bulletin officiel comprend trois éditions en langue arabe et une édition de traduction officielle ce qui peut entraîner des divergences entre les deux catégories de texte. Seul le texte arabe prévaudra et s’imposera aux tribunaux (la langue officielle étant l’arabe : préambule de la constitution).

Par contre si la loi ou règlement est publié d’abord en français et que le texte arabe ne voit le jour qu’au bout d’un certain temps, il faut déterminer la date d’entrée en vigueur de la loi. C’est le premier texte publié qui détermine la date d’entrée en vigueur de la loi ou du règlement conformément au principe selon lequel les lois ont un effet immédiat.

b – Procédé exceptionnel de publication :

- Depuis longtemps les tribunaux marocains ont décidé qu’une loi ou règlement peut être exécutoire dans l’ensemble du royaume sans avoir fait l’objet d’une publication au bulletin officiel. Il suffit que le texte ait été porté à la connaissance du public par un procédé quelconque : insertion dans la presse, annonce par radiodiffusion, déclaration ou ordre du roi qui a valeur et force de loi. Toutefois, pour avoir force contraignante, il est préférable que ces principes soient énoncés par un texte ou réglementaire.

- La mise en vigueur d’une loi peut être retardée jusqu’à une certaine date.

B – Abrogation de la loi :

Article 474 du DOC « les lois ne sont abrogées que par des lois postérieures lorsque celles-ci l’expriment formellement ou quand la nouvelle loi est incompatible avec la loi antérieure ».

1 – Abrogation expresse :

Suppose que le texte nouveau en des termes formels, décide que telles dispositions antérieures sont abrogées. L’abrogation peut être globale ou partielle.

- L’abrogation partielle qui est la plus fréquente, laisse subsister une partie de la législation antérieure (cas de la loi du 25 décembre 1980 qui a reformé en partie la législation sur les loyers).

- L’abrogation globale présente un caractère exceptionnel et intervient à l’occasion de grandes reformes ou à la suite d’un grand mouvement de codification (dahir du 26 novembre 1962 qui a institué le code pénal qui nous régit actuellement).

2 – Abrogation tacite :

C’est l’hypothèse ou une loi nouvelle prévoit des règles incompatibles avec celles qui figuraient dans un texte antérieur. Il est donc pas possible d’appliquer au même moment deux textes contradictoires. On en déduit que la loi récente a implicitement abrogé la loi ancienne.

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3 – Abrogation par désuétude :

Une loi qui a cessé de s’appliquer ou qui n’est plus respectée par les particuliers est-elle pour autant abrogée ? Cela revient à se demander si une loi peut être mise en échec par une coutume ou un usage contraire ? Le droit marocain interdit le recours à ce procédé car la loi prime sur la coutume et celle-ci ne peut constituer une base solide pour assurer la sécurité des transactions. L’article 475 est clair « la coutume et l’usage ne sauraient prévaloir contre la loi lorsqu’elle est formelle.» Ce qui veut dire que les lois impératives restent en vigueur même si elles ont cessé de s’appliquer depuis un certain temps.

III – Application de la loi dans le temps :

A – Principe de la rétroactivité des lois nouvelles :

Le principe de non rétroactivité se justifie par des considérations de sécurité et de justice. Quand deux personnes, décident d’établir une convention, elles tiennent compte de la loi en vigueur en ce moment précis. Si par suite intervient une reforme législative qui s’applique à cette transaction, cela reviendrait à bouleverser les prévisions de la règle de droit : assurer et stabilité et sécurité des rapports sociaux. Ce principe de non rétroactivité des lois est un principe constitutionnel qui sauf dans de rares hypothèses semble s’imposer de façon absolue.

1 – La non rétroactivité conçue comme règle relative :

- Caractères du principe de la non rétroactivité : Jusqu’à l’entrée en vigueur de la constitution de 1962, de nombreux dahirs ont produits des effets dans le passé (dahir du 29 octobre 1959 relatif à l’affaire des huiles nocives).

- Exceptions au principe : Après l’avènement de la première constitution, le droit marocain écartait le principe de non rétroactivité. Ces exceptions étaient fréquentes surtout en matière pénale. Par exemple, la règle de la rétroactivité de la loi pénale la plus douce, est formulée par l’article 6 du code pénal : « lorsque plusieurs lois ont été en vigueur entre le moment où l’infraction a été commise et le jugement définitif, la loi dont les dispositions sont les moins rigoureuses, doit recevoir application ».

De même il en va dans l’hypothèse inverse, celle où une loi pénale plus rigoureuse est déclarée d’application rétroactive : c’est ce qui a été décidé à l’occasion du procès des huiles nocives. C’est pourquoi le roi Mohamed V a édicté un dahir rétroactif érigeant les falsifications de denrées alimentaires en crime contre la santé de la nation, crime passible de la peine de mort. Ce dahir a été déclaré applicable même aux infractions commises avant son entrée en vigueur.

2 – La non rétroactivité conçue comme une règle absolue :

L’article 4 de l’actuelle constitution prévoit expressément que la loi ne peut avoir d’effet rétroactif. Ce principe s’impose à tous les organes de l’Etat. Il a donc un caractère absolu, en sens qu’il doit être respecté par les 3 organes de l’Etat. Toutefois, il semble permis d’écarter ce principe chaque fois que des considérations de justice, de sécurité ou d’ordre social ne sont pas susceptibles d’être compromises (c’est le cas des lois qui abrogent rétroactivement ou qui annulent les textes antérieurs pris par une autorité illégitime).

B – Le principe de l’effet immédiat des lois nouvelles :

Il s’agit d’envisager les situations en cous de constitution ou d’exécution. C’est le cas d’une vente à tempérament. Si la loi régissant les paiements échelonnés dans le temps vient à changer, faut il maintenir la loi ancienne ou appliquer immédiatement la loi nouvelle ? Au Maroc comme en France, il n’existe aucun texte d’ensemble donnant une réponse à ce problème.

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1 – Signification du principe :

La loi nouvelle est destinée à s’appliquer immédiatement en se substituant à la loi ancienne qui n’a plus de raison d’être. La loi nouvelle s’applique aux situations qui se créent après son entrée en vigueur et elle s’applique aussi aux effets futurs des situations anciennes. De façon générale, deux argument justifient ce principe :

- La loi nouvelle est présumée meilleure que la loi ancienne.

- Il faut assurer l’unité de la législation en évitant de faire coexister deux lois (nouvelle et ancienne).

2 – Dérogations au principe de l’effet immédiat de la loi nouvelle :

L’effet immédiat de la loi nouvelle peut être écarté par une disposition formelle, le législateur estimant souhaitable de retarder l’application du nouveau texte. Une autre exception concerne la matière des contrats. Une loi nouvelle ne doit pas produire effet à l’égard des contrats en cours et bouleverser les prévisions légitimes des parties.

IV – L’interprétation de la loi

La loi est rédigée en termes généraux mais doit être appliquée à des cas particuliers : pour savoir si telle situation entre dans les prévisions de la loi, il faut l’interpréter.

A – Protagonistes de l’interprétation :

Cette tache est dévolue aux tribunaux car les solutions jurisprudentielles et les options doctrinales, jouent en la matière un rôle essentiel.

1 – La jurisprudence :

Les juridictions du royaume ont pour mission d’appliquer la loi dans les affaires qui leur sont soumises. Pour cela, elles se livrent à un travail d’analyse et d’interprétation des dispositions légales et réglementaires. Cette interprétation jurisprudentielle ne produit effet que dans le cadre d’une instance donnée et pour résoudre un litige spécifique. Ce qui signifie que le même tribunal ou les autres juridictions, dans des procès ultérieurs peuvent donner une interprétation différente. Il reste que l’interprétation dégagée par les magistrats peut finir par avoir une portée générale et c’est le cas quand les solutions jurisprudentielles se répètent constamment. Enfin, reste à préciser que la cour suprême qui se trouve au sommet de la hiérarchie judiciaire, est chargée d’assurer l’unité d’interprétation de la règle de droit.

2 – Doctrine :

Est constituée par les travaux d’ensemble des juristes qui participent à la formation, interprétation et évolution du système juridique. Le débat entre les auteurs ayant des points de vue divergents sur un même point de droit, peut orienter le législateur au stade de l’élaboration des textes et les tribunaux au niveau de l’interprétation des règles de droit. Les opinions défendues peuvent avoir une grande autorité et donc influencer l’évolution de la jurisprudence.

B – Méthodes d’interprétation de la loi :

1 – Méthode exégétique :

Les juristes du 19e siècle ont adoptés cette méthode (interprétation attachée aux textes) qui s’efforce de dégager la volonté du législateur. Ainsi s’il s’agit de l’interprétation d’un texte obscur, la recherche du texte s’opère en utilisant les travaux préparatoires (étude des discussions qui ont précédé la vote de la loi), les précédents historiques (référence utile quand le législateur s’est inspiré de la tradition) et l’analyse grammaticale et logique pour préciser le sens et portée de la loi.

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2 – Méthodes modernes d’interprétation de la loi :

- L’école de la libre recherche scientifique : il faut appliquer la loi quand elle a prévu le cas considéré car la volonté du législateur doit être respecté. Mais quand il n y a plus de loi, l’interprète (le juge) devient créateur de la règle de droit en s’inspirant des données historiques, sociales, idéales : il élabore la loi par une libre recherche (parce que fondée sur les textes) scientifique (parce que fondée sur des données objectives).

- L’interprétation historique ou évolutive :

- Quand la loi est ancienne, il faut interpréter le texte de la loi en fonction des besoins de la société au moment de cette interprétation.

- Donc un même texte va acquérir un sens nouveau pour répondre aux nécessitées actuelles et à l’évolution subie par la société.

Au Maroc, les tribunaux marocains s’efforcent de fonder la solution d’un litige sur un texte quitte à l’interpréter d’une façon très extensive, pour l’adapter au contexte social du moment. Enfin les juges marocains, s’il n’existe aucune disposition légale ou réglementaire, font volontiers appel aux principes généraux de droit.

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LE SYSTEME JUDICIAIRE MAROCAIN

L’EVOLUTION DU DROIT PRIVE MAROCAIN

es textes les plus importants qui ont vu le jours concernent l’organisation judiciaire (dahir du 15 juillet 1974 qui fixe l’organisation judiciaire du royaume et dahir du 28 septembre 1994 qui approuvant le code de procédure civile) et visent à améliorer le

fonctionnement de la justice et à simplifier la procédure. En plus de ces reformes, bien d’autres de portée limitée ont été adoptées (code de statut personnel 1993, code pénal 1982 et 1994). En effet depuis 1993, un certains nombre de reformes sont intervenues :

- Reforme du droit judiciaire :

Généralisation de la collégialité au niveau des tribunaux de première instance qui siégent avec 3 magistrats. C’est une collégialité rationalisée car la loi distingue les affaires mineures de celles complexes : les premières sont confiées à un juge unique (affaires des mineurs, demandes qui tendent à déclarer judiciairement une naissance ou un décès, enquête suivie en matière d’accidents de travail et de maladies professionnelles).

Le dahir du 10 septembre 1993 a modifié et complété les dispositions du code de procédure civile : les tribunaux peuvent être divisés en section, selon la nature du litige (civile, pénale, sociale, immobilière et de statut personnel) et chaque section peut instruire et juger toute affaire soumise au tribunal. De plus cette loi de 1993 a introduit des innovations qui tendent à renforcer les garanties judiciaires et à améliorer le fonctionnement du service judiciaire. (Procédure écrite devant les TPI est la règle).

- Reforme du droit des affaires :

L’environnement du droit est traversé par des mutations profondes sur le plan économique, politique et culturel. Le législateur marocain s’est donc engagé dans la voie de réformes globales et on peut citer pléthore de lois et de codes : dahir du 25 décembre 1992 relative aux obligations comptables des commerçants, dahir du 1 août 1996 formant code de commerce, refonte du droit des sociétés (loi 17-95 relative aux sociétés anonymes). On peut citer aussi loi relative à la propriété industrielle (dahir du 15 février 2000), loi sur la bourse des valeurs, loi relative au micro crédit.

I - L’organisation judiciaire

Ce terme désigne l’ensemble des tribunaux et cours du royaume. Le terme tribunal est réservé à des juridictions inférieures telles que le tribunal de première instance (TPI).

Par contre le terme cour s’applique aux juridictions supérieures telles la cour d’appel (CA) et cour suprême (CS).

Un certain nombre de personne interviennent dans le fonctionnement de ces juridictions : avocats, magistrats, greffiers, experts, adouls ; ce personnel fait partie de ce que l’on appelle le corps judiciaire.

A – Les juridictions :

Au termes de l’article 1 du dahir du 15 juillet 1974 tel qu’il a été modifié et complété par la loi du 10 septembre 1993, l’organisation judiciaire comprend les juridictions suivantes :

1 – Juridictions de droit commun :

L’une des innovations introduites par les textes de 1974 réside dans la généralisation au niveau du premier degré de juridiction, du système du juge unique. En effet depuis la réforme de 1993, seules les juridictions communales et d’arrondissement et exceptionnellement les TPI, sont des juridictions à juge unique. En revanche les autres juridictions de droit comme (CA et CS) obéissent à la technique de la collégialité (concours de plusieurs juges).

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a – Juridictions à juge unique :

JJuurriiddiiccttiioonnss ccoommmmuunnaalleess eett dd’’aarrrroonnddiisssseemmeenntt ((JJCCAA)) Dotés d’attributions qualitativement limitées mais qui couvrent des affaires pénales et civiles relativement étendues. L’organisation de ces juridictions est composé d’un juge unique, assisté d’un greffier ou d’un secrétaire. La compétence de ces juridictions se réduit aux affaires mineures en matière civile (actions mobilières et personnelles dont la valeur n’excède pas 1000 DH) comme en matière pénale (infractions passibles uniquement d’une peine d’amande). Les jugements rendus par les JCA ne sont susceptibles d’aucune voies de recours ordinaire ou extraordinaire.

LLeess ttrriibbuunnaauuxx ddee 11èèrree iinnssttaannccee ssiiééggeeaanntt àà jjuuggee uunniiqquuee :: Siégent exceptionnellement à juge unique pour connaître d’un certain type de demandes (affaires des mineurs, demandes tendant à déclarer judiciairement une naissance ou un décès, procédures de conciliation en matière d’accident de travail et maladies professionnelles).

b – Juridictions collégiales :

TTrriibbuunnaauuxx ddee 11èèrree iinnssttaannccee :: Siégeant en formation collégiale qui peuvent connaître de toutes matières sauf quand la loi attribue formellement compétence à une autre juridiction. Le TPI a une compétence générale qui s’étend à toutes les affaires pénales, civiles, immobilières, sociales, statut personnel et successoral.

CCoouurr dd’’aappppeell :: En toute matière, l’audience est tenue et les arrêts rendus par trois magistrats. Sa compétence s’étend aussi bien aux appels des jugements des TPI que des appels des ordonnances. C’est un deuxième degré de juridiction, c'est-à-dire qu’elle examine une seconde fois les affaires déjà jugées en première instance.

La chambre criminelle de la cour suprême juge en premier et dernier ressort les infractions les plus graves : crimes.

CCoouurr ssuupprrêêmmee :: Se trouve au sommet de la hiérarchie ; La cour suprême comprend 6 chambres : civile, statut personnel et successoral, commerciale, administrative, sociale et pénale. Les audiences sont tenues et arrêts rendus par cinq magistrats et la présence du ministère public est obligatoire dans toutes les audiences. Les deux principales attributions de la CS :

- Recours en annulation pour excès de pouvoir formés contre les décisions de certaines autorités administratives.

- Pourvois en cassation formés contre les décisions rendues en dernier ressort par toutes les juridictions du royaume.

La CS contrôle la régularité de toutes les sentences rendues au Maroc, et son rôle se limite à l’examen des questions de droit : vérifier si les tribunaux et cours d’appel ont bien appliqué la règle de droit.

2 – Juridictions spécialisées :

Tribunaux administratifs : Sous contrôle de la CS, se caractérisent par le système de collégialité et par l’institution d’un ministère public réellement indépendant par rapport au pouvoir exécutif appelé le commissaire royal de la loi et du droit. A une compétence générale en matière administrative ou pour les litiges qui mettent en cause l’administration. (Contentieux électoral ou fiscal …)

Juridictions de commerce : Dahir du 12 février 1997 a prévu la création des tribunaux de commerce et des cours d’appel de commerce. Les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des actions relatives aux contrats commerciaux, aux effets de commerce,

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actions entre commerçants à l’occasion de leurs activités commerciales, différends entre associés d’une société commerciale et ceux relatifs à raison de fonds de commerce. La procédure est en la matière écrite et le tribunal ne saurait rendre sa décision sans avoir au préalable, rédigé intégralement le jugement qu’il va prononcer.

Quant aux cours d’appel de commerce, elles connaissent des appels interjetés contre les décisions rendues en premier ressort par les tribunaux de commerce.

Cour des comptes et cour régionales des comptes : Cour des comptes est une juridiction comptable supérieure régie par les articles 96 à 99 de la constitution actuelle et qui assure le contrôle de l’exécution des lois de finances et la régularité des opérations de recettes et de dépenses des organisations soumis à son contrôle en vertu de la loi et en apprécier la gestion. Quant aux cours régionales des comptes, elles assurent le contrôle des comptes et de la gestion des collectivités locales et de leurs groupements.

Juridictions d’exceptions :

- Haute cour de justice (article 88 à 92 de la constitution de 1996) : juge les membres du gouvernement qui ont commis des crimes et délits dans l’exercice de leurs fonctions.

- Tribunaux militaires : qui comprennent le tribunal militaire permanent des FAR (juge les infractions commises par les militaires et cadres de l’armée comme la désertion ou le vol, infraction contre la sûreté extérieure de l’Etat) et tribunaux militaires en temps de guerre.

B – Corps judiciaires :

1 – Les Magistrats :

Le dahir du 11 novembre 1974 prévoit que l’accès au corps de la magistrature se réalise par voie de concours. Après un stage de deux années, les attachés de justice qui ont subis avec succès l’examen de fin de stage peuvent être nommés par dahir sur proposition du conseil supérieur de la magistrature.

- Magistrat du siège : jugent et tranchent les procès qui leur sont soumis.

- Magistrat du ministère public : magistrats du parquet qui représentent le pouvoir exécutif.

2 – Les auxiliaires de la justice :

Les auxiliaires directs : ce sont les greffiers (s’occupent des audiences, des procédures commerciales, des faillites) et huissiers de justice (procèdent aux notifications nécessaires à l’instruction des procédures, dresser les actes requis pour l’exécution des ordonnances, jugements et arrêts, remettre les convocations en justice…)

Les auxiliaires indirects : avocats, oukils judiciaires (assistent et représentent comme les avocats les parties et rédigent tous les actes de la procédure : mais ils n’interviennent que dans les matières qui relèvent du chraa), défenseurs agrées, adouls (assurent le service de greffe et de notariat au regard des différents actes relatifs au statut personnel, familial et successoral et aux transactions sur les immeubles non immatriculés : reçoivent aussi des déclarations et témoignages).

II – La procédure proprement dite

A – Généralités sur la procédure

1 – La procédure civile :

Le procès au Maroc est dirigé par le juge lui-même : on parle de procédure civile de type inquisitoire. Depuis 1974 avec la généralisation du système du juge unique au niveau du premier degré de juridiction, son rôle est devenu prépondérant dans le cadre des juridictions

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populaires et des TPI. Devant cette juridiction, c’est le juge qui préside le déroulement de la procédure et mesures nécessaires en vue d’instruire l’affaire.

2 – La procédure pénale :

L’aspect inquisitoire se manifeste au niveau des poursuites (action exercée par le magistrat du ministre public), de l’enquête policière (investigations et enquêtes préliminaires sont conduites par les membres de la police judiciaire qui recherche les auteurs et constatent les infractions) et de l’instruction préparatoire (le juge d’instruction peut procéder à tous les actes d’information qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité).

Au cours de la dernière phase du procès qu’est le jugement, c’est le système accusatoire qui prévaut (le juge marocain interroge l’inculpé mais l’adversaire de la personne poursuivie ou ses avocats peuvent discuter tous les moyens de preuve.

B – Les principales voies de recours :

1 – L’opposition :

Voie de recours dirigée contre les jugements par défaut, c'est-à-dire contre les décisions rendues contre un plaideur qui n’a pas comparu et qui n’a pas été en mesure de présenter son point de vue. C’est une voie de rétraction car on demande au tribunal de revenir sur son propre jugement.

2 – L’appel :

Voie de réformation introduite devant une juridiction hiérarchiquement supérieure à celle qui a rendu le jugement attaqué. L’appel est de droit dans tous les cas qui ne sont pas formellement excepté par la loi (exceptions concernent les affaires de faible importance). Le délai d’appel est en règle général, fixé à 30 jours à compter de la notification du jugement, et 15 devant les tribunaux de commerce. L’appel produit un effet suspensif (le délai d’appel et l’appel interjeté dans le délai légal, sont suspensifs) et dévolutif (l’ensemble du dossier de l’affaire est soumis à la cour d’appel qui est appelée à l’apprécier dans tous ses aspects en reprenant l’examen des questions de droit et de fait).

3 – Pouvoir en cassation :

Concerne toutes les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions du royaume. Formé par les parties au procès et le délai pour saisir la cour suprême est de 30 jours à compter de la notification de la décision.

Les cas d’ouverture sont : violation de la loi interne (méconnaissance ou fausse interprétation de la loi) ; excès de pouvoirs, incompétence, violation d’une règle de procédure ayant causé préjudice à une partie, défaut de base légale ou de motifs (absence de motivation des décisions rendues). Enfin, les effets du pouvoir : il n’a pas d’effet suspensif (recours à la cour suprême ne fait pas obstacle à l’exécution de la décision attaquée), ni d’effet dévolutif (la cour rendra donc soit un arrêt de rejet du pouvoir ou de cassation).

C – Décisions de justice :

1 – Contenu des jugements et arrêts :

Les décisions de justice doivent être motivées : La première partie comprend l’exposé des motifs : motifs de droit (répondre aux questions de droit qui mettent en cause l’interprétation de la règle de droit) et de fait (relatifs aux contestations purement matérielles). La seconde partie comprend le dispositif, c'est-à-dire la solution donnée par le tribunal ou la cour au litige.

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2 – Effets des jugements et arrêts :

- FFoorrccee eexxééccuuttooiirree : Le plaideur qui a obtenu gain de cause peut faire appel au concours de la force publique pour faire exécuter la décision qui a été rendue. La copie du jugement ou de l’arrêt qu’on lui délivre doit reproduire la formule exécutoire.

- AAuuttoorriittéé ddee llaa cchhoossee jjuuggééee : Il est impossible de remettre en cause les points qui ont été tranchés par la juridiction ; ces solutions sont définitivement acquises et ne peuvent donner lieu à une nouvelle instance.

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LES DROITS SUBJECTIFS

es sources de ces droits peuvent être soit des actes juridiques ou des faits juridiques.

Les Actes juridiques :

C’est une manifestation de volonté destinée à produire des effets de droit. Il faut distinguer :

- LL’’aaccttee uunniillaattéérraall :: dont l’effet juridique résulte de la volonté d’une seule personne (ex : cas du testament par lequel une personne dispose pour la période qui suit son décès, d’une partie de ses biens).

- LL’’aaccttee bbiillaattéérraall : c’est le cas quand le résultat juridique poursuivi découle de deux ou plusieurs manifestations de volonté poursuivant le même but, dans le cadre des contrats et conventions (article 19 du DOC).

- Une autre distinction tient compte de la nature des prestations accomplies.

- AAcctteess àà ttiittrreess oonnéérreeuuxx : chaque partie retire un avantage de l’opération réalisée (contrat de location d’un local).

- AAcctteess àà ttiittrree ggrraattuuiitt : actes désintéressés qui se proposent de rendre service à autrui (donation).

Les Faits juridiques :

Evènements auxquels la règle de droit attache des conséquences juridiques (création, transmission ou extinction d’un droit subjectif) qui n’ont pas été spécialement recherchées.

Le fait juridique peut être un évènement purement matériel qui échappe à la volonté de l’homme (naissance, décès, ou inondations, tremblement de terre).

Le fait juridique peut être marqué par une certaine volonté qui provoque des effets de droits mais il reste que ces effets n’ont pas été spécialement recherchés (la victime d’un dommage acquiert droit à réparation du dommage).

CCHHAAPPIITTRREE II :: LLEESS SSUUJJEETTSS DDEESS DDRROOIITTSS SSUUBBJJEECCTTIIFFSS

I – Personnes physiques

A – Notion de personnalité

L’une des principales acquisitions en matière de consolidation des droits de l’homme a consisté à reconnaître la personnalité juridique.

1 – Commencement de la personnalité juridique :

Se manifeste dés la naissance et le législateur fait remonter le point de départ de la personnalité juridique à la conception, mais à la condition que l’enfant né soit né vivant. De plus la détermination de la personnalité juridique et de sa portée doit tenir compte de la distinction capacité d’exercice (aptitude d’un individu à exercer soi même les droits dont il est titulaire), de jouissance (certaines personnes comme le dément ou le mineur ne peuvent pas exercer elles même les droits dont elles ont la jouissance et c’est pourquoi le législateur les soumet à un système de représentation appelée tutelle).

2 – Fin de la personnalité juridique :

C’est le décès qui marque la fin de la personnalité juridique. Il marque l’ouverture et la liquidation de la succession du défunt. Si l’individu est réellement mort, les membres de sa famille sont fondés à concourir à la succession. En cas de doute, les intérêts de l’absent exigent que la liquidation de la succession soit retardée au maximum.

L

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B – Le nom :

Le système du nom de famille ou du nom patronymique est réglementé par l’article 6 du dahir du 08 mars 1950 portant extension du régime de l’Etat civile instituée par le dahir du 04 septembre 1915 « le nom choisi ne doit pas être un sobriquet, un nom ridicule, ou pouvant porter atteinte à la morale ou l’ordre public, un nom étranger ou ne présentant pas un caractère traditionnelle marocain ».

C – Le domicile :

C’est le rattachement de toute personne à un lieu déterminé. L’article 519 du code de procédure civile du 28 septembre 1974 a défini le domicile comme « le lieu où toute personne physique a son habitation habituelle et le centre de ses affaires et de ses intérêts ».

D – L’état civil :

Le dahir du 08 mars 1950 a mis les marocains dans l’obligation de s’inscrire à l’état civile, puis le décret du 04 décembre 1963 leur a imposé d’y enregistrer obligatoirement les naissances et décès à venir.

II – LES PERSONNES MORALES

Ce sont les différents groupements (sociétés, associations et syndicats) qui ont vocation à bénéficier de la personnalité juridique. La personne morale est dotée d’un patrimoine qui lui est propre et qui se distingue du patrimoine qui appartient à chacun de ses membres. Le groupement se détermine par un nom (raison sociale), un domicile (siège social), et même sa nationalité.

A – Groupements de biens

1 – Fondations religieuses :

C’est le système du habous ou wakf qui est l’acte juridique par lequel une personne en vue d’être agréable à dieu, se dépouille d’un ou plusieurs de ses biens, généralement des immeubles et le mer hors du commerce en les affectant à une œuvre, à un but pieux, charitable ou social, soit en une manière absolue exclusive de toute restriction (habous public), soit en réservant la jouissance de ses biens à une ou plusieurs personnes déterminées (habous de famille).

2 – Fondations laïques :

Bien ou masse de biens dotée de la personnalité morale en raison de son affectation à but désintéressé : création d’un hôpital. Par exemple les prix Nobel apparaît comme une fondation laïque.

B – Groupement de personne

1 – Personnes morales de droit privé :

Il s’agit des sociétés, associations et syndicats : les sociétés ont un but lucratif, c'est-à-dire se proposent de réaliser des bénéfices. Les associations ont un but désintéressé, et au niveau des syndicats, le but recherché est à la fois professionnel et désintéressé. Au Maroc, la personnalité morale a été rapidement reconnue à la société que l’article 982 du DOC, définit comme le contrat pour lequel deux ou plusieurs personnes mettent en commun leurs biens ou leur travail ou les deux à la fois, en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter. Il s’agit des sociétés commerciales qui pour réaliser des opérations commerciales prennent la forme de société de capitaux (SA) ou de société de personne dont les membres assument une responsabilité personnelle (SNC). La personnalité morale profite moyennant quelques formalités aux associations régies par dahir du 15 novembre 1958 qui est l’accord visant à réaliser un but autre que le partage des bénéfices entre ses membres.

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2 – Personnes morales de droit public :

Ce sont les collectivités publiques avec à leur tête l’Etat qui apparaît comme une personne morale, un sujet de droit au niveau interne et international.

CCHHAAPPIITTRREE IIII :: OOBBJJEETT DDEESS DDRROOIITTSS SSUUBBJJEECCTTIIFFSS

I – CLASSIFICATION DES DROITS

A – Droits patrimoniaux et extra patrimoniaux

1 – Droits patrimoniaux

Ce sont les droits qui ont une valeur pécuniaire, qui peuvent être évalués en argent : c’est le cas du droit de propriété. Ces droits sont dans « le commerce juridique » et peuvent faire l’objet de toutes sortes de transactions : vente, saisie, emprunt.

2 – Droit extra patrimoniaux

Ne sont pas évaluables en argent : il s’agit des droits politiques du citoyen et de ses droits familiaux (obligation alimentaire) ; on peut citer aussi le droit à l’honneur. La caractéristique de ces droits est qu’ils ne peuvent être cédés ni échangés ni saisis par les créanciers.

B – Droits réels et personnels :

1 – Les droits réels :

C’est le droit qui porte sur une chose et qui confère à son titulaire un certain nombre de prérogatives. C’est un droit absolu, opposable à tous sous condition de l’accomplissement de formalités de publicité et de ce droit absolu deux conséquences :

- Il dispose du droit de suite : le titulaire du droit réel (hypothèque, gage…) peut revendiquer le bien entre les mains de quiconque même si la chose a été volée ou cédée à une autre personne

- Droit de préférence : la personne qui peut se prévaloir d’un droit réel (hypothèque) est préférée à celles qui invoquent de simples droits personnels et que l’on appelle créanciers chirographaires. Le créancier hypothécaire est payé sur le produit de la vente de l’immeuble par préférence au créancier ordinaire.

a – Droits réels principaux :

Consacrés par l’article 8 du dahir du 2 juin 1915 fixant la législation applicable aux immeuble immatriculés. Il s’agit :

DDuu ddrrooiitt ddee pprroopprriiééttéé : assure à son titulaire, une maîtrise totale de la chose.

DDrrooiitt ddee ll’’uussuuffrruuiitt (droit réel temporaire qui confère à l’usufruitier le droit de se servir de la chose et le droit d’en jouir sa vie durant, le nu propriétaire conservant du droit de disposer de la chose, en particulier l’aliéner.

DDrrooiitt dd’’uussaaggee (celui qui a l’usage des fruits d’un fonds ne peut prétendre qu’aux fruits qui correspondent à ses propres besoins et à ceux de sa famille) et d’habitation :

- LL’’eemmpphhyyttééoossee : bail de longue durée portant sur un immeuble et conférant au preneur un droit réel susceptible d’hypothèque. Consenti pour une durée de plus de 18 ans et de 99 au maximum.

- DDrrooiitt ddee ssuuppeerrffiicciiee : c’est le fait de posséder des bâtiments, des ouvrages ou plantations sur un fonds appartenant à autrui.

- DDrrooiitt ddee sseerrvviittuuddee : droit réel perpétuel établi sur un immeuble (fonds servant) pour l’usage et l’utilité d’un autre immeuble appelé le fonds dominant. Exemple servitude de passage (le propriétaire dont les fonds sont enclavés (dominant) peut réclamer un

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passage sur les fonds de son voisin (fonds servant) pour y accéder, à charge de lui verser une indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner.

b – Droits réels accessoires :

Destiné à garantir l’exécution des obligations : ce sont les sûretés réelles :

- HHyyppootthhèèqquuee : Droit réel immobilier sur les immeubles affectés à l’acquittement d’une obligation. Elle est de sa nature indivisible et subsiste en entier sur les immeubles affectées, sur chaque portion de ces immeubles : elle les suit dans quelques mains qu’ils passent (art 157 dahir de 1915).

- GGaaggee : permet de garantir une créance par la remise d’un projet mobilier au créancier gagiste ou au tiers. Le créancier peut retenir la chose engagée jusqu’à parfait acquittement de la dette et la vendre si l’obligation n’est pas acquittée, et d’être payé sur le prix, en cas de vente, par préférence à tout autre créancier.

2 – Droits personnels :

Appelés droit de créance, il lie deux personnes en permettant à l’une d’exiger de l’autre une prestation : par exemple le remboursement d’un prêt. Dans certains cas, l’exécution de l’obligation peut consister en une simple abstention. Ces droits personnels sont en nombre illimités et en la matière, le principe de la liberté contractuelle autorise les particuliers à établir entre eux les rapports les plus diversifiés.

Reste une 3e catégorie de droits : droits intellectuels qui est le droit qu’a une personne d’être la seule à titre profit d’une chose immatérielle : il s’agit d’une activité professionnelle (des œuvres littéraires et artistiques, des brevets d’invention, exploitation d’une marque). Ces droits ne portent pas sur des objets matériels comme c’est le cas en matière de droit réel ; ils sont opposables à tous.

II – DISTINCTION DES DIENS CORPORELS ET INCORPERELS

A – Biens corporels

Il s’agit de tous les biens matériels. Ils ont une existence réelle : un immeuble ou un objet matériel quelconque.

B – Biens incorporels

Ce sont des biens qui n’ont pas d’existence réelle mais qui ont une grande importance en raison de leur valeur économique. C’est le cas de la propriété littéraire et artistique (droit d’exploitation exclusive de l’œuvre) et du fonds de commerce où c’est le droit à la clientèle qui est l’élément essentiel de ce fonds et qui est un bien incorporel ou immatériel.

III – CLASSIFICATION DES CHOSES

A – Choses consomptibles et non consomptibles

- LLeess cchhoosseess ccoonnssoommppttiibblleess : sont celles qui se consomment ou se détruisent par le premier usage (denrées à la consommation ou l’argent s’il ne fait l’objet d’un placement)

- LLeess cchhoosseess nnoonn ccoonnssoommppttiibblleess : ce sont les biens durables qui peuvent faire l’objet d’usage répétés : propriété immobilière, voiture

Ainsi si un prêt porte sur des choses consomptibles, le prêteur n’est pas admis à exiger qu’on lui rende le même objet : il s’agit d’un prêt à consommation.

Par contre si le prêt porte sur une chose non consomptible, le prêteur reste propriétaire et l’emprunteur doit lui rendre la même chose : c’est le prêt à usage ou commodat.

B – Choses fongibles et non fongibles

Les choses fongibles ou choses de genre : ce sont les choses interchangeables (céréales).

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Les choses non fongibles sont des corps certains, des objets individualisés (maison déterminée).

Au niveau du régime d’exécution des obligations, celui-ci diffère selon que l’on se trouve en présence de choses fongibles ou de choses certaines. Au regard des premières, le débiteur ne doit que la même quantité, qualité et espèces portées dans l’obligation quelle que soit l’augmentation ou diminution de la valeur. Au regard des corps certains, le débiteur est libéré par la remise de la chose en l’état où elle se trouve lors du contrat.

IV – DISTINCTION DES MEUBLES ET IMMEUBLES

LLeess iimmmmeeuubblleess ::

Trois catégories d’immeubles : par nature, par destination et par l’objet auquel ils s’appliquent.

- Les immeubles par nature comprennent les fonds de terre (le sol, sous sol) et les constructions adhérant au sol (ascenseurs, canalisations, bâtiments, pont)

- Les immeubles par destination : choses mobilières fictivement considérées comme des immeubles en raison du lien qui les unit à un immeuble par nature dont ils constituent l’accessoire : par exemple un tracteur ou de l’outillage industriel.

- Les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent : ce sont les droits réels immobiliers (servitudes ou hypothèques) et les actions immobilières (actions qui tendent à revendiquer un immeuble).

LLeess mmeeuubblleess ::

Objets que l’on peut déplacer : meubles par nature (meubles corporels tels livres, machines et incorporels tels titres au porteur), par anticipation (choses qui sont des immeubles au moment ou elles sont considérées mais qui sont qualifiées meubles parce qu’elles vont le devenir après leur séparation du sol tels arbres vendus pour être abattues).

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