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INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE COLLÈGE DE CANDOLLE 3 E ANNÉE (4) ROSENBERG CH. 1 : LÀ OÙ NOUS EMPORTE L’ÉLAN PHILOSOPHIQUE

INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE - République et canton ......• Philosophie ≠ mathématiques (preuves par des procédés formels) La philosophie comme activité de la raison : •

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  • INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE COLLÈGE DE CANDOLLE 3E ANNÉE

    (4) ROSENBERG CH. 1 : LÀ OÙ NOUS EMPORTE L’ÉLAN PHILOSOPHIQUE

  • SUR QUOI PORTE LA PHILOSOPHIE ? Ce que nous savons déjà :

    •  Philosophie ≠ science empirique (preuves par l’expérience) •  Philosophie ≠ mathématiques (preuves par des procédés formels)

    La philosophie comme activité de la raison : •  Vrai, mais peu précis (littérature, histoire, sciences…)

    L’élan philosophique : •  Étonnement face au monde et notre place dans le monde → questions :

    •  Est-ce que le temps et l’espace continuent à l’infini ? •  Et si Dieu n’existait pas ? (Ou : s’il existait effectivement ?) •  Peut-on être authentiquement libre ? •  Le bien et le mal existent-ils réellement ? •  Y a-t-il des vérités absolues ? •  Certaines oeuvres d’art peuvent-elles être meilleures que d’autres ? •  Quel est le sens de la vie ?

    •  Poser ces questions vs. comment s’y prendre pour donner une réponse •  « Le travail du philosophe consiste ainsi à transformer ces questions en

    quelque chose au sujet duquel on puisse réfléchir — et puis d’y réfléchir. Une telle entreprise requiert de la part des philosophes à la fois une stratégie générale — une méthode — et des tactiques au cas par cas — des techniques permettant d’appliquer cette méthode. »

  • LA PHILSOSOPHIE : UNE DISCIPLINE DE « SECOND ORDRE »

    Disciplines de « premier ordre », qui ont pour objet d’étude, p. ex. :

    •  les sciences •  l’art •  la religion •  les mathématiques •  l’histoire •  la psychologie •  le droit •  le langage

    Discipline de « second ordre », qui a pour objet d’étude les activités de disciplines de « premier ordre », p. ex. :

    •  philosophie des sciences •  philosophie de l’art •  philosophie de la religion •  philosophie des mathématiques •  philosophie de l’histoire •  philosophie de la psychologie •  philosophie du droit •  philosophie du langage

    « celui qui voudrait absolument définir la philosophie par son sujet d’étude aurait besoin d’une description très large de ce même sujet d’étude — quelque chose comme « les activités rationnelles, cognitives et conceptuelles des gens ». De ce point de vue, la philosophie en tant qu’activité consisterait à attirer l’attention de la raison sur ses propres opérations, à étudier rationnellement les pratiques rationnelles. »

  • EXEMPLES Affirmations des disciplines de « premier ordre »

    •  Sciences : « Les gaz sont constitués de molécules. »

    •  Sciences : « Tout objet matériel est composé d’atomes. »

    •  Critique d’art : « Le David de Michel-Ange est une oeuvre plus achevée que sa Pieta. »

    •  Théologie : « Dieu est miséricordieux. » •  Histoire : « Les causes sous-jacentes de la

    Seconde Guerre Mondiale étaient principalement économiques. »

    •  Linguistique : « Les compétences linguistiques des êtres humains ne peuvent pas être expliquées sans présupposer l’existence de capacités linguistiques innées et transmises génétiquement. »

  • LA PHILOSOPHIE : QUESTIONS DE SIGNIFICATION Questions de signification :

    •  Que veut dire « une oeuvre d’art est « plus achevée » qu’une autre » ? •  Qu’est-ce qu’une « cause sous-jacente » ? •  « Un gaz est-il constitué de molécules de la même façon qu’une échelle

    est constituée de ses barreaux et de ses côtés ? […] De la même façon qu’une phrase est constituée de mots ? »

    •  « Un théologien qui dit de Dieu qu’il est miséricordieux peut-il réellement employer ce mot dans le sens que nous lui prêtons d’ordinaire ? Après tout, la miséricorde de Dieu est supposée être compatible avec l’existence des maladies, des sécheresses, des famines, des guerres, […] ainsi que de tous les autres maux et calamités dont souffre l’espèce humaine et qu’Il laisse apparemment s’abattre sans distinction tant sur les innocents que sur les coupables. Et ce n’est pas là le type de comportement que nous attendrions d’ordinaire d’un être miséricordieux. »

    •  La « capacité linguistique » est-ce « quelque chose qui peut être génétiquement transmis au sens où, par exemple, la couleur des yeux est génétiquement transmise » ?

  • LA PHILOSOPHIE : QUESTIONS DE JUSTIFICATION Questions de justification :

    •  « Comment le comportement observable et grossier de substances, d’objets et d’instruments dans le laboratoire peut-il conférer quelque légitimité au discours des physiciens sur quelque particule ou force inobservable ? »

    •  « Les jugements de valeur esthétiques peuvent-ils prétendre à quelque validité intersubjective, ou sont-ils condamnés à n’être rien de plus que l’expression de goûts personnels ? »

    •  « Garantir la vérité de tel ou tel énoncé théologique requiert-il en fin de compte de faire appel à un type spécial d’expérience religieuse, et y a-t-il (ou peut-il y avoir) un tel genre d’expérience ? »

  • LA PHILOSOPHIE : GÉNÉRALISATIONS À PARTIR DE QUESTIONS PARTICULIÈRES Questions générales :

    •  Peut on justifier objectivement les jugements de valeur quelconques (par exemple les jugements esthétiques ou les jugements moraux) ?

    •  Et que faut-il comprendre par « jugement de valeur » ? Y-a-t-il une différence entre jugements de valeur et jugements de fait ? Si oui, quelle différence ?

    •  Peut-on justifier l’inférence du visible à l’invisible – peu importe qu’il s’agisse des atomes, des désirs et des croyances des gens, ou du prochain lever du soleil ?

    •  Et que voulons-nous dire au clair quand nous utilisons les expressions « visible » et « invisible » ?

    •  Peut-on justifier une affirmation quelconque – par exemple une affirmation théologique – par l’expérience ou par le raisonnement ?

    •  Et que signifie vraiment l’affirmation « L’affirmation P est justifiée » ? « Les philosophes ne réfléchissent jamais directement au monde : ils réfléchissent au fait de réfléchir au monde. »

  • LA PHILOSOPHIE AVANT ET AVEC LES DISCIPLINES DE « PREMIER ORDRE » Avant la physique : l’atomisme grec

    •  Démocrite (460-370 av. J.-C.), Epicure (341-270 av. J.-C.)

    Avant la jurisprudence : réflexions sur la nature de la justice

    •  Platon (428-348 av. J.-C.) Avant les sciences sociales et la psychologie : réflexions sur l’organisation politique et sur l’âme

    •  Aristote (384-322 av. J.-C.) Avec la physique : les philosophes-physiciens

    •  Ernst Mach (1838-1916), Pierre Duhem (1861-1916) Avec la jurisprudence : les philosophes-juristes

    •  Hans Kelsen (1881-1973), Herbert Hart (1907-1992) Avec les sciences sociales et la psychologie : les philosophes-économistes et les philosophes-psychologues

    •  Friedrich Hayek (1899-1992), Amartya Sen, Joshua Greene

  • DÉSACCORDS ENTRE CHERCHEURS DES DISCIPLINES DE « PREMIER ORDRE » Comment résoudre des désaccords dans les disciplines de « premier ordre » – un exemple de l’histoire

    •  Question : Les allemands (a) ont-ils collaboré volontairement avec la politique nazie entre 1933 et 1945 ou (b) ont-ils collaboré à cause de la pression conformiste qu’ils subissaient ?

    •  Réponse (a) Daniel Jonah Goldhagen •  Réponse (b) Christopher Browning •  Sur quoi porte le désaccord ?

    •  Pas sur les données (sources) •  Mais sur les implications à tirer de ces données

    •  Comment résoudre le désaccord ? •  Grâce à la méthodologie historiographique commune

    •  Compatibilité avec d’autres données •  Logique de l’argumentation

  • DÉSACCORDS ENTRE CHERCHEURS DES DISCIPLINES DE « SECOND ORDRE » La stratégie de résolution de désaccords propre aux disciplines de « premier ordre » ne peut s’appliquer :

    •  « Les philosophes, au contraire, ne partagent en commun ni phénomène, ni expérience, ni document pouvant faire office de donnée, ni foi. »

    •  Exemple : Deux philosophes sont en désaccord sur les « limites de la connaissance perceptuelle c’est-à-dire au sujet de ce qu’il est possible de connaître du monde par le seul moyen de l’expérience sensorielle ».

    •  Pourquoi un recours aux résultats de la neurophysiologie ne peut pas résoudre le désaccord :

    •  Désaccord sur la signification et la justification des résultats de neurophysiologie

    Le rôle méthodologique de l’histoire de la philosophie : •  « langage d’exposition commun » •  « vocabulaire conceptuel partagé » •  « raisonnements philosophiques paradigmatiques » •  « catalogue inépuisable de théories et d’arguments »

    !  En se basant sur ce terrain commun – rattachant un désaccord aux arguments déjà explorés – les philosophes « peuvent amorcer un processus qui leur permettra de faire converger leur compréhension de leur désaccord initial et, éventuellement, de le résoudre une bonne fois pour toute ».