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542.9 : 346.2~ : 541.12. LA PRESSION LIMITE D’AUTOOXYDATION CONSIDl?REE COMME UN CAS PARTICULIER DE LA LIMITE INFGRIEURE D’EXPLOSION. 11. par M. IY. P. JORISSEN. I. J’ai montrC dans un travail prCcCdent l) que la pression limite d’autooxydation peut &tre considCrCe comme un cas particulier de la limite infkrieure d‘explosion. Si, dans un m6lange d’un gaz inflam- mable et d’oxygkne (ou d’air) la proportion du premier gaz descend en-dessous d’une certaine limite (ou encore, si la teneur du melange en oxyghe s’Cl6ve au-dessus d’une certaine valeur), l’inflammation ne se produit plus, lorsqu’on fait jaillir une Ctincelle ou qu’on intro- duit une flamme. De m6me, dans un mClange de vapeur de phosphore et d’oxygsne (ou d’air), l’autooxydation cesse, lorsque la teneur en oxygkne monte au-deli d’une certaine limite (lorsque la pression de l‘oxygkne dkpasse une certaine valeur). La seule difference consiste en ceci, que dans le dernier cas la vapeur (ou le gaz) oxydable n’a pas besoin d’une flamme ou d‘une Ctincelle pour s’enflammer. Les observations, aussi bien celles relatives ii la pression limite d’autooxydation que celles qui se rapportent A la limite infkrieure d’explo- sion, confirment cette manisre de voir. 2. Lorsque la tempkrature s‘klsve, la pression limite d’autooxydation du phosphore doit monter, car la tension de vapeur du phosphore augmente ; la concentration (ou la pression) de l’oxygkne devra donc s’dever aussi pour maintenir la teneur en vapeur de phosphore en-dessous de celle de la limite infkrieure d’explosion. Alors que j’ai trouvka) que la pression limite d’autooxydation du phosphore dans l’oxygkne humide est d‘environ 600 mm. A 15’, C. F. SCHONBEIN~) observa que dans l’oxyghe humide, sous I atm. de pression, le phosphore ne devient luminescent qu’A 24”. 1) W. P. JORISSEN, Chem. Weekbl. 15, 705 (1918). J’ai Bgalement donne dans cc travail un a p e r y de la hibliographie concernant la pression limite d’auto- oxydation et des tentatives faites pour expliquer cette Iimite. ’) W. P. JORISSEN et W. E. RINGER, Chem. Weekhl. 2, 275 (1905); Cbem. Kews 92, 150 (1905). 9 Pogg. Ann. (3) 15, 368 (1848).

La Pression Limite D'Autooxydation Considérée Comme un cas Particulier de la Limite Inférieure D'Explosion. II

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542.9 : 346.2~ : 541.12.

LA PRESSION LIMITE D’AUTOOXYDATION CONSIDl?REE COMME UN CAS PARTICULIER DE LA LIMITE INFGRIEURE

D’EXPLOSION. 11.

par M.

IY. P. JORISSEN.

I. J’ai montrC dans un travail prCcCdent l) que la pression limite d’autooxydation peut &tre considCrCe comme un cas particulier de la limite infkrieure d‘explosion. Si, dans un m6lange d’un gaz inflam- mable et d’oxygkne (ou d’air) la proportion du premier gaz descend en-dessous d’une certaine limite (ou encore, si la teneur du melange en oxyghe s’Cl6ve au-dessus d’une certaine valeur), l’inflammation ne se produit plus, lorsqu’on fait jaillir une Ctincelle ou qu’on intro- duit une flamme. De m6me, dans un mClange de vapeur de phosphore et d’oxygsne (ou d’air), l’autooxydation cesse, lorsque la teneur en oxygkne monte au-deli d’une certaine limite (lorsque la pression de l‘oxygkne dkpasse une certaine valeur). La seule difference consiste en ceci, que dans le dernier cas la vapeur (ou le gaz) oxydable n’a pas besoin d’une flamme ou d‘une Ctincelle pour s’enflammer.

Les observations, aussi bien celles relatives ii la pression limite d’autooxydation que celles qui se rapportent A la limite infkrieure d’explo- sion, confirment cette manisre de voir.

2. Lorsque la tempkrature s‘klsve, la pression limite d’autooxydation du phosphore doit monter, car la tension de vapeur du phosphore augmente ; la concentration (ou la pression) de l’oxygkne devra donc s’dever aussi pour maintenir la teneur en vapeur de phosphore en-dessous de celle de la limite infkrieure d’explosion.

Alors que j’ai trouvka) que la pression limite d’autooxydation du phosphore dans l’oxygkne humide est d‘environ 600 mm. A 15’, C. F. SCHONBEIN~) observa que dans l’oxyghe humide, sous I atm. de pression, le phosphore ne devient luminescent qu’A 24”.

1) W. P. JORISSEN, Chem. Weekbl. 15, 705 (1918). J’ai Bgalement donne dans cc travail un apery de la hibliographie concernant la pression limite d’auto- oxydation et des tentatives faites pour expliquer cette Iimite.

’) W. P. JORISSEN et W. E. RINGER, Chem. Weekhl. 2, 275 (1905); Cbem. Kews 92, 150 (1905). 9 Pogg. Ann. (3) 15, 368 (1848).

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3. Une influence de la vapeur d’eau a C t C observCe aussi bien pour la pression limite d’autooxydation du phosphore que pour l’explosion de mClanges de protoxyde de carbone et d’oxyghe. Pour le phosphore je trouvail) que la pression limite, qui est ae 600 mm. a 15” pour de l’oxyghe saturC de vapeur d‘eau, descendait B 330 mm. environ B la meme tempCrature, lorsque le gaz. Ctait sCchC au pentoxyde de phos- phore (mais pas aussi parfaitement que dans les experiences de H. BRERETON BAKER) a). Pour les mklanges de protoxyde de carbone et d’oxyghe H. DIXON 3) observa qu’un mClange excessivement sec ne dCtone pas a 1’Ctincelle Clectrique et que l’explosion se produit d’autant plus aisement (entre certaines limites) que la quantitC de vapeur d’eau devient plus grande. 4) A mop avk, la limite infCrieure d’explosion doit icertainement s’dlever lorsque la teneur en vapeur d’eau s’abaisse. 4. Dans mon travail prdckdent j’ai d6jB pu fixer l’attention sur

l’influence analogue d’une addition d’azote sur la pression limite de phosphorescence du phosphore 5, et les limites infkrieures d’explosion de l’hydroghne et du mCthane O).

Je puis indiquer maintenant une influence analogue du bioxyde de carbone dans les deux phdnomsnes. Dans les deux cas I’influence de bioxyde de carbone est plus grande que celle d’azote. Cela fut ob- serve! par J. J O U B E R T ~ ) pour la phosphorescence du phosphore. De ses observations on pent d6duire que la pression limite, qui dtait de 670 mm. 21 15”-16” pour l’oxyghe pur, s’abaissa 21 505 mm.

1) W. P. .JORISSE;N et 1%’. E. RINGER, 1. c. 8 ) Phil. Trans. A 179, 5x3 (1888). I1 trouva que le phosphore sec n’est pas

attaquli par I’nxygene sec (tous deux sechPs avec des prCcautions speciales) ,,though thc pressure was varied in every possible way”, pas m6me au point d’ehullition (290”).

*) Phil. Trans. 175, 617 (1884). 4) A. F. ~ ; I R V A N [Proc. Chem. Soc. 19, 236 (1903)] a trouvd que la quantitc‘

1 ’eau n6wssaire po<r rendrr possible l’explosion d’un melange de protoxyde de carhone cst d’oxyg6ne est de 1 mol. sur 24000 mol. de gaz.

6) 0bservnt.ions de .J. JOUBERT (Theses, Paris, p. 36) a 15”--16”. Si nous prenons pour 15”--16” ia valeur (0,03 mm. A peu pres) trouvee par M. CENT- NERSZWER [Zeitschr. f . physik. Chem. 85, 99 (1913)] pour la tension de vapeur du phosphore A 20”, l a rapport entre les concentrations de la vapeur de phos-

0 03 0 03 phore et de l’oxygene s’eleve de L- A -L lorsqu’on remplace l’oxygene pur 760 905’ par un melange A volumes egaux d’oxygene et d’azote.

0 ) 1,’apres R. BUNSEN (Gasometrische Methoden 1877, 338) la limite inferieure d’explosion de l’hydrogene melange 21 l’oxygene, est environ 6% en vol.; suivant J. ROSZKOWSKI [Journ. f . Gasbeleucht. 33, 496 (1890) celle de l’hydrogene md- langi. A I’air est de 9,57& Le rapport entre les conce$brations de l’hydroghne et de l’oxygkne est donc port6 de - 6’1 a -L. Pour le methane et l’air la

lirnite infbrieurr d’explosion est situee, suivant le mi,me auteur, B 6% en vol., alors que J. HARGER [Coal and the Prevention of Explosions and Fires in Mines; Newcastle-upon-Tyne, 1913, 1223 la trouva a u p e n t e e a 8% par abaisse- ment de la teneur de l’air en oxygene B 17.5% en vol. J. K. Clement (Techn. Paper 43, Biireau of Mines, Washington 19i3) la trouva augment& de 5,8 B 6,.57& par abaissement de la teneur de l’air en oxygkne de 20,O B 14.0%.

9 5 93,9 19,o

7 ) Thes&s. p. 82.

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(d’oxyghe) dans le cas d’iin mClangr 2 volumes Cgaux d’oxyghe et d’azote. Par contre, Q 12’ la prcssion limite descendit de 510 mm. pour 1’oxygPne pur Q 261 mm. (d’oxyghe) pour tine teneur en bioxyde de carbone de 37 poux cent5 en volume.

I,a variation de 121 limite infkrieure d’explosion de I’hydi oghe , du protosyde de c;~l-lmnt et du mkthanc, par suite du remplacement de l’azote par clu biosyde de carhone, fut Gtudike par J. ROSZKOWSKI ’).

D’accord avec ct‘s observations sont celles dfi J. K. CLEMENT 2)

sur le mCthane et le gaz naturel (composition : 83,1% mCthane, 16,0”/, Cthane, 0.9% azotc).

Bioxyde de carbone nir; thane

i-rsygPnc

0 % 12 25 35 45 53 61

imite inferieure d’explosion du

gaz naturel - _ _ __

5 ,2 5 36 6,1 674 6,9 792 8 74

A propos d’une recherclie sur l’extinction de flammes3), dans la- quelle il fut Cgalenient qurstion du pouvoir extincteur du bioxyde de carbone plus grand que celui de l’azote (constat6 par CLOWES) ’), j’ai pu expliquer la diffkrence par une chaleur spkcifique molkculaire plus grande et un plus grand pouvoir conducteur calorifique du bioxyde de carbone (A des tempkratures ClevCes). La mCme explication s’applique, Q mon avis, aiix phknomirnes ci-dessus.

j. Pour ce qui regarde d’autres gaz que l’azote et l’acide carboni-

1) Journ. €. c.;asbt:lcnclit. 33, 4% (1890) ; confr. aussi P. E I T N E : ~ ~ , ihid. 45,

* ) Technical Paper, 11’. A:) , Bureau of Mines, Washington, J913, p. 9 et 12. s, I h n s laquelle se rnanifesta entre autres l’analopie cntre Ic plic‘nomene de

la limite superieure d’explosion et I’extinctiun de flinnnles dilrls l’air dont la teneur en oxygene est descendue ail-dessous d’une ccrtainr limite. La. tcneur en oxygCne est a peu pres la mCme dans les deux (:as. V(;ir W. P. JORISSEN et N. H. SIEWERTSZ VAN REESEMA, Chem. Weekbl. 6, 1053 (1909) ; Zeitschr. f . physik. Chern. 73, 163 (1910); Arch. Neerl. (3) A 1, 15 ($911) ; W. P JORISSEN, Chcm. Weekbl. 10, 961 (1913); Het Gas, juin 1914.

222 (i902).

‘1 Journ. Soc. Chem. Ind. 13, 1155 (1894).

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que, on p u t mentionner, au sujet de la pression limite de’lumines- cence du phosphore, les recherches de J. JOUBERT’) relatives au pro- toxyde de carbone, l’hydroghe et le protoxyde d’azote. Leur influence est du m b e ,,ordre” que celle de l’azote et d u bioxyde d e carbone a). Au sujet de la limite infCrieure d’explosion de l’hydroghe on peut mentionner les expkriences de HUMPHRY DAVY. 3)

~~ ~

I Gaz ajoute 1 explosait encore en n’explosait plus .

1 presence de 1 apres addition de

1 mol. de gaz detoaant

_____-- .~ __________ Acide chlorhydrique 1 M o o PIL \ 01. 2% en vol. Fluorure dc silicium 1 - s/,& I ‘16

Limite infcrieure d’explosion calculfie

par moi

24% enviruii 37 ,,

. __

1) Theses, p. 3 9 4 3 . *) C o m e les experiences n’ont pas I%& effectuees a la mCme temp&rature,

une cornparaison precise de l’influence est impossible. 8 ) Phil. Trans. 1817, 59. I1 examina aussi l’influcnce de methane, d’hydrogene

sulfur6 et d’ethylene (contenant peut-Ctre un peu d’ether) sup I’explosivitP du gaz detonant et trouva

~~

Gaz ajoutk 1 vol. de gaz detonant

explosait encore j n’explosait plus apres addition de

-__ I par la presence de

Methane 3/&, en vol. Hydrogene sulfur6

Ethylene

1% en vol. 2 ’I2

mais ici le’ph6nom8ne est pluscompliqu6, eu 6gard B l’inflammabilite des gaz ajout6s. 4) Trans. Roy. SOC. Can. 13, sect. 111, 211 (1919). J e n’ai pi] lirequ’unextralt. 5 ) Phil. Mag. (5) 38, 530 (1894) ; Zeitschr. f. physik. Chem. 16. 340 (1895). 6 ) Les frais de ces experiences furent couverts par un subside allou? par

1’Institut international de physique Solvay.

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La limite infkrieure d‘explosioil se trouvair A 5 p/o en vol., la limite supkrieure a 13.5y0 l).

On fit ensuite des melanges d’oxygene et de bioxyde de carbone avec une teneur en oxyghe eggale celle de l’air. Des melanges de ces gaz avec de la vapeur d’acCtald6hyde ne purent Ctre rCduits A exploser *).

Finalement, j’ai examine des melanges de cette vapeur avec un melange gazeux, composC de 21% en vol. d’oxygirne, 60% de bioxyde de carbone et 19% d’azote. La limite inferieure d’explosion correspon- dait maintenant Q 8,Ph en vol. d’ac&aldChyde, la limite superieure . B 11% environ a). Le remplacement d’azote par du bioxyde de carbone a donc une grande influence.

Un rapprochement des limites d’explosion, aboutissant a un fusion- nement, par remplacement de l’azote par du bioxyde de carbone, fut dCjQ observee pour le methane et le ,,gaz naturel” (mkthane + Cthane, voir plus haut) par J. K. CLEMENT) a).

7. Pour finir, je mentionnerai encore la remarque suivante de Th. G R A H A M ~ ) , datant de 1829, qui me tomba dernigrement sous, les yeux : ,,L’action par laquelle certains gaz empechent l’oxydation du phosphore est sans doute en rapport avec telle par laquelle ces gaz, et d’autres encore, rendent ininflammable par I’Ctincelle, le mClange explosif d’oxyghe et d’hydroghe.”

Je citerai Cgalement le passage suivant d 3 JOUBERT, dana l’intro- duction de sa dissertatione) (venant aprbs qu’il a par16 des pheno- m h e s observ6s dans l’oxydation du phosphore) : ,,il y aurait donc pour chaque temperature deux limites entre lesquelles la combustion du phosphore par l’oxyg&ne serait possible et en dehors desquelles elle ne pourrait avoir lieu” ; Q quoi il ajoute : ,,enfin, ne serait-il pas permis de se demander si l’on ne se trouverait pas la en presence d’une loi gCnCrale et si l’on n’aurait pas soils les yeux, la temp& rature ordinaire, ce qui aurait lieu pour I’hydroxhe et I’oxyghe, par exemple, Q une tempkrature de 500 degrCs?”, mais aussi: ,,ce sont 18 d’ailleurs des questions trB-dClicates, sur lesquelles il est difficile de se prononcer.”

L e y d e, labomtoire de chimie inorgartique de l’wniversitt, octobre 1920.

( R e p le 23 octobre 1920). - ~ _ _ _ _

1) L’explosion ne se produisait pas pour 3.6, 3.7, 5.6 et 5.7% en w l . ; clle se produisait faiblement pour 5,8%. Pour des teneurs plus @levees la force de l’explosion augmentait d’abord, diminuait ensuite ; B 13.3% en vol. l’explosion Ctait faible, et elk ne se produisait phis pour 13.6 et plus.

8 ) Les melanges contenaient respectivement 6.0, 6.9, 9.6, 10.7, 11.1, 11.6, 12.6 et 13.7% en vol. d’acktaldehyde.

a) Un melange contenant 5.9% d’acetaldnhyde n’explosait pas, un melange A S,l% tant6t explosait (mais tres faiblement) tantbt n’explosait pas ; un melange A 10.lYo explosait assez faiblement; ceux ti 11.6 et 12.4% n’explosaient pas.

‘) Technical Paper 43, Bureau of Mines, Wiishington 1913. j) Pogg. Ann. 17, 375 (1829). 6 ) Theses, p. 15 et 16.