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25 J Chir 2007,144, N°1 • © 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Article original Le consentement éclairé : quelle est sa valeur en chirurgie digestive ? 1 Étude prospective sur 259 cas F. Dufour, N. Gillion, V. Grassi, C. Polliand, G. Champault Service de Chirurgie Digestive, Hôpital Jean Verdier – Bondy. Correspondance : F. Dufour, Service de Chirurgie Digestive, Université Paris XIII, UFR « Leo- nard de Vinci », Hôpital Jean Verdier, Avenue du 14 Juillet, F 93143 Bondy Cedex. e-mail : [email protected] Résumé / Abstract Le consentement éclairé : quelle est sa valeur en chirurgie digestive ? Étude prospective sur 259 cas F. Dufour, N. Gillion, V. Grassi, C. Polliand, G. Champault Situation : L’arrêt de la cour de cassation de 1997 précise que « le médecin est tenu d’une obligation particulière d’information vis-à-vis de son patient et qu’il lui incombe de prouver qu’il a exécuté cette obligation ». Les sociétés savantes ont recommandé d’utiliser un formulaire de consentement éclairé applicable à toutes les pratiques, signé par le patient. But de l’étude : Évaluer l’impact de cette pratique mise en place en 1999 et utilisée systématiquement chez tous les patients devant subir une intervention programmée. Patients et méthodes : Deux cent cinquante neuf patients successifs devant subir des interventions programmées ont été évalués prospectivement. Avant l’intervention, tous avaient signé le formulaire d’information sur le consentement éclairé. Le jour de la sortie, un questionnaire d’évaluation portant sur ce document et l’information reçue était remis au patient, rempli et rendu le jour même. Résultats : Quatre vingt treize pour cent des patients se souvenaient du formulaire de consentement éclairé. Huit pour cent l’avaient signé sans l’avoir lu. Quatre vingt deux pour cent pensaient que ce document était utile à leur prise en charge. Parmi les patients n’ayant pas lu le formulaire de consentement, 38 % auraient souhaité plus d’informations. Ce n’était le cas que de 16 % de ceux qui l’avaient lu. Cette différence est significative (p = 0,03). Les patients ayant eu une complication étaient significativement moins satisfaits de l’information reçue que ceux ayant eu des suites simples (67 versus 94 %) (p < 0,01). Conclusion : Le formulaire de recueil de consentement offre une base simple et pratique pour informer les patients, mais ne dispense en aucun cas le chirurgien de cette charge. Les patients qui ne lisent pas le consentement étaient moins satisfaits de l’information reçue que ceux qui le lisent. La forte adhésion des patients au formulaire suggère que son existence constitue un facteur d’information jugé rassurant pour les opérés. Mots-clés : Divers. Consentement éclairé. Information médicale pré-opératoire. Value of the informed consent in digestive surgery? Prospective study 259 cases. F. Dufour, N. Gillion, V. Grassi, C. Polliand, G. Champault Situation: In 1997 the Supreme Court of Justice decreed that “the doctor is responsible for giving his patient certain information and is obliged to prove that the information has been given” . French surgical societies recommend using a form of informed consent signed by the patient applicable to all practices. Aims: To evaluate a step taken systematically since 1999 in our department. Patients and methods: A prospective study was put into place for 259 patients candidate for elective surgery. All patients signed and returned the “informed consent” before surgery. The day of leaving the hospital, they answered a post-operative questionnaire to evaluate what they remembered of the “informed consent form” and the quality of information. Results: Ninety three per cent of them remembered it. Eight per cent signed it without reading it. Eighty two per cent of the patients think that this document is useful for their medical records. Among the patients who did not read the informed consent form: 38% wished it gave more information, whereas only 16% of those who had read it, considered the given information inadequate. This difference is statistically (p=0.03) significant. Introduction Le devoir d’information du malade est depuis longtemps reconnu. Déjà l’arrêt Mercier en 1936 [1], prenait pour acquis que « le médecin passant un contrat avec son patient, échange les consentements qui président à l’acte de soin ». Cette jurispru- dence est constante. 1 Cependant ce n’est que dans la révi- sion du code de déontologie en 1995 que ce devoir est expressément énoncé dans son article 35 [2] : « Le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la person- nalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension ». Depuis, l’évolution de la jurispru- dence a permis la recherche d’un défaut d’information du patient ou d’informa- tions incomplètes en l’absence de faute médicale vraiment démontrée et dans un souci d’indemnisation des victimes. Tout particulièrement depuis l’arrêt de la cour de cassation du 25 février 1997 [3] énonçant que : « le médecin est tenu d’une obligation particulière d’information vis-à-vis de son patient et qu’il lui incombe de prouver qu’il a exécuté cette obligation ». À la suite de cet arrêt, les sociétés savantes (dont la Société Française de Chirurgie Laparoscopique -SFCL-) ont recommandé d’utiliser un document d’information applicable à toutes les pratiques chirurgicales, que le patient signe en double exemplaire et restitue lors de son admission à l’hôpital pour être conservé dans le dossier médical. 1. Travail présenté au XI e Congrès de la Société Française de Chirurgie Laparoscopique (SF- CL), à Paris le 25-26 janvier 2006.

Le consentement éclairé : quelle est sa valeur en chirurgie digestive ?: Étude prospective sur 259 cas

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J Chir 2007,144, N°1 • © 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Article original

Le consentement éclairé : quelle est sa valeur en chirurgie digestive ?

1

Étude prospective sur 259 cas

F. Dufour, N. Gillion, V. Grassi, C. Polliand, G. Champault

Service de Chirurgie Digestive, Hôpital Jean Verdier – Bondy.

Correspondance :

F. Dufour, Service de Chirurgie Digestive, Université Paris XIII, UFR « Leo-nard de Vinci », Hôpital Jean Verdier, Avenue du 14 Juillet, F 93143 Bondy Cedex.

e-mail : [email protected]

Résumé / Abstract

Le consentement éclairé : quelle est sa valeur en chirurgie digestive ? Étude prospectivesur 259 cas

F. Dufour, N. Gillion, V. Grassi, C. Polliand, G. Champault

Situation :

L’arrêt de la cour de cassation de 1997 précise que «

le médecin est tenu d’une obligation particulière d’information vis-à-vis de son patient et qu’il lui incombe de prouver qu’il a exécuté cette obligation ».

Les sociétés savantes ont recommandé d’utiliser un formulaire de consentement éclairé applicable à toutes les pratiques, signé par le patient.

But de l’étude :

Évaluer l’impact de cette pratique mise en place en 1999 et utilisée systématiquement chez tous les patients devant subir une intervention programmée.

Patients et méthodes :

Deux cent cinquante neuf patients successifs devant subir des interventions programmées ont été évalués prospectivement. Avant l’intervention, tous avaient signé le formulaire d’information sur le consentement éclairé. Le jour de la sortie, un questionnaire d’évaluation portant sur ce document et l’information reçue était remis au patient, rempli et rendu le jour même.

Résultats :

Quatre vingt treize pour cent des patients se souvenaient du formulaire de consentement éclairé. Huit pour cent l’avaient signé sans l’avoir lu. Quatre vingt deux pour cent pensaient que ce document était utile à leur prise en charge. Parmi les patients n’ayant pas lu le formulaire de consentement, 38 % auraient souhaité plus d’informations. Ce n’était le cas que de 16 % de ceux qui l’avaient lu. Cette différence est significative (p = 0,03). Les patients ayant eu une complication étaient significativement moins satisfaits de l’information reçue que ceux ayant eu des suites simples (67

versus

94 %) (p < 0,01).

Conclusion :

Le formulaire de recueil de consentement offre une base simple et pratique pour informer les patients, mais ne dispense en aucun cas le chirurgien de cette charge. Les patients qui ne lisent pas le consentement étaient moins satisfaits de l’information reçue que ceux qui le lisent. La forte adhésion des patients au formulaire suggère que son existence constitue un facteur d’information jugé rassurant pour les opérés.

Mots-clés :

Divers. Consentement éclairé. Information médicale pré-opératoire.

Value of the informed consent in digestive surgery? Prospective study 259 cases.

F. Dufour, N. Gillion, V. Grassi, C. Polliand, G. Champault

Situation:

In 1997 the Supreme Court of Justice decreed that

“the doctor is responsible for giving his patient certain information and is obliged to prove that the information has been given”

. French surgical societies recommend using a form of informed consent signed by the patient applicable to all practices.

Aims:

To evaluate a step taken systematically since 1999 in our department.

Patients and methods:

A prospective study was put into place for 259 patients candidate for elective surgery. All patients signed and returned the “informed consent” before surgery. The day of leaving the hospital, they answered a post-operative questionnaire to evaluate what they remembered of the “informed consent form” and the quality of information.

Results:

Ninety three per cent of them remembered it. Eight per cent signed it without reading it. Eighty two per cent of the patients think that this document is useful for their medical records. Among the patients who did not read the informed consent form: 38% wished it gave more information, whereas only 16% of those who had read it, considered the given information inadequate. This difference is statistically (p=0.03) significant.

Introduction

Le devoir d’information du malade estdepuis longtemps reconnu. Déjà l’arrêtMercier en 1936 [1], prenait pour acquisque

« le médecin passant un contrat avecson patient, échange les consentements quiprésident à l’acte de soin »

. Cette jurispru-dence est constante.

1

Cependant ce n’est que dans la révi-sion du code de déontologie en 1995que ce devoir est expressément énoncédans son article 35 [2] :

« Le médecin doità la personne qu’il examine, qu’il soigne ouqu’il conseille une information loyale, claireet appropriée sur son état, les investigationset les soins qu’il lui propose. Tout au longde la maladie, il tient compte de la person-nalité du patient dans ses explications etveille à leur compréhension »

.

Depuis, l’évolution de la jurispru-dence a permis la recherche d’un défautd’information du patient ou d’informa-tions incomplètes en l’absence de fautemédicale vraiment démontrée et dansun souci d’indemnisation des victimes.Tout particulièrement depuis l’arrêt dela cour de cassation du 25 février 1997[3] énonçant que :

« le médecin est tenud’une obligation particulière d’informationvis-à-vis de son patient et qu’il lui incombede prouver qu’il a exécuté cette obligation »

.

À la suite de cet arrêt, les sociétéssavantes (dont la Société Françaisede Chirurgie Laparoscopique -SFCL-)ont recommandé d’utiliser un documentd’information applicable à toutes lespratiques chirurgicales, que le patientsigne en double exemplaire et restituelors de son admission à l’hôpital pourêtre conservé dans le dossier médical.

1. Travail présenté au XI

e

Congrès de la SociétéFrançaise de Chirurgie Laparoscopique (SF-CL), à Paris le 25-26 janvier 2006.

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Le consentement éclairé : quelle est sa valeur en chirurgie digestive ?

F. Dufour

et al.

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Conclusion:

The informed consent form gives a lot of information to the patients, but the surgeon is still obliged to do likewise. Patients who did not read the consent were less satisfied with the given information than those who had read it. The positive reaction of the patients in favour of the form makes it evident that the existence of the form reassures them.

Key words:

Informed consent. Surgical information.

L’objectif de cette étude était d’éva-luer cette démarche effectuée systéma-tiquement depuis 1999 dans le servicede chirurgie digestive de l’hôpital JeanVerdier (Bondy -93-).

Patients et méthodes

De novembre 2004 à septembre 2005,259 patients ont été opérés pour des in-terventions programmées.

L’information médicale préopéra-toire était délivrée oralement au maladepar le chirurgien en consultation. Auterme de cette dernière, il était donnéet expliqué au patient un formulaire deconsentement éclairé

(figure 1)

sur le-quel figurait son identification hospita-

lière. Dans ce document, le patientadmettait avoir reçu les informationsconcernant l’évolution possible de lamaladie sans intervention, la nature etle but de l’intervention, les risques etcomplications éventuels. Il acceptaitl’intervention et l’élargissement de laprocédure en réalisant des actes com-plémentaires si nécessaire. Enfin, il sti-pulait avoir eu la possibilité de poser desquestions et d’avoir eu les réponses à sesquestions. Ce formulaire était égale-ment disponible en langue arabe. Le dé-lai moyen entre la consultation pré-opératoire et l’intervention était de17 jours avec des extrêmes allant de 3 à85 jours.

Figure 1 : Formulaire de consentement éclairé.

CONSENTEMENT ÉCLAIRÉ

Au cours de la consultation du Docteur ………… du ……………., il aété convenu que je devais être hospitalisé le ………………à l’hôpitalJean Verdier avenue du 14 juillet 93140 Bondy, pour y subir uneintervention chirurgicale le ………………

Le Docteur ………………… m’a donné des informations précises surmes problèmes de santé. Il m’a expliqué de façon simple et intelligiblel’évolution possible si l’on ne recourrait pas à une interventionchirurgicale. Il m’a informé des autres types de traitements, s’ils existentavec leurs bénéfices ou inconvénients potentiels.

Il m’a clairement indiqué la nature et le but de l’intervention qui serapratiquée, l’inconfort possible qu’elle est susceptible d’entraîner ainsique les risques et complications potentiels de cette chirurgie nonseulement dans les suites opératoires mais aussi à terme.

J’ai également été prévenu du fait qu’au cours de l’intervention unedécouverte ou un événement imprévus pourraient conduire l’opérateur àélargir la procédure en réalisant des actes complémentaires différents deceux prévus initialement. J’autorise dans ces conditions le chirurgien àeffectuer tout acte ou prescription qu’il estimerait nécessaire.

J’ai eu la possibilité de poser des questions et le Docteur………………y a répondu de façon complète et satisfaisante. J’ai bien compris lesréponses qui m’ont été fournies. Je donne mon consentement pour soitréalisée l’intervention prévue dans les conditions ci-dessus.

Fait à Bondy, en double exemplaire, le ……………

Signature

Étiquette dupatient

Patients

La population étudiée se composait de148 femmes et 111 hommes âgés de 16à 96 ans (moyenne 49 ans). Le type dechirurgie effectué était une interventiondigestive, viscérale ou endocrinienne va-riée avec une prédominance d’acte dechirurgie pariétale et biliaire

(tableau 1)

.Les interventions ont été effectuéespar voie conventionnelle dans 175 cas(67,5 %) et par voie laparoscopique dans84 cas (32,5 %).

Méthodes

Le jour de leur sortie, un questionnaired’évaluation, portant sur la feuille deconsentement éclairé et l’informationreçue, était remis au patient, rempli etrendu le jour même. Pour chacun des259 malades opérés un suivi prospectifd’un mois après la sortie du serviceétait réalisé, notant les complicationssurvenues.

Statistiques

La comparaison entre les variablesqualitatives a été effectuée par le testexact de Fischer. La différence étaitconsidérée comme significative lorsquep < 0,05.

Résultats

Tous les patients avaient signé etrendu le consentement éclairé avantl’intervention. Cinq conversions (6 %)lors des laparoscopies ont été néces-saires, dont quatre pour cholécystec-tomie et une pour hernie inguinalebilatérale (trans abdominale extrapéritonéale). Vingt et un patients(8 %) ont eu des complications pos-topératoires

(tableau 2)

, dont quatre

Tableau 1

Interventions effectuées.

Intervention n = 259 %

Pariétale 81 31,5

Biliaire 48 18,5

Thyroïdienne 27 10,5

Obésité 25 9,5

Colorectale 13 5,0

Proctologie 18 7,0

Lésions superficielles 24 9,0

Urologique 14 5,5

Exploratrice 9 3,5

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majeures : une plaie et une fistule bi-liaire ; deux désunions anastomotiques.Cinq complications (6 %) étaientconsécutives à une laparoscopie.Aucun décès n’était à déplorer.Aucune plainte des patients ayantparticipé à l’étude n’a été portée, ànotre connaissance à ce jour.

Tous les patients ont répondus auquestionnaire

(tableau 3)

remis à la finde l’hospitalisation.

Pour le document de

consentementéclairé

: 93 % des patients s’en souve-naient et 89 % l’avaient lu avant de lesigner. Sur l’ensemble des opérés,82,5 % pensaient que ce document a

Tableau 2

Complications.

Complications n = 21 Lecture du Questionnaire

Questions posées

Satisfaction

Plaie/fistule biliaires 2 Oui Non nspOui nsp nsp

Fistule anastomotique 2 Oui Non nspNon Non Oui

Hypocalcémie 2 Oui Non OuiOui Non Oui

Hématome profond 1 Non Oui OuiParalysie récurrentielle 1 Oui Non NonPhlébite 1 Oui Non NonRectorragies après Longo 1 Oui Oui NonHématome de paroi 3 Non Oui Non

Oui Oui nspOui Oui Oui

Abcès de paroi 1 Oui Non OuiOui Non nsp

Douleurs postopératoires 4 Oui Oui OuiOui Non OuiOui Non nsp

Respiratoires 2 Oui Non NonNon Non Oui

Rétention urinaire 1 Oui Non Oui

nsp : ne sait pas

Tableau 3

Questionnaire de fin d’hospitalisation.

Oui Non Sans réponse

Vous souvenez-vous du formulaire de consentement éclairé ?

n 241 14 4

% 93,0 5,5 1,5

L’avez-vous lu avant de le signer ?n 230 21 8

% 89,0 8,0 3,0

Le formulaire vous a-t-il conduit à poser d’autres questions au chirurgien ?

n 72 173 14

% 28,0 67,0 5,0

Pensez-vous que ce document est utile à votre prise en charge ?

n 214 18 27

% 82,5 7,0 10,5

Auriez-vous souhaité d’autres informations ?n 19 231 9

% 7,5 89,0 3,5

Avez-vous eu des informations précises sur la technique utilisée ?

n 204 43 12

% 79,0 16,5 4,5

été utile à leur prise en charge. Vingthuit p cent des patients ont été conduità demander d’autres informations auchirurgien.

Pour l’

information fournie

: 79 % despatients étaient satisfaits des informa-tions reçues sur la technique utilisée ;18 % des patients auraient souhaitéd’autres informations concernant leurmaladie (30 %), le déroulement pré-opératoire (anesthésie, technique chi-rurgicale, déroulement de l’interven-tion) (33 %), le déroulement des suitesopératoire (complications, conduite àtenir) (33 %). Enfin 13 % des patientsne précisaient pas quelles informationscomplémentaires ils auraient souhai-tées.

Parmi les patients qui n’avaient paslu le questionnaire (n = 21), 8 (38 %)auraient souhaité plus d’informations.Alors que l’information était considéréecomme insuffisante chez seulement16 % des patients (37/230) qui l’avaientlu. Cette différence est significative(p = 0,03).

Parmi les patients qui n’avaient paslu le questionnaire, 90,5 % (n = 19)pensaient que le document a été utile àleur prise en charge. Alors que seule-ment 84 % des patients (n = 193) quil’avaient lu l’estimaient utile à leur priseen charge. Cette différence n’est passignificative (p = 0,54).

Parmi les 72 patients ayant lu leformulaire et demandant d’autres ex-plications, 79 % étaient satisfaits desexplications complémentaires, mais21 % (15 patients) étaient restés insa-tisfaits. Il n’y avait pas de différence si-gnificative quant à la satisfaction despatients qui ont lu le questionnaire se-lon qu’ils aient ou non posé des ques-tions (p = 0,24).

Des cinq patients ayant nécessitéune conversion pendant une laparosco-pie, aucun n’avait souhaité d’autresinformations après lecture du formulai-re de consentement éclairé. Quatre sur5 estimaient avoir reçu des informationsprécises et suffisantes sur la techniqueopératoire, mais 2 sur 5 auraient souhai-té avoir d’autres informations ; l’un surla prise en charge de la douleur en pos-topératoire et l’autre n’a pas précisélesquelles.

Les patients ayant eu une complica-tion (n = 21) étaient significativementmoins satisfaits de l’information reçueque ceux ayant eu des suites simples (67

versus

94 %) (p < 0,01).

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Discussion

Le formulaire de consentement éclairéutilisé dans cette étude était court. Iltient sur le verso d’une feuille format A4et invite le malade à poser des questions.Cette enquête montre que malgré cela,8 % des patients l’ont signé sans l’avoirlu.

Les patients qui n’ont pas lu leconsentement étaient moins satisfaitsde l’information reçue que ceux quil’avaient lu. Paradoxalement c’était lespatients qui ne lisaient pas le formulairede consentement qui semblaient le trou-ver le plus utile à leur prise en charge.

Globalement la forte adhésion auformulaire de consentement éclairé(82,5 % des patients l’ont estimé néces-saire) laisse penser que son existencemême rassure, faisant supposer uneattention particulière de l’équipe. Lasignature du formulaire de consente-ment était effectuée sans difficulté partous les patients qui semblaient trouvercette démarche normale. Il s’agit d’uneévolution rapide des mentalités proba-blement accélérée par le rôle des médiassur le sujet.

Le recueil écrit du consentement dumalade n’était pas habituel en Francejusqu’en 1997. Il a même longtemps été

déconseillé sous prétexte d’altérer laconfiance du malade en son médecin.Depuis l’arrêt Hédreul de la Cour deCassation du 25 février 1997 [3], cer-tains conseils juridiques recommandentau médecin de constituer une preuveécrite de l’information donnée, signéedu malade [4]. L’Agence Nationaled’Accréditation et d’Évaluation de laSanté (ANAES) a recommandé un for-mulaire distinct de toute fiche d’infor-mation dans lequel le patient reconnaîtqu’il a reçu les informations adéquateset qu’il les a comprises [5]. En 2000,30 % des malades interrogés étaientchoqués par la demande de signatured’un consentement éclairé avant un acted’endoscopie [6]. Une fiche de ce typeavait été proposée en 1998 [7].

Les patients compliqués n’étantpas assez nombreux pour différencierceux ayant lu ou non le consentementéclairé. Une nouvelle étude n’incluantque les patients compliqués devraitêtre effectuée pour connaitre l’impactdu consentement éclairé sur ce groupede patients.

Conclusion

Le formulaire de recueil de consente-ment offre une base pour informer les

patients, mais ne dispense en aucun casle chirurgien de cette charge que ce soiten pré- ou en post-opératoire.

Environ un patient sur dix signe leformulaire de consentement éclairésans l’avoir lu. Paradoxalement ce sontces mêmes patients qui sont le moinssatisfait de l’information reçue.

Plus de huit patients sur 10 estimentque le formulaire est utile à leur priseen charge.

Références

1. Arrêt Mercier. Cassation civile. 20 mai1936.

2. Code de la Santé Publique ; n

°

R.4127-35.

3. Arrêt Hedreul. Cassation Civile. Cham-bre civile 1. 25 février 1997.

4. Sargos P, Pellerin D, Glorion B. Patienteducation by the surgeon. Juridical as-pects, ethical aspects, deontologic as-pects. Chirurgie 1998;123:85-95.

5. ANAES. Recommandations destinéesaux médecins. Mars 2000.

6. Denis B, Bottlaender J, Goineau J

et al.

Consentement éclairé en endoscopie di-gestive : enquête d’opinion auprès desmalades. Gastroenterol Clin Biol 2002;26:675-679.

7. Cardin JL. L’information au patient. JChir 1998;135:146-147.