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N O U V E L L E S S C I E N T I F I Q U E S

MAI - JUIN - JUILLET 1998 LETTRE DES SCIENCES CHIMIQUES N° 66

Les fibres optiques monomodesQuand la science des matériaux et del’optique se propagent à la même vitesse

Avec l'engorgement des autoroutes de l'information, on impose aux fibres optiques des débits d'in-formation de plus en plus élevé (30 canaux à 40 Gbits/s ont été publiés à OFC'98). Ces améliorationentraînent des recherches fondamentales dont certaines sont présentées ici. Dans cet article, jedécris quelles sont les caractéristiques optiques des fibres monomodes, comment elles sont élabo-rées, dans quelles applications autres que le transport d'information on les rencontre : fibres ampli-ficatrices, éléments réflecteurs à base de filtre de Bragg. L'objectif est de montrer que des pro-blèmes de mise en œuvre industrielle entraînent parfois une réflexion fondamentale. C'est ainsi quel'on découvre que la physicochimie dans les verres est très différente de celle en milieu liquide oucristallin. La maîtrise de la microstructure d'un verre est un objectif important pour les applicationsindustrielles. Ici, des défaut ponctuels de la silice sont utilisés pour obtenir des variations perma-nentes d'indice ou des effets non linéaires.

L

es fibres optiques, vous en avez entenduparler pour internet, au sujet de la

construction des autoroutes de l’informa-tion. Vous savez à travers la lecture de vosquotidiens ou revues préférés que grâce àelles vous pourrez recevoir de plus en plusde services sur votre ordinateur personnel(voir le très bon article paru dans la

Recherche n° 297, avril 1997, p. 64. Des mil-lions de conversations dans une fibreoptique). Vous n’avez pas oublié vos coursde premières années expliquant que lalumière est guidée par réflexion multipledans des milieux transparents (eau ouverre), ce qui permet d’obtenir des effetsaussi jolis que spectaculaires dans les fon-taines lumineuses parisiennes ou les lam-padaires en fibres de verre. Les fibres utili-sées pour le transport et le traitement del’information sont très différentes des pre-mières fibres inventées par le FrançaisI. Dubus-Bonnel en 1836. Celles-ci étaientobtenues par simple étirage dans le chalu-meau, de verres multicomposants conte-nant silice, oxyde de bore, oxydes alcalinset bien d’autres oxydes encore. Leur dia-mètre était large et assez irrégulier. Lesfibres actuelles perfectionnées en 1955 parl’anglais N. Kapani sont élaborées à partir

de silice et d’oxydes ultra purs et ont undiamètre de 125,0 microns à 0,1 micronsprès. Elles présentent en elles une struc-ture d’indice guidante. Dans les premièresfibres de transport (vers les années 1960 à1980), la lumière se propageait sous formede faisceau (ensemble de rayons lumineux)se réfléchissant totalement sur les surfacesinternes suivant les relations de Descartes.Dans les fibres actuelles, c’est un rayonlumineux qui se propage « attiré » par unindice légèrement plus élevé au centre : lecœur de la fibre. Du fait, de la taille ducœur comparable à celle de la longueurd’onde, la propagation est quantifiée sousforme de modes. Ces modes ne se propa-gent pas à la même vitesse ; s’ils portent lemême message, ce dernier sera finalementbrouillé. Pour éviter cela, les ingénieurs ontcompris qu’il suffisait de diminuer le dia-mètre du cœur jusqu’à 4 à 6 microns. Cetteexigence a conduit à mettre au point desméthodes d’élaboration de dépôt en phasevapeur (CVD en anglais, brevet CorningGlass Works 1970) (voir encadré Elabora-tion d’une fibre monomode et structure).

La première utilisation des fibres est letransport des télécommunications, unarticle déjà cité plus haut de mes collègues

d’Alcatel-Alsthom décrit tous les espoirsque suscitent les progrès récents réaliséssur ce fil de verre. Mais, si le transport estune fonction à assurer pour l’achemine-ment des gros volumes d’information, letraitement du signal doit lui aussi être réa-lisé à la vitesse de la lumière. Pour cela, onutilise des fibres de structure interneencore plus élaborée contenant parfois desdopants spécifiques de la fonction à assurer.Ainsi, il est nécessaire pour les liaisonssous-marines de réamplifier le signaloptique à intervalles réguliers (100 km).Cette fonction est assurée par des fibresdont le cœur est dopé avec de l’erbium(typ. 500 ppm). L’erbium est pompé parune source super luminescente (une diodelaser AsGaAl émettant vers 1,38 microns)de son état fondamental 4I5/2 vers un étatexcité 4I13/2. Il réémet entre les mêmesniveaux (mais pas les mêmes sous-niveaux) vers 1,4-1,55 microns. Cette fibreétant soudée à la fibre de transport, lesignal la traverse et se retrouve amplifié.D’autres amplificateurs fonctionnant àd’autres longueurs d’onde sont à l’étudepour d’autres applications.Pour réaliser un laser à partir d’une fibrecomme celle décrite ci-dessus, il suffit de for-

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Figure 2. Installation MCVD de réalisation d’une préforme.

Alcatel-Alsthom Recherche

Contrôle des gaz réactifsContrôle de la surpression dans le tube dépôtContrôle de la température

* DM = Débimètre massique

O2

Camérainfra-rouge

Pyromètre

O2

H2

Extractiondes gaz

CF2Cl2

Micro-ordinateur

D

M

D

M

D

M

D

M

D

M

SiCl4

POCl3

GeCl4

D

M

D

M

ELABORATION ET STRUCTURE D’UNE FIBRE MONOMODE

La réalisation d’une fibre optique s’effectue en deuxétapes : la fabrication d’une préforme et le fibrage.La préforme (comme son nom l’indique) possède lamême structure interne que la fibre en final, maiselle possède un diamètre de 15 à 100 mm suivant ladestination (recherche ou production) et une lon-gueur de 1 à 1,5 m. Elle est réalisée sur un tour deverrier à partir d’un tube de silice de haute pureté(concentration en OH de l’ordre de quelques ppm oumoins, qualité Heralux de Heraeus, par exemple). Al’intérieur de ce tube sont déposées par couches suc-cessives de 10 microns, les différentes structures dela future fibre : le cœur et la gaine optique isolant cecœur du tube de qualité optique insuffisante pour letransport des télécommunications sur des grandesdistances. Il faudra entre 12 et 32 couches pour lagaine et 4 à 10 pour le cœur. Les dépôts sont lerésultat de l’oxydation de chlorures de silicium, degermanium, de phosphore ou de fréon. La réactiond’oxydation est contrôlée précisément par unensemble de débitmètres massiques maîtrisant lesconcentrations, la température du chalumeau (entre1 700 et 1 900 °C) et la pression (fig. 2). La réactions’effectue en trois étapes : la formation des suies lorsdu passage des gaz dans le chalumeau, le dépôt dessuies en avant du chalumeau et la vitrification dessuies quand le chalumeau se déplace. Une fois lesdifférentes couches déposées et la structure termi-née, il demeure un trou qu’il faut refermer. Celas’effectue par augmentation de la température duchalumeau jusqu’au ramollissement du tube qui partension superficielle se rétrécit en même temps queles mors du tour s’éloignent.

L’étape suivante est le fibrage (fig. 3). La préforme estplacée au sommet d’une tour de près de 10 m de hau-teur dans un four graphite. La fibre est formée parsimple étirage laminaire; la vitesse et la températurede fibrage déterminent son diamètre qui est contrôlépar la diffraction d’un laser. Une fois amorcée, la fibrepasse dans une filière pour se recouvrir d’une pre-mière couche de résine silicone, celle-ci est polymé-risée par irradiation UV. Cette première couche estsouple pour ne pas introduire de contrainte sur lafibre mais la protéger des agressions chimiques. Unedeuxième couche de polymère, plus résistante méca-niquement est ensuite déposée sur la première.

La structure finale de la fibre est celle que nous voyonssur la figure 4. Le diamètre du cœur est de 4 à 6microns. Il est constitué de verre binaire de silicecontenant entre 6 à 30 % de GeO2 en mole. La gaineest formée d’une silice dopée de 0,1 à 1 % en mole dephosphore, fluor, germanium. Son indice est compa-rable à la silice pure mais plus faible de 1 à 3 10–2. Lesimpuretés métalliques dans ces deux parties nedépassent pas les quelques 10–9. L’atténuation dans lecœur est de l’ordre d’un facteur 10 sur 50 km.

Plusieurs fibres (quatre ou six) sont ensuite noyéesdans une graisse contenue dans une structureconstituant le câble de transport (fig. 5). Le diamètredu câble est de quelques dizaines de mm pour lesliaisons sous-marines.

Figure 1. Elaboration d’une préforme par méthode CVD dite modifiée(MCVD).

Réalisation du dépôt de gaine et decœur par couches successives de10 microns. Le nombre de couchesde gaine varie entre 12 et 32 et lenombre de couches de cœur est entre4 et 90 selon le type de fibres.

Réactions chimiques et formation desuies

Dépôt de suies

Vitrification du dépôt

RÉALISATION DE LA PRÉFORME

Dépôt de gaine tube de silice

Dépôt de cœur

Chalumeau mobile(oxygène hydrogène)

Synthèse de la siliceSiC14 + O2

SiO2 + 2.C12DopagesGeC14 + O2 GeO2 + 2.C124.POC12 + 3.O2 2.P2O5 + 4.C12

Rétreint

2 000° C

1 700° C

25 mm

réactif gazeuxextraction

suies

ooo

réactif gazeux suiesextraction

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sible d’inscrire de manière per-manente des variations pério-diques faibles de l’indice deréfraction en appliquant uninterférogramme UV sur le cotéd’une fibre à cœur germanosili-cate. On produit ainsi un réseaud’indice qui suivant la loi deBragg réfléchit les rayons lumi-neux dont la longueur d’ondeest en accord avec le pas duréseau. Le mécanisme condui-sant à cette variation d’indiceest en cours d’étude au niveaufrançais dans deux laboratoires :

celui du groupe de P. Niay et M. Douay àLille et le mien).Les mécanismes de cette photoréfractivitévarient suivant le matériau utilisé, la lon-gueur d’onde du laser ou la durée d’irradia-tion; certains sont décrits dans l’encadré« Elaboration d’un réseau de Bragg ».L’objectif dans notre groupe est de lesmodéliser pour les optimiser, découvrir denouveaux dopants et prévoir les durées devie des dispositifs.Pour cela, nous avons recours à des ciné-tiques spécifiques du milieu vitreux2. Dansun milieu solide cristallisé, pour réaliserune réaction physico-chimique, une espècesituée en un point doit franchir une bar-rière énergétique que ce soit pour rencon-trer une autre espèce ou pour adopter uneautre configuration. Elle est toujours lamême quel que soit le lieu où s’effectue laréaction et elle y progressera sans diffé-rence. On peut de manière égale, considé-rer un point et étudier son évolution tem-porelle ou considérer un intervalle detemps et étudier sa distribution spatiale;cette équivalence s’appelle ergodicité.Dans un milieu vitreux où il existe undésordre à longue distance, les cheminsphysico-chimiques pour aller d’un état à unautre ne sont plus uniques, il sont nom-breux mais certains sont cependant plusfréquents que d’autres. Ils sont distribuéset leur statistique correspond au type dedésordre du verre. L’énergie d’activation dela réaction chimique est donc d’unemanière générale distribuée, elle aussi.Elle peut être plus faible à certains

Figure 3. Tour de fibrage. Alcatel-Alsthom Recherche

Hauteur : 7,2 mHeight

Vitesse de fibrage : 100 m/mnDraving speed

Dispositif de recettede la fibreWinding up unit

Dispositif de translation de la préformePreform feed unit

PréformPreform

Four de fibrage chaufféà ≈ 2 000°C par effet JouleDrawing furnace

Mesure du diamètre de la fibreFiber diameter measurement

Fibre non revêtue ø 125 mmUncoated fiber

FilièreCoating cup

Caisson d'irradiation U-VU-V curing oven

Contrôle du centragede la fibreCoating concentricity checkingFilièreCoating cup

2 caissons d'irradiation U-V2 u-v curing ovens

CabestanCapstan

Mesure de la tension de fibrageFiber tension measurement

Gainage secondairerigide ø 240 µmTough secondary buffer

Gainage primairesouple ø 210 µmSoft primary buffer

Contrôle de centragede la fibreCoating concentricity checking

Figure 4. Constitution d’une fibre optique.

Cœur ultra transparent à 1,5 µm

(÷ 10 sur 50 km)verre binaire

Si02-GeO2indice 1,45

Gaine optique transparente permet le guidageindice plus faible que le cœur de 1-3.10–2, P : F : Ge : SiO2

Tube de silice pure

Couverture silicone

ø 125 µm

ø 4-6 µm

ø 250 µm

Index Profile

9 + 9

+ .006

Radius (mm)

1G 2G 3G*

Diamètre module optique - Optical module OD (mm) 5.7 4.7 2.3Mou de fibre - Fiber over length (%) 1 0.5 0Nombre de fils acier - Steel wires 36 36 24Poids dans l'eau - Weight in water (T/kmm) 0.636 0.427 0.201Charge de rupture - Breaking load (kN) 14 000 10 500 6 500Résistance ohmique - Resistance (Ω/km) 0.65 1.15 1 à 10Diamètre extérieur - OD (mm) 25 21.5 13Module - Module (km) 22 24.5 32

Figure 5. Câbles sous-marins (grand fond) 0,2 T/km.

Al

cate

l-Als

thom

Rec

herc

he

Tube conducteur encuivre (1 à 10 Ω/km)(retour par la mer)

Isolation en polyéthylènediamètre extérieur 13 mm

Fils d'acier (voûte)

Module optiquediamètre 2,3 mm

Module optique

Fibre optique

Jonc plastique àrainure en hélice

Graissehydrofuge

Gaine en polyéthylène

Porteur central en acier

mer une cavité résonante. Pour cela, il fautplacer de part et d’autre de la cavité amplifi-catrice, des éléments réfléchissant partielle-ment. Dans les dispositifs classiques, cettefonction est assurée par des miroirs, l’unréfléchissant totalement et l’autre à 99 %.Dans le cas des fibres, il est possible d’utili-ser la propriété de photosensibilité aux UVdu matériau constituant le cœur pour élabo-rer des éléments réfléchissants plus perfor-mants : les réseaux de Bragg.

Attardons nous quelque peu sur cetteapplication qui est actuellement en pleindéveloppement. Il a été remarqué par unchercheur Canadien en 1978 qu’il était pos-

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Figure 6. Dispositif d’écriture.

ECRITURE D'UN RÉSEAU DANS UNE FIBRE

Laser 240-260 nm

Analyseur de spectre

Source blanche

θ

Pas du réseau ∧ ≈ µ m

Croissance de la réflectivité au cours du temps

t = quelques minutes

IUV = 300 mJ / cm2.impulsionfréquence = 10 Hz

Longueur d'onde

λB = 2.pas du réseau

La réflectivité augmente, un réseau d'indice apparaît

Indice de réfraction

L'indice augmente mais faiblement (10–3). Il est difficile de mettre enévidence cette faible variation autrement que par la diffraction.

1,446

1,445Axe du réseau

Pour produire des franges d’interférence,on dédouble le faisceau de lumière dulaser UV (fig. 6). Puis on fait superposer lesdeux faisceaux ainsi obtenus. Dans la zonede superposition tous les points ne sontpas à égale distance de la source; la phasedes deux ondes issues des deux cheminsn’est de ce fait pas la même. Suivant ledéphasage la lumière s’ajoute ou sedétruit; des interférences apparaissent,elles forment un interférogramme. Celui-ciest alors appliqué à la fibre préalablementdégainée de sa couche de silicone. Lalumière UV traverse la partie de la fibrenon dopée en germanium et pénètre dansle cœur où elle est fortement absorbée. Ilse produit alors des transformations phy-sico-chimiques qui conduisent à unevariation d’indice.Notre compréhension des mécanismesdans les fibres à cœur germanosilicate estla suivante. La première étape est une pho-toabsorption de la lumière du laser par unebande d’absorption d’un défaut du verre desilice dopée germanium : la lacune d’oxy-gène. L’absorption par ce défaut donneensuite lieu à plusieurs transformations :1) création d’autres bandes d’absorptioncorrespondant à d’autres défauts (photo-chromisme) ;2) augmentation de la densité du verre(photocompaction) ;3) création de contraintes (photoélasticité).Nous avons déterminé que le premier méca-nisme contribuait à la variation d’indice deréfraction pour environ 10 %, le dernier pourenviron 20 %, la variation d’indice est doncproduit en majeure partie par le secondmécanisme. Ces deux derniers produisentune variation de volume locale que nousavons mis en évidence sur des préformes defibres (fig. 7)1.Le réseau ainsi crée se comporte commeun filtre (fig. 8). Un rayon lumineux dont lalongueur d’onde est en accord avec la rela-tion de Bragg sera réfléchi alors que lesautres longueurs d’onde ne seront pasmodifiées. Si on considère un faisceau degrande largeur spectrale, il sera filtré de lalongueur d’onde qui est en accord avec leréseau. La finesse du filtrage dépend dunombre de traits par unité de longueur etde l’intensité de la variation d’indice impri-mée. On a démontré qu’une finesse de 500MHz était possible. A partir de cet élément,beaucoup d’autres applications sont envi-sageables, certaines sont citées sur lafigure 9.

1. Hommage rendu au Professeur Jean Rouxel, qui cite dansson article « Chimie des solides : une autre chimie », Lettredes Sciences chimiques n° 65, page 6, que « le défautdevient souvent plus important que la matrice qui le contient ».

ELABORATION D’UN RÉSEAU DE BRAGG : QUAND UN DÉFAUT

DEVIENT UNE QUALITÉ1

U.V. U.V.

Intensité U.V.

0

1

Figure 7. Ondulations de surface produites par l’interaction de l’interférogramme UV avec la surfacedu cœur d’une préforme de fibre.

Oblique Plot

Surface Map

Profile Plot

yMax : nm

yMin : nm

xMax : mm

xMin : mm

yDst : + 40.48 nm

xDst : + 88 mm

Update Calipers

Reset Prof PV

Set Trace

Level Axes CtI0ff

PV 169.98 nm

rms 9.68 nm

Ra 7.14 nm

Size X 0.18 mm

Size Y 0.16 mm Points 60077 Removed : Plane Trimmed : 0 Filter : Off

+ 124.88

nm

– 45.100.165

mm

0.000

0.101mm0.000

+ 124.88

nm

– 45.10

Surface Profile

50.00

0.00

25.00

37.50

12.50

0 50 100 150

PV 40.00 nm

rms 9.74 nm

Ra 6.90 nm

Profile Stats

Re1 Distance (µm)

Rel H

eigh

t (nm

)

6a

6b

6c

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conjugaison de la dispersion chromatiquelinéaire et non linéaire. La première contri-bution linéaire a une tendance à élargirune impulsion, la seconde non linéaire à lacomprimer. En jouant sur la structure duguide et sur l’intensité du signal, il est pos-sible de faire en sorte que les deux se com-pensent pour permettre une propagationsans déformation et donc plus grande sansamplification.Généralement les effets non linéairesappa-raissent pour des densités de puissanceélevées. Or la structure guidante de la fibreest particulièrement adaptée pour per-mettre la propagation d’une forte densitésur une grande distance. Cet avantage per-met d’obtenir des interactions nombreusesmême avec des coefficients non linéairesfaibles comme ceux de la silice.Ainsi, on peut citer le Raman stimulé.L’effet Raman est l’émission d’une lumièredont la longueur d’onde diffère de la lon-gueur d’onde incidente d’une quantité cor-respondant à l’écart entre un niveau d’éner-gie fondamental et un niveau vibrationneldu matériau (voir encadré : un effet Ramantrès stimulé.). Cette lumière diffusée estassez puissante pour donner lieu à son tourà une autre lumière diffusée. Au fur et àmesure de la propagation dans la fibre, lalumière verte du laser peut ainsi évoluervers le jaune jusqu’au rouge. Pour des rai-sons d’efficacité de couplage, le modechange au cours de la propagation. Ce phé-nomène donne lieu à de jolies imagesquand la lumière est collectée en sortie defibre (voir photo). L’efficacité de cet effet estd’autant plus grand que la fibre contient dugermanium mais aussi d’autant plus que lafibre a été élaborée en milieu réducteur.La fibre peut évoluer sous illumination, latransformation conduisant à une variationd’indice est un exemple. Il en existe d’autres

Figure 8. Fonction filtrante d’un réseau de Bragg. Alcatel-Alsthom Recherche

PRINCIPE DE FONCTIONNEMENT D'UN FILTRE DE BRAGG

λ

Pn

z

P

λλΒ

λΒ = 2neffΛ

P

λΒ λ

Spectre en entrée

Specte en réflexion

Cœur de la fibre

Profile d'indice

Spectre en transmission

APPLICATIONS

Figure 9. Quelques applications des réseaux de Bragg. Alcatel-Alsthom Recherche

FILTRES CAPTEURS LASER À FIBRE

• WDM–> filtre en réflexion

ou en transmission

• ETALON–> en longueur d'ondes

pour sources

• AMPLIFICATEURS–> égalisation spectrale

du gain

–> capteurs detempérature et dedéformation

–> capteurs multiplexésen longueur d'onde

–> dopants : Er, Nd, Yb,...–> ∆ν = qq 10 Khz–> Pout = qq mW

–> accordable–> multi-longueur d'onde

λB(T, ε)

∆λB––– ≈ 0,015 nm/°C∆T∆λB––– ≈ 1 pm/µε∆ε

λp λB

R2R1

endroits que d’autres; la réaction élémen-taire se fera alors plus rapidement. Celaimplique qu’à certains endroits dans lesolide, la réaction sera terminée alors qu’àd’autres elle n’aura pas commencé. La pro-priété d’ergodicité a disparu. Ce phéno-mène est passionnant à certains égards.On peut par exemple considérer qu’uneréaction est une horloge. Le degré d’avan-cement permet de connaître la durée écou-lée. Dans le verre, du fait de la variétéd’énergie d’activation, ces horloges ne vontpas à la même vitesse. Le temps nes’écoule pas de la même façon en toutpoint du verre. Certains points sont dans lepassé alors que d’autres sont déjà dans lefutur. Ainsi le verre, possède son histoireinscrite dans sa structure. Plus encore, onpeut montrer que du fait de la distributiond’énergie, la stabilité d’une transformationaugmente avec la durée du traitement ousa température. C’est exactement comme

le clou dans une planche en bois; il tientd’autant mieux qu’on l’enfonce. Parailleurs, si on recuit le matériau on aug-mente la stabilité relative du système, onefface les réactions les moins stables enprogressant vers les plus stables, celles quisont demeurées dans le passé; on voit làque l’on peut remonter d’une certainefaçon dans le temps.Les progrès effectués dans le domaine deces cinétiques non-ergodiques permettentd’améliorer les prédictions de durée devie des systèmes à base d’effets photoré-fractifs.D’autres effets sont étudiés dans les fibresoptiques, c’est le cas d’effets nonlinéaires3, 4 . Je ne peux les exposer tous.Parmi les plus importants actuellement, lapropagation des solitons (impulsions solu-tions particulières des équations de propa-gation; elles ne diminuent pas d’amplitudeau cours de la propagation) impliquent une

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comme le doublage de fréquence. Ce phé-nomène est l’obtention d’une lumière delongueur d’onde moitié de la lumière depompe. Ainsi, en utilisant par exemple unlaser YAG (le milieu fluorescent est le Gre-nat d’yttrium et d’aluminium) émettant à1,064 microns (infrarouge) on obtiendra unelumière dans le vert à 532 nm. Ce phéno-mène bien connu par ailleurs requiert desconditions d’antisymétrie du milieu etd’accord de phase entre les ondes. La pre-mière est satisfaite dans les cristaux; elle estinterdite dans les verres du fait de leur struc-ture centrosymétrique. Néanmoins, le dou-blage de fréquence peut être observé aprèsquelques minutes d’irradiation (voir fig. 13).Il provient d’une part d’une absorption mul-

Le phénomène de diffusion Raman est unprocessus quasi-élastique. Il correspondà la création d’un photon de longueurd’onde plus grande (processus Stokes :physicien irlandais 1819-1903) ou pluscourt (processus antiStokes). C’est unediffusion cohérente comme la diffusionRayleigh (qui, elle, est élastique, la cou-leur bleue du ciel) ou Brillouin (quasi-élastique, couplage avec une onde acous-tique). Le schéma de niveaux duprocessus Stokes est une quasi-absorp-

tion correspondant à une transition dusolide de l’état fondamental à un niveauvirtuel suivi d’une émission vers unniveau vibrationnel excité. La probabilitéd’émission est proportionnelle à la sec-tion efficace de diffusion Raman. Pour leprocessus antiStokes, le chemin estinverse, partant d’un état excité pourrejoindre l’état fondamental. La lumièreStokes est de forme symétrique mais elleest cependant plus faible.Dans le cas d’un effet stimulé, l’intensité

de la lumière de pompage est suffisam-ment intense pour permettre une inver-sion de population et par conséquent uneamplification du signal Raman spontané.La lumière diffusée est alors proportion-nelle à l’exponentielle de la section dediffusion Raman et de la distance de pro-pagation. Elle peut devenir suffisammentintense pour donner lieu à son tour à uneautre diffusion et ainsi de suite. Cettesuccession produit une cascade de raiesdont la figure 11 est un exemple.

UN EFFET RAMAN TRES STIMULÉ.

Emission StokesL'énergie estinférieure àl'énergie de lapompe

état vibrationnel excité

Processus Stokes

Figure 10. Schéma de niveaux correspondant aux processus Raman (PrixNobel 1930).

Niveau virtuel

Pompe d'excitationex. : 532 nm

Energie de lalumière diffusée

Spectre de diffusion Raman spontané

Intensitéde la lumièrediffuséeétat fondamental

Processus antiStokesNiveau virtuel

Pompe d'excitationex. : 532 nm

Emission antiStokesL'énergie est supérieure à l'énergiede la pompe

Intensitéde la lumièrediffusée

Energiede la lumière

diffusée

état vibrationnel excité

état fondamental

Spectre de diffusion Raman spontané

Figure 11. Analyse spectrale correspondant à la photographie en fig. 12. Lespectre est composé d’effets Raman stimulés successifs ainsi que demélanges de photons (processus à quatre photons).

Fibre à cœur Ge,SiO2 et gaine P,F : SiO2

Raie laserYAG doublé

puissance moyenne0,5 mW

FPM

FPM

FPM

FPM

FPM

650 600 550 λ (nm)

R5 599

A

R4587

R2558 R1

545R3

572

R# : raie de diffusion Raman Stokes multipleA : raie antiStokesFPM : raie obtenue par mélange à 4 ondes

532

tiphotonique qui conduit à un déplacementde charges des zones éclairées vers leszones sombres brisant ainsi la symétrie etd’autre part de la superposition des ondeslumineuses (infrarouge et verte) quiconstruisent d’elles mêmes leur accord dephase. Les études spectroscopiques ontpermis de découvrir que des lacunes d’oxy-gène étaient à l’origine de ce phénomène.Plusieurs effets utiles pour le traitementoptique de l’information sont ainsi produitsà partir du verre de silice. Leur maîtrise par-ticipe à améliorer les qualités des fibresoptiques et à progresser sur le chemin del’application. Mais au fur et à mesure desprogrès réalisés sur les matériaux, les struc-tures de fibres sont modifiées, adaptées et

on découvre parfois d’autres phénomènes.Cette synergie qui fonctionne efficacementdepuis une dizaine d’années dans les fibresoptiques s’oriente maintenant pour réussirl’intégration des fonctions sur des substratsplans (optique intégrée). Une autre histoirecommence...

Remerciements :

Enfin, je voudrais remercier chaleureu-sement mes collègues de l’Université deLille (P. Niay, M. Douay) et d’Alcatel(J.M. Gabriagues, H. Février, J. Augé,P. Sansonetti, C. Le Sergent, I. Riant)pour l’aide qu’ils m’ont apporté dans larédaction de cet article.

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N O U V E L L E S S C I E N T I F I Q U E S

MAI - JUIN - JUILLET 1998 LETTRE DES SCIENCES CHIMIQUES N° 66

Pendant et après la stimulation

Fig. 12. Photographie en champ lointain de lalumière collectée à la sortie de la fibre.

Figure 13. Images en champ lointain. a) lumièred’ensemencement b) lumière engendrée pardoublage de fréquence. Du fait de l’intensitésuffisamment grande de la lumière verte pro-duite par doublage de fréquence, d’autres cou-leurs apparaissent provenant principalementd’effets Raman stimulés.

GÉNÉRATION DU VISIBLE À PARTIRDE L’INVISIBLE.

L’injection d’une lumière infrarouged’intensité suffisamment élevée (10 GW/cm2) dans une fibre à cœur germanosili-cate produit l’apparition au bout dequelques dizaines de minutes d’unelumière visible. Si un laser émettantdans l’infrarouge à 1,064 microns estutilisé, on collecte une lumière verte à532 nm dont l’intensité croit avec letemps. Au départ, une très faiblelumière verte est créée par effet quadri-polaire. Celle-ci est absorbée dans unprocessus à deux photons par unelacune d’oxygène du matériau ainsi quela lumière infrarouge par absorption àquatre photons. Ces absorptions quiinterférent entre elles fournissent desélectrons qui se délocalisent vers leszones non illuminées en accord de phaseavec les ondes infrarouge et verte. Lacentrosymétrie est ainsi brisée etl’accord de phase construit. Le doublagede fréquence s’effectue alors beaucoupplus efficacement à travers un couplagedipolaire.Il est possible de surseoir à cettepériode d’attente en ensemençant lafibre avec une lumière verte extérieureobtenue à l’aide d’un cristal doubleur(KTP par exemple). On peut injecter deslumières infrarouge et verte cohérentesentre elles simultanément dans la fibrependant quelques secondes avant decouper la composante visible externe;le déplacement de charge est alorsconstruit beaucoup plus efficacement.La figure 13a montre la lumière verted’ensemencement qui a été injectée icivolontairement dans un mode de pro-pagation d’ordre élevé. La figure 13bfaisant apparaître le même mode per-met d’affirmer que la génération delumière visible par la fibre est impriméepar le processus de préparation.

a

b

Bibliographie :

1. B. Poumellec and F. Kherbouche (1996).« The photorefractive Bragg gratings in thefibers for telecommunications », Journal dePhysique III, 6, 1595-1624.2. B. Poumellec (1998), « Links betweenwriting and erasure (or stability) of Bragggratings in disordered media ». Journal ofNon-Crystalline Solids, accepted 01/98.

3. B. Poumellec, J. Delaire, J.F. Delouis andH. Fevrier (1993), « Time response of fluo-rescence-like emissions in silica-basedoptical fibers », Optics Communications 99,135-146.4. B. Poumellec (1994), « Measurement andinterpretation of fluorescence-like emis-sion in silica-based optical fiber », Photosen-sitivity and solf-organisation in optical fibers andwaveguides, Québec, Canada, SPIE.

Bertrand POUMELLEC

Laboratoire de thermodynamique etphysicochimie des matériauxBât. 415, Université Paris Sud91405 Orsay CedexTél. : 01 69 15 63 51Fax : 01 69 15 47 97E-mail : [email protected]