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À la fin des années 70, les écologistes s’étaient mobilisés pour préserver les prairies Saint-Martin d’une pénétrante à quatre voies. Aujourd’hui, c’est un projet de parc urbain qui s’annonce. Un projet qui traduit une certaine conception de la nature, de l’urbanisme et de la démocratie locale. Pour Europe Ecologie Les Verts, l’objectif est de réussir la ville dense en l’ouvrant sur la nature, mais sans faire abstraction de la valeur patrimoniale, sociale et écologique des milieux naturels et humains. Groupe de Rennes Analyse et propositions Les prairies Saint-Martin et le projet municipal de parc naturel urbain PENSER DIFFÉREMMENT L’AVENIR DES PRAIRIES UN BASSIN D’EXPANSION QUI NE DIT PAS SON NOM Situé au nord des prairies Saint-Martin, le projet de ZAC Armorique était dans les cartons depuis 2005. Sa mise en œuvre débute en 2010. Le terrain est situé pour partie en zone inondable. Il est remblayé. Problème : ces remblais font obstacle à l'expansion des crues et amènent la Préfecture à imposer à la Ville des mesures compensatoires. En pratique, ces mesures compensatoires vont prendre la forme d’un bassin de rétention temporaire, qui sera installé aux prairies St-Martin et requalifié en « parc naturel urbain ». La Préfecture n’aurait donc rien exigé de la Ville si cette dernière n’avait eu des projets de construction en amont des prairies. Ainsi, pour pouvoir construire dans d’autres zones inondables, la Mairie a fait le choix de supprimer les jardins familiaux (120 parcelles et des abris coûteusement restaurés en 2006) et des espaces naturels aux prairies. Dans une brochure de 1995 ¹, elle souligne pourtant l’intérêt à la fois social («une petite ville où cha- cun se connaît») et écologique des lieux («un petit paradis de la faune et de la flore»). Les prairies Saint-Martin aujourd’hui. En amont des prairies, la ZAC Armorique, en construction. Le projet municipal de parc urbain. Plutôt qu’une vision du "naturel" où l’homme est au pire consommateur (d’activités de loisir) au mieux observateur (des oiseaux sauvages et vaches prenant un bain de pattes) mais reste extérieur à cette nature, EELV défend une approche mêlant nature et vie urbaine. Agence Base L'arrêté préfectoral du 26/10/2010 ² accorde à la Ville la possibilité d'ériger une digue avec une zone remblayée sous réserve, notamment, qu'un volume de 60 000 m3 de terrain soit trouvé pour compenser la zone d'expan- sion des crues perdue à cause « des différents projets » d'urbanisme rennais (on comprendra principalement les remblais dont l'autorisation de construction est condition- née par ce point). Les bassins de rétention et d’expansion temporaire sont une solution très coûteuse qui consiste à aménager des zones (le plus souvent des parcs, comme c’est le cas ici) ca- pables d’accueillir l’eau des crues. Le même type de solution a, par exemple, été développé pour le quartier des Trois-Ri- vières, à Stains (Seine-Saint-Denis). Europe Ecologie Les Verts Rennes - septembre 2012

Les prairies Saint-Martin et le projet municipal de parc urbain à Rennes

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À la fin des années 70, les écologistes s’étaient mobilisés pour préserver les prairies Saint-Martin d’une pénétrante à quatre voies. Aujourd’hui, c’est un projet de parc urbain qui s’annonce. Un projet qui traduit une certaine conception de la nature, de l’urbanisme et de la démocratie locale.

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Page 1: Les prairies Saint-Martin et le projet municipal de parc urbain à Rennes

À la fin des années 70, les écologistes s’étaient mobilisés pour préserver les prairies Saint-Martin d’une pénétrante à quatre voies. Aujourd’hui, c’est un projet de parc urbain qui s’annonce. Un projet qui traduit une certaine conception de la nature, de l’urbanisme et de la démocratie locale.

Pour Europe Ecologie Les Verts, l’objectif est de réussir la ville dense en l’ouvrant sur la nature, mais sans faire abstraction de la valeur patrimoniale, sociale et écologique des milieux naturels et humains. Groupe de Rennes

Analyse et propositions

Les prairies Saint-Martin et le projet municipal de parc naturel urbain

PENSER DIFFÉREMMENT L’AVENIR DES PRAIRIES

UN BASSIN D’EXPANSION QUI NE DIT PAS SON NOMSitué au nord des prairies Saint-Martin, le projet de ZAC Armorique était dans les cartons depuis 2005. Sa mise en œuvre débute en 2010. Le terrain est situé pour partie en zone inondable. Il est remblayé. Problème : ces remblais font obstacle à l'expansion des crues et amènent la Préfecture à imposer à la Ville des mesures compensatoires.

En pratique, ces mesures compensatoires vont prendre la forme d’un bassin de rétention temporaire, qui sera installé aux prairies St-Martin et requalifié en « parc naturel urbain ».

La Préfecture n’aurait donc rien exigé de la Ville si cette dernière n’avait eu des projets de construction en amont des prairies. Ainsi, pour pouvoir construire dans d’autres zones inondables, la Mairie a fait le choix de supprimer les jardins familiaux (120 parcelles et des abris coûteusement restaurés en 2006) et des espaces naturels aux prairies. Dans une brochure de 1995 ¹, elle souligne pourtant l’intérêt à la fois social («une petite ville où cha-cun se connaît») et écologique des lieux («un petit paradis de la faune et de la flore»).

Les prairies Saint-Martin aujourd’hui.

En amont des prairies, la ZAC Armorique, en construction.

Le projet municipal de parc urbain. Plutôt qu’une vision du "naturel" où l’homme est au pire consommateur (d’activités de loisir) au mieux observateur (des oiseaux sauvages et vaches prenant un bain de pattes) mais reste extérieur à cette nature, EELV défend une approche mêlant nature et vie urbaine.

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L'arrêté préfectoral du 26/10/2010 ² accorde à la Ville la possibilité d'ériger une digue avec une zone remblayée sous réserve, notamment, qu'un volume de 60 000 m3 de terrain soit trouvé pour compenser la zone d'expan-sion des crues perdue à cause « des différents projets » d'urbanisme rennais (on comprendra principalement les remblais dont l'autorisation de construction est condition-née par ce point).

Les bassins de rétention et d’expansion temporaire sont une solution très coûteuse qui consiste à aménager des zones (le plus souvent des parcs, comme c’est le cas ici) ca-pables d’accueillir l’eau des crues. Le même type de solution a, par exemple, été développé pour le quartier des Trois-Ri-vières, à Stains (Seine-Saint-Denis).

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RIEN NE CONDAMNE LES JARDINS

Ce que dit la Préfecture

Quid du plan de prévention des risques d’inondations (PPRI), si-gné en 2007 entre la Ville et la Préfecture 3 ? Ce document indique le classement des prairies Saint-Martin en zone inondable réservée à l’expansion des crues.

Mais, comme nous l’a confirmé la Préfecture, dans cette zone les jardins et les équipements de loisirs sont autorisés. Principale condition posée par le PPRI : les eaux doivent pou-voir s’écouler en cas de crue, qu’il s’agisse de constructions dans leur état actuel ou futur (lors d’une rénovation, par exemple).

Pollution : un faux prétexte ?

Suite à une étude sanitaire identifiant, en 2009, une pollution, la Ville a interdit la consommation des légumes à feuilles produits dans les jardins. La présentation publique organisée à ce sujet mentionne, concernant la qualité des sols, « une qualité moyenne qui n’entraîne pas de risque sanitaire pour les usagers » ; pour les végétaux, « les résultats sont globalement bons mis à part deux salades (sur 48 prélèvements) ».

Drôle de coïncidence de découvrir ces menaces au moment même où l’on cherche à reclasser une zone urbaine...

Interrogé par les habitants, le Commissaire enquêteur préco-nise tout au plus de déplacer dans la zone des prairies les jar-dins qui s’avèreraient effectivement pollués.

UNE CONCERTATION DE FAÇADE ?Les jardiniers locataires des prairies et les associations d’envi-ronnement soulignent que ce dossier a été préparé sans réelle concertation de la part de la Mairie, qui ne les a pas associés en amont. De fait, c’est seulement après avoir entériné en Conseil municipal le principe de la création d’un parc urbain que la mairie a envisagé de lancer « une phase de concertation large ».

Insuffisant car, comme le notent certains sociologues : « La concertation à la française, de nature règlementaire, sert es-sentiellement d’alibi (information-communication sur des projets déjà ficelés), à la différence d’autres pays où la parole des habitants est prise au sérieux » 4.

UN HABITAT ANCIEN QUI DÉRANGE ?Les zones d’habitation des prairies étaient à l’origine exclues de la DUP (Déclaration d’Utilité Publique) prononcée en 2006 (et au-jourd’hui arrivée à échéance). A l’heure actuelle, les expropriations sont toujours impossibles, ce tant qu’une nouvelle DUP n’est pas acceptée et signée par le préfet.

Pour qu’elle le soit, il faudrait que la Ville démontre l’utilité pu-blique de la suppression de ces habitations. Or, ces maisons ne nuisent à aucun service collectif, elles n’entravent le passage d’au-cune route...

Jusqu’à présent, le seul motif au nom duquel la suppression de l’habitat au bord du canal et sur les prairies est souhaitable selon la Ville, est un motif esthétique : ces maisons feraient «moche», elles gêneront le regard des futurs habitants de la ZAC Plaisance (en face sur l’autre berge) et ceux des prome-neurs du parc urbain qui voudront du « propre ».

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Pourquoi, depuis si longtemps, aucun aménagement, même léger, n'a été fait sur les prairies (aire de jeux pour les enfants, terrain avec but, quelques bancs, un petit plan d'eau...) ?

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NATURE ET VIE URBAINEEELV défend des solutions conciliant densification urbaine au voi-sinage des prairies (qui doivent rester inconstructibles) et main-tien, sur le site, des jardins et du vivant actuel.

Maîtriser la construction en zone inondable

L’exemple de la ZAC Armorique montre que la densification dans des zones exposées peut parfois apparaître contradictoire avec les objectifs de réduction de la vulnérabilité affichés par les plans de prévention des risques d’inondations (PPRI).

Certains choix de construction sont pourtant parfaitement compatibles avec les PPRI. C’est le cas des bâtiments inon-dables ou sur pilotis, qui n’entravent pas l’écoulement de l’eau en cas de crue, à la différence des remblais et autres digues (tels ceux de la ZAC Armorique).

Une trame verte et bleue, jusqu'au centre ville

Les prairies Saint-Martin, mais aussi les quais du canal d’Ille-et-Rance jusqu’à la Vilaine, constituent un corridor de biodiversité en cœur de ville qu’il faut développer.

Comment ? Par la reconquête de la trame bleue (chemin natu-rel de l’eau), comme le préconise une étude réalisée en 2009 par l’Atelier de l’Ile 5, et par le renforcement de la trame verte, com-posée de boisements, haies, prairies et jardins familiaux 6.

.Respecter le « sociotope »

.du quartier

Les espaces de nature, s’ils constituent des « biotopes » pour les animaux et les plantes, peuvent aussi être des « sociotopes » 7 pour les gens qui y vivent, les fréquentent et les aiment…

Or, le projet municipal de parc urbain, en supprimant les jar-dins, les abris et l’habitat existant, fait l’impasse sur cet aspect essentiel et oublie l’identité particulière du lieu.

En effet, les jardins ouvriers existent depuis 1929. Ce type de pay-sage, très commun il y a 50 ans, est devenu unique aujourd’hui en milieu urbain : boisement, cabanes personnalisées, haies plessées, espèces végétales d’intérêt, refuge pour les oiseaux. Ils constituent aussi des espaces sociaux intergénérationnels peu compatibles avec une délocalisation et un éloignement des lieux de vie des habitants.

L’agriculture urbaine, un enjeu fort

Autonomie alimentaire, restauration de la biodiversité, in-tégration sociale… Dans un contexte général de crise (éco-nomique, écologique, énergétique), l’agriculture en milieu urbain présente des atouts qui plaident pour le maintien de jardins aux prairies.

De manière générale, tout projet urbain doit prendre en compte la place de la na-ture en ville. Cela passe, notamment, par la végétalisation des aménagements et par un plan de développement agricole en milieu urbain (intégrant les jardins fa-miliaux, ouvriers ou parta-gés).

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L’étude réalisée en 2009 par le cabinet de l’Ile inclut le maintien des jardins.

L’aménagement du secteur doit s’intégrer dans un projet plus vaste, visant à prolonger la coulée verte vers le centre ville et à reconquérir les berges du canal, jusqu’à la place de Bretagne.

ELABORATION DES PROJETS "Jamais sans les habitants"

Pour EELV, favoriser l’implication et la participation des habitants, c’est favoriser une meilleure qualité environnementale et sociale

des réalisations.

Pour y parvenir, il est nécessaire d’introduire, aux côtés des habituels maître d’ouvrage et maître

d’œuvre, un troisième acteur : le maître d’usage, c’est-à-dire les habitants eux-mêmes,

et ce dès l’amont des projets.

De nombreuses expériences, en pays de Rennes et ailleurs, démontrent l’efficacité de ces démarches pour améliorer la qualité de vie

dans les quartiers.

Page 4: Les prairies Saint-Martin et le projet municipal de parc urbain à Rennes

•W

Concilier nature et vie urbaine

1. Pour Europe Ecologie Les Verts, les prairies St-Martin doivent s’envisager comme un écosystème à préserver et non comme une zone de compensation pour des projets d’urbanisme ;

2. EELV défend le principe d’un aménagement des prairies (notamment pour faire face au risque de rudéralisation 8), mais un aménagement qui :

• protègeetrenforcelatrameverteetbleue ;

• tientcomptedel’histoireduquartieretduvivantactuel;

• maintientsurlesitejardins,jardiniersethabitants;

• s’intègre dans un projet plus vaste visant à prolonger la coulée verte vers le centre ville et à reconquérir les berges du canal, jusqu’à la place de Bretagne ;

3. Enmatièred’urbanisme,EELVplaidepourdeschoixetsolutionsconciliantdensité et protection des zones vulnérables ;

Multiplier les surfaces de jardins

4. EuropeEcologieLesVertsproposedemettreàprofitl’augmentationdessurfaces d’espaces verts à Rennes pour :

• créerdenouvellesparcellespourlesfamillesquivontarriversurlesZACPlaisanceetArmorique;

• prévoir20%desurfacedejardinspartagésdanstouslesprojetsurbains;

• prendreencomptel’enjeudel’approvisionnementetdel’autonomiealimentaire de la cité ;

Améliorer la transparence et la concertation

5. Europe Ecologie Les Verts défend le principe :

• delamiseàdispositiondetouslesdocuments,administratifsoutechniques,dontleshabitantspeuventavoirbesoinpourleurinformation

Concernant les prairies, les résultats de l’étude générale de pollution des sols, commandée par la Ville au cabinet SCE, n’ont pas été rendus publics (seuls des résultats partiels ont été communiqués pour le moment)

EELV demande qu’une nouvelle étude de pollution des sols soit menée en partenariat avec les usagers des jardins

• d’unchiffragesystématiqueducoûtdegestionprévisionneldesprojetsd’aménagement

NB : paysager, le projet municipal de parc naturel urbain nécessitera un entretien dont le coût n’a pas été estimé (gardiennage des animaux, protection du cadre « sauvage » reconstitué...)

6. EELVpréconisedesméthodesdeco-constructionetdeconcertationeffectiveavecleshabitantsdansladéfinitionetlamiseenoeuvredesprojetsurbains.

Les propositions d'EELV Rennes

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ILS L'ONT FAIT !

Sur une envie croissante des habitants, nous développons les jardins partagés,

qu'ils soient familiaux, pédagogiques ou d'insertion. Une démarche qui crée du lien,

de la convivialité et des légumes frais ! Les jardins pédagogiques, destinés aux

enfants, leurs font découvrir le jardinage et la biodiversité ; les jardins d'insertion

permettent à des adultes en difficulté de reconstruire un projet personnel.

Nous offrons aussi la possibilité aux habitants de fleurir un espace vert de leur

quartier en partageant leur savoir-faire. La réalisation de ces projets de proximité

permet de tisser du lien social dans une dynamique locale et démocratique »

Martine Tressard, élue Europe Ecologie Les Verts

à Quimper et Quimper Communauté

La concertation, ce n’est pas qu’une promesse pour faire joli sur un

tract de campagne électorale. Ça se met en oeuvre. »

Jacques Boutault, maire EELV du 2ème arrondissement de Paris

Jacques Boutault s’emploie à verdir la ville par l’explication et la concertation.

Il a notamment réformé le fonctionnement des Conseils dequartier de son arrondissement.

Ceux-ci sont aujourd’hui largement ouverts, les

collèges d’habitants y sont majoritaires, les élus n’y votent pas et leur

président est choisi par les habitants.

PRAIRIES SAINT-MARTINET PROJETS URBAINS

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Documents à retrouver sur le site d’EELV Rennes :

1. Brochure «Les flâneries St-Martin», ville de Rennes, 1995.2. Arrêté préfectoral du 24 octobre 2010 relatif à l’aménagement de la ZAC Armorique.3. Plan de Prévention de Risques d’Innondation : zonage.4. http://www.eelv-rennes.ouvaton.org/new/Urbanisme-concerter-en-amont-pour.html5. Atelier de l’Ile : http://www.atile.fr6. en plus de la restauration de la zone d’expansion des crues «dans les secteurs où cela est possible (partie Sud-Est

des Prairies St-Martin, Nord de la Prévalaye, vallée du Blosne)» : étude «Zones humides et cours d’eau de la ville de Rennes», Ecosphère, juin 2006.

7. « La structure verte de la ville et ses fonctions sociales » : conférence à Ploemeur d’Alexander Stahle, 09/2009, Audiar.8. Rudéraliser : transformer un terrain par une activité humaine désordonnée (décombres, terrains vagues). Voir l'étude

«Zones humides et cours d’eau de la ville de Rennes», Ecosphère, avril 2007, p. 67.