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LES TROUBLES DU COMPORTEMENT ALIMENTAIRE QUEL RETENTISSEMENT NUTRITIONNEL ? Daniel Rigaud a,* R6sum6 Les troubles du comportement alimentaire sont au nombre de trois : anorexie mentale, boulimie et compulsions alimentaires. Chacun retentit, & un degr~ variable, sur I'~tat nutritionnel des malades. Uanorexie mentale est responsable d'une d6nutrition parfois mas- sive. Cette d6nutrition se caracterise, comme beaucoup de d~nutri- tions par carence d'apport exclusive, par la normalit6 du bilan biolo- gique evaluant de fagon standard 1'6tat nutritionnel : les marqueurs biologiques sont en d~faut Iongtemps, malgr6 I'importance de la perte de poids. Ceci ne dolt pas rassurer. La boulimie se complique principalement d'hypokali6mie parfois sev6re. Mais la malnutrition - a. poids normal, y est assez fr~quente et ne dolt pas ~tre n6gligee. Les compulsions alimentaires n'exposent pas au risque de d~nutri- tion, mais au contraire, chez les sujets pr~dispos6s, au risque de surcharge pond~rale et d'ob~sit~, avec toutes les complications m6taboliques et cardiovasculaires qui y sont li6es, Iorsqu'il existe une susceptibilite g~n~tique & d~velopper ces complications. Troubles du comportement alimentaire - anorexie mentale - boulimie - compulsions alimentaires - d6nutrition. Summary There are three types of eating disorders : anorexia nervosa, buli- mia nervosa and binge eating. Each of them may alter deeply the nutritional status. In anorexia nervosa, malnutrition may be severe and is responsible of a 10 percent death after 10 years follow-up. Unfortunately, blood nutritional markers levels are within normal ranges until very deep muscle mass losses. Bulimia nervosa patients are at risk of hypokaliemia and low-potas- sium related cardiac arythmia. In bulimia nervosa, a normal body weight can be associated with a loss of muscle and lean body masses. This is related to low inputs in proteins, minerals, zinc and vitamins. Binge eating patients are at risk of overweight or obesity and may have all the complications of this excess fat body mass, depending on their genetic traits. Eating disorders - anorexia nervosa - bulimia nervosa - binge eating - malnutrition. aService de nutrition H6pital Le Bocage 21034 Dijon cedex * Correspondance. artide re~u le 9 janvier 2001, accept6 le 28 mars 2001. © Elsevier, Paris. RevueFranqaise des Laboratoires, juin 2001, N ° 334 1. Introduction L es troubles du comportement alimentaire sont des affections fr6- quentes dans nos soci6t~s. On admet qu'actuellement 0,5 % des jeunes filles et jeunes femmes de 15 & 35 ans sont atteintes d'ano- rexie mentale, que 3 & 5 % des femmes de 20 & 40 ans souffrent de boulimie (sur une base d'au moins deux crises par semaine) et que 10 & 30 % des femmes et 5 & 20 0/o des hommes consultant pour un surpoids ou une ob6sit6 ont au moins une crise de compulsion par semaine. Les troubles du comportement alimentaire sont au nombre de trois : anorexie mentale, boulimie et compulsions alimentaires. Chacun reten- tit, & un degr~ variable, sur 1'6tat nutritionnel des malades. Si la d6nutrition de I'anorexie mentale n'6chappe & aucun th~rapeute, elle ne dolt pas faire oublier que boulimie et compulsions alimentaires conduisent & des d6sordres nutritionnels qui peuvent ob6rer & long terme qualit6 et esp~rance de vie. 2. L'anorexie mentale La d6nutrition est une complication fr6quente de I'anorexie mentale. Elle touche un grand nombre de ces malades, de I'ordre de 80 & 90 0/0 selon les statistiques. On manque cependant de donn6es fiables & 1'6chelle de la population. II est en effet probable que les statistiques, 6manant de services specialists, sont biais~es par le recrutement de ces services. La d6nutrition de I'anorexie mentale est utile & conna~re. En effet, elle r~pond & un type particulier de d6nutrition, la d6nutrition par carence d'apport exclusive [13, 14]. Classiquement, dans nos contr6es, la d6nutrition rel6ve le plus sou- vent d'une maladie inflammatoire chronique oe le syndrome inflam- matoire (infectieux ou non) le dispute ~. une r6duction des apports 6ner- g~tiques et prot~iques pour aboutir ~. une d~nutrition parfois s~v~re. Dans le cas des d6nutritions li6es & la seule carence d'apport, I'amai- grissement est exclusivement d0 & la r~duction des entr~es : le patient maigrit parce qu'il mange moins ou parce que le tube digestif est moins apte & I'absorption des nutriments. La physiopathologie de ces 6tats de d6nutrition par carence d'apport est importante ~. connaitre pour plusieurs raisons. - La d6nutrition par carence d'apport exclusive n'est en aucun cas I'apanage des pays pauvres : il y a en France bon nombre de condi- tions o(J elle est au premier plan. ,a, titre indicatif, la d6nutrition par carence d'apport touche environ 15 & 20 o/0 des sujets &g~s vivant en institution (h6pital de long s~jour). - Les cons6quences physiopathologiques de la carence d'apport sont m6connues. Les id6es fausses qui circulent retardent la prise en charge de ces malades ! Trois raisons de connaffre les d~nutritions par carence d'apport. - EIles sont fr6quentes, m~me dans nos contr6es. - Elles sont n6glig6es, parce que, le malade n'a qu'& manger. ! - Elles sont graves, et le malade meurt ~ faute de soins, ! 23

Les troubles du comportement alimentaire: quel retentissement nutritionnel ?

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LES TROUBLES DU COMPORTEMENT ALIMENTAIRE QUEL RETENTISSEMENT NUTRITIONNEL ?

Daniel Rigaud a,*

R 6 s u m 6

Les troubles du comportement alimentaire sont au nombre de trois : anorexie mentale, boulimie et compulsions alimentaires.

Chacun retentit, & un degr~ variable, sur I'~tat nutritionnel des

malades. Uanorexie mentale est responsable d'une d6nutrition parfois mas-

sive. Cette d6nutrition se caracterise, comme beaucoup de d~nutri-

tions par carence d'apport exclusive, par la normalit6 du bilan biolo- gique evaluant de fagon standard 1'6tat nutritionnel : les marqueurs

biologiques sont en d~faut Iongtemps, malgr6 I'importance de la perte de poids. Ceci ne dolt pas rassurer.

La boulimie se complique principalement d'hypokali6mie parfois

sev6re. Mais la malnutrition - a. poids normal, y est assez fr~quente

et ne dolt pas ~tre n6gligee.

Les compulsions alimentaires n'exposent pas au risque de d~nutri-

tion, mais au contraire, chez les sujets pr~dispos6s, au risque de

surcharge pond~rale et d'ob~sit~, avec toutes les complications m6taboliques et cardiovasculaires qui y sont li6es, Iorsqu'il existe

une susceptibilite g~n~tique & d~velopper ces complications.

T r o u b l e s d u c o m p o r t e m e n t a l i m e n t a i r e - a n o r e x i e m e n t a l e

- b o u l i m i e - c o m p u l s i o n s a l i m e n t a i r e s - d 6 n u t r i t i o n .

S u m m a r y

There are three types of eating disorders : anorexia nervosa, buli-

mia nervosa and binge eating. Each of them may alter deeply the

nutritional status. In anorexia nervosa, malnutrition may be severe and is responsible

of a 10 percent death after 10 years follow-up. Unfortunately,

blood nutritional markers levels are within normal ranges until very

deep muscle mass losses. Bulimia nervosa patients are at risk of hypokaliemia and low-potas-

sium related cardiac arythmia. In bulimia nervosa, a normal body weight can be associated with a loss of muscle and lean body

masses. This is related to low inputs in proteins, minerals, zinc and

vitamins. Binge eating patients are at risk of overweight or obesity and may

have all the complications of this excess fat body mass, depending

on their genetic traits.

E a t i n g d i s o r d e r s - a n o r e x i a n e r v o s a - b u l i m i a n e r v o s a -

b i n g e e a t i n g - m a l n u t r i t i o n .

a Service de nutrition H6pital Le Bocage 21034 Dijon cedex

* Correspondance.

art ide re~u le 9 janvier 2001, accept6 le 28 mars 2001.

© Elsevier, Paris.

Revue Franqaise des Laboratoires, juin 2001, N ° 334

1. Introduction

L es troubles du comportement alimentaire sont des affections fr6- quentes dans nos soci6t~s. On admet qu'actuellement 0,5 % des

jeunes filles et jeunes femmes de 15 & 35 ans sont atteintes d'ano- rexie mentale, que 3 & 5 % des femmes de 20 & 40 ans souffrent de boulimie (sur une base d'au moins deux crises par semaine) et que 10 & 30 % des femmes et 5 & 20 0/o des hommes consultant pour un surpoids ou une ob6sit6 ont au moins une crise de compulsion par semaine.

Les troubles du comportement alimentaire sont au nombre de trois : anorexie mentale, boulimie et compulsions alimentaires. Chacun reten- tit, & un degr~ variable, sur 1'6tat nutritionnel des malades.

Si la d6nutrition de I'anorexie mentale n'6chappe & aucun th~rapeute, elle ne dolt pas faire oublier que boulimie et compulsions alimentaires conduisent & des d6sordres nutritionnels qui peuvent ob6rer & long terme qualit6 et esp~rance de vie.

2. L'anorexie mentale

La d6nutrition est une complication fr6quente de I'anorexie mentale. Elle touche un grand nombre de ces malades, de I'ordre de 80 & 90 0/0 selon les statistiques. On manque cependant de donn6es fiables & 1'6chelle de la population. II est en effet probable que les statistiques, 6manant de services specialists, sont biais~es par le recrutement de ces services.

La d6nutrition de I'anorexie mentale est utile & conna~re. En effet, elle r~pond & un type particulier de d6nutrition, la d6nutrition par carence d'apport exclusive [13, 14].

Classiquement, dans nos contr6es, la d6nutrition rel6ve le plus sou- vent d'une maladie inflammatoire chronique oe le syndrome inflam- matoire (infectieux ou non) le dispute ~. une r6duction des apports 6ner- g~tiques et prot~iques pour aboutir ~. une d~nutrition parfois s~v~re.

Dans le cas des d6nutritions li6es & la seule carence d'apport, I'amai- grissement est exclusivement d0 & la r~duction des entr~es : le patient maigrit parce qu'il mange moins ou parce que le tube digestif est moins apte & I'absorption des nutriments.

La physiopathologie de ces 6tats de d6nutrition par carence d'apport est importante ~. connaitre pour plusieurs raisons. - La d6nutrition par carence d'apport exclusive n'est en aucun cas I'apanage des pays pauvres : il y a en France bon nombre de condi- tions o(J elle est au premier plan. ,a, titre indicatif, la d6nutrition par carence d'apport touche environ 15 & 20 o/0 des sujets &g~s vivant en institution (h6pital de long s~jour). - Les cons6quences physiopathologiques de la carence d'apport sont m6connues. Les id6es fausses qui circulent retardent la prise en charge de ces malades !

Trois raisons de connaffre les d~nutritions par carence d'apport. - EIles sont fr6quentes, m~me dans nos contr6es. - Elles sont n6glig6es, parce que , le malade n'a qu'& manger . ! - Elles sont graves, et le malade meurt ~ faute de so ins, !

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Nutrition

2 1 E p i d e m i o l o g t e et de f in i t i on

C'est une maladie de la f e m m e jeune : elle touche environ 0,5 1 % des femmes de 15 et 25 ans. C'est la femme qui est touchee dans 95 % des cas [1, 2]. Les cas chez I'homme sont rares, mais indis- cutables. L'incidence de I'anorexie mentale est d'environ deux & huit nouveaux cas pour 1 O0 000 habitants par an [1, 2, 3].

La f r~ luence de ranorexie mentale augmente probablement. On manque cependant de donnees dans la population generale.

Les malades meurent de denutrition : il s 'ag i t d'une maladie grave ou la mortalite atteint 8 & 10 % aprbs 15 ans d'evolution [1,3] . La mortalite est avant tout le fait de la denutrition et des mal- nutritions diverses (carences) observees au cours de I'evolution.

Une prise en charge nutritionnelle au long court permet de reduire nota- blement la mortalite. C'est dire que tout dolt ~,tre tente pour restau- rer un etat nutritionnel acceptable. C'est un des trois objectifs, incon- tournable, du traitement.

Definition

La maladie est caracterisee par les elements suivants [4]. - Une alteration de I'l~tat nutritionnel : ramaigrissement y est de plus de 15 % du poids anterieur. - Un trouble du comportement alimentaire : eclatement des repas, evictions alimentaires (graisses, sucre), ritualisations, amassement d'ali- ments. - Une peur de s'al imenter : il s'agit beaucoup plus souvent d'an- goisse, de peur, de refus face aux repas que d'anorexie. - Une peur de devenir ol0~se, quel que soit I'etat de denutrition atteint. - L'absence de toute pathologie organique ou psychiatrique.

Ajoutes aces crit~res, la presence d'au moins deux des signes sui- vants est necessaire au diagnostic [4] : - lanugo (reapparition d'un duvet de type perinatal, faite de poils tres fins), - bradycardie (< 60 bat./min) et hypothermie, signes de denutrition, - et surtout amenorrhee, hyperactivite physique, vomissements, epi- sodes boulimiques.

2 2 . P h y s i o p a t h o l o g i e

L'anorexie mentale resulte d'une puissante contrainte : celle de vou- loft tout maitriser [3, 4]. II en decoule une n~cessite imperieuse de res- treindre toujours plus son alimentation. Prendre un repas induit I'an- goisse de ne plus pouvoir s'arr~.ter de manger et de grossir. Le je£me procure & I'inverse & beaucoup d'anorexiques un plaisir et/ou un sen- timent de ~ toute-puissance ~. La pression sociale de la minceur, et des difficultes concernant son image corporelle - notamment chez la jeune fille - renforcent le trouble du comportement alimentaire. Fait majeur, la peur de manger augmente avec la perte de poids. Avec la denutrition s'installent trois types de dysfonctionnements qui aggra- vent la r~duction des ingesta : - ranorexie vraie, c'est-&-dire la perte d'inter~t ou d'eveil ~. la prise alimentaire ; - la perte du go~t, par carence en proteines, en acides gras essen- tiel et en zinc ; - les troubles digestifs, par diminution de la force des fibres mus- culaires lisses digestives : il en r~sulte un defaut de propagation dans I'cesophage (douleurs thoraciques), un reflux gastro-oesophagien, un ralentissement de la vidange gastrique comme du transit colique et un anisme. Tout ceci gen~re reflux acides et alimentaires, br~lures retrosternales, pesanteurs ou douleurs epigastriques, dyspepsie, meteorisme, douleurs abdominales et constipation [1, 13].

Les diff~rents types d'anorexies

II y a deux types d'anorexies : les formes restrictives pures, les formes avec vomissements etJou ~pisodes boul imiques vrais

(ingestion massive, sans faim ni plaisir, d'une grande quantite de nour- riture en un temps court, avec la sensation de perdre le contrele, sui- vie d'un degoOt de sol et de vomissements provoques ou sponta- nes). Vomissements et crises de boulimie doivent 6tre recherches par tousles moyens [3, 14]. IIs sont en effet caches par les malades. Cette distinction est capitale, car elle condi t ionne le pro- nostic.

• Dans la forme restrictive pure (65 ~ ?5 % des cas), la malade obtient I'amaigrissement de deux fagons : - par la restriction energetique de plus en plus severe, - et par I'hyperactivite physique.

Les troubles du rythme cardiaque, associes & la cardiomyopathie de denutrition conduisent au decbs.

• Dans I'anorexie-boulimie (25 & 35 % des cas), la malade s'aide, pour maigrir, de vomissements, s'estimant incapable de restreindre suff isamment son alimentation. Elle abuse souvent des laxatifs (30 0/0 des cas) ou, trOs rarement, des diuretiques (3 0/o des cas). Certaines de ces malades ont des pulsions imperieuses de se rem- plir sans fin tors des crises de boulimie. Un comportement de dependance s'installe. Le deces peut survenir & court terme par hypokaliemie grave et & long terme du fait du risque suicidaire (10 O/o des cas).

2.3. M e c a n i s m e de la pe r t e de p o i d s

2.3.1. La r~duction des entr~es ~nerg~tiques

Dans I'anorexie mentale, c'est la restriction alimentaire qui est res- ponsable de la perte de poids. Cette restriction alimentaire realise le plus souvent un tableau de marasme : la perle de poids porte sur la masse maigre (muscles et visceres) tout autant que sur la masse grasse (tissu adipeux sous-cutane et profond).

Le plus souvent, les malades retrecissent de plus en plus leur champ alimentaire au fil de I'amaigrissement. Ceci s'explique de trois faqons : - la peur de manger se renforce au fil de la perte de poids, - une anorexie vraie apparaTt (perte de la sensation de faim), - la perte du goQt renforce I'anorexie.

Dans la forme restrictive pure, la reduction des apports est assez caracteristique (figure 1) : ce qui est vise est une alimentation - Sante ,,, mais tous les nutriments sont en fait touches (protides, lipides et glucides) : suppression des viandes, notamment les viandes rouges ; suppression des matieres grasses ajoutees et des matieres grasses de constitution - visibles ,, ; rejet des aliments gras ; sup- pression du sucre ajoute et des aliments sucres-gras ; du pain et des feculents. Legumes verts et crudites sont respectes. II en est de meme des laitages.

Dans la forme boulimique, les crises apportent une quantite mal eva- luable (du fait des vomissements) d'aliments gras-sales, sucre-gras ou sucres.

2.3.2. L'adaptation de la d~pense ~nerg~tique

2.3.2.1. La d~pense #nerg&tique de repos (DER)

En cas de denutrition par carence d'apport, la DER est basse [5]. II y a deux raisons & cela. La premiere est la restriction des apports ener- getiques en dessous des apports de maintenance : les cellules hepa- tiques et musculaires reduisent leur depense 6nergetique (strategie ,, d'economie ,,). La deuxieme raison est la diminution de la DER Nee & la reduction de la masse maigre, puisque la DER est expliquee & 90 % par la masse maigre [6].

Cette diminution de la DER n'est pas totalement expliquee : le syn- drome de basse T3 : T3 libre (FT3) basse et FT4 et TSH normales y participe, mais la DER n'est pas correlee & la valeur de T3 libre. Pourraient intervenir la reduction des ca techo lamines circulantes (?) et la lept ine, une hormone secretee par le tissu adipeux et qui est

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responsable d'une reduction de la sensation de faim et d'une aug- mentation de la DER. Chez des anorexiques mentales denutries, la lep- tinemie est tres basse.

2.3.2.2. La d#pense ~nerg~tique postprandiale (DEPP)

En cas de denutrition par carence d'apport, la DER est basse. Les rai- sons en sont la reduction des apports energetiques et la diminution des masses corporelles. La DEPP est en effet lice aux transformations des nutriments : un pourcentage assez fixe des lipides (2 O/o), glucides (8 %) et protides (20 %) est oxyde dans des operations de transfor- mation et stockage.

2.3.2.3. La depense energ~tique li~e ~ I'activite physique (DEAF))

Au fil de I'amaigrissement, la restriction des apports induit une stra- tegie d'economie : chaque cellule musculaire depense moins pour une meme activite [7]. De plus, le malade amaigri porte moins de poids et reduit son activite physique par une asthenie = com- pensatrice -. Dans ranorexie mentale, cette economie est malheu- reusement largement compensee par raugmentation frequente (3/4 des cas) de I'activite physique (marche, piscine) par souci de maigrir !

2.3.2.4. La depense energetique de thermoregulation (DETR)

La restriction des apports entralne une diminution de la secretion des hormones thyro'(diennes et donc de la temperature corporelle.

2.4. C o m p o s i t i o n co rpo re l l e

Uidee que, dans ranorexie mentale, la perte de poids est faite de masse grasse uniquement e s t u n e i d 6 e f a u s s e ; en effet, la perte de poids porte aussi sur la masse maigre : en moyenne, & un stade o~ une hos- pitalisation est requise, la composition corporelle est la suivante (pour 1,65 m).

La perte de poids touche la masse musculaire :

- poids corporel : 35 kg (vs 50 kg). - masse maigre : 30 & 32 kg (vs 40 kg). - masse musculaire : 6 & 10 kg (vs 15 & 20 kg). - masse grasse : 3 & 5 kg (vs 10 kg). - masse minerale osseuse : reduite de 10 & 15 %.

Schematiquement, les masses corporelles diminuent assez paraile- lement. Ainsi, sur 5 kg perdus, il y a 2,5 kg de masse maigre (et 2,3 kg de muscles) et 2,5 kg de masse grasse. Une perte de poids de 30 % par rapport au poids ideal [indice de masse corporelle de 21 kg/(m) 2] s'accompagne d'une perte de masse musculaire d'envi- ron 30 0/0.

Au fil de la denutrition, apparaft une tendance & la retention hydro- sodee : en dessous d'un indice de masse corporelle de 15 kg/(m) 2, on observe une inversion du rapport Na+/K + urinaire (par hyperal- dosteronisme) et une tendance & des oedemes discrets & moderes des membres inferieurs ou des Iombes. Ceci doit conduire & la mise sous regime pauvre en sodium Iors de la renutrition.

La composition corporelle est alors la suivante (figure 2) :

- I'eau corporelle occupe une place trop importante, - le secteur extra-cellulaire augmente, au profit de reau interstitielle, - le volume plasmatique se retracte, - la masse grasse fond, - les masses musculaires diminuent et s'hyperhydratent.

2.5. Un e ta t de denu t r i t i on m a s q u e e

De nombreux faits contribuent & ce que la denutrition paraisse moins grave qu'elle ne I'est. Les malades sont hyperactifs [4]. On a donc du mal & imaginer des Iors qu'ils soient au plus mal ! La famille

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et la soci6te banalisent la maigreur : le malade se sent donc valorise !

Les marqueurs proteiques de I'etat nutritionnel sont en defaut [8]. C'est ce qu'illustrent les tableaux I et I1. Pendant tres Iongtemps, les concentrations plasmatiques d'albumine, de prealbumine, de transferrine et d'hemoglobine sont normales. II y a deux raisons & cela : le volume plasmatique se contracte (hemoconcentration) ; le catabolisme de beaucoup de proteines diminue grandement et se stabilise & un niveau assez proche de la synthese. Ainsi, pendant tres Iongtemps, les niveaux d'anabolisme et de catabolisme de ces proteines sont proches, permettant & rorganisme de maintenir leur concentration plasmatique normale. Le catabolisme global est d'en- viron 20 & 30 g de proteines/j.

Les autres marqueurs sont aussi en defaut : calcemie, phosphoremie, magnesium plasmatique et globulaire sont Iongtemps normaux.

2.6. R e t e n t i s s e m e n t fonc t i onne l

Face & I'anorexie mentale, beaucoup de medecins pensent que, mal- gre la perte de poids, il n'y a ni denutrition ni amputation des fonc-

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4,3 + 3,¢ 3,1 ±O,e )2 + 0,51 33 + 0,41 54+ 0,1! )2 + 0,7 )4 -I- 0,3, ,58 + 42 25 + l , e 6 8 + 1,8

Nutrition

40 i2~4 ,2 [ 45,1 +4 ,0

1,93 + 0,,~ 12,06 + 0;30 1,20 + 0,35 11,28 + 0'34 0 ,59+0,151 0,61+0,17 0,86 + 0,47 0,77 + 0,51 0,83 + 0,29 0,84 + 0,30 1,60 ± 38 1;57 ± 35 s +t t

± o 9

55,8 + 5,9 19,7 + 2,4

1,92 + 0,54 1,17+0,3

0,67 + 0,1 0,80 + 0,3 0,88 ± 0,;

1 ,79+2; 2,98 + 0,' 1,82 + O,I

(1) Denutrition tres severe : IMC < 12 kg/(m) 2 et albuminemie < 35 g/L (2) Denutrition severe : IMC : 12-14 kg/(m) 2 et albuminemie entre 35 et 40 g/I. (3) Denutrition moyenne : IMC : 14-16 kg/(m) 2 et albuminemie entre 35 et 40 g/I. (4) Denutrition moderee : IMC entre 16 et 18 kg/(m) 2 et albuminemie normale. (5) Denutrition absente : IMC > 18 kg/(rn) 2 et albuminemie normale (> 40 g/I). (o) IMC : index de masse corporelle en kg/(m) 2. (7) En mg/lO0 ml.

.

19 - 22 40 - 45

0,25- 0,40 2,0 - 3,4

0,60 - 1,20 140- 145 3,8 - 4,4 2,0 - 2,6 0,9 - 1,3 0,7- 1,1 0,'7 - 1,1

.,xprimee en

limites de la

tions internes. En ceci, ils se trompent. La denutrition est responsable de I'alteration de nombre de fonctions : - defaut de concentrat ion intellectuelle, - diminution des capacites mnesiques, - diminution du desir et de I'inter6t, - ra lent issement du renouvellement cellulaire (peau, phaneres et

muqueuses).

• Deficit musculaire portant sur les muscles stries comme sur les muscles lisses (digestifs notamment) : il y a diminution de la force comme de I'endurance. II en resulte : - un ralentissement de la frequence cardiaque, une diminution de la pression d'ejection systolique, une hypotension (notamment ortho- statique), - un defaut modere de retour veineux (expliquant en partie les oedemes des membres inferieurs), - un deficit fonctionnel diaphragmatique avec diminution du volume inspiratoire et du debit expiratoire maximaux [9], - une amputation nette des capacites musculaires & I'effort, tant en puis- sance maximale qu'en endurance (reduction de la duree de I'effort) [?],

- un reflux gastro-oesophagien par diminution des contractions oeso- phagiennes propagees et du tonus du sphincter inferieur de I'oeso- phage, - une pesanteur epigastrique, par ralentissement de la vidange gas- trique [10], - des ballonnements et une constipation, par ralentissement du temps de transit col ique lie & la faiblesse du muscle lisse colique. • Uosteoporose est frequente : une malade sur deux a une densite minerale osseuse inferieure & deux deviations standards apres dix ans d'evolution, alors que calcemie et phosphoremie sont normales ! • Les fonctions immunitaires sont en revanche Iongtemps preservees, sans que I'on sache pourquoi. Les malades sont peu touches par les infections ,, courantes >,. Cependant, les infections opportunistes, comme les pneumopathies & mycobacteries typique (BK) ou non, sont obser- vees dans 5 % des cas.

2.7. D i a g n o s t i c

Aucun examen complementaire n'est requis pour le diagnostic d'ano- rexie mentale. En cas de doute (si la malade accepte de peser un poids normal), il faut eliminer une affection inflammatoire (VS, CRP) - en par- ticulier une maladie inflammatoire digestive (maladie de Crohn), une hyperthyroi"die voire une insuffisance hypophysaire.

En fait, si I'on s'attache & recueillir I 'ensemble des criteres diagnos- t iques vus ci-dessus, le diagnostic est facile. On a decrit, dans I'ano- rexie mentale, differentes anomalies endocriniennes : - un syndrome de basse T3 : T3 libre basse, T4 et TSH normales ; - un hypercort icisme modere : cortisolemie, cortisol libre urinaire et ACTH un peu eleves ; - un profil des hormones stero'i'diennes feminines de type ,, pre-puber- taire ,, • estradiol et estrone, progesterone, LH et FSH basses ; - une discrete hyperprolactinemie ; - un hyperaldosteronisme secondaire ; - une hypercholesterolem e ,5 HDL dans 17 % des cas.

En fait, aucun de ces examens n'est ~. demander, car ils ne debouchent sur aucun classement pronostique ni aucune prescription therapeutique.

Les seuls examens & demander ont pour but d'evaluer le retentisse- ment et le pronostic & court terme. - I o n o g r a m m e sanguin et c r6a t i n i n6m ie & la recherche de vomis- sements. - Amylases, ALAT et ASAT & la recherche de crises de boulimie (qui les font augmenter). - A l b u m i n 6 m i e , p r 6 - a l b u m i n 6 m i e & la recherche de signes de gravite nutritionnelle : si les concentrations plasmatiques baissent, c'est un signe de mauvais pronostic ou un signe d'infection surajoutee. - Fer s~r ique et t ransferr in~mie : ferritinemie si valeurs basses.

Devant une anorexie mentale de plus de 10 ans d'evolution, il convient de rechercher par osteodensitometrie osseuse (absorptiometrie bipho- tonique), une osteopenie ou une ost6oporose vraie.

2 .8 . R e s i s t a n c e & la p r i se d e p o i d s

Dans I'anorexie mentale, une moindre prise de poids que celle qui est attendue est observee [13, 16]. Un certain nombre de faits concou- rent & cette ,, resistance ,,.

2.8.1. Angoisses et peurs

La peur de grossir et de ne pas pouvoir s'arr~ter (de manger, de gros- sir) aboutit & des conduites d 'opposi t ion ,, volontaires ~ et de dissi- mulation chez les anorexiques restrictives et & des vomissements chez les anorexiques-boulimiques [3].

2.8.2. Troubles digestifs

La prise alimentaire est freinee par les reflux gastro-oesophagiens, le retard & la vidange gastrique et les ballonnements abdominaux.

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2.8.3. Ph~nom~nes adaptatifs La - resistance - & la prise de poids est aussi en rapport avec une authentique adaptation metabolique [1 1] : augmentation de differents postes de la depense energetique [12, 13, 14, 15].

Les trois cl~s de la r~sistance a/a prise de poids : - I'angoisse freine I'augmentation des apports, - l e s troubles digestifs la rendent inconfortable, - l e s differents postes de depense energetique augmentent.

La figure 3 schematise ces phenomenes.

3. Boulimie

3.1. Def in i t ion

La boulimie est la r(~p(~tition de crises boulimiques. La pr6oc- cupation excessive d'acc6der & la minceur conduit la malade aux manipulations des entrdes (vomissements) et des sorties (~ner- g6t iques (laxaUfs, potomanie, hyperacUvit6 physique, diur(~- t ique et amph6tamines plus rarement). C'est une maladie de la femme : 90 % de femmes parmi les patients.

La crise bou/imique a/es caracteristiques suivantes :

- temps court, - quantite massive d'aliments non choisis, sans plaisir, ni faim ni rassasiement, - sensation de perte le contr61e, - suivie de vomissements, - d6goOt de sol (honte) qui peut conduire au suicide.

3.2. E p i d e m i o l o g i e

C'est une maladie de la jeune femme, le plus souvent entre 20 et 35 ans. C'est un trouble frequent : 2 & 10 % des femmes de 20-35 ans selon les statistiques.

Son incidence va croissante. On ignore cependant I'incidence exacte de la boulimie, car les malades en ont honte et la cachent. La bouli- mie s'accompagne frequemment d'un etat depressif chronique et d'une tendance suicidaire. Ces conduites en font toute la gravite.

3.3. P h y s i o p a t h o l o g i e

Le manque de confiance et un desir farouche de minceur conduisent & la poursuite d'un = but ~ de nature senserielle : la crise, et d'un but de nature emotionnelle : la violence de I'acces. Le comportement se fige par sa repetition et la dissimulation & I'entourage.

II s'agit d'une condui te addict ive (cf. alcool, drogues). Le diagnostic est difficile : le trouble est cache ! On peut s'aider des signes suivants : - desir d'amaigrissement ~. poids normal ou bas, - instabilite, - ne - mange rien et grossit -, - souhaite = apprendre & manger ~, - gonflement du visage et des parotides, - signes biologiques de vomissements : hypokaliemie, reserve alca- line elevee (alcalose), insuffisance renale fonctionnelle (creatininemie elevee), hyponatremie (potomanie), hemoconcentration (protides totaux, hemoglobine).

Les complications somatiques sont rares et le plus souvent pas tres graves. II y a deux exceptions : la perte dentaire (email, gencives), fie- quente et invalidante ; parfois des hypokaliemies majeures entrainant des troubles du rythme.

On a decrit rupture oesophagienne ou gastrique, pancreatite subaigu@, dilatation colique et pseudo-obstruction intestinale idiopathique, mala- die des laxatifs.., mais ces complications sont rares.

Sch6ma fait sur la base de donn~es exp~rimentalee : malades de 35 kg ayant des apports avant renutrition (restriction) de 900 kcal/j et une hyperactivit~ physique. (1) DER : ddpense ~nerg~tique de repoe. (2) DEPP : d~pense postprandiale. (3) DEAP : d~pense liee ti I'activit~ physique.

] (4) DETR : d6pense de thermor~gulation. (5) DE totale : d~pense des 24 h.

La perte des masses corporelles

On a tree peu de donnees sur la composition corporelle des malades boulimiques.

Une erreur serait de croire qu'un poids normal est synonyme de bon etat nutritionnel. En fait, certaines boulimiques, parce qu'elles s'ali- mentent mal, ont une malnutrition ou une reduction de leur masse maigre active. Ceci n'a jamais ete evalue sur un echantillon suffisant. On peut penser que la suppression des repas et les vomissements favorisent lee carences nutritionnelles. De plus, il est probable que la restriction importante sur les aliments riches en proteines animales, en particulier les viandes, conduit certaines malades & une malnutrition proteique responsable elle-m~.me d'oedemes, ou & une carence en fer responsable d'anemie, d'asthenie ou de deficit immu- nitaire.

Le mecanisme des osdemes est sans doute complexe : inflation hydrique plasmatique au cours des crises, augmentation du secteur plasmatique et extravasation liquidienne du fait de la perte de conti- nuite endotheliale et de la carence proteique.

Certaines boulimiques ont, pour un poids corporal normal, une infla- tion hydro-sodee globale, une contraction du secteur plasmatique, une diminution de la masse maigre et de la masse musculaire et une aug- mentation de la masse grasse. Ceci, au demeurant, est important & leur expliquer, afin qu'elles comprennent I'interet qu'elles ont & lutter contre leur trouble du comportement alimentaire.

Jk poids equivalent, les malades boulimiques ont un pourcentage de masse grasse plus important que celui des anorexiques (resultats per- sonnels). En revanche, en moyenne, & poids constant, il n'y a pas de difference entre boulimiques et femmes de comportement alimentaire normal.

Une autre complication serieuse de la boulimie est I'osteoporose. Elle est beaucoup plus rare chez les boulimiques que chez lee anorexiques. Elle survient beaucoup plus souvent chez lee boulimiques qui ont un long passe d'anorexie ou chez les anorexiques-boulimiques que chez les boulimiques & poids normal.

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Nutrition

Selon les cas, il y a des boulimiques & poids normal et des boulimiques en leger surpoids. Par definition, il n'y a pas d'obesite & ce stade, car le critere - souci extra.me de minceur * est un crit6re cle de ce trouble du comportement alimentaire.

II existe dans la boulimie de nombreux risques de carences nutrition- nelles : carence en vitamines du groupe B, en fer, en vitamine D et en calcium, carence en magnesium (?), carence en vitamines liposoluble (A, D, E). Assez curieusement, ceci a ete tres mal evalue. Sans doute ceci s'explique-t-il par le fair qu'il s'agit de malades & poids normal et qui sont souvent prises en charge par des psychiatres.

4. La compulsion alimentaire

La compulsion a l imentaire ~ f r6n~Uque • (binge eating des Anglo- Saxons) est la consommation en un temps court d'une quantit~ assez importante d'aliments choisis, avec une connotat ion de plaisir, m~me s'il y a ensuite le sentiment d'avoir perdu le contr61e. Elle n'est en regis pas suivie de vomissements.

Ceci I ' oppose & la bou l im ie . II n'y a pas ou moins de souci extreme de minceur. Les malades se laissent donc grossir, sans tenter le plus souvent de s'y opposer par des manoeuvres diverses. Les caracte- ristiques de la composition corporelle de ces sujets plut6t sedentaires sont ceux des sujets obbses. ~excbs de masse grasse est trbs variable suivant I' importance et la frequence des crises et le risque g6n6tique (ou familial) d'obesit~. La prise de poids varie de quelques kilos & plu- sieurs dizaines de kilos selon lee cas. On peut m~me rencontrer des compulsifs ,< superob~ses >,.

La prise de poids s'accompagne, pour peu que les malades y soient predisposes g~n~tiquement, des complications m6taboliques et car- dio-vasculaires classiques : - hyperglycemie et resistance & I'insuline, - diabete non insulino-dependant, - hypertriglycerid6mie de type IV,

- baisse du cholesteroI-HDL, - syndrome X oe sont associes aux elements ci-dessus une hyper- coagulabilite et une hyperviscosite sanguine, - hyperuricemie.

Mais aussi hypertension arterielle, insuffisance coronarienne, troubles endocriniens (hypofertilite, hirsutisme).

5. Conclusion

L es troubles du comportement alimentaire retentissent assez fie- quemment sur la composition corporelle. IIs justifient pleinement

I'assertion selon laquelle le poids corporel est un mauvais juge de 1'6tat nutritionnel.

L'anorexie mentate est un module de denutrition par carence d'apport. Elle illustre tousles m6canismes adaptatifs qui caracterisent cette der- niere. Affectee d'une mortalite de 10 % & 10 ans alors qu'elle touche des malades jeunes (20-25 ans), elle illustre la gravit~ de ce type de d6nutrition. M6me si I'apport proteique est respect6, la reduction des apports energetiques non proteiques aboutit & une perte de masse musculaire, les muscles 6tant utilises comme materiau energetique. La normalit6 du bilan biologique standard ne dolt pas rassurer : il ne sera perturbe que bien Iongtemps apres que la perte de masse mus- culaire ne soit devenue evidente cliniquement ! Quant au bilan hor- monal, il n'a plus sa place actuellement que dans les cas oe le dia- gnostic est incertain ou douteux. Les carences nutritionnelles sont probablement assez frequentes en cas de boulimie s6v6re, chronique et de Iongue duree. Mais ceci meriterait d'6tre mieux evalue, car il y a peu de donnees & ce sujet. On peut craindre des carences en mine- raux et vitamines liposolubles.

La compulsion, quant & elle, est responsable parfois de surpoids et d'ob~sit6, avec toutes les complications m6taboliques et cardiovas- culaires qui y sont associees.

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