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Lésions papulonodulaires des paupières

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Page 1: Lésions papulonodulaires des paupières

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nnales de dermatologie et de vénéréologie (2011) 138, 520—522

AS POUR DIAGNOSTIC

ésions papulonodulaires des paupières

odular papular lesions of the eyelids

H. Laasri a,∗, F. Hali a, K. Khadira,H. Benchikhia, M. Agoubb

a Service de dermatologie-vénéréologie, CHU Ibn Rochd, quartier des hôpitaux, 20200Casablanca, Marocb Service de psychiatrie, CHU Ibn Rochd, quartier des hôpitaux, 20200 Casablanca, Maroc

Recu le 2 fevrier 2011 ; accepté le 18 fevrier 2011

mai

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Disponible sur Internet le 7

bservation

ne jeune fille de 17 ans, d’origine rurale, célibataire,on scolarisée, sans antécédents pathologiques particu-iers, était hospitalisée en service de dermatologie poures lésions papulonodulaires érythémateuses à surface croû-euses, infiltrées, des deux paupières supérieures (Fig. 1),’apparition aiguë depuis décembre 2009 et entraînant unecclusion palpébrale.

Elle ne prenait aucun traitement au long cours, et elle neapportait pas d’application de topiques sur les paupières nidistance.Elle n’avait pas eu de traumatisme ni de piqûre d’insecte.L’examen clinique ne trouvait pas de fièvre ni d’autres

ésions cutanées.

L’examen ophtalmologique était rendu impossible par

’occlusion palpébrale.Les examens complémentaires donnaient les résultats

uivants :

∗ Auteur correspondant. Rachidia 3, bloc B, No 607 Mohammedia,aroc.

Adresse e-mail : [email protected] (H. Laasri).

lj

151-9638/$ — see front matter © 2011 Publie par Elsevier Masson SAS.oi:10.1016/j.annder.2011.02.025

2011

le prélèvement bactériologique cutané avait isolé un sta-phylocoque doré multisensible ;l’examen tomodensitométrique crânio-orbitaire montraitun épaississement des parties molles palpébrales bilaté-rales sans anomalies oculaires ni osseuses crâniennes ouorbitaires ;le frottis à la recherche de corps de Leishman était néga-tif ;la biopsie palpébrale montrait une discrète hyperacan-those et une spongiose minime avec un infiltrat dermiqueinflammatoire dense lymphohistiocytaire riche en polynu-cléaires éosinophiles, sans corps de Leishman.

La patiente était mise sous antibiothérapie : 3 g par jour’amoxicilline-acide clavulanique et corticothérapie (pred-isolone 1 mg/kg par jour).

L’évolution était marquée par une régression partielle dea taille des lésions avec une ouverture palpébrale après cinqours de traitement (Fig. 2).

Par la suite l’évolution était stationnaire.

Page 2: Lésions papulonodulaires des paupières

Lésions papulonodulaires des paupières 521

Ft

Quel est votre diagnostic ?

Figure 1. Lésions palpébrales bilatérales.

igure 2. Évolution après traitement par antibiothérapie et cor-icoïdes.

Page 3: Lésions papulonodulaires des paupières

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ypothèses du comité de rédaction avantes données complémentaires

es hypothèses du comité de rédaction sont les suivantes :dermite caustique ;pathomimie ;herpès ;leishmaniose.

ommentaires

evant l’indifférence totale de la patiente vis-à-vis de saaladie et l’élimination des autres diagnostics, le diagnostice pathomimie était évoqué.

La pathomimie était finalement retenue après avoir sur-ris la patiente en train de s’automutiler en frottant sesaupières avec des branches, dans le jardin de l’hôpital.

La patiente a eu un entretien psychiatrique qui a révélén terrain dépressif majeur.

Elle est actuellement sous antidépresseur sérotoniner-ique avec une bonne évolution sur le plan psychique etutané.

Il s’agit d’un tableau de pathomimie de localisa-ion strictement palpébrale : cette présentation cliniquexceptionnelle nous a posé par conséquent un problèmeiagnostique et thérapeutique complexe.

La pathomimie peut se définir comme une maladie auto-rovoquée dans un état de conscience claire par le patientui-même, au niveau du revêtement cutanéomuqueux ou deshanères [1].

Elle représente l’un des problèmes diagnostiquest thérapeutiques les plus complexes en dermatologie1,2].

Elle survient dans l’immense majorité des cas chez lesemmes [3].

Les aspects cliniques peuvent être très variés, les possibi-ités de l’inconscient semblant sans limite : plaies, brûlure,bcès, granulomes à corps étrangers, érythèmes, ecchy-oses, saignements, eczémas, dermatoses autoaggravées,

ans que cette liste soit limitative [1,3].Comme les aspects cliniques des lésions sont très variés,

e diagnostic de pathomimie ne peut se faire que devant unaisceau d’arguments [1].

Aux arguments négatifs (pas de diagnostic de dermatoseonnue mais aussi après avoir éliminé un des diagnosticsifférentiels psychiatriques), il faut ajouter des argumentsositifs [1] :lésions aux contours nets, souvent géométriques, situéessur des zones facilement accessibles ;début brutal mais flou ;

récidives inexpliquées ;amélioration ou guérison des lésions sous occlusif ouplâtre ;grande tolérance pour des lésions très affichantes ;

[

H. Laasri et al.

importance du secret sur l’origine des lésions pour lepatient.

Si la cause sous-jacente n’est pas apparente, le diag-ostic d’une pathologie factice doit toujours être envisagé4].

Chez notre patiente, l’absence de lésions spécifiquesl’examen histologique, le début brutal des lésions, la

érennisation de symptômes malgré des soins adaptés et’indifférence de la patiente vis-à-vis de sa maladie ont faitaître des soupcons dans l’équipe médicale sur la possibilité’une pathologie factice.

Les traits psychopathologiques qui peuvent conduire à unel comportement sont souvent difficiles à appréhender. Ileut s’agir d’états limites faits d’instabilité émotionnelle,’agressivité, de demande d’attention, de perversion, plai-ir à manipuler les autres, masochisme de l’autoagression ouême d’hypochondrie. Des éléments dépressifs coexistentarfois [5].

L’attitude à adopter face à de tels patients est dif-cilement codifiable. Leur prise en charge demande un

nvestissement pluridisciplinaire le plus précoce possible5]. La collaboration entre dermatologue et psychiatrest essentielle afin d’élaborer un projet thérapeutiqueommun, et ce en amont de la rencontre du patient avece psychiatre [5,6].

Dans notre contexte marocain, la prise en charge thé-apeutique reste très difficile en raison de l’habituellepposition des sujets atteints et même de leurs familles quiefusent ce diagnostic.

éclaration d’intérêts

es auteurs n’ont pas transmis de déclaration de conflits’intérêts.

éférences

1] Misery L. Les pathomimies cutanées. Ann Med Psychol2010;168:297—300.

2] Zaraa I, Mokni M, Letaïef H, Cherif F, Eleuch D, Azaiez M, et al.Sténose complète des conduits auditifs externes. Ann DermatolVenereol 2004;131:595—6.

3] Verraes-Derancourt S, Derancourt C, Poot F, Heenen H, BernardP. Pathomimie : étude rétrospective de 31 malades. Ann Derma-tol Venereol 2006;133:235—8.

4] Mahirogullari M, Chloros G, Cilli F, Semiz U, Kiral A. Emphysèmesous-cutané factice d’un membre. Rev Rhum 2008;75:87—90.

5] Scrivener Y. Pathomimies cutanées : plaidoyer pour une priseen charge en milieu dermatologique sans confrontation directe.Ann Dermatol Venereol 2005;132:109—10.

6] Euvrard T, Biron F, Blineau N, Boibieux A, Berthezène Y,Marchand B. Pathomimie révélée par une arthrite septiqueinterapophysaire postérieure polymicrobienne : diagnostic parbiopsie percutanée. J Radiol 2004;85:43—6.