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ב''הMagazine Judaïsme Nord Chabbath Vayikra Parachath Ha’hodech 20/03/2015 Roch ‘Hodech Nissan 5775

Magazine vayikra 2015

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ב''ה

Magazine Judaïsme Nord Chabbath Vayikra Parachath Ha’hodech

20/03/2015 Roch ‘Hodech Nissan 5775

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Magazine Edité par Judaïsme Nord Recueil d’articles publiés

sur Daf-Hagueoula.org et sur la version française de Chabad.org Tous les textes sont protégés par le copyright

Composition par Rav Eliahou Dahan Tous nos remerciements à Rav Emmanuel Mergui

rédacteur de la version française de Chabad.org

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Table des matières

Editorial ............................................................................................................................................... 5

Nissan – L’Heure du Miracle ............................................................................................................. 5

Il était une Fois ................................................................................................................................. 7

Une Question de Me moire ................................................................................................................. 7

La Paracha en Bref .......................................................................................................................... 8

Réflexions sur la Paracha de la Semaine ............................................................................... 9

Crise Identitaire ................................................................................................................................. 9

Pi et Le Temps ou comment on a libe re l’humanite de l’entrave du destin ................................. 11

Le Alef de l’Etude ............................................................................................................................. 15

Le Midrash Raconte la Guéoula ............................................................................................... 17

Un Instant de Bonheur .................................................................................................................... 17

Cycles de la Vie................................................................................................................................ 18

Un Anniversaire Juif ......................................................................................................................... 18

Fêtes .................................................................................................................................................... 19

Kitniyot : Ne sommes-nous pas un seul peuple ? .......................................................................... 19

Récit .................................................................................................................................................... 21

Comment Rabbe nou Tam fut sauve des croise s ............................................................................ 21

Le Mariage ........................................................................................................................................ 24

Les Dix Commandements du Mariage ............................................................................................ 24

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Editorial

Nissan – L’Heure du Miracle

Nous rentrons, cette semaine, dans le mois

de Nissan. Ce mois est bien connu pour la

fête de Pessa’h dont les préparatifs battent

leur plein. Pourtant, ce mois a bien d’autres

qualités qui sont moins connues.

Nissan est le premier mois du calendrier

biblique. C’est dans ce mois que naquit

Yits’hak, fils d’Avraham, le Patriarche. Le

mois de Nissan vit naître le peuple Juif à sa

libération de l’esclavage Egyptien. Un an

plus tard, le premier Nissan 2449, fut inauguré le Michkan – le Tabernacle. C’est

Na’hchon Ben Aminadav – chef de la tribu de Yéhouda – qui fut honoré à offrir, le

premier, les offrandes du Temple.

Tous ces événements ont un facteur commun : ils prirent place au mois de Nissan.

« Nissan » découle du mot « Ness » qui signifie « miracle ». Or, nous constatons que

tous ces événements sont effectivement le fruit et l’expression du miracle.

Yits’hak, le premier enfant Juif, ne serait jamais né sans l’intervention miraculeuse de

D.ieu dans la vie de ses parents, Avraham et Sarah, bientôt centenaires. Depuis cette

naissance, le destin d’Israël ne dépend plus des lois de la nature.

Nul n’aurait pu envisager qu’un groupe d’hommes et de femmes, esclaves du plus

puissant des empires pendant plus de deux cents ans, puisse devenir une nation libre

qui dictera l’histoire de l’humanité et lui inspirera les valeurs universelles.

Le Michkan représente la Résidence de D.ieu sur terre. A présent, Il ne reste plus dans

les sphères célestes, mais, à travers ce Sanctuaire, Il se manifeste parmi les hommes.

Le Tabernacle témoigne, alors, du miracle quotidien de la Présence Divine.

Ce mois-ci, chacun de nous se doit de vivre à l’heure de Nissan, à l’heure du miracle.

Nous devons être conscients que le destin et l’avenir du peuple d’Israël ne dépendent

d’aucune prédiction ni d’aucune statistique de spécialiste averti.

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Néanmoins, nous devons aussi avoir à l’esprit que le miracle n’est pas gratuit ; c’est

l’action de l’homme qui l’appelle et qui invite D.ieu à intervenir. Le miracle de D.ieu

fait écho au miracle que l’homme entreprend dans sa propre vie.

Na’hchon Ben Aminadav fut honoré le jour de l’inauguration du Sanctuaire,

précisément parce qu’il avait, par une action intrépide, invité D.ieu à procéder au

miracle le plus merveilleux jamais réalisé dans l’histoire : l’ouverture de la Mer Rouge.

En effet, au moment où tout Israël était pris de panique – prisonnier entre les

Égyptiens et la Mer Rouge – à l’heure où personne n’aurait misé sur l’avenir du peuple

Juif, un homme se jeta à la mer pour poursuivre sa route vers le Mont Sinaï. Le miracle

se produisit et la mer se fendit, grâce à lui pour tout le peuple. Cet homme était

Na’hchon, il venait de procéder lui-même à un miracle en exprimant la confiance

inconditionnelle qu’il avait en D.ieu. Face à cet homme, Hachem ne pouvait que suivre

le pas.

En cette fin de Galouth, d’exil, nous devons, nous aussi, être des Na’hchon. Nous

devons avoir confiance dans le message de la Guéoulah qui approche ; ne nous arrêtons

pas face aux épreuves et aux difficultés ; poursuivons notre élan ; entreprenons un

miracle quotidien en ajoutant chaque jour une Mitsva et un acte de bienfaisance ; alors,

bientôt, nous mériterons de voir, nous aussi, la Présence Divine au quotidien par la

venue de Machia’h.

Rav Eliahou DAHAN

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Il était une Fois

Une Question de Mémoire

Le Tséma’h-Tsédek – le troisième Rabbi de

Loubavitch – dut se rendre plusieurs fois à Saint-

Pétersbourg pour plaider, auprès du

gouvernement du Tsar, des allégements sur les

décrets imposés aux Juifs. A cette époque, l’état

voulait imposer une surveillance sur le système

éducatif de la communauté Juive et lui dicter de

nouvelles formes d’enseignements. Ainsi, les

russes pensaient, à court terme, introduire des

matières et des principes étrangers au Judaïsme

qui mèneraient la communauté à l’assimilation.

Le Tséma’h-Tsédek s’opposa fermement au

programme du ministère, et il avertit que

l’ensemble des Rabbins de Russie n’aiderait pas

le gouvernement dans ce pernicieux projet.

Les paroles du Rabbi firent une forte impression sur le ministre. Lorsque le Tsaddik

s’apprêtait à quitter son bureau, il le rappela et lui demanda pourquoi il portait les

Tsitsith à l’extérieur, alors que d’autres Juifs pratiquants se suffisent de cacher les fils

sous le pantalon. À travers cette question, le ministre tentait – en dernier recours – de

montrer qu’il n’y avait pas de consensus religieux dans la communauté Juive.

Le Tséma’h-Tsédek répondit que les Tsitsith ont pour mission de rappeler l’ensemble

des Mitsvoth, ainsi qu’il est dit (Nombres 15 – 39) : « Vous les verrez et vous vous

souviendrez de toutes les Mitsvoth… »

« Certains de mes coreligionnaires ont une bonne mémoire, » ajouta le Rabbi. « Ils leur

suffit, alors, de voir les Tsitsith le matin, lorsqu’ils s’habillent, pour qu’ils se

souviennent des Mitsvoth toute la journée. Malheureusement, moi, je n’ai pas une si

bonne mémoire ! C’est pourquoi j’ai besoin d’avoir mes Tsitsith visibles

constamment ! »

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La Paracha en Bref

Vayikra Lévitique 1, 1 – 5, 26

D.ieu s’adresse à Moïse de la Tente d’assignation pour lui

communiquer les lois régissant les offrandes apportées

au Sanctuaire. Elles comprennent :

- L’holocauste (olah) qui, après son abattage, est

entièrement consumé sur l’Autel, « odeur agréable à

l’E.ternel ».

- L’oblation (min’ha), offrande de fleur de farine, d’huile

et d’encens dont il existe cinq sortes.

- Le sacrifice de paix (chelamim), dont la viande est

consommée par celui qui l’apporte après que certaines

parties en ont été brûlées sur l’Autel et d’autres données

aux Cohanim (les prêtres).

- Les sacrifices d’expiation (‘hatat) des fautes commises par le Grand Prêtre, la

communauté tout entière, le Roi ou un particulier.

- Le sacrifice de culpabilité (acham) qu’apporte notamment celui qui détourne de leur

usage des biens du sanctuaire, qui est en situation de doute quant à une transgression

qu’il a pu commettre ou encore celui qui a commis une « trahison envers D.ieu » en

jurant de façon mensongère, à propos d’argent qu’on lui réclame, au détriment de son

prochain.

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Réflexions sur la Paracha de la Semaine

Crise Identitaire

Yossi Goldman

L’amnésie est une maladie effroyable. Imaginez-vous

oublier qui vous êtes : vous n’avez soudain plus de famille,

plus d’histoire, et plus d’identité. Ceci peut survenir à un

individu, et aussi à une nation. Il y a eu des cas dans notre

histoire où il a semblé que nous avions oublié qui nous

étions et d’où nous venions. Et, bien trop souvent, nous

semblons incertains quant à notre destination.

Dans les premiers chapitres du Lévitique, nous lisons

l’expression Nefech ki te’heta : « Lorsqu’une personne

fautera. » La Torah décrit ensuite les différents sacrifices

expiatoires nécessaires pour absoudre le fauteur de ses manquements. L’œuvre

classique de la Kabbale, le Zohar, donne de cette phrase une lecture à la fois littérale et

spirituelle. Nefech est interprété comme ne signifiant pas simplement une personne,

mais une âme. Et le verset se termine par un point d’interrogation. Ainsi la Torah

demande-t-elle Nefech ki te’heta ? Une âme peut-elle fauter ? Est-ce qu’une âme juive,

une yidishé néchama, une étincelle de divinité, peut réellement et véritablement

s’avilir en commettant un misérable péché ? Comment est-ce possible ?

La seule possibilité que cela arrive, c’est quand nous oublions qui nous sommes. Quand

nous ne sommes plus en contact avec notre spiritualité. Quand nous commençons à

souffrir d’amnésie spirituelle.

Et malheureusement, cela arrive. En fait, ce n’est pas si difficile à concevoir. Après tout,

nous vivons dans une société laïque et matérialiste. Les murs des anciens ghettos ne

sont plus là pour nous isoler. Nous sommes exposés au vaste monde avec toutes ses

diversions, en apparence plus alléchantes les unes que les autres. Même si nous nous

marions avec un/une coreligionnaire, nous devenons culturellement assimilés.

Lentement mais surement, dans ce cas, même une nefech, une âme juive, se met à

oublier qui elle est et peut tomber dans les filets du péché.

Vous vous rappelez du « sage » de Chelm et de son problème ? Il craignit qu’en se

rendant au bain public où tout le monde est déshabillé, il ne sache plus qui il est. Sans

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ses habits qui le distinguent des autres, il pourrait souffrir d’une crise d’identité. Alors

il conçut un plan. Il attacha un fil rouge à son gros orteil de sorte que, même au bain

public, il demeurerait différent. Hélas, en prenant sa douche, l’eau et la mousse

détendirent la ficelle qui glissa de son orteil. Pire encore : le fil rouge flotta jusqu’à la

douche suivante et s’enroula autour du gros orteil du bonhomme qui s’y trouvait.

Soudain, notre génie de Chelm s’aperçut que sa ficelle n’était plus là. Il se mit à

paniquer, en proie à une sérieuse crise identitaire. C’est alors qu’il vit que son voisin

portait son fil rouge. Sur quoi il se planta devant lui et lui cria « Je sais qui tu es, mais

moi, qui suis-je ? »

Qui êtes-vous ? Vous êtes un Juif, une Juive ! Un fils d’Abraham, d’Isaac et de Jacob,

une fille de Sarah, Rebecca, Rachel et Leah. Vous êtes un membre du « royaume de

prêtres et de la nation sainte ». Vous avez été libéré(e) d’Égypte et vous vous êtes

tenu(e) au Sinaï. Vous avez survécu à d’innombrables assauts contre votre vie et votre

foi. Vous avez émergé des cendres d’Auschwitz pour vivre de nouveau. Et vous

demandez « Qui suis-je ? » C’est là un sérieux cas d’amnésie nationale.

Alors le saint Zohar nous rappelle que nous ne sommes pas seulement « une personne

qui pourrait fauter ». Nous sommes une âme, et une âme pourrait-elle fauter ? Une

âme est par définition une partie et une parcelle du divin. Et, pour l’âme divine à

l’intérieur de nous, nous éloigner de notre source est absolument inconcevable.

De quelle autre façon pourrions-nous expliquer le fait qu’après 70 ans d’athéisme

communiste, les Juifs de l’ancienne Union Soviétique embrassent aujourd’hui avec

ferveur la foi de leurs ancêtres ? Ou que, après des années d’apathie, des Juifs

occidentaux de tous âges, sont désespérément en quête de spiritualité ? Ou encore que

la renaissance de la vie juive est devenue une réalité dans le monde entier ? Certes, il y

a des gens de bien dans ces endroits qui allument des feux et soufflent dessus jusqu’à

ce qu’ils soient des brasiers de foi. Mais ces feux ne prendraient pas s’il n’y avait pas

une braise ardente dans chaque âme juive, une braise qui, quoi qu’il advienne, ne peut

jamais s’éteindre.

Alors si jamais il vous arrive de douter de qui vous êtes, rappelez-vous du Zohar. Vous

êtes une âme. Et une âme ne meurt jamais.

© Copyright 2015, all rights reserved.

Rav Yossy Goldman est né à Brooklyn, New York au sein de la communauté Loubavitch.

En 1976, il fut envoyé par le Rabbi de Loubavitch en tant que Chalia'h (émissaire) pour

être au service de la communauté juive de Johannesburg en Afrique du Sud. Il est le

rabbin de la Sydenham Highlands North Shul depuis 1986 et le président de

l'Association Rabbinique Sud-Africaine.

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Pi et Le Temps

ou comment on a libéré l’humanité

de l’entrave du destin

Tzvi Freeman

Jadis, le temps était rond. Et puis un jour, nous

l’avons redressé et étiré, nous lui avons collé une

pointe de flèche à son extrémité et nous nous

sommes mis à surfer dessus. Cependant,

n’importe quel élève de collège sait que pour

aplatir un cercle, il faut produire un calcul infini

du nombre irrationnel pi. Il en ressort que,

lorsque l’on aplatit un cercle, quelque chose

d’infini apparaît.

Laissez-moi vous raconter ce qui s’est passé.

Voyez-vous, nos ancêtres comptaient leurs jours

en commençant par l’automne. Pourquoi

l’automne ? Parce que, disaient-ils, c’est à ce

moment que le cycle de la nature a commencé.

D.ieu a mis le monde en rotation le premier jour du mois d’automne de Tichri et il

continue depuis lors de tournoyer selon son cycle annuel.

Puis vint l’Exode et avec lui un nouveau départ. C’est quand D.ieu dit à Moïse : « Moïse,

J’ai une mitsva pour toi. La toute première mitsva que Je vais commander aux Enfants

d’Israël. À partir d’aujourd’hui, vous commencerez l’année en ce mois du printemps, le

mois dans lequel Je vais vous libérer d’Égypte. »

Dès lors, si le premier jour de Tichri demeura la tête de tous les jours de l’année,

Nissan, au printemps, devint la tête de tous les mois de l’année.

Cela paraît simple. Mais il y eut une légère complication :

« Et puis, Moïse, tu devras aligner ton calendrier sur les phases de la lune. La

réapparition de la nouvelle lune dans le ciel marquera le début de chaque mois. »

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Le problème est que les années lunaires ne correspondent pas aux années solaires.

Elles ont vis-à-vis d’elles un déficit de onze jours et quelques. Pourtant, D.ieu ne fournit

aucune indication supplémentaire.

Le choix de mesurer les années d’après le cycle de la lune plutôt que celui du soleil,

écrivait Rabbi Avraham Ibn Ezra au 12ème siècle, ne touche pas seulement au choix d’un

cycle différent. Les musulmans suivent aussi un cycle lunaire, de sorte que 34 années

lunaires s’effectuent en 33 années solaires. Mais il nous a été également prescrit de

veiller à ce que le premier mois, dans lequel tombe Pessa’h, demeure toujours au

printemps. Dès lors, il ne s’agit pas pour nous seulement de suivre un cycle. Nous

devons le déterminer. »

En d’autres termes, d’après Rabbi Ibn Ezra, si Moïse avait demandé à D.ieu comment

exactement nous devons résoudre cette énigme, D.ieu aurait répondu : « Là est

justement Mon intention : Je m’en remets à vous. »

Alors nous avons décidé qu’une fois de temps en temps nous ajouterions un mois à

l’année, pour repousser Pessa’h vers sa place, au printemps. Que signifie ce « de temps

en temps » ? C’est quand nous – c’est-à-dire la Cour Suprême juive qui représente le

peuple – le déterminons.

« La cour céleste tout entière se présente devant le Saint béni soit-Il, et demande

“Quand tombe Roch ‘Hodech ? Quand tombe Yom Kippour ?” Et Il leur répond :

“Pourquoi vous adressez-vous à Moi, alors que j’ai mis cela entre les mains des Enfants

d’Israël. Rendons-nous ensemble au tribunal terrestre et voyons ce qu’ils ont tranché.”

Si cela vous semble trivial, considérez le contexte : Vous êtes en Égypte Ancienne. Et

comme tout le monde le faisait dans ce monde-là, vous levez vos yeux vers les étoiles

et ce sont elles qui dictent votre destin. Les cycles de la nature, la crue du Nil, la pousse

de vos cultures, la fécondité de votre ventre, tout est déterminé par les mouvements

prédictibles des constellations. Ainsi en allait-il en Égypte, ainsi était-ce dans la

civilisation de Summer de laquelle provenait notre père Abraham, ainsi était-ce pour

les sages de l’Inde, pour ceux du Tao, du I Ching, et de tout système de sagesse

antérieur à la Torah. Chaque homme est né dans sa caste, son statut et son sort dans la

vie sont scellés par le karma/matta/cosmos depuis l’aube des temps. Les dieux eux-

mêmes sont soumis à ce grand cycle de l’existence dans la pyramide du temps. La

Grande Roue de la Vie tourne et tourne, indifférente aux efforts de l’homme ou à ses

aspirations, déclamant : « ... la vie de l’homme est un cycle de l’enfance à l’enfance et il

en est de même pour toute chose dans laquelle s’imprime un mouvement. »« Tout ce

qui fut sera, et tout ce qui sera a déjà été, car il n’est rien de nouveau sous le soleil. » Et

dans ce cas, « ...quel bénéfice peut-il y avoir à tous les efforts de l’homme ? »

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Mais désormais, bam ! : Hors du cercle et dans le siège du pilote. Le Cycle du Temps

n’a plus d’emprise sur nous. Maintenant nous sommes libres. Maintenant, c’est nous

qui allons déterminer le Temps.

C’est là notre première mitsva. La proto-mitsva de toutes les autres. Non pas le

commandement d’obéir comme des robots, mais de prendre en charge notre propre

monde. Un commandement qui libère et qui investit de pouvoir. Un commandement

pour briser les chaines du sort et prendre le Destin lui-même entre nos mains.

Ce qui éclaire une nuance fascinante de la langue hébraïque que beaucoup ne

remarquent pas : une année se dit en hébreu chana. Un mois est un ‘hodech. Chana

désigne quelque chose qui se répète indéfiniment, un cycle. ‘Hodech signifie

« nouveau ». Le soleil passe et repasse sans fin, mais la lune se renouvelle.

Voilà deux descriptions du temps diamétralement opposées : Chana est le temps en

tant que cycle, la prison décrite plus haut. Mais le temps peut également être décrit

comme ‘Hodech, comme nouveauté, comme réel changement. Un temps dans lequel

nous allons quelque part, où le futur réserve quelque chose dont le passé était

dépourvu. Un temps dans lequel la vie a un sens et une finalité. Le temps dans le sens

de ce mot tellement puissant qui a érigé la société moderne en une anomalie de

l’histoire : le Temps comme Progrès.

Lorsque Celui qui transcende tout temps et tout espace nous a arrachés aux entraves

de la servitude égyptienne, jetant à bas sa pyramide des castes sociales et faisant voler

en éclats son concept de déterminisme naturaliste, ce fut le moment où la liberté fit son

entrée dans le monde pour la première fois. Quand aujourd’hui des êtres humains

luttent quelque part pour un monde meilleur, leur histoire débute avec cet Exode. Pas

seulement parce que des esclaves furent alors libérés. Pas seulement parce qu’un

simple serf put appeler à l’aide le Maître de l’Univers, comme s’il s’agissait de son

propre père, et que les lois de la nature furent brisées pour lui. Mais parce que

l’humanité fut élevée en dehors et au-delà du cercle, détachée de la meule tyrannique

des dieux de la Nature, du Temps et du Sort. C’est à ce moment que la vie humaine prit

tout son sens et qu’Il nous dit : « Prenez votre destin en mains. Allez de l’avant. Si ce

n’est pas un monde dans lequel vous pouvez faire régner la paix, changez-le, faites-le

devenir ainsi. Si vous rencontrez de la souffrance, supprimez-la. Si votre karma sent

mauvais, dépassez-le. Ne soyez jamais satisfaits. Ne soyez pas les prisonniers du sort,

mais ses maîtres. »

« Ce monde est celui des fiançailles, mais le monde futur sera un mariage. Dans ce

monde, Il nous a donné la lune. Dans le monde futur, Il nous donnera le soleil, les

étoiles et tous les cycles de la nature. »

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Nous avons reçu une Torah avec une boite d’outils pour diriger le monde, pour le mener

vers son destin, pour révéler l’intention profonde pour laquelle il fut originellement

créé. Jusqu’à ce que, en fin de compte, la liberté pénétrera le monde entier, et le cercle

sera révélé dans sa véritable nature : l’infinité dissimulée.

© Copyright 2015, all rights reserved.

Rav Tzvi Freeman vit à Toronto, Canada. Il est l’auteur de nombreuses traductions et

synthèses de la pensée kabbalistique et ‘hassidique, parmi lesquels « Bringing Heaven

Down to Earth. »

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Le Alef de l’Étude

Le jour où le Tséma’h-Tsédek devait se rendre

pour la première fois au ‘Heder – école religieuse

-, il fut accompagné par son grand-père, Rabbi

Chnéour-Zalman. Le Rabbi demanda, alors, au

Melamed – maître d’école – de commencer sa

leçon par le premier passage de Vayikra.

Après le cours, l’enfant demanda à son grand-

père : « Pourquoi le Alef de Vayikra est-il écrit en taille réduite ? »

Rabbi Chnéour-Zalman se mit à réfléchir et il répondit : « Les lettres de la Torah sont

de taille moyenne. Dans certains cas exceptionnels, elles sont écrites en taille

supérieure ou inférieure à la moyenne. »

« Adam était la créature de D-ieu Lui-même, c’est pourquoi il était doté d’une

intelligence supérieure à la normale. Elle dépassait aussi le niveau de la sagesse des

anges. Conscient de ses qualités, il devint rapidement fier et orgueilleux. Ceci le mena

à la chute et le poussa au péché de l’Arbre de la Connaissance. »

« Moché était doté de qualités exceptionnelles et il en était conscient. Cependant, cela

n’éveilla pas chez lui quelque sentiment d’orgueil ; au contraire, son cœur était empli

de modestie. »

« Moché considérait qu’il jouissait d’une situation particulière, mais que si un autre

Juif avait reçu le même privilège que lui, il aurait certainement atteint, à partir de ce

potentiel, un degré supérieur au sien. Un autre homme aurait achevé des missions

plus importantes que Moché ben Amram »

« Adam était conscient et fier de ses aptitudes ; il pécha. C’est pour cela que la Torah

utilise, une fois (Chroniques 1 – 1), un grand Alef en écrivant son nom. Tandis que

lorsque la Torah rapporte que D-ieu s’adressa à Moché – l’homme le plus humble –

elle écrit Vayikra – il appela – avec un petit Alef. »

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Nous pouvons nous interroger sur la réponse du grand-père. Avait-il besoin

d’introduire ses propos par une présentation pas très élogieuse du personnage

d’Adam ? Ne pouvait-il pas se limiter à dire que le petit Alef représente la modestie de

Moché ?

En fait, Rabbi Chnéour-Zalman ne se limita pas à répondre à la question de l’enfant. Il

voulait lui transmettre une leçon fondamentale dans le service de D-ieu. Il ne pouvait

présenter ce concept sans faire ses remarques sur Adam.

Le fait d’être conscient de ses propres qualités ne constitue pas une faute en elle-même,

comme en témoigne cet aphorisme : « Il est important de connaître ses défauts, mais

il est indispensable de reconnaître ses propres qualités. » Mais, nous devons savoir

qu’un être aussi élevé qu’Adam succomba au péché à cause de sa fierté. Alors que la

reconnaissance par Moché de ses qualités ne le mena pas à un sentiment d’orgueil

déplacé. Il était conscient que toutes ses aptitudes étaient un don Divin et qu’elles

auraient pu être mieux utilisées par un autre individu. C’est ainsi que Moché sut rester

modeste.

L’homme doit savoir qu’il possède un immense potentiel spirituel. Cette prise de

conscience lui permet de surmonter toutes les épreuves qu’il rencontre dans la vie et

c’est ce qui lui permet de progresser. D’autre part, il doit reconnaître que les richesses

contenues dans son âme sont un don qu’il a reçu sans aucun effort. D’autres personnes

dotées des mêmes pouvoirs pourraient achever de plus hauts desseins. C’est ainsi que

l’homme peut rester véritablement humble.

Likouté Si’hoth Vol XVII

Page 17: Magazine vayikra 2015

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Le Midrash Raconte la Guéoula

Un Instant de Bonheur

« Une personne qui offrira une Min’ha – une oblation – à

Hachem... »

(Lévitique 2 –1)

La Min’ha était une modeste

offrande ; c’est pourquoi nos

sages rapportent, dans le

Midrash, le verset de Kohéleth (4

– 6) : « Plutôt une simple

poignée dans le calme, que

d’avoir les mains pleines en

peinant et en courant après le

vent. » Ils le commentent ainsi :

Il est préférable de maîtriser

quelques lois de la Torah que d’étudier sans cesse sans rien retenir.

Il est préférable d’avoir dix pièces de son labeur que d’aller emprunter des fortunes.

Il est préférable de donner la Tsédaka du peu que l’on a que de voler pour faire de la

bienfaisance.

Rabbi Béra’hia enseigne qu’un seul pas de D-ieu dans le domaine Egyptien fut plus

efficace que les mains pleines de Aaron et de Moché. Le verset dit (Exode 12 – 12) : « Je

traverserai l’Egypte cette nuit-là. » Ceci – un simple passage Divin – engendra la

Guéoulah. Alors que les pleines poignées de suie de fournaises de Moché et de Aaron

(Exode 9 – 8) n’apportèrent pas la délivrance.

Rabbi ‘Hiya dit qu’une petite poignée de Chabbath est préférable aux mains pleines du

labeur de la semaine, car Israël sera délivré de l’exil grâce au Chabbath, ainsi qu’il est

écrit (Isaïe 30 – 15) : « C’est par la paix et le repos que vous serez libérés. »

Rabbi Yaakov Bar Kourchy nous précise qu’une poignée – un instant – du monde futur

est préférable aux mains pleines de ce monde.

Midrash Rabba

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Cycles de la Vie

Un Anniversaire Juif

Votre jour à vous

L’établissement d’un « calendrier juif » fut la

première mitsva (commandement) que la nation

juive reçut de D.ieu. Ce calendrier unique est basé

sur le mois lunaire, mais il est parfois ajusté de

sorte qu’il reste synchronisé avec l’année solaire et

les saisons.

Ainsi, d’année en année, une date du calendrier juif

fluctue par rapport à d’autres systèmes de

calendrier, mais restera toujours à proximité de sa

date correspondante sur le calendrier grégorien

couramment utilisé (basé sur le soleil). Par

exemple, si votre anniversaire civil est le 15 juin,

jour de votre anniversaire juif sera toujours dans les

semaines qui entourent cette date.

Votre anniversaire juif a une double signification : a) Selon la tradition juive, votre

mazal (bonne fortune) est dominant le jour de votre anniversaire. b) En tant que

nation, nous célébrons les dates lors desquelles sont survenus des événements

particuliers qui ont affecté notre destin, appelés « fêtes ». En tant qu’individus, nous

célébrons les dates qui ont une signification personnelle – et quoi de plus important

que votre naissance ? C’est le moment où le Créateur a dit : « Voici, je te donne un

corps, une âme et une mission divine. J’ai une confiance absolue en ta capacité à la

réussir pour Moi. »

En 1988, le Rabbi, Rabbi Mena’hem Mendel Schneerson, de mémoire bénie, a lancé

une « campagne de l’anniversaire juif ». Il nous a engagés à mettre à profit au

maximum ce jour si particulier dans notre vie. Une journée pour réaffirmer la mission

que D.ieu nous a confiée, en s’améliorant et en se sanctifiant, nous-mêmes et le monde

qui nous entoure.

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Fêtes

Kitniyot : Ne sommes-nous pas un seul peuple ?

Aron Moss

Question :

Je suis ashkénaze (juif originaire d’Europe de l’Est) et ma femme est séfarade

(juive d’origine orientale). Elle a grandi en mangeant du riz à Pessa’h, chose que

la coutume de ma famille ne permettrait jamais. Chaque Pessa’h, nous avons la

même discussion : comment est-il possible qu’un groupe de Juifs puisse manger

du riz à Pessa’h et qu’un autre groupe ne le puisse pas ?

Ne sommes-nous pas tous de la même religion ? N’est-ce pas là un exemple de

comment la Torah peut être interprétée de bien des façons, et l’illustration du

fait qu’il n’existe pas un seul vrai judaïsme ?

Réponse :

En fait, lorsqu’on compare les manières

respectives des Juifs ashkénazes et séfarades de

célébrer Pessa’h, ont est plutôt stupéfait devant

les similitudes que par les différences. Les écarts

sont si mineurs et superficiels qu’ils viennent

seulement confirmer la règle : nous sommes un

seul peuple avec une seule Torah.

La Torah fait interdiction aux Juifs de

consommer ou même de posséder des produits

levés à Pessa’h. Cela signifie que tout produit

fabriqué à partir des cinq céréales (blé, orge,

épeautre, seigle, avoine), autre que la matsa, ne

peut consommé ou possédé pendant les huit

jours de la fête. Les Juifs vivant dans certaines régions ont pris sur eux une rigueur

supplémentaire et ont interdit le riz et les légumineuses à Pessa’h.

Les Juifs d’Orient, cependant, n’ont pas adopté cette coutume. Peut-être que les

conditions de production et de stockage de ces produits dans leurs pays ne justifiaient

pas cette précaution supplémentaire. Cela signifie que le menu du Séder d’une famille

juive d’Irak ou du Yémen différera grandement du repas servi à une table de Juifs

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allemands ou hongrois. Les premiers mangeront du riz, des pois, des haricots et du

maïs, alors que les derniers s’en abstiendront.

Mais c’est seulement le menu. Si vous regardez tous les autres aspects du Séder, vous

verrez qu’il est presque identique d’une communauté à l’autre. Pour illustrer cela,

imaginez le scénario suivant :

Prenez un Juif persan du 9ème siècle et téléportez-le à travers le temps et l’espace

jusqu’à la Pologne du 19ème siècle. Après avoir traversé le globe et fait un saut de mille

ans, il arrive à une époque et dans un pays qui lui sont totalement étrangers. Il marche

dans les rues complètement hagard, perdu et déboussolé.

Mais emmenez-le à un Séder et il se sentira comme à la maison. Certes, sa famille

d’accueil aura un teint de peau et un habillement différents, et ils consommeront des

plats ashkénazes étrangers à son palais persan, mais le Séder sera exactement le même

que celui qu’il célèbre chez lui avec sa famille. Il entendra les enfants poser les mêmes

quatre questions que ses propres enfants lui posent. Il mangera la même Matsa et les

mêmes herbes amères, boira les mêmes quatre coupes de vin et lira les mêmes prières

et citations bibliques. Même les chansons, quoique chantées sur des airs différents,

auront les mêmes paroles hébraïques.

Plus important encore, il entendra exactement la même histoire, l’histoire que chaque

famille juive a racontée chaque année depuis plus de trois mille ans. L’histoire de nos

ancêtres communs qui furent esclaves en Égypte jusqu’à ce que D.ieu les libère.

Nous formons toujours un seul peuple

C’est tout simplement incroyable. Deux mille ans d’exil n’ont pas affaibli notre lien

profond. La dispersion à travers le monde n’a pas desserré les liens que notre histoire

commune et notre destin unique ont forgés. Malgré toutes les divisions et les

dissensions dont nous nous plaignons tous, nous formons toujours un seul peuple. Et

cela se ressent à Pessa’h plus qu’à tout autre moment.

Plutôt que de vous focaliser sur les disparités superficielles entre les communautés,

considérez notre lien profond. Nous racontons tous la même histoire. D.ieu nous a fait

sortir d’Égypte pour faire de nous une nation, unie par la Torah, notre histoire

commune et notre but commun. Certains mangent du riz, d’autres pas, et cela

n’importe pas. Nous sommes une seule famille, les enfants d’Israël.

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Rav Aron Moss enseigne la mystique juive, le Talmud et la pratique du Judaïsme à Sydney en

Australie et contribue fréquemment à Chabad.org.

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Récit

Comment Rabbénou Tam fut sauvé des croisés

Rameru, une petite localité de

France, où le célèbre Rabbénou

Yaakov Tam (un éminent Tossafiste,

petit-fils de Rachi) avait installé sa

yéchiva, comptait parmi le petit

nombre de villes qu'épargna la

sauvagerie des Croisés qui, avant de

partir pour la Terre Sainte, volèrent

et massacrèrent des milliers de Juifs

sans défense. Un des plus jeunes élèves de Rabbénou Tam était Joseph, fils d'un riche

financier à la cour de l'évêque de Trèves, grande ville sur les bords du Rhin.

À l'âge de douze ans, Joseph fut envoyé à la yéchiva de Rameru pour étudier la Torah

et devenir une lumière en Israël. Bien que le jeune homme aimât beaucoup sa famille,

et particulièrement sa mère, il quitta la maison paternelle et une vie confortable pour

se rendre à l'école talmudique. Grâce à sa grande intelligence et à ses capacités

intellectuelles supérieures, Joseph fit de grands progrès, et après trois ans des études

intensives dans un groupe d'étudiants qui étaient tous plus âgés que lui, il se révéla le

meilleur élève. Il ne cessait d'espérer que le jour viendrait où il serait aussi savant que

les élèves plus âgés, qui étaient déjà de jeunes rabbins, destinés à devenir des chefs en

Israël.

Un après-midi, Joseph fit une promenade dans les champs. Depuis le matin de très

bonne heure, il s'était consacré à ses études et en se promenant ainsi, en suivant un

sentier dans une forêt, il pensait à tout ce qu'il avait appris ce jour-là et essayait de s'en

souvenir et de mieux le comprendre.

Subitement, il entendit le galop d'un cheval. Il se retourna et vit un homme masqué à

cheval, qui se dirigeait à toute allure dans sa direction, en tenant sur sa selle un garçon

frêle, bien habillé, qui avait environ le même âge que lui, Joseph.

Très vite il se mit, sur le côté de la route pour ne pas être renversé par le cheval, mais

parvint néanmoins à entrevoir le jeune homme dont l'expression du visage semblait

implorer secours. Joseph fut saisi de pitié, mais il ne pouvait rien faire, sans cheval et

sans armes. Ayant vu que le chevalier s'était écarté de la route et avait pris le chemin

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de la forêt, le jeune garçon suivit les empreintes laissées par les sabots du cheval, en

ayant soin de prendre toutes les précautions nécessaires pour ne pas être remarqué.

La nuit était déjà tombée, mais Joseph continuait toujours sa poursuite. Une heure

plus tard, il entendit les hennissements d'un cheval. S'approchant, il trouva le chevalier

masqué qui dormait dans l'herbe. Le jeune prisonnier était attaché à un arbre, et le

cheval était relié à la ceinture de son maître au moyen d'une longue corde.

Le sauvetage

Joseph fit signe au garçon de ne pas crier. Il le délivra des cordes avec lesquelles il était

attaché et coupa celles du cheval. Montant le malheureux garçon sur la selle, il s'enfuit

à cheval avec lui. Joseph était maintenant content que son père lui eût offert, dans sa

jeunesse, un poney sur lequel il s'était exercé à chevaucher. L'homme au masque s'était

réveillé au bruit du galop du cheval. Il essaya de désarçonner Joseph, mais celui-ci

réussit à se sauver en se faufilant habilement en zigzag entre les arbres. Une demi-

heure plus tard, Joseph se trouva hors de danger. Il s'arrêta près d'un petit ruisseau et

lava le garçon qui s'était évanoui de tant de fatigue et d'émotion.

Lorsque le garçon revint à lui, il raconta ce que lui était arrivé. Joseph fut heureux

d'apprendre qu'il avait sauvé la vie du fils d'un comte puissant qui habitait un château

non loin de Rameru. Le garçon avait été enlevé pendant qu'il chassait le faucon. Il était

très reconnaissant et demanda à Joseph de l'accompagner chez son père, le comte.

Mais Joseph déclina cette offre, car il savait qu'un étudiant de yéchiva comme lui n'était

pas fait pour le cadre de vie d'un château. Il donna le cheval au jeune homme, lui

indiqua le chemin et prit congé de lui. Ce dernier, avant de quitter Joseph, lui donna

une chaîne en or qu'il avait au cou, et Joseph ne put refuser ce témoignage de gratitude.

Quelques années plus tard, un jour de Chavouoth de l'an 4907, ou au mois de mai 1147,

une compagnie de Croisés attaqua Rameru et ravagea la yéchiva de Rabbénou Tam.

Les étudiants et leur maître furent traînés dans un champ ou se trouvaient déjà les

autres Juifs de la communauté de Rameru dont les maisons avaient été incendiées et

les biens saccagés.

Joseph, qui était à cette époque un adulte, était devenu un des élèves préférés du grand

rabbin. Les croisés l'enchaînèrent avec son maître avant de mettre à exécution leur noir

dessein de tuer tous les hommes juifs. Ils avaient déjà saisi Rabbénou Tam (ainsi nous

raconte Ephraïm ben Jacob, poète et historien du martyr des Juifs de cette époque) et

s'étaient mis à le frapper avec des barres de fer. Le saint rabbin saignait de quatre plaies

à la tête, lorsqu'un chevalier, à la tête d'un groupe d'hommes, survint sur les lieux. En

s'approchant encore davantage, il reconnut le médaillon qui sortait de la chemise

déchirée de Joseph. Sautant de son cheval, il l'embrassa et lui confia que c'était lui le

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jeune garçon qu'il avait sauvé quelques années plus tôt, et qu'il n'avait cessé de le

chercher.

Les assassins, frappés de stupeur, n'osaient plus lever la main contre les autres Juifs et

s'enfuirent, car le chevalier avait menacé de tuer lui-même quiconque oserait faire du

mal à ses chers amis. C'est ainsi que grâce à la bonne action d'un jeune garçon, un des

plus grands maîtres en Israël fut sauvé d'une mort certaine.

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Le Mariage

Les Dix Commandements du Mariage

Esther Piekarski

Dans le judaïsme, le concept du mariage ne

concerne pas uniquement la relation entre l’homme

et la femme ; notre relation avec notre Créateur est

également considérée comme un mariage. Notre

anniversaire de mariage est la fête de Chavouot, le

jour où nous avons reçu la Torah. Et de même qu’un

mariage se doit d’être continuellement renouvelé,

nous revivons chaque année le moment

extraordinaire du don de la Torah, notre mariage

avec D.ieu.

C’est tous réunis que nous avons reçu la Torah,

hommes, femmes et enfants, et il nous est enseigné

que le mont Sinaï lui-même, la plus petite et la plus

humble de toutes les montagnes, fut suspendue au-dessus de nos têtes, symbolisant le

dais nuptial : la ‘houpah. Quand nous reçûmes les Dix Commandements, les

fondements de la Torah, ceux-ci furent notre contrat de mariage, la ketoubah,

représentant l’amour, l’engagement, le respect et la responsabilité au sein de cette

relation.

Chaque fois qu’un homme et une femme se marient, le moment où ils se tiennent sous

la ‘houpah est une reconstitution de notre noce avec D.ieu, le jour où nous reçûmes ces

Dix Commandements. Il est donc clair qu’en approfondissant ces commandements,

nous y trouverons non seulement des conseils d’ordre spirituel pour améliorer notre

mariage, mais également des directives pratiques essentielles.

Les Dix Commandements :

1. Je suis l’É-ternel ton D.ieu qui t’a fait sortir d’Égypte, de la

maison d’esclavage.

Soyons clairs, dans mon travail de formatrice et de conseillère matrimoniale, j’ai

rencontré beaucoup de gens qui se demandaient s’ils avaient épousé la bonne

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personne. Ils pouvaient être mariés depuis des décennies, mais ils n’étaient toujours

pas sûrs à 100 %. Certains avaient pu être sûrs par le passé, et puis le doute s’était

insinué en eux. « Ai-je été trop précipité(e) ou immature en prenant ma décision ? Est-

ce la bonne personne ? Serais-je plus heureux(se) avec quelqu’un d’autre ? Depuis

notre mariage, avons-nous évolué dans des directions différentes, sommes-nous

devenus différents ? »

Oui, vous étiez immature quand vous vous êtes marié(e), mais c’est une bonne chose.

Vous vous êtes rencontrés quand vous étiez plus jeunes et encore flexibles et vous avez

grandi ensemble. Oui, vous avez tous deux changé et évolué depuis votre mariage, mais

si vous vous incluez mutuellement dans les changements et le développement, ceux-ci

ne feront qu’accroître l’intérêt que vous vous portez l’un à l’autre.

Ne vous y trompez pas : le doute peut tuer n’importe quel bon mariage. Imaginez ce

qu’il peut faire à un mariage fragile. J’ai rencontré des femmes qui ne purent être

heureuses qu’après avoir reconnu et voulu accepter : « Cet homme est mon mari. C’est

l’homme que j’ai voulu épouser. » Lorsqu’on reconnaît cette décision, on reconnaît que

c’est l’homme avec lequel on est destinée à demeurer, à travailler, à vivre, à élever des

enfants, à payer des factures, à trouver des solutions et à vieillir : cet homme et aucun

autre.

Dans le premier commandement, le premier mot est Anokhi. Ce mot signifie « Je »

dans la langue égyptienne. Pourquoi D.ieu choisit-il de commencer le don de la Torah,

le tout premier des Dix Commandements, dans une langue étrangère et non en

hébreu ?

À ce moment-là, nous, le peuple juif, venions à peine de sortir d’Égypte. Bien que nous

ayons fait usage de l’hébreu, l’égyptien nous était également devenu familier. D.ieu a

choisi de s’adresser à nous dans une langue commune, constituant un « terrain

commun » pour amorcer la relation. Cela recèle d’une leçon pour nous tous.

À un moment de sa vie, une femme peut en venir à se dire : « Il est tellement différent

de moi. » Cependant, avec des efforts et du dévouement, un terrain commun peut être

trouvé. S’il vous faut pour cela « parler une langue étrangère » pendant quelque temps,

faites-le.

L’utilisation du mot Anokhi, « Je », nous enseigne que D.ieu a investi toute Son essence

dans la Torah. La leçon pour nous est que nous devons investir tout notre cœur et toute

notre âme dans notre mariage.

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« Qui t’a fait sortir d’Égypte »

Pourquoi D.ieu continue-t-il de nous rappeler d’où nous venons ? Est-ce à ce point

agréable de s’entendre dire que nous fûmes des esclaves ? Ne pouvons-nous pas

simplement oublier le passé et aller de l’avant ?

Nous venons tous de quelque part. Bien que nous souhaitions entamer notre vie

maritale aussi neufs que des nouveau-nés, le fait est que nous y arrivons avec notre

histoire personnelle, notre enfance, nos habitudes, nos attentes, nos différences et

peut-être même, à D.ieu ne plaise, nos traumatismes. S’il y a dans notre passé quelque

chose qui doit être réparé, il faut s’y atteler et ne pas le balayer sous le tapis. Toute

chose escamotée aujourd’hui reviendra amplifiée demain ou la semaine prochaine ou

dans dix ans. Tôt ou tard, elle devra être affrontée, examinée et traitée. Et plus on s’y

prend tôt, bien mieux on se portera. On peut vraiment se blesser, soi-même comme

d’autres membres de la famille, en trébuchant sur toutes ces bosses sous le tapis.

Tant que nous n’avons pas assumé notre « passif », la tentation existe de faire porter à

notre conjoint la responsabilité de nos angoisses. Y a-t-il quelque chose en nous qui ait

besoin d’être réparé ? Quelque chose qui remonte à très loin ?

Nous ne sommes pas les seul(e)s à avoir un passé. Nos conjoints, eux aussi, viennent

d’un foyer différent, ont fréquenté une école différente ou ont peut-être grandi dans

une culture différente. Aussi semblables que nous pensions être, nous serons toujours

différents. Parfois une personne est vexée par quelque chose que son conjoint fait ou

ne fait pas, parce qu’elle se dit qu’il « devrait savoir ». Par exemple, vous avez peut-être

grandi avec une certaine manière de célébrer votre anniversaire dans laquelle vous

aviez toujours un gâteau et des cadeaux. Mais il est possible que les choses se soient

faites tout à fait différemment chez ses parents. Donc si vous ne lui dites jamais ce à

quoi vous vous attendez, vous ne pouvez pas être vexé(e) si votre conjoint ne sait pas

que vous voulez un gâteau et des cadeaux. Chaque partenaire doit prendre le passé de

l’autre en considération.

2. Tu n’auras pas d’autres dieux devant Moi

Ne regardez pas d’autres hommes ; ne comparez pas votre mari aux maris d’autres

femmes.

Ne regardez pas d’autres femmes ; ne comparez pas votre femme aux femmes d’autres

hommes.

J’ai récemment reçu un appel d’une femme que je ne connaissais pas. Elle voulait me

parler. Elle était malheureuse. Elle était mariée depuis plusieurs années et s’était

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soudainement rendue compte que son mari n’était pas aussi intelligent, poli, raffiné,

bien élevé, sophistiqué, que...

Alors qu’elle parlait, il m’a semblé qu’il manquait une partie de sa phrase. « Il n’est pas

aussi bien que... » Que qui ? ai-je demandé.

Elle ne répondait pas. En insistant, j’ai demandé s’ils étaient récemment sortis avec un

autre couple. Surprise, elle s’est exclamée : « Oh, vous nous avez vus au restaurant ? »

(La vérité c’est que je ne savais même pas à qui je parlais !)

Je l’ai assurée que je ne les avais pas vus, mais je lui ai expliqué qu’il était évident qu’elle

comparait son mari à quelqu’un d’autre et je lui ai demandé de me raconter ce qui

s’était passé.

Elle a tristement décrit comment la nuit précédente, au restaurant, le mari de son amie

avait tiré la chaise pour sa femme, comment il avait pris son manteau et l’avait

soigneusement accroché pour elle. Son propre mari n’avait pas fait cas de sa chaise ni

de son manteau. Le mari de l’autre femme avait su quoi commander et savait même ce

que sa femme préférait. Son propre mari était resté assis à attendre qu’elle commande

pour lui, non sans avoir déclaré qu’il détestait la nourriture sophistiquée. Il a alors fait

une blague sur les gens qui mangent autre chose que des steaks-pommes de terre.

L’autre homme avait été si raffiné et distingué, tandis que son propre mari avait

accidentellement offensé le serveur. Et l’autre mari connaissait même tout sur les vins !

Elle était rentrée à la maison se sentant très déçue de son mari.

Ceci est absurde, bien sûr. Un connaisseur de vins n’est pas ce qui fait un bon mari !

On pourrait même soutenir que l’inverse est vrai.

Concentrez-vous sur ce qui est bon chez votre conjoint, sur les choses qui sont

importantes. En les reconnaissant, vous les renforcerez. Le remercier pour sa patience

avec les enfants, par exemple, renforcera cette qualité en lui. Reconnaissez et renforcez

le bon.

Comparer ne peut que causer des problèmes. C’est votre conjoint ; il n’y en a aucun

autre.

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Esther Piekarski est une émissaire du Rabbi de Loubavitch à Tel Aviv où elle enseigne aux futurs

mariés ainsi que dans le cadre de nombreux séminaires. Elle est aussi une conférencière de

renommée internationale.