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MEMOIRE DE MASTER ÉTUDE DE LA CONNECTIVITE ET DU CONCEPT DHYPERCONNECTIVITE CHEZ LES 18-25 ANS Chloé BARRANCO GALEA Directeur de mémoire : Benoît d’AIGUILLON Année 2014-2015 Master 2 Information-Communication Spécialité Communication et Contenus Numériques Parcours Stratégie de Communication ~

Mémoire fin d'études

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Mémoir de fin d'étude

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  • MEMOIRE DE MASTER

    TUDE DE LA CONNECTIVITE ET DU CONCEPT

    DHYPERCONNECTIVITE CHEZ LES 18-25 ANS

    Chlo BARRANCO GALEA Directeur de mmoire : Benot dAIGUILLON

    Anne

    2014-2015

    Master 2 Information-Communication

    Spcialit Communication et Contenus Numriques

    Parcours Stratgie de Communication

    ~

  • TUDE DE LA CONNECTIVITE ET DU

    CONCEPT DHYPERCONNECTIVITE CHEZ

    LES 18-25 ANS

    Je, soussign(e) Chlo Barranco Galea, certifie que le contenu de ce mmoire est le rsultat

    de mon travail personnel. Je certifie galement que toutes les donnes, tous les raisonnements

    et toutes les conclusions emprunts la littrature sont soit exactement recopis et placs

    entre guillemets dans le texte, soit spcialement indiqus et rfrencs dans une liste

    bibliographique en fin de volume. Je certifie enfin que ce document, en totalit ou pour partie,

    na pas servi antrieurement dautres valuations, et na jamais t publi.

    Chlo BARRANCO GALEA

    Directeur de mmoire : Benoit DAIGUILLON

  • Table des matires

    INTRODUCTION ...................................................................................................................... 2

    1. REVUE CRITIQUE DE LA LITTERATURE ................................................................... 5

    1.1. La gnration Y sous le microscope ............................................................................ 6

    1.2. Lhyperconnectivit : dfinition et tat ....................................................................... 9

    1.3. Les connexions et leurs effets .................................................................................... 13

    2. METHODOLOGIE ........................................................................................................... 19

    2.1. Notre terrain : les 18-25 ans en France ...................................................................... 19

    2.2. Nos mthodes de collecte .......................................................................................... 19

    2.3. Traitement des donnes recueillies ............................................................................ 21

    3. ETUDE ET ANALYSE DE LENQUTE ...................................................................... 23

    3.1. Lhyperconnectivit remise en questions .................................................................. 23

    3.2. La gnration Y : telle quon la dcrit ? .................................................................... 32

    3.3. Des consquences de la connectivit ......................................................................... 41

    CONCLUSION ........................................................................................................................ 47

    BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... 49

    ANNEXES ............................................................................................................................... 52

    1. Verbatim de lentretien collectif.................................................................................... 52

    2. Questionnaire en ligne ................................................................................................... 76

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    INTRODUCTION

    Un changement fondamental et dimportance mondiale est en train de se produire de notre vivant : le passage de la culture imprime la culture numrique (Weber, 2014).

    LHomme a toujours eu le dsir et le besoin de communiquer, mais depuis larrive dinternet et des avances technologiques qui y sont lies, lHomme a pu abolir la dimension temporelle et gographique en trouvant de nouveaux moyens de communiquer, et cela sur de plus en plus

    dcrans et de plus en plus souvent. Nous vivons donc toujours plus connects et ces connexions sont devenues tellement incorpores dans nos vies quotidiennes que, plus que devenir normales,

    elles sont devenues la norme. De nos jours, le portable, transform en smartphone, est un outil

    de pointe de communication. Objet intime port en permanence, il est consult plus de 100 fois

    par jour (Bodier, 2014).

    Les tablettes, hybrides entre le portable et lordinateur, deviennent quant elles de plus en plus populaires (CREDOC, 2014). Enfin linternet des objets pointe le bout de son nez, promettant dtre la nouvelle tape de lhyperconnectivit (The Economist, 2014).

    Cest ce concept d hyperconnectivit qui va nous intresser dans cette tude. Il est utilis de plus souvent dans de nombreux contexte pour dcrire nos interactions numriques et

    particulirement celles des jeunes de la gnration Y, aussi connus sous le nom de digital

    natives (Howe & Strauss, 2000). Ns approximativement entre 1982 et 2002, cest une gnration duque, avec un grand pouvoir dachat, et la nouvelle cible prfre des publicitaires, qui utilisent de plus en plus de stratgies online pour les atteindre. Dans cette

    perspective de marketing et de prospective, il parait intressant de voir quel est le lien entre

    cette gnration, lhyperconnectivit, et les consquences que cette dernire peut avoir sur ces individus, qui constituent une gnration prpondrante de notre nation.

    La problmatique quexplorera ce mmoire est donc: Etude sur la gnration des 18-25 ans en France : la multiplication des connexions tendt-elle vers lhyperconnectivit et quelles en sont les consquences?

    Nous tudierons particulirement les 18-25 ans car ce sont des adultes mergents , un

    concept dfini par le professeur amricain de psychologie Jeffrey Jensen Arnett comme tant

    un stage de dveloppement critique entre la priode de ladolescence et lge adulte. Pendant cette priode, les individus dterminent le genre de personne quils seront par rapport leurs visions et valeurs personnelles, leur vie amoureuse et style de vie.

    Ce stage de dveloppement liminal est important car les individus sont capables dexprimenter avec leur identit dans un contexte qui nest pas contraint par la surveillance parentale qui caractrise ladolescence, ni par toutes les responsabilits lies lge adulte. Les tudiants sont obligs de faire une srie dajustements pour sadapter leur nouveau mode de vie, ces ajustements passent par lintgration acadmique mais aussi par des ajustements personnels, motionnels et sociaux. (Gray, Vitak, Easton & Ellison, 2013, p.194).

    Cest donc un moment critique de la vie des individus de cette gnration, qui correspond la sortie de ladolescence et du foyer parental, au commencement de la prise de responsabilits et qui va jusqu lentre dans la vie active. Les 18-25 ans sont aussi les plus quips en priphriques connects et ils en sont les plus grands utilisateurs, comme nous le verrons plus

    tard (CREDOC, 2014).

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    La plupart des travaux sur la gnration Y et sur lhyperconnectivit sont anglophones, mais de plus en plus de travaux franais sintressent ces sujets de recherche dcoulant de la rvolution communicationnelle de ces dernires annes. Les publications sur la gnration Y sont

    principalement axes sur des perspectives dducation, de management et de marketing. Les questions qui reviennent sont : comment lentre de cette gnration va-t-elle impacter le milieu du travail ? Quelle est sa raction face aux mthodes denseignement actuelles ? Comment les atteindre et construire une relation avec eux en tant quentreprise ? Malgr une multitude de travaux sur les rseaux sociaux, les usages du portable ou, chez nos

    amis anglophones, les media and internet studies ainsi que la computer-mediated

    communication , ce concept gnrationnel et lhyperconnectivit sont rarement associs pour tre tudi en tant que tels, et le nombre de travaux sur lhyperconnectivit reste moindre. Cest un terme qui est pass dans la culture populaire et technologique sans vraiment avoir t tudi en profondeur de manire scientifique. Il est en gnral attribu sans prise en compte de

    critres particuliers et dlimitant, et souvent utilis de manire ngative, impliquant un excs.

    Cest pourquoi dans ce mmoire, nous allons nous poser plusieurs questions :

    QR1 : Le fait de qualifier les 18-25 ans de la gnration Y d hyperconnects est-il justifi ?

    QR2 : Les autres caractristiques attribues cette gnration sont-elles dpendantes de

    lhyperconnectivit ?

    QR3 : Quelles sont les consquences positives et ngatives de la multiplication des connexions.

    Les jeunes de la Generation Y sont dit hyperconnects. En prouvant ou rfutant cet tat, nous

    verrons si les autres caractristiques qui leurs sont attribues se maintiennent, et nous feront

    ensuite un point sur les consquences positives et ngatives de la multiplication des connexions

    sur les 18-25 ans.

    Pour rpondre ces questions, nous allons tudier des chantillons de la population des 18-25

    ans prsents en France, qui correspondent aux adultes mergents dArnett (2000). Ils reprsentent 6 169 504 individus daprs le recensement de lINSEE au 1er janvier 2015. Pour permettre une analyse aussi bien quantitative que qualitative dchantillons de cette population mre, nous allons combiner lutilisation dun sondage et dun focus group, ou entretien collectif semi-directif.

    Le sondage permettra datteindre un nombre de gens important et ainsi de pouvoir analyser les donnes en pouvant les gnraliser un minimum, et lentretien pourra mettre en vidence de nouvelles informations concernant le sujet et tester les ractions des participants par rapport

    ltat des savoirs les concernant.

    A travers ce mmoire, nous tenterons de dmontrer que lhyperconnectivit nest pas encore un terme assez bien dfini pour tre utilis en tat, et que les 18-25 ans sont vritablement

    reprsentatifs dune priode de transition, o les individus reconnaissent les attraits et bnfices de la technologie aussi bien que ces dangers et o le temps dconnect revt une

    importance capitale.

    Nous essaierons galement de faire un point sur les consquences positives et ngatives de la

    multiplication des connexions et nous verrons quelles sont assez quilibres.

    Lhyperconnectivit tant un sujet assez vaste, avec de nombreuses applications dans des domaines varis (conomie, technologie, marketing notamment) nous ne dvelopperons pas le

    concept dinternet des objets plus avant, nous ferons limpasse sur ses implications dans le e-marketing et le e-business et nous ne traiterons pas le sujet des identits numriques ou de

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    lutilisation des donnes personnelles publies sur internet, car cela ne rentre pas dans le cadre strict de notre recherche et ne serait pas pertinent. Nous mettrons galement de ct le domaine

    du marketing et du management par rapport la gnration Y.

    Pour mener bien cette recherche, nous tudierons dabord plus en profondeur le cadre et les apports thoriques qui concernent ce sujet afin de bien dfinir les concept cls, puis nous

    explorerons les mthodes appliques au terrain, soit le questionnaire et lentretien, avant de voir quels rsultats ces mthodes ont donn, de les analyser et den discuter afin dessayer de rpondre aux questions poses. Pour finir, nous verrons quelles ont t les limites de notre

    mthode ou de notre sujet, car il y en a toujours, et nous rflchirons de futures possibilits

    dapprofondissement.

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    1. REVUE CRITIQUE DE LA LITTERATURE

    Pour rechercher les informations ncessaires la comprhension de ces concepts et avoir une

    vision densemble de ce qui les relie, nous avons utilis plusieurs moteurs de recherche comme Google mais aussi Ixquick et des bases de donnes telles que Cairn, qui regroupe des revues,

    articles, ouvrages et magazines en sciences humaines et Perse, un autre portail rpertoriant des

    publications scientifiques.

    Nous avons voulu nous concentrer sur des publications scientifiques, publies par des

    acadmiques destinations de leurs pairs en vue de faire avancer les savoirs sur le sujet. Les

    recherches ont t faites principalement en anglais, vu que les anglophones sont plus avancs

    dans cette branche dtude que nous. Les mmes mots-cls ont cependant t essays en franais galement. Voici une liste non-

    exhaustive des mots-cls utiliss :

    Hyper-connectivity / Hyperconnectivity / Hyper-connectivit / Hyperconnectivit

    Dfinition hyperconnectivit / hyperconnectivity definition

    Millenials / Digital natives / Generation Y / Gnration Y

    Millenials caracteristics / Generation Y caracteristics/ GenerationY definition / caractristiques gnration Y / Dfinition Gnration Y

    Hyperconnectivity problems / Hyperconnectivity consequences / Consquences hyperconnectivit

    Hyperconnectivity stress / Hyperconnectivity social effects

    Internet des objects / Internet of things

    Culture numrique / Digital culture + hyperconnectivit/hyperconnectivity

    Computer-mediated communication / Communication assiste par ordinateur

    Media studies / Internet studies / Internet studies hyperconnectivity / Connectivity studies

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    Statistiques connectivit / Statistiques quipement connect / INSEE1 / ARCEP2 / FFT3 / EHESS 4 / CNRS5 / GREA6 / CREDOC7

    La recherche fut compliqu car en anglais, le terme hyperconnectivity est aussi un terme

    mdical, or ce domaine de la mdecine est bien plus document que celui qui est le ntre, nous

    poussant utiliser beaucoup de bases de donnes spcialises pour trouver des rsultats

    pertinents. Pour trouver des publications intressantes, nous avons aussi beaucoup utilis les

    bibliographies des articles et ouvrages tudis de manire nous renvoyer des ouvrages

    importants et des auteurs de rfrences que nous naurions peut-tre pas remarqu sans cela dans la multitude de rfrences disponibles sur internet.

    La plupart de nos rfrences bibliographiques sont soit amricaines, soit franaises. Nous avons

    essay de trouver des publications rcentes afin que linformation soit la plus juste possible tant donn que ce sujet a une volution rapide. Il ny a que certaines thories de bases qui datent davant les annes 2000. La plupart des rfrences viennent de journaux et revues scientifiques, certaines proviennent dorganismes de statistiques et dtudes nationaux, et enfin quelques ouvrages ont aussi pu tre utiliss, dont des manuels amricains et franais.

    Nous allons maintenant passer plus prcisment en revue les ancrages thoriques des principaux

    concepts que nous mobiliseront dans ce mmoire.

    1.1. La gnration Y sous le microscope

    Il existe plus de 70 qualificatifs pour dcrire cette gnration (Monneuse, 2012) et le terme de

    gnration Y reste trs controvers, mme par les membres de sa propre gnration.

    Cependant la littrature scientifique les nomment ainsi, ou le plus souvent par le terme

    Millenials , qui date de 2000. Cette dernire appellation vient dN.Howe et W. Strauss, sociologues amricains pionniers de la recherche sur les gnrations.

    Leurs tudes sont cependant parfois critiques par des historiens comme ntant pas fondes sur des lments trs scientifiques.

    Les chercheurs saccordent dire que les membres de la gnration Y sont ns entre 1982 et 2002, mme si ces dates changent lgrement dun dmographe lautre. Cest une gnration marque par sa familiarit et son usage lourd de la communication, des mdias de masse et de la technologie digitale et qui met laccent sur cet usage comme la caractristique principale de leur gnration, daprs Keeter (2010).

    1 Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques

    2 Autorit de Rgulation des Communications Electroniques et des Postes

    3 Fdration Franaise des Tlcoms

    4 Ecole des Haute Etudes en Sciences Sociales

    5 Centre national de Recherche Scientifique

    6 Groupement Romand DEtude des Addictions

    7 Centre de Recherche pour lEtude et lObservation des Conditions de Vie

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    Keeter a conduit cette recherche linitiative du Centre de Recherche Pew, qui est un centre amricain apolitique qui se considre comme un fact tank et conduit rgulirement des

    sondages dopinion, des recherches dmographiques, des analyses de contenus mdiatiques etc. Pour eux, les Millenials considrent des comportements comme twitter, textoter ou rseauter

    sur les rseaux sociaux comme normaux et faisant partie de la vie quotidienne.

    Pour eux, la technologie relve du domaine de lutilit, du confort et de lintgration, et elle est implique dans tous les aspects de leurs vies (Merritt & Neville, 2002).

    Richard Sweeney, chercheur et libraire de lInstitut de Technologie du New Jersey, a conduit des entretiens dans une douzaine duniversits amricaines pour comprendre comment ces jeunes se comportaient et comment il pouvait lappliquer afin de faire changer le management des collections des bibliothques universitaires, qui pour linstant est statique et peu dvelopp sur internet.

    Il crit qu ils sont une gnration norme dimpatients, qui apprennent par la pratique, des natifs du numrique, multitches, et des joueurs qui aime le monde lisse et connect et qui

    attendent une connectivit nomadique 24/24. 8

    Il leur attribue certaines caractristiques inhrentes leur gnration. Pour lui, le fait quils soient ns la mme priode que le phnomne de la longue trane (Anderson, 2009) fait quils sont habitus ce quon leur propose un vaste choix de produits et de services et attendent cette abondance de choix dans tout ce quon leur propose. Sweeney pense aussi que ce sont des gens qui prfrent apprendre par la pratique et linteraction et ne lisent jamais les instructions 9. Ils prfrent garder un emploi du temps flexible afin de

    pouvoir le rarranger pour profiter de meilleures propositions tout moment. Ils sattendent ce que les produits et services quils choisissent soient personnalisables et puissent sadapter leurs vies changeantes. Ces sont des impatients qui dtestent les files dattentes et les retards. Ils naiment pas perdre leur temps et le prouvent aussi en tant multitches , cest--dire quils sont habitus jongler entre plusieurs tches en mme temps afin dtre plus efficaces et de ddier plus de temps ce qui leur plat.

    Ils sadaptent plus vite aux nouvelles technologies parce quils ont grandi avec, et ce sont des communicants qui aiment rester en contact constamment avec leurs amis. Cest une tude assez fiable que propose Sweeney car ses recherches ont t entreprises sur diffrents campus dans

    tout le pays, regroupant ainsi un chantillon danalyse plutt fiable. Nanmoins, nous navons pas accs ces tmoignages et ils ne figurent pas dans sa publication, ce qui fait que son

    interprtation est la seule laquelle nous pouvons nous fier, ce qui nest peut-tre pas la mthode la plus objective.

    Cette soif de contacts permanents avec leurs pairs, qui passent souvent par lintermdiaire des rseaux sociaux, est questionne par Denis MacQuail, thoricien de la communication et figure

    dans le domaine la communication de masse, dans son livre McQuail Mass Communication

    Theory, paru en 2005. Pour lui, la plus grande source de motivation la connexion pour les

    gens de cette gnration est le besoin dintgration et dinteraction sociale. Les activits relies internet sont principalement des activits dinteractions sociales o les gens changent, apprennent, grent leurs relations avec autrui, partagent et passent le temps avec dautres

    8 Sweeney R., Millenials Behaviors and Demographics, New Jersey Institute of Technology, 2006, page 1.

    9 Ibid. Page 3.

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    personnes. McQuail tudie la communication de masse depuis le dbut des annes 1990, et bien

    que dans sa thorie de lutilit et de la rception des mdias il voque la difficult comprendre comment les gens reoivent un mdia, ses travaux sont considrs comme des bases et sont

    mmes souvent tudis en cours.

    Contrairement cette perspective, Tim Elmore a publi des livres en 2010 et 2012 o il partage

    son dsaccord avec le fait de dcrire les membres de la gnration Y en tant que prolifiques

    communicants qui apprennent mieux par la pratique et les cas concrets. Elmore pense que si

    ces individus sont constamment en train de communiquer et toujours connects, ce nest pas entre eux, mais avec la technologie et internet. A cause de cette connexion permanente la

    technologie, il soutient que les individus perdent leurs comptences sociales et leur capacit

    tenir une vraie conversation en face face (2010). Il affirme aussi que les jeunes pensent avoir

    un savoir d lexprience, mais quen fait ils nont quun savoir informationnel et quainsi leur confiance en soi est base sur des fondements uniquement virtuels. Elmore appelle ce

    phnomne, la maturit artificielle (2012). Son travail connait cependant certaines limites

    majeures. Premirement, il se base uniquement sur des adolescents, de plus il utilise beaucoup

    de gnralisations et dmontre un certain biais religieux.

    Un franais apporte une rponse intressante cet argument, le chercheur Marc Lacaille dit en

    2011 que Je communique donc je suis , telle pourrait tre la maxime de la gnration

    numrique.

    Alors que certains voient dans les rseaux sociaux numriques des rseaux antisociaux du

    fait de labsence de coprsence physique relle, daucuns la considrent comme un facteur de sociabilit augmente .

    Cette dernire notion doit toutefois tre nuance : dune part, celle-ci se dveloppe essentiellement dans une fonction de maintien ou damplification des liens avec le groupe dappartenance ; dautre part, la relation de face face en coprsence physique dans la vie relle reste, chez la trs grande majorit des jeunes, considre comme la relation

    authentique. 10 Cest la vision qui se gnralise de plus en plus daprs nos recherches.

    Marie Boton, journaliste pour Alternatives Economiques, France Culture, La Croix et Etudes,

    une revue de culture contemporaine, confirme ce principe en 2013 dans son article La

    gnration Y, une classe dge faonne par le Net . Elle y affirme qu On aurait tort de voir dans cette cybersociabilit une duplication des relations sociales noues dans la vraie

    vie. Les changes en ligne obissent dautres codes communicationnels .11 La gnration Y, pour elle, cest aussi une gnration qui tient la flexibilit en haute estime. Elle cite le sociologue Olivier Donnat ce sujet avec lexemple de la tlvision : Les 15-30 ans ont du mal se plier aux rgles de la tlvision qui imposent dtre disponible tel jour telle heure pour regarder un programme. Ces jeunes tiennent avoir une plus grande matrise

    de leur temps libre. (Donnat O. 2009, p.32.)

    Les digital natives sont aussi de fervents dfenseurs de la consommation par tlchargement et

    de linternet gratuit et partag. Pour Marie Boton, Consciemment ou non, les digital natives militent pour que les biens culturels deviennent des biens publics. (Boton, 2013, p.37)

    Elle soutient galement que la gnration Y est une gnration lesprit critique aiguis, la

    10 Lacaille M., Les univers soci@ux et culturels des jeunes comme terreau d'initiatives , Pour, 2011/4 N 211,

    p. 157-163. DOI : 10.3917/pour.211.0157. Page 161.

    11 Boton M., La gnration Y, une classe dge faonne par le Net , Etudes 7/2013 (Tome 419). Page 35.

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    limite du dsenchant. Les 15-30 ans sont distants et circonspects vis--vis des grands

    discours idologiques, des luttes syndicales et plus largement des institutions [] Dsenchante diront certains, lucide nuanceront dautres, la gnration Y peine en tout cas croire en quoi que ce soit. (Boton M., 2013, p.39)

    Enfin, elle introduit une notion trs intressante, celle dun glissement de socialisation allant dune socialisation verticale parents-enfant vers une socialisation horizontale, de pairs pairs . Un apprentissage passant donc de pres pairs si lon peut dire, changeant la place du parent et faisant une place importante aux pairs.

    Par rapport aux limites de ces dclarations, nous devons nous poser la question de la

    mthodologie. Ici Marie Boton ne fait quun compte rendu de ce que diffrents sociologues ont remarqu et y apporte son interprtation. Bien que cette publication semble correcte et

    possde une argumentation bien taye, elle reste assez subjective car soumise linterprtation de son auteure.

    Bien que ces tudes soient strictement ralises dans leurs pays respectifs, il est intressant de

    constater que la dfinition de la gnration Y est similaire aussi bien pour les amricains que

    pour les franais sur la plupart des caractristiques attribues cette gnration : attitude envers

    la technologie, besoin de flexibilit, fonctionnement multitche, adoration des mdias sociaux,

    impatience, et surtout, besoin constant dtre connect, ou hyperconnectivit. Cette gnration est soumis un flot dinformation norme depuis son plus jeune ge et ces caractristiques sont bien reprsentatives des mcanismes quelle a d dvelopper pour intgrer et contrler son environnement.

    Maintenant que nous avons vu limportance prpondrante de la connexion permanente pour les membres de notre chantillon (18-25ans), nous allons essayer de dfinir le concept

    d hyperconnectivit et le cadre thorique qui lentoure.

    1.2. Lhyperconnectivit : dfinition et tat

    Le gouvernement du Royaume-Uni a commissionn la rdaction dun rapport mettant en collaboration des experts anglais et internationaux pour tudier leffet de lhyperconnectivit sur la vie des anglais, afin que les hommes politiques et le gouvernement puissent prendre les

    meilleures dcisions lgislatives dans des domaines comme la criminalit, la sant,

    lenvironnement et le bien-tre des citoyens, lemploi, lducation, la radicalisation/lextrmisme ainsi que la mobilit et lintgration sociale. Ce rapport a t rdig partir de 20 rapports indpendants avec des thmatiques diffrentes, qui avaient t demands

    par ces experts. Le rapport final dfinit lhyperconnectivit comme tant : lutilisation de multiples systmes et appareils de communication afin de rester constamment connect des rseaux sociaux et flux dinformations. Lhyperconnectivit a plusieurs attributs cls : toujours en ligne (connect tout le temps, depuis nimporte quel endroit) ; accessible sans restrictions ; riche dinformation au-del de la capacit de consommation dinformation dun individu seul ; interactive, pas seulement les individus entre eux mais aussi les interactions personne-machine et machine-machine ; et

    toujours en train denregistrer, avec virtuellement aucune limite de stockage, ce qui facilite de

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    dsir des gens de documenter leurs vies. (Government Office, 2013, p. 22)12

    Ce facteur de changement est considr comme lun des dveloppements cls du dbut du 21me sicle.

    Or cette dfinition provient en fait de deux endroits : le dictionnaire Collins et larticle The Promise and Peril of Hyperconnectivity for Organizations and Societies de John Fredette,

    Revital Marom, Kurt Steinert et Louis Witters, crit pour le forum mondial de lconomie (2012).

    Dans cet article, la notion dhyperconnectivit est plus dveloppe. Elle reprsente le rsultat de lvolution acclre de la communication. Elle ne rfre pas simplement une panoplie dobjets de communications mais aussi des effets sur les comportements personnels et organisationnels. Fredette et les autres chercheurs ayant labors cette dfinition ont galement

    dvelopp la signification des attributs cls de lhyperconnectivit comme tant :

    Toujours connect : des appareils mobiles haut dbits omniprsents permettent aux gens dtre connects leurs familles, leurs emplois, amis, vocations, obsessions et plus, 24h sur 24.

    Accessible sans restriction : un univers o les appareils mobiles et les ordinateurs personnels lient les gens et les organisations ensemble ; ces connexions sont de plus en

    plus disponibles nimporte quelle heure ou endroit.

    Riche en information : sites internet, moteurs de recherche, medias sociaux et chanes dinformation et de divertissement en continue assurent que linformation du stratgique au banal est toujours disponible, au-del de la capacit de consommation de quiconque.

    Interactive : lhyperconnectivit permet chacun doffrir sa contribution sur presque tout.

    Ne se limite pas aux gens : lhyperconnectivit inclut les communications homme-machine et machine-machine, soutenant le dveloppement de lInternet des Objets.

    Toujours en train denregistrer : tats de services, capacits de stockage virtuellement illimites, camras vidos miniaturises, systmes de positionnement mondial, capteurs

    et plus - combins avec le dsir des gens de documenter leurs propres activits assurent quune large portion des activits quotidiennes et des communications des gens font partie dun enregistrement semi-permanent. 13 (Fredette J. et al., 2012, p.113)

    12 Dfinition en langue originale: Hyper-connectivity is the use of multiple communications systems and devices to remain constantly connected to social networks and streams of information. Hyper-connectivity has several key

    attributes: being always on (connected all of the time and everywhere); readily accessible; information-rich beyond any individuals capacity to consume; interactive, not only between people but also involving people-to-machine and machine to- machine communications; and always recording, with virtually unlimited storage

    capacity facilitating peoples desire to document their lives.

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    Lhyperconnectivit dpasse ainsi lespace et le temps, lexprience est virtualise et ce qui ncessit un dplacement et un contact humain peut tre fait de chez soi, ou mme dun autre pays. (Fredette J., et al., 2012). Fredette et al. indiquent en 2012 que lhyperconnectivit est un phnomne grandissant et que ceux qui nen ont pas ressenti les effets les verront bientt. Or nous sommes trois ans plus tard. O en est lhyperconnectivit ? En tout cas, cest la premire dfinition complte et prcise que nous avons trouv de ce phnomne si peu connu et qui intresse et impacte pourtant beaucoup de monde.

    Brian R. Gaines est un professeur mrite au Canada dans le domaine de lingnierie et de la psychologie, fondateur et diteur du Journal International des Etudes Homme-Ordinateur,

    auteur de plus de cinq-cents publications et auteur/contributeur sur prs de dix ouvrages. Il a

    reu en 2014 un prix dexcellence pour lensemble de sa carrire du Rseau de Psychologie Constructiviste.

    Dans son article Hyperconnected Civilizations : Some Historic Perspectives 14, il nous

    explique que nous sommes dans une poque o les ordinateurs, les technologies des mdias et

    la communication ont converg de telle manire que les ordinateurs, tlphones et tlvisions

    ont quasiment les mmes fonctions, bien quils gardent des apparences diffrentes. Pour lui lhyperconnectivit est le rsultat de cette dernire dcade de convergence. Cest donc la fois un phnomne technique mais aussi social. lhyperconnectivit est le dernier stage de lvolution de la connectivit humaine qui a t le cur de la ncessit du dveloppement des civilisations humaines depuis au moins cinq mille ans. (Gaines, non connue, p.17)

    Arm dun important cadrage thorique, critiquant avec prcision, Gaines est le premier parler de la cause de lhyperconnectivit, cest--dire la convergence numrique, qui comprend la convergence des services, des rseaux, des offres commerciales et des terminaux. Le concept

    de convergence est un concept intrinsquement li lhyperconnectivit. Tout comme Fredette, il a su mettre en vidence la double dimension technologique et sociale de cette notion.

    Enfin trois chercheurs amricains et no-zlandais vont plus loin et approchent

    lhyperconnectivit en relation avec dautres formes de connectivit. Pour eux la connectivit reprsente : les mcanismes, processus, systmes et relations qui

    lient les individus et les collectifs (par exemple les groupes, les organisations, cultures et

    socits) en facilitant lchange matriel, informationnel et/ou social. Elle inclut les artefacts et interactions gophysiques (e.g. espace, temps et lieu), technologiques (e.g. les technologies

    de linformation et leurs applications) et sociales. (Kolb, 2008, p. 128) Darl G. Kolb, Arran Caza et Paul D. Collins expliquent ainsi la connectivit comme un concept

    contrlable, mesurable15, avec diffrent niveaux : lhypoconnectivit, la connectivit ncessaire et lhyperconnectivit . Bien que leur tude se passe dans le contexte du travail, il est intressant dexplorer ce nouvel aspect de lhyperconnectivit. Pour eux, la connectivit nest jamais constante car diffrents facteurs viennent linterrompre. Dune part, parfois la connexion est asynchrone ou impossible, notamment dans les trajets en transports en commun, la fin de la journe de travail ou les

    endroits o le rseau est indisponible. Cest lintermittence temporelle (Kolb, D. G., 2008, p.129). Le deuxime critre qui fait que la connectivit nest jamais toujours constante est la volont et libert de lacteur lui-mme.

    14 Date de publication non connue.

    15 Kolb a notamment mis en place des chelles pour dterminer le niveau de connectivit.

  • P a g e 12 | 85

    Mme dans les environnements de travail hautement structurs, les dcisions des individus

    sur quand et comment se connecter sont influences par leurs pratiques personnelles de

    communication et les dimensions sociales de la connectivit, telles que la confiance mutuelle,

    les liens sociaux et une culture collaborative qui permet aux individus plus ou moins de libert.

    (Collins & Kolb, 2012). (Kolb D.G., Caza A., et Collins P.D., 2012, p. 269.).

    Les individus grent donc leur niveau de joignabilit et vu que la connectivit nest pas constante daprs eux, ils proposent trois autres concepts plus appropris selon leur vision des choses.

    La connectivit ncessaire est ainsi le seuil raisonnable et appropri de la connectivit. Elle

    rfre un tat intermdiaire de la connectivit o la personne est efficace et arrive des

    rsultats professionnels ou sociaux tout en tant entre lhypoconnectitivit et lhyperconnectivit. (Kolb, Collind et Lind, 2008). Lhypoconnectivit est un tat o la connectivit nest pas assez soutenue pour rpondre aux demandes de la situation. Par exemple, les mauvaises performances de Skype ou le fait dtre sur des fuseaux horaires trop loigns pour utiliser un tel logiciel sont des freins la

    connectivit.

    Lautre extrme est lhyperconnectivit, mais elle est ici reprsente comme un tat de connectivit excessive qui est prjudiciable la performance.

    Lhyperconnectivit nest donc pas un tat dsirable car elle conduit au stress, linefficacit et au burnout. (Kolb, Caza et Collins, 2012)

    On pourrait alors penser que le niveau de connectivit ncessaire est le meilleur niveau.

    Cependant cest ltat de flux connectif qui est ltat optimum de connectivit. Sinspirant des travaux de Wajcman et Rose, ils dcrivent cet idal comme ltat o la communication est hautement efficace et quilibre en fonction de nos besoins et des demandes

    de la tche ou situation qui se prsente. (Kolb et al., 2008, p. 183)

    Cet optimum est une vision moins fixe, plus ractive et adaptable de la connectivit par rapport

    aux prcdents tats quils ont dvelopps. Dune manire critique, nous pouvons nous demander si ces trois professeurs de business et management, bien que ce soient des professeurs

    de renom, nont pas une vision trop organisationnelle de la communication par rapport la connectivit. Ils se soucient principalement de lefficacit de la connectivit et pas vraiment de ses tenants et aboutissants et dcoupent la connectivit en tats statiques non compatibles, or

    nous pouvons supposer que certaines personnes tendent vers lhypoconnectivit dans le milieu du travail mais vers lhyperconnectivit dans leurs vies personnelles ou inversement. De plus, Kolb, Caza et Collins apportent un certain jugement de valeur lhyperconnectivit en ne dveloppant pas vraiment leur explication. Leur article reste cependant extrmement

    intressant.

    On peut voir que la littrature scientifique au sujet de lhyperconnectivit nest pas trs alimente. Les dfinitions sont rares, bien que ce soit un mot de plus employ. Il apparat que

    les gens le prennent comme un mot vidence qui se suffit souvent lui-mme, peu importe

    ses connotations. Il est cependant important de le dfinir avec prcision pour savoir si ce

    phnomne technologique et social est dj install, et si donc son utilisation est pertinente, ou

    alors si nous sommes encore dans une phase de transition et quil ne faut en parler que comme dune tendance en devenir. Aprs avoir essay de cadrer et de dfinir cette notion cl, nous allons voir, sans parler

    dhyperconnectivit, quelles sont les consquences de la multiplication des connexions et du passage la culture numrique.

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    1.3. Les connexions et leurs effets

    Le professeur Joseph B. Walther, dans le Sage Handbook of Interpersonal Communication16

    passe en revue plusieurs thories en liens avec la communication assiste par ordinateur.

    J. B. Walther est un spcialiste reconnu du domaine, il a reu plusieurs prix de la National

    Communication Association aux Etats-Unis, et de lInternational Communication Association, dont il fait dsormais partie. Il a aussi reu un prix rcompensant lensemble de sa carrire. Dans son chapitre, plusieurs concepts peuvent nous intresser. Tout dabord la thorie de la proximit lectronique.

    Walther explique ce sujet que le construit central dans la thorie de la proximit

    lectronique est la proximit psychologique ressentie par les communicants. L o lintimit physique, ou proximit, est gnralement associe la participation interpersonnelle dans une

    communication face face, Korzenny (1978) soutient que les communicants connects par le

    biais de mdias lectroniques peuvent aussi faire lexprience dun sentiment dintimit, ou de proximit lectronique. (Walther J.B. in Knapp & Daly, 2011, p.455)

    Christian Licoppe, professeur de sociologie des technologies de linformation et de la communication, corrobore cette thorie en disant que le caractre ponctuel de ce flux

    dchanges ponctuels permet dentretenir le sentiment dune connexion permanente, limpression que le lien peut tre activ tout moment, que lon peut ainsi prouver chaque instant lengagement de lautre dans la relation. (Licoppe, C., 2002, p.183) Ainsi les connexions nos rseaux sociaux via internet nous apportent une impression de

    proximit du ou des interlocuteurs et dintensit de la relation. La prsence de lautre nous rassure, attnue notre solitude et nous apporte du soutien.

    J.B. Walther nous parle aussi dune certaine perception de la relation sur internet qui est influence par le fait quavoir une conversation en ligne prend beaucoup plus de temps quavoir la mme conversation en face face (Tidwell et Walther, 2002). Or les interlocuteurs de

    communications assistes par ordinateurs ne se rendent pas compte de cette distorsion

    temporelle et cela peut affecter la manire donc ils voient leurs relations.

    Quand le temps semble passer plus vite quil ne passe en ralit, les gens accordent aux vnements qui se sont passs pendant cette priode de temps un caractre de plaisir. (Sackett,

    Nelson, Meyvis et Converse, 2009) (Walther J.B. in Knapp & Daly, 2011, p.465). Cest une thorie tout fait plausible, lexpression Je nai pas vu le temps passer ! nest par exemple applique quaux moments agrables. Cela pourrait aussi expliquer pourquoi les gens, et particulirement les jeunes, passent autant de temps en ligne.

    Finalement J.B. Walther fait galement rfrence une consquence ngative de cette relation

    internet, en citant Scott E. Caplan, professeur de luniversit du Delaware spcialis dans la communication interpersonnelle et la communication assiste par ordinateur. Walther explique

    que certains individus peuvent dvelopper ce que Caplan considre comme une prfrence pour

    les interactions sociales en ligne, caractrise par la croyance que personne nest plus en scurit, plus efficace, plus en confiance et plus confortable quavec les interactions et relations interpersonnelles en ligne plutt quavec les activits sociales traditionnelles (face face). (Caplan, S.E, 2005, p.723)

    16 Chapitre 14. Knapp M.L, Daly J.A., The Sage Handbook of Interpersonal Communication, 4me edition, Thousand Oaks, Calif.: SAGE Publication, 2001.

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    Sans pour autant les traiter de no-life 17 , Caplan comprend bien que les personnes peuvent

    se considrer plus laise avec les interactions en ligne quavec les interactions physiques tout en introduisant une notion de caution avoir par rapport un excs ventuel, une drive des

    connexions multiplies.

    Cette facilit avec la communication par internet tient du fait que lcrit et l invisibilit de la personne ont un effet dsinhibant. (Hrault et Molinier, 2009) Dans Les caractristiques de

    la communication sociale via Internet , Adeline Hrault et Pierre Molinier indiquent que ce

    ct dsinhibant peut tre favorable limplication et lintensit des relations virtuelles. Ils prcisent que J. Suler compare dailleurs la situation de communication sur Internet (et notamment les changes exclusivement textuels ou vocaux) la situation de psychanalyse o le

    thrapeute se place derrire le divan de son patient, pour que sa prsence physique le gne le

    moins possible dans son effort dexpression. (Hrault et Molinier, 2009, p. 5) Les individus ont en effet plus de facilits pour se confier sur internet. Mais cela nempche pas le bon droulement de leurs interactions sociales hors ligne. Bien au contraire, Johann Chaulet,

    charg de recherches au CNRS dans le domaine de linnovation, a explor les usages que les adolescents font de ces connexions et en conclut que les communications mdiatises

    alimentent des contacts physiques bien plus quelles ne les empchent ou les remplacent. Comme le montre de nombreuses tudes rcentes plus on sappelle, plus on se voit ; les listes de contacts des logiciels de messageries instantanes sont peuples de personnes qui font,

    par ailleurs, partie du rseau direct de sociabilit et les amis avec lesquels ils discutent le plus

    en ligne sont souvent ceux avec lesquels ils passent, physiquement, le plus de temps. (Chaulet,

    2009, p.58).

    Un rapport du CREDOC ralis par Rgis Bigot et Patricia Croutte en 2014, confirme aussi que

    le temps pass sur internet nempche pas lexistence dautres formes de relations sociales et de sociabilit. Les membres dune association ou ceux qui reoivent trs souvent des amis domicile ont, dans le temps, tendance passer beaucoup plus de temps sur internet. (Bigot

    R., et Croutte P., 2014, p.141)

    Internet nest donc pas un frein la sociabilit mais un supplment o la communication ne rpond pas aux mmes codes et o elle est plus libre.

    Beaucoup dtudes ont aussi t ralises par Nicole B. Ellison et Danah M. Boyd sur le pouvoir des rseaux sociaux tels que Facebook, qui est le rseau le plus utilis au niveau mondial. Ce

    qui est intressant dans leur mthodologie, cest quelles se sont concentres sur la mme population que nous en termes dge : les 18-25 ans, ou adultes mergents. Ellison et Boyd sont deux chercheuses amricaines en sciences de la communication. Aprs

    avoir tudi cinq articles ou Nicole Ellison avec Danah Boyd mais aussi dautres chercheurs, nous pouvons soutenir que les connexions aux rseaux sociaux sont bnfiques pour

    lintgration sociale des 18-25 ans. Nous allons tout dabord dfinir ce quest un rseau social, puis expliquer ces effets bnfiques.

    Ellison et Boys dsignent un site de rseaux social comme une plateforme de communication

    en rseau sur laquelle les participants 1) ont des profils uniques et identifiables qui sont

    composs de contenus fournis par les usagers, de contenus provenant dautres usagers et/ou

    17 Dfinition : Un no life, de l'anglais no life , littralement pas de vie ou sans vie , est une personne

    qui consacre une trs grande partie (si ce n'est la totalit) de son temps pratiquer sa passion, voire son travail, au

    dtriment d'autres activits. Cette addiction affecte ses relations sociales et sentimentales. Le terme est

    rgulirement utilis pour dsigner une personne atteinte de cyberdpendance. (Wikipdia, consult le 3 mars.)

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    de donnes du systme ; 2) peuvent publiquement articuler des connexions qui peuvent tre

    vues et parcourues par dautres ; et 3) peuvent consommer, produire, et/ou interagir avec des flux de contenus gnrs par les usagers et qui proviennent de leurs connexions sur le site.

    (Ellison N., Boyd D., 2013, p.158)

    Pour Boyd et Ellison, les sites comme Facebook aident beaucoup les tudiants sadapter leur nouvel environnement quand ils arrivent luniversit.

    Pour tre concis, et surtout daprs les publications de Nicole B. Ellison, lutilisation de Facebook est un facilitateur dinteractions sociales et peut amliorer lestime de soi ainsi que le capital social relationnel, de liaison ou bridging capital (Putnam, R. 2000). Les

    connexions Facebook ou dautres rseaux sociaux sont donc bnfiques et aident les 18-25 dans la priode o ils quittent le foyer familial, voire la ville de naissance, pour sinstaller ailleurs, commencer luniversit et se lancer dans la vie active. Premirement, Facebook permet dapprendre des informations sur ses amis et les gens qui sont dans notre environnement, ce qui facilite dventuels changes. En naviguant sur les profils du site, les usagers peuvent accder des informations relatives lidentit des autres qui peuvent pousser la communication face face (en servant de ressources dinformations sur les prfrences, caractristiques personnelles des autres.). Apprendre des informations sur les liens latents (Haythornthwaite, 2005) pourrait abaisser les barrires linitiation de la communication, la fois car des points communs potentiels sont rvls et que des

    informations cruciales sur les autres comme le statut amoureux, sont fournies attnuant ainsi la peur dtre rejet. (Steinfield C., Ellison N. B., Lampe C., 2008, p. 443) En dautres mots, les tudiants se servent de Facebook pour se consacrer de la recherche dinformations sociales [] des informations qui peuvent potentiellement [] servir de lubrifiant social (Gray R., Vitak J., Easton, E. W., Ellison N. B., 2013, p.197) et ainsi

    surpasser les obstacles comme la timidit etc.

    En plus dencourager les interactions sociales, lutilisation des sites de rseaux sociaux amliore aussi ce que Robert Putnam (2000) appelle capital social relationnel. L o le capital social

    affectif, ou bonding social capital, mane de la famille et des amis proches et prend la forme

    de soutien motionnel ainsi que matriel, le capital relationnel, ou bridging social capital, qui

    vient avec sa notion de pont18, est associ nos liens faibles [ou liens latents] : amis

    damis, anciens collgues, ou autres connaissances. Nos liens faibles sont de prcieux conduits vers diverses perspectives et nouvelles informations. (Ellison N.B, Lampe C., Steinfield C.,

    2009, p.7) En permettant la collection de connaissances et la maintenance facile de ces

    contacts (un jaime , lapparition dun changement de statut dans son fil dactualit, une conversation de groupe etc.) Facebook nous donne les moyens sociaux et techniques

    damliorer notre capital relationnel. Dans Ellison et. Al. (2007) une forte association fut trouve entre lintensit de lutilisation de Facebook et le capital social relationnel peru des participants [ ltude]. (Steinfield C., Ellison N. B., Lampe C., 2008, p. 441). Ces contacts relationnels, avec lesquels la relation sociale est maintenue avec plus ou moins dintensit, forment notre rseau, un rseau qui peut tre activ une plus grande chelle quavant Facebook et qui peut tre porteur dinformations/doccasions capitales, notamment dans la recherche demploi ou encore lapport de conseils et de soutien.

    18 Bridging , de bridge , qui signifie en franais, pont .

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    Si la multiplication des usages de Facebook entrane la multiplication des interactions sociales,

    Valkenburg (2006) a trouv que laccroissement de ces dernires avait des effets positifs sur la confiance en soi et la satisfaction gnrale par rapport la vie de ses sujets de recherche. Cette

    relation entre confiance en soi et usage de Facebook, Ellison va aussi ltudier et arriver aux mmes conclusions : Facebook limite les craintes relies linteraction sociale avec des trangers, poussant les gens initier un contact mme lorsquils ont peu confiance en eux. En collaborant lors de travaux de groupe pour luniversit par exemple, ou en schangeant des notes ou des explications sur des cours, les tudiants peuvent crer de nouvelles connexions qui

    se poursuivront hors de la sphre dinternet. Ils peuvent ainsi se faire de nouveaux amis plus facilement et dans plusieurs groupes dappartenance. Ce cercle vertueux, dans les publications dEllison, exclut la mention de lego, ce qui nous parat tre une variable prendre en compte. En dehors de a, la mthodologie des articles o

    elle apporte sa collaboration est trs pointue et dtaille, voire difficile comprendre. Elle se

    base chaque fois sur des entretiens, des sondages et des analyses de corrlation caractre

    mathmatique, croisant plusieurs chelles de mesures et coefficients. Des analyses de

    rgression sont pratiques et plusieurs indexes impliqus. Ce sont les analyses les plus

    complexes quil nous a t donn de voir parmi toutes nos rfrences bibliographiques. Ellison nen oublie pas pour autant les donnes qualitatives. Le fait quelle travaille sur la mme population que nous, hormis pour le caractre gographique, est aussi un lment de poids

    prendre en compte. De plus elle se base sur beaucoup de recherches menes par ses pairs, mme

    si elle a tendance beaucoup sappuyer sur ses prcdents travaux.

    Du ct franais, des effets moins positifs de la connectivit ont t dmontrs, notamment par

    Francis Jaurguiberry, professeur de sociologie et ancien directeur du laboratoire SET19 au

    CNRS et sa thorie de tourbillon du branch (Jaurguiberry, 2005).

    Jaurguiberry considrent les gens comme des opportunistes sans arrt connects et la

    recherche du mieux, une opinion quil partage avec dautres chercheurs et qui fait de la flexibilit une notion si importante pour les gens de la gnration Y.

    Cette recherche dintensit a cependant ses dangers . Jaurguiberry nous dit ce sujet que La chasse au temps perdu, le culte du potentiel, la monte

    de lurgence, la pression de limmdiat et la multiplication des informations plongent lindividu dans une situation dinjonctions rptes ragir de plus en plus vite. Cette acclration peut tre vcue de faon positive : comme multiplicateur dactivits et dopportunits, comme rvlateur de certaines potentialits organisationnelles jusqualors inexploites [] Mais cette acclration peut aussi donner le vertige, et la chute nest alors pas exclue. [ Les prises de dcision deviennent alors autant de violences que lindividu simpose dans une situation quil ne matrise plus. Tensions, stress et parfois mme anxit ont alors toutes chances dapparatre. Le branch se sent non plus interpell mais harcel. Tout un ensemble de pathologies

    psychosomatiques sont associes cette contradiction dans laquelle se place lindividu en surchauffe occupationnelle . (Jaurguiberry, 2005, p. 4 et 5).

    On peut retrouver cette notion dacclration dans un nombre assez important de publications constituant notre littrature, et avec elle cette notion de contrle mis mal. Certains individus

    peuvent bien sy adapter et en bien vivre cette tat de connexion permanente, considrant chaque demande comme un dfi et cette exprience comme prenante, gratifiante, alors que

    dautres peuvent avoir du mal tout matriser et ils vont se retrouver dbords et pris dans un tourbillon.

    19 Socit Environnement Territoire

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    Laugmentation du stress est souvent un sujet inquitant lorsquon parle dhyperconnectivit ou de connexions rptes internet. En effet la frontire entre lextrieur, lieu de contacts sociaux et de disponibilit relationnelle, et lintrieur, lieu dhabitation, de repos et refuge , sest effac progressivement avec le portable, que nous gardons constamment proche de nous. Le fait que lon puisse nous joindre de partout pour le travail par exemple, fait que nous y pensons plus souvent et que les horaires de travail classiques disparaissent parfois au profit

    dune sorte dastreinte officieuse. Trop dinformations et de demandes peuvent paratre accablantes. Jaurguiberry rajoute sur ce point que : La fuite en avant et le refus sont des conduites de rupture avec lexprience du branch. Les deux relvent finalement dune impossibilit ou dune incapacit de conjuguer le dsir ou la ncessit dtre branch avec la volont de prserver un temps soi (Jaurguiberry, 2005, p. 8) Ici la fuite en avant signifie la recherche dun objet technique toujours plus performant qui aidera lindividu grer les demandes qui lui sont adresses, et le refus fait rfrence un ventuel burnout , ou syndrome dpuisement professionnelle. Jaurguiberry met galement en vidence ce paradoxe de la connectivit, retrouv de

    multiples reprises dans la littrature, savoir la contradiction entre notre dsir dtre connect et disponible et notre envie de samnager des priodes de temps sans perturbations extrieures pour vivre le prsent sans distractions. Le portable sert combler lennui et le vide (Jaurguiberry, 2005), mais parfois cela peut excder nos attentes et se retourner contre

    nous.

    Dans ses travaux, Jaurguiberry aborde ce sujet de manire presque philosophique dans ses

    propos sur la temporalit, mais il garde tout le long une approche plutt objective, en incluant

    la possibilit que ce que certains peroivent et vivent comme tant une exprience ngative,

    dautres le ressentent de manire positive. En revanche, il ne se base pas sur une grande bibliographie pour traiter son sujet et fini par une vision plutt engage, ce qui est prendre en

    considration. De plus, Jaurguiberry se rfrait plutt au cadre du travail, or ce nest pas notre population dtude et les salaris ne subissent pas forcment les mmes demandes que les tudiants ou jeunes actifs.

    Un autre effet ngatif de la connectivit rside dans le fait de pouvoir se distraire tout moment

    dun simple clic. Cela a chang la relation des tudiants luniversit. Marie Boton cite Denis Kambouchner et al. dans son article, en prcisant par exemple que les cours magistraux

    lancienne ne russissent plus capter lattention des lves. Ces derniers finissent par devenir trs exigeants : ils veulent dsormais faire en cours quelque chose qui na pas dquivalent ailleurs (Kambouchner D., Meirieu P., Stiegler B., Gautier J., Vergne G., 2012). Cet argument est soutenu par les propos de J. Kerneis, A. Coutant, H. Assogba et T. Stenger

    qui dfinissent que : Les plus gs admettent pour leur part ne plus suivre les cours la

    moindre perte de rythme. Plus encore, ils disent conserver en permanence leurs outils de

    communication prfrs ouverts, Facebook en tte, ce qui peut amener les dconcentrer mme

    lorsquils sont dcids rester assidus. Tous soulignent la difficult sextraire du flux permanent de nouveaux contenus, allant jusqu se qualifier d addicts . (Kerneis J., Coutant A., Assogba H. et Stenger T., 2012, p.5)

    Cette peur de rater le moindre vnement sur des sites pourtant reconnus par eux-mmes

    comme consacrs des badineries [] 20 et cette difficult rester concentr sur des choses moins intressantes et stimulantes que ce qui est trouvable en ligne est particulirement

    prononce chez les jeunes.

    20 Ibid. P.5

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    Aprs une enqute mene sur deux ans et constitue dobservations participantes sur trois rseaux sociaux et de lanalyse quantitative de 7041 profils, Kerneis et al. ont mis en vidence cette concurrence dloyale (Kerneis et al., 2012) entre internet et lducation classique. Les jeunes peuvent tout trouver en ligne en quelques clics et suivre des cours non interactifs,

    qui sont assez ceux culturellement proposs par France notamment, induit un manque de

    motivation auprs des jeunes, qui prfrent la facilit et lchappatoire que signifie le web. Or daprs lenqute de ces chercheurs, ds lors [que les enquts] sont interrogs sur les solutions envisageables pour conserver un quilibre entre les dimensions de leur vie en ligne

    et hors ligne, ils ne rpondent que par des solutions radicales et appliques Internet pris dans

    sa globalit quitter Internet , se dconnecter par exemple [] [Mais] les solutions envisages demeurent peu plausibles dtre appliques car impliquant trop de renoncements. (Kerneis J., Coutant A., Assogba H. et Stenger T., 2012, p.6).

    On peut donc voir que les jeunes sont coincs dans un entre-deux communicationnel qui ne leur

    offre pas rellement de compromis ou de juste milieu. Il est cependant mentionn que parmi

    tous les enquts, aucun, mme sils peuvent se considrer comme tel, nest vraiment dpendant . Leur ducation en ptit-elle pour autant ? Malheureusement larticle ne rpond pas cette question, mais envisage cependant des solutions pour faire voluer lducation de manire ce quelle puisse apporter plus aux tudiants.

    Ces diverses recherches rejoignent des termes de la culture populaire que nous entendons de

    plus en plus, tels que le syndrome FOMO ou Fear Of Missing Out21, une sorte danxit lie au fait de rater un vnement ou une information importante pour cause de non connexion,

    ou encore la nomophobie22, ou peur de se retrouver sans son tlphone portable. On peut voir

    que le tlphone portable est loutil principal de la connectivit utilis par les jeunes. Plus mobile que lordinateur, regroupant quelques fonctionnalits quil na pas, le tlphone est le hub de lensemble de nos interactions avec notre environnement numrique et physique (Poty P., 2010, p.31). Le mot hub dsigne normalement une plate-forme de correspondances entre

    plusieurs moyens de transport, mais ici il est considr comme le point dinterconnexion de plusieurs appareils et rseaux. Cest llment cl permettant toute forme de connectivit.

    Aprs avoir pass en revue toutes ces notions et thories, on peut voir que lhyperconnectivit est toujours une notion assez floue. Elle nest pas dfinit par beaucoup de sources diffrentes, ce qui peut reprsenter un frein sa gnralisation, et elle ne signifie pas la mme chose pour

    tout le monde. Dans ce contexte, est-ce que qualifier les 18-25 ans dhyperconnects est justifi ?23

    Si le terme dhyperconnectivit na pas lieu dtre employ, ou alors dune autre manire, est-ce que les autres caractristiques attribues aux jeunes de la gnration Y perdurent ? Sont-ils

    toujours attachs la flexibilit, distraits etc.?

    Enfin, si lhyperconnectivit correspond juste un niveau de connexion pas encore atteint, est-ce que les consquences de la connectivit, que la littrature voque, se vrifient chez les 18-

    25 ans en France ?

    Nous allons voir dans le prochain chapitre quelle mthodologie mettre en place pour tenter de

    rpondre ces questions.

    21 Peut se traduire par la peur de rater quelque chose .

    22 Le terme nomophobie est la contraction des mots anglais no mobile et phobia .

    23 Question de recherche n1

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    2. METHODOLOGIE

    Pour rpondre nos questions de recherche, il est essentiel de bien dfinir le terrain tudier

    ainsi que la mthode employer. Par rapport notre problmatique et aux questions de

    recherche qui en ont dcoul, nous avons choisi une mthode constructiviste, o notre

    mthodologie va consister explorer les questions que nous nous posons partir de plusieurs

    outils.

    2.1. Notre terrain : les 18-25 ans en France

    Dans ce mmoire, le terrain est la fois abstrait et concret, parce que la population des 18-25

    ans en France est trop grande pour tre tudie dans son ensemble. En revanche on peut tudier

    un chantillon de cette population de la manire la plus fiable dont nous sommes capables, afin

    de pouvoir en gnraliser les rsultats. Nos lieux de collecte de donnes seront donc internet,

    pour toucher le plus dindividus possible via un sondage et la ville de Marseille, o nous allons pratiquer un entretien collectif avec des tudiants venant de plusieurs campus et correspondant

    notre population dtude. Nous allons rcolter des donnes quantitatives ainsi que quantitatives sur ces deux lieux , et

    galement nous baser sur ltude du CREDOC prcdemment cite (Bigot R., Croutte P., 2014)

    Pour le questionnaire, les donnes que nous allons chercher extraire sont : comment les 18-

    25 sont quips en objets connects, comment ils utilisent leurs portables, pourquoi faire,

    quelle frquence ils se connectent, quelles applications ils utilisent etc. Nous allons essayez de

    savoir comment ils considrent internet et sil leur sert dans tous les aspects de leurs vie : en cours/au travail, entre amis et en famille ainsi que dans le cadre des relations amoureuses.

    Pour lentretien, nous allons chercher connaitre la perception des participants par rapport lhyperconnectivit, lusage quils font de ces technologies et les motivations qui les poussent sen servir. Nous leur demanderons leurs opinions avant tout. De cette manire, nous allons pouvoir voir dans quelle mesure nous pouvons qualifier les 18-25 ans dhyperconnects et essayer de soutenir nos affirmations avec des chiffres concrets. Lentretien sera tout de mme llment central pour notre analyse et celui qui nous permettra de recueillir le plus de donnes qualitatives.

    2.2. Nos mthodes de collecte

    Le questionnaire en ligne

    Bien que peu utilis lors des approches constructivistes ou lexploration ncessite des donnes plus qualitatives, le questionnaire peut permettre de mettre en vidence certaines tendances et

    daiguiller les rponses que nous allons donner nos questions de recherche. Il pourra aussi nous aider corroborer certaines rponses trouves partir de donnes quantitatives pour leur

    donner plus de poids. Cependant, lchantillonnage ne sest pas fait par strates, grappes ou

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    quotas mais sur la base du volontariat, ce qui rend la reprsentativit de lchantillon imparfaite. Nous pouvons tout de mme nous en servir titre dindication de tendances chez les 18-25 ans.

    En utilisant le service en ligne Google Forms, paramtr pour naccepter quune rponse par par ordinateur, nous avons mis en ligne un sondage assez long contenant 39 questions.24

    Ces questions taient soit des questions avec des une ou plusieurs options cocher et marques

    comme obligatoires, soit des questions ouvertes o les gens taient libre dcrire ce quils voulaient. Celles-ci ntaient pas toutes obligatoires, afin dencourager les gens aller jusquau bout du sondage. Le sondage a t partag sur Facebook sur plusieurs profils et dans plusieurs

    groupes tudiants en France, notamment Marseille, Lyon, Paris et Caen, qui sont de grandes

    villes tudiantes.

    Seuls les 18-25 taient invits y rpondre et en tout, trois cent soixante-cinq volontaires y ont

    rpondu, sur une population de 6 169 504 individus. En se basant sur un niveau de confiance

    de 95% et compte tenu de la population mre et de lchantillon, la marge derreur de ce sondage est denviron 5, 13%25. En tudiant les donnes talon , nous pouvons voir que notre chantillon tait constitu de 228 femmes et 137 hommes.

    Voici les graphiques raliss sur Google avec les donnes du sondage :

    On peut voir que ce sont les femmes qui ont majoritairement rpondu au sondage, et

    principalement les individus entre 21 et 25 ans, avec un pic de 75 rpondants chez les 23 ans.

    Les moins reprsents sont les 18-19 ans, avec respectivement 8 personnes de 18 ans et 20

    personnes de 19 ans.

    Lentretien collectif

    Lentretien collectif est un bon moyen pour recueillir beaucoup de donnes qualitatives. Le champ lexical et les expressions des gens peuvent tre rvlateurs, mais cest aussi le fait de confronter leurs opinions et exprience qui en fait un exercice de collecte de donnes fructueux.

    Nous avons pratiqu un entretien auquel sept personnes ont particip :

    24 Questionnaire en annexe.

    25 Ce pourcentage fut calcul partir de calculateurs en ligne et de tables de valeurs de lINSEE.

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    - Florian, 24 ans, infirmier.

    - Thibault, 24 ans, en premire anne de thse en informatique.

    - Geoffrey, 24 ans, en alternance pour devenir comptable.

    - Matthias, 21 ans, en 3me anne dinformatique Supinfo.

    - Kelly, 22 ans, en 2me anne de manipulateur radio.

    - Julie, 25 ans, en 2me anne de DSCG.

    - Pauline, 19 ans, en 2me anne de droit.

    Ces personnes26 ont t choisies car elles ne sont pas dans notre cercle relationnel proche et

    reprsentent des horizons diffrents (paramdical, comptabilit, informatique, droit). De plus,

    mme si lon peut constater une majorit de personnes ayant 24 ans, il y a une assez bonne rpartition sur les autres ges et presque autant dhommes que de femmes. Daprs nos informations, ces personnes avaient aussi des relations diffrentes par rapport aux technologies

    de linformation et de la communication : il y avait des utilisateurs frquents mais aussi rares et intermdiaires, un ensemble de comportements assez varis donc.

    Parmi elles il y avait un couple, Geoffrey et Pauline, et deux autres personnes taient en couple,

    les trois autres tant donc clibataires. Certains se connaissaient dj car ils font partie de la

    mme association tudiante mais leurs niveaux dimplication sont diffrents et ils ne font pratiquement quinteragir spontanment sur une conversation Facebook regroupant trente-deux personnes. Le fait quils se connaissent nest pas forcment un problme, au contraire cela peut faciliter lchange et la prise de parole lorsquon a un avis contraire, abaissant ainsi des barrires lexpression.

    Aprs llaboration dune liste de questions poser, ou guide dentretien, ces personnes ont t convies dans un endroit calme et lentretien a t men dune manire semi-directive. De cette manire, malgr un ordre de questions prtablit, rien nempchait de poser dautres questions en rapport avec ce que les participants venaient de dire, ne serait-ce que pour approfondir leur

    propos, et cela laissait une plus grande libert dexpression aux participants, le but ntant pas quils se sentent interrogs . Lentretien a t enregistr pour tre retranscrit de manire prcise afin daider lanalyse des donnes recueillies.

    2.3. Traitement des donnes recueillies

    Les donnes quantitatives du questionnaire en ligne ont t transformes en graphiques tels que

    des diagrammes circulaires ou des histogrammes via le programme Excel afin dtre synthtiques et lisibles visuellement. Les donnes qualitatives provenant des questions ouvertes

    du questionnaire ont t compiles et analyses manuellement en fonction de leur pertinence,

    26 Les noms attribus ces personnes sont des noms fictifs.

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    de leur rcurrence et du champ lexical employ. Les non-rpondants aux questions ouvertes ont

    aussi t comptabiliss pour plus de prcision quantitative.

    Lentretien collectif a t retranscrit, relu et attentivement tudi. Les arguments ont t lists, les citations rvlatrices ont t extraites et analyses et enfin, le champ lexical ainsi que les

    rptitions et la syntaxe ont t passs en revue afin de ne manquer aucun des lments de

    rponses donns ou impliqus de manire implicite ou explicite par les participants.

    Enfin, tous ces lments de rponses ont t compars aux lments trouvs dans la littrature

    et complts par les statistiques du CREDOC concernant la diffusion des Technologies de

    lInformation et de la Communication en 2014.

    Les mthodes de lentretien collectif et du questionnaire en ligne nous ont paru complmentaires dans le sens o notre population tant trs grande et tendue, il nous fallait un

    instrument adapt sa taille et qui nous laisserait loccasion de recueillir des donnes sur tout le territoire franais pour ainsi tre plus reprsentatif, mme si ce nest pas encore parfait, et correspondre au terrain dfini. Puisque nous sommes localiss dans une grande ville tudiante,

    il nous semblait dommage de ne pas en tudier la population pour recueillir plus de donnes

    qualitatives, qui ont plus de mal tre releves via questionnaires. Nous avons donc choisi

    lentretien. Il aurait pu se faire individuellement mais ce qui nous intressait tait particulirement la confrontation des points de vue des participants en temps rel.

    Au final, ces deux instruments de collecte nous ont permis davoir une multitude de donnes analyser, ce que nous allons faire dans le chapitre suivant.

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    3. ETUDE ET ANALYSE DE LENQUTE

    Pour analyser les rsultats obtenus par lentretien collectif et le questionnaire en ligne, nous allons diviser ces rsultats en fonction de nos questions de recherche pour essayer de mieux y

    rpondre et de suivre notre cheminement logique de dpart.

    3.1. Lhyperconnectivit remise en questions

    Pour parler ou non dhyperconnectivit, il faut dabord tudier lquipement en technologie des 18-25 ans car cest ce qui leur donne accs au rseau internet et donc, la connectivit.

    Equipement

    Daprs le CREDOC, les jeunes adultes (18-39 ans) sont quasiment tous quips [en smartphones], alors quune personne sur trois pass 70 ans na pas de mobile. (Bigot R., Croutte P., 2014, p.45). Cependant prendre en compte les 18-39 ans rajoute une assez grande

    fourchette dtude la population qui nous intresse, nous avons donc repos la question pour avoir un focus sur les 18-25 ans et nous avons confirm queux aussi sont quasiment tous quips dun smartphone.

    Sur 365 rpondants, 347 ont un

    smartphones, quinze nen ont pas (soit 4,1%), et trois envisagent den acheter un

    (soit 0,8%).

    Les 18-25 ans sont donc majoritairement

    quips en smartphones. En ce qui concerne

    les ordinateurs, le constat est encore plus

    saisissant.

    En effet, 99,5% des rpondants, soit 363

    personnes, sont quips dun ordinateur daprs notre tude.

    Selon le CREDOC, il y a cependant une tendance

    intressante prendre en compte :

    Pour la premire fois depuis 25 ans, le taux

    dquipement en ordinateurs semble ne plus progresser (Graphique 31). En revanche, les

    tablettes tactiles sduisent de plus en plus : 29 %

    des Franais en disposent (+ 12 points en un an)

  • P a g e 24 | 85

    27

    Source : CREDOC, Enqutes Conditions de vie et Aspirations, 2014, p.60

    En comparant ce graphique et ce tableau, on peut en effet voir quil y a une tendance la baisse du taux dquipement en ordinateurs dans la population franaise en gnral mais aussi chez les 18-24 ans, o il connait une baisse de quatre points. On pourrait penser que ce taux est arriv

    son maximum par rapport sa pntration dans la population, et quavec lvolution technologique qua t la tablette, lordinateur a trouv un concurrent. Cependant mme si le CREDOC semble affirmatif quant la monte en popularit des tablettes,

    ces nouveaux objets connects, qui se veulent tre des hybrides entre lordinateur et le portable, ne semblent pas conqurir normment la tranche dge des 18-25 ans, alors que ce sont eux quon dcrit comme les plus friands de nouvelles technologies.

    27 Ibid. Page 58.

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    Graphique 39 : Taux dquipement en tablettes tactiles en fonction de

    lge.

    Source : CREDOC, Enqutes Conditions

    de vie et Aspirations, 2014, p.64

    Sur ce graphique, on peut voir que

    mme si la tablette est en

    augmentation chez les 18-24 ans,

    cette tranche dge reste la moins quipe parmi les jeunes . Ceux

    chez qui la tablette compte le plus de

    fans sont les 12-17 ans, qui

    correspondent la gnration

    daprs, ne dans un monde o la technologie tait dj avance au contraire des 18-25 ans, et chez les 25-39 ans. En effet, les tablettes sont plus populaires chez les gens avec des diplmes

    du suprieur, des foyers denviron quatre personnes et chez les classes moyennes suprieurs et hauts revenus, et ces caractristiques correspondent surtout aux 25-39 ans. (CREDOC, 2014).

    Les 18-25 ans commencent devenir financirement indpendants par rapport leurs parents

    et pour la plupart ils sont encore tudiants ou jeunes diplms, ils ne gagnent pas voire peu

    dargent. Ils ne rentrent donc pas vraiment dans la catgorie des usagers de tablettes.

    Les 18-25 ans sont donc la tranche dge de lentre-deux et cela se confirme avec les rponses de nos rpondants :

    Seulement 121 personnes sur 365

    personnes possdent une tablette,

    alors que 206 nen voient pas le besoin. Trente-huit personnes

    comptent cependant en acheter une.

    Durant lentretien collectif, seule Pauline possdait une tablette.

    Elle nous dit : en fait quand je suis

    arrive la fac je ne voulais pas

    prendre mon ordi, ctait trop lourd, a prend de la place, alors je suis

    passe la tablette et au dpart je

    faisais que mes cours dessus puis

    finalement maintenant je regarde

    aussi mes sries.

    Daprs ce tmoignage, la tablette ne sert pas de multiples usages comme le portable. Les gens nutilisent donc pas toutes ses fonctionnalits et cela apparat comme tant un choix. La tablette est plus considre comme un objet de travail que de loisirs. Si son usage est concentr

    sur les loisirs, les 18-25 ans ont limpression quil ny en a pas le besoin et que ce priphrique rentre plutt dans la catgorie du gadget, linstar de beaucoup dobjets connects. A la question Pourquoi utilisez-vous une tablette ? les rpondants du questionnaire ont

    principalement mentionn les cours, comme Pauline, mais aussi les jeux et les sries/films. La

    transportabilit par rapport lordinateur est galement revenue. En dautres mots, la tablette a un format qui peut tre plus pratique transporter et on sen sert principalement pour son

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    confort dutilisation par rapport la taille de son cran, plus grand que celui dun cran de portable, lorsque lon ne peut pas avoir accs un cran dordinateur. Cependant plusieurs personnes indiquent quelle ne leur sert pas grand-chose et quils ne lutilisent pas souvent.

    Les objets connects ne sont pas non plus trs populaires pour linstant, 292 personnes ne possdent aucun objet connect et 31 possdent des kindle, kobo, ou autres liseuses

    lectroniques deBooks. Parmi les 36 rpondants qui ont rpondu Autre , presque tous faisaient rfrence des consoles de jeux comme la PS4 par exemple. Cinq personnes possdent

    quant elle des montres connectes, dernier objet connect en date. Enfin, dix personnes

    seulement envisagent dacheter des objets connects dans un futur proche.

    Pour analyser ces rsultats, nous

    pouvons les confronter aux paroles de

    nos participants lentretien collectif. A la question et vous, les objets

    connects a vous tente ? , la majorit

    du groupe rpond non.

    P : Moi jaime trop les trucs papier, cest comme lordinateur, je suis incapable dapprendre mes cours dessus.

    F : Puis si tu prends des notes cest mieux sur autre chose quun ordi.

    K : Ah oui moi jcris tout la main.

    P : Cest comme lire, jamais je pourrais acheter une liseuse.

    M : Moi si parce quen fait quand je commence un livre cest con parce que je prfre aussi les livres papier, mais souvent je vais acheter un tome ou deux tomes, et je vais les finir il sera 23h et 23h tu

    vas pas ta boutique acheter un livre donc cest simple je vais sur internet, je le tlcharge et je le lis.

    P : Ah non moi jachte tout dun coup du coup.

    M : Bah ya des fois je les achte aprs si vraiment le bouquin ma plu, mme si je lai dj lu et que je le r-ouvre pas et que je le relirai que dans deux ans.

    P : Cest comme une montre tu vois ? Bah une montre qui envoie des sms et tout, non. Une montre cest un bijou, cest joli, cest beau et a donne lheure. Cest pas un truc connect, horrible.

    F : Moi jarrive pas comprendre lutilit dune montre connecte. A partir du moment o tas un priphrique qui est dans ta poche et qui te sert justement recevoir des messages, des appels, voir

    des vidos etc. je vois pas pourquoi une montre. Surtout quun smartphone cest relativement bien abouti en termes technologiques, pour laccs sur le web tas pratiquement la mme aisance que sur un ordinateur pour une utilisation classique, genre quand tes pas en train de faire du code ou de jouer des gros jeux. Puis la montre tu laisses ton tlphone dans ta caisse tu pars au bar 300 mtres plus loin

    a marche plus ! Du coup faut ton tlphone dans ta poche. Donc a sert rien.

    T : En fait cest juste une interface de plus pour faire la mme chose quoi. []

    P : Vincent [un ami Pauline] a, le truc a sonne, tu sais plus o rpondre tsais ! Jai trop peur que quand je lappelle yait tout qui sonne, quand tout tes trucs sont connects tu sais plus o donner

    de la tte.

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    On peut voir que les 18-25 ans sont encore trs attachs limprim et au manuscrit. Si lobjet connect quon leur propose na pas de fonctionnalit propre, quil ne partage pas avec dautres objets connects, il semble alors inutile. Certains usages sont aussi bien ancrs, comme celui

    de la montre nayant quune fonction, celle de donner lheure, voire la date. Nous sommes donc encore loin de tous vouloir la montre de James Bond, au contraire, la vraie fonction des objets

    ne doit pas tre oublie et linquitude davoir trop dobjets connects et de ne plus savoir o donner de la tte , dtre pris dans ce que le tourbillon du branch (Jaurguiberry, 2005) existe. Cependant, ils ne sont pas non plus contre ces objets et nuancent leurs propos.

    C : Du coup vous prfrez les objets qui nont quune seule fonction ?

    T : Non moi je suis pour que a soit un hub, genre tas tout tes objets et tas une chose qui les runit quoi.

    M : Pareil.

    P : Non pour moi chaque objet devrait avoir son utilit propre.

    F : Moi je suis un peu partag entre les deux, cest--dire quil y a un intrt que ce soit dans un milieu pro ou pour un usage perso, davoir effectivement une sorte de hub, comme ce que font les smartphones lheure actuelle, peut tre en plus dvelopp plus accessible, mais je pense quil y a une limite cette connexion. Que ce soit dans la montre, dans un bracelet ou nimporte quoi, il faut quil y ait un rel intrt parce que au bout dun moment moi jai limpression que a prend plus le pas dun gadget, cest--dire que mme la tablette moi je trouve que cest trs gadget par rapport ce quon peut faire avec les micro PC ou les tablettes avec des claviers qui se clipsent. Bref transformer un objet juste pour le

    connecter je vois pas lintrt. Une montre, cest une montre. Jai connu des services o on utilisait des tablettes pour travailler, pourquoi pas, ctait pratique.

    C : Daccord donc vous tes pour les objets connects tant que a a une utilit pratique ?

    P : Cest a.

    Les autres : Ouais

    Matt : Sinon a fait que te distraire et on est dj suffisamment distrait.

    On retrouve ici le concept de hub de Pascal Poty. Un seul objet devrait tre le centre de la

    connectivit, la plateforme cl qui fait le lien avec les autres objets. Or cette plateforme est pour

    linstant le tlphone portable et cela convient parfaitement aux 18-25 ans. On sent ici leur volont de ne pas multiplier les connexions si ce nest pas absolument utile, de manire viter une accumulation inutile dobjets connects qui les distrairaient plus que ceux quils ont lheure actuelle, ne le font. Le seul objet qui est connect et 97% (CREDOC, 2014, p.19) gens ont, est une tlvision, mais ils se servent rarement de ces connexions comme on peut le voir

    ici :

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    La majorit des tlviseurs des rpondants sont connects internet et leurs ordinateurs. La

    diffrence tant que lorsque le tlviseur est connect internet, on peut regarder des contenus

    web dessus sans lintermdiaire de lordinateur, et que lorsquil est connect lordinateur, on peut soir regarder la tlvision sur notre ordinateur, soit projeter lcran de notre ordinateur sur celui de la tlvision. Regarder la tlvision en direct sur un ordinateur concerne une

    personne sur cinq en moyenne (22 %). La proportion atteint prs dune personne sur trois chez les lves et tudiants (36 %) et prs dune personne sur deux dans la tranche 18-24 ans (47 %). (CREDOC, 2014, p.30)

    Seulement 30 personnes ont rpondu que leurs tlviseurs taient connects leurs portables.

    Cest donc une utilisation qui nest pas encore trs dveloppe. Un seul des participants lentretien avait connect son portable son tlviseur. Il sagissait de Matt, qui nous dit : je men sers comme dune tlcommande pour ma tl aussi, parce que je retrouve jamais la mienne . Cela relve donc dun usage purement pratique pour lui.

    Les personnes ayant rpondu autre ont, pour la plus grande partie, prcis quils navaient pas de tlviseurs, que leurs tlviseurs taient trop vieux pour tre connects ou quils ltaient leur console de jeu.

    Dans lensemble, les gens ne se servent pas beaucoup des connexions leurs tlviseurs, sur une chelle de 1 (reprsentant trs peu souvent ) 5 (reprsentant trs souvent ), 197

    personnes ont rpondu par trs peu souvent contre 36 pour trs souvent .

    La tlvision doit tre lappareil connectable dont on se sert le moins en termes de connectivit.

    Connexions en termes de temps et dactivation

    Le CREDOC a analys le temps que les gens passent sur internet et pour ce centre, En

    moyenne, un internaute dclare passer 17 heures par semaine sur le net (contre 15 heures en

    2013). (CREDOC, 2014, p. 17)

    On sait aussi que 96% des 18-24 ans se

    connectent quotidiennement depuis un

    ordinateur situ leur domicile, ce qui

    est la proportion la plus leve jamais

    mesure 28.

    En effet, les 18-25 ans passent

    normment de temps sur internet.

    Dans notre sondage, nous leur avons

    demand dindiquer combien dheures ils passaient sur ordinateur tous les

    jours. Les rsultats que nous avons

    obtenus sont bien suprieurs ceux du

    28 Ibid. Page 75

  • P a g e 29 | 85

    CREDOC. Les 18-25 ans interrogs passent en moyenne 4,9 heures par jour sur ordinateur. La

    plupart des internautes de cette tranche dge passent entre une et cinq heures par jour sur internet, mais nous pouvons aussi observer un pic de quarante-deux personnes ayant indiqu

    passer environ dix heures par jour sur leurs ordinateurs. Bien sr, ce choix est srement li

    leurs vies professionnelles mais ctait un lment que nous voulions prendre en compte car les usagers se servent aussi de leurs connexions des fins personnelles certains moments lors de

    leurs journes de travail/cours, comme nous pouvons le voir daprs notre sondage.

    83,8% des personnes intrroges ont dclar aller sur des rseaux sociaux pendant leurs heures

    de travail ou de cours, soit 306 personnes sur 365. Nous leur avons propos une chelle de 1

    5 pour dterminer la frquence de leurs connexions ces sites en dehors de leur temps libre, 1

    signifiant peu souvent et 5, trs souvent . La majorit des rpondants y vont assez

    souvent, avec 95 personnes ayant choisi 3 , soit 29,7% et 22,2% ayant rpondu par le chiffre

    4. Il est intressant de noter quil y a pratiquement autant de monde dans les choix 1 et 5 (14,7% contre 15% respectivement), ce qui indique un usage pas encore tout fait gnralis. La

    majorit des gens passent ainsi un temps moyen sur les rseaux sociaux en dehors de leur temps

    libre. Durant lentretien, la question pourquoi allez vous sur des conversations blabla 29, les participants ont eu un change intressant :

    T : Quand tas rien faire a fait passer le temps. Genre moi tu vois quand je suis au bureau jai longlet Facebook ouvert ct de mes onglets de travail et je vais de lun lautre.

    []

    C : Et toi tu fais quoi Julie ?

    J : Je fais pareil que lui, des pauses Facebook qui remplacent des pauses clopes.

    29 Comprendre des conversations qui nont pas vraiment de but organisationnel mais qui consistent plutt en un change de badineries. Reprise dune de leurs expressions.

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    Ainsi on peut voir que les gens passent du temps sur les rseaux pendant les heures de travail,

    que ce soit par ordinateur ou sur portable. Il y vont dailleurs plusieurs reprises durant leurs journes, pour des moments courts, voir furtifs, mais intenses (rattrapage du fil dactualit, surveillance et rponses dventuels messages etc.).

    Par rapport au portable, notre enqute a mis en vidence le fait que les 18-25 ans le laissaient

    connect soit leurs donnes mobiles soit un rseau wi-fi la plupart du temps.

    Sur 365 rpondants, 178 personnes sont toujours connectes grce leurs donnes mobiles,

    cest--dire quelles sont en permanence connectes peu importe le rseau wi-fi etc. Il ny a que les transports en commun et les endroits mal couverts par le rseau qui peuvent freiner leurs

    connexions. Certaines personnes choisissent de nactiver ces donnes que lorsquelles sont en dplacement lextrieur, elles sont ici 91, soit 24,3% de nos interrogs. Seules 29 personnes ont indiqu ne jamais activer leurs donnes mobiles lextrieur. Celles-ci ne sont donc pas connectes lorsquelles sont lextrieur de leur domicile ou dun ventuel rseau Wi-Fi porte. Pour complter ces donnes, nous savons que daprs le CREDOC30, 74% des 18-24 ans se connectent internet depuis un ordinateur portable ou une tablette en dehors de chez eux,

    et que 82% de ces jeunes adultes, sy connectent partir de leurs tlphones portables. A leur domicile, notre enqute a trouv que 208 personnes, soit 57% des rpondants taient

    toujours connects au Wi-Fi. Celles qui y sont connectes la plupart du temps reprsentent

    plus de 15% du reste. Quarante-cinq personnes ont cependant indiqu ne jamais se connecter

    au Wi-Fi depuis leur domicile. Elles reprsentent 12,3% de notre chantillon. Nous pouvons

    supposer que ces personnes se servent exclusivement de leurs ordinateurs pour se connecter

    internet depuis leur domicile.

    Cela nous amne la conclusion quune majorit des 18-25 ans est connecte un rseau quel quil soit en permanence via tlphone portable. Ces connexions frquentes augmentent aussi le temps pass sur le portable. Lorsquon leur a pos la question, voici ce que nos participants

    30 CREDOC, 2014.

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    lentretien ont rpondu :

    C : Est-ce que vous pensez passer beaucoup de temps sur vos tlphones ?

    P : Oh oui.

    K : Non a va.

    G : Ah bah de 8h 20h au moins Tu veux quon le quantifie ?

    J : De 8h 23h je dirais.

    M : Tant que jai de la batterie en fait.

    P : Cest le prolongement de mon bras !

    T : Moi jai mon chargeur sur moi Matthias !

    G : De temps effectif non a doit faire 3-4h par jour.

    []

    F : Je sais pas comment vous faites les g