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(~ Masson, Paris. CHIRURGIE CARDIAQUE Ann Fr Anesth R&anim, 7 : 110-114, 1988 ET AGENTS INOTROPES Moyens m6caniques de traitement de I'insuffisance cardiaque r6fractaire Mechanical treatment of resistant congestive heart failure G. DREYFUS Service de Chirurgie Cardiovasculaire, H6pital Broussais, 96, rue Didot, F 75674 Paris Cedex 14 RI~SUMI~: Les moyens m6caniques de traitement de l'insuffisance cardiaque sont de plus en plus nombreux. Lcs limltes d'efficacit6 et los indications appropri6es de chaque moyen restent ~t d6finir. Le probl6me majeur est celui de l'6volution de la cardiopathie sous-jacente, qui pout se faire soit vers l'am61ioration permettant le sevrage, soit vers l'aggravation, n6cessitant secondairement une transplanta- tion cardiaque. On distingue arbitrairement los moyens simples, les assistances circulatoires et les ca~urs ou ventricules artificiels_ Parmi los moyens simples, la contrepulsion intra-aortique est la plus utilis6e. Elle est d'une cfficacit6 incontestable, mais malgr6 tout tr6s limit6e. De m6me, on pout contrepulser l'art6re pulmonaire dans los d6faillances droites, surtout dans les formes avec hypertension pulmonaire. Les assistances peuvent se faire soit par circulation extracorporelle, soit par des pompes centrifuges de type Biomedicus. Les d6bits de cos m6thodes sont en r6gle inf6rieurs aux d6bits th6oriques des malades, le but 6rant d'attendre une r6cup6rafion 6ventuelle. Toutes los modalit6s sont possibles : canulation f6morale ou cardiaque, uni- ou biventriculaire, avec ou sans oxyg6nateur. Le caract6re non puls6 de la plupart des assistances semble jouer un r61e d616t6re apr6s 72 h. La limite de ces m6ttiodes vient de l'alt6ration de la coagulation et de la fonction pulmonaire. Le caract6re impr6visible de l'6volution de la maladie causale pout contraindre h attendre une transplantation. Enfin, on trouve los c~urs artificiels, ou plut6t los ventricules artificiels, qui permettent une prise en charge totale de la circulation. I1 pout s'agir de ventricules orthotopiques, de type Jarvik, ou de ventricules h6t6rotopiques, de type Pierce. Chacun pr6sente des avantages et des inconv6nients. Leur capacit6 h assurer une prise en charge totale de la circulation pendant plusieurs semaines permet de corriger les cons6quences visc6rales des chocs cardiog6- niques aigus et doric de transplanter des malades ~ r6tablis ~ quant aux fonctions r6nale et pulmonaire. Le point capital, lors de l'utilisation de proth6ses cardiaques dans l'attente d'une transplantation, est de distinguer les malades pour lesquels ce relais sera efficace (pas d'atteinte visc6rale chronique) et ceux qu'il faut r6cuser avant. I1 semble int6ressant de citer un nouveau type de ventricules artificiels h6t6rotopiques, l'Abiomed BVS 5000, qui, par sa simplicit6, son efficacit6 et son faible coot, repr6sente une alternative s6duisante. ABSTRACT: Mechanical means tend to be used more frequently nowadays for the treatment of congestive heart failure which does not respond to more normal treatment. The indications and limits of such devices, as well as their cost, must be defined. The new problem created by these therapeutic tools is the evolution of the underlying cardiac disease : should it improve the patient will be weaned from the machine, whereas if it worsens heart transplantation would be the only answer. Three types of mechanical support are described. Balloon pumping, and especially intra-aortic balloon pumping, is the technique used most often. It has a true but limited efficacy. Its best indication is cardiogenic shock by lefl vcntricular ischaemia with normal or slightly increased peripheral resistances. Intrapulmonary balloon pumping is occasionally used, but the system can only be set up surgically. Its best indication would seem to be right-sided heart failure by pulmonary hypertension. Circulatory assistance is the second type considered. All types of bypass pumps can be used. The output used is usually less than the patient's theoretical output, the aim being to allow the myocardium to recover. Vascular access for these pumps is either femoral or intrathoracic. An oxygenator may or may not be added to the bypass circuit, and support may be mono- or biventricular. Although the non pulsatile flow has not been shown to be detrimental, this has to be investigated further. The use of these devices is limited by their effects on blood coagulation and pulmonary function. The artificial heart or artificial ventricles are the last devices described. They are either orthotopic, such as the Jarvik type, or extracorporeal, such as the Pierce artificial ventricles. Their ability to support totally the circulation for weeks allows patients to recover somewhat from acute multiple organ failure, so that they can be transplanted in better conditions. The main difficulty in using such devices is patient selection, with the exclusion straight-off of those patients with chronic multiple organ failure who will in any case not be suitable for transplantation later on. Because there are numerous mechanical means now available for the treatment of congestive heart failure no longer responsive to drugs, the choice of device to be used depends on the ultimate goal aimed for, i.g. transplantation or not. Requ le 8 octobre 1987 ; accept6 apr6s r6vision le 3 d6cembre 1987.

Moyens mécaniques de traitement de l'insuffisance cardiaque réfractaire

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Page 1: Moyens mécaniques de traitement de l'insuffisance cardiaque réfractaire

(~ Masson, Paris. CHIRURGIE CARDIAQUE Ann Fr Anesth R&anim, 7 : 110-114, 1988 E T A G E N T S INOTROPES

Moyens m6caniques de traitement de I'insuffisance cardiaque r6fractaire Mechanical treatment of resistant congestive heart failure

G. DREYFUS Service de Chirurgie Cardiovasculaire, H6pital Broussais, 96, rue Didot, F 75674 Paris Cedex 14

RI~SUMI~: Les moyens m6caniques de t rai tement de l ' insuffisance cardiaque sont de plus en plus nombreux. Lcs limltes d'efficacit6 et los indications appropri6es de chaque moyen restent ~t d6finir. Le probl6me majeur est celui de l '6volution de la cardiopathie sous-jacente, qui pout se faire soit vers l'am61ioration permet tan t le sevrage, soit vers l 'aggravation, n6cessitant secondairement une transplanta- tion cardiaque. On distingue arbitrairement los moyens simples, les assistances circulatoires et les ca~urs ou ventricules artificiels_ Parmi los moyens simples, la contrepulsion intra-aortique est la plus utilis6e. Elle est d 'une cfficacit6 incontestable, mais malgr6 tout tr6s limit6e. D e m6me, on pout contrepulser l 'art6re pulmonaire dans los d6faillances droites, surtout dans les formes avec hypertension pulmonaire. Les assistances peuvent se faire soit par circulation extracorporelle, soit par des pompes centrifuges de type Biomedicus. Les d6bits de cos m6thodes sont en r6gle inf6rieurs aux d6bits th6oriques des malades, le but 6rant d 'a t tendre une r6cup6rafion 6ventuelle. Toutes los modalit6s sont possibles : canulation f6morale ou cardiaque, uni- ou biventriculaire, avec ou sans oxyg6nateur. Le caract6re non puls6 de la plupart des assistances semble jouer un r61e d616t6re apr6s 72 h. La limite de ces m6ttiodes vient de l 'alt6ration de la coagulation et de la fonction pulmonaire. Le caract6re impr6visible de l '6volution de la maladie causale pout contraindre h at tendre une transplantation. Enfin, on trouve los c~urs artificiels, ou plut6t los ventricules artificiels, qui permet tent une prise en charge totale de la circulation. I1 pout s 'agir de ventricules orthotopiques, de type Jarvik, ou de ventricules h6t6rotopiques, de type Pierce. Chacun pr6sente des avantages et des inconv6nients. Leur capacit6 h assurer une prise en charge totale de la circulation pendant plusieurs semaines permet de corriger les cons6quences visc6rales des chocs cardiog6- niques aigus et doric de transplanter des malades ~ r6tablis ~ quant aux fonctions r6nale et pulmonaire. Le point capital, lors de l 'utilisation de proth6ses cardiaques dans l 'at tente d 'une transplantation, est de distinguer les malades pour lesquels ce relais sera efficace (pas d 'a t te inte visc6rale chronique) et ceux qu'il faut r6cuser avant. I1 semble int6ressant de citer un nouveau type de ventricules artificiels h6t6rotopiques, l 'Abiomed BVS 5000, qui, par sa simplicit6, son efficacit6 et son faible coot, repr6sente une alternative s6duisante.

ABSTRACT: Mechanical means tend to be used more frequently nowadays for the t reatment of congestive heart failure which does not respond to more normal t rea tment . The indications and limits of such devices, as well as their cost, must be defined. The new problem created by these therapeutic tools is the evolution of the underlying cardiac disease : should it improve the patient will be weaned from the machine, whereas if it worsens heart transplantation would be the only answer. Three types of mechanical support are described. Balloon pumping, and especially intra-aortic balloon pumping, is the technique used most often. It has a true but limited efficacy. Its best indication is cardiogenic shock by lefl vcntricular ischaemia with normal or slightly increased peripheral resistances. In t rapulmonary balloon pumping is occasionally used, but the system can only be set up surgically. Its best indication would seem to be right-sided heart failure by pulmonary hypertension. Circulatory assistance is the second type considered. All types of bypass pumps can be used. The output used is usually less than the pat ient 's theoretical output , the aim being to allow the myocardium to recover. Vascular access for these pumps is either femoral or intrathoracic. An oxygenator may or may not be added to the bypass circuit, and support may be mono- or biventricular. Al though the non pulsatile flow has not been shown to be detrimental , this has to be investigated further. The use of these devices is limited by their effects on blood coagulation a n d pulmonary function. The artificial heart or artificial ventricles are the last devices described. They are either orthotopic, such as the Jarvik type, or extracorporeal, such as the Pierce artificial ventricles. Their ability to support totally the circulation for weeks allows patients to recover somewhat from acute multiple organ failure, so that they can be t ransplanted in better conditions. The main difficulty in using such devices is patient selection, with the exclusion straight-off of those patients with chronic multiple organ failure who will in any case not be suitable for transplantation later on. Because there are numerous mechanical means now available for the t rea tment of congestive heart failure no longer responsive to drugs, the choice of device to be used depends on the ult imate goal aimed for, i.g. transplantation or not.

Requ le 8 octobre 1987 ; accept6 apr6s r6vision le 3 d6cembre 1987.

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ASSISTANCE CARDIAQUE NON PHARMACOLOGIQUE 111

Depuis l'essor de la transplantation cardiaque et des moyens m6caniques pour assister ou prendre en charge la circulation d'un cceur ddfaillant, une nouvelle pathologic est apparue. De plus en plus, des malades autrefois condamnds sont propos6s en chirurgie cardiaque pour assistance, cceur artificiel ou transplantation cardiaque. Ce sont de <~ nou- veaux malades ~,, tant par le caract~re 6volu6 de leur maladie, non limitde au cceur en gdn6ral, que par les d6sordres induits ~ plus ou moins long terme par ces moyens mdcaniques.

La diversit6 des moyens et l 'escalade th6rapeuti- que souvent n6cessaire chez de tels malades expli- quent la ndcessit6 d'en connMtre les limites et, fait non n6gligeable, le cotit.

Avant d'utiliser un moyen mdcanique pour trai- ter l'insuffisance cardiaque, il faut ddterminer avec le plus de prdcision possible l ' importance de la ddfaillance cardiaque et y apporter un remade adapt6. I1 faut aussi tenter d'en pr6voir la rdversi- bilit6 ou la non-r6versibilit6, pour se porter soit d'embl6e vers une prise en charge totale par des ventricules artificiels en vue d 'une t ransplantat ion cardiaque, soit vers une tentative d'assistance en vue d 'une r6cupdration dont la dur6e est souvent impossible ~ chiffrer.

I1 faut distinguer les moyens simples, les assis- tances circulatoires et, enfin, les cceurs ou ventri- cules artificiels.

1. MOYENS SIMPLES

Le plus couramment utilis6s, ils sont repr6sent6s essentiellement par la contrepulsion diastolique intra-aortique (CPIA). Sans revenir sur le mdca- nisme d'action de la CPIA (am61ioration de la perfusion coronarienne et diminution de la post- charge), il importe de rappeler qu'elle n 'augmente en fait le d6bit coronarien que de 20 ~ 30 % et qu'elle n 'augmente peu ou pas du tout le d6bit cardiaque [6]. La meilleure indication est donc repr6sent6e par les chocs cardiog6niques d'origine isch6mique pr6dominant sur le ventricule gauche. Pour l'utiliser au mieux, les r6sistances doivent 6tre normales, ou m6me un peu 61evdes, ce qui peut s 'opposer & son utilisation combin6e 5 des vasodilatateurs art6riels, voire aux cas rares, mais gravissimes, de chocs cardiog6niques & rdsistances effondr6es.

L'efficacit6 de la CPIA semble 6tre d'autant plus grande qu'elle s'applique pr6s du coeur. C'est pourquoi certains ont d6velopp6 une CP1A gz dou- ble ou mOrne gl triple ballonnet, augmentant ainsi le flux rdtrograde ddplac6 vers les coronaires h cha- que inflation, ce qui accroh le flux coronarien mais finit indirectement par augmenter le d6bit cardiaque. Ce type de ballonnet est encore exp6ri- mental et non disponible commercialement.

Le ventricule droit a longtemps 6t6 sous-estim6 dans l'analyse de la gravit6 des ddfaillances cardia- ques. La gravit6 d 'une atteinte du ventricule droit repose non seulement sur la difficult6 d'analyser sa participation fi une ddfaillance cardiaque globale, mais aussi sur le fait que son traitement mddical est limit6 aux vasodilatateurs veineux et aux ino- tropes. C'est pourquoi la contrepulsion intrapulmo- naire commence // 6tre utilis6e. Son mdcanisme d'action physiopathologique est plus complexe que celui des CPIA, puisqu'elle ne permet pas d'am6- liorer directement la perfusion coronarienne. Elle induit une diminution combinde de la pr6charge et de la postcharge, une augmentation de la pression ventriculaire droite tdldsystolique et donc de la pression artdrielle pulmonaire systolique, l'ensem- ble concourant fi diminuer le travail du ventricule droit et fi augmenter le flux transpulmonaire [4]. Le principe marne repose sur une propridt6 d u

syst6me droi t : 6tant tr6s compliant, il permet pour une faible variation de pression une forte augmentation de ddbit. II semble que l'efficacit6 de cette m6thode soit limit6e par la n6cessit6 d'obtenir des d6bits sup6rieurs fi 15 ml - kg -1 . min -I (ce qui reprdsente, pour un sujet de 70 kg, une augmentation de ddbit de 1 1. min ~), La raise en place de cette contrepulsion n6cessite l'ou- verture du sternum et, sans circulation extracorpo- relic (CEC), le clampage latdral du tronc de l 'art6re pulmonaire. Un ballonnet n ° 40 de CPIA est introduit dans une proth6se pr6coagul6e de Dacron n ° 20, sutur6e juste au-dessus des valves pulmonaires. L'int6r6t physiopathologique de la contrepulsion intrapulmonaire (CPIP) r6side dans le fait qu'elle est exclusivement antdrograde (~ l'oppos6 de la CPIA) et que la proth6se cousue latdralement sur l 'art6re pulmonaire joue pratique- ment le r61e d'un ventricule accessoire d'environ 40 ml [3]. Les meilieures indications semblent plus ~tre les d6faillances droites par hypertension pul- monaire que les d6faillances ventriculaires par atteinte de la contractilit6 du ventricule droit.

On peut ~tre amen6 dans certains cas ~ mettre en place une double contrepulsion, ~ la fobs intra- aortique et intrapulmonaire.

2. ASSISTANCES CIRCULATOIRES

Elles peuvent 6tre rdalisdes fi thorax ouvert ou thorax ferm6 avec ou sans oxygdnateur, uni- ou biventriculaire.

I1 s'agit le plus souvent de pompes de CEC, avec leurs avantages et leurs inconv6nients. Leurs avantages sont essentiellement leur large diffusion dans t ous l e s centres de chirurgie cardiovasculaire, leur relative facilit6 de mise en place et leur faible coot. Les inconvdnients viennent surtout de la Iongueur des circuits vdhiculant le sang, ndcessi- tant une anticoagulation avec des risques h6morra-

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112 G. DREYFUS

giques non n6gligeables, et de la dur6e de l'assis- tance, qui agit d 'une part sur la coagulation et d 'autre part sur la fonction pulmonaire. Enfin, un probl6me important n'est toujours pas r6solu h ce jour : faut-il ou non utiliser une pression puls6e ? Dans la n6gative, quelles en sont les cons6quences sur le rein et le poumon au-del~ de 48 ou de 72 h ? Certains proposent l'utilisation combin6e d 'une contrepulsion intra-aortique pour r6soudre partiellement ce probl6me.

Ces pompes peuvent 6tre mises en place par voie f6morale sous anesth6sie locale en canulant l 'art6re et la veine f6morales, la difficult6 6tant d 'obtenir un drainage veineux suffisant. Les d6bits d'assistance par cette m6thode ne d6passent gu6re 2 1 • min -j. A l'oppos6, ces systbmes peuvent 6tre mis en place apr6s sternotomie, en canulant les gros vaisseaux et les oreillettes ; le d6bit n'est alors plus limit6 [7].

Les diff6rents types de pompe sont comparables, l 'exception des mod61es Rh6ne-Poulenc, qui sont

plus fiables pour plusieurs raisons ; leur asservisse- ment complet entre l ' injection et l '6jection de la pompe supprime tout risque de d6samor~age ; les corps de pompe sont silicon6s et de calibre diff6- rent pour les syst~mes droit et gauche, c'est-'~-dire capacitif h droite et r6sistif h gauche_

Ces assistances sont de loin les plus physiologi- ques. Fait capital, ces pompes de CEC fonction- nent par simple d6clivit6 et n 'entrainent aucune aspiration, ni aucun vide, ce qui limite beaucoup le risque d'embolie gazeuse. La qualit6 du drai- nage des cavit6s cardiaques est fondamenta le ; celle-ci 6tant d 'autant plus difficile ~ r6aliser que les oreillettes sont petites, certains ont propos6 d'anastomoser fi l 'oreillette gauche une n6o-cavit6 accessoire servant de r6servoir interm6diaire de remplissage, ce qui accroh notablement l'efficacit6 des pompes.

La plupart du temps, l 'h6matose peut 8tre assu- r6e par le malade lui-m6me et l 'h6modynamique seule doit ~tre assist6e ou suppldde. Mais parfois l'(ed6me pulmonaire est tel qu'un oxygdnateur est adjoint h ce syst6me circulatoire ; c'est ce que les anglo-saxons appellent ECMO (<< extracorporeal membrane oxygenator >>). Les oxygdnateurs utilis6s sont des oxygdnateurs ~ membrane pour limiter l'agression globulaire. I1 est cependant admis que l 'hypoplaquettose et les troubles d'h6mostase sont accrus quand un oxyg6nateur est associ6. Mais rares sont les assistances par ECMO efficaces apr6s 72 h, et exceptionnelles sont celles qui per- mettent la r6cupdration pulmonaire (tableau I).

Entre les CEC et les ventricules artificiels, se trouvent les assistances pulsdes, essentiellement par le biais de pompes centrifuges, dont la plus r6pandue est la pompe Biomedicus. Elles se rem- plissent par simple ddclivit6 et permettent une assistance pulsde pouvant aller jusqu'~ 5 1 - min -j [5]. Ce syst6me fiable est tr6s rdpandu aux USA ;

Tableau I. - - Moyens mecaniques de traitement de I'insuffi- sance cardiaque refractaire

D6bit Assis- Sup- Dur6e (l-rain i) tance pl6ance

totale

ProthSses biventriculaires orthotopiques (Jarvik) 4 a 8 - + mois Proth6ses biventriculaires h6t6rotopiques (Pierce, Symbion) 2 ~ 5 + +

Pompes centrifuges (Biomedicus) + +

Pompes 5 galet (Rh6ne-Poulenc)

2 ~ 5 (puls6)

2 a 6 (non puls6)

+ +

semaines

jours

heures

Syst6me Abiomed BVS 5000 2 ~ 5 + + semaines

* D'aprc3s CARPENTIER et coll. [2].

il demande bien entendu une h6parinisation, mais les avantages sont multiples: le volume d 'amor- Gage est tr6s faible, le d6bit obtenu peut 6tre tr6s 61ev6 et est puls6. Ces pompes centrifuges ont surtout 6t6 indiqu6es dans les d6faillances apr6s chirurgie cardiaque, ot~ la s6rie la plus importante publi6e rapporte un taux de survie de 18 malades sur 50 patients [5], r6sultats qui montrent bien la difficult6 du probl~me dans cette indication. L'uti- lisation de ces pompes, dans les d6faillances car-

d i a q u e s r6fractaires au traitement m6dical et en attente de transplantation, est relativement peu courante et concerne uniquement la chirurgie p6- diatrique.

3. CGEURS ARTIFICIELS

I1 paraR peut-~tre pr6somptueux d'appeler coeurs artificiels des ventricules artificiels dont l 'ensemble des m6canismes d'activation et de r6gulation sont ext6rioris6s. I1 existe en fair actuellement deux grands types de ventricules artificiels : les orthoto- piques n6cessitant l 'explantation pr6alable du c0eur malade, de type Jarvik (fig_ 1), et les h6t6rotopi- ques n6cessitant une canulation du c~eur laiss6 en place, les ventricules 6tant h l 'ext6rieur, de type Pierce (fig. 2).

Les assistances circulatoires et les caeurs ou ven- tricules artificiels se distinguent par leur capacit6 de prendre en charge la totalit6 du d6bit circula- toire d 'un malade. L'assistance, comme son nom l'indique, prend en charge partiellement le travail d6faillant pour des d6bits en r6gle inf6rieurs 4 1 • min -f. Les assistances sont indiqu6es en g6n6ral pour des d6faillances cardiaques apr6s chi- rurgie cardiaque, dans l'espoir d 'une r6cup6ration

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ASSISTANCE CARDIAQUE NON PHARMACOLOGIQUE 113

Fig. 1. - - Ventricule orthotopique de Jarvik.

charge totale du d6bit., Les ventricules artificiels sont capables d 'assurer la totalit6 du d6bit circula- toire, goit des d6bits sup6rieurs gt 5 1. min -~.

3.1. Type Jarv ik

Ils ont des avantages [1]. La suture directe des oreillettes avec les ventricules artificiels laisse une petite surface de mat6riel 6tranger en contact avec le sang, la perte de charge est faible, et surtout la console informatique de r6gulation e t d'activation permet une grande finesse dans la r6gulation (volume d'djection systolique modulable). Leurs inconv6nients sont ceux d 'une v6ritable transplan- tation sous CEC. Les sutures auriculaires doivent 6tre 6ranches d 'embl6e, car elles sont inaccessibles une fois le cmur mis en fonction. I1 est impossible de r6aliser des 6tapes interm6diaires de type sevrage. Une recoupe des oreillettes est n6cessaire pour la retransplantation et n6cessite done un arti- fice technique lors de l ' implantation du coeur artifi- ciel. Enfin, le corot est tr6s 61ev6, aussi bien pour la console (plus de 500 000 FF) que pour chaque proth6se (200 h 250 000 FF). Les seules limites thdoriques aux indications de tels c0eurs sont les 6tats septiques ~ r6sistances p6riph6riques effon- dr6es.

3.2. Type Pierce

Ils ont des avantages [2]. Ils peuvent ~tre mis en piace sans CEC et la technique d'insertion est facile. Un sevrage et un passage en assistance sont possibles en cas de r6cup6ration du cmur pris en charge. Ils cofitent beaucoup moins cher (400 450 000 FF pour la console, 80 000 FF seulement pour chaque m o d u l e ; tableau II). Mais, ils ont aussi des inconv6nients : pertes de charge et acti- vation des ph6nomenes de coagulation par les lignes du circuit, entre les ventricules plac6s ~t l 'ext6rieur et les canules plac6es ~ l'int6rieur. Le d6bit obtenu est ra rement sup6rieur ~ 5,5- 6 1 - m i n -~, bien que l'efficacit6 de d6bits sup6- rieurs soit discutable et d ' int6ret non d6montr6. De la m6me fagon que pour les ventricules ortho- topiques, les limites th6oriques d'indication sont les 6tats septiques h r6sistances basses.

Fig. 2. - - Ventricule hdtdrotopique de Pierce.

du coeur assist6 avec possibilit6 de sevrage. I1 s'agit cependant d'un schdma, car il est toujours possible qu 'un coeur assist6, du fait de l 'aggrava- tion de la ddfaillance sous-jacente, doive 6tre pris en charge totalement. L 'apparei l id6al serait celui qui permet t ra i t de remplir les deux fonctions, d 'une part l 'assistance et d 'autre part la prise en

Tableau II. - - Variations de coot des protheses-relais*

Consoles Proth6ses d'activation ventriculaires

Jarvik 495 000 FF 185 000 FF Pierce 350 000 FF 160 000 FF Biomedicus 185 000 FF 3 500 FF Abiomed 394 000 FF 57 000 FF

* D'apr6s CARpENnER et coll. [2].

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1 14 G. DREYFUS

Beaucoup plus important que la presentation de ces differents criteres techniques de choix d'un c~eur artificiel parait 6tre de tenter de prdciser la limite rdelle d'efficacite de ces prises en charge en attente de transplantation. I1 faut tenir compte essentiellement de l 'etat visceral du malade avant la mise en place d'une prothese, en particulier de l'6tat renal et hdpatique. Si les atleintes rdnales et hepatiques sont passees ~ la chronicit6, la prise en charge sera sfirement efficace, mais en fait inutile et quasi vouee /~ l 'echec dans l 'optique d'une transplantation. Finalement, les rneilleures indica- tions de ces ventricules artificiels, qu'ils soient heterotopiques ou orthotopiques, sont les ddfail- lances cardiaques aigues chez des malades jusque- 1~ compenses, en particulier sur le plan rdnal et hepatique. Les cceurs heterotopiques ont aussi et6 utilisds, du fait de leur grande maniabilite, sous forme d'assistances (debits < 4 1 - ra in - l ) , soit en monoventriculaire (le plus souvent gauche exclu- sive), soil parfois en biventriculaire pour des chocs cardiogeniques apres chirurgie cardiaque, la morta- lit6 etant alors relativement 61evee (de l 'ordre de 60 %).

II para~t important de citer un nouvel appareil de prise en charge totale de la circulation, de type heterotopique, represente par le systeme Abiomed BVS 5000 (fig. 3). Sa particularite est qu'il fonc- tionne sur le principe des pompes de CEC par declivite, sans aucune aspiration, et qu'il a en m~me temps un systeme de ventricules qui 6jecte 80 ml par ejection et qui semble, du fait de la facilit6 de sa surveillance et de sa regulation, extremement utile et appreciable.

consequent elles relevent des moyens d'assistance heterotopique. Ce n'est qu'apr~s recuperation eventuelle qu'un bilan "~ distance permettra de poser ou non l'indication (si elle est necessaire) d 'une transplantation cardiaque ;

- - l e s chocs cardiogeniques des malades en attente de transplantation cardiaque. Ce sont des candidats aux prises en charge totales, o r tho top i - ques ou heterotopiques, s'il n'existe pas d 'embolie pulmonaire importante recente ou d'infarctus sys- temique ;

- - l e s chocs cardiogeniques des infarctus du myocarde. L'evolution d'un seul tenant vers la defaillance myocardique refractaire amene parfois, en attente de transplantation, ~ assister temporai- rement la circulation. Un module d'assistance est alors indiqu6, en sachant qu'il peut 6tre necessaire de prendre en charge la totalite du debit. L~ encore les coeurs heterotopiques peuvent remplir les deux fonctions.

4. CONCLUSION

I1 existe de nombreux moyens mecaniques pour soutenir un cceur defaillant, une fois l'arsenal the- rapeutique pharmacologique depasse. I1 parait capital de tenter de determiner ce que l'on veut faire avant de mettre en place l'un des moyens mecaniques. Soit on se dirige d 'emblee vers la transplantation et la prise en charge totale doit pouvoir 6tre realisee, soit on ne peut transplanter le malade (du fait de contre-indications viscerales ou d 'une maladie associee, de type diabete insu- lino-dependant ou autre) et on se fixe alors sur une assistance, en sachant que les resultats sont relativement decevants, quel que soit le moyen mecanique utilise. Il faut donc pouvoir quantifier la defaillance cardiaque et il reste ~ determiner un pronostic ~ court terme (inferieur "fi une semaine) de l 'evolution d 'une cardiopathie sous assistance mecanique pour ne pas laisser passer l 'heure d 'une transplantation cardiaque.

Fig. 3. - - console et module heterotopique du systeme Abio- med BVS 5000.

On peut schematiquement distinguer trois types de situation :

- - les defaillances cardiaques aigues apres chirurgie cardiaque. Ce ne sont pas de bonnes indications de transplantation en urgence, et par

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ASSISTANCE CARDIAQUE NON PHARMACOLOGIQUE 115

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DISCUSSION

(F Brunet, JF Dhainaut, G Dreyfus, S Estanove, Y Lecompte, D Payen et JC Salord)

Quelle est la place exacte en p6riode postop6ra- toire de la contrepulsion intra-aortique ?

GD : La contrepulsion intra-aortique est surtout utilisde pour pallier les ddfaillances postopdratoires rdsistant aux substances inotropes des cardiopathies ischdmiques, mais parfois aussi celles des cardiopathies valvulaires, Iors d ' interventions tr6s longues off la note ~< i s c h 6 m i q u e , prime sur les cons6quences myocardiques de la valvulopathie elle-m6me. En effet, au cours de la chirurgie cardiaque de l 'adulte, la plupart des dysfonc- tions cardiaques postopdratoires sont dues ~ u n ddfaut de protection myocardique, les ddfauts de correction et les dys- fonctions valvulaires 6tant ici exceptionnelles. Cependant , la contrepulsion intra-aortique n 'est qu 'une m6thode d 'appoint permet tant de diminuer la quantit6 de substances inotropes. II a bien 6t6 montr6 que cette m6thode, '2 la diffdrence des autres m6thodes d 'assistance plus sophistiqu6es, 6tait incapable de prdserver les zones ischdmiques sous-endocardiques lots des ndcroses exp6rimentales. L'objectif final de l 'assistance circula- toire n 'cst pas seulement d'amdliorer la mortalit6 immddiate, mais encore de p r d s e r v e r l a fonction myocardique afin de ne pas laisser un patient en insuffisance cardiaque grave apr~s cet 6pisode.

YL : Soulignons que, si l 'on fait b6n6ficier les adultes de ce que l'on fait couramment chez l 'enfant, c'est-~-dire d 'une assis- tance prolong6e sous CEC avant de prescrire les substances inotropes en cas de dysfonction en fin d ' intervention, les mdthodes d 'assistance tr~s lourdes peuvent le plus souvent 6 t re 6vitdes.

Faut-il ~tre aussi s6v~re vis-a-vis de la contrepul- sion intra-aortique preop~ratoire ?

GD, SE, D P : Certes, la contrepulsion est efficace pour contr61er certains syndromes de menace r6sistant au t rai tement m6dical, permet tant ainsi coronarographie et chirurgie si n6ces- saire ; de m6me vis-a-vis de certaines complications m6cani- ques, voire de certains chocs cardiog6niques de l ' infarctus du myocarde, elle permet ~t quelques patients d 'arriver ~ la chirur- gie en 6tat h6modynamique stable et contr616, alors que leur 6tat paraissait inop6rab[e au d6but.

Quelle est I'efficacit6 de la contrepulsion intrapul- rnonaire ?

GD : Dans notre courte exp6rience, cette m6thode peut ~tre efficace darts les d6faillances droites iso[6es. Mais cette m6thode n 'es t qu 'un appoint th6rapeutique, bien moins efficaee que les pompes d'assistance ventriculalre, et une tendance quasi in61uctable est de sauter l '6tape de la contrepulsion.

Le concept de d6faillance droite isol6e existe-t-il apres chirurgie cardiaque ?

D P : La chirurgie a vis6e rythmologique sur un ventricule droit dysplasique r6alise un mod61e quasi expdrimental de ddfaillance ventriculaire droite isol6e et uoe assistance mdcani- que univentriculaire est tr6s souvent ndcessaire.

G D : Les transplantations cardiaques peuvent aussi rdaliser des ddfaillances cardiaques droites avec ou sans hypertension art6rielle pulmonaire. L e support inotrope est naturel lement indispensable, mais aboutit parfois h l 'absence d'effet sur le ventricule droit, avec une tachycardie ddldt6re sur le remplis- sage ventriculaire et vasculaire coronarien. Le remplissage ven- triculaire gauche est, de plus, g~n6 dans son remplissage par le ddplacement septal et la cavit6 ventriculaire peut devenir quasi virtuelle en systole du fair des substances inotropes positives.

SE : Les acc6s d 'hypertension art6rielle pulmonaire suprasys- tdmique, qui peuvent compliquer les suites op6ratoires des cardiopathies congdnitales avec shunt gauche-droit , se tradui- sent par dcs ddfaillances cardiaques droites tr~s longtemps isol6es.

YL : De tels accbs d 'hypertension artdrielle pulmonaire sont un cas particulier, car il s'agit d 'une augmentat ion aigu6 de postcharge sur un ventricule droit dont la fonction est normale ou supranormale. L'dldvation des pressions de remplissage ven- triculaire gauche, dont l 'apparition est variable selon les patients, tdmoigne de la g6ne au remplissage ventriculaire plu- t6t que d 'une d6faillance au sens << contractilit6 ,, du terme. Le trai tement est d'ailleurs bas6 sur la diminution de cette hyper- tension art6rielle pulmonaire par la prostacycline, qui semble le m6dicament le plus efficace. Quan t ~t l 'at t i tude pr6ventive de tels acc6s, les aspirations trachdales courtes, la bonne oxygdna- tion avec hyperventilation et la sddation sont des interventions classiques et efficaces.

Quelle est la place des vasodilatateurs dans le trai- tement des d6faillances cardiaques postop6ratoires du nourrisson, en dehors de I'hypertension art6rielle pulmonaire ?

YL : Le traitement de ces d6faillances par les vasodilatateurs chez le nourrisson n 'a fait la preuve ni de son efficacit6, ni de son innocuit6, en pattie du fait des difficult6s d' invcstigation d6j/a soulev6es chez ces petits malades. Par contre, un remplis- sage vasculaire tr~s prudent est un pr6alable classique ~ un trai tement inotrope dont l'efficacit6 porte surtout sur l ' augmen- tation de la fr6quence cardiaque, qui b, elle seule est efficace, comme la stimulation auriculaire l 'a bien montr6.

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Comment peut-on expliquer qu'aprbs I'intervention de Fontan, qui supprime fonctionnellement le ventri- cule droit, certains patients se portent bien sans signes de d6faillance droite s6vere ? Quel est le r61e exact du ventricule droit ?

JFD : La diff6rence importante entre l ' intervention de Fon- tan, qui rdalise une ddrivation du ventricule droit, et la ddfail- lance droite classique tient au ventriculc droit lui-lname. En effet, lors de la d6faillance droite classique, la dilatation du

vent r icu le droit vient, par intcrf6rence ventriculaire dans le sac p6ricardique inextensible, per turber la contraction septale et le remplissage ventriculaire gauche, r6alisant une v6ritable tam- ponnade intrap6ricardique. Les interventions expdrimentales et cliniques de d6rivation ventriculaire droite (le volume du ven- tricule droit alors tr~s rdduit ne peut induire une telle interfd- fence ventriculaire) ont bien montr6 que le r61e du ventriculc droit 6tait alors modeste , sauf en cas d 'hyper tension artdrielle pulmonaire. Par contre, une ldsion expdrimentale associde du septum intraventriculaire est toujours suivic de signes patents de d6faillance droite.

D P : Signalons h ce propos que si on rigidific le syst6me veineux, en particulier le syst6me splanchnique, on est capable d ' augmente r voire de doubler le d6bit cardiaque.

Faut-il maintenir les substances inotropes Iors du sevrage de la ventilation artificielle ?

FB : L'insuffisance ventriculaire gauche repr6sente presque le quart des causes d'impossibilit6 de sevrage du respirateur chez les patients apr6s chirurgie cardiaque. La simple correction de cette insuffisance ventriculaire gauche par la dobutamine asso- ci6e ou non aux vasodilatateurs permet le sevrage rapide clans la plupart des cas. En effet, lors du passage en ventilation spontan6e, l 'augmentat ion de la consommat ion d 'oxyg6ne dia- phragmatique, l 'augmentat ion du retour veineux et de la post- charge ventriculaire gauche (due au passage d 'un r6gime de pression positive en pression n6gative) entrainent une 616vation parfois insoutenable du travail cardiaque pour un cceur ~ limite ~,, qui peut induire une insuffisance ventriculaire gauche aigu6 avec ced6me pulmonaire. A c e propos, l 'aide inspiratoire, qui favorise le passage progressif vers la ventila- tion autonome, nous semble particuli~rement efficace chez ce type de patients.

Quelle est I'efficacite des substances inotropes positives sur la fonction ventriculaire droite ?

DP~: Des doses nmfimes pour le ventricule gauche (5 Ixg - kg J - rain -~ de dobutamine) ont un effet tr~s net sur la contraction du ventrieule droit aprons chirurgie cardiaque.

J F D : Un point particulier est h rioter concernant le ehoc cardiog6nique secondaire ~t une hyper tension art6rielle pulmo- naire aigu6, comme peut en provoquer l 'embolie pulmonaire. Les substances inotropes sont ici inefficaces, h l 'exception de la noradr6naline qui seule, par son effet vasoconstricteur, 616ve la pression art6rielle ~t un niveau compatible avec une perfusion coronarienne droite ad6quate devant une relic 616vation de la postcharge.

Quelle est la place de I'adr(~naline parmi les sub- stances inotropes en chirurgie cardiaque ?

SE : L'adrdnaline est la substance inotropc positive que l 'on utilise souvent en derni6re intention dans le bas-ddbit apr6s CEC. Nous avons tous en t6te des observations off ellc s'est

DISCUSSION

av6r6e tr~s efficace alors quc d 'autres 6taient sans effet. Elle est aussi tr6s utile en cas d ' impr6gnat ion importantc pr6alable par les [3-bloqueurs.

Comment explique-t-on I'effet hypertensif de la dobutamine Iorsque le patient est sous 6-blo- queurs ?

JFD, JCS : Cet effet est dfi b, Faction de la dobutamine sur les r6cepteurs a, action vasoconstrictrice qui n 'est plus contre- balanc6e par la stimulation des r6cepteurs [32, impossible du fait du t ra l tement par [3-bloqueurs.

Le pr~traitement par la phentolamine induirait une diminution de I'effet inotrope de la dobutamine, Qu'en est-il actuellement ?

JCS, JFD : I1 est exact que la phentolamine tend '~ diminuer l 'effet inotrope de [a dobutamine. Le mdcanisme exact reste discut6 : I'effet a -bloquant de la phentolaminc pourrait dimi- nuer I'effet inotrope de la dobutamine en faisant jouer un r61e aux c~-r6cepteurs myocardiques dans la r6ponse motrope posi- tive a la dobutamine.

Conclusion

JFD ct DP : La contractilit6 joue un r61e fondamental dans la performance cardiaque, mais les indices habi tuel lement cmploy6s d6pendent largement des conditions de charge ventri- culaire. Une tentative raisonnable d'6valuation, n6cessitant au moins des mesures 6chocardiographiques, n 'est pas toujours facile "5_ effectuer, si bien que le t ra i tement inotrope restc empirique, bas6 sur des donn6es essentiel lement cliniques.

Les i3-agonistes apparaissent comme les inotropes de la d6faillance cardiocirculatoire aigu6 ; la mih inone et la f6noxi- mone peuvent 6tre une alternative raisonnable aux [3-agonistes, saul si la d6faillance cardiocirculatoire est instable e t / o u asso- ci6e a une vasopl6gie. Ainsi, les inhibiteurs des phosphodiest6- rases semblent beaucoup plus adapt6s au trai tement de I'insuffi- sance cardiaque aigu6 sans choc et surtout h l ' insuffisance cardiaque chronique, car seules leurs formes orales sembleot efficaces de fa~on prolong6e.

En chirurgie cardiaquc, les substances inotropes, habituelle- ment a doses 61ev6es, sont la base du traitelnent du has d6bit postop6ratoire. Cependant , I 'association soit de plusieurs ino- tropes, soit d ' inotropes et de vasodilatateurs repose sur des bases encore trop empiriques, n6cessitant des 6tudes compl6- mentaires.

L'assistance m6canique joue aussi un r61e tr~s important , bien que le mode d'assistance id6al, permet tant d 'effectuer une prise en charge soit partielle, soit totale si ['dtat du malade l 'exige, pour un coQt raisonnable, reste ~t trouver. Seuls 25 % des patients soumis /I une assistance circulatoire auront une vie normale a la sortie de l 'h6pital, montrant l '6tenduc des progr6s

accomplir. La chirurgie cardiaque du nouveau-n6 et du nourrisson

repr6sente une agression encore plus s6v6re, car leurs rdscrvcs cardiovasculaires sont presque nulles. Les inotropcs sont effi- caces cn cas d 'at teinte de la contractilit6, mais il manque les crit6res objectifs de l 'indication, du choix et de la posologie de ces substances.