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paramètres La pénologie Réflexions juridiques et criminologiques autour de la peine Sous la direction de Estibaliz Jimenez et de Marion Vacheret Les Presses de l’Université de Montréal M Extrait de la publication

Pénologie • Réflexions autour de la peine et de son ...… · introduction 5. pénologie . Réflexions autour de la peine et de son application. Les Presses de l’Université

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Le Canada a adopté récemment la Loi sur la sécurité des rues et des

communautés établie dans la ferme intention d’aggraver les sanctions

pénales à l’égard de certains groupes de contrevenants en dépit de la

diminution du taux de criminalité au cours des vingt dernières années.

Cette loi s’inscrit dans la continuité des discours politiques centrés sur la

protection des familles, la défense des victimes et la responsabilisation des

criminels. Son entrée en vigueur a suscité une attention médiatique

considérable, ainsi que d’importants débats de société. En effet, qu'en

est-il du droit de punir et de sa mise en œuvre ?

De l’absolution à la condamnation, en passant par les peines d’emprison-

nement à perpétuité et les amendes, les pratiques pénales sont nombreuses

et complexes. Devant cette diversité, les auteurs ont choisi de se concentrer

sur les mesures affectant, ou risquant d’affecter, la liberté des condamnés,

dans un contexte où la prison reste le point d’orgue du système pénal

canadien.

En offrant une présentation simple et claire de la législation actuelle,

ce livre très pertinent, écrit par plusieurs spécialistes, se veut un outil

pratique à l’usage des étudiants et de tous les professionnels de ce domaine.

EEstibaliz Jimenez, criminologue, est professeure régulière au Département de

psychoéducation à l’Université du Québec à Trois-Rivières.

Marion Vacheret, criminologue, est professeure titulaire à l’École de crimi-

nologie de l’Université de Montréal.

29,95 $ • 27 e

Couverture : Illustration Umberto Cirrito, d'aprèsune photographie de Maaike Annegarn

Aussi disponible en version numérique

www.pum.umontreal.ca

ISBN 978-2-7606-3315-5

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La pénologieRéflexions juridiques et

criminologiques autour de la peine

Sous la direction de

Estibaliz Jimenezet de Marion Vacheret

Les Presses de l’Université de MontréalPUM

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pénologie Réflexions autour de la peine et de son application

Les Presses de l’Université de Montréal

Sous la direction d’Estibaliz Jimenez et Marion Vacheret

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iSBn (papier) : 978-2-7606-3315-5iSBn (pdf) : 978-2-7606-3320-9iSBn (epub) : 978-2-7606-3321-6

Dépôt légal : 3e trimestre 2013Bibliothèque et Archives nationales du Québec© Les Presses de l’Université de Montréal, 2013

Les Presses de l’Université de Montréal reconnaissent l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour leurs activités d’édition. Les Presses de l’Université de Montréal remercient de leur soutien financier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).

impr imé au c a na da

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Jimenez, EstibalizPénologie : réflexions autour de la peine et de son application(Paramètres)Comprend des références bibliographiques.iSBn 978-2-7606-3315-51. Sentences (Procédure pénale) - Canada. I. Titre. II. Collection : Paramètres.

Ke9355.J55 2013 345.71’0772 c 2013-941540-8

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Introduction

L’année 2012 a été marquée au Canada par l’adoption de la Loi sur la sécurité des rues et des communautés. Établie avec la volonté affirmée d’aggraver les sanctions pénales à l’égard de certains groupes de contre-venants, cette loi s’inscrit dans la continuité des discours politiques centrés sur la protection des familles, la défense des victimes et la responsabili-sation des criminels, et ce, en dépit de la diminution du taux de criminalité au cours des 20 dernières années.

L’entrée en vigueur de cette loi a suscité une attention médiatique considérable, ainsi que d’importants débats de société quant aux fonde-ments du droit de punir et à sa mise en œuvre. Elle renforce les préoccu-pations autour du rôle attendu du système judiciaire et des fonctions attribuées à la peine. Pour certains, nous punissons trop – trop souvent, trop sévèrement, de façon inadéquate, voire inutile ; pour d’autres, notre système est trop laxiste ou trop doux – on parle alors de sentences bon-bons. Et qui ne se souvient pas des « club fed » qui ont fait la une des journaux canadiens à la fin des années 1990 ? La détermination de la peine, le fonctionnement du système judiciaire, les profils de la population prise en charge et les fonctions de l’emprisonnement sont aujourd’hui discutés, dans un contexte où les coûts associés à la justice sont de plus en plus remis en question, en regard des « résultats » attendus et obtenus. Intrinsèquement constitutives de la pénologie, ou de l’étude de la sanction pénale, ce sont ces dimensions que nous aborderons dans cet ouvrage.

Que l’on parle de condamnation, de sanction ou de châtiment, la péno-logie s’inscrit dans une réflexion sur le droit de punir et de faire souffrir que s’accorde une société. Au Canada, la peine est dite plurifonctionnelle.

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Elle vise, selon le Code criminel, à la fois la dénonciation de l’acte, la répa-ration des torts causés, la dissuasion et la neutralisation des contrevenants potentiels, ainsi que la responsabilisation ou la réinsertion sociale des délinquants condamnés.

Pendant longtemps les discours politiques, législatifs, administratifs et universitaires se sont concentrés sur la modération pénale, la recon-naissance de l’importance des mesures alternatives à l’incarcération et la limitation de l’usage de l’emprisonnement à tel point que la philosophie de réinsertion sociale semblait faire partie du sens commun. En fermant au Québec en 1996 cinq établissements de détention, réduisant ainsi la capacité carcérale de plus de 400 places, le très bref (il n’a duré que cinq ans) virage milieu qu’a connu la province au milieu des années 1990 en a été l’un des signes les plus profonds. En énonçant l’objectif d’une inter-vention pénale centrée sur la prévention, la résolution des conflits et une utilisation modérée et ciblée de l’emprisonnement, cette réforme se démarquait alors de la tendance que connaissait l’Amérique du Nord en général, en particulier les États-Unis.

Toutefois, nous assistons aujourd’hui à des changements majeurs dans cette perspective. La responsabilisation des condamnés, la rationalisation des interventions et l’idée d’une peine vraiment méritée sont au cœur de la philosophie pénale actuelle. Changement de paradigme, les interven-tions pénales se concentrent maintenant sur le risque et sa gestion. Afin de réduire la probabilité de survenance des actes criminels, les connais-sances scientifiques et le développement technologique sont mis à profit pour mieux gérer les populations prises en charge, dans un État non plus social mais sécuritaire. Les interventions pénales s’y appuient sur des discours de gestion rationnelle tant économique que sociale ou politique. Il est question de réduction des coûts de la criminalité et de la justice, d’investissements économiquement rentables en matière de lutte contre la criminalité ou encore de gains de capital social ou politique. Visant la sécurité publique par un recours accru à la sanction pénale, à la respon-sabilisation du condamné et à la neutralisation de certains groupes de contrevenants, le rétablissement de l’ordre social est devenu la formule clé de l’ensemble et une façon pour l’État de faire valoir sa force et ses compétences.

La première grande réforme du Code criminel date de 1996. Depuis, et surtout à partir de 2006, nous assistons à une explosion de l’activité

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législative en matière pénale. Remettant en cause l’esprit de modération énoncé jusque-là, ce mouvement est caractérisé par l’entrée en vigueur de multiples projets de lois, concernant soit un allongement des peines, soit de nouvelles incriminations, ou une restriction du pouvoir discré-tionnaire des juges. Ces actions ont enclenché une inflation pénale et carcérale, dont nous commençons à voir les répercussions.

L’ensemble des politiques mises en place s’inscrit dans une dualité pénale. Certaines mesures, issues des grandes années durant lesquelles la réhabilitation prédominait, sont centrées sur la modération et l’insertion communautaire. D’autres mesures visent davantage la répression des actes criminels et la neutralisation, relativement longue, des contrevenants. La peine se conjugue alors sous de multiples formes. De l’absolution à une condamnation, à une peine d’emprisonnement à perpétuité, ou d’une amende à une ordonnance de probation, les pratiques pénales sont nom-breuses et diversifiées. On retrouve parmi les sanctions non carcérales les travaux communautaires, instaurés au début des années 1980, qui impo-sent au condamné une peine comportant l’exécution de travaux pour un organisme sans but lucratif, ou la probation, une sanction pénale permet-tant de purger sa peine dans la communauté, tout en demeurant sous la surveillance des représentants du service correctionnel. D’un autre côté, l’emprisonnement reste encore et toujours le point de référence en matière de pénalité. On y retrouve les peines privatives de liberté, à proprement parler, et leurs diverses modalités, comme la libération conditionnelle et l’ordonnance d’emprisonnement avec sursis, mesure hybride qui allie la réinsertion sociale et la punition du contrevenant.

Que l’on soit sociologue, criminologue, travailleur social ou juriste, l’étude du droit de punir d’une société à l’égard de ses concitoyens nous paraît être fondamentale. Elle doit permettre de comprendre à la fois le processus pénal mis en œuvre, le sens de la peine, ainsi que les enjeux associés à une prise en charge pénale. Sans prétendre à l’exhaustivité, il s’agit de poser les jalons d’une réflexion de fond sur la législation cana-dienne actuelle, tout en amenant une réflexion plus large à propos des politiques pénales. Face à la diversité des mesures pénales existantes, notre choix dans cet ouvrage a été de nous concentrer sur les mesures affectant ou risquant d’affecter la liberté des condamnés, la prison étant encore aujourd’hui le point d’orgue tant du système pénal canadien que des discours politiques et sociaux actuels.

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La première partie de cet ouvrage est consacrée à l’acte de juger au sein du processus pénal. Sébastien Lachambre analyse les principes fon-damentaux en matière pénale, les objectifs pénaux et les critères de déter-mination, et Françoise Vanhamme présente une réflexion sur le rôle et la place du juge dans ce fonctionnement.

La deuxième partie jette un regard éclairant sur la notion de peine et sur ses formes particulières aujourd’hui. La prison étant au cœur de la pénalité contemporaine, Marion Vacheret fait l’analyse des peines pro-noncées. Les mesures non carcérales ou moins restrictives en matière de privation de liberté sous l’angle de l’ordonnance d’emprisonnement avec sursis sont examinées par Sandra Lehalle, puis Fernanda Prates analyse à son tour le régime de libération conditionnelle. Finalement, Estibaliz Jimenez traite des répercussions d’un casier judiciaire pour un condamné et du régime de réhabilitation.

Finalement, dans la troisième partie, il sera question de la place faite à certains groupes sociaux dans le système pénal. À partir d’une réflexion sur les délinquants dangereux, les personnes atteintes de troubles mentaux et les condamnés âgés, Dominique Robert, Denis Lafortune et Véronique Strimelle mettent en lumière les enjeux associés à cette prise en charge.

Loin d’être une conclusion formelle et définitive sur un système, cet ouvrage se veut un outil d’ouverture vers la réflexion et la discussion à partir d’une présentation simple et claire de la législation actuelle. Différents auteurs, différents thèmes et différents niveaux d’analyse et de réflexion favoriseront la compréhension d’un ensemble complexe d’infor-mations. Cet ouvrage vise surtout à permettre à des étudiants de première année d’amorcer une certaine découverte du système pénal canadien. Avec entre autres des réflexions théoriques, plusieurs chapitres restent délibérément descriptifs, la compréhension des enjeux entourant le sys-tème pénal passant nécessairement par la connaissance de ce dernier.

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le système pénal et la détermination de la peine

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1L’évolution des objectifs de la peine en droit canadien

Sébastien Lachambre

La structure actuelle des objectifs de la peine s’inscrit dans une tradition bien établie malgré l’apparition de nouveautés. Les objectifs les plus anciens demeurent présents (dissuasion, dénonciation, rétribution, réha-bilitation et neutralisation) et de nouveaux s’y ajoutent (réparation et conscientisation du contrevenant), tout comme des changements législa-tifs récents incitent les juges à donner la priorité à la dénonciation et la dissuasion, dans le cas des peines à imposer pour des infractions ciblées. Ce chapitre montrera l’utilisation des objectifs de la peine en droit cana-dien et présentera l’évolution de ces derniers par l’étude de différents types de discours (législatif, jurisprudentiel et juridico-politique).

L’étude de l’article 718 du Code criminel est fondamentale si l’on veut comprendre la structure des objectifs de la peine au Canada, mais elle est loin d’être suffisante. En effet, c’est seulement dans les années 1990 que les objectifs de la peine ont été codifiés, ce qui limite la capacité de ce changement à nous éclairer sur leur évolution. De plus, durant les décen-nies 1960, 1970 et 1980, certains des discours les plus détaillés sur les objectifs de la peine au Canada ont été produits par des commissions de réforme du droit. Ces discours juridico-politiques n’ont pas force de loi, mais ils influencent les décisions à la fois politiques (création de la loi) et juridiques (décisions des tribunaux dans des cas précis). Jusqu’aux années 1990, les cours d’appel des provinces jouaient un rôle important dans

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l’orientation de la détermination de la peine au Canada. La Cour suprême du Canada a également pris position à plusieurs reprises sur les principes et les objectifs de la peine. L’ensemble des décisions illustre comment les juges canadiens comprennent et utilisent les objectifs de la peine.

Ce chapitre est divisé en quatre parties. Tout d’abord, l’ensemble des objectifs de la peine du système pénal canadien est présenté. Suivra une discussion sur les discours juridico-politiques suscités par les différents rapports de commissions de réforme du droit. Seront ensuite abordées certaines décisions de la Cour suprême du Canada, ce qui permettra de saisir la position de la plus haute cour du pays sur les objectifs de la peine. Enfin, trois articles du Code criminel seront exposés, de manière à mon-trer une nouvelle tendance en matière d’objectifs de la peine au Canada.

Les objectifs de la peine dans le système pénal canadien

Un objectif de la peine consiste en l’identification d’une cible pour les peines. C’est une promesse, un souhait formulé à l’égard des peines. Les objectifs de la peine sont des réponses familières et rassurantes à des questions éthiques difficiles, par exemple : comment peut-on justifier les mesures les plus contraignantes que l’État peut imposer à ses citoyens (amende, prison et mort) ? Les objectifs de la peine contribuent à donner un sens socialement acceptable aux pratiques punitives déployées en réaction aux infractions criminelles.

Rétribuer, dissuader, réhabiliter, neutraliser, dénoncer. Voilà des objec-tifs bien connus attribués aux peines imposées en droit criminel en vertu de l’article 718. Ces objectifs ont tous tenu un rôle dans les réflexions sur le droit criminel au Canada qui, à l’instar d’autres pays occidentaux, a connu une intense période de réflexion sur le droit pénal à partir des années 1950. Malgré tout, leur articulation et leur sens demeurent souvent mal compris.

Historiquement, il y a eu une opposition forte entre deux courants philosophiques : le rétributivisme et l’utilitarisme. Pour le rétributivisme, punir tous les contrevenants est un devoir de l’autorité, peu importe les conséquences concrètes de l’imposition de la peine. La rétribution donne corps à cette fonction de la peine et elle est souvent illustrée par l’adage « œil pour œil, dent pour dent ». L’utilitarisme présuppose au contraire que l’imposition des peines doit entraîner des bénéfices pour la société ;

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de manière générale, la peine doit servir à protéger la société du crime. La dissuasion, la réhabilitation et la neutralisation ont été les objectifs les plus couramment associés à cette fonction du droit criminel et de la peine. Enfin, une troisième fonction importante du droit et des peines a été progressivement discutée à partir de la fin du x ix e  siècle, mais son statut par rapport aux deux autres demeure incertain. Il s’agit de la réaffirmation des valeurs fondamentales de la société ou de la « fonction socio-pédagogique » (Van de Kerchove, 2005). L’idée de dénoncer le crime par la peine a accompagné la réflexion sur cette fonction de la peine.

Depuis la fin du xv iii e siècle, par rétribution, on entend « punir pour punir » ou « punir pour faire justice » sans égard aux conséquences de la peine. Au cœur de cet objectif se trouve l’idée de punir de manière égale ou proportionnelle à la gravité du crime parce que la peine est méritée. Les années 1970 ont vu apparaître une variante de la position de Kant sous les traits du juste dû1.

Lorsque la peine a pour objectif de dissuader, on punit soit pour faire peur aux contrevenants potentiels (dissuasion générale), soit pour éviter la récidive du contrevenant puni par la crainte de l’application d’une nouvelle peine (dissuasion spécifique). La peine doit être suffisamment sévère pour dépasser les avantages que la commission du crime pourrait procurer aux contrevenants2.

Quant à elle, la réhabilitation peut être définie ainsi : punir de manière que les contrevenants deviennent respectueux de la loi ou, du moins, qu’ils ne transgressent plus les lois. La réhabilitation réclame l’administration de programmes de traitement qui doivent être appliqués en prison ou dans la communauté. Cet objectif a fait l’objet de nombreuses critiques à partir des années 1960, mais il demeure bien présent encore aujourd’hui3.

Lorsque la peine vise la neutralisation, punir sert à réduire la capacité de commettre des crimes des contrevenants dangereux en les mettant à l’écart de la société. Cet objectif de la peine ne présuppose pas que les individus peuvent changer, seulement que la société peut bénéficier de la

1. Le châtiment est parfois utilisé comme synonyme de la rétribution.2. L’intimidation peut parfois se substituer à la dissuasion.3. Pour faire référence à cet objectif, on emploie aussi correction, réadapta-

tion et réinsertion.

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mise à l’écart temporaire (parfois prolongée) ou permanente de certains contrevenants ou groupes de contrevenants4.

Finalement, la dénonciation, à titre d’objectif de la peine, laisse entendre que punir est nécessaire pour que s’exprime la désapproba- tion de la société à l’égard du crime. Une telle expression peut être une fin en soi ou un moyen de consolider la désapprobation des citoyens honnêtes pour le crime. Cet objectif a été promu avec vigueur par le juriste anglais James Fitzjames Stephen. La dénonciation a été progressi-vement institutionnalisée en droit criminel, au moins à partir des années 19505.

R. c. Willaert 6, de la Cour d’appel de l’Ontario, est une décision représentative des préoccupations en matière de détermination de la peine des années 1950 (et abondamment citée dans des décisions ultérieures). Dans cette décision rendue sur une affaire d’agression sexuelle, le juge MacKay indique que « la véritable fonction du droit criminel, en ce qui a trait à la peine, est dans l’amalgame judicieux (wise blending) de la dis-suasion et de la réhabilitation, où la rétribution n’est pas complètement mise de côté7 ». Fait à noter, la réhabilitation est pour lui « ce qui permet d’avoir le plus d’espoir dans la plupart des cas, en matière de peine8 ». Cette décision est intéressante, puisqu’elle met en évidence l’importance d’amal-gamer différents objectifs de la peine. Elle souligne également l’impor-tance grandissante de la réhabilitation en droit criminel.

Quelque quarante ans plus tard, en 1996, le législateur a enchâssé dans le Code criminel9 du Canada ce que bon nombre d’observateurs consi-dèrent comme l’approche canadienne en matière d’objectifs de la peine, c’est-à-dire justement un amalgame de plusieurs objectifs (principalement la rétribution, la dissuasion, la neutralisation et la réhabilitation). De ce

4. En plus de la neutralisation, on retrouve l’idée de séparation, ou le besoin d’isoler le contrevenant. Parfois, les expressions « protection de la société » ou « prévention » sont utilisées pour définir cet objectif précis de la peine.

5. Avant que l’étiquette dénonciation ne soit adoptée, des périphrases jume-lant notamment l’idée d’expression à la désapprobation, à l’indignation ou à la haine ont été observées.

6. R. c. Willaert, [1953] O.R. 282-289.7. Traduit par l’auteur.8. Traduit par l’auteur.9. Référence complète du Code criminel (L.R.C. [1985], chapitre C-46), ci-

après « C. cr. ».

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point de vue, aucun objectif n’a préséance sur les autres. Pour répondre aux exigences de différentes situations, des objectifs de la peine différents peuvent être privilégiés tout comme ils peuvent être combinés. Cette position est défendue par Manson (2001), Meyer et O’Malley (2005), Ruby et al. (2008), Jodouin et Sylvestre (2009) et Renaud (2009), pour n’en nommer que quelques-uns.

Le législateur a également ajouté des « nouveautés » dans la mesure où la réparation du tort causé et la conscientisation des délinquants quant à leurs responsabilités, comme objectifs de la peine, ne sont apparues que marginalement au cours des décennies précédentes.

Dadour (2007) écrit que la réparation est le désir du législateur de favoriser une « “remise en état” de la victime par le contrevenant ». Le Code criminel prévoit notamment des modalités de dédommagement de la part du contrevenant (C. cr. 742.3[2][e]), mais il peut aussi être question de travaux communautaires où c’est l’intérêt de réparation envers la société qui est promu. Renaud (2009) ajoute que cet objectif doit promou-voir la justice réparatrice en « encourageant » ou en « incitant » le contre-venant à cette fin.

Quant à l’objectif prévu au paragraphe 718(f), Renaud invite à distin-guer, dans la formulation même de l’objectif par le législateur, deux objectifs différents : responsabiliser le contrevenant quant à ses actions et l’amener à reconnaître les torts qu’il a causés aux victimes et à la collec-tivité. Selon lui, cet objectif peut notamment être utile lorsque l’accusé nie sa culpabilité.

On peut remarquer que la rétribution n’apparaît pas comme objectif de la peine dans le Code criminel. On trouve cependant l’idée de « sanc-tions justes » dans l’introduction aux objectifs de la peine tout comme le « principe fondamental » est la proportionnalité, où la peine doit corres-pondre à la gravité du crime et à la responsabilité de l’infracteur. Ces idées sont avantageusement interprétées comme la réminiscence de la rétribu-tion au Canada bien qu’elles peuvent prendre plusieurs sens. Ce point de vue est défendu entre autres par Dadour (2007), par Dumont (1997) et par Roberts et Von Hirsch (1999).

Le droit criminel se déploie à l’intérieur de différents discours. Parmi ceux-ci, il y a bien entendu les décisions des tribunaux ainsi que ce qui a trait à la législation (lois, débats parlementaires, etc.), sans oublier les travaux de doctrine. Pour aborder l’évolution des objectifs de la peine, il

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faut aussi prendre en considération les rapports produits par les commis-sions de réforme du droit.

Les discours juridico-politiques à l’égard des objectifs de la peine

Les commissions de réforme du droit, à mi-chemin entre les ouvrages de doctrine et le domaine législatif (Dubé et Cauchie, 2007), constituent des fenêtres sur l’état des discours sur le droit à un moment donné. Celles-ci sont citées par les décisions des tribunaux et elles peuvent aussi entraîner des réformes législatives. Elles ont aussi une plus grande flexibilité que d’autres discours juridiques, de telle sorte qu’elles ont la capacité d’innover.

Seront discutés les rapports produits par trois commissions, soit celui du comité Ouimet (1969), ceux de la Commission de réforme du droit du Canada (1976) et celui de la Commission canadienne sur la détermination de la peine (1987). Ces rapports permettent de voir que des structures différentes de celle que l’on peut observer tant dans la décision R. c. Willaert que dans l’article 718 du Code criminel ont été explorées et lais-sées dans l’oubli. On voit également les traces de la continuité qui carac-térise l’approche canadienne.

Le comité Ouimet

Le Comité canadien de la réforme pénale et correctionnelle (aussi appelé comité Ouimet) a été établi en 1965, à la demande du ministre de la Justice du Canada, dans le but d’étudier le domaine correctionnel, de l’amorce du processus judiciaire à la remise en liberté et à la demande de pardon, et de faire les recommandations nécessaires. Son rapport a été publié en 1969.

Comme le comité Ouimet le martèle tout au long de son rapport, « [l]e but fondamental de la justice criminelle est de protéger tous les membres de la société, y compris le délinquant lui-même, des consé-quences d’une conduite hautement nuisible et dangereuse ». En même temps, on peut y lire ceci :

La conception moderne du « sentencing » a vraiment le caractère d’un com-promis. En effet, le magistrat est censé tenir compte des trois facteurs sui-vants : dissuasion, réadaptation et ségrégation, dans le but de protéger la société. […] [L]’on […] s’attend […] à ce qu’il […] tente de fusionner ces trois éléments pour en arriver à une décision appropriée (Ouimet, 1969).

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l ’é v o l u t i o n d e S o BJe c t i f S d e l a p e i n e e n d r o i t c a n a d i e n 19

Cette manière de concevoir la détermination comme l’intégration de plusieurs objectifs de la peine est proche de l’amalgame judicieux présent dans R. c. Willaert (1953).

C’est sur la réhabilitation que le comité Ouimet porte le plus d’atten-tion et c’est sur cette finalité qu’il fonde le plus d’espoir parce qu’il y voit « la meilleure protection sociale à long terme » (Ouimet, 1969). Qui plus est, Ouimet « fait ressortir la nécessité de traiter les délinquants au sein même de la collectivité, lorsque la chose est possible » (ibid.).

Enfin, Ouimet considère que la rétribution doit être valorisée lorsqu’elle prend le sens suivant : « La société dit au délinquant : “Nous rejetons ce genre de comportement”, et elle traduit la force de ce sentiment dans la sévérité plus ou moins grande de la sentence imposée. » (ibid.) On peut y voit l’élargissement du sens de la rétribution pour voir apparaître les signes de la dénonciation (Lachambre, 2011).

Pour donner suite aux travaux du comité Ouimet, le gouvernement du Canada a mis en place la Commission de réforme du droit du Canada pour étudier tous les aspects du droit, incluant la détermination de la peine.

La Commission de réforme du droit du Canada

En 1971, le gouvernement du Canada instaure la Commission de réforme du droit du Canada (CRDC). Cette commission prend place dans un contexte où se côtoient l’optimisme de Ouimet pour la réhabilitation et la critique très forte de cet objectif de la peine de la part de juristes, de criminologues et de groupes sociaux divers.

En plus de se réapproprier la réhabilitation valorisée à l’extérieur de la prison, la CRDC a aussi mis de côté les objectifs traditionnels que sont la rétribution et la dissuasion (1976a) pour les remplacer entre autres par la dénonciation et la neutralisation. En fait, pour la CRDC, il y a trois motifs seulement qui peuvent justifier le recours à l’emprisonnement :

(a) neutraliser le délinquant qui présente un danger sérieux pour la vie et la sécurité personnelle des membres de la communauté ; ou (b) [dénoncer]10 un comportement que la société juge extrêmement répréhensible parce qu’il

10. La CRDC traduit parfois « to denounce » et « denounciation » par « stig-matiser » et « stigmatisation » ; il semble plus clair de maintenir « dénoncer ».

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constitue une violation grave des valeurs fondamentales ; ou (c) servir, en dernier ressort, de mesure de contrainte contre les délinquants qui refusent de se soumettre à d’autres sanctions pénales (CRDC, 1976b).

Chaque objectif de l’emprisonnement venait avec des modalités par-ticulières. La détention visant la neutralisation pouvait s’étirer sur une période maximale de 20 ans. Lorsqu’il s’avérait nécessaire d’emprisonner un contrevenant pour dénoncer le comportement criminel, elle ne dépas-serait pas trois ans11.

La CRDC réaffirme aussi la pertinence de maintenir la réhabilitation comme objectif de la peine. Elle dit d’une part que « [l]a réadaptation sociale ne constitue pas une justification valable du recours à l’emprison-nement » (ibid.), rendant facultatifs les programmes thérapeutiques des-tinés aux détenus (ibid.). D’autre part, la CRDC recommande l’instauration d’une peine, appelée ordonnance visant l’amélioration des aptitudes sociales (formation professionnelle, suivi thérapeutique, etc.) (ibid.), appli-cable dans la communauté. C’est là que la réhabilitation continuerait d’avoir une emprise plus évidente sur le système pénal.

En spécifiant à la fois des objectifs et des durées de détention maxi-males liées à chacun d’eux, la CRDC est parvenue à proposer des balises véritablement contraignantes au recours à l’emprisonnement. Cette manière d’encadrer le recours à l’emprisonnement sera reprise dans les propositions de réforme subséquentes, mais toujours un peu plus atté-nuées jusqu’à complètement disparaître.

La Commission canadienne sur la détermination de la peine

Dans les suites des travaux de la CRDC, le gouvernement fédéral a jugé nécessaire de mettre en place en 1987 une commission portant spécifique-ment sur la détermination de la peine. La Commission canadienne sur la détermination de la peine (CCDP) considère que la dissuasion, la réhabi-litation et la neutralisation sont inefficaces ou des options inutilisables. Selon la CCDP, la dénonciation est surtout un processus communica-tionnel fondé sur la réaffirmation des valeurs et bien qu’il soit « clair

11. Les rapports de la CRDC contenaient probablement la promotion d’autres objectifs, comme la responsabilisation ou la conscientisation du délin-quant, tout comme la réparation ou le dédommagement, mais la CRDC n’est pas claire à ce sujet, c’est pourquoi nous n’en parlons pas ici.

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T R O I S I È M E P A R T I E

les justiciables et les populations prises en charge

7. Les délinquants dangereux 113

Dominique Robert

8. Les troubles mentaux, la responsabilité criminelle et l’incarcération 135

Denis Lafortune

9. Au bout de « la » peine ? Les femmes âgées incarcérées au Canada 153

Véronique Strimelle

Bibliographie 169

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Le Canada a adopté récemment la Loi sur la sécurité des rues et des

communautés établie dans la ferme intention d’aggraver les sanctions

pénales à l’égard de certains groupes de contrevenants en dépit de la

diminution du taux de criminalité au cours des vingt dernières années.

Cette loi s’inscrit dans la continuité des discours politiques centrés sur la

protection des familles, la défense des victimes et la responsabilisation des

criminels. Son entrée en vigueur a suscité une attention médiatique

considérable, ainsi que d’importants débats de société. En effet, qu'en

est-il du droit de punir et de sa mise en œuvre ?

De l’absolution à la condamnation, en passant par les peines d’emprison-

nement à perpétuité et les amendes, les pratiques pénales sont nombreuses

et complexes. Devant cette diversité, les auteurs ont choisi de se concentrer

sur les mesures affectant, ou risquant d’affecter, la liberté des condamnés,

dans un contexte où la prison reste le point d’orgue du système pénal

canadien.

En offrant une présentation simple et claire de la législation actuelle,

ce livre très pertinent, écrit par plusieurs spécialistes, se veut un outil

pratique à l’usage des étudiants et de tous les professionnels de ce domaine.

EEstibaliz Jimenez, criminologue, est professeure régulière au Département de

psychoéducation à l’Université du Québec à Trois-Rivières.

Marion Vacheret, criminologue, est professeure titulaire à l’École de crimi-

nologie de l’Université de Montréal.

29,95 $ • 27 e

Couverture : Illustration Umberto Cirrito, d'aprèsune photographie de Maaike Annegarn

Aussi disponible en version numérique

www.pum.umontreal.ca

ISBN 978-2-7606-3315-5

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Lapé

nolo

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La pénologieRéflexions juridiques et

criminologiques autour de la peine

Sous la direction de

Estibaliz Jimenezet de Marion Vacheret

Les Presses de l’Université de MontréalPUM

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