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972 Rev Neurol (Paris) 2004 ; 160 : 10, 956-977 NEUROMÉDITERRANÉE V Étude clinique et electrophysiologique de 180 cas de syndrome de Guillain-Barré N. Birouk, M. Berramdane, H. Belaidi, B. Kably, M. El Alaoui Faris, M. Yahyaoui, R. Ouazzani, T. Chkili Laboratoire de Neurophysiologie Clinique, Hôpital des Spécialités, Rabat, Maroc. Le syndrome de Guillain-Barré est la cause la plus fré- quente de paralysie flasque aiguë symétrique des membres. L’examen électrophysiologique est très utile pour confir- mer le diagnostic et pour déterminer le type d’atteinte démyélinisante ou axonale. Nous rapportons une étude de 180 patients examinés au laboratoire de Neurophysiologie pour le diagnostic d’un SGB entre janvier 1998 et juin 2003. L’âge moyen était de 23,6 + 18,2. II y’avait 74 enfants âgés de 18 mois à 15 ans (7,4+4,1) et 106 adultes âgés de 16 à 70 ans (34,8 + 15,6). Une PRN aiguë répondant aux critères classiques de démyélinisation a été diagnostiquée chez 153 patients (85 p. 100). Les 27 patients restants avaient une forme axo- nale dont la grande majorité était motrice pure. Huit patients avaient un SGB à rechute et étaient à leur second épisode avec un intervalle libre de 1 à 10 ans. L’atteinte des nerfs crâniens était inaugurale chez 7 patients. Les caractéristiques cliniques et l’évolution ont été comparées d’une part, entre les groupes de patients avec forme démyélinisante et axonale et d’autre part, entre les enfants et les adultes. La reprise d’une marche autonome au-delà de 3 mois par rapport au début (forme sévère) a été notée de façon significativement plus fréquente dans la forme axonale. La forme axonale était significativement plus fréquente chez les enfants (26 p. 100 vs 7,5 p. 100 chez les adultes), en revanche, l’atteinte bulbaire et la nécessité de séjour en unité de soins intensifs ne présentait pas de différence significative entre enfants et adultes. La détermination du caractère démyélinisant ou axonal de la PRN aiguë de type Guillain-Barré par le biais de l’examen électrophysiologique est cruciale étant donné la possibilité de mécanismes physiopathologiques différents et éventuellement d’une prise en charge thérapeutique dif- férente. Polyradiculonévrites chroniques : étude clinique, électrophysiologique et évolutive de 24 cas H. Belaidi, B. Benaaboud, N. Birouk, B. Kably, S. Aidi, M. El Alaoui Faris, M. Yahyaoui, R. Ouazzani, T. Chkili Service de Neurophysiologie Clinique, Hôpital des Spécialités, Rabat, Maroc. Les polyradiculonévrites inflammatoires démyélinisantes chroniques (PIDC) sont des affections chroniques ou à rechutes. Elles se caractérisent habituellement par un défi- cit moteur des membres, des troubles sensitifs distaux et une aréflexie. La protéinorachie est souvent élevée, l’étude neurophysiologique et histologique trouve des signes de démyélinisation segmentaire. Nous rapportons 24 cas de PIDC, recrutés entre 1988 et 2003, il s’agit de 20 patients de sexe masculin et 4 de sexe féminin, âgés de 4 à 73 ans avec un délai d’apparition des signes cliniques entre 4 mois et 5 ans. Des signes de démyélinisation ont été retrouvés à l’étude électrophysiolo- gique dans tous les cas, avec une dissociation albuminocy- tologique à l’étude du LCR chez 17 patients. L’étude histologique a été réalisée dans 10 cas. Le bilan inflammatoire, immunologique et sérologique était normal, chez tous nos patients. Sous corticothérapie orale 1 mg/kg/j de prednisone ou des bolus de méthylprednisolone, l’évolution était favora- ble dans 21 cas, dont 3 cas avaient présenté une rechute après régression de la corticothérapie, ayant nécessité une reprise de la posologie initiale, avec adjonction des immu- nosuppresseurs voire des immunoglobulines IV dans un cas. Le recul évolutif est compris entre 5 mois et 26 ans. Polyradiculonevrite aiguë à rechute révélant une maladie de Crohn : à propos d’un cas B. El Moutawakil 1 , M.A. Rafai 1 , I. Gam 1 , H. Fadel 1 , H. El Otmani 1 , M. Tahiri 2 , R. Smail 2 , R. Alaoui 2 , A. Cherkaoui 2 , I. Slassi 1 1 Service de Neurologie, 2 Service de Gastro-Entérologie, CHU Ibn Rochd Casablanca, Maroc. Les manifestations neurologiques au cours de la maladie de Crohn sont rares, dominées par les anomalies de la subs- tance blanche et les mononeuropathies multiples, les poly- radiculonévrites restent exceptionnelles. Les auteurs rapportent l’observation d’un patient de 33 ans, hospitalisé pour bilan d’un deuxième épisode de tétraparésie flasque aréflexique ascendante, survenue 8 ans après un premier épisode similaire ayant régressé spontané- ment ; ce tableau évoluait de façon concomitante avec une diarrhée chronique jusque-là non bilantée. L’aspect électro- physiologique était compatible avec une polyradiculoné- vrite. L’étude du LCR montrait une discrète dissociation albumino-cytologique. L’existence de la diarrhée a orienté les investigations dans le sens d’une entéropathie inflam- matoire, ce qui a été conforté ultérieurement par les don- nées endoscopiques, radiologiques et histologiques ayant conclu à une maladie de Crohn évolutive. Le diagnostic d’une PRNA à rechutes associée à une maladie de Crohn a été retenu. Le patient a bénéficié d’un traitement à base de salazopirine-budosemide et l’évolution a été satisfaisante sur le plan digestif et neurologique avec un recul de 16 mois. La fréquence des atteintes neurologiques au cours d’une maladie de Crohn est mal documentée, seules des observations sporadiques ont été rapportées. Les mécanis- mes incriminés sont, soit directement liés à la maladie (déficit en vitamine B12 en vitamine A ou en Acide folique et/ou par le biais d’une vascularite auto-immune), soit secondaires au traitement par Métronidazole au long cours.

Polyradiculonevrite aiguë à rechute révélant une maladie de Crohn : à propos d’un cas

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Page 1: Polyradiculonevrite aiguë à rechute révélant une maladie de Crohn : à propos d’un cas

972 Rev Neurol (Paris) 2004 ; 160 : 10, 956-977

NEUROMÉDITERRANÉE V

● Étude clinique et electrophysiologique de 180 cas de syndrome de Guillain-Barré

N. Birouk, M. Berramdane, H. Belaidi, B. Kably, M. El Alaoui Faris, M. Yahyaoui, R. Ouazzani, T. Chkili

Laboratoire de Neurophysiologie Clinique, Hôpital des Spécialités, Rabat, Maroc.

Le syndrome de Guillain-Barré est la cause la plus fré-quente de paralysie flasque aiguë symétrique des membres.L’examen électrophysiologique est très utile pour confir-mer le diagnostic et pour déterminer le type d’atteintedémyélinisante ou axonale.

Nous rapportons une étude de 180 patients examinés aulaboratoire de Neurophysiologie pour le diagnostic d’unSGB entre janvier 1998 et juin 2003. L’âge moyen était de23,6 + 18,2. II y’avait 74 enfants âgés de 18 mois à 15 ans(7,4+4,1) et 106 adultes âgés de 16 à 70 ans (34,8 + 15,6).Une PRN aiguë répondant aux critères classiques dedémyélinisation a été diagnostiquée chez 153 patients(85 p. 100). Les 27 patients restants avaient une forme axo-nale dont la grande majorité était motrice pure. Huitpatients avaient un SGB à rechute et étaient à leur secondépisode avec un intervalle libre de 1 à 10 ans. L’atteinte desnerfs crâniens était inaugurale chez 7 patients.

Les caractéristiques cliniques et l’évolution ont étécomparées d’une part, entre les groupes de patients avecforme démyélinisante et axonale et d’autre part, entre lesenfants et les adultes. La reprise d’une marche autonomeau-delà de 3 mois par rapport au début (forme sévère) a éténotée de façon significativement plus fréquente dans laforme axonale.

La forme axonale était significativement plus fréquentechez les enfants (26 p. 100 vs 7,5 p. 100 chez les adultes),en revanche, l’atteinte bulbaire et la nécessité de séjour enunité de soins intensifs ne présentait pas de différencesignificative entre enfants et adultes.

La détermination du caractère démyélinisant ou axonalde la PRN aiguë de type Guillain-Barré par le biais del’examen électrophysiologique est cruciale étant donné lapossibilité de mécanismes physiopathologiques différentset éventuellement d’une prise en charge thérapeutique dif-férente.

● Polyradiculonévrites chroniques :étude clinique, électrophysiologique et évolutive de 24 cas

H. Belaidi, B. Benaaboud, N. Birouk, B. Kably, S. Aidi, M. El Alaoui Faris, M. Yahyaoui, R. Ouazzani, T. Chkili

Service de Neurophysiologie Clinique, Hôpital des Spécialités, Rabat, Maroc.

Les polyradiculonévrites inflammatoires démyélinisanteschroniques (PIDC) sont des affections chroniques ou àrechutes. Elles se caractérisent habituellement par un défi-cit moteur des membres, des troubles sensitifs distaux etune aréflexie. La protéinorachie est souvent élevée, l’étude

neurophysiologique et histologique trouve des signes dedémyélinisation segmentaire.

Nous rapportons 24 cas de PIDC, recrutés entre 1988et 2003, il s’agit de 20 patients de sexe masculin et 4 desexe féminin, âgés de 4 à 73 ans avec un délai d’apparitiondes signes cliniques entre 4 mois et 5 ans. Des signes dedémyélinisation ont été retrouvés à l’étude électrophysiolo-gique dans tous les cas, avec une dissociation albuminocy-tologique à l’étude du LCR chez 17 patients. L’étudehistologique a été réalisée dans 10 cas.

Le bilan inflammatoire, immunologique et sérologiqueétait normal, chez tous nos patients.

Sous corticothérapie orale 1 mg/kg/j de prednisone oudes bolus de méthylprednisolone, l’évolution était favora-ble dans 21 cas, dont 3 cas avaient présenté une rechuteaprès régression de la corticothérapie, ayant nécessité unereprise de la posologie initiale, avec adjonction des immu-nosuppresseurs voire des immunoglobulines IV dans uncas. Le recul évolutif est compris entre 5 mois et 26 ans.

● Polyradiculonevrite aiguë à rechute révélant une maladie de Crohn : à propos d’un cas

B. El Moutawakil1, M.A. Rafai1, I. Gam1, H. Fadel1,H. El Otmani1, M. Tahiri2, R. Smail2, R. Alaoui2,A. Cherkaoui2, I. Slassi1

1 Service de Neurologie,2 Service de Gastro-Entérologie, CHU Ibn Rochd Casablanca, Maroc.

Les manifestations neurologiques au cours de la maladiede Crohn sont rares, dominées par les anomalies de la subs-tance blanche et les mononeuropathies multiples, les poly-radiculonévrites restent exceptionnelles.

Les auteurs rapportent l’observation d’un patient de33 ans, hospitalisé pour bilan d’un deuxième épisode detétraparésie flasque aréflexique ascendante, survenue 8 ansaprès un premier épisode similaire ayant régressé spontané-ment ; ce tableau évoluait de façon concomitante avec unediarrhée chronique jusque-là non bilantée. L’aspect électro-physiologique était compatible avec une polyradiculoné-vrite. L’étude du LCR montrait une discrète dissociationalbumino-cytologique. L’existence de la diarrhée a orientéles investigations dans le sens d’une entéropathie inflam-matoire, ce qui a été conforté ultérieurement par les don-nées endoscopiques, radiologiques et histologiques ayantconclu à une maladie de Crohn évolutive. Le diagnosticd’une PRNA à rechutes associée à une maladie de Crohn aété retenu. Le patient a bénéficié d’un traitement à base desalazopirine-budosemide et l’évolution a été satisfaisantesur le plan digestif et neurologique avec un recul de16 mois. La fréquence des atteintes neurologiques au coursd’une maladie de Crohn est mal documentée, seules desobservations sporadiques ont été rapportées. Les mécanis-mes incriminés sont, soit directement liés à la maladie(déficit en vitamine B12 en vitamine A ou en Acide foliqueet/ou par le biais d’une vascularite auto-immune), soitsecondaires au traitement par Métronidazole au long cours.

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© MASSON Compte rendu de congrès • Neuroméditerranée V 973

NEUROMÉDITERRANÉE V

L’évolution des manifestations neurologiques est engrande partie dépendante de l’évolution de l’affection.

● Apport de la biopsie de nerf dans le diagnostic des neuropathies acquises

J.-M. VallatService de Neurologie, CHRU Dupuytren, Limoges.

La biopsie nerveuse périphérique est un examen parfoistrès utile pour le diagnostic de certaines neuropathies péri-phériques, en complément des examens cliniques, électro-physiologiques et biologiques. Son indication est à discuterau cas par cas. L’intérêt est surtout d’ordre étiologique,mais parfois elle affirmera la neuropathie.

Les techniques les plus adéquates doivent pouvoir êtreréalisées, ce qui implique un laboratoire spécialisé. Néan-moins, les fixations indispensables peuvent être pratiquéesn’importe où, dans la mesure où certains impératifs simplessont respectés.

Dans le cadre d’une neuropathie acquise, elle sera réservéeà certaines indications. Par exemple, en cas de suspiciond’une polyradiculonévrite inflammatoire démyélinisantechronique, si les critères électrophysiologiques sont insuffi-samment informatifs, la biopsie permettra d’affirmer le dia-gnostic en mettant en évidence des signes en faveur d’unedémyélinisation ; l’atteinte axonale presque toujours associéedans ces cas d’évolution chronique, est secondaire et ne doitpas faire méconnaître le diagnostic. En effet, un traitementimmunomodulateur peut être d’une réelle efficacité. Aucours d’une neuropathie associée à une dysglobulinémie,surtout si la recherche d’anticorps anti-MAG est négative, labiopsie peut être très utile pour préciser le mécanisme lésion-nel : infiltrations d’immunoglobuline, de cellules anormales,d’amylose, processus dysimmun, rôle d’une éventuelle chi-miothérapie, processus multiples concomitants. Enfin, ilarrive de temps à autre, dans le cadre d’une neuropathie sanscause, que seule la biopsie permette de conclure à une amy-lose, une lèpre, une sarcoïdose, etc.

En cas de neuropathie probablement génétique, la biopsiepeut orienter vers certaines anomalies géniques (proliférationsmyéliniques anormales en faveur d’une maladie de Charcot-Marie de type 4 B) ; plus rarement, seront découvertes uneneuropathie à axones géants, une maladie de surcharge.

Dans notre expérience, la biopsie nerveuse est d’un inté-rêt certain dans le diagnostic des neuropathies périphéri-ques en insistant sur l’indication à discuter au cas par caset sur la nécessité d’être certain d’utiliser le maximum desmeilleures techniques histologiques.

● Manifestations neurologiques périphériques révélatrices d’une hépatite virale C

M.A. Rafai, Z. El Farouki, B. Moutawakil, H. El Othmani, F.Z. Boulaajaj, I. Gam, I. SlassiService de Neurologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc.

Les manifestations neurologiques au cours de l’hépatitevirale C sont rares et peu connues. L’atteinte du système

nerveux périphérique étant la mieux documentée. Tous lestableaux cliniques peuvent être réalisés. Cependant, lesmononeuropathies multiples sont les plus habituelles. Nousrapportons 4 observations colligées au service de Neurolo-gie CHU Ibn Rochd de janvier 1999 à décembre 2001. Ils’agit de deux hommes et deux femmes dont l’âge moyenest de 51 ans. L’atteinte neurologique périphérique réalisaitune mononeuropathie multiple dans tous les cas et étaitassociée à une atteinte neurologique centrale dans 2 cas. Lebilan paraclinique n’avait pas retrouvé de cryoglobulinémiedans tous les cas. Le diagnostic de l’hépatite virale C étaitretenu devant l’association d’une atteinte hépatique clini-que, biologique et anatomopathologique à une sérologiepositive à l’hépatite virale C (Riba), une PCR recherchantune évolutivité virale réalisée dans 4 cas, s’est avérée posi-tive dans 2 cas. Le traitement à l’interféron a été instaurédans 2 cas (PCR positive). Il a permis une évolution favo-rable dans 1 cas. La corticothérapie a été instaurée dans1 cas (PCR négative) et a permis une nette amélioration. Àla lumière de ces observations, les auteurs discutent lesdivers mécanismes étiopathogéniques de l’atteinte neurolo-gique périphérique au cours de l’hépatite virale C : actiondirecte du virus, atteinte indirecte à médiation auto-immunemettant en jeu une cryoglobulinémie, un pseudosyndromede Gougerot, un syndrome des antiphospholipides ouencore une angéite. Les auteurs analysent par ailleurs lespossibilités thérapeutiques actuelles.

● Neuropathie révélant une sclérodermieO. Messouak, S. Rostom, N. Birouk, M.F. BelahsenService de Neurologie, CHU de Fès, Fès, Maroc.

La sclérodermie est une affection généralisée du tissuconjonctif, des artérioles et des microvaisseaux, caractéri-sée par une fibrose et une oblitération vasculaire pouvanttoucher la peau, le tube digestif, le poumon et les reins.L’atteinte cutanée en est la localisation principale, enrevanche, les manifestations neurologiques sont rares.

Nous rapportons un cas de neuropathie révélant une sclé-rodermie.

Un homme âgé de 20 ans sans antécédent présenta defaçon progressive en 2 ans, d’abord un déficit moteur distaldu membre supérieur droit avec sensation de peau carton-née, puis du membre supérieur gauche et enfin des 2 mem-bres inférieurs. La biopsie cutanée révéla une sclérodermie.L’EMG montra une discrète neuropathie axonale sensitivo-motrice prédominant aux 2 membres inférieurs. Le dia-gnostic de neuropathie secondaire à une sclérodermie futposé. Une nette amélioration clinique fut notée après unecorticothérapie par de la prednisone à la dose de 1 mg/kg/j.

L’atteinte du système nerveux périphérique est très rareet de pathogénie incertaine, bien que dans quelques cas, deslésions vasculaires aient pu être montrées.