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Pr6vention et prise en charge des complications en endoscopie digestive : information et consentement du patient B. DENIS (Colmar) Les complications de l'endoscopie digestive sont heureusement rares eu 6gard au nombre important d'examens r6alis6s. L'endoscopie repr6sente n6an- moins les deux tiers des causes de plaintes de patients vis-a-vis des gastroent6rologues. Dans ce cas, le d6faut d'information ou de consentement 6clair6 (CE) est souvent invoqu6 comme motif de plainte [1, 2]. Le meilleur traitement des complications est leur pr6vention. L'information et le CE ont un r61e capital a jouer dans la pr6vention des complications et de leurs suites judiciaires : correctement inform6, un patient est plus vigilant et plus coop6rant dans les suites d'un geste endoscopique ce qui permet un dia- gnostic plus pr6coce d'une 6ventuelle complication ; correctement inform6 au cours d'un dialogue avec son m6decin, un patient est moins enclin a porter plainte : ~ people who are talked to seldom sue ~ [3]. Dans l'6tude de Neale, plus du tiers des compli- cations de l'endoscopie aurait pu 6tre 6vit6 ainsi que la plupart des plaintes qui en r6sultaient si le patient avait 6t6 suffisamment inform6 pour donner un CE ad6quat [1]. LA LEGISLATION Depuis 1997, la jurisprudence a beaucoup fait 6vo- luer le droit fran~ais vers un renforcement des droits des patients : renversement de la charge de la preuve de l'information donn6e ; extension de l'obligation d'information aux risques exceptionnels. Des revues g6n6rales r6centes ont 6t6 publi6es [4-6]. Les diver- gences entre les juges et entre les multiples interpr6- tations publi6es ont entretenu la confusion. Depuis lors, la loi tant attendue du 4 mars 2002 relative aux droits des malades eta la qualit6 du syst~me de sant6 a pr6cis6 dans son chapitre 1er les r6gles qui r6gissent ,, l'information des usagers du systbme de sant6 et l'expression de leur volont6 ~. ~ Art. L. 1111-2 -- Toute personne a le droit d'dtre inform6e sur son 6tat de sant6. Cette information porte sur les diff6rentes investigations, traitements ou actions de pr6vention qui sont propos6s, leur utilit6, leur urgence 6ventuelle, leurs cons6quences, les risques fr6quents ou graves normalement pr6visibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les cons6quences pr6visibles en cas de refus. Lorsque, post6rieurement a l'ex6cution des investigations, traitements ou actions de pr6vention, des risques nouveaux sont identifi6s, la personne concern6e doit en atre inform6e, sauf en cas d'impos- sibilit6 de la retrouver. Cette information incombe tout professionnel de sant6 dans le cadre de ses comp6tences et dans le respect des r6gles profession- nelles qui lui sont applicables. Seule l'urgence ou l'impossibilit6 d'informer peuvent l'en dispenser. Cette information est d61ivr6e au cours d'un entretien individuel. En cas de litige, il appartient au profes- sionnel ou fi l'6tablissement de sant6 d'apporter la preuve que l'information a 6t6 d61ivr6e a l'int6ress6 dans les conditions pr6vues au pr6sent article. Cette preuve peut ~tre apport6e par tout moyen ~. ~ Art. L. 1111-4. -- Toute personne prend, avec le professionnel de sant6 et compte tenu des informa- tions et des pr6conisations qu'il lui fournit, les d6ci- sions concernant sa sant6. Le m6decin doit respecter la volont6 de la personne apr~s l'avoir inform6e des cons6quences de ses choix. Si la volont6 de la per- sonne de refuser ou d'interrompre un traitement met sa vie en danger, le m6decin doit tout mettre en oeuvre pour la convaincre d'accepter les soins indis- pensables. Aucun acte m6dical ni aucun traitement ne peut ~tre pratiqu6 sans le consentement libre et 6clair6 de la personne et ce consentement peut 6tre retir6 a tout moment ~,. Cette loi apporte un certain nombre de pr6cisions et/ou de modifications par rapport a la jurisprudence : l'information doit d6sormais porter sur les ~ risques fr6quents ou graves normalement pr6visibles ~ et les risques exceptionnels en sont donc a priori exclus. Un entretien individuel devient obligatoire. Par ailleurs, cette m6me loi pr6voit dans son chapitre concernant les ~(risques sanitaires r6sultant du fonctionnement du systbme de sant6 ~ une obligation d'information ~ en cas d'accidents m6dicaux, d'affections iatrog~nes ou d'infections nosocomiales ~. ~ Art. L. 1142-4. -- Toute personne victime ou s'es- timant victime d'un dommage imputable a une acti- vit6 de pr6vention, de diagnostic ou de soins ou ses ayants droit, si la personne est d6c6d6e, ou, le cas 6ch6ant, son repr6sentant 16gal, doit 6tre inform6e par le professionnel, l'6tablissement de sant6, les ser- vices de sant6 ou l'organisme concern6 sur les cir- constances et les causes de ce dommage. Cette infor- mation lui est d61ivr6e au plus tard dans les quinze jours suivant la d6couverte du dommage ou sa demande expresse, lots d'un entretien au cours duquel la personne peut se faire assister par un m6de- cin ou une autre personne de son choix ~,. Cette phase d'information obligatoire est impos6e comme pr6alable a toute tentative de r6glement Acta Endoscopica Volume 32 - Suppldment 2 - N ~ 3 - 2002 501

Prévention et prise en charge des complications en endoscopie digestive: information et consentement du patient

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Page 1: Prévention et prise en charge des complications en endoscopie digestive: information et consentement du patient

Pr6vent ion et prise en charge des compl icat ions en endoscopie digest ive : information et consentement du pat ient

B. D E N I S ( C o l m a r )

Les complicat ions de l ' endoscopie digestive sont heu reu se m e n t rares eu 6gard au n o m b r e impor tan t d ' examens r6alis6s. L ' endoscop ie repr6sen te n6an- moins les deux tiers des causes de plaintes de patients vis-a-vis des gas t roen t6ro logues . Dans ce cas, le d6faut d ' i n fo rma t ion ou de c o n s e n t e m e n t 6clair6 (CE) est souvent invoqu6 comme mot i f de plainte [1, 2]. Le meil leur t ra i tement des complicat ions est leur pr6vention. L ' in format ion et le CE ont un r61e capital a jouer dans la pr6vent ion des complications et de leurs suites judiciaires : co r rec tement inform6, un pat ient est plus vigilant et plus coop6rant dans les suites d 'un geste endoscopique ce qui pe rmet un dia- gnostic plus pr6coce d 'une 6ventuelle complicat ion ; c o r r e c t e m e n t inform6 au cours d ' un dia logue avec son m6decin , un pa t i en t est moins encl in a p o r t e r plainte : ~ people who are talked to seldom sue ~ [3]. Dans l ' 6 tude de Neale , plus du t iers des compli- cations de l 'endoscopie aurait pu 6tre 6vit6 ainsi que la plupart des plaintes qui en r6sultaient si le pat ient avait 6t6 suffisamment inform6 pour donner un CE ad6quat [1].

L A L E G I S L A T I O N

Depuis 1997, la jur isprudence a beaucoup fait 6vo- luer le droit fran~ais vers un renforcement des droits des patients : renversement de la charge de la preuve de l ' in format ion donn6e ; ex tens ion de l 'obl igat ion d ' informat ion aux risques exceptionnels. Des revues g6n6rales r6centes ont 6t6 publi6es [4-6]. Les diver- gences entre les juges et entre les multiples interpr6- tat ions publi6es ont en t re t enu la confusion. Depuis lors, la loi tant a t tendue du 4 mars 2002 relative aux droits des malades e t a la qualit6 du syst~me de sant6 a pr6cis6 dans son chapitre 1 er les r6gles qui r6gissent ,, l ' i n fo rmat ion des usagers du systbme de sant6 et l 'expression de leur volont6 ~.

~ Art. L. 1111-2 - - Toute personne a le droit d 'dtre in fo rm6e sur son 6tat de sant6. Ce t t e i n fo rma t ion por te sur les diff6rentes investigations, t rai tements ou actions de pr6vention qui sont propos6s, leur utilit6, leur u rgence 6ventuel le , leurs cons6quences , les risques fr6quents ou graves normalement pr6visibles qu'ils compor t en t ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les cons6quences pr6visibles en cas de refus. Lor sque , p o s t 6 r i e u r e m e n t a l ' ex6cut ion des investigations, t rai tements ou actions de pr6vention, des r isques nouve a ux sont identif i6s, la pe r sonn e concern6e doit en atre inform6e, sauf en cas d' impos-

sibilit6 de la re t rouver . Cet te i n fo rma t ion incombe tou t p rofess ionne l de sant6 dans le cad re de ses

comp6tences et dans le respect des r6gles profession- nelles qui lui sont applicables. Seule l ' u rgence ou l ' impossibil i t6 d ' i n fo rm er p e u v e n t l ' en dispenser . Cette information est d61ivr6e au cours d 'un entre t ien individuel. En cas de litige, il appar t i en t au profes- sionnel ou fi l '6 tabl issement de sant6 d ' a p p o r t e r la preuve que l ' information a 6t6 d61ivr6e a l 'int6ress6 dans les conditions pr6vues au pr6sent article. Cette preuve peut ~tre apport6e par tout m o y en ~.

~ Art. L. 1111-4. - - Toute personne prend, avec le professionnel de sant6 et compte tenu des informa- tions et des pr6conisations qu'il lui fournit , les d6ci- sions concernant sa sant6. Le m6decin doit respecter la volont6 de la personne apr~s l 'avoir inform6e des cons6quences de ses choix. Si la volont6 de la per- sonne de refuser ou d ' in te r rompre un t ra i tement met sa vie en danger , le m6dec in doi t t ou t m e t t r e en oeuvre pour la convaincre d ' accepte r les soins indis- pensables. Aucun acte m6dical ni aucun t ra i tement ne peut ~tre prat iqu6 sans le co n sen t em en t libre et 6clair6 de la personne et ce consen temen t peut 6tre retir6 a tout moment ~,.

Cette loi appor te un certain n o m b re de pr6cisions et/ou de modifications par rappor t a la jur isprudence : l ' information doit d6sormais por t e r sur les ~ risques fr6quents ou graves normalement pr6visibles ~ et les risques exceptionnels en sont donc a p r i o r i exclus. Un entret ien individuel devient obligatoire. Par ailleurs, cette m6me loi pr6voit dans son chapi t re concernant les ~( risques sanitaires r6sultant du fonc t ionnemen t du systbme de sant6 ~ une obl igat ion d ' in format ion ~ en cas d'accidents m6dicaux, d 'affections iatrog~nes ou d'infections nosocomiales ~.

~ Art. L. 1142-4. - - Toute personne victime ou s'es- t imant victime d 'un dommage imputable a une acti- vit6 de pr6vention, de diagnostic ou de soins ou ses ayants droit , si la pe r sonne est d6c6d6e, ou, le cas 6ch6ant, son repr6sentant 16gal, doit 6tre inform6e par le professionnel, l '6tablissement de sant6, les ser- vices de sant6 ou l 'o rganisme concern6 sur les cir- constances et les causes de ce dommage. Cet te infor- mat ion lui est d61ivr6e au plus tard dans les quinze jours suivant la d6couve r t e du d o m m a g e ou sa d e m a n d e expresse, lots d ' u n e n t r e t i e n au cours duquel la personne peut se faire assister par un m6de- cin ou une autre personne de son choix ~,.

Cette phase d ' information obligatoire est impos6e c o m m e pr6alable a tou te t en ta t ive de r6g lement

Acta Endoscopica Volume 32 - Suppldment 2 - N ~ 3 - 2002 501

Page 2: Prévention et prise en charge des complications en endoscopie digestive: information et consentement du patient

amiable des litiges. I1 s'agit d 'une sorte ~ d 'op6rat ion v6rit6 ~> au cours de laquelte tout dommage, queI qu'il soit, ne doit ~tre ni 61ud6, ni minimis6, ni cach6.

L ' I N F O R M A T I O N E N P R A T I Q U E

- - L 'ob l iga t ion d ' i n f o r m e r p6se h la fois sur le m6decin qui p rescr i t et sur le m6dec in qui r6alise l 'acte m~me si c 'est au m6decin endoscopiste, et ~ lui seul, que revient la responsabili t6 de s 'assurer que le patient est bien inform6.

- - L ' i n f o r m a t i o n dol t 6tre posi t ive et hi6rar- chisde : elle doit pr6senter les bdn6fices attendus des soins envisag6s avant leurs inconv6nients et risques 6ventuels.

- - L ' i n f o r m a t i o n doi t p o r t e r sur les r isques fr6- quents ou graves, c 'es t -h-d i re ayan t ~ des cons6- quences mortelles, invalidantes ou mOme esth6tiques graves compte tenu de leurs r6percussions psycholo- giques ou sociales ~.

- - L ' informat ion doit atre loyale, claire et appro- pri6e. A u t r e m e n t dit, elle doit 6tre honn6te, intelli- gible, facile ~ c o m p r e n d r e et doit 6tre adap tde au patient.

- - Le mddecin doit s 'assurer que le patient a bien compris ce qui lui a 6t6 dit.

- - Le m6decin doit 6valuer quel est le niveau d'in- fo rmat ion souhait6 par le pat ient . Le m6decin dolt informer le pat ient autant qu'il est ra isonnablement n6cessaire et au tan t qu ' i l le souhai te pour p rendre sa d6cision. I1 est bon de conclure l 'entre t ien par la formule ,~ avez-vous d 'autres questions ? ~>.

- - Concernan t les risques et complications, il ne s'agit pas de noyer le pat ient sous une 6num6rat ion exhaus t ive et i neomprdhens ib le d 'acc idents poten- tiels avec leur f rdquence : t rop d ' informat ion tue l'in- formation. L ' i n fo rma t ion doit pe rmet t r e au pat ient de prendre conscience du rappor t b6n6fice/risque de l 'acte propos6. I1 s'agit pour le mddecin d 'une mission de conseil, mission qui va bien au-delh de la simple transmission de l ' information. Cette mission implique de t ransmet t re au pat ient une 6valuation personna- lis6e, adapt6e fi son cas particulier, des avantages et risques encourus de telle sorte qu'il puisse donner un consen temen t ou un refus 6clair6 ~ l 'acte proposal. Elle doit ~tre d 'autant plus exhaustive que le rapport b6n6fice/risque de l 'acte propos6 diminue. De m6me, moins un acte est r6put6 dangereux, moins le patient peut imaginer qu'il compor te un risque, certes excep- t ionnel mais 6ventuel lement grave, et plus il est indis- pensable de lui en faire p rendre conscience.

- - L ' in fo rma t ion du pa t ien t sur les risques d 'un geste endoscopique ne doit pas, pour 6tre honn6te, se cacher derribre les taux de complications publids dans la l i t t6rature. Id6a lement , le m6decin doit pouvoi r i n fo rmer le pa t ient de ses p rop re s taux de compli- cations [7]. Encore faut-il les conna~tre ! L'6valuation systdmatique des r6sultats et des complicat ions des

actes endoscopiques doit se gdn6raliser. I1 y va de la cr6dibilit6 de l 'endoscopie digestive. I1 nous semble, avec B. Millat, que la ~ raise en ~ assurance qualit6 ~ des actes invasifs est une r6ponse m6dicale aux exi- gences de la qualit6 et de la gestion des risques ~ [8]. Dans le mame esprit, le pat ient devrait 6tre pr6venu lorsque le m6decin rdalise un geste pour la premi6re fois ou lorsque l 'endoscopie est r6alis6e par un junior en formation.

- - La loi impose que l ' i n fo rma t ion soit donn6e ora lement au cours d 'un entre t ien individuel. Lui seul permet une information personnalis6e, adapt6e ~ sur mesure ~ ?~ chaque patient. II pe rmet de r6pondre aux ques t ions du pa t ien t et de lui exp l ique r les points qu'il n 'a pas compris.

- - L'uti l isation des fiches d ' informat ion r6alis6es par les soci6t6s savantes est r ecommand6e car elles consti tuent une forrne de s tandard consensuel repo- sant sur des donn6es valid6es [9]. Dans une enqu~te personne l le , 6 1 % des pa t ien ts in ter rog6s consid6- ra ient que les fiches S F E D - S N F G E appor ta ient un plus aux explications orales donn6es par le m6decin. Les complicat ions d6crites dans ces fiches suscitent l ' i nqu i6 tude chez 18 ~ 36 % des pa t ien ts mais ne conduisen t h u n refus de l ' e x a m e n que chez une minor i t6 d ' e n t r e eux [4, 10]. Darts no t r e enqu~te , seuls 15 % des pat ients interrogEs aura ient pr6f6r6 passer l ' examen endoscopique sans la fiche d ' infor- mat ions m6dicales. Nous avons d em an d 6 ?a nos pat ients quel le 6tait la source d ' i n fo rma t ion qui r6pondait le mieux h leurs questions concernant Fen- doscopie: il s'agissait pour 5 1 % du m6decin endos- copiste, pour 18 % de la fiche d ' informat ions , pour 13 % de l ' inf i rmi6re d ' endoscop ie , p o u r 8 % du m6decin prescripteur et pour 5 % de leur entourage. Ceci traduit bien la diversit6 et la compl6mentar i t6 des d i f f6rentes sources d ' in fo rmat ions . Chaque pat ient puise l ' in format ion h la source qui lui est la ptus accessible, la mieux adapt6e. Ces fiches ont un r61e exclusif d ' informat ion : elles ne doivent pas 6tre assorties de formules obligeant le pat ient ~ y apposer sa signature [9].

L '6cr i t a un cer ta in n o m b r e d ' a tou t s ; il pe rme t : 1) d 'assurer ~ un min imum >~ quanti tat if et qualitatif d ' in format ion pour tous les patients quelle que soit leur provenance ; 2) d 'uniformiser les pratiques entre les diff6rents op6ra teurs ; 3) de faciliter le dialogue entre le patient et son m6decin, qu'il s'agisse du pres- cripteur de l 'endoscopie, de l 'endoscopiste lui-m~me, ou des autres acteurs (soignants, secr6taires, etc.) ; 4) d ' dconomise r du temps m6dical consacr6 ta l ' in format ion . C o r r e c t e m e n t effectu6, le processus d ' information et de CE prend du temps. A l 'heure de la R T T et eu 6gard h la diminution de la d6mographie des gastroent6rologues, il est important de mettre en oeuvre tous les moyens qui permet ten t d '6conomiser du temps sans nuire h la qualit6 de l ' information et du processus de CE ; 5) de contr ibuer h la preuve de l'in- formation donn6e. L'6crit, m6me sign6, n 'est pas une preuve en soi. La preuve r6sulte de pr6somptions qui r eposen t sur un faisceau d ' a rgumen t s convergen ts dont le principal est l 'existence d 'un dossier m6dical

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Figure 1

C o n s e n t e m e n t ~ c l a i r ~ e n d o s c o p i e d i g e s t i v e

Vous allez passer une endoscopic digestive.

- - Lisez attentivement la fiche d'inforrnation ci-jointe ainsi que ce formulaire de consentement 6clair6.

- - Si les explications donn6es ne sont pas claires ou si vous souhaitez un compldment d'information sur l'endoscopie, ne signez pasce formulaire pour l'instant. Vous aurez l'opportunit6 de discuter avec le m6decin et de lui poser toutes les ques- tions que vous souhaitez avant l'endoscopie.

- - Si vous avez compris toutes les informations donn6es et n'avez plus de questions/~ poser, veuillez donner votre accord pour l'exarnen en compl6tant le formulaire de consentement ci-dessous.

- - Apportez ce formulaire en Endoscopic le jour de l'exarnen.

Je soussign6(e), M me, M lIe, M . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

- - ai 6t6 suffisamment inforrn6(e) sur l'examen et ai requ les r6ponses aux questions que je me posais,

- - sais que je peux encore poser toute question suppl6mentaire au m6decin,

- - sais, qu'ayant sign6 le formulaire de consentement, je reste libre de refuser l'examen.

- - Un tel refus ne nuirait pas ~ la qualit6 de la relation avec mon m6decin,

- - sais que mon consentement ne constitue pas une ddcharge de responsabilit6 du mddecin ni de l'h6pital,

- - donne mon consentement pour b6n6ficier de l'endoscopie digestive pr6vue dans les conditions

- - qui m'ont 6t6 indiqu6es par le(s) Docteur(s) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Fait h . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . le

Signature :

complet compor tant les d6tails des entretiens entre le pat ient et son m6decin [11]; 6) de pe rme t t r e au patient de r6fl6chir au calme, chez lui ; 7) au mieux, le document 6crit peut ~tre personnalis6 en y ajoutant des annotations manuscrites, en rayant les mentions inutiles, ou en pr6cisant le cas 6ch6ant les sch6mas.

Le recours h l'6crit n 'est cependant pas une panac6e: 1) il exclut un quart des patients qui, pour diverses raisons, ne peuven t pas lire ou c o m p r e n d r e les formulaires [12] ; 2) l '6crit est par ailleurs ~ obligatoi- rement impersonnel et doric imparfait, soit bref, t rop sch6matique et incomplet , soit t rop long et incom- pris ~ [13]. Pour I ' A N A E S , un d o c u m e n t 6crit peut 6tre remis au patient, mais il ne peut et ne doit pas ~tre plus qu 'un simple compl6ment de l ' information orale [9].

- - Si la preuve d 'un d6faut d ' information est faite, l ' indemnisation n 'est pas pour autant acquise. Encore faut-il 6valuer le lien de causalit6 entre le d6faut d ' in- formation et le dommage subi. En g6n6ral, plus l 'acte est indispensable moins la perte de chances li6e au d6faut d ' information est importante. Le patient peut ne pas 6tre indemnis6 du tout si l 'on consid6re que m~me averti des risques, il n 'aurai t pu refuser l 'acte. Au contraire, l ' indemnisation peut ~tre totale si, pour

un geste non indispensable il est vraisemblable que correctement inform6 le pat ient aurait refus6 l 'acte. L ' in fo rmat ion sur les risques et compl ica t ions doit donc ~tre d 'autant plus pr6cise et d6taill6e, d 'au tant plus exhaustive que l 'ac te endoscop ique est moins indispensable ou s '6car te des r e c o m m a n d a t i o n s en vigueur. II est prudent de toujours pouvoir se r6f6rer aux textes des diff6rentes conf6rences de consensus et autres recommandat ions et r6f6rences m6dicales.

L E C O N S E N T E M E N T F . C L A 1 R E

E N P R A T I Q U E

Le CE est un concep t ju r id ique qui p rov ien t de l 'analyse contractuel le : il n ' y a pas de contra t sans consentement et ce consentement n 'est valable que si une information pr6alable a 6t6 donn6e, de telle sorte que c 'es t un c o n s e n t e m e n t 6clair6 qui est re~u. Le processus de CE permet un t ransfer t part iel de responsabilit6 du m6decin vers le patient dans ce sens qu'il permet d ' impliquer le patient dans le processus de d6cision. L ' e sp r i t du CE est de t r ans fo rmer un patient passif qui accepte ou subit un examen qui lui est impos6 en un pat ient actif et r e sponsab le qui

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rEclame l 'examen. L 'exis tence d 'un dElai de rEflexion suffisant est une condit ion n6cessaire pour un CE de qualitE. I1 faut veiller ~ le respecter . Le CE du patient est une obligation 16gale mais ses modalit6s de recueil sont laissEes libres : le consen tement peut Otre impli- cite ou explici te , et dans ce cas oral ou 6crit. La formalisation 6crite du CE est la rOgle aux Etats-Unis [2]. Elle Etait inhabi tuel le en France jusque rEcem- ment mais son usage tend ~ se gEnEraliser. 49,5 % des gastroent6rologues qui ont rEpondu ~ l 'enqu~te de la S F E D en 1999 faisaient signer un document h leurs patients. Le document sign6 Etait dans 74 % des cas, la f iche d ' i n fo rma t ions mEdicales e l le-m6me, ce qui n 'es t pas c o n f o r m e aux r e c o m m a n d a t i o n s de I 'A N AES [9]. Nous avons 61aborE avec un groupe de pa t ien ts un fo rmula i re de C E (Figure 1) [12]. II informe les patients sur leurs droits et leur offre l 'op- portunitE d 'expr imer leur au tonomie et de participer a c t i v e m e n t / t la d6cision de passer l ' examen. Une enqu~te r6alis6e auprbs de 100 patients a montr6 que, contra i rement aux craintes formulEes par I 'ANAES, la fo rmal i sa t ion 6cri te du CE n 'a l tErai t pas la conf iance des pa t ien ts en leur mEdecin [12]. Cet te enqu6te a par ail leurs montrE que la formal isat ion 6crite du CE 6tait comprise et acceptEe par la majo- rite des patients. 80 % des pat ients interrogEs trou- vaient ce formulaire rassurant. Ce formulaire de CE s 'avbre h l 'usage tr~s complEmentaire des fiches d'in- format ions m6dicales de la S F E D et de la SNFGE. Nous l 'avons utilisE en rou t ine pendan t 2 ans pour pr6s de 10000 examens . La s ignature du pat ient n '6tait pas exig6e pour la rEalisation de l 'examen. Les rares patients qui mont ra ien t une ret icence ~ signer le formulaire de CE bEn6ficiaient de l 'examen avec un simple consen temen t oral ou implicite. La formali- sa t ion Ecrite du C E est, ~ no t r e sens, une amElio- rat ion par rappor t au consentement implicite ou oral

condit ion que la signature du pat ient soit facultative et que le formulaire ne joue qu 'un r61e accessoire et ne remplace pas le dialogue qui consti tue l 'essentiel du processus de CE. Si, apr6s explications, le patient refuse l 'examen proposE, il faut le ment ionner dans le dossier de telle sorte qu'il y ait une trace 6crite d 'un refus EclairE.

L'utilit6 du recours ~ l'Ecrit est dictEe par l'indica- t ion de l 'acte medica l envisage et par le degrE de risque inherent/~ cet acte. ~ Moins un acte est indis- pensable, plus prudente doit en ~tre son indication, et plus averti des risques doit en ~tre le pat ient ~ [13]. L o r s q u ' u n acte medica l ne vise qu ' au confor t ou

pal l ier un deficit fonc t ionne l mineur , afortiori s'il s'agit d 'un acte de d6pistage, le pat ient doit en 6tre parfa i tement inform6 et doit, ~ notre sens, exprimer explicitement, par Ecrit, son CE. Lorsqu 'un acte n 'est pas mEdicalement justifi6, il vaut mieux s 'abstenir de le r6aliser plut6t que d 'obteni r un CE, fut-il Ecrit [14]. Enf in , la fo rmal i sa t ion 6cri te du CE peu t para~tre excessive clans le cas d 'actes endoscopiques h faible r isque c o m m e la gas t roscopie d iagnos t ique , mais nous semble recommandEe dans le cas d'actes endo- scopiques ~ risque plus impor tan t de complicat ions comme la coloscopie avec polypectomie , la cholan- gio-pancrEatographie r6trograde endoscopique et les autres actes endoscopiques thErapeutiques [3].

CONCL USION

En h6pato-gas t roent6ro log ie , les condamna t ions p o u r fau te t echn ique sont r e l a t i v em en t rares. Par contre, les condamnat ions pour d6faut d ' information sont de plus en plus f r6quentes , condu isan t ~ des indemnisa t ions parfois aussi 61ev6es q u ' e n cas de faute technique. Les processus d ' in fo rmat ion et de CE du pat ient sont des outils efficaces de pr6vention des complicat ions et de leurs suites judiciaires. Ces processus ne sont pas seu lemen t une obl igat ion 16gale, ils const i tuent une r6elle oppor tuni t6 d 'am6- lioration de la qualit6 des soins. Bien que l 'entret ien individuel en t re le pa t ien t et le m6dec in en soit le pivot, le r ecours ~ l '6cri t est une aide significative pour am61iorer la qualit6 des processus d ' informat ion et de CE en prat ique courante. Encore faut-il que les documents utilis6s soient valid6s et i r r6prochables . Les fiches d ' informat ion de la SFED et de la S N F G E peuvent et doivent encore 6tre am61ior6es en tenant compte des r ecommanda t ions de I ' A N A E S [9]. En particulier, elles devraient ~tre r6vis6es en par tena- riat avec des associations de patients. Pour la fiche coloscopie , le r isque d ' u n e co los tomie proviso i re devra i t p r o b a b l e m e n t ~tre signal6. D e m~me, le patient devrait ~tre inform6 des limites de l 'examen et que, bien que faite dans les r6gles de l 'art, la colo- scopie peut manquer des polypes, voire des cancers. Les sch6mas des d i f f6rentes fiches pou r r a i en t ~tre am61ior6s de fa~on ~ ~tre utilisables pour 6clairer le patient sur son propre cas. Enfin, un formulaire stan- dardis6 de CE devrait ~tre 6labor6 qui pourrai t s'ins- pirer du formula i re que nous avons rEdig6 avec un groupe de patients.

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