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Physiologie de la respiration nasale

Respiration nasale

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Physiologie de la respiration nasale

Plan du cours

Introduction Anatomie Respiration nasale Notion de cycle nasal Conditionnement de l’air et ventilation nasale Morphogenèse et ventilation nasale Pathologie et exploration conclusion

INTRODUCTION

Dans les conditions normales, et notamment au repos chez le sujet sain, la seule voie respiratoire physiologique est la voie nasale. La respiration orale est un complément utilisé en cas de besoins accrus (exercices musculaires, stress….) ou dans le cas d’une obstruction nasale

En effet, premier maillon des voies respiratoires, l’organe nasal n’est pas un conduit inerte : il change constamment pour adapter les caractéristiques aérodynamiques et physicochimiques de l’air inspiré. Cela explique la supériorité physiologique de la ventilation nasale sur la ventilation orale.

Le nez a quatre fonctions : olfactive, ventilatoire, immunitaire et morphogénétique. C’est la ventilation qui intéressera cet exposé.

Cette fonction essentielle peut être perturbée par diverses pathologies. Elle est menacée dans la chirurgie non fonctionnelle du nez et le chirurgien doit impérativement la connaître pour la préserver ou la réparer.

ANATOMIE Pour la compréhension des mécanismes qui gèrent la ventilation nasale, des

notions d’anatomies sont indispensables à rappeler. L’anatomie classique de la fosse nasale est rapportée dans l’annexe 1. Par ailleurs d’autres structures nous semblent intéressantes à décrire, car elles régulent d’une manière directe ou indirecte le flux aérien nasal comme on le verra plus loin.

1- La valve narinaire :

Elle est située à l’entrée de l’auvent narinaire ou nez cutané correspond aux orifices narinaires externes, d’une surface de 1cm2 environ. Chez le sujet d’origine caucasienne, l’orifice narinaire est ovalaire, à grosse extrémité postérieure et son grand axe est oblique en avant et en dedans (leptorrhinien). Chez le sujet d’origine asiatique au nez épaté, l’axe narinaire peut prendre une direction très oblique (mésorhinien) et chez le sujet d’origine africaine au nez négroïde, l’axe peut prendre une direction presque horizontale (platyrhinien).

Orifice narinaireorifices narinaires : ONE (1), ONI (1,4), valve nasale

(0,7)

ANATOMIE

L’orifice narinaire externe (ONE) varie également en fonction des positions relatives de la columelle et de l’aile du nez. En effet, il ne se situe pas dans un plan horizontal mais regarde légèrement en bas, en avant et en dehors de sorte que de profil, l’aile narinaire découvre la columelle et que de face les deux orifices, vus en fuite, se remarquent à peine.

La valve narinaire est animée par la pars alaris du muscle nasal (muscle dilatateur, muscles myrtiforme et depressorsepti).

2- Valve nasale (VN) : Elle correspond à un volume compris entre l’orifice narinaire interne (ONI) en

avant et l’orifice piriforme en arrière. Ce volume, situé dans l’auvent nasal ou nez muqueux et orienté dans un plan oblique en bas et en arrière, est délimité par :

– en dehors, le cartilage supérieur dans son tiers inférieur (mobile), prolongé des tissus mous du triangle faible latéral jusqu’à l’orifice piriforme ;

– en dedans, le cartilage septal (fixe) ; – en avant, les deux éléments précédents, séparés sur leur bord antéromédial

par l’incisure interseptocartilagineuse et réunis par un étui périchondral souple, la « valvemembraneuse » correspondant au triangle faible médian;

.

Orifice narinaire externealaire (1), triangulaire (2), columelle (3), os propre (4).

ANATOMIE

– en bas et en arrière, l’orifice piriforme et le plancher des fosses nasales, au-dessus duquel s’avance plus ou moins, suivant son degré de turgescence, la tête du cornet inférieur, indissociable fonctionnellement de la valve nasale

La valve nasale est, de ce fait, plus longue dorsalement que ventralement. La limite entre nez fixe et nez mobile passe, non pas, par la jonction entre

cartilages supérieurs et inférieurs mais par l’extrémité supérieure de la valve nasale. Une légère pression exercée à ce niveau obstrue facilement le nez alors que l’auvent narinaire et les fosses nasales sont libres.

La valve nasale (fig. 4 et 5) correspond à un passage étroit de quelques millimètres entre deux zones dilatées (avec un ratio de 0,7 par rapport à l’orifice narinaire externe selon Bachmann et Legler). Ce segment de limitation de flux (« flow limiting segment » où se trouve la zone de résistance maximale au flux aérien s’étend sur toute la longueur de la « valve membraneuse ».

limite entre nez fixe et mobile

valve narinaire :inspiration;B:expiration

ANATOMIE La valve nasale proprement dite (de VALVA = battant de porte) correspond à la

partie supérieure du volume et forme un angle de 10 à 15° qui a tendance à augmenter d’avant en arrière. La partie basse, large, de la valve est seule fonctionnelle.

Si, anatomiquement, la valve nasale appartient au nez muqueux, physiologiquement, elle dépend du nez cutané. Auvent narinaire et valve nasale sont étroitement liés sur le plan anatomophysiologique (lamelles cartilagineuses incluses dans une gaine périchondrale, « accrochage » fréquent entre les bords caudal et céphalique retournés des cartilages supérieurs et inférieurs). Cette notion d’unité fonctionnelle valve nasale-auvent narinaire est fondamentale.

L’incision inter cartilagineuse inévitable, dans la rhinoplastie à « toit ouvert », ne perturbe la valve nasale que le temps de la cicatrisation. De même, il n’existe pas dedifférence fonctionnelle entre les incisions inter- et intra cartilagineuses car les résections cartilagineuses aboutissent à la même consolidation cicatricielle. En revanche, l’affaiblissement excessif des structures cartilagineuses supérieures et/ou inférieures conduit à un collapsus valvaire avec limitation du flux aérien qui s’aggrave avec l’âge. La valve nasale est sous la dépendance du muscle levator labii superioris alaeque nasi (muscle releveur commun de l’aile du nez et de la lèvre supérieure) et du muscle nasalis avec ses deux composantes, la pars transversa qui la ferme (mouvement volontaire) et la pars alaris (mouvement volontaire et involontaire) qui l’ouvre. La partie supérieure de la valve nasale se ferme à l’inspiration et s’ouvre à l’expiration (fig.5).

ANATOMIE La tendance naturelle au collapsus de la valve nasale du fait de sa nature

cartilagineuse souple et du faible degré de l’angle septum-cartilage supérieur est compensée par trois éléments :

– le retournement du bord caudal du cartilage supérieur, qu’il faut respecter ou diminuer de façon prudente s’il est hypertrophique. Son ablation et, a fortiori, le raccourcissement du bord caudal du cartilage supérieur, doit s’accompagner de la réalisation d’une nouvelle valve nasale ;

– la résistance élastique du cartilage inférieur et de la jonction inter cartilagineuse. Cette dernière ne joue pas le rôle d’articulation, qui lui est classiquement attribué ;

– le couple cartilage inférieur muscles dilatateurs. Les incisions et les décollements

doivent ménager les muscles narinaires.

c- Valve septoturbinale (VST) La valve septoturbinale est comprise entre le septum et les cornets moyen et

inférieur. Elle est soumise aux variations vasomotrices de la muqueuse érectile qui recouvre ces structures (surtout le bord inférieur des cornets inférieur et moyen), modifiant ainsi le calibre des fosses nasales.

La muqueuse pituitaire qui recouvre le septum présente en regard des zones de jonction entre cartilage et os des épaississements ou « arêtes septales » oblique et verticale. L’épaississement muqueux, situé à la partie dorsale du septum antérieur, particulièrement riche en tissu spongieux érectile et comparable à celui des cornets, réaliserait une valve septale, régulatrice du flux aérien.

Valve septoturbinale

VENTILATION NASALE

Toujours sujette à controverse, bien que l’opinion de MASING soit la plus communément admise. Le courant pénètre dans la narine à 60° et se divise en plusieurs filets qui balayent les méats et les espaces entre les cornets. Lors de l’inspiration normale un courant aérien pénètre dans la fente olfactive en décrivant une trajectoire semi-circulaire. Le courant inspiratoire longe la face interne des cornets et ne pénètre pas les méats, par contre le courant expiratoire turbulent atteint les méats et les ostiums sinusiens.

PROCTOR et ANDERSON établissent le schéma suivant : au cours de l’inspiration durant une phase de repos, l’air passe verticalement en montant par les orifices narinaires à une vitesse de 2à3 m/s. Le flux converge sur 1,5cm jusqu’à la terminaison du vestibule. A cet endroit, la convergence entraîne un flux narinaire et sa direction change, passant de la verticale à l’horizontale. Là se situe la partie la plus rapide et la plus résistive de la voie aérienne : la valve nasale. La vitesse du flux est alors de 12à18m/s. une fois cette région franchie le flux pénètre la fosse nasale qui a une section beaucoup plus large. La plus grande partie du flux continue horizontalement le long du méat moyen sur 8cm à 2à3m/s. une petite partie passe le long du plancher et des turbulences se forment dans la zone olfactive. La zone de l’étage moyen est dons la zone ventilatoire principale, mais tout le nez participe au flux aérien.

VENTILATION NASALE SCHRECK a étudié l’influence des variations de section sur la résistance nasale et

a constaté : - La partie extérieure du nez se comporte comme un tuyau en contraction/dilatation

où la perte de charge est uniquement fonction de la petite section. - Dans la cavité les pertes de charges sont similaires à celles obtenues dans un

canal. - Le nasopharynx se comporte comme un conduit circulaire avec un virage serré de

90°.

1-Aérodynamique de la cavité nasale Selon ZWAARDMAKER : - Pendant la respiration normale, l’air n’atteint pas de façon importante la fente

olfactive. - Lors de la respiration forte, l’air se dirige directement dans la zone olfactive. Selon DAWES : - A l’expiration, l’air atteint systématiquement la zone olfactive. - A l’inspiration, l’air atteint la fente olfactive uniquement lorsque la dépression est

importante > à 16mm d’eau. - En mode flairage, l’air suit le même chemin qu’en mode normal mais pendant le

temps de pause qui suit l’inspiration, l’air se répand rapidement dans la zone olfactive. Le flairage provoque des vagues successives dans la partie olfactive.

A:Axe anatomique de l’auvent nasal

B:courant inspiratoire

Courant expiratoire

VENTILATION NASALE A ces deux études on associe celle de JAILLARDON et celle GIRARDIN, ceux

qui nous permet les conclusions suivantes : - Lors de l’inspiration normale : le flux d’air n’atteint que très peu la zone olfactive

et la fraction d’air qui la traverse le fait plutôt de manière indirecte. La partie inférieure de la cavité nasale est utilisée pour la respiration. Le flux la traverse en direction du nasopharynx.

- Lors de l’expiration normale : des recirculations, situées à l’extrémité antérieure des cornets, entraînent une partie de l’air dans la zone olfactive.

- Lors des respirations fortes, et plus particulièrement lors du flairage, l’air atteint directement et de manière importante la zone olfactive.

- L’action de flairer enfin consiste à laisser l’air stagner plus longtemps dans la La fonction ventilatoire du zone olfactive.

3- ventilation nasale La fonction ventilatoir du nez (10 000 litres d’air par jour) regroupe, elle-même,

un certain nombre de fonctions et de réflexes qui participent au conditionnement de l’air inspiré : régulation des débits aériens (rhéostat), filtration, humidification (hygrostat) et réchauffement (thermostat).

VENTILATION NASALE a- Régulation des débits aériens : L’écoulement de l’air dans les fosses nasales obéit aux lois physiques de la

dynamique des fluides. Lorsqu’un fluide progresse à l’intérieur d’un conduit, sa pression diminue au fur et à mesure de l’écoulement. Entre les narines et les choanes, il existe donc une différence de pression (ou gradient de pression) d’autant plus élevée que la résistance nasale est plus grande. Cette résistance nasale est importante puisqu’elle représente la moitié de la résistance totale des voies aériennes supérieures. À faible débit, le flux aérien est laminaire. À proximité de parois nasales, du fait de sa viscosité, il est presque sans mouvement mais, au centre de la fosse nasale, dans l’espace septoturbinal, il se déplace très rapidement. À fort débit, le flux devient turbulent; ce régime turbulent s’observe également, lorsque les parois sont irrégulières, ce qui est le cas des fosses nasales, même en cas d’écoulement faible. Au cours de la traversée des fosses nasales, l’air inspiré va rencontrer un certain nombre d’obstacles constituant la résistance nasale, d’abord au niveau du nez cutané (valve narinaire), puis et surtout, au niveau du nez muqueux (valves nasale et septoturbinale). La valve narinaire représente un tiers de la résistance nasale, les valves nasale et septoturbinale représentent deux tiers de la résistance. C’est à la partie antérieure des fosses nasales que la résistance est la plus nette. La résistance nasale opposée par les valves narinaire et nasale est relativement constante, celle opposée par la valve septoturbinale est extrêmement variable.

VENTILATION NASALE b- Fonctionnement de la valve narinaire : La morphologie et l’inclinaison des orifices narinaires externes influencent la

direction du courant aérien. Ainsi pour un angle nasolabial fermé, le courant aérien prend une direction verticale et inversement pour un angle nasolabial ouvert, le courant prend une direction horizontale. Ces courants sont à distinguer des axes anatomiques de l’auvent nasal et des fosses nasales. Dès son admission dans le vestibule narinaire, l’air inspiré est confronté à un certain nombre de résistances dont la plus importante est constituée par le « cul-de-sac » entre cartilages supérieurs et inférieurs. À l’inverse, le « ventricule », à la face interne du lobule, oppose une résistance à l’air expiré. L’air inspiré quitte ensuite le vestibule par l’orifice narinaire interne. Cet orifice, situé à la jonction nez cutané- nez muqueux, précède le deuxième et principal obstacle, la valve nasale. L’orifice narinaire interne (narine interne de Zuckerkandl), plus grand (surface de 1,5 cm2 environ) que l’orifice externe, ne crée pas ou peu de résistance à l’écoulement aérien nasal Cet orifice oblique par rapport au septum est limité :

– en dehors, par le limen nasi formé par la plica nasi correspondant au bord inférieur retourné du cartilage supérieur, prolongé de tissus mous jusqu’à l’orifice piriforme ;

– en dedans, par la crête septale située à la jonction cutanéomuqueuse et correspondant approximativement au bord caudal du cartilage septal ;

– en bas, par le bord inférieur de l’orifice piriforme. Cet orifice narinaire interne est particulièrement visible lorsque l’on soulève l’aile du

nez. Il faut le ménager lors des incisions inter cartilagineuses et inter septomembraneuse ainsi que lors des résections cartilagineuse et muqueuse.

Flux aérien dans les fosses nasales

VENTILATION NASALE c- Fonctionnement de la valve nasale : En assurant un débit constant, la valve nasale est essentielle dans la régulation

permanente du flux aérien. L’augmentation du flux nasal est liée davantage à l’augmentation des fréquences inspiratoires qu’à celle de la quantité d’air qui passe au niveau de la valve. La valve fonctionne passivement ou activement selon le degré de l’activité respiratoire :

– passivement : au repos et en activité respiratoire calme, la valve nasale change la direction du flux aérien et détermine une résistance statique à l’écoulement de l’air dont la vitesse augmente permettant un passage une fois et demie plus important. C’est cet effet qui donne la sensation subjective de perméabilité nasale à condition que la sensibilité soit préservée. Cette notion de sensibilité et de proprioception tant muqueuse que cutanée (au niveau du vestibule narinaire) est très importante; le nez, pour être « confortable », doit posséder une sensibilité de type discriminatif, notion trop souvent ignorée en clinique. Il suffit pour s’en convaincre de constater la sensation de gêne ventilatoire et la perte de la « satisfaction nasale » après anesthésie locale ;

– activement : à l’effort et en activité respiratoire accrue, la tendance au collapsus de la valve est compensée par l’intervention des muscles dilatateurs du nez (fig.9), véritables muscles respiratoires accessoires. Leur mise en jeu, autonome, étudiée par électromyographie, se fait durant la phase inspiratoire (synergie respiratoire). Elle est proportionnelle à la résistance ventilatoire et à la pression négative intra thoracique. Lorsque l’activité des muscles dilatateurs est dépassée, la ventilation orale apparaît.

VENTILATION NASALE À l’expiration, la pression intranasale devient positive, écartant légèrement la

valve. Toute atteinte statique (angle inférieur à 10°, diminution de 1 mm de la lumière de la partie antérieure du nez muqueux) ou dynamique (collapsus de la valve quand le débit ventilatoire augmente) au niveau de la valve nasale entraîne une gêne ventilatoire. Les principales atteintes statiques sont d’origine cartilagineuse (« nez sous tension », déviation septale, déviation ou ballonnement du cartilage supérieur) ou muqueuse (épaississement, synéchie). Les atteintes dynamiques sont la conséquence d’une atteinte musculaire (paralysie faciale décompensant une déviation septale jusque-là bien tolérée) ou cartilagineuse (flaccidité ou rigidité par ballonnement excessif du cartilage supérieur).

Par ailleurs, c’est dans la partie antérieure des fosses nasales que le flux aérien est le plus rapide ainsi que dans l’espace septoturbinal. À l’expiration, la résistance est fournie presque exclusivement par les cornets. Mais le phénomène n’est pas inverse, car le flux aérien à l’entrée des choanes va rencontrer une formation turbinale totalement différente. Le nez est symétrique dans le plan frontal, mais ne l’est pas dans le plan sagittal.

L’air pénètre dans les sinus davantage à l’expiration qu’à l’inspiration du fait de la différence de diamètre entre choanes et narines. Cela explique que certaines odeurs d’origine sinusienne soient perçues davantage à l’expiration qu’à l’inspiration. Cela explique également certaines expansions sinusiennes par obstacle antérieur aux ostiums sinusiens.

L’action expansive du flux aérien s’exerce essentiellement sur la valve narinaire, sur La partie basse (ostéomembraneuse) des fosses nasales, sur le développement des os maxillaires, des sinus maxillaires et du nasopharynx.

VENTILATION NASALE d- Fonction de la valve septoturbinale : Le septum contribue à la régulation du flux aérien mais sa rigidité en fait un

élément statique. Il est rarement droit chez le sujet caucasien, mais toutes les déviations n’affectent pas de façon significative le débit aérien. Elles ne nécessitent aucun traitement sauf si elles sont responsables conjointement d’une anomalie morphologique du nez ou d’une gêne fonctionnelle. Les épaississements allongés en forme de crête, les luxations et déviations du septum, de direction parallèle au flux sont classiquement moins gênants que les déviations perpendiculaires au flux. En fait, les déviations septales hautes ou les épaississements limités en forme d’éperon, lorsqu’ils siègent en regard de l’espace septoturbinal dans sa partie moyenne, et qu’ils sont suffisamment volumineux, sont une cause d’obstruction nasale et de conflit méatosinusien. Il est également souvent rapporté qu’un contact entre septum et cornet hypertrophié peut constituer une épine irritative à l’origine d’algies ou de phénomènes vasomoteurs. Il semble que ce soit davantage l’obstruction nasale qui en résulte qui soit responsable de ces phénomènes que le simple contact septoturbinal qui est à l’origine de crises d’éternuements. Une relation anatomique et physiologique existe entre septum et cornet. Quand le septum est droit, les cornets sont souvent symétriques. Quand le septum est dévié, les cornets inférieur et moyen, du côté concave, occupent la place laissée libre, et sont souvent hypertrophiés. La trajectoire du flux aérien dans les fosses nasales est fonction de leur forme allongée et de leur architecture tourmentée, liée en particulier aux cornets qui créent un courant turbulent (ce qu’expriment parfaitement les termes « turbinate » en anglais, « turbinato » en italien pour cornet).

La trajectoire dépend aussi de la forme et de l’orientation des orifices narinaires, des valves nasales et de la morphologie du septum et du « pied de cloison ». Grossièrement, le trajet du flux aérien suit la bissectrice de l’angle formé par les axes anatomiques de l’auvent nasal et des fosses nasales (fig.7). Lorsque l’air pénètre dans la fosse nasale, il butte sur la tête du cornet inférieur. Théoriquement, il peut contourner l’obstacle selon trois voies, inférieure, médiale et supérieure :

– voie inférieure : l’air emprunte peu le méat inférieur et l’espace compris entre le cornet et le plancher nasal ;

– voies médiale et supérieure : la plus grande partie du flux aérien emprunte les espaces médial septoturbinal et latéral sinusoturbinal correspondant au méat moyen. La tête du cornet moyen, libre dans les fosses nasales clive, en effet, le flux aérien. L’air empruntant l’espace septoturbinal rencontre plus haut la tête du cornet supérieur, libre, qui clive à son tour le flux aérien. Ainsi, en s’élevant dans la fosse nasale et en rencontrant un nombre grandissant d’obstacles, le flux aérien devient faible et turbulent, ce qui favorise l’olfaction. Le flux ventilatoire est nécessaire à l’analyse olfactive.

Chez l’enfant, le flux aérien passe surtout par l’espace septoturbinal dans sa partie basse, les méats étant de volume réduit.

Chez l’adulte, le flux aérien passe surtout par les espaces septoturbinal etsinusoturbinal en regard du cornet moyen (méat moyen). Ces espaces, et davantagel’espace septoturbinal (1-3 mm) que l’espace sinusoturbinal, naturellement étroit (0,5-1 mm), constituent la zone ventilatoire principale mais tout le nez est intéressé par lepassage du flux aérien inspiratoire.

Notion de cycle nasal La muqueuse pituitaire et la muqueuse des cornets inférieurs en

particulier possèdent une vasomotricité très active dont les variations sont à l’origine du cycle nasal, présent chez 80 % des sujets normaux adultes, régulé par le système nerveux végétatif avec une alternance cyclique d’une cavité nasale à l’autre. Lorsque la muqueuse dans une fosse nasale est en turgescence, par vasodilatation, (prédominance du système parasympathique), la muqueuse de l’autre fosse nasale est en état de rétraction par vasoconstriction (prédominance du système orthosympathique). La situation s’inverse au cours de la période suivante. Ce cycle vasomoteur est d’une périodicité moyenne de 3-4 heures (extrêmes 2 à 5 heures). Les modifications de perméabilité qui en découlent dans chaque fosse nasale ne sont pas ressenties par le sujet car la perméabilité nasale totale (ou résistance nasale totale) ne varie pas. Lors de la phase congestive du cycle nasal, la valve turbinale prédomine sur la valve nasale et inversement. Le passage de l’air se fait de façon privilégiée du côté le plus perméable, c’est dire l’importance de la valve nasale. La durée et l’amplitude du cycle nasal sont variables d’un individu à l’autre, et varient aussi en fonction de l’âge. Chez l’enfant, la durée des cycles est plus courte. Le déterminisme du cycle nasal reste obscur mais de nombreux facteurs peuvent le modifier : activité physique, température ambiante, position du corps, obstruction

nasale chronique.

Notion de cycle nasal En décubitus latéral : le cycle nasal expliquerait le changement fréquent

de côté lors du sommeil. Le cycle nasal touche également la muqueuse des cavités sinusiennes maxillaires et ethmoïdales. Le cycle nasal se modifie avec l’âge, une étude sur 361 patients, considérés comme indemnes de pathologies rhinosinusiennes, suggère que des modifications du cycle nasal peuvent survenir jusqu’à l’âge de 16 ans en raison des modifications anatomiques et qu’ensuite une certaine stabilité est observée.

Au total, on constate que chaque système peut être régulé indépendamment, mais également interagir sur les autres systèmes vasculaires, créant les conditions d’une indépendance au sein d’un système d’interdépendance. La régulation de cette circulation est également complexe. Les vaisseaux de la muqueuse nasale reçoivent des stimulations constantes par le système sympathique, alors que le système parasympathique aurait une activité plus irrégulière.

Conditionnement de l’air et ventilation nasale

Le conditionnement de l’air inspiré consiste en une triple action : a- Filtration : Un certain nombre de grosses particules sont arrêtées au niveau du vestibule,

grâce aux vibrisses. Un maximum de particules en suspension restent prisonnières du mucus tapissant toute la muqueuse où elles sont retenues grâce aux propriétés d’adhésivité du mucus. Ce dernier est disposé en deux couches, une profonde, fluide et une superficielle, visqueuse. Le mouvement mucociliaire et la pente du plancher des fosses nasales et des méats permettent ensuite l’évacuation (4 à 8 mm par minute) du mucus contaminé vers l’arrière, où il est dégluti.

b- Humidification : L’humidification de l’air inspiré, qui nécessite un litre d’eau environ par jour, se fait

par simple contact avec la couche de mucus composée d’eau pour 95 % qui tapisse la muqueuse, accessoirement par les glandes nasales antérieures. La valve nasale intervient dans la fonction d’humidification par son rôle de nébulisation.

c- Réchauffement : Le réchauffement de l’air inspiré est assuré à 70 % dans les fosses nasales au

contact des cornets turgescents. Le rétrécissement nasal entraîne un ralentissement du débit et augmente la chaleur locale qui est, normalement, de 30 à 32°,

Conditionnement de l’air et ventilation nasale c’est-à-dire inférieure à celle du corps. Cette fonction essentielle de la

muqueuse nasale est sous la dépendance de la différentiation morphologique et fonctionnelle du réseau vasculaire (shunt artérioveineux du chorion profond).

Ce mécanisme de conditionnement est ensuite complété au niveau de l’arbre trachéobronchique (30 %).

Inversement, le courant inspiratoire, en s’échauffant, produit un refroidissement du sang veineux turbinal qui contribue, à son tour, à la régulation de la température du cerveau, comme en témoigne l’alternance de l’activité électrique du cortex, synchrone du cycle nasal.

Morphogenèse et ventilation nasale Morphologie faciale et physiologie nasale sont étroitement liées. La

fonction ventilatoire physiologique du nez se doublent chez l’enfant d’une fonction morphogénétique mettant en jeu l’expansion volumétrique par le flux aérien. Le passage de l’air dans les fosses nasales associé à l’application de la langue sur le palais et les remparts alvéolodentaires est en partie responsable du développement tridimensionnel des cavités narinaires, nasosinusiennes et nasopharyngées pendant la croissance. La ventilation nasale est également indispensable à l’eutrophie de la muqueuse pituitaire et de son chorion. Cette bonne santé muqueuse est nécessaire à sa capacité d’expansion. Tout trouble de la ventilation nasale ou toute pathologie de la muqueuse s’accompagnera d’une anomalie de la croissance nasosinusienne.

À la naissance, le nouveau-né normal présente une ventilation exclusivement nasale jusqu’à l’âge de 2 à 5 mois. Cette ventilation nasale physiologique est assez précaire car les résistances nasales du nouveau-né sont plus élevées que celles de l’adulte. Les cornets volumineux obstruent les méats et limitent la filière ventilatoire à l’espace paramédian septoturbinal.

Au total : « L’adulte porte la marque indélébile de l’insuffisance nasale de l’enfant ».

PATHOLOGIE ET EXPLORATION

1- Symptomatologie fonctionnelle : le trouble de la ventilation ou insuffisance respiratoire nasale communément

appelé obstruction nasale peut avoir des origines diverses (déformations architecturales, processus tumoraux, maladie de la muqueuse, …). Les signes accompagnateurs le plus souvent associés sont :

- Rhinorrhée

- Eternuements

- Troubles de l’odorat

2- Méthodes diagnostic : le classique miroir de Glatzell a perdu de sa valeur au dépends de la

rhinomanométrie, seul examen para clinique évaluant les résistances nasales. Tous les autres examens sont demandés en fonction de l’orientation du diagnostic étiologique (tests cutanés, imagerie…).

Conclusion

La fonction ventilatoire, le conditionnement de l’air inspiré, c’est-à-dire la régulation des débits aériens, la filtration, l’humidification et le réchauffement de l’air se font grâce à un triple mécanisme valvaire, narinaire, nasal et septoturbinal. Cette fine mécanique, variable d’un individu à l’autre et chez le même individu d’une fosse nasale à l’autre et d’un moment à l’autre, passe inaperçue dans les conditions normales habituelles. En raison des modifications de la perméabilité nasale, liées à la congestion veineuse de décubitus, la ventilation nasale optimale est la ventilation exclusivement nasale, bouche fermée, pendant le sommeil.