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Risque chimique dans le ba ˆtiment. Quatrie `me session : fume ´es de soudage Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Aspects technologiques ge ´ne ´raux des proce ´de ´s d’assemblage a ` chaud des me ´taux F. Marini, D. Beaufils * , comite ´ consultatif des recherches en soudage 1, rue Strolz, 90000 Belfort * Auteur correspondant. Adresse e-mail : d.beaufi[email protected]. Il m’appartient d’ouvrir cette se ´ance consacre ´e au soudage des me ´taux comme membre expert et de ´le ´gue ´ franc ¸ais de l’Institut international de soudure (IIW) et Pre ´sident de la Commission fran- c ¸aise de se ´curite ´ du soudage (CCRS-HS). Nous avons un tre `s court moment pour vous sensibiliser, susciter votre inte ´re ˆt pour le monde des aciers et pour la profession de soudeur. Pour assembler des me ´taux, il faut des aciers, les couper, les souder, les usiner, les prote ´ger. Les bonnes conditions de travail de toutes les ope ´rations constitue- ront la qualite ´ de l’ensemble me ´cano-soude ´ qui de ´coule de la sou- dabilite ´ des me ´taux employe ´s et des exigences demande ´es aux produits finis. La diversite ´ des chantiers de construction me ´tallique est immense. Nous sommes me ´decins de chantiers et, puisqu’il y a des work place symptoms, il y a des work place doctors. Il est ne ´cessaire de connaı ˆtre la nouvelle classification europe ´enne des aciers faiblement ou fortement allie ´s et celle des alliages. Un rappel des proprie ´te ´s des alliages permet de comprendre les phe ´nome `nes de la soudabilite ´. Il faut savoir qu’il existe en tout 33 proce ´de ´s employe ´s de fac ¸on industrielle dont 12 seulement utilisent l’e ´nergie de l’arc e ´lectrique. Sont de ´crits les principaux proce ´de ´s de soudage : – oxy – ace ´tyle ´nique ; –a ` l’e ´lectrode enrobe ´e (MMA) ; – sous gaz (inerte ou actif) (MIG, MAG, FCAW) ; – avec e ´lectrode de tungste `ne (TIG). Les proce ´dures font partie du bon apprentissage donc du bon geste et des re `gles de l’art, c’est-a `-dire de : – l’ergonomie pre ´ventive : – re ´glage de l’intensite ´; – tenue de l’e ´lectrode ou torche ; – vitesse d’avancement ; – positions des parties a ` souder ; – choix des gaz ; – traitement pre ´ventif des de ´formations ; – mise en œuvre des moyens de ventilation et de protection. Ceci fait partie de l’agre ´ment du soudeur et de son niveau de qualification dont de ´coule sa responsabilite ´ et sa carrie `re. C’est une profession tre `s recherche ´e. Une description particulie `re est re ´serve ´e au brasage qui est aussi une me ´thode d’assemblage des me ´taux mais diffe ´rente du soudage : – brasage tendre en dessous de 4508 ; – brasage fort au-dessus et limite ´ en dessous de la tempe ´rature de fusion du me ´tal de base conside ´re ´. Le risque toxique lors des ope ´rations de brasage fort dans le secteur du BTP F. Michiels * , B. Bouard, F. Rivie `re, C. Mallants Service de sante ´ des arme ´es, centre de me ´decine de pre ´vention, BCRM de Brest, CC 92, 29240 Brest cedex 9 * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected]. De ´finitions.– Par abus de langage, le brasage est souvent assimile ´a ` une technique de soudage. Il s’agit pourtant d’un proce ´de ´ fondamen- talement diffe ´rent, tant sur le plan me ´tallurgique que par ses impli- cations toxicologiques. Il est notamment utilise ´ dans le secteur du BTP par les plombiers, les e ´lectriciens et les travailleurs re ´alisant les conduites de gaz. La particularite ´ de cette me ´thode d’assemblage a ` chaud des me ´taux, pratique ´e au « chalumeau », est de ne faire fondre que le me ´tal d’apport, sans atteindre la tempe ´rature de fusion du me ´tal de base. En d’autres termes, le brasage consiste a ` appliquer une colle me ´tallique entre les pie `ces a ` assembler. Cette de ´finition recouvre aussi bien le brasage tendre (soldering anglosaxon), concernant des ope ´rations se de ´roulant a ` moins de 450 8C, que le brasage fort (brazing) au-dela `, jusqu’a ` 800 8C environ. L’e ´valuation des risques d’un poste de brasage est complexe et doit inte ´grer aussi bien les phases pre ´paratoires (ponc ¸age, de ´capage, usinage) que les e ´tapes poste ´rieures (piquage, ponc ¸age...)a ` l’acte de brasage lui-me ˆme. Ces gestes et expositions professionnelles annexes ne pre ´sentant pas de particularite ´s par rapport a ` des activite ´s classiques de me ´tallerie (bruit, vibrations, poussie `res de moyenne a ` forte granulome ´trie, solvants), nous nous inte ´resserons ici aux risques induits par les ope ´rations de brasage proprement dites, en prenant pour exemple le brasage fort. La proble ´matique toxicologique.– Le risque toxicologique est classi- quement apporte ´ par les « fume ´es », terme ge ´ne ´ral qui rend mal compte de la complexite ´ des composants toxiques pre ´sents. Par de ´finition, la fume ´e comporte des particules solides en suspension dans une phase gazeuse. Cette dernie `re comporte des gaz (lie ´s notamment a ` l’action d’une flamme nue sur l’air ambiant) et des vapeurs (lie ´es aux changements de phase de compose ´s, lors de l’e ´le ´vation de la tempe ´rature au-dela ` du point d’e ´bullition d’un liquide, voire de sublimation d’un solide, pre ´sents dans les mate ´riaux assemble ´s). La phase particulaire est de granulome ´trie variable mais, a ` la diffe ´rence des poussie `res lie ´es aux activite ´s corollaires au brasage, la majorite ´ des corps pre ´sents appartient au domaine des nanoparti- cules. 46 1775-8785X/$ - see front matter ß 2009 Publie ´ par Elsevier Masson SAS. 10.1016/j.admp.2009.12.018 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2010;71:46-51

RISQUE CHIMIQUE DANS LE BATIMENT. Quatrieme session : Fumees de soudage

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Risque chimique dans le batiment.Quatrieme session : fumees de soudage

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Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

Aspects technologiques generaux des procedesd’assemblage a chaud des metauxF. Marini, D. Beaufils*, comite consultatif des recherches en soudage1, rue Strolz, 90000 Belfort* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected].

Il m’appartient d’ouvrir cette seance consacree au soudage desmetaux comme membre expert et delegue francais de l’Institutinternational de soudure (IIW) et President de la Commission fran-caise de securite du soudage (CCRS-HS).Nous avons un tres court moment pour vous sensibiliser, suscitervotre interet pour le monde des aciers et pour la profession desoudeur.Pour assembler des metaux, il faut des aciers, les couper, les souder,les usiner, les proteger.Les bonnes conditions de travail de toutes les operations constitue-ront la qualite de l’ensemble mecano-soude qui decoule de la sou-dabilite des metaux employes et des exigences demandees auxproduits finis.La diversite des chantiers de construction metallique est immense.Nous sommes medecins de chantiers et, puisqu’il y a des work placesymptoms, il y a des work place doctors.Il est necessaire de connaıtre la nouvelle classification europeenne desaciers faiblement ou fortement allies et celle des alliages.Un rappel des proprietes des alliages permet de comprendre lesphenomenes de la soudabilite.Il faut savoir qu’il existe en tout 33 procedes employes de faconindustrielle dont 12 seulement utilisent l’energie de l’arc electrique.Sont decrits les principaux procedes de soudage :– oxy – acetylenique ;– a l’electrode enrobee (MMA) ;– sous gaz (inerte ou actif) (MIG, MAG, FCAW) ;– avec electrode de tungstene (TIG).Les procedures font partie du bon apprentissage donc du bon geste etdes regles de l’art, c’est-a-dire de :– l’ergonomie preventive :– reglage de l’intensite ;– tenue de l’electrode ou torche ;– vitesse d’avancement ;– positions des parties a souder ;– choix des gaz ;– traitement preventif des deformations ;– mise en œuvre des moyens de ventilation et de protection.Ceci fait partie de l’agrement du soudeur et de son niveau dequalification dont decoule sa responsabilite et sa carriere. C’estune profession tres recherchee.Une description particuliere est reservee au brasage qui est aussi unemethode d’assemblage des metaux mais differente du soudage :

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1775-8785X/$ - see front matter � 2009 Publie par Elsevier Masson SAS.10.1016/j.admp.2009.12.018 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2010

– brasage tendre en dessous de 4508 ;– brasage fort au-dessus et limite en dessous de la temperature defusion du metal de base considere.

Le risque toxique lors des operations de brasage fortdans le secteur du BTPF. Michiels*, B. Bouard, F. Riviere, C. MallantsService de sante des armees, centre de medecine de prevention, BCRMde Brest, CC 92, 29240 Brest cedex 9* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected].

Definitions.– Par abus de langage, le brasage est souvent assimile aune technique de soudage. Il s’agit pourtant d’un procede fondamen-talement different, tant sur le plan metallurgique que par ses impli-cations toxicologiques. Il est notamment utilise dans le secteur du BTPpar les plombiers, les electriciens et les travailleurs realisant lesconduites de gaz.La particularite de cette methode d’assemblage a chaud des metaux,pratiquee au « chalumeau », est de ne faire fondre que le metald’apport, sans atteindre la temperature de fusion du metal de base. End’autres termes, le brasage consiste a appliquer une colle metalliqueentre les pieces a assembler. Cette definition recouvre aussi bien lebrasage tendre (soldering anglosaxon), concernant des operations sederoulant a moins de 450 8C, que le brasage fort (brazing) au-dela,jusqu’a 800 8C environ.L’evaluation des risques d’un poste de brasage est complexe et doitintegrer aussi bien les phases preparatoires (poncage, decapage,usinage) que les etapes posterieures (piquage, poncage. . .) a l’actede brasage lui-meme. Ces gestes et expositions professionnellesannexes ne presentant pas de particularites par rapport a des activitesclassiques de metallerie (bruit, vibrations, poussieres de moyenne aforte granulometrie, solvants), nous nous interesserons ici aux risquesinduits par les operations de brasage proprement dites, en prenantpour exemple le brasage fort.La problematique toxicologique.– Le risque toxicologique est classi-quement apporte par les « fumees », terme general qui rend malcompte de la complexite des composants toxiques presents. Pardefinition, la fumee comporte des particules solides en suspensiondans une phase gazeuse. Cette derniere comporte des gaz (liesnotamment a l’action d’une flamme nue sur l’air ambiant) et desvapeurs (liees aux changements de phase de composes, lors del’elevation de la temperature au-dela du point d’ebullition d’unliquide, voire de sublimation d’un solide, presents dans les materiauxassembles). La phase particulaire est de granulometrie variable mais,a la difference des poussieres liees aux activites corollaires au brasage,la majorite des corps presents appartient au domaine des nanoparti-cules.

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Risque chimique dans le batiment. Quatrieme session : fumees de soudage

L’approche la plus pragmatique pour identifier les dangers potentielsconsiste a inventorier les substances et composants chimiques pre-sents dans les differents elements techniques mis en œuvre. Lors dubrasage fort, les substances dangereuses peuvent donc provenir desmetaux de base, des composants des baguettes d’apport, qu’ils soientmetalliques ou non, des residus presents sur les surfaces assemblees,appliques volontairement (flux) ou lies a une mauvaise preparation(peintures, solvants. . .).Risques lies aux composes chimiques organiques.– Nous passeronsrapidement sur les risques lies aux residus indesirables eventuelle-ment presents sur les pieces a assembler. Leur variete potentielle esten effet grande, meme si les peintures et les solvants en sont lesprincipaux representants. L’identification des substances susceptiblesd’etre rencontrees releve de l’etude de poste specifique et des infor-mations recueillies sur le terrain lors de chaque activite concernee.Une attention particuliere devra cependant etre portee sur le risquede formation de phosgene lors de brasage effectue trop premature-ment apres application d’un solvant chlore.Independamment de ces residus variables, de nombreux composeschimiques peuvent etre presents dans l’environnement d’un braseur.La majorite provient des baguettes d’apport. La composition de celles-ci est complexe, associant des liants, des anticorrosifs, des decapants,des agents favorisant le « mouillage », etc. Parmi les composesd’interet medical significatif, la colophane, utilisee du fait de sesproprietes a la fois agglomerante et decapante, apporte un risque nonnegligeable de sensibilisation cutanee, voire respiratoire [1,2].Risques lies aux metaux.– Le principal ecueil rencontre par le medecindu travail et plus generalement l’equipe de prevention, lors desoperations de brasage, est de recenser et d’evaluer les risques liesaux metaux et autres elements mineraux. La demarche toxicologiquehabituelle consiste a analyser la composition des materiaux mis enœuvre, a mesurer leur concentration dans l’atmosphere de travail eteventuellement chez le salarie expose. Mais cette demarche estdifficilement applicable lors du brasage du fait de la multiplicitedes metaux rencontres, rendant onereuse l’analyse atmospheriqueet peu realiste la recherche de l’ensemble de ces metaux chez lesalarie. Affiner l’etude toxicologique permet de determiner lesmetaux dont la prise en compte est la plus pertinente sur le planmedical.Criteres d’evaluation.– Trois parametres meritent d’etre integres pourparvenir a cette evaluation :– la toxicite intrinseque de chaque metal, qui influe evidemment sur leniveau de maıtrise a atteindre et parfois sur le cadre reglementaire aappliquer (cas des CMR) ;– le taux de chaque metal dans les alliages mis en œuvre, qu’il s’agissedu metal de base ou des metaux d’apport. Le principe meme dubrasage implique que la temperature de fusion du metal de base(essentiellement cuivre, laiton et bronze) conditionne la compositiondes baguettes utilisees, dont la temperature de fusion doit etreinferieure ;– la comparaison entre les temperatures de fusion et d’ebullition desdifferents metaux et la temperature atteinte dans le bain de fusion.Ce critere permet en particulier d’identifier les metaux susceptiblesd’etre presents sous forme de vapeur dans la fumee primaire emiseimmediatement au niveau du bain de fusion et auxquels la proba-bilite d’exposition est donc forte.Resultats de l’approche toxicologique fondamentale.– Une etude largede la composition des alliages assembles et des baguettes d’apportpermet de retenir les points suivants :– trois metaux constituent theoriquement un danger dans les metauxde base :- le zinc, present jusqu’a 40 % dans certains laitons et dont latemperature d’ebullition est de 907 8C, donc proche de la temperaturede travail. Ce metal est susceptible d’induire une fievre des metaux,

- le plomb, susceptible d’etre rencontres dans certains laitons (3,5 %) etsurtout certains bronzes (jusqu’a 28 %). Il reste cependant loin de satemperature d’ebullition, et sa teneur dans les fumees est tres faible [3] ;- le phosphore, potentiellement hepatotoxique, dont la temperatured’ebullition est basse mais present a faible taux.Etant cependant inclus dans un alliage non fondu, le risque dedegagement de ces trois metaux est reduit.Le fait que seul le metal d’apport fonde explique que seuls sescomposants atteignent, en approche theorique mais aussi lors desetudes metrologiques publiees, un taux significatif dans l’atmospherede travail [4]. Plus aisement mobilisables du fait de la fusion desbaguettes, le zinc et le phosphore doivent ici etre pris en compte. Maisun metal focalise l’attention : le cadmium. Present dans des baguettesde brasage a des teneurs moyennes de 20 a 30 % dans les applicationsBTP, ce metal bout a 765 8C. La probabilite d’exposition au cadmium(sous forme de nanoparticules) est donc elevee. Possedant des pro-prietes aussi bien cancerogenes, mutagenes que reprotoxiques, cemetal est de plus un nephrotoxique reconnu [5,6]. Il est, par conse-quent, fondamental de le rechercher lors des etudes de poste et detout faire pour le substituer.Signalons enfin la presence, dans les flux (en general integres dans lesbaguettes elles-memes) de composes bores, notamment d’acideborique. Ces substances ont ete classees reprotoxiques decategorie 2 dans la 30e ATP adoptee le 9 juin 2008 par la communauteeuropeenne. Des substituts sans acide borique apparaissent d’ores etdeja sur le marche.Conclusion.– L’evaluation des risques lors des operations de brasageest de prime abord complexe. Neanmoins, le respect d’une demarcherigoureuse et ordonnee, analysant les materiaux mis en œuvre sur leterrain et decrivant precisement les modalites techniques utilisees,permet non seulement d’identifier les substances dangereuses poten-tiellement presentes mais aussi de preciser celles apportant un risquesignificatif et justifiant donc un suivi medical specifique. Cette demar-che analytique peut evidemment etre transposee aux autres techni-ques d’assemblage a chaud des metaux, notamment au soudage danslequel le metal de base fond egalement, mais pour lequel les compo-sitions des metaux de base et d’apport sont similaires. Les resultats deces etudes permettent non seulement de mieux cibler les modalitesde suivi medical, comme cela sera aborde dans une autre presentationde cette session, mais pourraient aussi servir de base a des evolutionstechnologiques.References[1] Crepy MN. Dermatoses professionnelles a la colophane. Documentspour le medecin du travail 2002;89:75–82.[2] Rosenberg N. Asthme professionnel a la colophane. Documentspour le medecin du travail 2003;94:195–200.[3] Matczak W. Assessment of exposure to toxic metals resleasedduring soldering and brazing processes. Med Pr 2002;53:473–80.[4] Apostoli P, Porru S, Brunelli E, et al. Multiple exposure to metals ineight types of welding. G Ital Med Lav Ergon 1997;19:8–14.[5] Gan SL, Tan SH, Pinnagoda J, et al. Cadmium hazard in silverbrazing. Ann Acad Med Singapore 1995;24:325–7.[6] Mason HJ, Williams N, Armitage S, et al. Follow-up of workerspreviously exposed to silver solder containing cadmium. Occup Envi-ron Med 1999;56:553–8.

Difficultes rencontrees lors de la mise en place etl’interpretation de campagnes de mesuresatmospheriquesJ. CataniCRAM du Sud est, 35, rue George, 13386 Marseille cedex 20Adresse e-mail : [email protected].

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L’activite de soudage met en jeu la fusion de metaux qui libere dansl’atmosphere des molecules qui se combinent a l’air pour former desoxydes metalliques, visibles a l’œil nu sous forme de fumees, auxquelss’ajoutent les substances produites par la combustion de materiauxprevisibles ou inattendus et indesirables.Quel que soit le secteur d’activite concerne, le soudage ne fait que tresrarement l’objet d’une activite a temps plein. Les operations desoudage voisinent frequemment avec d’autres taches au sein d’ate-liers de grande taille, de type hangar. Il est commun de rencontreregalement des operations de preparation ou de finition des pieces aassembler, telles que le poncage, le meulage, le decapage, voire lamise en peinture. Toutes ces activites sont generatrices de polluantsde natures diverses, gaz, vapeurs, particules...L’ensemble de ces emissions interfere de maniere tres importanteavec les fumees de soudage et rend necessaire la definition d’unestrategie claire de prelevement pour determiner l’origine des pollu-ants.En effet, les poussieres metalliques emises lors d’un poncage, memedans le cas d’un acier inoxydable fortement charge en chrome, nepresentent pas les memes risques pour la sante que l’inhalation desoxydes metalliques constitutifs des fumees de soudage.Le prelevement realise a l’aide de filtres en fibres de quartz eststrictement identique et l’analyse conduite, soit a l’aide d’une torchea plasma, soit avec un spectrometre d’absorption atomique, nepermet pas de differencier les metaux de leurs oxydes (a l’exceptiondu chrome) malgre des valeurs limites d’exposition professionnelles(VLEP) tres differentes representatives des risques pour la sante del’operateur comme l’aluminium metal : 10 mg/m3, fumees : 5 mg/m3 ou sels solubles : 2 mg/m3.La strategie de prelevement doit integrer cette notion et privilegierdes prelevements individuels au plus pres des sources d’emission demaniere a permettre la differenciation : metal/oxyde.Le dosage parallele des gaz lies exclusivement a la degradationthermique due au soudage, tels que le monoxyde de carbone oules oxydes d’azote, peut egalement aider dans certaines situations a lavalidation de l’origine des polluants metalliques.Cependant, meme dans un atelier entierement dedie a la soudure, onpeut mettre en evidence que les fumees de soudage ne sont en rienhomogenes et strictement liees aux metaux en phase d’assemblage.Ces fumees proviennent certes du support de base et de fait du metald’apport, qui sont en general tres proches, mais egalement de lapresence d’un eventuel revetement tel que des residus de peinture, dela remanence de traces de contaminant tel qu’un degraissant ou de lagraisse. La nature des fumees varie egalement avec la nature du gazde protection qui peut influer sur la taille des particules ultrafines.Ces difficultes ont ete mises en evidence lors d’une etude menee enPACA de 2002 a 2005 dans le secteur de la metallerie ou de nombreuxmateriaux de recuperation sont utilises. Des taux anormalementeleves de plomb atmospherique et urinaire ont ete mis en evidenceen lien avec la presence de traces de peinture sur certaines parties desmetaux.D’une maniere generale, 95 % de la composition des fumees desoudage proviennent de la source de metal d’apport, fil plein, filfourre, baguettes. . . il y a donc lieu d’apporter une grande attention ala lecture des fiches de donnees securite (FDS) et particulierement derechercher la presence de metaux dont les sels peuvent etre classescancerogenes, la composition des flux qui peuvent etre sourcesd’emission importante de fumees. Il faut etre informe que les FDSconcernent les produits neufs et que ces documents ne tiennent passouvent compte des risques lies a la degradation thermique desconstituants et aux modifications chimiques, telles que l’oxydation,qui vont survenir au cours de l’utilisation. On voit donc tres regulie-rement des baguettes pour acier inoxydable, contenant du nickel etdu chrome, ne presentant aucun risque pour la sante.

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Conclusion.– Les procedes de soudage sont tres largement utilises et ace titre, pense-t-on tres bien connus et maıtrises, ce qui n’est pastoujours le cas. Une analyse aigue de la tache et de l’organisation dutravail s’avere donc utile en amont de toute tentative d’evaluation desconcentrations atmospheriques. Ces mesures sont reglementairesdans de nombreuses situations et doivent, des que cela est possible,etre associees avec une surveillance biologique.Le dosage atmospherique des substances chimiques ne representequ’une photographie de l’instant ou les mesures ont ete realisees et ilest sujet a de fortes variations en fonction des procedes, des condi-tions atmospheriques, du niveau de l’activite etc. . .

La realisation de ces mesures sans mise en œuvre des autres outilsd’evaluation des risques ne saurait avoir de signification scientifique.

Avantages et inconvenients des methodes d’analysesmetrologiques et biometrologiques utilisees dans lesecteur du soudageA. NicolasLaboratoire de toxicologie et biotoxicologie professionnelles,Toxilabo, rue P.-A. Bobiere, 44300 NantesAdresse e-mail : [email protected]

Les activites de soudage sont exercees souvent a temps partiel dans leBTP. Elles exposent les salaries a une diversite de composes gazeux etmicroparticulaires ou les oxydes metalliques sont majoritaires. Lestaches de preparation, de finition qui entourent le soudage, emettentdes poussieres de granulometrie plus importante.Les corps de metier travaillant a proximite des soudeurs sont aussiexposes a une partie de leurs emissions.La metrologie atmospherique et la biometrologie renseignent par-tiellement sur les risques toxiques generes par les differentes tachesdu metier. Les parametres sont choisis en fonction des metauxsoudes, des metaux d’apport et des autres polluants reperes lorsde l’etude des postes de travail. La priorite est donnee aux composesqui presentent une toxicite specifique.La metrologie atmospherique.– Elle evalue l’exposition a l’ensembledes fumees et des poussieres par la pesee de la fraction collectee surfiltre. Le dosage de certains metaux est realise sur le meme filtre.Les methodes analytiques mises en œuvre ne distinguent pas lesdifferentes formes presentes d’un meme element, qu’il s’agissed’oxydes ou du metal.Une photographie est ainsi obtenue, traduisant les conditions d’emis-sion a un moment donne.Des valeurs limites francaises (VME), etrangeres (MAK allemandes,TLV-TWA americaines), sont disponibles pour interpreter les concen-trations de fumees, d’oxydes metalliques.La VME, applicable a l’ensemble des fumees collectees, est de 5 mg/m3.L’exposition aux fumees de soudage sur acier ordinaire est evalueepar le dosage du fer (VME trioxyde : 5 mg/m3), du manganese (VMEfumees : 1 mg/m3, TLV-TWA : 0,2 mg/m3).Si l’acier est galvanise, la concentration en oxyde de zinc est mesureecar il represente une forte proportion des fumees emises (VMEfumees : 5 mg/m3).Lors des operations de soudage sur acier inox, le chrome et le nickelfont l’objet de dosages specifiques : chrome total (VME : 2 mg/m3),chrome hexavalent (VME : 0,05 mg/m3), nickel (VME oxydes : 1 mg/m3,TLV-TWA composes inorganiques insolubles : 0,2 mg/m3).Si le soudage s’effectue sur aluminium, les fumees d’oxydes d’alu-minium peuvent etre emises en quantite importante, justifiant leurdosage (VME fumees : 5 mg/m3, TLV-TWA : 1 mg/m3).La biometrologie.– Appliquee aux expositions metalliques, elleconsiste a doser des metaux dans le sang ou dans les urines. Les

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Risque chimique dans le batiment. Quatrieme session : fumees de soudage

dosages renseignent sur la quantite des formes diffusibles absorbeesdepuis plusieurs jours, voire plusieurs semaines.Les concentrations observees dependent de la demi-vie biologique desespeces metalliques, ainsi que de la frequence, la duree et l’intensitede l’exposition.Les activites de soudage s’effectuent dans le BTP dans des conditionstres variables. La variabilite porte notamment sur les pieces travail-lees, l’environnement plus ou moins confine, la pratique de plusieursprocedes, ceux-ci etant plus ou moins emissifs.De nombreux metaux sont dosables dans le sang comme dans lesurines. Le choix des marqueurs s’effectue en tenant compte desresultats de l’etude de risques et des prelevements atmospheriques.Le medecin du travail oriente sa prescription en fonction des emis-sions les plus frequentes mais aussi en fonction de risques specifiquesassocies a certains chantiers.Des valeurs guides francaises, etrangeres (BAT-EKA, BEI) sont disponi-bles. Les indices etrangers sont mis a jour annuellement, contraire-ment aux valeurs francaises.La DFG allemande propose une BAT pour le manganese sanguin(20 mg/L), la BAT de l’aluminium a ete abaissee en 2008 de200 mg/L a 60 mg/gramme de creatinine.Cet organisme publie des EKA pour le nickel et le chrome. Les EKAconcernent des composes classes cancerogenes, elles resultent d’unecorrelation etablie entre des concentrations atmospheriques et l’eli-mination urinaire des metaux en fin de poste. Ainsi, une exposition de0,5 mg/m3 au nickel sous forme d’oxyde et de metal se traduit par uneelimination urinaire de l’ordre de 45 mg/L, apres plusieurs postes detravail. Une exposition de 0,05 mg/m3 aux fumees de trioxyde dechrome serait correlee a une elimination urinaire du chrome de 20 mg/L, mesure en fin d’exposition.L’ACGIH a fixe un BEI pour le chrome urinaire de 25 mg/L, valide lors del’exposition aux fumees solubles dans l’eau.Choix des parametres.– Le manganese sanguin est utilisable poursuivre l’evolution de la charge corporelle lors de l’exposition chroniqueaux fumees de soudage sur acier ordinaire.Le chrome et le Nickel urinaires sont doses pour evaluer l’absorptionaux fumees de soudage sur acier inox ; l’aluminium urinaire, celle dueau soudage sur aluminium.Des procedes tels que le brasage, le soudo-brasage sont moinsemissifs. Cependant, l’environnement de travail est souvent polluepar des poussieres comme celles de plomb, de cadmium; l’absorptionpar voie digestive est a rechercher si ces elements sont utilises dans leprocede.Ils sont dits cumulatifs en raison d’une demi-vie biologique deplusieurs mois a plusieurs annees, ils s’accumulent lors d’expositionschroniques, meme de faible intensite.La periodicite de surveillance de la plombemie, de la cadmiurie, est aadapter aux resultats observes. Les 2 metaux sont aussi a identifierlors du soudage sur pieces peintes. Les peintures anti-corrosioncontenant ces pigments sont degradees en oxydes qui contribuenta la production de fumees.Interpretation.– L’interpretation de la biometrologie peut s’avererdelicate au niveau individuel comme au niveau collectif.La redaction d’une fiche de renseignements detaillee est indispen-sable lors du recueil de chaque echantillon. Elle doit fournir desinformations sur l’activite du jour et de la veille, sur les conditionsde prevention mises en œuvre et sur les facteurs pouvant influencerl’absorption.Des differences significatives de resultats sont observees au cours dutemps pour un meme salarie.De meme, au sein d’un groupe homogene d’exposition, une dispersiondes resultats biologiques est frequente. Les renseignements apportespar la fiche donnent souvent une explication a ces differences.L’examen chronologique des resultats, tant individuels que collectifs,

permet de degager une tendance, avec des oscillations autour d’unevaleur moyenne.Conclusion.– Le medecin du travail dispose d’outils performants sousla forme de parametres atmospheriques ou biologiques pour evaluerl’intensite de l’exposition aux fumees et poussieres metalliques.Ces outils repondent aux memes exigences, d’identification despolluants pour choisir ceux dont le dosage est justifie, de descriptiondes taches et des activites au moment des prelevements. Ces infor-mations s’averent aussi importantes que les resultats chiffres renduspar le laboratoire.Les indicateurs biologiques ne remplacent pas la metrologied’ambiance, les deux approches se completent. Leur usage reguliercontribue a l’amelioration continue de la prevention. La regularite desevaluations favorise l’identification de situations exposantes, qu’ellesresultent des conditions de travail ou de comportements individuels.

Le programme de prevention lors d’activites desoudage application au BTPF. Marini, D. Beaufils*, comite consultatif des recherches en soudage1, rue Strolz, 90000 Belfort* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected]

La mise en œuvre de la prevention en matiere de soudage qu’ils’agisse d’un chantier metallurgique ou du batiment, suivra la memedemarche resultant de :– la metrologie, l’ergonomie, l’evaluation des risques : c’est la doseexterne ;– la clinique, la toxicologie, la cinetique des metaux : c’est la doseinterne.L’objectif etant la maıtrise des risques, la securite prend en compte laglobalite des risques de l’environnement du soudeur qui ne se limitepas aux fumees emises.S’agissant de complexite et de diversite des sites sans cesse renou-velees, l’organisation du travail et l’adaptation a chaque chantier sontla base de cette securite.Le medecin ergonome du BTP va donc devoir construire sa preventiona chaque fois, risques par risques et au poste du soudeur, a chaquecaracteristique du procede et de l’assemblage demande.En soudage, il y a lieu de distinguer en fait deux grands types desituation :– la piece va au soudeur : les postes sont fixes ou bien il y a despositionneurs, des convoyeurs et l’ergonomie en est simplifiee !– le soudeur va a la piece : il doit se deplacer, utiliser les dispositifsmobiles, nacelles, plateformes, l’ergonomie est plus compliquee, lesmoyens de securite doivent etre emmenes.L’autre distinction majeure, s’agissant de fumees et de gaz, est desavoir si on est ou non en espace confine et meme semi-confine. Onest alors en risque grave, voire mortel.Dans tous les cas, tout doit concourir a ventiler, aspirer, extraire l’airpollue (exhaust ! disent les anglo-saxons), le soudeur ne doit pasrespirer les fumees de soudage, nous possedons les moyens pourempecher cela et tendre a un maximum d’air renouvele et aussiparfois diminuer l’emission de ces fumees en utilisant la bonneprocedure.Un bref rappel des etudes epidemiologiques mondiales, auxquellesnous avons eu le bonheur de participer, nous montre que malheu-reusement celles-ci ne tiennent pas compte des conditions d’hygieneet de securite rencontrees, acceptables ou inacceptables.Quelques tableaux presentes resument les risques en mecano-sou-dure permettent d’adapter la securite.Le bon apprentissage formera a la securite integree dans l’applicationdu procede selon les regles de l’art.

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Il faut aussi evaluer les risques connexes :– le soudage sur toles pre-peintes ;– les UV (les troubles de la vision ne font pas partie du programme deces journees mais sont un souci majeur et permanent en soudage) ;– le thorium ajoute dans le procede TIG ;– les risques electriques ;– les champs electro-magnetiques ;– le degraissage des pieces ;– les operations mecaniques : meulage, matage, planage.Les moyens de protection du soudeur sont passes en revue :– les principes de ventilation ;– la captation et l’aspiration des fumees ;– les cabines de soudage ;– les dispositifs fixe et mobiles ;– le choix des filtres ;– les torches aspirantes ;– les masques a adduction d’air, en complement ;– les protections individuelles.Enfin, nous proposons un petit memento a l’usage du medecin dutravail des soudeurs en 5 pages.L’hygiene securite en soudage, outre la protection de la main d’œuvre,est generalement bien comprise car intimement liee a la qualite.

Strategie medicale face a un soudeurF. Michiels*, B. Bouard, F. Tagnard-Merat, C. MallantsService de sante des armees, centre de medecine de prevention, BCRMde Brest, CC 92, 29240 Brest cedex 9* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected].

Introduction.– La determination des expositions lors des activitesd’assemblage a chaud des metaux n’est pas une problematiquenouvelle. Face a la variete des techniques, la multiplicite des mate-riaux mis en œuvre, la variabilite des conditions de travail, il estillusoire de definir de maniere univoque les expositions attendues,meme si une bonne connaissance des techniques permet d’orienterles recherches vers certains composants toxiques. Dans ces condi-tions, nous avons tous ete confrontes a cette interrogation : quesurveiller chez ce soudeur ? Quels examens lui prescrire ? Afin de nepas tomber dans l’une des deux attitudes extremes face a cessituations complexes – abstention totale ou au contraire inflationd’examens « exploratoires » – une demarche systematique permetd’orienter la conduite medicale.Criteres a prendre en compte.– Le choix des modalites de surveillancemedicale resulte de la confrontation des donnees recueillies lors del’activite en milieu de travail et des donnees d’interrogatoire dusalarie concerne. Pour chaque travailleur doivent ainsi etre precises :– la technique exacte utilisee, sans se limiter a la seule distinctionsoudage ou brasage. TIG, MIG, MAG, electrode enrobee sont un niveauminimal de precision, idealement complete par la temperature detravail ;– le metal de base assemble, dont la reference (AFNOR, par exemple)permet une excellente approche de la composition fine ;– la composition du materiel d’apport employe, sur la base des fichesde donnees de securite, ainsi que celle des flux, que ceux-ci soientincorpores au fil ou a la baguette ou apportes separement (pate,poudre. . .).Ces donnees completent celles relatives au calendrier professionnel :duree, frequence, anciennete des activites de soudage, normalementregroupees dans la fiche individuelle d’exposition dans le cas dessubstances CMR. Elles permettront d’orienter le conseil a l’employeurquant aux analyses atmospheriques a effectuer pour evaluer l’effi-cacite de la prevention collective. Elles seront aussi un critere

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decisionnel de poids, en combinaison avec les resultats metrologi-ques, pour choisir le cas echeant les examens complementaires etnotamment biometrologiques a prescrire.Organes cibles.– L’analyse des classements reglementaires et desdonnees bibliographiques relatives au soudage ou au brasage, maisaussi a chaque composant present, permet d’identifier quelquesorganes cibles principaux.Le poumon : l’exposition aux fumees et vapeurs a evidemment pourpremiere cible le poumon. Trois risques meritent d’etre pris en compte :– l’asthme, susceptible d’etre induit notamment par la colophane lorsdu brasage ;– les atteintes bronchiques chroniques, en particulier chez les sou-deurs ayant plus de 20 ans de pratique [1] ;– le risque de cancer reste controverse, mais plusieurs etudes et meta-analyses retrouvent un risque relatif de 1,3 environ chez les soudeurs,qu’il soit ou non significatif [2,3].La peau et l’œil : au-dela du risque de brulure et autres traumatismeslies aux activites annexes du soudeur, la presence d’ultra-violets a eteincriminee dans la survenue de melanomes cutanes mais aussichoroıdiens. En outre, l’intensite du rayonnement lors du soudagea l’arc induit un risque potentiel de cataracte. Bien que les cas decritssoient anciens et le risque relativement anecdotique du fait desequipements de protection modernes, une certaine vigilance restede mise.Le rein : un certain nombre de metaux lourds et metalloıdes ont lapropriete de s’accumuler dans la corticale renale. Des nephropathies apoint de depart tubulaire ont ainsi ete decrites avec le plomb, lecadmium, le thorium. . . En outre, l’accumulation de substances clas-sees cancerogenes dans un organe interroge quant au risque de lesionmaligne. Une etude, certes isolee, identifie d’ailleurs le cadmiumcomme facteur de risque de cancer du rein [4].Le systeme nerveux central : quelques metaux sont suspectes d’induiredes alterations neurologiques (manganese) ou une alteration desfonctions superieures (aluminium) [5]. La realisation de tests de routinesemble cependant illusoire dans la pratique quotidienne. La prescrip-tion d’examens specialises, orientee par l’interrogatoire des sujetspotentiellement exposes aux substances suspectes (dont les solvantsorganiques) paraıt, par contre, l’approche la plus rationnelle.La fonction reproductrice : si le risque de cancer reste discute, labibliographie laisse moins de doute quant a l’existence d’un risquereprotoxique. Deux revues de litterature confirment ainsi l’augmen-tation du delai de procreation chez les couples dont l’homme estsoudeur [6,7]. L’hypothese la plus souvent avancee est celle de l’actiondu rayonnement thermique sur les gonades males. Cependant, plu-sieurs composants metalliques sont connus ou suspectes commereprotoxiques et pourraient contribuer au risque : bore, cadmium,voire antimoine.En pratique.– Le contenu de la visite medicale se decline en fonction desa date dans le parcours professionnel (visite initiale, periodique ou defin d’activite) et precise les donnees a recueillir lors de l’interrogatoire,de l’examen somatique et au travers des explorations complemen-taires.La visite initiale, independamment des elements relatifs a la deter-mination de l’aptitude au poste, est surtout l’occasion de realiser unbilan de reference a titre conservatoire. Celui-ci inclura un bilanophtalmologique (milieux transparents et fond d’œil), une spirome-trie, une radiographie pulmonaire. Un bilan renal semble utile,completant utilement un bilan hepatique dans l’hypothese d’uneexposition a des solvants chlores notamment.Lors de visites periodiques, l’interrogatoire recherche, outre dessymptomes respiratoires ou allergiques, des troubles de la fecondite.L’examen somatique complet porte une attention particuliere al’auscultation pulmonaire et aux zones cutanees decouvertes. Parmiles examens paracliniques, la bandelette urinaire et un examen

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Risque chimique dans le batiment. Quatrieme session : fumees de soudage

ophtalmologique de base sont d’autant plus indiques qu’ils sont derealisation simple. Si une spirometrie au minimum biennale s’impose,la radiographie pulmonaire semble d’un interet limite. La realisationde scanners thoraciques, debutes au moins 20 ans apres le debut del’exposition, selon une periodicite de 5 a 10 ans selon l’intensite del’exposition, paraıt plus contributive. La realisation d’examens biome-trologiques est possible, adaptee aux resultats de l’analyse toxicolo-gique prealable et des mesures atmospheriques. Le dosage combinede la cadmiurie et d’un marqueur de tubulopathie chez les braseursargent-cadmium ou de chrome et de nickel chez les soudeurs d’acierinoxydable sont les mieux valides. Ils trouvent de plus leur place dansla tracabilite des expositions aux CMR, dont le suivi des marqueursd’exposition au plomb est un exemple. A manier avec precaution al’echelle individuelle, ces examens biometrologiques presentent, parcontre, un grand interet dans le cadre d’une evaluation collective,pour repondre a une question precise (par exemple : efficacite des EPIlors de telle operation).Enfin, la visite de fin d’activite est le pendant de la visite initiale :examen ophtalmologique complet, spirometrie et scanner thoracique(sous reserve d’un delai d’au moins 20 ans par rapport a la premiereexposition), bilan renal, completent un examen somatique complet.Perspectives.– Une veille technologique et scientifique attentive estnecessaire dans ce domaine en constante evolution. Au-dela desinnovations techniques, la strategie de suivi medical elle-memedevrait evoluer dans les annees a venir. Sous l’impulsion de recherchesen cours, les performances des indicateurs d’exposition au bore ousurtout au beryllium devraient s’elever dans les prochaines annees.L’incrementation rapide des connaissances sur les effets des nano-particules, par exemple l’impact de leur absorption par voie olfactive,ouvre un nouveau champ d’analyse.Certains troubles olfactifs infra-cliniques survenant semble-t-il pourdes niveaux d’exposition faibles pourraient redonner un interet a desexplorations aujourd’hui desuetes [8]. Enfin, la diffusion progressivedes tests de genotoxicite offre de nouvelles possibilites d’evaluationdes effets precoces a l’echelle des groupes de travail [9].

Conclusion.– Si les expositions potentielles lors de l’assemblage achaud des metaux sont eminemment complexes, une demarcherigoureuse, qui ne differe en rien de celle adoptee face a tout risquechimique, permet neanmoins d’orienter le medecin. Ce n’est qu’ens’appuyant sur les donnees recueillies lors de son activite en milieu detravail que le medecin pourra affiner son cheminement diagnostiqueet determiner les explorations complementaires utiles.References[1] Antonini JM, Lewis AB, Roberts JR, et al. Pulmonary effects ofwelding fumes: review of worker and experimental animal studies.Am J Ind Med 2003;43:350–60.[2] Ambroise D, Wild P, Moulin JJ. Update of a meta-analysis on lungcancer and welding. Scand J Work Environ Health 2006;32:22–31.[3] Siew SS, Kauppinen T, Kyyronen P, et al. Exposure to iron andwelding fumes and the risk of lung cancer. Scand J Work EnvironHealth 2008;34:444–50.[4] Pesch B, Haerting J, Ranft U, et al. Occupational risk factors forrenal cell carcinoma: agent-specific results from a case-control studyin Germany. MURC Study Group. Multicenter urothelial and renalcancer study. Int J Epidemiol 2000;29:1014–24.[5] Sjogren B, Iregren A, Frech W, et al. Effects on the nervous systemamong welders exposed to aluminium and manganese. Occup Envi-ron Med 1996;53:32–40.[6] Jensen TK, Bonde JP, Joffe M. The influence of occupationalexposure on male reproductive function. Occup Med (Lond)2006;56:544–53.[7] Winker R, Rudiger HW. Reproductive toxicology in occupationalsettings: an update. Int Arch Occup Environ Health 2006;79:1–10.[8] Mascagni P, Consonni D, Bregante G, et al. Olfactory function inworkers exposed to moderate airborne cadmium levels. Neurotoxi-cology 2003;24:717–24.[9] Fassi R, Catani J, Iarmarcovai G, et al. Caracterisation de l’exposi-tion aux fumees de soudage en atelier, dans le secteur du BTP.Journees nationales de Sante au Travail dans le BTP. Annales28:69–78.

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