10
Supplémentation en Progestagènes et Prévention des Résorptions Embryonnaires Précoces FORMATION CHEF DE CENTRE EQUIN 2015-2016 FLORI CÉLINE Supplémentation en Progestagènes et Prévention des Résorptions Embryonnaires Précoces I. Les Us et Coutumes de la supplémentation en progestagènes II. Que sait-on sur : 1) Les sources endogènes de progestérone (P) pendant la gestation ? 2) Le développement précoce de l’embryon ? 3) Le rôle de la Progestérone pendant la gestation ? 4) Les résorptions embryonnaires précoces (REP) ? 5) Les causes de résorption embryonnaire précoce identifiées ? III. En pratique, la supplémentation raisonnée en progestagènes

Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

  • Upload
    others

  • View
    3

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

Supplémentation en Progestagènes et Prévention

des Résorptions Embryonnaires Précoces

FORMATION CHEF DE CENTRE EQUIN 2015-2016

FLORI CÉLINE

Supplémentation en Progestagènes et Prévention des Résorptions Embryonnaires Précoces

I. Les Us et Coutumes de la supplémentation en progestagènes

II. Que sait-on sur :

1) Les sources endogènes de progestérone (P) pendant la gestation ?

2) Le développement précoce de l’embryon ?

3) Le rôle de la Progestérone pendant la gestation ?

4) Les résorptions embryonnaires précoces (REP) ?

5) Les causes de résorption embryonnaire précoce identifiées ?

III. En pratique, la supplémentation raisonnée en progestagènes

scamus
Texte tapé à la machine
17669
Page 2: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

Les Us et Coutumes

� Sur le terrain, la supplémentation en progestagènes est mise en place à l’aveugle :

� Juments difficiles à remplir

� Juments qui coulent

� Receveuses asynchrones

� Receveuses après transfert non chirurgical difficile

� Progestagènes voie orale, simple ou double dose, voie injectable, forme retard

� « C’est un traitement dont le but est d’apaiser le propriétaire et/ou le vétérinaire en cas d’une éventuelle déficience de la production de progestérone endogène qui pourrait causer une résorption embryonnaire ». En Australie, plusieurs milliers de juments sont traitées àl’aveugle chaque année. ALLEN 2001

� Mais quelles sont les preuves d’efficacité pour justifier d’un traitement hormonal exogène onéreux, à si grande échelle?

Supplémentation en Progestagènes et Prévention des Résorptions Embryonnaires Précoces

I. Les Us et Coutumes de la supplémentation en progestagènes

II. Que sait-on sur :

1) Les sources endogènes de progestérone (P) pendant la gestation ?

2) Le développement précoce de l’embryon ?

3) Le rôle de la Progestérone pendant la gestation ?

4) Les résorptions embryonnaires précoces (REP) ?

5) Les causes de résorption embryonnaire précoce identifiées ?

III. En pratique, la supplémentation raisonnée en progestagènes

Page 3: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

Que sait-on sur :1)Les sources endogènes de progestérone (P) pendant la gestation ?

Que sait-on sur :1) Les sources endogènes de progestérone (P) pendant la gestation ?2) Le développement précoce de l’embryon ?

� Ovulation CJ1 P sécrétée de façon linéaire jusqu’à J5 (4ng/ml), gestation ou non.

� Non gestante : sécrétion de P pendant le dioestrus puis lutéolyse.

� Gestante : Absence de lutéolyse et sécrétion de P par le CJ1qui maintient la gestation.

� J11-J15 : Migration embryonnaire : L’embryon sécrète oestrogènes et prostaglandines qui stimulent les contractions utérines favorisant la migration. Reconnaissance maternelle de la gestation : bloque la sécrétion de PGF2a, la lutéolyse et le retour en chaleur. CJ1 reste actif.

� J16-J17 : Fixation de l’embryon à la base d’une corne.

� J30 : Baisse de la production de P par CJ1, jusqu’à 2,5ng/ml (versus 4 à 10 pour le 1er tiers de gestation).

� J35 : Apparition des cupules endométriales, sécrétant l’eCG, max à J50-J60. L’eCG :

� Stimule la sécrétion de P par CJ1,

� Action LH-like : Sur 10-15 vagues folliculaires successives FSH-induites, maturation folliculaire avec ovulations ou lutéinisations : Nombreux CJ2 qui produisent P.

� J60-J120 : Pic de P jusqu’à 30ng/ml, puis disparition des cupules et baisse de P.

� J50-J70 : Début de la production foeto-placentaire de P.

� J150-J180 : Régression des CJ2.

� J200 : Réduction de toutes les structures ovariennes lutéales.

Page 4: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

Que sait-on sur :3) Le rôle de la Progestérone pendant la gestation ?

� Elle est indispensable à la gestation :

� Maintien de la gestation pendant les 3 premiers mois sur des juments ovariectomisées, ou ayant reçu une injection de PGF2a (uniquement supplémentées en progestérone).

� Utilisation avec succès de receveuses ovariectomisées ou en anoestrus, supplémentées uniquement en progestérone.

� Elle favorise l’implantation et le maintien de la gestation par ses actions sur l’endomètre, le myomètre et le col utérin.

� Elle permet les 2 formes de nutrition (haemotrophique et histotrophique) nécéssaires au développement rapide de l’embryon.

Que sait-on sur :4) Les résorptions embryonnaires précoces (REP) ?

� Sur 356 juments pleines à l’échographie, le taux de REP avant J50 est de17,3% dont 77,5% avant J35. Les signes indicatifs d’une REP imminente :

� Vésicule irrégulière ou dentelée

� Présence de liquide dans la lumière utérine

� Présence de spots échogènes dans la vésicule

� Particulièrement après J30 :

� Absence de battements cardiaques

� Faible définition des structures fœtales

� Liquide fœtal très échogène

� La plus grande longueur de la vésicule est 2 fois inférieure aux normes établies

� Croissance vésiculaire inférieure aux normes

� Parfois, apparition de plis endométriaux comme des signes de chaleur autour de la vésicule en début de gestation

� Chez les juments agées infertiles, il semblerait que les REP aient lieu principalement dans l’oviducte, leur problème n°1 étant l’ovocyte. Mc Kinnon 2009

Page 5: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

Un déficit en Progestérone peut-il causer une résorption embryonnaire précoce ?

D’après ALLEN 2001

� OUI pendant les 40 premiers jours de gestation, alors que seul le CJ1 sécrète P.

En cas de défaillance soudaine du CJ1, par exemple si relargage massif de PGF2 lors d’endotoxémie gastro-intestinale : Lutéolyse du CJ1 et REP. Ces résorptions sont prévenues par une supplémentation en progestagène exogène et/ou un traitement avec Flunixine Méglumine (inhibiteur prostaglandine synthétase)

Mais rare, car même si 63% (sur 1393 juments) des REP ont lieu entre J15 et J45, les suivis échographiques montrent que les REP ne sont pas associées à une lutéolyse (d’ailleurs souvent les juments nécessitent une injection de PGF2 pour le retour en chaleur). Autres causes?

� NON après J40, car l’effet lutéotrophique de l’eCG est puissant

Que sait-on sur :5) Les causes de résorption embryonnaire précoce identifiées ?

Page 6: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

Existe-t’il une insuffisance lutéale primaire chez la jument ?

� C’est une anomalie décrite chez d’autres espèces de mammifères

� Définition : Réduction de la durée de vie du Corps Jaune primaire ou arrêt de son fonctionnement provoquant une chute anormale de la concentrationplasmatique en progestérone (thèse Blanchard 2006)

� D’après Daels 2006 : Absence de preuve de son existence chez la jument, ni de consensus sur sa définition. Est-ce un défaut de sécrétion par dysfonctionnement du CJ ou une incapacité du niveau de progestérone normal à maintenir une gestation ? Nombreuses études, mais peu concluantes(Qq études : IRVINE : sur 179 juments, 17 REP entre J17 etJ42, une seule avec 1 baisse du taux de progestérone précédant la résorption. BERGFELT : 2 juments avec une baisse préalable de P sur 21 REP. Canisso 2012 : 1 cas)

� A partir de quel taux plasmatique de P peut-on y penser?

� Mc Kinnon 2009 : < 1ng/ml sur 2 à 3 prélèvements la même semaine

� Blanchard 2006 : < 4ng/ml 2 jours de suite ou <2ng/ml 1 fois

� Kelleman 2014 : 2 ng/ml : taux mini pour le maintien de la gestation

� Shideler : < 2ng/ml (survie embryonnaire au dessus de 4)

Facteurs favorisant les résorptions embryonnaires précoces lors de transfert :

D’après Carnevale 2000, les REP, lors de transfert, sont favorisées par des facteurs embryonnaires :

�Qualité de l’embryon avant transfert (grade 1 à 4)

�Stade de développement de l’embryon avant transfert : blastocyste < morulae

�Diamètre de l’embryon avant transfert :taux < pour les petits embryons : 100 à 299µm

Les critères de choix de la receveuse influent aussi sur le taux de résorption : âge, jour de l’ovulation et aspect de l’utérus à J5

Retard de développement

Page 7: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

Supplémentation en Progestagènes et Prévention des Résorptions Embryonnaires Précoces

I. Les Us et Coutumes de la supplémentation en progestagènes

II. Que sait-on sur :

1) Les sources endogènes de progestérone (P) pendant la gestation ?

2) Le développement précoce de l’embryon ?

3) Le rôle de la Progestérone pendant la gestation ?

4) Les résorptions embryonnaires précoces (REP) ?

5) Les causes de résorption embryonnaire précoce identifiées ?

III. En pratique, la supplémentation raisonnée en progestagènes

En pratique, la supplémentation raisonnée :Quelles molécules? Quelles doses?

� Mc Kinnon (2000 et 2009) a montré l’inefficacité des progestagènes suivants àmaintenir une gestation en l’absence de progestérone endogène :

� Medroxyprogestérone acétate

� Hydroxyprogestérone hexanoate = Hydroxyprogestérone carproate

� Norgestomet

� Megestrol acétate

Seule l’altrenogest à la dose de 0,044mg/kg et en 1 prise par jour par voie orale est efficace au maintien de la gestation (et disponible en France).

� Daels 2007 : « L’altrenogest est le seule progestagène qui a prouvé son activité » 0,044mg/jour per os une prise.

Page 8: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

En pratique, la supplémentation raisonnée :Indications sur les juments à risque de REP

Avant de supplAvant de suppléémenter, gmenter, géérer tous les facteurs non endocriniens responsables de REP rer tous les facteurs non endocriniens responsables de REP (Mac Kinnon 2009) : endométrites, mauvaise conformation, gestations gemellaires…cf supra)

�Juments à REP inexpliquées et répétées : Supplémenter à partir de J5 et poursuivre jusqu’à J80 (relai foeto-placentaire)Daels 2007, Kelleman 2014

Rmq : Si on décide d’arrêter avant J80, faire un dosage de P car sur 10% des juments, l’altrenogest a un effet de rétrocontrôle sur la production de P endogène qui tombe à0. Dans ce cas poursuivre jusqu’à J80 et diminuer progressivement sur 10 jours.

�Juments subissant une agression à PGF2a (endotox…) : Démarrer le traitement immédiatement et poursuivre jusqu’à J70 puis diminuer la dose de moitié sur 1 semaine. Kelleman 2014

J5 J80

En pratique, la supplémentation raisonnée : Indications sur les juments receveuses

� En cas de transfert cervical difficile (agression à PGF2α !) : supplémenter dès le transfert. Possibilité d’arrêter au relais de la production de P par CJ2� vérifier dans ce cas que le dosage de P endogène est suffisant (>4ng/ml)

� En cas de défaut de synchronisation : supplémenter dès le transfert

� Receveuse ovulée J9 avant transfert : Carnevale 2000 : Dans une J9, la reconnaissance maternelle ne sera pas fiable. Sevinga 1999 : La taille du CJ et la Production de P changent déjà à J8, les changements ont peut-être même lieu avant.

� Receveuse ovulée J4 avant transfert : supplémenter jusqu’au diagnostic de gestation, avec un dosage de P avant arrêt ?

� En cas de petits embryons : faut-il supplémenter ?Jusqu’à J45 ?

Page 9: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

Les inconvénients de la supplémentation

� Supplémentation contre-indiquée en cas d’endométrite : La progestérone supprime la phagocytose par les neutrophiles dans l’utérus, donc le « nettoyage » de l’utérus. Sur une endométrite résiduelle, on risque de la prolonger et de l’exacerber. Daels 2007

� Suivi de la gestation : y penser car les juments sous REGUMATE ND ne reviennent pas en chaleur. Daels 2007

� Augmentation de la taille du clitoris des pouliches sur des mères traitées de J20 à J325. Kelleman 2014

� Absence d’incidence sur le déroulement de la saison N+1 sur des juments traitées de J20 à J325 en saison N. Daels 2007

Conclusion

� Scientifiquement peu d’éléments

� Faire une utilisation raisonnée de la supplémentation, notamment en réalisant des dosages

� Coût du :� dosage de P : 39€ (LDHVET)

� traitement de J5 à J80 : environ 130€

� Autres molécules effectives sur les REP :� GnRH : Pycock 1996 : 40µg/jument à J9, J10 ou J11: gestation et taux de REP

Newcombe : 1 dose de 20 à 40 µg entre J8 et J 12 + Arruda : 10% du taux de gestation (hyp : GnRH lutéotrophique : stimule le CJ1)

� Stimulants immunitaires : Mc Kinnon 2009 : aide au maintien de la gestation � utilisée pendant l’oestrus � diminue les inflammations (EQSTIM, EQUIMMUNE)

Page 10: Supplémentation en Progestagènes et Prévention des

Les références bibliographiques :

ALLEN WR Luteal Deficiency and Embryo Mortality in the Mare Reprod Dom Anim 36, 121±131 (2001) Ó 2001

ARRUDA RP Pregnancy rates and plasma progesterone concentrations in embryo recipient mares receiving hormone treatment. Proceeding of 6thInternational Symposium on Equine Embryo Transfer , Rio de Janeiro 2004

BLANCHARD S L’insuffisance lutéale chez les femelles domestiques et la femme Thèse Doctorat Vétérinaire ALFORT 2006

CANISSO IF Premature Luteal regression in a pregnant mare and subsequent pregnancy maintenance with the use of oral altrenogest Equine Veterinary Journal 45 (2013) 97-100

CARNEVALE EM Factors effecting pregnancy rates and early embryonic death after Equne Embry Transfer Theriogenology 54:965-979, 2000

DAELS Peter Progesterone Therapy and Pregnancy Loss – 8th AAEP Annual Resort Symposium, Rome 2006

DAELS Peter Hormone Supplementation during pregnancy Abstracts Voorjaarsdagen 2007- Amsterdam

KELLEMAN Audrey Equine Pregnancy and Clinical Applied Physiology – Proceeding of AAEPconvention, Nashville USA 2014

MCKINNON A The inability of some synthetic progestagens to maintian pregnancy in the mare Equine Veterinary Journal (2000) 32 (1) 83-85

MCKINNON A. Hormonal control of Equine Reproduction MCKINNON A. Maintenance of pregnancy Proceeding of AAEP Annual Resort Symposium Colorado USA 2009

SEVINGA M, Relationship between ultrasonographic characteristics of the Corpus Luteum, Plasma Progesterone concentration and early pregnancy diagnosis in Friesian mares Theriogenology 52 :585-592, 1999