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SYNDROME DE RESTAURATION IMMUNITAIRE (IRIS) AU COURS DE PATHOLOGIES INFECTIEUSES Tuberculose, VIH, autres immunodéprimés Dr Nathalie De Castro Maladies Infectieuses

SYNDROME DE RESTAURATION IMMUNITAIRE …gfol1.grrroh.com/download/IRIS_ws1032655541.pdf · • Facteurs favorisants ... • Aspergillose invasive (AI) et candidose hépatosplénique

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SYNDROME DE RESTAURATION IMMUNITAIRE (IRIS)

AU COURS DE PATHOLOGIES INFECTIEUSES

Tuberculose, VIH, autres immunodéprimés

Dr Nathalie De Castro Maladies Infectieuses

Cas 1 •  VIH, 40 CD4 : mise sous ARV au Cameroun •  A 1 mois de la mise sous traitement diagnostic de méningite à

cryptoccoque : fluconazole •  Aggravation : HTIC, sourde, aveugle •  Rapatriement en France : Charge virale VIH contrôlée. Reprise d’un

traitement antifongique adapté. •  Evolution :

•  absence d’amélioration malgré stérilisation LCR et PL soustractives. Pas d’autre infection opportuniste. Feutrage méninges++++

•  Diagnostic d’IRIS=>dérivation, corticoïdes. Amélioration surdité, régression signes méningés, petite récupération visuelle (atrophie optique…)

•  Evolution vers la cortico-dépendance avec rechute des symptômes à chaque arrêt de la corticothérapie

•  Après 18 mois de traitement antifongique, 3 cures de corticoïdes fortes doses, début anti-TNF pour faciliter sevrage en cortic

•  Amélioration inattendue de la vue. Pas de récidive des symptômes à 1 an de l’arrêt des antiTNF. CD4>500 et VIH contrôlé

2011 08 24 2011 09 30 Cortic 1

2012 01 12 cortic 2

2012 12 04 Cortic 3

2013 02 04 adalimumab

2014 02 26 2014 11 06 2012 12 18

Cas 2 •  Transplantée rénale • A 5 ans de la transplantation sous MMF, tacrolimus et

corticoïdes : diarrhée à norovirus •  5-6 mois plus tard : confusion, ataxie cérebelleuse • Diagnostic de cryptoccocose neuro-méningée :

antifongiques, PL soustractives, baisse de l’immunosuppression : arrêt cellcept, diminution tacrolimus et corticoïdes

•  J8 : aggravation clinique et IRM =>dérivation puis corticoïdes

• Pas d’amélioration (glasgow 8)=> antiTNF • Amélioration spectaculaire à J10 avec récupération

neurologique motrice Scemla et al. American Journal of Transplantation 2015; 15: 560–564

Scemla et al. American Journal of Transplantation 2015; 15: 560–564

Cas 3

Cas 3 •  Camerounais 38 ans, AEG, polyadénopathie=> VIH+; CD4=30/

mm3

•  Diagnostic de tuberculose pulmonaire : quadrithérapie •  Début ARV à J8-J10 des antituberculeux •  M1 : fièvre, majoration adénopathies cervicales pré-fistulisées :

mise à plat chir (échec cortic). Amélioration état général.

Cas 3 : M6 anti-TB et ARV

Cholestase ictérique : stop RIF; FQ+EMB 6 mois puis ré-introduction INH=>INH+FQ 6 mois

Cas 3 Durée traitement anti-TB 18 mois

M12 M24

Cas 4 PCP/VIH

J0 J21

J60

IRIS Introduction • Aggravation « paradoxale » sous traitement anti-infectieux

d’une pathologie infectieuse connue •  dans la lèpre •  dans la tuberculose, décrit depuis années 60-70 : tuberculomes et

pleurésie de l’enfant notamment

• Chez les immunodéprimés pathologie peut-être « démasquée » par la reconstitution immunitaire chez un patient « asymptomatique »

• Situations à risque : •  VIH •  Sortie d’aplasie : infections fongiques •  diminution/arrêt de traitements immunosuppresseurs quels qu’ils

soient (cas particulier des biothérapies)

TUBERCULOSE Hors infection VIH

IRIS Tuberculose (non ID) •  Tuberculoses extra-pulmonaires +++ •  Fréquence exacte? 10-25% selon type d’atteinte

•  TB ganglionnaire 20-25% 1

•  TB pleurale 15% 2

•  TB neurologique <10% mais pronostic++ 3

• Pas d’impact sur morbi-mortalité? (y compris neurologique3) mais hospitalisations, examens supplémentaires, prolongation traitement, complications corticothérapie?

1-Hawkey et al. Clin Infect Dis 2005 May 1;40:1368-71 2- Jeon et al. Int J Tuberc Lung Dis. 2012 Jun;16(6):846-51 3- Garg et al. J Neurol Sci 2014 15;340:26-36

IRIS Tuberculose (non ID) • Diagnostic plus simple que dans le cas des patients ID car

pas de doute sur diagnostic initial mais diagnostic d’élimination •  Inobservance thérapeutique • Souche résistante (antibiogramme pas toujours

disponible dans les premières semaines)

• Efficacité de la corticothérapie1, ponctions/draînages, anti-TNF dans atteintes neurologiques3

1-Hawkey et al. Clin Infect Dis 2005 May 1;40:1368-71 2- Jeon et al. Int J Tuberc Lung Dis. 2012 Jun;16(6):846-51 3- Garg et al. J Neurol Sci 2014 15;340:26-36

Cas 4 27 ans, VIH négatif, tuberculose méningée

M0 M1 M12

IRIS ET INFECTION VIH

IRIS /infection VIH •  Incidence?? 10-45% selon séries et infections

•  Phénomène décrit dans les 6 mois suivant mise sous traitement dès l’utilisation des premiers ARV (AZT), amplifié la fin des années 90 (introduction trithérapies)

•  Aujourd’hui, indications de traitement ARV pour tous les patients quel que soit le déficit immunitaire et en cas d’IO à J15

•  Décrit dans nombreuses pathologies infectieuses (ou non inf) •  Mycobactéries tuberculose ou atypiques •  Pneumocystose (rare car corticothérapie) •  Leishmaniose, toxoplasmose •  mycoses invasives (cryptoccocose, histoplasmose, penicilliose..),

Virus :VZV, CMV, EBV (lymphomes), HHV8 (kaposi), hépatites virales, JC virus (LEMP)…

•  Maladies inflammatoires (sarcoïdose++) HIV/AIDS – Research and Palliative Care 2015:7 49–6

IRIS /infection VIH • Problème : pas de critère permettant diagnostic de

certitude; diagnostic d’élimination • Pour pays à faibles ressources : proposition de liste de

critères majeurs/mineurs pour aider les cliniciens

•  Facteurs favorisants •  Profondeur du déficit immunitaire initial++ (CD4<50+++) •  Introduction précoce des ARV à J15 même au cours des infections

opportunistes (saut TB neurologique et cryptoccocose neuroméningée)

•  Atteinte disséminée? (Inoculum élevé?)

HIV/AIDS – Research and Palliative Care 2015:7 49–6

Mécanismes IRIS/VIH

HIV/AIDS – Research and Palliative Care 2015:7 49–6

Mortalité IRIS/VIH? • Selon les études : 0 à 15%...jusqu’à 20% dans

cryptoccocose neuro-méningée et 75% dans méningite TB !

• Mortalité élevée dans atteintes neurologiques liée à gravité initiale++

• Essai ANRS Carinemo •  Tuberculoses/VIH •  Médiane CD4: 9/mm3

•  Mortalité globale 6% •  9% IRIS •  mortalité patients avec IRIS 9% •  MDR TB? •  Sous utilisation des corticoïdes?

Bonnet et al. PLoS One. 2013; 8(12): e84585.

Corticoïdes et IRIS Pas de différence de mortalité

• 110 patients avec IRIS grave • 0,75mg/kg/j prednisone 10j ou placebo

• Critère jugement: journées d’hospitalisation ou nécessité consultations/gestes en ambulatoire

• Pas de différence de mortalité: placebo 4%vs prednisone 5%

Meintjes et al. AIDS 2010; 24:2381-90

Corticoïdes et IRIS

Meintjes et al. AIDS 2010; 24:2381-90

IRIS ET AUTRES IMMUNODÉPRIMÉS Hématologie (neutropénie) Transplantation

IRIS et neutropénie • Aspergillose invasive (AI) et candidose hépatosplénique

(CHS)+++ • Prophylaxies antifongiques et traitement pré-emptif en cas

de neutropénie prolongée=> très nette diminution de l’incidence de ces 2 infections (sauf si résistance)

• Comme dans le cas de l’infection VIH : « unmasking IRIS » et aggravation (imagerie+++) sous traitement

• Diagnostic IRIS sous traitement difficile à distinguer de •  Échec du traitement •  Résistance •  Autre IFI (mucor…)

CHS

• Maladie de reconstitution immune • Diagnostic microbiologique difficile/ mais tableau clinico-

radiologique typique et diagnostic différentiel des atteintes hépatiques plus simple que pour AI

• Mortalité élevée (mais peu de données récentes), surtout en raison de la rechute de l’hémopathie

•  Intérêt du TEP pour le suivi •  Traitement symptomatique par corticoïdes • Poursuite programme de chimiothérapie++ car pronostic lié à

la rechute de la maladie hématologique

Description CHS

De Castro et al. CMI 2012;18:E185-7.

Etude rétrospective 24 cas de CHS entre 2000-2007 (nck+sls)

Mortalité CHS

De Castro et al. CMI 2012;18:E185-7.

IRIS/Aspergillose invasive • Diagnostic AI plus difficile que CHS car beaucoup de

diagnostics différentiels dans le poumon => critères EORTC

• Aggravation lésions à l’imagerie sous traitement est également « classique » : IRIS ou maladie non contrôlée?

• Distinction majeure par rapport aux autres IRIS/IFI : pas de corticothérapie+++

IRIS/ Aspergillose invasive

Compliqué! •  Séoul, rétrospectif, 2008 à

2013 •  AI selon EORTC •  Définitions:

•  Réponse complète •  IRIS :sortie d’aplasie et

aggravation ou nouvelles lésions avec « contrôle microbiologique » et absence d’autre dg…

•  Radiologie •  Réponse complète •  Réponse partielle : 25%

réduction •  Stable : réduction 0-25% •  Progression : augmentation ou

nouvelles lésions

Jung et al. J Infect Dis 2015

IRIS/Aspergillose invasive Mortalité

•  Mortalité liée à persistance de la neutropénie

•  Donc…patients avec IRIS ont mortalité moindre!

•  à J30 : 11% vs 33% (p=0,01)

•  À J90: 33% vs 58%

•  Problème = •  définitions! •  >90% d’aspergilloses

probables •  >50% des patients sous

prophylaxie Jung et al. J Infect Dis 2015

IRIS/transplantés d’organe solide

•  Fréquence exacte? • Mêmes infections que les patients VIH, mais surtout

cryptoccocose et autres mycoses invasives, tuberculose, CMV et néphropathie BK virus

• Y penser quand on diminue immunosuppresseurs++ •  Traitement par corticoïdes par analogie avec ce qui se

passe dans VIH • Mortalité?

Sun et al. CID 2011:53; 168-176

En conclusion •  IRIS : entité bien décrite chez les patients VIH

•  Fréquent car initiation des ARV de plus en plus précoce •  Pronostic et difficultés de prise en charge différents selon le pays

où on se trouve •  « Spectaculaire » et traitement parfois difficile mais mortalité

directement imputable probablement faible en dehors des atteintes neurologiques (et mortalité par autres causes diminue vite sous ARV). Mais morbidité importante.

•  IRIS chez les patients neutropéniques •  Rare : prophylaxies antifongiques •  Mécanisme immunologique probablement différent •  Probablement plus graves mais lié à la neutropénie++ et à la

maladie hématologique

IRIS : ce qui est important •  Chez le VIH, l’anticiper

•  en recherchant de façon exhaustive infections opportunistes « occultes » chez les patients avec CD4<50

•  Corticothérapie « facile » lors de l’aggravation de lésions connues dès qu’on a éliminé une autre cause

•  On ne commence pas ARV à J15 en cas de cryptoccocose et tuberculose neurologique

•  En hématologie •  Traquer autre champignon++ et résistance dans le cas de l’AI •  Suivi par TEP? •  Ne pas décaler la chimiothérapie

•  Chez les transplantés très immunodéprimés •  raisonner comme pour le VIH, penser aux mêmes infections : TB et

cryptoccocose •  décaler baisse IS/traitement de l’infection?

Merci de votre attention