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Avant propos. La présente chronique s’attache à recenser la jurisprudence relative à la matière des accidents du travail dans le secteur privé durant la période couvrant les années 1988 à 1998. Dans un souci de clarté et de pragmatisme, nous avons pris soin de suivre pas à pas la systématique fixée par la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail. A quelques exceptions près - et ce afin de ne pas nous éloigner de notre objectif initial - nous avons écarté de notre étude les décisions spécifiques relatives à la législation concernant les accidents du travail dans le secteur public. 1 A vrai dire, parmi la quantité impressionnante de décisions publiées, nous avons tenté de mettre tout particulièrement en exergue la jurisprudence fondamentale qui, au regard de la loi telle qu’elle est vigueur, présente un intérêt immédiat pour le praticien. Dans la mesure où des problèmes récurrents se présentent dans la matière des accidents du travail, il nous a semblé opportun, avant de les aborder et à dessein de tendre vers une bonne compréhension des arrêts et jugements répertoriés, d’effectuer - tant que faire ce peut - un bref rappel des principes. Au demeurant, un renvoi vers des articles et ouvrages plus complets est réalisé en note subpaginale et nous ne pouvons qu’en conseiller vivement la lecture. Chapitre I : Dispositions préliminaires. Section 1 : Champ d’application. 1.1 L’article 1 de loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail - qui délimite le champ d’application de la loi et relève selon la Cour de cassation de l’ordre public 2 - ,vise principalement les personnes qui sont assujetties, pour tout ou 1 Voir sur ce point M. RESPENTINO « Les accidents du travail dans le secteur public », Story Scienticia, 1989 ; M. RESPENTINO, « Les accidents du travail dans le secteur public », Chron. D.S., 1991, p 367 et ss. 2 Cass, 24 avril 1989, JTT, 1989, p 295 ; Bull. 1989, p 877 ; RW, 1989-1990, 1460 et note. 1

Synthèse de jurisprudence Accident du travail

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Page 1: Synthèse de jurisprudence Accident du travail

Avant propos.

La présente chronique s’attache à recenser la jurisprudence relative à la matière des accidents du travail dans le secteur privé durant la période couvrant les années 1988 à 1998. Dans un souci de clarté et de pragmatisme, nous avons pris soin de suivre pas à pas la systématique fixée par la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail. A quelques exceptions près - et ce afin de ne pas nous éloigner de notre objectif initial - nous avons écarté de notre étude les décisions spécifiques relatives à la législation concernant les accidents du travail dans le secteur public.1

A vrai dire, parmi la quantité impressionnante de décisions publiées, nous avons tenté de mettre tout particulièrement en exergue la jurisprudence fondamentale qui, au regard de la loi telle qu’elle est vigueur, présente un intérêt immédiat pour le praticien.

Dans la mesure où des problèmes récurrents se présentent dans la matière des accidents du travail, il nous a semblé opportun, avant de les aborder et à dessein de tendre vers une bonne compréhension des arrêts et jugements répertoriés, d’effectuer - tant que faire ce peut - un bref rappel des principes. Au demeurant, un renvoi vers des articles et ouvrages plus complets est réalisé en note subpaginale et nous ne pouvons qu’en conseiller vivement la lecture.

Chapitre I : Dispositions préliminaires.

Section 1 : Champ d’application.1.1 L’article 1 de loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail - qui délimite le champ d’application de la loi et relève selon la Cour de cassation de l’ordre public2 - ,vise principalement les personnes qui sont assujetties, pour tout ou partie, à la sécurité sociale des travailleurs salariés3. Brevitatis causa, nous pouvons dire que cette législation englobe tous les travailleurs et tous les employeurs liés par un contrat de travail.4 C’est, dès lors, en isolant l’élément de subordination du complexe de faits qui lui est soumis que le juge distinguera le contrat de travail par rapport à d’autres conventions..5 Au travers de ce prisme de la subordination, la cour du travail de Liège a jugé que l’épreuve de sélection, qui a pour seul but de tester les aptitudes d’un candidat, ne peut être assimilée à un contrat de travail6. La même cour a estimé que l’accident survenu dans les locaux de l’employeur postérieurement à un renvoi sur le champ ne peut plus être considéré comme s’étant produit dans le cours de l’exécution du contrat de travail.7 Le tribunal du travail de Gand a, quant à lui, tranché qu’il n’y avait pas de contrat de travail liant un fils qui collaborait dans l’entreprise de son père aux motifs, que dans la cas d’espèce, il ne pouvait être décelé dans cette relation le moindre lien de dépendance juridique8.Il a encore été décidé que l’aide volontaire d’un ami dans

1 Voir sur ce point M. RESPENTINO «  Les accidents du travail dans le secteur public », Story Scienticia, 1989 ; M. RESPENTINO, «  Les accidents du travail dans le secteur public », Chron. D.S., 1991, p 367 et ss.2 Cass, 24 avril 1989, JTT, 1989, p 295 ; Bull. 1989, p 877 ; RW, 1989-1990, 1460 et note.3 article 1 qui établit un parallèle avec la loi du 27 juin 1969 révisant l’arrêté loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs ; pour rappel rentre encore dans le champ d’application de la loi du 10 avril 1971, en vertu de l’article 1, les ouvriers mineurs et assimilés et les marins de la marine marchande.4 Trib. trav Courtrai, 18 février 1997, RW, 1997-98, p 614.5 Voir M. JAMOULLE, «  Seize leçons sur le droit du travail », Collection Scientifique Fac. Droit Liège, 1994, p 109-110 ; Bruxelles, 21 février 1994, Bull. Ass, 1994, p 536 et note de VAN GOSSUM.6 C. trav Liège, 7 novembre 1989, Bull. Ass, 1990, p 86 et note LVG ; JT, 1990, p 558.7 C trav Liège, 22 mars 1993, JTT, p 442 et note ; Bull Ass, 1994, p 83 et note LVG.8 Trib. trav. Gand, 22 novembre 1991, Bull. Ass, 1992, p 242 et note de LVG.

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l’exécution de travaux de réparation chez un tiers n’est pas réalisée dans les liens d’un contrat de travail9 En revanche, le fait pour un travailleur, lié par un contrat de travail à durée indéterminée, de devenir actionnaire de la société qui l’emploie, ne suffit pas à démontrer que son contrat a pris fin.10

Nous savons que le champ d’application ratione personae de la sécurité sociale des travailleurs salariés peut être étendu par un arrêté royal délibéré en conseil des ministres pris après avis du Conseil national du travail.11 Le Roi a notamment usé de cette faculté en faveur des artistes de spectacle.12 Par conséquent, c’est à bon droit que la cour du travail d’Anvers13 a estimé que les mannequins qui présentent des vêtements de manière artistique peuvent bénéficier de l’application de la loi sur les accidents du travail.

Il est acquis qu’un médecin peut être engagé dans liens d’un contrat de travail ; c’est pourquoi, le tribunal du travail de Charleroi a considéré qu’un médecin en service de garde est sous l’autorité de son employeur.14 Il en est de même pour un administrateur de société qui cumule ce mandat, non rémunéré, avec le statut d’administrateur-délégué, chargé de la gestion quotidienne de l’entreprise sous l’autorité du conseil d’administration de la société.15 En revanche, le tribunal du travail de Tongres a jugé que le gérant d’une SPRL n’agit pas dans les liens d’un contrat de travail s’il n’est pas démontré que celui-ci se trouve en état de subordination à l’égard d’un organe –autre que l’assemblée générale qui ne donne aucunes instructions précises – de la SPRL.16

La cour du travail de Mons rappelle que le règlement général de la SNCB régissant les accidents du travail constitue un régime autonome par rapport à la loi du 10 avril 1971 et ce quant bien même il y est fait ponctuellement référence, cette loi ne s’applique pas à ses agents statutaires.17

Les jeunes liés par un contrat d’occupation d’étudiants sont également bénéficiaires de la couverture offerte par l’assurance loi. A ce propos, la cour du travail de Mons a décidé que l’étudiant de l’enseignement professionnel qui fournit pendant le week-end des prestations rémunérées dans une boulangerie où il effectue un stage pendant la semaine, est dans les liens d’un contrat de travail d’étudiant car il n’exécute pas une activité imposée dans le cadre de ses études mais réalise en dehors de l’école et contre rétribution des travaux qui ne présentent pas de caractère obligatoire.18

9 C. trav Gand ( section Bruges ) 27 septembre 1990, RW, 1990-91, p 647.10 Trib. trav. Tongres, 24 février 1997, JTT, 1997, p 413.11 Voir article 2 § 1er de la loi du 17 juin 1969 précitée.12 Voir article 3, 2° AR du 28 novembre 1969 pris en exécution de la loi du 27 juin 1969 révisant l’arrêté loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs ; voir encore J. CLESSE, « Faux indépendants et sécurité sociale des travailleurs salariés », in Editions du jeune Barreau de Bruxelles, 20 avril 1991, p 38-43.13 2 mai 1989, Chron. D.S., 1992, p 214.14 Trib trav Charleroi, 2 janvier 1992, RDS, 1992, p 141 ; JTT, 1992, p 329 ; Bull Ass, 1992, p 456 et note de LVG.15 Bruxelles, 21 février 1994, Bull. Ass, 1994, p 536 et note de VAN GOSSUM ; RGAR, 1995, n° 12.441.16 Trib trav Tongres, 24 mars 1997, JTT, 1997, p 412 et note.17 C. trav Mons, 9 avril 1993, RGAR, 1995, n° 12.536 ; voir aussi Trib trav Liège, 16 mars 1995, Pas, 1995, III, p 1 ; RGAR, 1997, n° 12.831 et C. trav Bruxelles, 14 janvier 1991, RW, 1991-1992, p 679 ; voir encore l’article 4, 3° de la loi du 10 avril 197118 C.trav Mons, 12 décembre 1988, Chron. D.S., 1992, p 195 et note J. JACQMAIN ; un pourvoi a été dirigé contre cette décision mais a été rejeté par la cour de Cassation le 10 septembre 1990, Bull. 1991, p 21 ; RW, 1990-1991, p 886.

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Le contrat d’apprentissage qui implique pour l’employeur l’obligation de donner ou de faire donner une formation professionnelle et pour l’apprenti, l’obligation d’apprendre la pratique de la profession sous l’autorité de cette personne et de suivre les cours requis pour sa formation, rentre dans le champ d’application de la loi de 1971.19. La cour d’appel de Bruxelles a, sur cette base, reconnu la qualité d’apprenti à un élève régulier du réseau d’enseignement professionnel. Pour fonder sa décision, la juridiction bruxelloise s’est appuyée sur un arrêt de la cour de Cassation du 5 juin 196320 qui précise que «  l’enseignement professionnel n’est pas seulement un enseignement théorique mais principalement pratique, conforme à l’exercice d’une activité propre à la profession, objet de l’enseignement ; que le travail que comporte un tel enseignement pratique est nécessairement dirigé en vue de la production et implique à cet égard un contrat d’apprentissage dès lors que les choses ainsi produites sont vendues à l’extérieur ». La cour d’appel en déduit « que l’exercice par un élève, d’une activité professionnelle dirigée en vue de la production, dans le cadre d’un enseignement professionnel, lui confère la qualité d’apprenti, pour l’application de la loi du 10 avril 1971 »21

Les travailleurs intérimaires rentrent également dans le champ d’application de la loi sur les accidents du travail. 22

L’article 76 de la loi du 10 avril 1971 prévoit un régime spécial de réparation des accidents du travail pour les gens de mer ; celui-ci ne s’applique toutefois pas à l’équipage d’un bâtiment de pêche qui ne bat pas pavillon belge.23 L’affaire - qui a occupé la cour de Cassation - concerne la victime d’un accident du travail, domiciliée en Belgique et rémunérée par une entreprise ayant son siège sociale sur le territoire du Royaume mais occupée à bord d’un bâtiment de pêche battant pavillon anglais. La Haute Cour constate que la CJCE, dans un arrêt du 4 octobre 199124, a dit pour droit que «  l’article 14, alinéa 2, sub. c), du règlement 1408/71, dans sa version en vigueur en 1980,25 doit être interprétée en ce sens qu’elle a pour effet de rendre inopposable aux personnes visées par elle, ou à leurs ayant droit, une disposition de la législation applicable d’un Etat membre en vertu de laquelle l’admission au régime de sécurité sociale est subordonnée à la condition que le navire à bord duquel est occupé le travailleur batte pavillon de cet Etat membre. ». La cour de Cassation en infère que l’exclusion contenue dans la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail pour les gens de mer qui font partie de l’équipage d’un navire ne battant pas pavillon belge ne peut être appliquée. En outre, la Cour observe – en ayant constaté au préalable que le règlement 1408/71 ne contient pas de règles de conflit relative à la législation applicable à la relation de travail qui existe entre le travailleur et son employeur 26 - que l’absence d’engagement de la victime, au moment de l’accident, dans les liens d’un contrat de travail conformément à la loi du 5 juin 1928 portant réglementation du contrat d’engagement maritime27, est sans incidence

19 Cass, 26 février 1990, RBSS, 1990, p 233 et note de HUYS J.20 Pas, 1963, p 1056 ; voir encore Cass, 26 février 1990, RBSS, 1990, p 227 et note HUYS.21 Bruxelles, 2 mars 1995, Bull Ass, 1996, p 44 et note de GHIJSELS.22 Gand 25 avril 1995, RGAR, 1998, n° 12.892.23 voir articles 58, § 1, 1°, 76 § 1 , 4° et § 2 de la loi du 10 avril 1971.24 FAT C/ De Paep et consorts, C-196/90 arrêt rendu sur question préjudicielle de la cour de Cassation du 18 juin 1990, Bull. Ass., 1990, p 694, note VAN AERDE F. ; Pas, 1990, p 1171 ; Arr. Cass, 1989-90, p 1318.25 voir actuellement l’article 14 ter du règlement 1408/71 ; M. JAMOULLE, «  Droit social européen », La charte, partie 3, pages 42 et 43.26 CJCE, FAT C/ De Paep et consorts, 4 octobre 1991, n° 1408/71.27 Le moyen était fondé sur l’article 89 de cette loi qui prévoit que le contrat prend fin par l’innavigabilité officiellement constatée du navire.

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puisque cette loi ne s’étend pas au contrat d’engagement maritime conclu même en Belgique par un marin belge pour le service d’un navire étranger.28

La formation professionnelle relève de la compétence exclusive des Communautés. De ce fait, les stagiaires en formation professionnelle ne peuvent prétendre à l’application de la loi du 10 avril 1971. Il appartient néanmoins aux Communautés d’obliger les employeurs qui les occupent à contracter une assurance en vertu de laquelle les intéressés bénéficient d’une protection analogue à celle prévue par la loi sur les accidents du travail.29

La cour de Cassation, par un arrêt du 2 décembre 1991, a retenu que le chômeur handicapé occupé dans un atelier protégé est lié à celui-ci par un contrat de travail ou d’apprentissage.30 C’est dès lors à tort selon nous que la cour du travail de Liège a confirmé un jugement31 qui excluait du champ d’application de la loi du 10 avril 1971, le chômeur difficile à placer occupé dans un atelier protégé, au motif qu’il n’était pas engagé dans les liens d’un contrat de travail.32 A ce sujet, il ne faut pas perdre de vue que depuis l’AR du 1 juin 199333, le Roi a fixé des conditions spéciales d’application de la loi de 1971 pour cette catégorie de personnes.

Enfin, précisons que le chômeur qui est inscrit dans une Agence Locale pour l’Emploi et qui effectue une activité dans ce cadre est assuré contre les accidents du travail.34

1.2 Les trois règles contenues dans l’article 6 de la loi du 10 avril 1971.L’article 6 de la loi de 1971 contient trois règles fondamentales. La première est relative aux conséquences de la nullité du contrat de travail. Le texte prévoit, en effet, que la nullité du contrat ne peut être opposée à l’application de la loi de 1971. Cette disposition, selon l’enseignement de la cour de Cassation, est impérative pour les deux parties puisque «  l’article 6 § 1 vise toute personne qui entend opposer la nullité du contrat de travail à l’application de la loi. ».35 Aussi, le travailleur ne dispose pas de la faculté de se prévaloir de la nullité du contrat de travail à l’égard de son employeur pour échapper à la réparation de son préjudice tel qu’il est défini par la loi de 1971. Au demeurant, c’est sur la base de cet article, que la cour du travail de Liège a pu légalement décider que le contrat de travail conclu par un mineur âgé de moins de 15 ans ne l’exclut pas du bénéficie de la réparation de son préjudice en loi.36

La deuxième règle retient que toute convention contraire aux dispositions de la loi de 1971 est nulle de plein droit. La cour de Cassation a réaffirmé ce principe en invalidant un arrêt de la cour du travail d’Anvers qui constata, au regard des rapports d’expertise, qu’il n’y avait pas eu d’événement soudain mais malgré ce admis l’existence d’un accident du travail en se fondant sur le fait que les parties avaient conclu une convention en ce sens.37 Dans le même

28 Cass, 4 mai 1992, Pas, 1992, p 771 ; RW, 1992-1993, p 569 ; RDS, 1992, p 287 ; Arr. Cass, 1991-1992, p 826.29 Cass, 16 janvier 1995, Chron. D.S., 1995, p 163 note PALSTERMAN ; C. trav Liège, 2 février 1995, Chron. D.S, 1997, p 67 et note de SWARTENBROEKX ; C. trav. Gand, 23 septembre 1993, RW, 1993-1994, p 1460 ; C.trav Gand 7 novembre 1991, RDS, 1992, p 154 ; JTT, 1992,, p 335 et note.30 Cass, 2 décembre 1991, RW, 1991-1992, p 950 ; voir Trib trav Bruxelles, 24 décembre 1991, JTT, 1992, p 338 et note jugement dans lequel le tribunal admet l’existence d’un lien de subordination.31 Trib trav Liège, 9 septembre 1991, JTT, 1991, p 49432 C. trav Liège, 20 décembre 1993, JTT, 1994, p 126 et note.33 pris sur la base de l’article 3, 2° de la loi de 1971.34 Voir article 79 § 10 de l’AR du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage.35 Cass, 21 octobre 1991, JTT, 1991, p 489 ; JT, 1991, p 839 ; Bull, 1992, p 141 ; RW, 1991-1992, p 919.36 C. trav Liège, ( section Namur ), 5 décembre 1989, Bull. Ass, 1990, p 304, note de LVG.37 Cass, 17 octobre 1988, Pas, 1989, p 165 ; RDS, 1989, p 47 ; JTT, 1989, p 105 ; RW, 1988-89, p 982 ; Cass, 7 novembre 1994, Bull, 1994, p 914 ; Chron. D.S., 1995, p 121 ; RW, 1994-95, p 1167 ; Cass, 3 octobre 1988,

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ordre d’idée, nous relèverons, l’arrêt de la Haute Cour du 3 octobre 1998 qui enseigne que les dispositions de la loi de 1971 qui déterminent les conditions d’existence de l’accident sont d’ordre public, et par conséquent, l’arrêt qui s’appuie sur un aveu extrajudiciaire pour établir la preuve d’un accident viole cette règle38 Ceci nous donne l’occasion de mettre en lumière - dans les hypothèses discutées d’accident mortel - le délicat problème de l’époux ou l’épouse qui s’oppose à la réalisation d’une autopsie, seul moyen de preuve dont dispose l’assureur loi pour établir qu’il n’existe pas de relation causale entre le décès et l’exécution du travail. La cour du travail de Bruxelles dans un arrêt du 17 janvier 1991 a, pour régler cet épineux problème, tout en réaffirmant le caractère d’ordre public de la loi, estimé que «  la vérification d’office par le juge que les dispositions de la loi ont été observées ne l’autorise pas à se substituer à l’appelant ( l’époux de la victime ) qui, sur la base d’éléments objectifs, accepte le point de vue de l’intimée ( l’assurance loi ) que la mort de M.P. son épouse, n’est pas due à un accident sur le chemin du travail au sens de la loi du 10 avril 1971 »39 La chambre des référés de la cour du travail de Bruxelles, confrontée à la même situation, franchira un pas supplémentaire en observant que les parties, pour éviter l’autopsie, peuvent s’entendre sur les termes d’un accord dans lequel elles constatent que la mort de la victime n’est pas dû au fait de l’exécution du contrat de travail et que celle-ci n’a eu aucun retentissement sur le décès.40

La troisième règle concerne les droits à l’indemnisation due à la victime et à ses ayants droit. Ces dispositions sont d’ordre public41, partant, le juge a le devoir de suppléer d’office la réclamation de la victime qu’il jugerait insuffisante. On ne s’étonnera, dès lors, pas en lisant l’arrêt prononcé par la cour de Cassation le 4 septembre 198942 qui confirma une décision rendue le 30 novembre 1987 par la cour du travail de Bruxelles qui fixa d’initiative l’indemnisation de l’incapacité temporaire de la victime sur la base d’une rémunération mensuelle brute de 36.471 francs et non de 32.451 francs comme le travailleur le sollicitait. Il faut, cependant, garder à l’esprit que le juge qui fonderait sa décision sur un motif invoqué d’office, sans avoir laissé aux parties la faculté de le contredire, violerait les droits de la défense.43

Section 2 : Définition.

2.1 Généralités.Dans un arrêt du 26 mai 1967, la cour de Cassation définit l’accident du travail comme «  l’événement soudain qui produit une lésion entraînant une incapacité de travail ou la mort du travailleur et dont la cause ou l’une des causes est extérieure à l’organisme de la victime. ».44 Le législateur s’est, à l’évidence, inspiré de la notion d’accident du travail retenue par la Haute Cour lors de la rédaction de l’article 7 de la loi de 1971 mais il l’a cependant amendée

Bull, 1989, p 115 ; Chron. D.S., 1989, p 41 ; JT, 1989, p 364 et note ; comparer avec Trib. trav. Nivelles, 5 mars 1991, Bull. Ass, 1992, p 44 et note de LVG.38 Cass, 3 octobre 1988, Chron.D.S., 1989, p 41.39 Bull Ass, 1991, p 313 et note LVG.40 21 janvier 1991, et aussi Trib trav Nivelles, 5 mars 1991, Bull Ass, 1992, p 40 et note LVG. Autant préciser que si cette position n’est pas des plus orthodoxe, on voit bien mal, si les parties s’accordent, sauf dans l’intérêt de la loi, qu’un pourvoi en cassation soit un jour exercé.41 Cass, 28 février 1994, Bull, 1994, p 213 ; Arr. Cass, 1994, p 211 ; RW, 1994-95, 722 ; toutes les dispositions de la loi ne sont cependant pas d’ordre public : voir M. BOLLAND, «  Lésions corporelles, accidents de travail et ordre public », RGAR, 1994, 12311.42 Cass, 4 septembre 1989, JTT, 1989, p 487 et note ; RW, 1989-1990, p 771 ; Bull, 1990, p 1 ; JLMB, 1989, p 1422.43 Cass, 21 octobre 1996, JTT, 1997, p 30 et note ; Chron.D.S., 1997, p 95 ; JT, 1997, p 458 ; Bull, 1996, p 1010 ; Dr Circ, 1997, p 153.44 RCJB, 1968, p 273.

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sur un point important puisque la lésion affectant la victime ne doit pas nécessairement entraîner une incapacité de travail ou le décès.45

Un rapide examen nous permet de constater que plusieurs éléments composent cette définition : 46

Un accident survenu dans le cours et par le fait de l’exécution du contrat de travail ; Une lésion ; Un événement soudain ; Une cause extérieure.47

2.2 L’accident doit survenir dans le cours et par le fait de l’exécution du contrat de travail.L’arrêt prononcé par la cour de Cassation le 26 septembre 1989 rappelle que «  l’accident survient dans le cours de l’exécution du contrat de travail lorsque, au moment de l’accident, le travailleur est soumis à l’autorité de l’employeur(…) en principe, le travailleur se trouve sous l’autorité de l’employeur tant que sa liberté personnelle est limitée en raison de l’exécution du travail ; (…) dès lors, le lien de subordination n’est pas nécessairement limité au temps de travail ; (…) par conséquent, l’exécution du contrat de travail ne coïncide pas toujours avec l’exécution du travail proprement dite » 48.Le fait de l’exécution du contrat de travail s’entend, quant à lui, comme englobant tout événement que le milieu du travail a rendu possible, et partant, il ne se limite pas aux risques spécialement engendrés par la convention.

La Haute Cour retient que le juge justifie légalement sa décision de considérer qu’un accident ne s’est pas produit durant et par le fait de l’exécution du contrat de travail, lorsqu’il est démontré que celui-ci s’est réalisé dans un club de vacances à l’étranger, pendant un séjour organisé par un fournisseur de l’employeur, par qui le travailleur victime de l’accident avait été désigné pour y participer, sans être cependant chargé, à cette occasion, de l’une ou l’autre mission en relation avec son contrat de travail.49

Dans la même optique, on épinglera l’arrêt de la cour de Cassation du 5 septembre 1988, qui confirme la décision qui tranche que le travailleur d’une mutualité qui accompagne volontairement des vacanciers après son travail lors de leur départ en classe de neige et assiste son épouse, employée au service de promotion de cette mutuelle, dans l’exécution de son travail, ne fournit pas en fait de prestations relatives à son contrat de travail.50

45 Ainsi un bris de lunettes peut être indemnisé en loi de même que des frais médicaux voir Cass, 25 mars 1985, Bull Ass, 1985, p 441 ; voir aussi si les lunettes ne sont pas portées en permanence : C. trav Liège, 23 octobre 1989, Chron.D.S, 1990, p 134 ; voir L. VAN GOSSUM, «  Les accidents du travail », De Boeck, 1994, pp30 et 102.46 articles 7 et 9 de la loi ; voir J. CLESSE et V NEUPREZ, «  La notion d’accident du travail », Chroniques de droit à l’usage du Palais, tome VI, 15 avril 1989 ; M. BOLLAND, «  Inédits d’accidents du travail : la notion d’événement soudain », JLMB, 1993, p 192 ; Trib trav Liège, 7ième chambre, 2 mai 1991, R.F, 731 inédit.47 J. RUSSE, «  Evénement soudain et cause extérieure en accident du travail, état de la jurisprudence », JTT, 1995, p 117 et suivantes.48 Bull, 1990, p 106 ; RW, 1989-1990, p 680 et note ; voir encore Cass, 22 février 1993, JT, 1993, p 516 ; Chron. D.S., 1993, p 312 ; Bull, 1993, p 200 ; Cass, 5 juin 1989, JTT, 1990, p 53 et note ; Bull, 1989, p 1057; c’est au travailleur qu’il appartient de démontrer que l’accident se produit durant l’exécution du contrat. Pour la cour du travail de Gand, la simple déclaration de l’employeur selon laquelle il a accompli à domicile un travail pour l’employeur après les heures de travail ne suffit pas à cet effet, même si l’employeur confirme cette déclaration : 12 décembre 1990, Bull Ass, 1991, p 303, note LVG ; JTT, 1991, p 208.49 Cass, 17 octobre 1988, Bull, 1989, p 167 ; RW, 1988-1989, p 960.50 Cass, 5 septembre 1988, Pas, 1989, p 7 ; JTT, 1989, p 109 ; voir aussi Bruxelles, 21 février 1994, Bull. Ass., 1994, p 536, note de L. VAN GOSSUM la cour constate que le fait pour un directeur chargé de la gestion journalière de soulever des bonbonnes de gaz, sans être en quoi que soit soumis à la contrainte de l’autorité d’un

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De même, la travailleuse qui est victime d’un agression alors qu’elle stationne son véhicule dans un parking, sans qu’elle n’y soit contrainte professionnellement, ne peut soutenir qu’elle s’y est transportée en raison de son contrat de travail puisqu’elle pouvait parfaitement exécuter celui-ci sans jamais s’y rendre.51

La cour suprême a cassé un arrêt de la cour du travail de Bruxelles du 21 septembre 1987 52qui observe qu’est victime d’un accident du travail la travailleuse qui durant son heure de pause est remorquée par son employeur et, lors du trajet, perd le contrôle de son cyclomoteur pour être traînée sur quelques mètres avant l’immobilisation de la voiture aux motifs qu’il ressort de l’arrêt que « l’heure de la pause de midi survenue, la victime disposait de son temps sans que l’employeur pût lui imposer son autorité ; que la circonstance que l’accident est intervenu dans le dépannage du véhicule comme tout tiers aurait pu le faire, est étrangère à l’exécution du contrat de travail ; que l’arrêt, qui décide qu’au moment de l’accident la victime, se trouvait sous l’autorité de son employeur parce qu’il contribuait au dépannage, méconnaît la notion légale d’autorité, et par voie de conséquence, celle de l’accident survenu au cours de l’exécution du contrat de travail ».53 En revanche, il ne peut être déduit de la seule circonstance que, pendant le temps de repos, un travailleur exerce une activité qui lui a été interdite par l’employeur, « il en résulte que cette occupation ne constitue pas une occupation normale pendant le temps de repos et que, pour cette raison, l’accident dont il a été victime, n’est pas un accident du travail. »54

Il a été jugé qu’est constitutif d’accident survenu dans le cours de l’exécution du contrat celui qui est la conséquence : de l’exécution par le travailleur d’une mission confiée par son employeur pour les besoins

et dans l’intérêt du service.55

d’une soirée passée à quai par un marin de la marine marchande un samedi soir, dès lors, qu’il est tenu de rester en permanence durant la traversée à la disposition de son employeur.56

d’un déplacement effectué par le travailleur, conformément à l’ordre de son employeur, entre deux sièges d’exploitation.57. Il en va de même pour des déplacements réalisés par un technicien, de son domicile vers chez ses clients, dans le but d’effectuer des réparations urgentes qui lui ont été confiés par radio ou par téléphone.58

d’une fête de fin d’année organisée par l’entreprise et à laquelle le travailleur à l’obligation morale et professionnelle d’y assister.59

d’une agression dont est victime un concierge un jour de repos, car, selon la cour du travail de Bruxelles, il entre dans ses missions de se préoccuper des bruits anormaux

organe ou d’un représentant de la société ne peut un accident du travail.51 Cass, 22 février 1993 précité.52 Chron.D.S., 1998, p 9053 Cass, 3 octobre 1988, Bull, 1989, p 115 ; Chron. D.S., 1989, p 41.54 Cass, 7 mars 1988, Pas, 1988, p 812.55 C. trav Mons, 6 juin 1995, RGAR, 1997, n° 12.850 ; voir sur ce sujet : Cass, 3 mai 1978, Pas, 1978, p 1001 arrêt dans lequel la Cour de cassation retient «  qu’un travailleur, obligé de séjourner plusieurs jours hors de chez lui pour l’exécution de sa mission, exécute son contrat de travail pendant toute la durée de ce séjour ; que l’accident survenu pendant ce séjour mais à un moment où le travailleur n’exécutait pas sa mission est néanmoins survenu au cours de l’exécution du contrat de travail ; que cet accident est, dès lors, un accident du travail, sauf s’il n’a pas été causé par le fait de l’exécution du contrat de travail »56 C. trav Anvers, 13 août 1993, Chron.D.S., 1996, p 587.57 C. trav Bruxelles, 3 janvier 1994, Bull Ass, 1996, p 240 et note LVG.58 C. trav Bruxelles, 12 mars 1990, Jur. Trav Brux., 1990, p 216.59 C. trav Anvers, 30 janvier 1990, Chron.D.S, 1992, p 197 ; C. trav Anvers 18 juillet 1989, Chron.D.S, 1992, p 213.

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venant de l’immeuble mais extérieurs à son appartement.60. Cette position est peut être plus discutable. En effet, on peut se demander si le concierge n’est pas intervenu au même titre que n’importe quel autre occupant de l’immeuble, et partant, sans être sous l’autorité de son employeur.

Par contre, le travailleur qui se promène dans les bâtiments de l’entreprise plus de cinq heures avant le début de son travail, sans qu’il n’y soit obligé par son contrat de travail, ne se trouve pas, à cet instant, sous l’autorité de l’employeur.61. Il a encore été jugé que l’accident qui se réalise lors d’une épreuve de sélection – parce qu’elle ne peut être assimilé à un contrat de travail – ne peut être qualifié d’accident du travail.62

Nous savons que la suspension du contrat de travail paralyse l’exécution des obligations principales de cette convention 63. Certaines causes de suspension peuvent, néanmoins, laisser subsister des obligations accessoires dont le non respect peut être révélateur d’un manquement contractuel64 de sorte qu’un sinistre survenu au cours d’une période de suspension peut être constitutif d’un accident du travail, si en dépit de celle-ci, l’exécution du contrat a été poursuivie par les parties ou si c’est sur injonction de son employeur que le travailleur agissait lorsqu’il a été victime d’un accident. Le tribunal du travail de Nivelles en a conclu que sauf disposition particulière figurant dans le contrat, un travailleur n’a pas l’obligation de prévenir son employeur de l’imminence de la reprise du travail et, dès lors, s’il est victime d’un accident à cette occasion, il ne peut s’agir d’un accident du travail. 65

Pour clore ce sujet, il nous semble opportun de rappeler que l’accident qui se produit dans le cours de l’exécution du contrat de travail est présumé, jusqu’à preuve du contraire, survenu par le fait de cette exécution.66. A ce propos, la cour du travail de Mons relève que cette présomption n’est pas renversée par la seule imprécision de la déclaration d’accident et par les contradictions que celles-ci peut présenter avec les renseignements recueillis par l’expert.67 La cour de Cassation estime également que « l’assureur loi qui supporte les conséquences d’un premier accident, qui est un accident du travail, doit aussi supporter les conséquences d’un second accident, qui n’est pas un accident du travail, lorsque les lésions produites par le premier accident ont facilité ( fût-ce partiellement ) la survenance des lésions produites par le second accident ».68

60 C. trav Bruxelles, 15 juin 1992, Chron. D.S., 1994, p 297.61 C. trav Anvers, 10 avril 1990, Chron. D.S., 1992, p 212.62 C. trav Liège, 7 novembre 1989, Bull Ass, 1990, p 86, note LVG ; JT, 1990, p 558.63 pour le travailleur : obligation de fournir un travail et pour l’employeur l’obligation de faire travailler et l’obligation de rémunérer.64 En effet, un travailleur peut être licencié pour motif grave pendant des périodes de suspension du contrat, par exemple s’il ne justifie plus de son absence ou travaille chez un concurrent durant les périodes de vacances annuelles.65 Voir Trib trav Nivelles ( section Wavre ) 6 mai 1992, RGAR, 1994, n° 12.264, le tribunal ne partage pas l’opinion de la cour du travail d’Anvers qui, dans un arrêt du 21 octobre 1975 qu’il cite, relève «  qu’un travailleur qui se trouve dans une période de suspension de son contrat de travail a pour obligation d’avertir son employeur de sa possibilité de reprendre le travail, pourvu qu’il connaisse cette possibilité avec certitude et précision ; que ceci constitue incontestablement une obligation du travailleur, résultant de son contrat de travail ; que si, à l’occasion de pareille exécution du contrat de travail, le travailleur est victime d’un accident, ce dernier correspond au critère légal de l’accident du travail ou de l’accident sur le chemin du travail »; voir encore Trib trav Anvers, 9 novembre 1995, Bull Ass, 1996, p 275 et note de GHYSELS, Y ; C. trav Liège, 17 novembre 1993, JLMB, 1994, p 632 ; JTT, 1994, p 189 et note.66 Voir article 7, alinéa 2 de la loi de 1971.67 19 mai 1995, JTT, 1995, p 482 ; Bull. Ass, 1996, p 58 et note, in casu la déclaration relatait la perte d’équilibre survenu lors de travaux de peinture qui a occasionné une entorse à la cheville droite.

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2.3 La lésion.La cour de Cassation rappelle que la loi du 10 avril 1971 exige que la victime établisse la preuve d’une lésion69 de sorte que le juge ne puisse se contenter de sa seule probabilité.70 La preuve de la lésion peut résulter d’un certificat médical et de la déclaration d’accident, associé à la déclaration de la victime.71 Il importe de ne pas confondre préjudice soudain et événement soudain. La cour du travail de Bruxelles dans un arrêt du 2 janvier 1995 - relatif à un accident du travail survenu dans le secteur public - fait une très juste application de ce principe en jugeant que la lésion et l’événement soudain sont deux éléments différents dont le premier n’est que la conséquence du second.72

Durant la période recensée, il a été jugé : que le fait pour une employée d’être agressée, même de son chef, constitue une lésion73. que le cœur n’a pas la propriété de pouvoir s’arrêter sans dommage, si bien que le

dérangement ou l’arrêt de cet organe vital constitue une lésion qui se concrétise par une modification de sa structure.74.

que la manipulation de ballots remplis de sacs en papier constitue un travail lourd qui peut entraîner des atteintes corporelles.75

que soulever une plaque de fer en position accroupie au dessus d’un pont roulant peut entraîner des lésions.76

En revanche, la cour de Cassation retient que « des articles 7, alinéa premier, 10 et 12 de la loi du 10 avril 1971, il résulte, d’une part, que la lésion est un élément constitutif de l’accident du travail, d’autre part, que la mort de la victime est une conséquence de cet accident ; que la mort de la victime n’est pas une lésion au sens de l’article 7 alinéa 1 de la loi de 1971. »77

Selon l’enseignement de la Haute cour, il faut dès lors distinguer la lésion et les séquelles de l’accident.78

68 Cass, 26 mars 1990, JTT, 1990, p 261 et note ; Bull, 1990, p 869 ; Chron.D.S, 1990, p 291, la Cour a cassé l’arrêt attaqué car en l’espèce, les juges d’appel refusaient de considérer que l’assureur-loi n’est tenu de supporter les conséquences du second accident que si celui-ci est provoqué, fût ce partiellement, par les lésions produites par le premier accident ; que dès lors, ils violent l’article 7 de la loi du 10 avril 1971.69 Cass, 21 décembre 1992, Bull, 1992, p 1398 ; RW, 1992-1993, 1205 ; Trib trav Bruxelles, 15 janvier 1993, Bull. Ass, 1993, p 225, note de LVG ; Trib trav Bruxelles 26 juin 1990, Chron. D.S., 1991, p 36 ; C. trav Gand 22 juin 1995, Bull. Ass, 1996, p 251 et note de LVG ; La cour du travail de Liège qui constate que le législateur a réduit, en faveur du travailleur les conditions probatoires, indiquent, qu’en contrepartie, il importe de se montrer rigoureux dans l’appréciation des éléments de preuves rapportés quant à la lésion : JTT, 1994, p 426.70 Cass, 27 septembre 1993, Chron. D.S., 1994, p 136 et note ; Bull. Ass, 1994, p 53 et note de LVG ; C. trav Liège, ( section de Neufchâteau ) 21 janvier 1998, JTT, 1998, p 483, note.71 C. Trav Gand, 19 avril 1990, JTT, 1990, p 269 ; voir encore Trib trav Courtrai, 9 juillet 1993, TGR, 1993, p 161 ; Le travailleur peut faire la preuve de la lésion par toutes voies de droit, la seule déclaration de bonne foi ne suffit pas pour le tribunal du travail de Liège : 17 mars 1994, Bull Ass, 1995, p 385 et note VAN GOSSUM.72 JTT, 1995, p 474, cette jurisprudence est transposable dans le secteur privé ; voir C. trav Bruxelles, 13 février 1995, Bull Ass, 1996, p 245, note Y. GHYSELS.73 Trib trav Dinant, 1 juin 1989, Chron. D.S., 1990, p 138 et note de J. JACQMAIN.74 C. trav Bruxelles, 6 novembre 1989, Chron. D.S., 1990, p 151 et note ; JTT, 1990, p 273 ; Jur. Trav. Brux., 1990, p 38.75 C. trav Bruxelles, 8 novembre 1993, Bull. Ass, 1994, p 242 et note de F. AERDE ; Rappelons que selon l’enseignement de la cour de cassation, on ne peut se contenter de vraisemblances quant à l’existence de la lésion. Une fois la lésion et l’événement soudain établis, c’est à l’assurance - loi qu’il appartient de renverser la présomption de causalité visée par l’article 9 de la loi en prouvant que la lésion n’est pas consécutive à l’événement soudain ou que la lésion est due exclusivement à une cause endogène.76 C. trav Gand, 4 octobre 1990, JTT, 1991, p 142 et note ; voir la remarque effectuée à la note précédante.77 Cass, 30 septembre 1996, JTT, 1997, p 32 et note ; Dr. Circ. 1997, p 85 ; JLMB, 1997, p 1072 et note de BOLLAND ; Bull, 1996, 880.78 Sur les conséquences de cette distinction voir M. BOLLAND, «  L’article 9 de la loi du 10 avril 1971 : simple ou double présomption », RGAR, 1997, 12761 ; JLMB, 1997, p 1075. La question est de savoir si la présomption de causalité de l’article 9 entre l’événement soudain et la lésion s’applique ou non aux séquelles de l’accident.

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2.4 L’événement soudain.

2.4.1 Généralités.La notion d’événement soudain suscite une abondante jurisprudence. En effet, celle-ci n’a pas été définie par le législateur. L’article 9 de la loi de 1971 dispose uniquement qu’il suffit à la victime ou à ses ayants droit d’établir l’existence d’une lésion et celle d’un événement soudain qui a pu la provoquer, pour que celle-ci soit présumée, jusqu’à preuve du contraire, trouver son origine dans un accident.79

L’accident du travail se distingue, dès lors, des maladies professionnelles, par la survenance d’un élément brutal susceptible d’être localisé dans le temps et dans l’espace.80

Les cours et tribunaux se sont efforcés, au fil du temps, de préciser le concept d’événement soudain. La cour de Cassation rappelle que «  l’exercice habituel et normal de la tâche journalière peut être un événement soudain à la condition que dans cet exercice puisse être décelé un élément qui a pu produire la lésion ; ( …) il n’est pas exigé que cet élément se distingue de l’exécution du contrat de travail ».81 L’événement soudain ne doit dès lors pas être anormal ou exceptionnel.82 Comme pour la lésion, l’événement soudain ne doit pas être possible mais certain.83. La Haute Cour précise également que «  la lésion ne peut être due uniquement à l’état physiologique de la victime, mais ‘les articles 7 et 9 de la loi de 1971’ ne requièrent pas que la cause ou une des causes de l’événement soudain soit extérieure à l’organisme de la victime ; que notamment une chute ne cesse pas d’être un événement soudain, au sens des articles précités, parce qu’elle a été causée par un défaut de l’organisme de la victime ».84

Si l’événement soudain ne doit pas forcément être instantané85, il importe toutefois, comme l’énonce la cour du travail de Liège dans un arrêt du 22 mars 1995, que le travailleur préjudicié par un accident prouve l’existence d’une agression subite de son organisme, en dépit de quoi, il ne peut être question d’un accident du travail.86

79 Voir notamment : Cass, 12 février 1990, Pas, 1990, p 686 ; Cass, 7 janvier 1991, JTT, 1991, p 78 et note.80 Voir Trib. trav. Bruxelles, 13 octobre 1992, JDS, 1992, p 493 ; C trav Gand, 19 novembre 1992, Bull. Ass, 1993, p 25, note F. VAN AERDE ; Trib. trav Liège, 16 décembre 1993, Bull. Ass , 1994, p 554 ; C trav Mons, 25 mai 1994, JTT, 1994, p 427 et note ; Bull. Ass, 1995, p 111 et note L. VAN GOSSUM ; Trib trav Mons, 13 novembre 1996, Bull. Ass, 1997, p 98, note L. VAN GOSSUM.81 Cass, 19 février 1990, Bull, 1990, p 701 ; JLMB, 1990, p 656 ; JTT, 1990, p 264 ; RW, 1990-1991, 393 et note ; Cass, 20 janvier 1997, JTT, 1997, p 292 ; Dr. Circ.,1997, p 209 ; Bull, 1997, p 98 ; Cass, 4 février 1991, Bull, 1991, p 537 ; Bull. Ass., 1991, p 278 et note LVG ; Cass, 26 février 1990, Chron.D.S., 1990, p 245 ; JTT, 1990, p 263 ; Bull, 1990, p 754 ; Cass, 25 janvier 1988, RGAR, 1990, n° 11.632 ; Bull, 1988, p 607 ; RW, 1988-89, 1127 ; Cass, 16 juin 1997, Chron.D.S., 1998, p 420 note de P. PALSTERMAN ; Cass , 2 février 1998, Chron.D.S, 1998, p 422 ; C. trav Liège, ( section de Neufchâteau ) 21 janvier 1998, JTT, 1998, p 483, note.82 C. trav Liège, 21 février 1994, Bull. Ass, 1995, p 102 et note LVG ; C. trav Liège, 17 novembre 1993, JTT, 1994, p 191 et note.83 Cass, 6 mai 1996, JTT, 1997, p 34 et note ; Chron.D.S., 1996, p 620 ; Bull, 1996, p 421 ; Cass, 27 septembre 1993, Bull Ass, 1994, p 53, note LVG ; Cass, 10 décembre 1990, JTT, 1991, p 78 ; Bull, 1991, p 348 ; C. trav Liège, 18 janvier 1995, JTT, 1995, p 483.84 Cass, 7 janvier 1991, JTT, 1991, p 78 et note ; RDS, 1991, p 24 ; Bull, 1991, p 414 ; RGAR, 1992, n°12.042 ; RW, 1990-1991, 1405. Cet arrêt a été prononcé à propos d’un accident survenu sur le chemin du travail. Il peut, dès lors, y avoir des différences- au niveau probatoire dans le chef de l’assurance loi - avec l’accident de travail sensu stricto - puisque celui-ci requiert toujours un élément causal ( l’accident doit avoir été provoqué par le fait de l’exécution du contrat ) au contraire de l’accident sur le chemin du travail pour lequel il ne faut plus démontrer un risque résultant du trajet.85 Voir Cass, 5 novembre 1965, Pas, 1966, p 299 ; Cass, 1 avril 1985, Pas, 1985, p 981 ; C. trav Liège, 28 mai 1990, JTT, 1991, p 213 ; RDS, 1990, p 382.

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2.4.2 La jurisprudence recensée.La majeur partie des décisions publiées relative à la notion d’événement soudain se focalise d’une part sur les faits et gestes de la vie courante et d’autre part sur la répétition d’un même geste professionnel.

De ce fait, n’ont pas été considéré comme événement soudain, à défaut, d’établir la preuve d’un élément distinct de l’exercice normal de la profession : le fait pour un employé de se lever et de percuter le tiroir de son bureau resté ouvert.87

le fait pour un travailleurs de se retourner quand il marche.88

le fait pour une personne de 43 ans de travailler en station debout durant une heure et par une température de 4 ou 5 degrés sous abri un 11 novembre.89

le fait de soulever un sac poubelle.90

le fait pour un travailleur d’une entreprise de transformation d’aluminium d’être piqué par insecte.91

le fait pour un travailleur de se pencher et de perdre son appareil auditif.92

le fait de chuter intentionnellement dans les escaliers.93

le fait de se relever d’une position agenouillée94 ou d’effectuer en position assise un mouvement de rotation du tronc.95

le fait pour un travailleur qui dispose de quatre jours pour préparer un voyage en Asie du Sud et du Sud-Est et qui décède à la fin de son séjour d’une quinzaine de jours, alors qu’il s’agissait de sa quatrième mission dans cette région du monde.96

le fait de rouler en vélo entre des véhicules garés.97

le fait de pendre du linge lessivé.98

le fait pour le travailleur d’invoquer un rythme soutenu de travail et une brève discussion survenue 24 heures plus tôt avec un supérieur.99

le fait pour un travailleur, en état d’ivresse, de chuter dans un point d’eau.100

le fait de se pencher en avant pour prendre un petit banc qui devait être déchargé.101

86 JTT, 1995, p 473 ;généralement la jurisprudence retient comme laps de temps de l’événement soudain une journée de travail ; voir aussi C. trav Mons, 25 mai 1994, JTT, 1994, p 427 et note ; Bull Ass, 1995, p 111 et note de LVG ; O. MICHIELS, «  Quelques précisions sur la notion d’événement soudain en matière d’accident du travail », Idj, 1996/3, p 82.87 C. trav Liège, 20 avril 1994, JTT, 1994, p 428 et note.88 C. trav Gand, 28 février 1991, Bull. Ass, 1992, p 49 et note de F. VAN AERDE ; C. trav Liège, ( section de Neufchâteau ) 21 janvier 1998, JTT, 1998, p 483, note89 C. trav Mons, 27 avril 1994, Bull. Ass, 1995, p 107 note L. VAN GOSSUM ; RGAR, 1996, n° 12.689.90 Trib trav Bruxelles, 20 décembre 1994, Bull. Ass , 1995, p 252 note de M. BOLLAND ; C. trav Bruxelles, 18 mars 1996, Bull. Ass, 1996, p 624, note Y. GHIJSELS.91 Trib trav Mons, 20 mai 1992, Bull. Ass, 1993, p 29 et note de LVG.92 Trib trav Anvers, 21 mai 1992, Bull. Ass, 1992, p 464, et note LVG.93 C. trav Anvers, 20 juin 1989, Chron.D.S., 1992, p 213.94 C. trav Anvers, 13 décembre 1996, Bull. Ass, 1997, p 265, note LVG ; Trib trav Liège, 17 janvier 1997, Bull Ass, 1997, p 450, note L. VAN GOSUM ; C. trav Mons, 4 mars 1998, JTT, 1998, p 482 et note; voir sur le simple fait de se relever : C. trav. Liège, 21 février 1994, Bull. Ass, 1995, p 102.95 Trib. trav Anvers, 7 mars 1991, Bull. Ass, 1991, p 846 et note LVG.96 C. trav Mons, 5 mars 1997, RGAR, 1998, n° 12.959, JTT, 1997, p 294 ; Bull. Ass, 1997, p 439 et note ; en l’occurrence, il n’était pas en outre établi que la température ait marqué des variations brusques ni que la veille du décès ait été stressante.97 Trib rrav Bruxelles, 15 janvier 1993, Bull. Ass, 1993, p 225 et note LVG.98 C trav. Gand, 23 mars 1995, Bull. Ass, 1996, p 421 et note.99 Trib. trav Liège, 16 décembre 1993, Bull. Ass, 1994, p 554, in casu, l’intéressé avait manifesté peu de temps avant l’accident des symptômes douloureux qui pouvait évoquer des problèmes cardiaques.100 C. trav Bruxelles, 2 mars 1992, JDS, 1992, p 342 ; Bull. Ass, 1994, p 66 et note de F. VAN AERDE ; comparer avec Cass, 10 décembre 1990, JTT, 1991, p 78 et note ; RW, 1990-91, 1337 ; Bull, 1991, p 348.101 C. trav Gand ( section Bruges ) 27 février 1992, Bull. Ass, 1992, p 659.

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le fait d’effectuer un travail lourd pendant 3 jours.102

En réalité, la jurisprudence considère ces gestes comme banals et anodins et qui ne différent, d’aucune manière, d’efforts consentis à d’autre moment.103

La répétition d’un même geste professionnel dont le dernier entraîne le dépassement du seuil de tolérance de la victime n’est, en règle générale, pas assimilée, par une jurisprudence largement majoritaire, à un événement soudain104 alors que la cour de Cassation a admis, que celui-ci peut être constitué par l’ultime geste d’une activité professionnelle sans cesse répétée pendant un certain laps de temps.105

Ont été considéré comme événement soudain : le fait pour un travailleur - victime d’un infarctus du myocarde – de fournir un effort pour

se rendre à son travail à vélo dans la froideur de l’air matinal 106 ou par une journée pluvieuse et venteuse.107

le fait de porter un coup volontaire à un autre travailleur, lors d’une rixe, fût-ce pour se défendre.108

le fait pour un travailleur, lors d’une fête d’une association professionnelle, de se livrer à une danse spectaculaire et endiablée.109

le fait de se relever si celui-ci est accompagné d’un effort et d’un faux mouvement.110

Le fait d’effectuer un mouvement pour passer d’une position accroupie semi-prolongée à la position debout le tout en tenant à bout de bras un bac pesant cinq kilos.111

le fait pour l’employeur de donner un ordre destiné à humilier le travailleur ce qui occasionne à ce dernier un choc psychologique.112

le fait que le travail de la victime soit plus ardu que d’habitude et nécessite, par conséquent, un effort plus important – pendant 4 heures - dans des conditions inconfortables.113.

le fait pour un travailleur d’effectuer une réparation urgente sur un haut fourneau et de travailler ensuite pendant près de 24 heures.114

le fait de trébucher sur un objet traînant par terre dans l’entreprise.115

102 C trav Gand, 22 juin 1995, Bull. Ass, 1996, p 251 et note ; C. trav Gand, 19 novembre 1992, Bull. Ass, 1993, p 25 et note de F. VAN AERDE.103 Voir notamment Trib trav Liège, 17 octobre 1991, Bull. Ass, 1992, p 63.104 C. trav Liège, 18 janvier 1995, JTT, 1995, p 483 ; C. trav Mons, 12 juillet 1994, Bull. Ass, 1995, p 115 et note LVG ; C. trav Liège, 11 septembre 1989, Bull. Ass, 1991, p 74 et note LVG ; C. trav Mons, 25 mai 1994, JTT, 1994, p 427, note ; Bull. Ass, 1995, p 111 et note ; Trib. trav Bruxelles, 13 octobre 1992, JDS, 1992, p 493 ; C. trav Liège, 3 octobre 1991, JLMB, 1992, p 413, note N. SIMAR.105 Cass, 21 septembre 1987, Pas, 1988, p 84 ; voir aussi C trav. Liège, 9 juin 1986, RGAR, 1988, 11.348.106 Cass, 25 septembre 1989, JTT, 1990, p 52 ; Bull, 1990, p 104 ; RDS, 1990, p 75.107 Cass, 7 janvier 1991, RDS, 1991, p 23 ; JTT, 1991, p 202 ; Bull, 1991, p 412 ; RGAR, 1992, n° 12041 ; voir aussi C. trav Gand, 9 novembre 1995, Bull Ass, 1996, p 261, note L. VAN GOSSUM.108 Cass, 8 mars 1993, JT, 1993, p 515 ; Bull 1993, p 259.109 C. trav Anvers, 18 juillet 1989, Chron. D.S., 1992, p 213.110 C. trav Mons, 1 avril 1994, Bull. Ass, 1994, p 549 comp. Avec C.trav Bruxelles, 13 décembre 1995, Bull. Ass, 1996, p 443 qui considère que le simple fait de se relever d’une position accroupie est un geste banal de la vie courante. 111 C. trav Bruxelles, 28 novembre 1995, Bull. Ass, 1996, p 438 et note ; comparer avec Trib trav Gand 18 janvier 1991, Bull Ass, 1991, p 605, note LVG.112 C. trav Liège, 21 mars 1994, Chron.D.S., 1994, p 317.113 C. trav Liège, 17 novembre 1993, JTT, 1994, p 191 et note ; voir aussi C. trav Anvers ( section Hasselt ) 20 mars 1991, Limb. Rechtsl., 1992, p 182 et note de J. MARTENS qui concerne des efforts continus pendant 6 heures ayant entraînés une décompensation cardiaque.114 C. trav Liège, 8 octobre 1990, JTT, 1991, p 94 et note ; JLMB, 1991, p 306, note de N. SIMAR.115 C. trav Liège, 28 septembre 1992, JTT, 1993, p 20 ; voir sur le quai d’une gare : C. trav Liège, 19 décembre 1991, JTT, 1993, p 212 ; comparer avec Trib trav Termonde ( section Saint-Nicolas ) 21 novembre 1995, JTT,

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le fait d’effectuer des mouvements répétés de rotation de la main droite, pendant une journée de travail, s’il ne s’agit pas uniquement de gestes banals et insignifiants.116

le fait de travailler dans un climat de travail lourdement stressant117 amplifié par des relations humaines tendues et détériorées.118

le fait d’effectuer un mouvement brusque au cours de la descente d’un escalier119 ou d’un marche pied.120

le fait pour un travailleur, ordinairement occupé comme peintre, d’être chargé exceptionnellement de lever des seaux de mortier.121

Le fait de charger un sac pondéreux dans le coffre d’une voiture située en contrebas du quai de chargement.122

le fait de subir un brusque contraste de température entre la chaleur d’un wagon et le froid intense de l’extérieur.123

le fait de subir une succession de faits concrets qui ont engendré un surmenage.124

le fait pour un travailleur, qui pour se rendre à son travail, est obligé de dégager son véhicule enneigé et de le pousser pour le faire démarrer.125

le fait pour un travailleur, occupé comme chauffeur privé du directeur de la société, de tondre une grande pelouse pendant quelques heures sous la chaleur.126

le fait pour un travailleur d’attendre inopinément pendant plus de cinq heures la venue d’un client important à la fin de la semaine.127

le fait de se pencher en nettoyant.128

des violences caractérisées, un jour de classe, d’une bande de jeunes nouvellement inscrits dans l’établissement et renvoyés à la suite de ces violences.129

2.4.3 La preuve de l’événement soudain.Nous savons que dès l’instant où la victime n’apporte pas la preuve de la survenance d’un événement soudain, il ne peut être question d’accident du travail.130 Cette preuve peut se faire par toutes voies de droit. De ce fait, la déclaration du préjudicié – fut-elle tardive131 - peut être prise en compte pour autant toutefois qu’elle soit corroborée par d’autres éléments tels des

1996, p 256 et note ; comparer avec Trib trav Tongres, 25 mars 1998, Bull Ass, 1998, p 464, note GHIJSELS Y. ; Trib trav Tongres, 25 mars 1998, Bull Ass, 1998, p 461 et note jugements dans lesquels le tribunal ne constate aucune défectuosité affectant le sol.116 C. trav Liège, 12 avril 1992, Chron.D.S., 1994, p 295.117 Sur le stress voir aussi C. trav Gand, 2 janvier 1992, RDS, 1992, p 219.118 C. trav Anvers ( section Hasselt ) 11 mars 1992, Chron.D.S.,1995, p 293.119 C. trav Liège, 21 février 1991, JTT, 1991, p 491.120 C. trav Mons, 15 avril 1994, Bull. Ass, 1994, p 552.121 C. trav Liège, 12 novembre 1990, JTT, 1991, p 211.122 C. trav Mons, 3 juin 1998, JTT, 1998, p 477.123 C. trav Mons, 22 octobre 1990, JTT, 1991, p 212 ; sur le froid exceptionnel constitutif d’un événement soudain voir : C. trav Mons, 18 juin 1990, JTT, 1991, p 88 et note.124 C. trav Liège, 28 mai 1990, JTT, 1991, p 213 ; RDS, 1990, p 382.125 Trib. trav Nivelles, 5 janvier 1990, Bull. Ass., 1990, p 711 et note LVG.126 C. trav Bruxelles, 12 décembre 1988, RGAR, 1991, n° 11.850127 C. trav Liège, 22 janvier 1990, Chron.D.S., 1991, p 56 et note.128 C. trav Anvers, 3 novembre 1992, Bull Ass, 1993, p 21 note LVG ; JTT, 1993, p 209 ; RW, 1992-93, 1167 ; comparer avec C. trav Mons, 25 janvier 1991, Bull Ass, 1992, p 46 et note VAN AERDE ; C. trav Anvers, 20 janvier 1997, Bull Ass, 1997, p 433, note LVG ; C. trav Gand, 18 mars 1994, Bull Ass, 1994, p 544  ; A ce propos, nous rappellerons que tout geste banal, mouvement ou déplacement ne peut être d’office considéré comme un événement soudain s’il n’offre pas la particularité d’avoir pu exposer l’organisme du travailleur à une influence professionnelle ayant pu entraîner la lésion : voir C. trav Liège, 15 novembre 1995, Bull. Ass, 1996, p 434 et note LVG ; C. trav Liège, 11 septembre 1989, Bull Ass, 1990, p 84.129 C. trav Bruxelles, 12 juin 1996, JTT, 1997, p 411.130 C. trav Liège, 22 mars 1995, JTT, 1995, p 473.131 C. trav Liège, 12 novembre 1990, JTT, 1991, p 211 ; C. trav Mons, 3 juin 1998, JTT, 1998, p 477.

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témoignages ou des présomptions graves précises et concordantes.132133 A ce propos, la cour du travail de Mons, dans un arrêt du 13 novembre 1998, a retenu que «  la thèse selon laquelle la bonne foi de la victime qui ne dispose d’aucun témoin devant être présumé, sa seule déclaration suffirait à démonter l’existence de l’accident du travail ne peut être acceptée. » 134La preuve de l’événement soudain doit être apportée de manière certaine de sorte qu’il n’est guère possible qu’elle puisse être fournie par un travailleur qui n’a pas été témoin de l’accident.135

Lorsque la victime ou ses ayants droit ont établis, outre l’existence d’une lésion, celle de l’événement soudain, la lésion est présumée, jusqu’à preuve du contraire, trouver son origine dans un accident. Cette présomption est renversée par l’assureur loi quand celui-ci démontre qu’il n’existe aucun rapport entre la lésion et l’accident.136 Dès lors, si un expert judiciaire prouve, sur la base de la littérature scientifique, qu’une hernie inguinale traumatique est très rare et qu’elle ne peut être occasionnée que dans des situations très spécifiques qui ne sont pas produites dans le cas d’espèce, la preuve du contraire est rapportée.137 Au demeurant, la cour de Cassation considère que la présomption de causalité est renversée lorsque le juge a la conviction que la lésion ne trouve pas son origine dans l’accident.138 La Haute Cour enseigne encore qu’il ne doit pas nécessairement y avoir une concomitance entre l’événement soudain et la lésion139. Ainsi, dans un arrêt du 12 février 1990, la juridiction suprême constate «  qu’in casu la cour du travail admet qu’un événement soudain s’est produit le 1er août 1984 et n’exclut pas que la lésion décrite par la demanderesse ( la travailleuse ) qui existait le 25 octobre 1984 , puisse avoir été causé par l’événement soudain pris en considération ; que toutefois, elle écarte la présomption de causalité prévue à l’article 9 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail, par le seul motif qu’une trop longue période

132 C trav Liège, 28 janvier 1992, Chron.D.S., 1992, p 189 ; Trib. trav Termonde, 21 novembre 1995, AJT, 1995-96, p 505 et note de LIETAERT ; C. trav Liège, 29 juin 1995, JTT, 1995, p 481 ; C. trav Liège, 18 janvier 1995, JTT, 1995, p 483 ; C. trav Liège ( section Neufchâteau ) 18 décembre 1991, JTT, 1992, p 333 ; C. trav Mons, 22 janvier 1993, Bull Ass, 1993, p 433 et note ; RGAR, 1995, n° 12.517 ; C. trav Liège 21 février 1994, Bull Ass, 1995, p 102, note L. VAN GOSSUM ; Trib trav Turnhout, 14 juin 1994, Turnh.Rechtsl., 1994-1995, p 99 ; Gand, 25 avril 1995, RGAR, 1998, n° 12.892.133 C. trav Gand, 2 février 1989, Bull Ass, 1990, p 81 et note LVG ; Trib trav Liège, 24 janvier 1991, JTT, 1991, p 219 ; Trib trav Liège, 17 mars 1994, Bull Ass, 1995, p 385, note L. VAN GOSSUM ; C. trav Gand, 12 décembre 1990, Bull Ass, 1991, p 303, note LVG ; JTT, 1991, p 208; le simple cri lancé par un ouvrier maçon ne peut constituer un événement soudain : Cass, 16 octobre 1995, JT, 1996, p 103 ; JTT, 1995, p 469 ; Bull, 1995, p 919 ; voir aussi C. trav Mons, 4 septembre 1998, JLMB, 1999, p 109134 JLMB, 1999, p 113 et observations de LVG ; L. VAN GOSSUM, Les accidents du travail, 4 édition, De Boeck, 1997, p 47.135 C. trav Mons, 4 septembre 1998, JLMB, 1999, p 109.136 C. trav Mons, 19 juin 1996, RGAR, 1997, n° 12.862 ; C. trav Mons, 25 mai 1992, RDS, 1992, p 305 ; C. trav Bruxelles, 15 janvier 1990, JTT, 1990, p 55 et note ; en cas d’accident mortel, l’assureur loi peut solliciter qu’il soit recouru à une autopsie : voir Trib trav Bruxelles, 11 janvier 1991, Bull Ass, 1991, p 307 ; C. trav Bruxelles, ( référés) , Bull Ass, 1992, p 40 ; C. trav Gand ( section Bruges ) 9 mars 1989, Bull Ass, 1990, p 293, et note LVG; sur la possibilité de permettre à un expert médecin de déterminer s’il existe un lien causal entre la lésion et le travail : C. trav Mons, 1 décembre 1989, JTT, 1990, p 58 ; Trib trav Mons, 15 février 1989, JTT, 1990, p 66 et note ; C. trav Liège, 22 janvier 1990, Chron D S, 1991, p 56 et note ; C. trav Anvers, 31 juillet 1990, Bull Ass, 1992, p 27 ; contra C. trav Bruxelles, 18 mars 1996, Bull Ass, 1996, p 624 et note GHISSELS.137 C. trav Anvers, 14 février 1989, Chron. D.S., 1992, p 191.138 Cass, 14 octobre 1991, Bull Ass, 1992, p 36 et note ; Cass, 9 juin 1997, JT, 1997, p 636 ; RW, 1998-199, p 220 et note ; voir aussi C. trav Gand, 22 novembre 1990, Bull Ass, 1991, p 86 et note de LVG139 Cass, 12 février 1990, Chron.D.S., 1990, p 244 ; JTT, 1990, p 265 ; Bull, 1990, p 686 ; Arr Cass, 1989-1990, 764 ; Cass, 29 novembre 1993, JT, 1994, p 232 ; JTT, 1994, p 187 et note ; Bull, 1993, p 1002 ; RGAR, 1995, n° 12.535 ; RW, 1993-1994, 1457.

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s’est écoulée « entre le fait invoqué et la lésion invoquée » ; que dès lors, l’arrêt viole l’article 9 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail ».140

Enfin, nous savons que la cour de Cassation distingue la lésion et ses conséquences.141 Dès lors, il se pose la question de savoir si le lien causal visé par l’article 9 de la loi de 1971 s’étend également aux séquelles de l’accident. Marc BOLLAND est convaincu que l’article 9 ne contient pas une double présomption de causalité ; par conséquent il appartient à la victime de prouver, par toutes voies de droit, que les séquelles dont elle entend être indemnisées sont dues à l’accident.142 A vrai dire, il nous faut constater, avec cet auteur, que la cour de Cassation n’était pas saisie de cette question précise. Par contre, il nous paraît que la Cour suprême, dans un arrêt du 14 juin 1993, s’est prononcée sur l’incidence de la présomption de causalité lorsque la victime d’un accident du travail présente une symptomatologie douloureuse qui subsiste entre deux séquelles143. Les faits de la cause peuvent se résumer de la manière suivante : le 2 octobre 1986, le bureau de poste où travaille Monsieur X est braqué par des délinquants. A cette occasion, Monsieur X reçoit un coup de crosse à sang coulant et subi un choc émotif important. Après 8 jours de repos, le travailleur reprend ses activités professionnelles. Il décède cependant à son domicile le 11 novembre 1986 suite à un infarctus du myocarde. Un médecin légiste est désigné par le tribunal du travail avec pour mission de déterminer si le choc émotif résultant de l’attaque à main armée peut être retenu, ne fût ce que partiellement, comme une cause du décès de l’époux de la victime. L’expert conclut que «  les investigations médico-légales, permettent de penser que, suite au hold-up , Monsieur X, âgé de 48 ans, a présenté une symptomatologie anxiodépressive qui, par les stress psychiques répétés, a pu, chez cet homme coronarien avéré et hypertendu, précipiter une arythmie létale. La relation m’apparaît tout à fait possible, car il semblait psychologiquement fort affecté par cet événement.  » Aussi, en degré d’appel, la cour du travail de Liège, constata que c’est avec raison que les premiers juges ont considéré que l’épouse de la victime bénéficiait de la présomption légale d’imputabilité du décès à l’accident en raison de la continuité de la symptomatologie présentée par le patient entre les deux événements. Un pourvoi fut dirigé contre cet arrêt aux motifs que «  le juge a pu constater qu’après le hold-up perpétré le 2 octobre 1986 dans son bureau, la victime X a été en état de stress psychique ; qu’en vertu de l’article 2 de la loi du 3 juillet 1967 ( dont le contenu est comparable avec l’article 9 de la loi de 1971 quant à la présomption causale ) il était donc présumé que ce choc émotif était une conséquence du hold-up ; que par contre, il n’existe pas de présomption que le choc émotif a provoqué l’infarctus du myocarde dont la victime est décédé le 11 novembre 1986 ; qu’il appartenait par conséquent à la veuve du travailleur de prouver l’existence d’une relation causale certaine entre ces deux lésions ; qu’en l’espèce, l’arrêt s’est borné à constater que cette relation, au vu de l’expertise, était probable ». La cour de Cassation rejeta le pourvoi et précisa «  qu’en décidant sur la base de ces constatations et considérations ( du médecin légiste ) que ‘ la veuve de la victime’ bénéficiait d’une présomption légale de l’imputabilité

140 Cass, 12 février 1990 précité ; voir aussi : C. trav Gand, 7 novembre 1991, JTT, 1992, p 237 ; C. trav Anvers, 31 juillet 1990, Bull Ass, 1992, p 27 ; C. trav Liège, 11 juin 1990, JTT, 1991, p 89 et note ; Trib trav Tongres, 2 mars 1992, Bull Ass, 1992, p 253, note P. MICHEL ; C. trav Bruxelles, 19 avril 1993, Chron D S, 1994, p 308 ; La Cour du travail de Bruxelles a toutefois considéré que la présomption de causalité ne pouvait pas s’appliquer lorsque l’accident n’est déclaré qu’onze mois après sa survenance et que les différentes explications données par la travailleuse quant à l’origine des lésions dont elle se plaint sont divergentes, surtout si d’autres éléments du dossier, notamment des données médicales ne permettent pas de lever le doute sérieux qui pèse sur ce lien de causalité : C. trav Bruxelles, 9 janvier 1990, RGAR, 1993, n° 12.109, voir aussi C. trav Bruxelles, 9 janvier 1989, Chron. D.S., 1990, p 128.141 Cass, 30 septembre 1996 précité voir n° 2.3.142 «  L’article 9 de la loi du 10 avril 1971 : simple ou double présomption », loc. cit., n° 12761 ; «  Accidents du travail, lien causal et présomption », JLMB, 1997, p 1075.143 Cass, 14 juin 1993, JT, 1994, p 81 ; Bull, 1993, p 566 ; RW, 1993-1994, 613.

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du décès à l’accident en raison de la continuité de la symptomatologie présentée entre les deux par le patient, et en en tirant les conséquences critiquées par le moyen la cour du travail a fait une exacte application de l’article 2 précité. »

2.5 Les accidents sur le chemin du travail.

2.5.1 GénéralitésNul n’ignore plus que l’accident survenu sur le chemin du travail est également indemnisé par l’assureur loi.144 Le chemin du travail s’entend du trajet normal – quant à la durée et à l’espace 145- que le travailleur doit parcourir pour se rendre de sa résidence au lieu de l’exécution du travail et inversement.146 Le trajet commence lorsque le travailleur franchit le seuil de sa résidence et se termine quant il regagne celle-ci.147 La cour de Cassation enseigne que le trajet demeure normal si les détours – qui renvoient à la notion d’espace – ou les interruptions – qui renvoient à la notion de temps - effectués par l’intéressé sont insignifiants, s’ils sont peu importants mais se justifient par un motif légitime, ou s’ils sont importants mais imputable à un cas de force majeure.148 L’importance du détour s’apprécie non pas exclusivement en fonction du rapport mathématique entre le trajet emprunté et le trajet le plus court, mais encore en fonction de toutes les circonstances de fait qui sont de nature à influer sur l’ampleur du risque.149 L’intention du travailleur de s’écarter du trajet normal est toutefois sans influence.150

La cause légitime est une notion propre au droit social. Il s’agit de l’événement qui s’impose, dans une certaine mesure, par nécessité à un travailleur. Il est moins que la force majeure mais plus qu’un simple motif de convenance personnelle.151 Aussi, le législateur considère que le détour est justifié pour reprendre des enfants à la garderie ou à l’école ou lors du covoiturage.152 144 Article 8 § 1er alinéa 1 de la loi du 10 avril 1971 ; voir aussi R. ROELS, «  La jurisprudence de la cour de cassation concernant la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail », JTT, 1985, p 488 et 489 qui écrit «  les accidents survenus sur le chemin du travail et ceux qui y sont assimilés présentent une caractéristique commune, c’est que pour pouvoir donner lieu à réparation, il faut avant tout qu’il s’agisse d’accidents au sens de la loi. Ceci implique donc l’application à l’accident sur le chemin du travail de la présomption, énoncée à l’article 9 de la loi » ; Comme l’indique la cour du travail de Liège «  dès que la victime démontre qu’elle a été impliquée dans une collision où elle a encouru des lésions, il est question d’un accident sur le chemin du travail » : C. trav Liège, 27 janvier 1992, JTT, 1992, p 326 et note ; F DEMET, «  La notion d’accident sur le chemin du travail », in Chroniques de droit à l’usage du Palais, tome VI, 15 avril 1989.145 Cass, 25 avril 1994, JTT, 1994, p 421 ; Bull, 1994, p 402 la cour indique notamment que l’appréciation du caractère normal du trajet quant à la durée nécessite «  d’examiner si le trajet succède à la période passée par le travailleur sur le lieu du travail pour y effectuer le travail convenu »; Cass, 1 février 1993, JTT, 1993, p 202 ; Le trajet normal n’est dès lors pas nécessairement le plus court ; voir C. trav Anvers, 23 mai 1997, Bull Ass, 1997, p 621, note K.BERBILLE.146 Le législateur a également assimilé certains trajets au chemin du travail : voir article 8, § 1er alinéa 3 de la loi de 1971.147 L. VAN GOSSUM, op cit, 1997, p 53 et suivantes.148 Voir notamment Cass, 24 septembre 1990, JLMB, 1990, p 1352 ; Cass, 13 novembre 1995, JTT, 1996, p 252 et note ; Chron.D.S., 1996, p 233 ; Dr Circ, 1996, p 203 ; Cass, 17 janvier 1994, JLMB, 1994, p 616 et note BOLLAND ; Bull, 1994, p 53 ; Cass, 13 avril 1992, Chron.D.S., 1992, p 322 ; RDS, 1992, p 200 ; JTT, 1993, p 206 ; Bull, 1992, p 725.149 Voir Cass, 17 février 1986, Pas, 1986, p 774 ; Cass, 21 mars 1983, Pas, 1983, p 795 ; C.trav Liège, 25 février 1991, JTT, 1991 , p 206 ; C. trav Liège, 25 février 1998, JTT, 1998, p 486.150 Cass, 24 septembre 1990, Chron.D.S., 1991, p 17 ; Bull, 1991, p 69 ; RDS, 1990, p 343 ; Cass, 13 novembre 1989, JTT, 1990, p 49 et note ; Bull Ass, 1990, p 78 et note LVG ; Bull, 1990, p 302.151 Voir Cass, 30 septembre 1985, Pas, 1986, p 87 ; Cass, 24 septembre 1990, JLMB, 1990, p 1352 ; C. trav Liège, 19 septembre 1994, JLMB, 1995, p 871, note BOLLAND ; JTT, 1995, p 131.152 Article 8, § 1er alinéa 2, 1° et 2° de la loi du 10 avril 1971, le tribunal du travail de Charleroi fait une interprétation stricte de cette disposition et estime, dès lors, que n’est pas visé le détour effectué par le travailleur

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La force majeure, quant à elle, se définit classiquement comme l’événement que la volonté humaine n’a pu ni prévoir, ni conjurer.153

2.5.2 La notion de résidence.La cour du travail de Liège souligne que la résidence est l’endroit où le travailleur a l’intention de fixer son habitation, fût ce temporairement.154 Il a été jugé que la victime qui a sa résidence principale chez sa mère mais qui retourne chez son père certains week-ends peut avoir une résidence secondaire chez celui-ci. Cependant, l’accident qui survient alors que le travailleur va prendre un repas chez son père avant de retourner à son travail ne se produit pas sur le chemin du travail puisqu’in casu, il n’avait pas l’intention d’y fixer sa résidence mais uniquement d’y déjeuner.155 Il a encore été décidé que par la simple inscription dans les registres de la population ne suffit pas pour établir la preuve d’une résidence ou d’une cohabitation de fait.156. Nous savons que le trajet débute lorsque le travailleur franchit le seuil de sa résidence. Par conséquent, n’est pas un accident sur le chemin du travail, la chute effectuée par la victime dans l’escalier intérieur de sa maison qui mène à son garage157 ou le sinistre qui survient alors que la victime a déjà pénétré dans le bâtiment de son atelier.158 En revanche, le seuil de la résidence est dépassé lorsque l’intéressé déambule sur la voie publique ou dans toutes les parties du domaine privé de son immeuble qui ont un caractère public, communautaire ou commun, tel que le hall d’entrée d’un bâtiment à appartements multiples.159 De même, la travailleuse qui, après avoir quitté son travail, range son véhicule devant sa résidence et est victime d’un accident alors qu’elle traverse la rue pour se rendre chez son boucher demeure sur le chemin du travail,.160

2.5.3 Les interruptions.Nous savons que le trajet normal entre le domicile et le lieu d’exécution du travail n’est pas nécessairement un trajet ininterrompu. La cour de Cassation rappelle néanmoins que les juges ne peuvent décider légalement qu’un trajet discontinu demeure normal quant au temps et à l’espace s’ils négligent de tenir compte de l’interruption dudit trajet.161 En réalité, le trajet restera normal si l’interruption est justifiée, soit pas une cause légitime si elle est peu importante, soit par un cas de force majeure si elle est importante.

C’est en application de ces principes que la cour de Cassation a confirmé la décision qui constate que l’accident qui s’est produit au cours d’un simple arrêt du véhicule de la victime, pendant une courte durée et sans que celle-ci ne sorte de son automobile, ne constitue pas, en

pour conduire ses enfants chez ses beaux parents : 8 octobre 1997, Bull Ass, 1998, p 53, note LVG. ; O. MICHIELS, «  Accident sur la chemin du travail et notion d’incapacité de travail pour les indépendants », Idj, 1997 / 7, p 83.153 Voir Cass, 17 décembre 1984, Pas, 1984, p 477 ; Cass, 24 septembre 1990, JTT, 1991, p 83 ; Cass, 13 novembre 1995, JTT, 1996, p 251.154 C trav Liège, ( section Neufchâteau ) 21 juin 1989, JLMB, 1989, p 1121.155 C. trav Liège, 23 janvier 1997, RRD, 1997, p 463.156 C. trav Gand ( section Bruges ) 3 décembre 1993, TBR, 1994, p 17.157 C. trav Mons, 13 mars 1992, Bull Ass, 1992, p 676, note LVG.158 C. trav Anvers ( section Hasselt ) 21 février 1996, Limb. Rechstl., 1997, p 90 et note COLLETTE A qui vise un cas où la victime est abattue par un coup de feu.159 C.trav Liège, 5 juin 1992, Chron.D.S., 1994, p 296.160 C. trav Bruxelles, 11 décembre 1989, Chron.D.S., 1990, p 132, la cour estimant, à juste titre, que le bref détour effectuée par la travailleuse est justifié par une cause légitime. Sur ce point voir n°2.5.4.161 JTT, 1993, p 202 ; JT, 1993-94, p 122 ; Bull, 1993, p 123.

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raison de son caractère insignifiant, une interruption du chemin du travail.162 La Haute Cour n’a pas davantage invalidé l’arrêt qui relève, en regard des circonstances de lieu et de temps, que présente un caractère peu important l’interruption de 90 à 95 minutes, qui s’est produite dans un débit de boisons qui constitue le local de football de l’entreprise, pour permettre au travailleur d’aller rejoindre ses coéquipiers pour boire quelques jus de fruits, après un match auquel il n’avait pu participer en raison de son horaire de travail le jour des faits.163 En revanche, dans un arrêt du 13 novembre 1995.164, la Cour suprême a décidé « qu’en considérant que l’interruption du trajet pendant quatre heures n’avait pas été importante, eu égard à la longueur du trajet à effectuer et de la nécessité ( pour le travailleur ) de s’adresser à un garagiste qui lui a exécuté un travail en fonction de contingences qui lui sont propres, la cour du travail n’a pas décidé légalement que le trajet était resté normal. » Comme le note B. GRAULICH, la Cour semble en revenir, pour apprécier la normalité du trajet, à un examen par étapes successives dicté par une première vérification portant sur l’étendue de l’interruption ( c’est-à-dire insignifiante, importante ou peu importante ) et par une seconde relative de la justification de celle-ci (à savoir l’existence d’un motif légitime ou d’une force majeure ).

De même, le travailleur qui, après une « soirée officielle » dans un café en présence de son supérieure, ne regagne pas, après le départ de celui-ci, son domicile mais demeure dans l’estaminet environ deux heures, suspend la poursuite de son chemin du travail pour des motifs personnels qui ne sont pas justifiés par une cause légitime.165 La cour du travail de Gand a, dans le même ordre d’idée, estimé que l’interruption à l’occasion du départ d’un travailleur à la pension, pour pourvoir être considéré comme une cause légitime doit rester normale au point de vue chronologique. Il n’en va pas ainsi si la victime s’attarde pendant 6 heures à cette festivité.166 N’est pas davantage sur le chemin du travail, le travailleur qui séjourne environ deux heures dans un bistrot avec des collègues après la fin de sa journée de travail et qui est renversé par un véhicule alors qu’il sortait de ce débit de boisons pour aller chercher dans sa voiture des photos relatives à un rallye automobile.167

Il a été jugé par la cour du travail de Mons que parmi les causes légitimes d’interruption, il y a lieu de ranger les nécessités essentielles de la vie courante.168 Cette même juridiction a pareillement considéré que le fait de se retrouver entre gens du spectacle après une représentation théâtrale, ce qui constituait, en l’espèce, une pratique courante – ce d’autant plus que le jour du sinistre la victime devait discuter de différents problèmes professionnels – peut être considérée comme une cause légitime d’interruption du trajet.169 La cour du travail de Liège, quant à elle, a jugé qu’une interruption de deux heures, par rapport à un trajet 162 Cass, 30 septembre 1996, Dr Circ, 1997, p 27 ; Bull, 1996, p 883.163 Cass, 17 janvier 1994, JLMB, 1994, p 616 et note BOLLAND, Bull, 1994, p 53 ; voir aussi C. trav Liège, 25 février 1998, JTT, 1998, p 486 qui constate que l’arrêt d’un travailleur dans un café pour rejoindre des collègues de travail suite à un congé exceptionnel de deux heures donnés par l’employeur à l’occasion de la Noël est justifié par une cause légitime.164 Cass, 13 novembre 1995, Chron.D.S, 1996, p 232 et note de B. GRAULICH ; Bull, 1995, p 1031 ; Dr. Circ., 1996 , p 201.165 Cass, 18 décembre 1989, JTT, 1990, p 268 ; Bull, 1990, p 487 ; RW, 1989-1990, 1261 ; voir aussi C. trav Gand, 6 septembre 1990, Bull Ass, 1990, p 705 et note LVG ; Cass, 9 juin 1997, JLMB, 1999, p 126.166 11 mars 1993, Bull Ass, 1994, p 76 et note de F VAN AERDE ; voir aussi C. trav Anvers, 15 décembre 1997, Bull Ass, 1998, p 447, note L. VAN GOSSUM.167 C. trav Gand 25 mars 1993, Bull Ass, 1993, p 440 et note.168 C. trav Mons, 13 janvier 1993, RDS, 1993, p 223 ; RRD, 1993, p 467 ; RGAR, 1995, n° 12.518.169 C. trav Mons, 9 février 1994, Bull Ass, 1994, p 529, note L VAN GOSSUM ; voir aussi, C. trav Bruxelles, 3 mars 1997, Chron.D.S., 1998, p 432 arrêt dans lequel, la cour en raison des circonstances de la cause, estime que l’interruption du trajet normal pendant 2 heures 40 pour une partie de squash avec un collègue, au cours de laquelle, les protagonistes ont poursuivi des discussions d’ordre professionnel est justifiée.

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normal de 20 à 25 minutes, est importante. Elle doit, par conséquent, être justifiée par un cas de force majeure qui n’est pas établie par le fait de réparer son véhicule, de s’arrêter dans des tavernes et de téléphoner à son épouse.170 De même, le travailleur ne peut motiver une interruption de quatre heures en prétextant un délassement bien mérité dans un café.171

2.5.4 Les détours.Les mêmes principes que ceux dégagés ci avant pour les interruptions s’appliquent, mutatis mutandis, aux détours. De ce fait, un détour insignifiant n’a pas d’incidence sur le caractère normal du trajet.172 Il a encore été jugé qu’un détour de 4.4 kilomètres pour un trajet normal de 18.6 kilomètres effectué pour aller chercher un stagiaire est inspiré par une cause légitime.173 De même, le détour par un café à la fin de la semaine qui prolonge le chemin du travail est justifié par un motif légitime dès lors que la coutume au sein de l’entreprise – ayant reçue l’assentiment de l’employeur - fut de permettre à certains travailleurs d’aller boire un verre de concert dans ledit café.174 Le tribunal du travail de Liège a, quant à lui, décidé qu’une travailleuse qui doit, par la suite d’une adaptation exceptionnelle de son horaire de travail, reporter au lendemain un traitement suivi de longue date chez une esthéticienne - ce qui la conduit a dévier de son trajet normal - demeure toujours à cet instant sur le chemin du travail.175 Il en va différemment du trajet parcouru entre le lieu du travail et le domicile lorsque le détour exécuté par le travailleur est motivé par l’achat de matériel électronique destiné à ses loisirs176 ou par l’achat d’un bateau de plaisance.177 De même, le travailleur qui fait un détour pour acheter un album photos et qui regagne ensuite son lieu de travail parce qu’il a oublié son portefeuille interrompt le trajet normal pour un motif personnel.178. N’est pas davantage justifié par des circonstances imprévisibles ou inévitables, l’important détour effectué par une travailleuse pour conduire son enfant chez sa belle mère en raison des vacances de sa gardienne.179 Il a encore été jugé que le travailleur qui dévie de son itinéraire normal pour le rendre deux fois plus long que le trajet le plus court doit légitimer son détour par la preuve de l’existence d’un cas de force majeure.180

2.5.5 L’anticipation du départ.Le trajet reste-t-il normal si le travailleur décide d’anticiper son départ ?La cour du travail de Liège, dans un arrêt prononcé le 21 juin 1989, a tranché que la travailleuse qui avance son départ aux motifs que «  1° pour faire le trajet le lundi 29 avril 1985, elle devait prendre un train de Libramont à 5 heures 22 ; 2° il n’existe pas de moyen de transport en commun qui permette de faire le trajet de sa résidence à Libramont à 6 heures 30 ; 3° elle ne dispose pas de voiture et le mauvais état de santé de son père ne lui permet pas de faire le trajet à une heure aussi matinale, 4° les circonstances atmosphériques ont été

170 29 juin 1993, JLMB, 1993, p 1395, note M. BOLLAND ; voir aussi C. trav Liège ( section Namur ) 17 janvier 1995, Bull Ass, 1995, p 400 et note LVG ; Trib trav Nivelles, 2 novembre 1990, JDS, 1991, p 96 ; C trav Gand, 18 avril 1991, Bull Ass, 1991, p 592, note LVG.171 C. trav Bruxelles, 6 septembre 1993, RDS, 1993, p 433.172 C. trav Gand, 16 avril 1998, JTT, 1998, p 479 et note ; voir aussi Trib trav Liège, 10 février 1995, JTT, 1995, p 480.173 C. trav Mons, 28 juin 1996, JTT, 1997, p 298 ; Bull Ass, 1997, p 251 et note P MICHEL.174 C. trav Gand ( section Bruges ) 9 juin 1994, RW, 1994-1995, p 954.175 Trib trav Liège, 16 mai 1991, JTT, 1991, p 492, ce jugement cite C. trav Liège, 18 février 1983, JTT, 1985, p 402 et l’arrêt de la cour de Cassation qui rejette le pourvoi dirigé contre cette décision : Cass, 11 mars 1985, RG n°7013.176 C. trav Mons, 17 avril 1989, Chron.D.S., 1990, p 150.177 Trib trav Termonde, 2 décembre 1996, JTT, 1997, p 299 ; AJT, 1996-1997, 466 note MOMMAERTS.178 Trib trav Gand, 19 avril 1991, Bull Ass, 1991, p 608, note LVG.179 C. trav Anvers, 12 octobre 1993, RW, 1994-1995, p 260.180 Anvers, 21 mai 1991, Bull Ass, 1991, p 598 et note LVG.

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défavorables durant le week-end ; en outre l’anticipation du départ n’a en rien aggravé les risques du trajet ; il s’en déduit que cette anticipation était en raison des circonstances décrites ci-avant, justifiée par des motifs légitimes et correspondant à une impérieuse nécessité »181. Le pourvoi dirigé contre cette décision fut rejeté par la cour de Cassation qui en conclut «  la cour du travail a pu considérer que le fait que la travailleuse avait avancé son départ dans les limites et les circonstances qu’elle a précisées, n’avait pas, en soi, enlevé au trajet parcouru son caractère normal »182 De même, la Haute Cour remarque que la durée du trajet parcouru par un travailleur n’est pas anormale par le seul motif que celui-ci commence son travail en retard ou le termine prématurément.183 Il a encore été décidé que le travailleur, victime d’un accident de la circulation, alors qu’il a quitté l’entreprise avant la fin du temps de travail à la suite d’une grève arrêtée au cours des heures d’activité, demeure sur le chemin du travail.184

2.5.6 La notion de lieu d’exécution du travail.Le travailleur, qui se prétend victime d’un accident sur le chemin du travail, doit démontrer que son déplacement trouve son origine dans l’exécution d’un droit185 ou d’une obligation, fut-elle accessoire, ordonnée ou indiquée par son employeur, 186 découlant de son contrat de travail. Dès lors, le lieu de l’exécution du contrat ne se restreint pas à l’endroit où le travailleur exerce habituellement son activité professionnelle.187

A ce titre, ont été appréhendé comme accident sur le chemin du travail : l’accident survenue à la suite du retour du travailleur vers son domicile après le

déplacement qu’il venait d’effectuer, à la demande de l’employeur, au bureau de celui-ci pour y conclure une convention portant sur la fin de leur contrat de travail et sur les vacances.188

l’accident survenu à la suite d’un déplacement réalisé par un médecin de garde de l’endroit où il se tenait à la disposition d’éventuels appels d’urgence de patients vers son domicile.189

l’accident survenu à un travailleur qui se rend, à la demande expresse de son employeur, au siège de l’entreprise pour y signer son contrat de travail à durée indéterminée et recevoir des informations pratiques préalables, tant écrites qu’orales, sur ses fonctions, même si l’entrée en fonction n’est prévue que pour le lendemain.190

l’accident survenu à un enseignant sur le trajet pour gagner une soirée organisée par l’amicale de l’école et au profit de celle-ci avec le soutien au moins tacite du pouvoir organisateur.191

181 JLMB, 1989, p 1121.182 Cass, 22 octobre 1990, JTT, 1991, p 80 et note ; Bull, 1991, p 195 ; Chron.D.S., 1991, p 174 ; JLMB, 1991, p 321 ; Cass, 8 septembre 1997, JTT, 1997, p 401 ; Dr. Circ., 1998, p 46 ; voir aussi Cass, 19 décembre 1968, Pas, 1969, p 373 arrêt dans lequel la cour indique «  le juge a pu légalement déduire de la seule circonstance que le défendeur avait avancé son départ dans les limites et les circonstances qu’il précise n’avait pas, en soi, enlevé au trajet parcouru son caractère normal, quels qu’aient été par ailleurs les mobiles du défendeur »183 Cass, 12 février 1990, JTT, 1990, p 266 et note ; Chron.D.S, 1990, p 243 ; Bull, 1990, p 688 ; R.W., 1989-1990, conclusions H. LENAERTS.184 C. trav Gand, 3 septembre 1992, JTT, 1993, p 210 ; RDS, 1993, p 41.185 C. trav Mons, 7 juillet 1988, Chron.D.S., 1990, p 149, la cour retient que le travailleur qui se présente chez son employeur pour percevoir sa rémunération exécute à ce moment son contrat de travail.186 C. trav Liège, 17 novembre 1993, JLMB, 1994, p 632 ; JTT, 1994, p 189, et note.187 La cour de Cassation enseigne cependant qu’un «  lieu cesse d’être le lieu d’exécution du travail, au sens de l’article 8, lorsque le travailleur, après avoir terminé son travail, y demeure, sans cause légitime, pendant un laps de temps plus long que la normale et ne s’y trouve plus sous l’autorité de son employeur. » : JT, 1997, p 637 ; JTT, 1997, p 403.188 C. trav Anvers, 2 novembre 1993, JTT, 1994, p 431 et note.189 Trib trav Charleroi, 2 janvier 1992, RDS, 1992, p 141 ; JTT, 1992, p 329 ; Bull Ass, 1992, p 456 et note LVG.190 C. trav Mons, 16 avril 1997, JTT, 1997, p 406.191 C. trav Bruxelles, 7 mars 1994, Chron.D.S., 1994, p 316.

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Par contre, le travailleur victime d’un sinistre lors du déplacement qu’il effectue, de sa propre initiative, en vue de contester un avis de reprise de travail donné par le médecin conseil de l’assureur-loi, ne constitue pas un accident sur le chemin du travail.192

2.5.7 Le travailleur en mission.La cour de Cassation a rappelé, dans un arrêt du 19 mars 1990, que «  lorsque l’exécution du contrat de travail d’un travailleur qui exécute une mission hors de l’entreprise prend fin lors de son retour à sa résidence ou au siège de l’entreprise, l’accident dont il est victime sur le chemin du retour est un accident du travail ( sensu stricto ), à moins que l’accident ne soit survenu à un moment où le travailleur a interrompu le retour à sa résidence ou au siège de l’entreprise pour des raisons personnelles, même si, géographiquement , il se trouve alors sur le trajet vers sa résidence ou vers le siège de l’entreprise ». Par conséquent, la Cour relève que «  la seule constatation que le retour a été précédé d’une « interruption excessive pour simple convenance personnelle » n’implique pas que l’accident sur le trajet du retour s’est produit à un moment où l’exécution du contrat de travail était interrompue ».193 Il a encore été décidé par la Haute Cour que le travailleur qui exécute une mission en dehors de son domicile et qui effectue un trajet de ce lieu vers un endroit de détente pour s’octroyer certains loisirs – autorisés par l’employeur - s’il est victime d’un accident, celui-ci doit être qualifié d’accident sur le chemin du travail. En effet, aux termes de l’article 8, § 2, 10° de la loi de 1971 est assimilé au chemin du travail (…) le trajet parcouru du lieu où le travailleur se trouve ou doit se trouver pour l’exécution d’une mission, au lieu où il prend ses loisirs et inversement, sauf interdiction expresse de l’employeur. De ce fait, la Cour estime « que selon ses termes, cette disposition est aussi applicable au trajet parcouru du lieu où le travailleur se trouve au lieu de récréation, lorsque les loisirs pris sont considérés comme faisant partie de la mission du travailleur. ».194

2.5.8 Le transport organisé par l’employeur.195

Il a été jugé que doit être qualifié d’accident sur le chemin du travail celui qui se produit lors du trajet effectué à bord une camionnette que l’employeur met à la disposition de ces travailleurs sans qu’il ne soit établi que celui-ci organise le déplacement et désigne le conducteur.196 De même, le travailleur qui emprunte un transport organisé par l’employeur, sans que celui-ci ne soit obligatoire, ne peut être victime que d’un accident sur le chemin du travail.197 En revanche, la cour du travail de Bruxelles estime qu’est victime d’un accident du travail sensu stricto, le travailleur ramené chez lui, avec l’autorisation de l’employeur, dans un véhicule de ce dernier, conduit par un compagnon de travail qui dispose d’un contrôle et d’une autorité sur le véhicule et le personnel transporté.198

2.5.9 Les trajets assimilés.L’article 8, § 2 de la loi du 10 avril 1971 assimile au chemin du travail divers trajets.199 Parmi ceux-ci on peut relever le trajet parcouru par l’intéressé pour se rendre de l’endroit où il 192 C. trav Liège, 17 novembre 1993, JLMB, 1994, p 632 ; JTT, 1994, p 189, et note.193 Cass, 19 mars 1990, JTT, 1990, p 262 et note ; JT, 1990, p 659 ; Bull, 1990, p 833 : dans cet arrêt la cour du travail de Liège avait déduit d’une interruption de 5 heures que le travailleur n’exécutait plus sa mission ; voir encore : Cass, 26 septembre 1988, Bull, 1989, p 91 ; RBSS, 1989, p 137 et note ELST ; voir aussi Anvers 10 janvier 1991, Bull Ass, 1991, p 841, note LVG.194 Cass, 18 janvier 1993, JTT, 1993, p 206 ; Bull, 1993, p 55 ; Bull Ass, 1993, p 205 et note F VAN AERDE.195 Voir : F DEMET «  Accidents sur le chemin du travail », in Chroniques de droit à l’usage du Palais, tome VI, 15 avril 1989, p 16-18 ; note de J. VAN HOREN sous C. trav Bruxelles, 29 mai 1995, Bull Ass, 1994, p 547.196 C. trav Liège, 22 septembre 1993, JTT, 1994, p 193 et note.197 C. trav Anvers, 26 septembre 1994, Bull Ass, 1995, p 122, note J. VANHOREN.198 29 octobre 1990, RGAR, 1993, n° 12.110.

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travaille au lieu où il perçoit en espèces tout ou partie de sa rémunération ou du montant qui y correspond et inversement.200 La cour de Cassation précise que «  le trajet parcouru pour se rendre de l’endroit où il perçoit sa rémunération ou le montant qui y correspond, à sa résidence, n’est pas visé par cette disposition.(…) L’énumération des trajets assimilés faite par l’article 8, § 2 n’est certes pas limitative, toutefois, cette énumération ne peut être étendue d’une manière inconciliable avec le but de la réglementation ; Les trajets assimilés au chemin du travail ne peuvent s’étendre aux trajets que le travailleur ne parcourt pas à partir du lieu où il travaille ou qui sont sans rapport direct avec la formation, l’exécution ou la fin du contrat de travail ; dès lors, ne peut être assimilé au chemin du travail le trajet parcouru par le travailleur pour regagner sa résidence à partir du lieu où il a retiré de l’argent du compte sur lequel sa rémunération est versée, même s’il s’y est rendu à partir du lieu du travail ».201

2.5.10 Divers. Licenciement pour motif grave .Il est acquis que le licenciement pour motif grave ne peut être opposée à l’autre partie que si celle-ci a été en mesure de prendre connaissance du congé notifié. Il s’ensuit que «  le travailleur qui se rend de sa résidence au lieu de l’exécution du travail, alors qu’il n’a pas été mis à même de prendre connaissance du congé pour motif grave qui lui a été notifié et donc du fait qu’il n’a plus l’obligation d’exécuter le travail convenu, se trouve sur le chemin du travail au sens de l’article 8 § 1er de la loi du 10 avril 1971. »202 La cour du travail de Bruxelles précise cependant qu’il n’y a pas lieu d’exiger une connaissance effective de la rupture car si une telle thèse devait être suivie, il suffirait au travailleur congédié de refuser d’accepter le pli recommandé ou de s’abstenir de le retirer pour pouvoir soutenir qu’il n’en a jamais eu connaissance.203

L’article 18 de la loi sur la loi sur le contrat de travail .Cet article dispose «  qu’en cas de dommages causés par le travailleur à l’employeur ou à des tiers dans l’exécution du contrat, le travailleur ne répond que de son dol et de sa faute lourde. Il ne répond de sa faute légère que si celle-ci présente dans son chef un caractère habituel plutôt qu’accidentel. ». Le tribunal de police de Louvain en infère que le travailleur ne bénéficie pas de cette immunité lorsqu’il est sur le chemin du travail puisqu’à cet instant il ne se trouve pas ou plus sous l’autorité de son employeur.204

Demande nouvelle et autorité de chose jugée .La cour du travail de Liège a admis que le travailleur puisse demander, par conclusions contradictoirement prises, que l’accident décrit dans l’acte introductif d’instance comme accident sur le chemin du travail soit en réalité requalifié en accident du travail sensu stricto pour autant que cette demande repose sur le même fait.205 En revanche, le jugement qui se

199 la loi programme du 22 décembre 1989 a complété l’article 8 par le trajet parcouru par le travailleur délégué syndical qui se rend pour suivre des cours de formation syndicale, de sa résidence ou de son lieu de travail au lieu où il suit ces cours et inversement ; voir aussi M. BONHEUR, «  Modifications récentes de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail », JTT, 1991, p 185 – 186.200 voir article 8, § 2, 4° de la loi du 10 avril 1971.201 Cass, 13 avril 1992, Chron.D.S., 1992, p 322 ; RDS, 1992, p 200 ; JTT, 1993, p 206 ; Bull, 1992, p 725.202 Cass, 14 janvier 1991, JLMB, 1991, p 300 et note J.CLESSE ; Chron.D.S., 1991, p 218, note JJ ; JTT, 1994, p 153, note C GILLES ; Bull, 1991, p 431.203 29 mars 1993, Bull Ass, 1993, p 448, note.204 Pol. Louvain, 12 décembre 1995, Dr Circ, 1996, p 58 ; voir notamment M. JAMOULLE, «  Seize leçons sur le droit du travail », Collection Scientifique Fac. Droit Liège, 1994, p 140 ; J. CLESSE, «  Examen de jurisprudence ; contrat de travail ( 1978-1981 ) », RCJB, 1983, p 579, n° 15 ; voir aussi Cass, 25 juin 1986, Bull, 1986, p 1321.205 C. trav Liège, 8 octobre 1990, JTT, 1991, p 94 et note ; JLMB, 1991, p 306, note N SIMAR. ; voir aussi, J. VAN COMPERNOLLE et G CLOSSET MARCHAL, «  Examen de jurisprudence. Droit judiciaire privé »,

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prononce sur une demande en réparation d’un accident du travail sensu stricto à une cause juridique différente de l’action qui se fonde sur la réparation d’un accident sur le chemin du travail. Par conséquent, dans une procédure où l’action a pour origine un accident sur le chemin du travail, il ne peut être argué de l’autorité de chose jugée que revêt une décision qui qualifie le sinistre d’accident du travail sensu stricto.206

Chapitre 2 : La réparation.

Section 1 : les accidents du travail mortel.1.1 La loi du 29 avril 1996 portant des dispositions sociales a supprimé la distinction, désormais illégale207, entre les enfants légitimes et naturels.208 Dès lors, tous les enfants qu’ils soient issus du mariage ou nés hors mariage sont bénéficiaires en qualité d’ayant droit de la loi sur les accidents du travail.209

1.2 Les ascendants de la victime d’un accident du travail mortel qui ne laisse pas d’enfants obtiennent une rente s’ils profitaient directement de la rémunération du défunt. Cette rente leur est due jusqu’au moment où le travailleur aurait atteint l’âge de 25 ans, à moins qu’elle ne soit leur principale source de revenus. La limitation dans le temps de l’octroi de la rente s’applique de la même façon lorsque le travailleur décédé avait plus de 25 ans au moment de l’accident.210 La cour du travail de Liège a rappelé, dans un arrêt du 26 mai 1997, que lorsque la victime, âgée de moins de 25 ans, vit sous le même toit que ses parents, il est présumé de manière irréfragable que ceux-ci profitaient directement de sa rémunération.211 Il a été jugé que cette preuve était faite si le travailleur célibataire domicilié chez ses parents y revenait tous les week-ends et les jours de congés mais résidait à un autre endroit durant la semaine pour les nécessités de sa profession.212 S’il n’est pas démontré que la victime vivait sous le même toit que ses ascendants, il leur appartiendra de fournir la preuve qu’ils tiraient un avantage direct du salaire du défunt.213 Après l’âge de 25 ans, le maintien de la rente suppose que les ascendants établissent que la victime était leur principale source de revenus. Cette notion de principale source de revenu est légalement appréciée, selon la cour de Cassation, «en évaluant la part des revenus du défunt par rapport aux revenus globaux des ascendants au moment de l’accident »214 La jurisprudence insiste sur le fait que cette part doit constituer le principal soutien financier des ascendants.215 Il va de soi que s’il n’est pas établi que la victime, âgée de plus de 25 ans, était la principale source de revenu du ménage, le droit à la

RCJB, 1997, n° 60-66206 Liège, 15 avril 1993, RGAR, 1995, livre 5, n° 12.468.207 voir la loi du 31 mars 1987 sur la filiation.208 Voir avant l’entrée en vigueur de la loi la position de la cour de Cassation qui, déjà, rejetait toute distinction : Cass, 15 octobre 1990, Chron.D.S., 1991, p 53 ; Bull, 1991, p 157; Cass, 15 mai 1992, Pas, 1992, p 804.209 Pour les autres modifications des articles 13 à 15 voir L. VAN GOSSUM, «  Loi du 29 avril 1996 portant des dispositions sociales : modifications à la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail », JTT, 1996, p 297-298.210 Cass, 8 février 1993, JTT, 1993, p 201 ; Chron.D.S, 1993, p 311 ; Bull, 1993, p 153 ; contra mais à tort Trib trav Courtrai, 5 avril 1990, Chron.D.S., 1991, p 60 et note comparer avec Trib trav Louvain, 10 avril 1990, Chron.D.S., 1991, p 61,note J ANDRE.211 Chron.D.S., 1998, p 440 ; voir article 20 de la loi du 10 avril 1971.212 C. trav Liège, 18 décembre 1995, JTT, 1996, p 259 ; Chron.D.S., 1997, p 73.213 C. trav Bruxelles, 28 mai 1990, Bull Ass, 1990, p 496, note LVG ; Gand, 25 février 1994, RW, 1995-1996, 90, note.214 Cass, 18 janvier 1993, RBSS, 1993, p 839, note J.HUYS; JTT, 1993, p 204 ; Bull Ass, 1993, p 200 note LVG ; Bull, 1993, p 57 ; Chron.D.S., 1993, p 309.215 C. trav Liège, 21 septembre 1994, JTT, 1995, p 124 ; C. trav Anvers, 12 février 1992, RDS, 1992, p 152 ; JTT, 1992, p 318 ; C. trav Gand ( section Bruges ) 12 septembre 1991, Chron.D.S., 1992, p 209, note PP ; C. trav Gand, 2 novembre 1989, Chron.D.S., 1990, p 131.

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rente au profit des ascendants ne s’ouvre pas, et par voie de conséquence, l’assurance loi ne doit pas bloquer un capital à cette fin auprès du Fonds des accidents du travail.216.

1.3 La loi sur les accidents du travail indemnise le conjoint survivant.217 En revanche, elle ignore totalement la situation de concubinage, et ne lui reconnaît, dès lors, aucun effets.218. Malgré ce, le tribunal du travail de Louvain, en se référant au principe du respect de la vie privée, au sens de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, considère que cette distinction entre les personnes mariées et celles qui cohabitants constitue une discrimination non autorisée par l’article 14 de la même convention. Les juges en ont déduit que la rente de survie prévue en faveur des conjoints par la législation relative aux accidents du travail doit être pareillement allouée à une personne qui formait un ménage de fait avec la victime219. Ce délicat problème mériterait assurément une question préjudicielle à la Cour d’arbitrage ce d’autant plus que le législateur réglemente explicitement l’existence d’une cohabitation dans diverses branches de notre droit.220

Section 2 : Incapacité de travail.

2.1 Généralités.Les indemnités d’incapacité de travail allouées en vertu de la législation relative aux accidents du travail couvrent le dommage consistant en la perte ou la réduction de la capacité de gagner sa vie par le travail.221 L’incapacité temporaire est évaluée en fonction de la rémunération perçue par le travailleur avant l’accident.222 L’incapacité permanente, quant à elle, se définit par rapport à la perte de la capacité de travail et de concurrence de la victime sur le marché général de l’emploi223 Rappelons que les montants alloués au travailleur pendant la période d’incapacité temporaire se dénomment «  indemnités », et à la consolidation, soit lorsque l’incapacité devient permanente, il est question d’« allocations ».

2.2 L’incapacité temporaire et la remise au travail.(a) Si l’incapacité temporaire de travail est ou devient partielle, l’assureur loi peut demander à

l’employeur d’examiner la possibilité d’une remise au travail de la victime soit dans la profession exercée précédemment soit dans une profession appropriée qui peut lui être confiée à titre provisoire. Dans l’hypothèse où la victime accepte la remise au travail, elle a droit à une indemnisation équivalant à la différence entre la rémunération perçue avant l’accident et celle qu’elle gagne depuis sa remise au travail.224 La cour de Cassation enseigne que les indemnités pour incapacité temporaire et total de travail restent dues lorsque le travailleur ne reprend pas son travail et qu’une remise au travail ne lui est pas

216 Trib trav Anvers, 8 novembre 1990, JTT, 1991, p 92 ; RGAR, 1993, n° 12151 ; le plafond de ce capital est déterminé à la date du décès du travailleur : C. trav Gand ( section Bruges ), 10 septembre 1992, RW, 1992-1993, 680.217 Article 12 de la loi de 1971.218 Voir O. MICHIELS, «  Divorce et accidents du travail », in Divorce commentaire pratique, Kluwer, XI.2.5-1.219 Trib trav Gand, 1 décembre 1997, Chron.D.S., 1998, p 454.220 Voir en matière de chômage et d’allocations aux handicapés : O. MICHIELS, op.cit., in Divorce commentaire pratique, Kluwer,XI.7.8-1 et XI.9.2 ; voir aussi la loi du 23 novembre 1998 instaurant la cohabitation légale, MB, 12.01.1999, p 786 et suivantes dont on attend les AR d’exécution.221 Cass, 5 octobre 1992, Chron.D.S., 1993, p 53 ; Bull, 1992, p 1115 ; Cass, 18 mai 1992, Chron.D.S., 1992, p 328 ; JTT, 1992, p 400 et note ; Bull., 1992, p 816.222 Voir article 22 de la loi.223 C. trav Bruxelles, 29 novembre 1993, Bull Ass, 1994, p 523, note L. VAN GOSSUM ; C. trav Liège, 22 novembre 1993, JTT, 1994, p 188, note ; C. trav Bruxelles, 24 janvier 1994, Bull Ass, 1994, p 386, note LVG ; C. trav Bruxelles, 17 septembre 1990, Bull Ass, 1991, p 299, note W DE BRAEKELEER.224 Article 23 de la loi.

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proposée alors même que la victime est un jobiste qui a recommencé ses études après l’accident.225 Rapidement, les cours et tribunaux du travail ont été confrontés aux difficultés engendrées par des causes d’interruption de la reprise du travail pour des motifs étrangers à l’accident. La cour de Cassation, dans un arrêt prononcé le 7 mai 1990, a décidé que la suspension de l’exécution du contrat de travail durant la période de fermeture de l’entreprise pour congés annuels n’affecte pas la remise effective au travail en vigueur avant celle-ci.226 De ce fait, la cour du travail de Liège a estimé que «  les indemnités d’incapacité temporaire totale ne sont pas dues à l’intimé ( la victime ) pour sa période de vacances annuelles(…) la période de suspension d’exécution du contrat pour la fermeture d’entreprise pendant les vacances annuelles n’affectant pas la remise effective au travail appliquée dans le cas d’espèce ».227 La cour du travail de Bruxelles adopte la même position tout en précisant que «  le problème n’est pas de déterminer la nature juridique exacte du pécule de vacances mais simplement de vérifier si la victime qui a repris le travail subit ou non une perte de salaire (….) qu’on ne voit pas sur quelle base juridique le travailleur en incapacité partielle et remis au travail sans perte financière, pourrait être remis en incapacité temporaire totale par la seule survenance de la période de vacances. ».228 En définitive, il ne peut guère y avoir de cumul entre l’octroi d’un pécule de vacances et l’indemnisation par l’assureur loi. De même, dans l’hypothèse d’une interruption de la remise au travail à la suite d’une maladie dont le lien causal avec l’accident du travail n’est pas démontré, le cumul entre les indemnités de mutuelle et l’intervention de l’assureur loi est, en principe, prohibé.229 Toutefois, en pratique des situations de cumul se présentent230. A ce propos, la cour du travail de Liège, soulignant d’emblée que « la victime doit recevoir la même rémunération que celle qu’elle percevait avant l’accident » a tranché la question en condamnant l’assurance loi au payement de la seule différence entre la rémunération perdue et le montant des indemnités versées par l’organisme assureur.231 Quant est-il des périodes de chômage technique et économique qui suspendent l’exécution du contrat de travail ? La cour du travail de Gand relève que le travailleur qui émarge temporairement à l’assurance chômage conserve son droit aux indemnités d’incapacité de travail temporaire totale puisque la remise au travail est interrompue pour un motif valable.232 En outre, la juridiction gantoise - suivant en cela la position de la cour de Cassation 233- constate que l’octroi d’allocations de chômage ne constitue pas une rémunération.

225 Cass, 24 avril 1989, Chron.D.S, 1989, p 385 ; JTT, 1990, p 269 et note.226 Bull, 1990, p 968 ; RGAR, 1992, n°11.973227 C. trav Liège, 19 septembre 1991, Bull Ass, 1992, p 53 ; C. trav Liège, 5 septembre 1991, RG 15.416/88 et 15.950/89 ; C. trav Liège, ( 3ième chambre ter ) 18 octobre 1993, AXA c/ H., RG 19.208/92.228 26 octobre 1992, Bull Ass, 1993, p 17.229 Article 103, § 1er 6° de la loi du 14 juillet 1994 portant coordination de la loi relative à l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités ; Voir aussi L. VAN GOSSUM «  Evaluation de l’incapacité de travail en loi : évolutions récentes des la jurisprudence allant dans le sens du refus de cumuler deux indemnisations pour un même dommage », JTT, 1995, p 114 ; N. SIMAR, «  L’article 23 de la loi du 10 avril 1971 », Chronique de droit à l’usage du Palais, t VI, 15 avril 1989, p 16.230 Voir L. VAN GOSSUM, loc. cit, JTT, 1995, p 114 notamment lorsque l’organisme assureur n’est pas informé de l’intervention de l’assurance loi.231 C. trav Liège, 17 mai 1993, Bull Ass, 1994, p 518 note P MICHEL ; voir aussi C. trav Bruxelles, 16 février 1987, JTT, 1987, p 419 ; contra C. trav Gand, 16 décembre 1993, JTT, 1994, p 199 et note.232 C. trav Gand, 16 décembre 1993, JTT, 1994, p 199 et note, l’article 23 disposant que la victime dispose de l’indemnité d’incapacité temporaire totale si pour, un motif valable, elle refuse la remise au travail ou le traitement proposé ou si elle y met fin. ; voir aussi Trib trav Mons, 8 février 1989, JTT, 1990, p 64 et note ; comparer avec C. trav Liège, 17 mai 1993, Bull Ass, 1994, p 518 qui admet le cumul avec les prestations de chômage économique.233 Cass, 28 septembre 1981, JTT, 1982, p 158 ; Bull, 1982, p 165 ; RGAR, 1983, n° 10.584.

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(b) La rupture du contrat de travail peut pareillement interférer sur la remise au travail. La Cour suprême, dans un arrêt du 24 octobre 1994, précise que « l’article 23, alinéa 4, 2°234, est applicable chaque fois qu’aucune remise au travail ou qu’aucun traitement n’est proposé à la victime, quelle qu’en soit la raison ; que l’employeur qui licencie la victime, qui a été remise au travail, en dehors du fait de celle-ci, ne lui propose plus de remise au travail à compter du jour du licenciement ; dès lors, la victime ainsi licenciée a droit à une indemnité pour incapacité temporaire totale de travail jusqu’au jour de la consolidation »235.La Haute Cour estime également que le travailleur engagé dans les liens d’un contrat de travail à durée déterminée, victime d’un accident du travail, a droit, conformément à l’article 23 alinéa 4, 2° lorsque le contrat de travail prend fin pour des raisons indépendantes de sa volonté - notamment lorsqu’il arrive à son terme et que la travailleusse n’est pas remise au travail - à l’indemnisation de l’incapacité temporaire totale de travail jusqu’au jour de sa remise au travail intégrale ou de la consolidation.236 En revanche, la Cour décide que la victime ne pourra se prévaloir du bénéficie de l’article 23 alinéa 4, 2°, pour la période postérieure à la rupture du contrat, si le travailleur y a mis fin, même de commun accord 237, ou s’il est congédiée par son propre fait.238

(c) Dans un arrêt prononcé le 1 juin 1987, la cour du travail de Bruxelles constata d’une part, que le travailleur fut victime d’un accident sur le chemin du travail le 8 octobre 1974 et présentait comme séquelles une fracture du tibia et du péroné et d’autre part, selon le rapport d’expertise, la seconde fracture de la même jambe, survenue lors d’une baignade en mer le 8 juillet 1975, soit avant la consolidation, trouvait son origine dans la première lésion. La cour du travail en déduisit« qu’à partir du moment où cette relation causale est raisonnablement établie, il importe peu de se demander si la seconde fracture s’est produite dans le cadre de la vie privée ou de la vie professionnelle ou si elle est due à un événement banal ou particulier, voire même violent ». Le pourvoi dirigé contre cette décision, se fondant sur la violation des articles 22 et 23 de la loi, fut rejeté par la cour de Cassation qui estima «  que la cour du travail a légalement justifié sa décision, sans méconnaître les dispositions légales visées… ; que dès lors que, comme il apparaît des énonciations qui précédent elle avait jugé que cette relation causale était établie, il était indifférent que le second accident fût survenu dans des circonstances relatives à la vie privée. ».239. Par conséquent, et sans préjudice des règles applicables en matière de révision, la réparation du dommage résultant des accidents du travail ne couvre pas seulement le dommage causé au moment de l’accident mais encore toutes les suites ultérieures dont le sinistre en est la cause dans la mesure où elles ne sont pas provoquées par la faute de la victime.

(d) L’arrêté royal du 19 octobre 1993 portant exécution de l’article 23 alinéa 1 de la loi du 10 avril 1971 dispose que si l’avis du médecin du travail a pour effet que la victime ne peut être remise au travail au poste qu’elle occupait avant l’accident ou ne peut l’être que sous certaines conditions, l’intéressé dispose de la possibilité de faire appel à la procédure de recours visée par l’article 146 quater du RGPT. Ce recours, indique le tribunal du travail de Huy, n’est pas ouvert à l’assureur loi, et partant, durant l’expertise, l’assureur loi est

234 qui dispose que la victime bénéficie de l’indemnité d’incapacité temporaire totale si, non remise au travail, il ne lui est pas proposé de traitement en vue de sa réadaptation.235 Chron.D.S., 1995, p 304 ; JTT, 1995, p 123 ; Bull, 1994, p 854 ; Cass, 21 octobre 1994, RW, 1994-1995, 1205, note JRR.236 Cass, 2 novembre 1998, JTT, 1998, p 473, et note ; Cass, 10 juin 1991, Bull, 1991, p 880 ; RDS, 1991, p 339.237 Cass, 14 mars 1988, Bull, 19988, p 845.238 Cass, 10 juin 1991, Bull, 1991, p 880 ; RDS, 1991, p 339.239 Cass, 8 janvier 1990, JTT, 1991, p 204 et note ; Bull, 1990, p 539 ; RDS, 1990, p 131.

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tenu d’indemniser le travailleur en incapacité temporaire totale sur la base de l’article 23.240

2.3 La guérison sans incapacité.Si la victime est guérie sans incapacité permanente, l’assureur loi lui notifie cette décision selon les modalités fixées par l’AR du 16 décembre 1987241. Si l’incapacité temporaire de travail est de plus de trente jours, la décision de l’assureur loi qui déclare la victime guérie est justifiée par un certificat médical. Le travailleur qui est en désaccord avec la position de l’assureur dispose de la faculté de saisir un tribunal dans les trois ans qui suivent la date de notification de la décision querellée.242La cour du travail de Liège estime qu’il peut être admis que la victime qui refuse systématiquement de subir un examen médical, même lorsque celui-ci a été ordonné par un juge, peut être considérée, sur la base des allégations de l’assureur, comme complètement guérie.243

2.4 L’incapacité permanente.L’incapacité permanente résultant d’un accident du travail consiste dans la perte ou la diminution du potentiel économique de la victime sur le marché général de l’emploi.244 La capacité de concurrence sur le marché général de l’emploi à prendre en considération pour fixer l’incapacité permanente de travail est déterminée par les possibilités dont la victime dispose encore, comparées à d’autres travailleurs, d’exercer une activité salariée.245 Parmi les critères qui déterminent l’incapacité permanente, il sera tenu compte de l’atteinte à l’intégrité physiologique de l’intéressé mais encore de son âge, de ses possibilités de recyclage, de sa faculté d’adaptation et de sa formation professionnelle.246 Comme l’indique la cour du travail de Liège, l’incapacité permanente reste totale si la victime a perdu toute possibilité de se procurer par son travail des revenus réguliers même si logiquement l’invalidité a subi une certaine amélioration.247

Il est acquis que la lésion qui n’entraîne aucune répercussion sur la capacité de travail, ni sur la position concurrentielle du travailleur sur la marché du travail n’est pas indemnisée en loi.248 Ainsi, il a été jugé, eu égard à la profession que l’intéressé exerçait et des fonctions

240 25 octobre 1995, Chron.D.S., 1997, p 97.241 Portant exécution de l’article 24 alinéa premier de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail ; voir aussi R.C. GOFFIN et F. LAGASSE, «  Les accidents du travail », in Guide juridique de l’entreprise, 2 édition, Kluwer, livre 68, n°290.242 Trib trav Liège, 16 décembre 1992, Bull Ass, 1993, p 215, note LVG.243 C. trav Liège, ( section Namur ), 27 mars 1990, Bull Ass, 1990, p 317, note LVG.244 Cass, 3 avril 1989, JTT, 1989, p 362 ; Bull, 1989, p 772 ; Cass, 28 mai 1990, Chron.D.S, 1991, p 12 arrêt dans lequel la Cour constate que si l’expert judiciaire s’est limité à la fixation du degré d’incapacité corporelle, les juridictions du travail peuvent évaluer elle-même les autres facteurs socio-économique sans méconnaître la notion d’incapacité permanente de travail.245 Cass 3 avril 1989 précité; C. trav Liège, 10 décembre 1990, JTT, 1991, p 211 ; C. trav Bruxelles, 19 mars 1990, Chron.D.S., 1992, p 214 ; C. trav Bruxelles, 29 novembre 1993, Bull Ass, 1994, p 523 et note LVG ; C. trav Mons, 8 novembre 1995, Bull Ass, 1996, p 257 et note L. VAN GOSSUM ; C. trav Bruxelles, 13 février 1989, Pas, 1989, II, p 203 ;Trib trav Turnhout, 12 mai 1992, Turnh. Rechtsl., 1992, p 135 ; pour les pensionnés voir C. trav Liège, 6 octobre 1988, Bull Ass, 1994, p 58 et note LVG arrêt dans lequel la cour indique que «la limitation légale du droit au travail du pensionné ne signifie nullement que tous les pensionnés indistinctement conservent une même capacité de travail ».246 C. trav Mons, 10 février 1993, Bull Ass, 1993, p 551, note LVG ; C. trav Gand ( section Bruges ) 9 décembre 1993, TBR, 1994, p 19.247 22 novembre 1993, JTT, 1994, p 188 et note.248 C. trav Bruxelles, 22 janvier 1993, RDS, 1993, p 28 ; C. trav Bruxelles, 29 novembre 1993, Bull Ass, 1994, p 523 et note LVG ; C. trav Mons, 13 mars 1992, RDS, 1992, p 297 ; C. trav Liège, 17 mars 1993, Bull Ass, 1993, p 436, note ; C. trav Mons, 10 février 1993, Bull Ass, 1993, p 551, note LVG ; C. trav Bruxelles, 6 mai 1996, Bull Ass, 1997, p 86 et note L.VAN GOSSUM ; C. trav Anvers, 16 mai 1994, Bull Ass, 1995, p 245, note F VAN

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qu’il est en mesure de pouvoir effectuer, que n’engendre aucunes répercussions sur sa compétitivité des brûlures qui occasionnent un prurit249, une atteinte à l’ouïe et au goût250 ou un préjudice esthétique251 Il en va différemment lorsque la lésion présentée par le préjudicié se concrétise par une gêne, même minime, dans l’exécution de certaines tâches ce qui réduit sa capacité concurrentielle sur le marché du travail.252 Donne, dès lors, lieu à réparation en en loi l’allergie résultant de la manipulation par la victime de différents produits qui sont utilisés dans diverses professions.253

Il n’est pas rare que l’incapacité de travail soit appréciée de manière distincte par l’expert médecin désigné dans le cadre d’une procédure pénale ou civile ou dans le cadre de la procédure mue devant le tribunal du travail alors qu’in concreto cette différenciation ne repose sur aucunes justifications sérieuses. N. SIMAR, citant le tribunal du travail de Verviers écrit «  faut-il considérer que l’optique de l’expert est différente selon qu’il examine l’incapacité de travail au vu du droit commun, par rapport au même examen en ce qui concerne les indemnités revenant à la victime dans le cadre d’un accident du travail » et il en conclut légitimement «  le fait que le procès se déroule devant la juridiction du travail ou une juridiction ordinaire ne peut justifier pareille différence irritante dans la plupart des cas pour l’appréciation du dommage. »254

2.5 La consolidation.La fixation de la date de consolidation est largement une question d’ordre médical.255 Elle détermine l’instant où l’incapacité affectant la victime devient permanente.256 La cour du travail de Liège, dans un arrêt du 24 octobre 1994, s’est départi «du principe général de la consolidation unique » et a admis, sur la base de l’accord de toutes les parties, que l’ordre public ne s’opposait pas à l’entérinement d’un rapport d’expertise retenant deux dates de consolidation successives avec deux taux différents d’incapacité définitive.257 Il a encore été jugé que « la décision fixant en droit commun la date de consolidation des lésions ne peut être opposé aux parties ou aux tribunaux du travail appelés à décider de cette date en matière d’accident du travail ; de même, le jugement intervenu en cette matière, qu’elle soit le fait de l’accord des parties entériné par le FAT, ou à défaut d’entérinement, du jugement du tribunal du travail, ne s’impose pas aux juridictions chargées de statuer en droit commun sur la date de consolidation des lésions.».258

AERDE.249 C. trav Bruxelles, 24 janvier 1994, Bull Ass, 1994, p 386, note L. VAN GOSSUM.250 Trib trav Courtrai, 14 février 1989, JTT, 1990, p 278 et note.251 C. trav Liège, ( section Namur ) 29 juin 1989, Chron.D.S., 1990, p 150, in casu, il s’agissait d’une femme d’ouvrage.252 C. trav Liège, 20 octobre 1988, Chron.D.S., 1989, p 354 ; C. trav Bruxelles, 6 novembre 1989, JTT, 1990, p 272 et note ; C. trav Liège, 28 mai 1990, JTT, 1991, p 90 et note.253 C. trav Liège, 6 avril 1995, Bull Ass, 1996, p 52, note LVG ; voir aussi C. trav Bruxelles, 29 juin 1990, Chron .D.S., 1992, p 214 qui aborde le problème de la perte de doigts pour un travailleur manuel.254 N. SIMAR, « L’assurance loi face à l’assureur de responsabilité », in problèmes actuels de la réparation du dommage corporel, Actes du colloque tenu à l’ULB, 10 février 1993, Bruylant, Bruxelles, 1993, p 228-229.255 C. trav Anvers, 16 janvier 1996, JTT, 1996, p 304 et note la cour précise cependant que les conséquences de la consolidation se situent sur le plan juridique ; Trib trav Huy, 3 mai 1995, Bull Ass, 1996, p 271, note P. MICHEL ; comparer avec Trib trav Mons, 29 mai 1991, Chron.D.S., 1992, p 211 et note.256 Voir Trib trav Huy, 10 janvier 1990, JTT, 1990, p 277 et note.257 C. trav Liège, 24 octobre 1994, Bull Ass, 1995, p 392 et note L. VAN GOSSUM ; comparer avec Cass, 30 mars 1987, Bull, 1987, p 909 ; C. trav Liège, 10 décembre 1990, JTT, 1991, p 210.258 Cass, 1 décembre 1995, Chron.D.S, 1996, p 332, RGAR, 1997, n° 12.789 ; Bull, 1995, p 1097 ; C. trav Bruxelles, 13 septembre 1993, Chron.D.S., 1994, p 309

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2.6 L’état antérieur et les accidents successifs.259

La cour de Cassation enseigne que l’incapacité de travail doit s’apprécier dans son ensemble, sans tenir compte de l’état de prédispositions antérieures de la victime dès lors et aussi longtemps que l’accident du travail est, au moins en partie, la cause de l’incapacité.260 Il faut déduire de ce principe que si les affections de la victime ne sont que la conséquence de son état pathologique évolutif, aucune incapacité permanente de travail ne doit être retenue.261 La cour du travail de Liège rappelle toutefois qu’il faut se garder de confondre la règle de l’indifférence de l’état antérieur avec celle qui doit gouverner spécifiquement l’hypothèse des accidents successifs.262 Dans ce cas, la cour de Cassation estime que le dernier accident qui a aggravé les conséquences du premier impose au juge « d’apprécier l’incapacité permanente de travail de la victime dans son ensemble, dès lors que l’incapacité de travail constatée après le dernier accident a celui pour cause, même partielle ».263 La Cour suprême prône par conséquent le principe d’une indemnisation globale du dommage.264 La Haute Cour, semble, au demeurant, justifier la règle du cumul par référence à la rémunération de base qui est présumée traduire la valeur économique sur le marché du travail de la victime.265 Les juridictions de fond ne se sont toutefois pas toutes alignées sur la jurisprudence de la cour de Cassation. En effet, la cour du travail d’Anvers considère que l’indemnité d’incapacité de travail découlant du dernier accident est déterminée en déduisant du degré total d’incapacité le taux d’incapacité résultant de l’accident antérieur.266 Cette position ne nous agrée nullement puisqu’au delà du fait qu’elle puisse aboutir à une réparation insuffisante du dommage engendré par le nouvel accident, elle se heurte, en outre, au principe de l’équivalence des conditions retenu par la cour de Cassation pour définir le lien causal267.268 La cour du travail de Gand, quant à elle, en s’appuyant sur le caractère forfaitaire de l’indemnisation en loi procède à une évaluation globale de l’incapacité permanente de travail en se conformant par conséquent à l’enseignement de la cour de Cassation.269 Enfin, la cour du travail de Liège soutient que l’indemnisation du nouvel accident doit réparer l’atteinte que celui-ci porte au potentiel économique de la victime sur le marché général de l’emploi, tel qu’il a été reconstitué après le dernier accident.270 La position médiane de la cour du travail de Liège qui

259 Voir Y. HANNEQUART, «Etat antérieur et prédispositions morbides » RGAR, 1987, 11230 ; M. BOLLAND « Etat antérieur et accidents du travail », RGAR, 1993, 12113.260 Cass, 21 septembre 1987, JTT, 1988, p 399.261 C. trav Liège, 19 mars 1997, JTT, 1997, p 407.262 C. trav Liège, 6 décembre 1996, Bull. Ass, 1997, p 257 et note L. VAN GOSSUM.263 Cass, 15 janvier 1996, JTT, 1996, p 258 et note ; Bull, 1996, p 70 ; Chron.D.S., 1996, p 619 ; Cass, 28 avril 1997, Chron.D.S., 1998, p 98 et note de P. PALSTERMAN.264 L. VAN GOSSUM, loc.cit., JTT, 1995, p 115265 Cass, 15 janvier 1996, JTT, 1996, p 258 et note ; Chron.D.S., 1996, p 619 et note; C. trav Mons, 3 mars 1993, RG, 10.732; voir pour une critique de cette justification : M. BOLLAND « Etat antérieur et accidents du travail », RGAR, 1993, 12113 ; Observations de L. VAN GOSUM sous C. trav Liège, 6 décembre 1996, Bull. Ass, 1997, p 257.266 31 janvier 1989, RW, 1992-1993, 468 ; voir aussi Trib trav Anvers, 19 avril 1991, Bull Ass, 1991, p 848 et note LVG : le tribunal suit la jurisprudence de la cour du travail d’Anvers et rejette le principe de l’évaluation globale de l’incapacité ainsi si pour le premier accident l’incapacité permanente fut de 22,5 % et le second 24 %, les prestations pour le second accident se calculent sur la base d’un degré d’incapacité de 24-22,5 = 1,5% ; dans le même sens voir aussi Trib.trav Dinant, 10 janvier 1991, Bull Ass, 1991, p 843 et note LVG ; Trib trav Bruxelles, 19 juin 1990, Bull Ass, 1990, p 500, note LVG.267 Voir JL FAGNART, « La responsabilité civile. Chronique de jurisprudence 1985-1995 », Dossier du JT, Larcier, 1997, p 25-26 et les références citées.268 M. BOLLAND, loc cit, RGAR, 1993, 12113 ; voir aussi Y HANNEQUART, « L’état antérieur et les accidents du travail », RGAR, 1975, 9487 269 C. trav Gand, 6 avril 1995, JTT, 1996, p 255 et note.270 C. trav Liège, 6 décembre 1996, Bull Ass, 1997, p 257 et note L. VAN GOSSUM ; C. trav Liège, 9 novembre 1992, JTT, 1993, p 208.

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apprécie, in concreto, l’incidence du nouvel accident sur la capacité socio-économique271 de la victime nous apparaît comme la plus proche de l’esprit de la loi et doit, dès lors, être privilégiée.

2.7 Les incapacités permanentes inférieures à 10 %.Depuis la consolidation272 jusqu’à l’expiration du délai triennal de révision, les allocations annuelles versées au travailleur, calculées par référence à la rémunération de base et au degré d’incapacité de la victime, sont diminuées de 50 % si l’incapacité permanente s’élève à moins de 5 % et de 25% si celle-ci est comprise entre 6 et 10 %.273 La Cour d’arbitrage saisie d’une question préjudicielle portant sur la conformité de cette mesure avec les articles 10 et 11 de la Constitution a rappelé, dans son arrêt du 27 juin 1996, qu’il ne lui appartenait pas de déterminer si la disposition légale querellée fut opportune ou souhaitable mais si la distinction opérée par le législateur reposait sur un critère objectif. In casu la Cour estima que le choix réalisé par le législateur de distinguer des cas voisins, selon la gravité des incapacités, dans un souci d’assainissement financier dans un secteur de la sécurité sociale, imposait la nécessité de fixer quelque part une limite. Par conséquent, elle en conclut que l’article 24, alinéa 3 de la loi du 10 avril 1971 n’établit pas une discrimination de traitement contraire à la Constitution.274

Nous savons qu’à l’expiration du délai de révision un capital est versé au travailleur atteint d’une incapacité de moins de 10 %. Celui-ci, estime la cour de Cassation, indemnise le préjudice subi pendant toute la durée de vie probable de la victime, en raison de la diminution ou de la perte de sa valeur économique sur le marché du travail, et notamment, le dommage pour incapacité de travail après l’âge de la pension.275

2.8 L’allocation pour l’aide d’une tierce personne.La loi programme du 22 décembre 1989 a fondamentalement modifié cette matière. En effet, l’article 24, alinéa 4 de la loi sur les accidents du travail dispose actuellement que «si l’état de la victime exige absolument et normalement l’assistance d’une autre personne, elle peut prétendre à une allocation complémentaire fixée en fonction du degré de nécessité de cette assistance, sur la base du revenu minimum mensuel moyen garanti tel que déterminé pour un travailleur à temps plein, par convention collective de travail conclue au sein du Conseil national du travail ».276 S’il apparaît que l’allocation pour l’aide d’une tierce personne conserve un caractère forfaitaire, l’indemnisation s’effectue, à présent, non plus par référence à la rémunération de base de la victime mais par rapport au revenu minimum mensuel moyen277 ce qui annihile toutes discriminations entre travailleur puisque que cette aide n’est plus modulée en fonction de la hauteur de la rémunération perçue. Pour faire bref, nous

271 C. trav Liège, 15 septembre 1993, JTT, 1994, p 195.272 Soit la date où l’incapacité devient permanente.273 Article 24, alinéa 3 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail.274 C.A., 27 juin 1996, MB, 9 août 1996, p 21.313 ; Chron.D.S., 1997, p 93 et note ; RBSS, 1996, p 833, note M. SISCOT ; Arr. C.A., 1996, p 519 ; voir aussi Trib trav Liège, 15 octobre 1990, Bull Ass, 1991, p 95, note LVG.275 Cass, 27 septembre 1988, Bull, 1989, p 98 cette jurisprudence s’applique aux capitaux versés en application de la loi sur la base des articles 24,25,45, 45bis et 45ter.276 Entrée en vigueur le 9 janvier 1990 ; le nouvel article 24, alinéa 4 s’applique immédiatement aux allocations dues pour des accidents antérieurs au 9 janvier 1990 qui persiste ou se prolonge après cette date, à l’exception des allocations qui ont été définitivement fixée à ce moment : voir Cass, 19 décembre 1973, JT, 1974, p 137 ; M. BONHEURE « Modifications récentes de la loi du 10 avril sur les accidents du travail », JTT, 1991, p 188 ; voir aussi C. trav Gand, 1 décembre 1997, JTT, 1998, p 484277 Voir CCT n° 43, conclue au sein du CNT, portant modification et coordination des CCT n° 21 du 15 mai 1975 et n° 23 du 25 juillet 1975 relatives à la garantie d’un revenu minimum mensuel moyen, rendue obligatoire par l’AR du 29 juillet 1988.

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pouvons remarquer que l’allocation complémentaire pour l’assistance d’une tierce personne n’est octroyée que dans des cas d’absolue nécessité pour permettre à la victime d’accomplir les actes de la vie courante.278

La cour de Cassation a dégagé diverses lignes de conduite qui nous permettent de délimiter l’étendue et les spécificités de cette aide. Dans un arrêt du 20 avril 1998, la Haute Cour enseigne que les soins auxquels la victime d’un accident du travail a droit et qui comprennent les soins médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et hospitaliers sont distincts de l’allocation complémentaire pour l’assistance d’un tiers fixée en fonction du degré de nécessité de cette assistance. De même, selon la Cour, l’opportunité de la nécessité de l’assistance d’un tiers en cas d’accident du travail se différencie de la question de savoir si à la suite de l’accident, une prothèse ou un appareil orthopédique est requis. Dès lors, l’allocation complémentaire pour l’assistance maximale d’un tiers n’exclut pas la nécessité d’une prothèse.279 La cour de Cassation précise également que « la loi ne fixe pas de critère d’évaluation de l’allocation complémentaire ; qu’elle laisse au juge le soin d’en apprécier le montant dans les limites qu’elle fixe et ne réserve pas l’allocation complémentaire la plus élevée qui soit autorisée, à l’assistance la plus complète possible ». 280 La Cour énonce encore qu’aussi longtemps que l’allocation complémentaire à laquelle la victime a droit n’est pas fixée définitivement281, elle doit s’apprécier « sur la base du revenu minimum mensuel moyen garanti en tenant compte des adaptations et modifications de celui-ci prévues par CCT conclue au sein du CNT».282 M. VAN GOSSUM écrit à ce propos que la Cour avalise un mécanisme de double indexation. En effet, l’allocation pour l’aide d’une tierce personne est indexé par rapport à l’indice pivot au moment de l’accident. Aussi, en laissant évoluer le revenu minimum mensuel moyen garanti jusqu’au jour du règlement définitif, il se crée un chevauchement de deux mécanismes d’indexation. Cet auteur en conclut «  ce phénomène de double indexation est fondamentalement malsain et introduit d’ailleurs une discrimination entre victimes puisque celles-ci bénéficieront d’une base de règlement plus ou moins favorable selon que la date du règlement définitif de leur indemnisation est plus ou moins rapprochée de la date de la consolidation ».283 C’est pourquoi par un jugement du 22 janvier 1999, le tribunal du travail de Tournai a posé à la Cour d’Arbitrage la question préjudicielle suivante : « s’ils doivent être interprétés en ce sens que le montant de la rémunération moyenne mensuelle minimale garantie à prendre en considération pour l’aide d’une tierce personne est celui à la date de l’accident, réévaluée selon l’évolution indiciaire à la date à laquelle interviendra le règlement définitif des conséquences de l’accident du travail dont est victime une personne, l’article 24 (et éventuellement 27bis) de la loi du 10 avril 1971 ne créent-ils pas une inégalité ou une discrimination entre les victimes d’accident du travail suivant le moment auquel interviendra ce règlement définitif ? ».284 Affaire à suivre…

278 Voir C. trav Bruxelles, 12 mai 1998, Bull Ass, 1998, p 456, note L. VAN GOSSUM.279 JTT, 1998, p 331 ; comparer avec C. trav Anvers, ( section Hasselt ), 20 mai 1996, RBSS, 1997, p 994 note J. HUYS.280 Cass, 28 février 1994, Chron.D.S., 1994, p 158 ; Bull Ass, 1994, p 367 et note VAN GOSSUM ; JTT, 1994, p 423 et note ; RGAR, 1995, n° 12.442 ; Bull 1994, p 207 ; voir aussi C. trav Anvers, ( section Hasselt ) 5 avril 1989, Chron.D.S., 1989, p 344 ; Trib trav Gand, 25 septembre 1992, Chron.D.S., 1993, p 315 et note.281 Voir C.trav Liège, 18 novembre 1996, JTT, 1997, p 408 ; Tri. trav Turnhout 12 mai 1992, Trunh. Rechtsl, 1992, p 135 ; Trib trav Louvain, 2 décembre 1997, Chron.D.S., 1998, p 447.282 Cass, 28 février 1994, précité ; Cass, 1 février 1993, JTT, 1993, p 203 ; Chron.D.S., 1993, p 315 ; Bull, 1993, p 126 ; Larcier Cass, 1993, n° 76 ; voir aussi C. trav Gand, 6 juin 1996, RBSS, 1997, p 983, note J. HUYS ; C. trav Gand, 2 novembre 1995, TGR, 1996, p 167 ; C. trav Gand, 18 novembre 1993, Chron.D.S., 1994, p 311 ; Trib trav Charleroi, 8 avril 1998, Chron.D.S., 1998, p 449 ; contra C. trav Bruxelles, 21 avril 1997, Chron.D.S., 1998, p 442.283 Observations sous Cass, 28 février 1994 précité.284 MB, 3.04.1999, p 11.230.

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L’évaluation de l’allocation octroyée pour l’assistance d’une tierce personne peut être déterminée en regard du prix de revient de l’aide requise et par comparaison entre ce prix et la rémunération de base.285 Il n’existe, en fait, pas de méthode d’évaluation ayant force obligatoire, pas même le système de points du régime des allocations aux handicapés.286

2.9 Les rechutes en incapacité temporaire totale.La victime d’un accident du travail atteint d’une incapacité permanente qui exerce une activité professionnelle et qui voit son incapacité s’aggraver à un point tel qu’elle s’avère être temporairement dans l’impossibilité de travailler, peut prétendre, si la rechute survient durant le délai de révision triennale, aux indemnités prévues par les articles 22 ( incapacité temporaire et totale ) et 23 (incapacité temporaire partielle ) de la loi du 10 avril 1971. La cour du travail de Liège estime que la rémunération quotidienne moyenne287 prise en considération pour l’indemnisation de la période de rechute doit être calculée en fonction du salaire de base qui précède l’accident et du plafond qui le limite.288 Cette même juridiction a décidé, par un arrêt du 6 avril 1995, qu’une éventuelle rechute en incapacité temporaire totale n’a pas d’incidence sur l’évaluation de l’incapacité permanente de travail puisque l’intéressé peut se prévaloir du bénéfice de l’article 25 pour cette nouvelle période d’ITT.289 La cour du travail de Bruxelles retient pour sa part qu’une rechute après la consolidation des lésions engendrées par la non adaptation de l’activité professionnelle de la victime en regard de son incapacité permanente fixée en tenant compte des dangers de répétition du même accident - in casu, la lésion diagnostiquée chez le travailleur était d’origine lombaire - ne peut être mise à charge de l’assurance loi sous peine d’indemniser deux fois le travailleur pour le même dommage.290 On peut se demander si cette décision n’est pas trop catégorie tant il est vrai que l’employeur n’a pas d’obligation de réintégrer le travailleur dans d’autres fonctions ou que l’exercice de nouvelle fonction peut avoir un retentissement sur les chances de promotion au sein de l’entreprise. La cour de Cassation, quant à elle, a rejeté le moyen qui soutenait que le jugement qui détermine la date de consolidation des lésions et le taux d’incapacité permanente fait obstacle, en raison de l’autorité de chose jugée qui s’attache à cette décision, à la recevabilité de l’action formée par la victime sur la base de l’article 25 de la loi du 10 avril 1971 pour une période antérieure audit jugement. La Haute Cour précise, en effet, « qu’une demande fondée sur l’article 25 ne tend pas à remettre en cause ce qui a été décidé en application de l’article 24 à savoir la date de consolidation des lésions et le degré d’incapacité permanente ; que pour fixer cette date et ce degré, le juge n’a pas à se prononcer sur une application éventuelle de l’article 25 ; qu’en procédant à cette fixation, le juge n’exclut, dès lors, pas l’existence possible d’une aggravation temporaire, au sens de cette disposition, ayant débutée avant sa décision ».291 En ce qui concerne les aggravations temporaires intervenant, après le délai de révision de trois ans,292 et qui sont en relation causale avec

285 Cass, 10 juin 1991, Bull, 19912, p 880 ; RDS, 1991, p 339 ; voir aussi C. trav Bruxelles, 21 avril 1997, Chron D.S., 1998, p 442 la cour se réfère au nombre d’heures pour lesquelles l’aide est nécessaire ;Cass, 10 octobre 1994, Chron.D.S., 1995, p 159 et note P. PALSTERMAN ; C trav Anvers, ( section Hasselt ) 21 décembre 1988, JTT, 1990, p 60 et note ;Trib trav Turnhout, 12 octobre 1993, Chron.D.S., 1994, p 320, note ; Chron.D.S., 1989, p 346.286 C. trav Bruxelles, 19 octobre 1989, RGAR, 1991, n° 11.811 ; C. trav Anvers, 27 juin 1997, Chron.D.S., 1998, p 445 ; voir aussi Trib trav Bruxelles, 28 juin 1991, RGAR, 1993, n° 12.230.287 cette notion à laquelle fait référence l’article 22 de la loi est égale à la rémunération de base divisée par 365.288 C. trav Liège, 20 mai 1996, Bull Ass, 1997, p 247 et note L. VAN GOSSUM.289 Bull Ass, 1996, p 52 et note L. VAN GOSSUM.290 C. trav Bruxelles, 18 octobre 1993, Bull Ass, 1995, p 241 et note LVG.291 Cass, 5 novembre 1990, JTT, 1991, p 79 ; JLMB, 1991, p 298 note SIMAR ; Chron.D.S., 1991, p 175 ; Bull 1991, p 240 ; voir aussi Trib. trav Bruges, 21 avril 1995, RW, 1995-1996, p 608.292 Voir C. trav Bruxelles, 25 juin 1990, Bull Ass, 1991, p 293, note F. VAN AERDE qui précise que l’aggravation temporaire doit intervenir après l’expiration du délai de révision.

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l’accident du travail,293 des indemnités sont uniquement dues si l’incapacité permanente de travail est d’au moins 10 %.294 Ce degré d’incapacité doit être atteint au moment où l’aggravation se produit 295 et ce indépendamment du taux d’incapacité permanente initial.

2.10 Le nouvel article 25 ter de la loi de 1971 : la récupération du salaire garanti.La loi du 25 janvier 1999 portant des dispositions sociales insère dans la loi de 1971 un article 25ter qui dispose que l’employeur redevable d’une rémunération garantie, conformément aux articles 52, 70 ou 71 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, à la victime d’un accident du travail survenu chez un autre employeur est subrogé dans les droits de la victime selon les modalités fixées par le Roi.296 En pratique, dans les hypothèses de rechute en incapacité temporaire de travail en cas de remise au travail chez un nouvel employeur, ce dernier qui est redevable de la rémunération garantie disposera, dorénavant, d’une action subrogatoire devant lui permettre de recouvrer en tout ou en partie cette rémunération auprès de l’assureur loi qui est tenu de payer les indemnités au cours de la même période d’incapacité temporaire de travail en vertu de la loi de 1971. Il en sera de même dans les situations où un travailleur est occupé chez des employeurs différents. L’employeur redevable de la rémunération garantie pour l’accident autre qu’un accident du travail sera subrogé dans les droits de la victime vis-à-vis de l’assureur loi. En définitive, l’assureur remboursera aux différents employeurs les indemnités d’incapacité temporaire de travail proportionnellement à la rémunération garantie allouée.297

Section 3 : Les autres allocations.Les articles 25 in fine, et 27bis à 27quater de la loi du 10 avril 1971 et l’AR du 10 décembre 1987 relatif aux allocations accordées dans le cadre de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail fixent le principe et les conditions d’octroi d’allocations complémentaires à l’indemnisation de l’incapacité de travail. Parmi ces allocations, on dénombre : l’allocation supplémentaire octroyée si l’allocation annuelle ou la rente avant tout

payement en capital est inférieur à certains montants.298

l’allocation d’aggravation accordée à la victime dont l’état résultant de l’accident du travail s’aggrave de manière définitive après l’expiration du délai de révision pour autant que l’incapacité de travail après cette aggravation soit de 10 % au moins.299

l’allocation de décès attribuée aux ayants droit de la victime si la preuve est établie que le décès est survenu par suite de l’accident du travail après l’expiration du délai triennal de révision.300

l’allocation spéciale octroyée à la victime ou à ses ayants droit s’ils fournissent la preuve que l’accident ne donnait pas lieu, au moment du fait dommageable, à une réparation comme accident du travail ou comme accident sur le chemin du travail, alors que l’application de la loi au moment de la demande aurait donné lieu à la débition d’une rente.301

293 Voir C. trav Anvers, ( section Hasselt ) 10 janvier 1994, Limb. Rechtsl., 1994, p 161.294 Article 25 in fine ; la cour du travail d’Anvers estime qu’aucune allocation d’aggravation ne peut être octroyée si l’incapacité permanente à fait l’objet d’une évaluation trop faible car il n’y a pas alors aggravation : C. trav Anvers, 9 novembre 1993, JTT, 1994, p 430.295 Cass, 9 octobre 1995, JTT, 1996, p 253, ; RBSS, 1996, p 317 et note M. SISCOT.296 MB, 6 février 1999, p 3553 article 2, sa date d’entrée en vigueur est fixée par le Roi.297.Chambre, session ordinaire 1997-1998, 25 août 1998, Doc Parl , n° 1722/1-97-98, pp. 2-4.298 Articles 5 et suivants de l’AR du 10 décembre 1987.299 Article 9 de l’AR du 10 décembre 1987 ; voir ci dessus.300 Article 10 de l’AR du 10 décembre 1987.301 Article 27 quater de la loi.

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l’allocation de péréquation qui, à partir du 1 janvier 1988, a été remplacée par l’indexation à charge de l’assurance loi pour les accidents postérieurs à cette même date.302

Il importe de préciser que les allocation de péréquation et les allocations supplémentaires sont accordées d’office. Les autres allocations, en revanche, sont allouées à partir du premier jour du mois au cours duquel la demande est introduite. 303 Cette distinction est importante puisque les allocations allouées d’office ne sont pas soumises au délai de prescription triennale visé par l’article 69 de la loi de 1971. Ainsi, le tribunal du travail de Namur, suivant en cela la jurisprudence de la cour du travail de Liège, estime que « le droit aux allocations supplémentaires et de péréquation étant accordées d’office (elles) ne font pas partie des indemnités visées à l’article 69 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail, (elles) ne tombent pas dans le champ d’application de l’article 2277 du code civil et ( partant ) le droit à obtenir celles-ci est imprescriptible ».304 On peut s’étonner de cette conclusion et nous ne pouvons dès lors que nous rallier à l’analyse de Luc VAN GOSSUM, - qui fait écho dans sa note aux observations formulées par Henri FUNCK à propos de la jurisprudence de la cour du travail de Liège - , qui s’interroge sur ce qui empêcherait les principes généraux de droit civil de la prescription de trouver à s’appliquer au cas d’espèce.305

L’article 27bis prévoit que l’indexation pratiquée pour les accidents survenus après le 1 janvier 1988 n’est pas applicable si l’incapacité permanente n’atteint pas au moins 10 %. On pouvait s’inquiéter de l’existence d’une différentiation entre des cas voisins fondés exclusivement sur la gravité des incapacités ? Aussi, la Cour d’arbitrage dut estimer si une telle disposition fut conforme aux articles 10 et 11 de la Constitution. D’emblée la Cour constata, dans son arrêt du 27 juin 1996, qu’il ne lui appartient pas dans le cadre du contentieux de l’égalité d’apprécier si une mesure est opportune ou souhaitable. Ce principe rappelé, elle en déduit que l’absence d’adaptation à l’indice des prix des indemnités dues aux victimes d’accidents de travail dont le taux d’incapacité est inférieur à 10 % n’est guère disproportionné à l’objectif poursuivi d’assainissement financier dans le secteur de la sécurité sociale. Dès lors, l’article 27bis de la loi de 1971 ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.306

Section 4 : Les soins médicaux et prothèses.

4.1 Les soins médicaux.

302 Voir article 27bis de la loi ; articles 6 et suivants de l’AR du 21 décembre 1971 concernant les allocations et l’assistance sociale accordées par le FAT à propos de cet article la cour de Cassation dans un arrêt du 22 mai 1989 enseigne «l’allocation de péréquation prévue par l’article 6 de l’AR du 21 décembre 1971 ne s’applique qu’aux allocations annuelles et aux rentes au sens de cet article, c’est-à-dire aux indemnités visées par l’article 24 de la loi du 10 avril 1971 ; elle ne s’applique donc pas à l’allocation d’aggravation prévue à l’article 7 du même AR, laquelle n’est ni l’allocation annuelle ni la rente mentionné à l’article 6 » : JTT, 1990, p 54 ; Chron.D.S, 1989, p 386 ; RDS, 1989, p 340 ; Bull, 1989, p 997 ; article 17 l’AR du 10 décembre 1987 qui disposent que toutes les personnes qui, en vertu des dispositions légales ou réglementaires en vigueur au 31 décembre 1987, pouvaient prétendre à l’octroi d’une allocation en application de l’AR du 21 décembre 1971, gardent les droits qu’elles peuvent faire valoir sur la base dudit arrêté.303 Voir article 13 de l’AR du 10 décembre 1987.304 Tri trav Namur, 3 juin 1998, Bull Ass, 1998, p 468 et note L. VAN GOSSUM ; C.trav Liège, ( section Namur ) 2 mai 1995, Chron.D.S, 1997, p 69 ; voir aussi Trib trav Namur, 15 novembre 1989, JTT, 1990, p 62 et note jugement dans lequel le tribunal retient une négligence dans le chef du FAT engageant sa responsabilité sur la base de l’article 1382 du Code civil.305 L VAN GOSSUM, Bull Ass, 1998, p 470 notamment l’article 2272 bis du Code civil.306 C.A., n° 40/96, 27 juin 1996, MB, 9 août 1996, p 21.313 ; Chron.D.S., 1997, p 93 et note ; RBSS, 1996, p 833, note SISCOT M.

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La victime d’un accident du travail a droit aux soins médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et hospitaliers nécessités par cet accident, soit tous les soins de nature à la remettre dans un état physique aussi proche que possible de celui qui était le sien avant la survenance de l’accident du travail. Rappelons que la cour de Cassation estime que ces soins médicaux sont distincts de l’allocation complémentaire pour l’assistance d’un tiers.307 Les frais médicaux, sont en principe, accordée sans limite dans le temps.308 Il a été jugé que la victime, dont l’accident du travail a été reconnu par l’assurance loi et qui ne dispose pas des moyens financiers suffisants pour prendre en charge des frais médicaux – in casu de kinésithérapie, de massage et le coût de chaussures orthopédiques - peut, par le biais d’une action en référé, obtenir la condamnation à titre provisoire de l’assurance loi qui se refuse d’opérer des décaissements tant que la détermination du pourcentage d’incapacité n’a pas eu lieu.309

4.2 Les prothèses.La cour de Cassation définit les notions de prothèses et appareils orthopédiques comme étant « tous « membres artificiels et moyens mécaniques » dont une personne valide n’a pas besoin et qui, suite à un accident du travail, sont nécessaires pour soutenir ou remplacer des membres déficients ou affaiblis ou pour en développer l’usage ou les fonctions ».310 La Haute Cour, dans un arrêt du 23 janvier 1995, ajoute encore « que les parties du corps déficientes ou affaiblies assistées sont les membres et les organes et il est indifférent que les moyens artificiels présentent ou non un caractère d’utilisation durable. »311 Dès lors, les objets suivants : des pinces de « Cuningham », des culottes en plastique, de l’ouate cellulosique et des compresses nécessaires à la perte de la fonction urinaire de la victime justifient parfaitement la constitution d’un capital prothèse.312 Il a encore été décidé que constitue une prothèse au sens de la réglementation relative aux accidents du travail : le placement d’un embrayage électromagnétique rendu nécessaire pour atténuer les

difficultés d’une victime effectuant des trajets en voiture dépassant 100 kilomètres.313

un fauteuil roulant et un lit adapté.314

un neurostimulateur implanté qui a des effets analgésiques sur la victime.315

des adaptations au véhicule316 ou à la maison.317

un appareillage destiné à faciliter l’entrée et la sortie d’un véhicule.318

un ordinateur personnel compensant la perte de la fonction d’écrire.319

les lunettes.320

307 Cass, 20 avril 1998, JTT, 1998, p 331.308 Voir Corr Ypres, 7 décembre 1995, Bull Ass, 1996, p 450 et note J. VANHOREN qui concerne des frais médicaux et pharmaceutiques accordés après la consolidation ; R.C. GOFFIN et F. LAGASSE, loc. cit., guide juridique de l’entreprise, titre VI, livre 68, Kluwer, n° 320.309 Trib trav Liège, 24 octobre 1988, Chron.D.S., 1992, p 215.310 Cass, 15 octobre 1990, Chron.D.S., 1991, p 54 ; Bull, 1991, p 160 ; RBSS, 1991, p 271, note J. HUYS.311 Chron.D.S, 1995, p 168 ; RGAR, 1995, n° 12.519 ; JTT, 1995, p 472 ; Bull, 1995, p 61.312 C. trav Mons, 14 mai 1993, JTT, 1993, p 440.313 C. trav Mons, 18 février 1998, Bull Ass, 1998, p 203, note L. VAN GOSSUM.314 C. trav Gand ( section Bruges ) 21 décembre 1989, RBSS, 1990, p 75, note J. HUYS ; Chron.D.S, 1990, p 135.315 C. trav Anvers, 31 juillet 1990, Chron.D.S, 1994, p 292.316 Trib trav Gand, 9 mai 1988, RW, 1989-1990, 962 ; Trib trav Turnhout, 12 mai 1992, Turnh. Rechtsl., 1992, p 135; voir aussi, J. HUYS, «Les adaptations aux véhicules automobiles sont-elles des prothèses au sens de la législation en matière d’accident du travail ? », RBSS, 1990, p 75.317 C. trav Gand, 6 juin 1996, RBSS, 1997, p 983, note J. HUYS.318 Trib trav Louvain, 2 décembre 1997, Chron.D.S., 1998, p 447 ; comparer avec C.trav Liège, 26 février 1996, JTT, 1996, p 303.319 Trib trav Anvers, 1 février 1996, Chron.D.S., 1997, p 84 et note.320 Il s’agit là d’une prothèse endommagée par l’accident : C. trav 23 octobre 1989, Chron.D.S., 1990, p 134, note P. PALSTERMAN ; JTT, 1990, p 274 et note ; C. trav Liège, 21 février 1991, JTT, 1991, p 491 ; C. trav

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Nous pourrions certainement multiplier à l’infini les exemples de prothèses. En réalité, il appartient aux juges d’apprécier sur la base des éléments concrets qui fondent la demande de la victime d’un accident du travail si les adaptions et l’appareillage sollicités sont indispensables pour sauvegarder les fonctions corporelles affectées.

L’assurance loi est tenue de constituer un capital prothèses pour assurer l’entretien et le renouvellement de celles-ci. A propos du calcul d’un capital relatif à des aménagements d’un véhicule, la cour du travail de Liège a décidé que la notion de coût des appareils de prothèse comprend non seulement les frais de l’équipement nécessaire à l’utilisation du véhicule – in casu une boule volant, une boîte de vitesse automatique, et la direction assistée - mais encore le coût de la surprime, calculée à raison de l’équipement concerné, non pas de l’assurance dégâts matériel, mais de l’assurance obligatoire responsabilité civile du conducteur d’un véhicule automoteur.321

4.3 Les frais de déplacement.L’article 33 de la loi de 1971 prévoit que, dans les conditions fixées par le Roi322, le conjoint, les enfants et les parents ont droit à l’indemnisation des frais de déplacement résultant de l’accident. On épinglera à ce propos le jugement du tribunal du travail de Tongres qui rappelle que les déplacements en provenance ou à destination d’un pays situé en dehors de l’union européenne sont soumis à l’autorisation préalable de l’assurance loi.323

Section 5 : La rémunération de base.

5.1 Généralités.La loi du 10 avril 1971 définit la rémunération de base comme celle à laquelle le travailleur a droit pour l’année qui a précédé l’accident en raison de la fonction exercée dans l’entreprise au moment de l’accident.324 Est considéré comme rémunération, toute somme ou avantage, évaluable en argent, octroyé directement ou indirectement par l’employeur au travailleur en raison des relations de travail existant entre eux, ainsi que le pécule de vacances325, soit que cet octroi résulte d’un contrat individuel écrit ou verbal, d’un règlement, d’une convention collective, d’un usage ou d’un statut, soit que cet octroi résulte d’une loi ou d’une obligation prise unilatéralement par l’employeur. Lorsque la période de référence d’une année est incomplète ou lorsque la rémunération du travailleur est inférieure, en raison de circonstances exceptionnelles, au salaire qu’il perçoit normalement, la rétribution à laquelle le travailleur a droit est complétée par une rémunération hypothétique pour les journées, en dehors du temps de repos, pour lesquelles le travailleur n’a pas reçu de rémunération.326 La notion de rémunération de base est d’importance puisqu’elle constitue l’assiette du calcul de l’allocation annuelle due en cas d’incapacité permanente. En définitive, la rémunération de base est présumée traduire la valeur économique sur le marché du travail de la victime d’un accident

Liège, 21 juin 1993, JLMB, 1994, p 807 ; Bull Ass, 1995, p 98 et note F. VAN AERDE ; JTT, 1995, p 125 et note.321 C. trav Liège, 29 juin 1995, Chron.D.S., 1997, p 72, note JJ.322 AR du 21 décembre 1971 portant exécution de certaines dispositions de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail.323 24 juin 1996, Chron.D.S., 1997, p 86 ; article 37 § 4 de l’AR du 21 décembre 1971 cité.324 Voir articles 34 et 35 de la loi de 1971.325 Voir Cass, 28 mai 1990, JTT, 1991, p 84.326 Voir notamment C. trav Bruxelles, 22 mai 1989, RW, 1990-1991, p 398 ; C. trav Gand, 15 juin 1995, Bull. Ass, 1995, p 556 et note J. VANHOREN ; C. LESCART et O. MICHIELS, « La rémunération de base en matière d’accident du travail sous la loupe de la Cour du travail de Gand », Idj, 1999/2, p 67-68.

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du travail.327 Précisons que pour les sportifs rémunérés,328 la rémunération de base est calculée en regard du montant fixé forfaitairement par le Roi et applicable au moment de l’accident.329

5.2 La rémunération à laquelle le travailleur a droit.Dans un important arrêt prononcé le 12 février 1990, la cour de Cassation précise que « ne peut être considéré comme rémunération le remboursement des frais exposés par le travailleur en raison des conditions et circonstances de travail qui lui sont imposées et qui sont à charge de l’employeur».330 En l’espèce, la Haute Cour estima que la décision qui exclue du calcul de la rémunération de base « l’indemnité de rafraîchissement », prévue par une convention collective de travail, aux motifs qu’elle constitue le remboursement de frais inhérent à la profession à charge de l’employeur et de frais résultant du respect des règles de sécurité routière est légalement justifié. La cour de Cassation a également décidé que le pourvoi dirigé contre un arrêt de la cour du travail d’Anvers qui englobe dans le montant de la rémunération de base une indemnité de mobilité - car il résulte de la convention collective de travail déterminant les conditions d’octroi de ladite indemnité que celle-ci est pareillement due aux travailleurs lorsqu’ils sont transportés par les soins et aux frais de l’employeur - doit être rejeté dès lors « que l’indemnité de mobilité est accordée indépendamment du fait que le travailleur supporte ou non les frais de déplacement ; (…) cette indemnité ne constitue pas le remboursement des frais de transport exposés réellement par le travailleur. »331 C’est à l’assurance loi qui conteste l’incorporation d’un avantage dans la rémunération de base qu’il incombe d’établir que cet avantage ne constitue pas une rémunération au sens de la loi de 1971.332 C’est, en revanche, à la victime, qui entend faire inclure dans sa rémunération de base un avantage évaluable en argent, à fournir la preuve que ledit avantage lui est octroyé en raison des relations de travail qui le lient à son employeur.333

Durant la période recensée ont été inclus dans la rémunération de base : les primes accordées à des facteurs pour leur déplacement à vélo et les primes de caisse.334

le pécule de vacances complémentaires.335

l’indemnité supplémentaire pour le travail de nuit.336

En revanche, il a été jugé que ne faisait pas partie de la rémunération de base :327 Cass, 15 janvier 1996, JTT, 1996, p 258.328 Voir articles 6 et 6bis AR du 28 novembre 1969 pris en exécution de la loi du 27 juin 1969 révisant l’arrêté loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs salariés ; Loi du 24 février 1978 relative au contrat de travail du sportif rémunéré ; voir aussi les articles 85 et 86 de la loi de 1971.329 Cass, 17 février 1992, Chron.D.S., 1992, p 185 ; Bull, 1992, p 540 ; JTT, 1992, p 454 arrêt relatif à un joueur de football professionnel ; voir aussi AR du 10 août 1987 fixant les conditions spéciales pour l’application de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail aux sportifs : article 5.330 Chron.D.S., 1990, p 125 ; JTT, 1990, p 267 ; Bull, 1990, p 690 ; article 2, 2° et 3° de la CCT du 25 janvier 1985, conclue au sein de la commission paritaire du transport ; voir aussi Trib trav Charleroi, 20 juin 1991, JTT, 1991, p 495.331 Cass, 22 juin 1992, RBSS, 1993, p 857, note SISCOT M ; JTT, 1992, p 321 ; Chron.D.S., 1992, p 407 ; Bull, 1992, p 938 ; article 31, § 2, alinéa 3 de la CCT du 30 juin 1980 conclue au sein de la commission paritaire de la construction ; voir aussi C. trav Mons, 11 octobre 1991, JTT, 1992, p 328 et note ; C. trav Gand ( section Bruges ) 10 janvier 1991, Chron.D.S, 1992, p 207 ; C. trav Anvers, 4 décembre 1990, Chron.D.S, 1991, p 182 ; Trib trav Bruges, 13 février 1990, Bull Ass, 1990, p 321.332 Cass, 25 novembre 1996, JTT, 1997, p 25 et note ; Bull Ass, 1997, p 61 et note L. VAN GOSSUM ; Bull, 1996, p 1165.333 Ibidem.334 Trib trav Liège, 7 février 1991, Chron.D.S, 1992, p 215 ; voir aussi, J.M. BOLLE, « La rémunération de base en accidents du travail », Orientations, octobre 1987/10, p 232.335 C. trav Gand, 13 mars 1991, JTT, 1991, p 490 ; C. trav Gand, 13 mars 1991, JTT, 1991, p 490.336 C. trav Liège, 15 février 1990, RDS, 1990, p 367 ; Notons qu’il en est de même pour les heures supplémentaire même si celles-ci ont été prestées en contravention avec la loi : Novelles, t IV, A 840 et A 855.

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l’indemnité de séjour versée en application d’une CCT aux transporteurs routiers.337

les cotisations patronales à un fonds de pension extra-légale et à une assurance accident privée.338

Il existe encore un abondante jurisprudence relative aux chèques repas. Le principe reste cependant le même ; il appartient aux juges d’apprécier au cas par cas, sur la base des éléments produits par les parties, si le chèques repas constitue ou non le remboursement de frais exposés par le travailleur. Par conséquent, doit être approuvé l’arrêt de la cour du travail de Liège qui note « qu’un avantage évaluable en argent, même s’il n’est pas expressément mentionné à l’alinéa 2 de l’article 35 de la loi de 1971 ( qui énumère les sommes, avantages ou indemnités qui ne sont pas considérés comme rémunération ) ne fait dès lors pas automatiquement et nécessairement partie de la rémunération de base et ne doit ainsi pas être inclus dans celle-ci le remboursement des frais exposés par le travailleur en raison de circonstances de travail qui lui sont imposées. »339 C’est pourquoi, dès l’instant où une CCT précise que le chèque repas constitue un remboursement de frais en tant qu’elle prévoit qu’il ne peut être utilisé qu’en payement d’un repas ou pour l’achat d’aliments prêts à la consommation, il n’y a pas lieu de l’inclure dans le calcul de la rémunération de base.340 Il en va différemment lorsque le juge constate que les frais de chèques repas « ne sont pas propres à l’employeur, celui-ci n’étant pas obligé de dédommager les frais encourus par le personnel pour ses repas.». Dès lors, la cour du travail de Mons a intégré dans la rémunération de base les chèques repas puisqu’ils « constituaient un avantage évaluable en argent d’une valeur forfaitaire indépendamment des frais consentis et aisément négociable, accordé au travailleur en raison de son engagement.».341 Selon nous, la référence à l’AR du 11 décembre 1987 - qui détermine les conditions d’exonération des chèques repas de cotisations de sécurité sociale - règle une matière spécifique dont il ne peut être déduit des conséquences immédiates dans le secteur des accidents du travail.342

5.3 La période de référence.La période de référence servant de base au calcul de la rémunération est celle afférente à l’année précédant le moment de la réalisation de l’accident. Cette période est complète lorsque l’intéressé a travaillé durant toute l’année conformément au régime de travail en

337 C. trav Gand, 6 juin 1996, RBSS, 1997, p 983, note J. HUYS ; C trav Anvers, 5 septembre 1994, RW, 1995-1996, 114 ; C. trav Gand ( section Bruges ) 26 mars 1992, JTT, 1992, p 324, note ; Trib trav Bruges, 21 juin 1991, Chron.D.S, 1992, p 208 ; Trib trav Gand 30 septembre 1991, Bull Ass, 1992, p 58, note W. DE BRAEKELEER.338 C. trav Liège, 8 février 1991, JTT, 1991, p 216 ; Bull Ass, 1991, p 313 ; voir aussi, L. VAN GOSSUM, op cit, p 86.339 C. trav Liège, 17 février 1993, Bull Ass, 1993, p 555 note LVG ; C. trav Liège, 17 mai 1993, JTT, 1993, p 439.340 C. trav Liège, 21 décembre 1993, Bull Ass, 1994, p 250, note L. VAN GOSSUM ; voir aussi Trib trav Charleroi, 2 septembre 1992, Bull Ass, 1993, p 31 et note LVG ; Trib trav Charleroi, 6 mai 1992, Bull Ass, 1992, p 686, note LVG ; Trib trav Anvers, 10 février 1994, JTT, 1994, p 433 et note ; J.M GERADIN «  La rémunération de base », Chroniques de Droit à l’usage du Palais, tome VI, 15 avril 1989, p 6.341 5 janvier 1994, Bull Ass, 1994, p 254 et note L. VAN GOSSUM ; JTT, 1994, p 429 et note ; Chron.D.S., 1994, p 314 et note ; voir aussi Cass, 25 novembre 1996, JTT, 1997, p 25 et note ; Bull, 1996, p 1165 ; C. trav Bruxelles, 7 mars 1994, JTT, 1997, p 38 et note.342 Trib trav Liège, 8 septembre 1993, Bull Ass, 1994, p 258, note L. VAN GOSSUM ; Trib trav Dinant,( 1 chambre ) 20 octobre 1994, Royale Belge c/ J. et FAT, RG 41.466 ; Trib trav Dinant,( 1 chambre ) 17 novembre 1994, en cause de Royale Belge c/ D et FAT, RG 39.958 ; Trib trav Nivelles, Royale Belge c/ L. et FAT, 15 juin 1994, RG 2302/92 ; contra Trib trav Liège, 30 janvier 1992, Bull Ass, 1992, p 683, note LVG ; C. trav Gand, 10 juin 1993, Bull Ass, 1994, p 235 et note L. VAN GOSSUM ; JM GERADIN, loc. cit, p 6.

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vigueur au sein de l’entreprise.343 Lorsque la période de référence est incomplète 344 la rémunération à laquelle le travailleur a droit est complétée par une rémunération hypothétique345. Pour le travailleur employé depuis moins d’un an au sein de l’entreprise ou dans la fonction exercée, la cour de Cassation enseigne que la fixation de sa rémunération hypothétique ne peut englober le salaire que l’intéressé a perçu pour le travail presté durant la période au cours de laquelle il était occupé.346 Par ailleurs, si la victime pratiquait une fonction unique dans l’entreprise, le juge peut déterminer la rémunération hypothétique en procédant à une moyenne des salaires perçus par trois travailleurs exerçant une activité identique dans une entreprise similaire.347 La Haute Cour précise encore que la juridiction qui fixe ex æquo et bono la rémunération hypothétique en raison du fait que l’article 36, § 2 de la loi ne peut être appliqué, n’est pas obligée de ne tenir compte que des dispositions d’une convention collective de travail qui est ou peut être obligatoire pour la victime.348 Lorsque le travailleur est occupé dans une entreprise ne comportant qu’une période limitée de travail par an, il est tenu compte, pour le calcul de l’indemnité d’accident du travail, de la rémunération à laquelle le travailleur a droit, complétée de ses gains, pendant le reste de l’année.349 Toutefois, il ne sera pas pris en considération le salaire perçu par le travailleur dans le cadre d’un emploi à temps plein exercé auprès d’un autre employeur.350 En définitive, il appartient aux juges d’apprécier si l’activité de l’entreprise et non celle du travailleur dans l’entreprise351 ne comporte qu’une période limitée de travail par an.352

5.4 Les pensionnés.L’article 37 de la loi de 1971 précise que la rémunération de base des pensionnés est déterminée exclusivement en fonction du salaire qui est dû à l’intéressé en raison de l’accomplissement du travail autorisé. La cour du travail de Mons estimait pouvoir déduire de cette règle qu’aucune disposition dans la loi du 10 avril 1971 n’interdit de porter la rémunération de base des pensionnés à la hauteur de la rémunération maximale autorisée.353 Saisie d’un pourvoi contre cet arrêt, la cour de Cassation a censuré la décision montoise aux motifs que la rémunération de base d’un pensionné ne peut être fixée en fonction de la rétribution maximale autorisée par la réglementation en matière de pensions et que, partant, seule la rémunération allouée à l’intéressé doit être prise en considération sans qu’elle ne puisse être complétée par une rémunération hypothétique lorsque celle-ci est inférieure au plafond légal.354 En définitive, si la période de référence peut être complétée, la rémunération de base, quant à elle, est le résultat du salaire réellement perçu. Précisons enfin que si le

343 Trib trav Gand, 27 février 1989, TGR, 1990, p 43.344 Ou que la rémunération du travailleur est inférieure à ce qu’il gagne normalement à la suite de circonstances occasionnelles, ou que le travailleur est occupé depuis moins d’un an ou que l’entreprise ne fonctionne que pendant une période limitée de l’année : C. trav Bruxelles, 16 octobre 1995, RW, 1996-97, 784.345 Article 36 de la loi de 1971.346 Cass, 9 septembre 1996, JTT, 1997, p 33 et note ; Chron.D.S., 1997, p 94 ; Bull Ass, 1997, p 236 et note J VANHOREN ; Bull, 1996, p 769.347 Ibidem ; la cour du travail de Gand considère que si les travailleurs de référence n’ont pas accompli d’heures supplémentaires, il ne faut pas en tenir compte pour le calcul de la rémunération hypothétique : C. trav Gand, 15 juin 1995, Bull Ass, 1995, p 556 et note J VANHOREN. Nous pensons que la cour aurait pu adopter une position inverse en prenant des points de comparaison plus proches de ceux de la victime voir encore la référence citée à la note qui suit.348 Cass, 28 mai 1990, JTT, 1991, p 84 et note ; Bull, 1990, p 1091 ; in casu, il s’agissait d’un cueilleur occasionnel sur échelle occupé depuis un jour lorsque l’accident s’est produit.349 Lorsque pour tout ou partie de l’année, il n’y a pas de gain, la rémunération est complétée par une rémunération hypothétique : article 36 § 3 de la loi de 1971.350 C. trav Bruxelles, 22 mai 1989, RW, 1990-1191, p 398.351 Trib trav Huy, 23 décembre 1992, RDS, 1993, p 229.352 Cass, 15 mars 1993, Bull, 1993, p 287.353 JTT, 1994, p 435 et note.

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travailleur est victime d’un accident du travail à une époque où il ne bénéficiait pas encore d’une pension ou d’une prépension de retraite, la détermination de la rémunération de base s’effectuera compte tenu du salaire perçu durant l’occupation au cours de l’année précédant le sinistre et donc sans avoir égard aux plafonds légaux du travail autorisé pour les pensionnés ou prépensionnés de retraite.355

5.5 Les travailleurs à temps partiel.Lorsque la victime d’un accident du travail est engagée dans les liens d’un contrat de travail à temps partiel, la rémunération de base, pour le calcul des indemnités d’incapacité temporaire de travail, 356 est fixée exclusivement en fonction du salaire dû aux termes dudit contrat de travail.357 Si le travailleur est engagé dans les liens de plusieurs contrats de travail à temps partiel, la rémunération de base est déterminée en tenant compte des salaires qui lui sont dus aux termes desdits contrats de travail. Cette hypothèse se distingue, par conséquent, de la situation du travailleur qui est victime d’un accident dans le cadre d’un emploi à temps partiel exercé à titre accessoire d’une profession à temps plein. La cour du travail de Gand en déduit qu’un tel travailleur a droit, durant les périodes d’incapacité temporaire, à des indemnités calculées sur la base du salaire de sa profession accessoire, complétées d’une rémunération hypothétique.358

5.6 Le plafond de la rémunération de base.En application de l’article 39 de la loi de 1971, la rémunération de base, en raison du caractère forfaitaire de la réparation, est plafonné à la somme de 300.000 francs.359 Depuis le 1 juillet 1993, le plafond de rémunération servant de référence à la fixation des indemnités et rentes est celui en vigueur à la date de l’accident360. La jurisprudence constante de la cour de Cassation qui prônait que le plafond de rémunération fut déterminé au moment de l’homologation, de l’entérinement ou du jugement est, par conséquent, devenue obsolète.361 En ce qui concerne les accidents antérieurs au 1 juillet 1993, lorsque la rémunération annuelle dépasse 891.510 francs elle n’est prise en considération à partir de cette date qu’à concurrence de cette somme.362

Section 6 : Le payement.

6.1 Les intérêts.L’article 42 alinéa 3 de la loi de 1971 dispose que les indemnités pour incapacité de travail portent intérêts de plein droit à partir de leur exigibilité. Un courant jurisprudentiel a retenu

354 Cass, 17 octobre 1994, Chron.D.S. , 1994, p 467 et note ; Bull Ass, 1995, p 94 et note L. VAN GOSSUM ; JTT, 1995, p 123 ; Bull, 1994, p 823 ; voir aussi C. trav Gand, ( section Bruges ) 12 septembre 1991, Bull Ass, 1992, p 229 et note LVG ; C. trav Bruxelles, 8 mars 1993, Bull Ass, 1993, p 559 ; C. trav Liège, 17 mai 1993, JTT, 1993, p 439 ; C. trav Gand, 19 mars 1998, JTT, 1998, p 481 et note; Trib trav Gand, 8 novembre 1993, Chron.D.S., 1994, p 324 ; Trib trav Gand, 11 janvier 1993, Bull Ass, 1993, p 220, note LVG ; Trib trav Bruxelles, 13 mars 1990, Jur. Trav. Brux., 1990, p 216.355 C. trav Mons, 27 mars 1996, Bull Ass, 1997, p 244, note P. MICHEL. C. trav Mons, 11 mai 1994, Bull. Ass, 1995, p 389, note LVG ; RGAR, 1996, n° 12.574 ; C. trav Gand, 5 mars 1992, JTT, 1992, p 325, note.356 Pour le calcul de l’incapacité permanente on en revient à l’article 36 de la loi du 10 avril 1971.357 Article 37bis de la loi du 10 avril 1971 ; C. trav Gand, 6 juin 1991, JTT, 1991, p 489 ; RDS, 1993, p 31.358 C. trav Gand, 12 mars 1998, Chron.D.S., 1998, p 438 ; Trib trav Gand, 17 mars 1994, RW, 1993-1994, p 474 ; comparer avec C. trav Gand, 26 septembre 1991 cité.359 Ce montant est indexé.360 Cass, 15 avril 1996, Chron.D.S., 1996, p 582 ; Bull Ass, 1996, p 616, obs L. VAN GOSSUM.361 L. VAN GOSSUM, op cit, 3ième édition, 1994, p 69.362 Article 31 de la loi du 6 août 1993.

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que l’article 42 ne concernait que les indemnités temporaires, les allocations annuelles363 et les arrérages de rente. Des intérêts sont également dus de plein droit sur les frais médicaux avancés par la mutuelle subrogé aux droits de la victime dans son action contre l’assurance loi.364 Les autres dépenses effectuées en vertu de la loi ne porteraient intérêt que conformément à l’article 1153, alinéa 3 du Code civil.365 La cour du travail d’Anvers a statué dans ce sens à propos de l’allocation de péréquation. Cet arrêt a toutefois été cassé par la Cour suprême aux motifs que ladite allocation de péréquation constitue une indemnité visée par la loi de 1971 et, dès lors, elle porte intérêt de plein droit à partir de son exigibilité.366

6.2 Le cumul entre rente accordée en accident du travail et pension de survie.L’article 42 bis organise un système de décumul entre les allocations annuelles ou les rentes versées en application de la loi de 1971 et la pension légale.367 Dans un arrêt du 13 octobre 1993, contre lequel un pourvoi en cassation fut formé, la cour d’appel de Bruxelles, se fondant sur le principe d’interdiction du cumul entre les indemnités en accident du travail et la pension légale, estima, dans le cadre de l’action dirigée par l’assureur loi subrogée dans les droits de la victime contre le tiers responsable de l’accident, que ce recours fut limité à la partie du capital destiné à indemniser la perte de revenus et ce après déduction de la pension de survie non versée par l’assureur. Dans son important arrêt du 2 novembre 1994 – sur lequel nous reviendrons ultérieurement dans le cadre de l’examen de la subrogation de l’assureur – la cour de Cassation reforme cette décision de la cour d’appel de Bruxelles et relève que «le droit reconnu à l’assureur loi par l’article 47 ( soit la subrogation organisée par la loi de 1971 – voir infra ) s’étend à tous les débours effectués(…) et ce indépendamment du fait qu’ensuite de la réglementation interdisant le cumul de la rente viagère avec une pension de survie, le Fonds des accidents du travail ne doit plus, en pareil cas, verser à la veuve ( bénéficiaire d’une pension survie ) qu’une rente réduite ».368 En conséquence, l’assureur loi peut exercer son action subrogatoire pour l’intégralité de la réparation forfaitaire sans que celle-ci ne puisse être réduite par le principe du décumul entre l’allocation ou la rente annuelle et la pension légale. De ce fait, la règle spécifique contenue dans l’article 42bis relative à la réparation forfaitaire en loi n’interfère en rien avec les principes de la réparation du droit commun.

6.3 Tiers en capital.Aux termes de l’article 45 de la loi de 1971, la victime peut, à tout moment, même après la constitution du capital, demander qu’un tiers au maximum de la valeur de la rente qui lui revient soit payé en capital. La somme en capital est un montant brut.369 La cour de Cassation retient que les règles relatives à la conversion de la rente en capital concernent la réparation due à la victime et sont, dès lors, d’ordre public.370 Il appartient au juge, selon le texte de la loi, de statuer au mieux de l’intérêt du demandeur. Aussi, la cour du travail de Liège considère

363 Dans son arrêt du 23 octobre 1989, la cour de Cassation a rappelé que l’allocation annuelle porte intérêt de plein à dater de son exigibilité : JTT, 1990, p 52 ; Chron.D.S., 1990, p 59 ; Bull, 1990, p 219.364 C. trav Bruxelles, 4 mars 1996, RW, 1996-1997, 658 ; Cass, 7 avril 1986, Arr. Cass, 1985-1986, 1057 ; comparer avec C. trav Anvers, ( section Hasselt ) 20 mai 1996, RBSS, 1997, p 994, note J.HUYS 365 voir C. trav Liège, 26 octobre 1989, Chron.D.S., 1992, p 215 les intérêts ne courent pas sur les frais médicaux, pharmaceutiques et d’hospitalisation.366 Cass, 30 janvier 1995, Chron.D.S., 1995, p 507 ; JTT, 1995, p 118 et note ; Bull, 1995, p 95.367 Voir AR du 13 janvier 1983 portant exécution de l’article 42bis de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail.368 Cass, 2 novembre 1994, JLMB, 1995, p 474, note J. TINANT et N. SIMAR ; JT, 1995, p 282 ; RGAR, 1995, n° 12.545, note L. VAN GOSSUM et J. VANHOREN ; Bull, 1994, p 884.369 C. trav Mons, 13 décembre 1995, JTT, 1996, p 259 ; RGAR, 1997, n° 12.800 voyez l’article 43 alinéa 1 de la loi de 1971.370 Cass, 23 octobre 1989, JTT, 1989, p 484 ; Chron.D.S., 1990, p 147 ; Bull, 1990, p 221 et note. ; Cass, 18 septembre 1995, Bull, 1995, p 818 ; JTT, 1996, p 225.

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qu’il incombe au demandeur d’établir la nécessité des sommes postulées en capital.371 Il a notamment été jugé par la cour du travail d’Anvers que la demande de tiers en capital pour l’édification d’une maison et d’un jardin de luxe est déraisonnable et excessive dès l’instant où la rente viagère constitue la seule garantie financière certaine pour l’avenir de l’intéressé.372

En revanche, le tribunal du travail de Mons a estimé que la loi ne requiert pas la justification des intentions du demandeur ni la vérification de celles-ci.373 Il nous faut constater que dans la pratique la majorité des demandes de conversion d’un tiers en capital reposent sur des projets réfléchis et raisonnables et ne mettent pas en péril l’équilibre financier du ménage. Il importe, dès lors, au juge qui se doit de statuer en équité de ne pas s’enfermer dans des formules rigides mais d’apprécier, au cas par cas, les demandes qui lui sont soumises. Précisons enfin que la demande de tiers en capital ne porte pas sur le mode de calcul de l’indemnité mais constitue un mode de payement de celle-ci. Par conséquent, il n’y a pas lieu de doubler l’indemnité de procédure si sa valeur excède la somme de 100.000 francs.374

Section 7 : Responsabilité civile.

7.1 Généralités.La loi de 1971 organise un régime de réparation forfaitaire du préjudice professionnel 375subi par la victime d’un accident du travail. Comme l’écrit M. JAMOULLE « la règle de la responsabilité patronale a disparu ; l’employeur n’est jamais plus le débiteur personnel des indemnités forfaitaire ; en revanche, il devient le titulaire d’une obligation de contracter une assurance accident en faveur de ses salariés, assurance dont il supporte le coût par le payement des primes qui demeurent à sa charge exclusive. »376 La loi de 1971 n’évince toutefois pas le droit commun si ce n’est en conférant à l’employeur, à ses préposés et à ses mandataires, dans des hypothèses strictement réglementées, une immunité civile.377 C'est pourquoi la loi sur les accidents du travail organise la coexistence entre la réparation forfaitaire et la réparation selon les règles du droit commun. Si la volonté du législateur fut de permettre à la victime d’un accident du travail d’obtenir une indemnisation du risque professionnel qui se concrétise par l’intervention d’une assurance privée, il n’a jamais été question de libérer le tiers responsable de l’accident de son obligation de réparation. Dès lors, la loi de 1971 confère à l’assureur loi une action subrogatoire.378 La cour de Cassation, durant la période recensée, a eu l’occasion de réaffirmer que « les dispositions légales relatives aux droits que la victime ou ses ayants droit et l’assureur loi subrogé peuvent exercer à l’égard du tiers responsable de l’accident ne sont ni d’ordre public, ni impérative ».379 Dans les lignes qui vont suivre nous tenterons de mettre en évidence, à la lumière de la jurisprudence, deux grandes règles : l’option de responsabilité et la double indemnisation d’un même dommage.

7.2 L’immunité civile de l’employeur.

371 C. trav Liège, 20 février 1996, JTT, 1996, p 303.372 5 octobre 1993, Chron.D.S., 1996, p 589.373 Trib trav Mons, 15 mars 1995, JT, 1995, p 652.374 Cass, 18 février 1991, RDS, 1991, p 193 ; Bull Ass, 1991, p 284 et note LVG ; JTT, 1991, p 201 ; JT, 1992, p 277 ; Bull, 1991, p 584 ; C. trav Gand, 9 mai 1990, JTT, 1991, p 214.375 Nous entendons par là que certains dommages tels ceux aux biens, le dommage moral, le préjudice d’agrément, en principe le préjudice esthétique….sont exclus de la réparation forfaitaire.376 M. JAMOULLE «  Introduction à la sécurité sociale belge », notes destinées aux étudiants, Secrétariat juridique, Faculté de droit de Liège, p 89.377 Voir J. CLESSE « La réparation des accidents du travail et la responsabilité civile », RGAR, 1984, n° 10797.378 Article 47 de la loi de 1971 voir infra.379 Cass, 5 octobre 1992, Chron.D.S., 1993, p 53 ; Bull, 1992, p 1115 ; Cass, 27 février 1989, JT, 1989, p 363 et observations ; Cass, 20 janvier 1992, Bull, 1992, p 425 ; RGAR, 1993, n° 12.211.

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En application de l’article 46 § 1er de la loi de 1971 une action s’appuyant sur les règles de la responsabilité civile peut être exercée par la victime ou ses ayants droit contre l’employeur s’il a causé intentionnellement l’accident du travail ou a causé intentionnellement un accident ayant entraîné un accident du travail ou si l’accident s’est produit sur le chemin du travail. L’immunité civile reconnue par la loi à l’employeur suppose que celui-ci détienne « les titres juridiques fondant la relation individuelle de travail ».380 Par conséquent, le fait pour un employeur de mettre un de ses travailleurs, avec lequel il est lié par un contrat de travail, à la disposition d’un autre employeur, sans qu’un contrat de travail ne soit conclu entre ceux-ci, n’a pas pour effet que l’emprunteur puisse se prévaloir de l’immunité civile quant bien même ce dernier exercerait sur le travailleur une autorité de fait.381 En revanche, le travailleur occupé dans les liens d’un contrat de travail en application de l’AR n°25 du 24 mars 1982 créant un programme de promotion de l’emploi dans le secteur non marchand ( troisième circuit de travail ) - qui se caractère par le fait que l’ONEm est réputé être employeur à l’égard desdits travailleurs pour l’accomplissement des obligations relatives à la sécurité sociale des travailleurs, en ce compris les accidents du travail382, - n’a pas comme retentissement de priver de la qualité d’employeur, au sens de l’article 46 de la loi de 1971, l’intéressé qui engage ce travailleur et ce même si l’ONEm paye la totalité de la rémunération et des cotisations sociales y afférentes. C’est pourquoi la victime d’un accident du travail ne possède pas dans les limites fixées par l’article 46 de la loi de 1971 d’action civile contre la personne qui l’a embauchée conformément à l’AR n°25.383

La responsabilité de l’employeur est engagée en cas de faute intentionnelle, partant, la faute lourde ne peut y être assimilée. A ce propos, il a été jugé qu’une méconnaissance grossière des règles de sécurité384, sauf à démonter que l’employeur entendait provoquer sciemment l’accident, ne peut faire l’objet d’une action civile émanant de la victime. Il a encore été décidé que l’arrêt qui après avoir relevé que le travailleur, mordu par le chien de l’employeur, fut victime d’un accident du travail et qui au delà de l’indemnisation forfaitaire de son dommage a admis que l’intéressé fut en mesure d’obtenir réparation du surplus de son préjudice contre son employeur en qualité de gardien de l’animal et contre sa compagnie d’assurance RC familiale, viole l’article 46 de la loi de 1971 s’il n’est pas établi que l’employeur a causé intentionnellement un accident du travail ou a causé intentionnellement un accident ayant entraîné un accident du travail.385

L’immunité civile de l’employeur et de son préposé ou de son mandataire entraîne que non seulement les bénéficiaires des indemnités forfaitaires mais encore tous ceux qui, à la suite du sinistre, pourraient prétendre à une indemnisation selon les règles du droit commun sont exclus du bénéfice de cette réparation civile contre l’employeur, ses mandataires ou ses préposés. La cour de Cassation précise toutefois que cette règle ne concerne que les droits à

380 J. CLESSE, « Le rôle de la responsabilité civile dans la réparation des accidents du travail », Act. Droit, 1980/1-2, p 221.381 Cass, 29 avril 1988, Bull, 1988, p 1032 ; Bull Ass, 1988, p 452, note LVG ; Civ Bruxelles, 8 septembre 1989, Bull Ass, 1990, p 94 ; voir notre point 7.3382 Article 17, alinéa 5 de l’AR n° 25 précité.383 Cass, 20 janvier 1993, Bull, 1993, p 75 ; Cass, 20 janvier 1993, Larcier Cassation, 1993, n°125 ; RW, 1993-1194, p 19.384 Voir Mons, 30 mai 1990, JLMB, 1991, p 303 ; Anvers, 26 mars 1993, Amén, 1996, p 26 et note P. MOERYNCK arrêt dans lequel le travailleur fut victime de lésions corporelles résultant d’une exposition fautive de substances toxiques.385 Cass, 26 septembre 1991, Bull, 1992, p 79 : la Cour précisant que la modification de l’article 46 § 2 alinéa 2 qui dispose que la réparation en droit commun qui ne peut se rapporter à l’indemnisation des dommages corporels, telle que couvert par le forfait, peut se cumuler avec les indemnités résultant de la loi n’a pas porté préjudice à l’application des exonérations de responsabilités.

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l’indemnisation tant matériel que moral, découlant du préjudice corporel causé au travailleur par la faute non intentionnelle de l’employeur ( ou de ses préposés ou mandataires ) et par conséquent elle ne s’applique pas au dommage propre direct subi par un ayant droit dans ses biens.386 La Haute Cour entend donc la notion d’ayants droit 387de manière extensive puisqu’elle vise non seulement les bénéficiaires d’une indemnisation en vertu de la loi de 1971 mais encore toutes les personnes qui, sur la base du droit commun, pourraient prétendre à la réparation de leur dommage matériel ( à l’exception des dommages aux biens) et moral engendrés par le préjudice occasionné à la victime d’un accident du travail qui ne résulte pas de la faute intentionnelle de l’employeur, de son préposé ou de son mandataire. L’arrêt de la cour de Cassation du 24 octobre 1994 en constitue une nouvelle illustration. Les faits de la cause peuvent se résumer de la manière suivante : deux véhicules d’un même employeur, l’un conduit par le travailleur W et l’autre conduit par le travailleur V sont impliqués dans un accident de roulage au cours duquel le fils de V décède. La cour d’appel analyse l’accident litigieux comme un accident du travail dans le chef de V. La juridiction d’appel estime, dès lors, pouvoir accueillir l’action en responsabilité civile de V contre l’assureur RC auto de l’employeur tant pour son dommage corporel – puisque la loi sur les accidents du travail ne couvre pas tous les éléments de ce préjudice – que pour son dommage moral dû au décès de son fils lors de l’accident. La cour de Cassation réforme partiellement cet arrêt aux motifs que les immunités civiles dont bénéficient l’employeur et son préposé en application de l’article 46 de la loi de 1971 « ne concernent que le dommage résultant d’un accident du travail ou d’un accident sur le chemin du travail ; que l’arrêt ne viole pas ces dispositions en accordant à V une indemnité à charge de la compagnie d’assurance du chef du dommage moral subi en raison de l’accident survenu à son fils ». En revanche, il ne se conforme pas à l’article 46 - et partant ne justifie pas légalement sa décision - en tant qu’il octroie une indemnisation du dommage corporel au travailleur V résultant de son accident du travail.388 Il est intéressant de remarquer que la cour de Cassation de France, statuant en audience plénière le 2 février 1990 a considéré, au sujet de l’action civile diligentée par l’épouse d’un ouvrier devenu tétraplégique et qui subit, à la suite de l’accident de son époux, un dommage par répercussion ou par ricochet, que si elle ne peut revendiquer la qualité d’ayant droit bénéficiaire d’une rente en raison la survie de la victime en vertu du code de sécurité sociale français, elle est toutefois en droit d’être indemnisée de son préjudice personnel selon les règles du droit commun.389

7.3 L’immunité civile des préposés et mandataires.Il résulte de l’article 46 § 1er de la loi de 1971 que, sauf en ce qui concerne le dommage aux biens, la victime d’un accident du travail ou ses ayants droit ne peuvent réclamer des dommages et intérêts aux mandataires ou aux préposés de l’employeur que si ces mandataires ou ces préposés ont intentionnellement causé l’accident du travail ou si celui-ci est survenu sur le chemin du travail. Madame JAMOULLE écrit que « c’est la notion même de préposé qui permet de désigner le bénéficiaire de l’immunité ; dès lors, il est requis que ce dernier ait provoqué le dommage dans l’exercice de ses fonctions. Le risque doit répondre par ailleurs à la qualification d’accident du travail au sens strict.(…) Encore faut-il, en troisième lieu, que

386 Cass, 2 novembre 1994, Bull 1994, p 890 ; JT, 1995, p 383 ; Bull Ass, 1996, p 611 et note J. VANHOREN ; voir aussi l’article 46, § 1er 2° de la loi de 1971 qui prévoit que la victime ou ses ayants droit peut intenter conformément aux règles de la responsabilité civile une action contre l’employeur dans la mesure où l’accident du travail a causé des dommages aux biens du travailleur ; l’exonération de responsabilité vise tous les dommages y compris ceux qui ne font pas l’objet d’une indemnisation sur la base de la loi sur les accidents du travail : Cass, 5 mai 1992, RGAR, 1994, n° 12266 voir point 7.3.387 Voir déjà Cass, 16 janvier 1956, Pas, 1956, p 467.388 Cass, 24 octobre 1994, RGAR, 1996, n° 12.573 et note J. HIRSCH ; Dr. Circ., 1996, p 170.389 RGAR, 1993, n° 12.190 et note J. HIRSCH.

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soit présente une double relation juridique : le préposé auteur de l’accident doit se trouver sous l’autorité d’un commettant qui sera en même temps l’employeur de la victime ».390 Une dissociation entre ces deux qualités se présente notamment dans les situations de travail intérimaire. En effet, l’entreprise intérimaire demeure l’employeur du travailleur ; l’utilisateur, quant à lui, en est le commettant.391 Aussi, en cas d’accident du travail survenu à l’intérimaire, celui-ci dispose d’une action en droit commun contre le salarié du commettant occasionnel mais encore, sur la base des articles 1382 et 1384 alinéa 3 du code civil contre l’employeur.392 La cour de Cassation enseigne que le terme mandataire se définit conformément aux articles 1984 et suivants du Code civil393 et que le terme préposé a la même signification que dans l’article 1384 du même Code.394 Il a été décidé que cause intentionnellement l’accident du travail - et par conséquent doit souffrir de l’action civile exercée contre lui par l’assurance loi subrogée dans les droits de la victime - le préposé qui a été condamné pénalement pour coups et blessures volontaires portés à l’un de ses collègues de travail.395 Il a encore été jugé que la veuve de la victime d’un accident du travail qui se constitue partie civile contre le mandataire pour obtenir indemnisation de son dommage psychologique doit être déboutée de son action puisque l’immunité civile dont jouit le mandataire vaut pour tous les chefs de demandes y compris pour le dommage qui ne fait pas spécifiquement l’objet d’une indemnisation en loi.396

7.4 La responsabilité civile et l’accident survenu sur le chemin du travail.L’article 46, § 1°, 5° de la loi de 1971 dispose qu’une action en justice, fondée sur le droit commun, peut être intentée contre l’employeur, ses mandataires ou préposés lorsque l’accident est survenu sur le chemin du travail. Ainsi, la victime d’un accident de roulage, selon qu’il s’agit d’un accident du travail sensu stricto ou sur le chemin du travail, causé involontairement par l’employeur, ses préposés ou ses mandataires se voit, sur le plan de la réparation de son préjudice, placée dans une situation fondamentalement différente. Le tribunal de police de Gand conforté à ce problème pris l’initiative de saisir la Cour d’Arbitrage et lui posa la question préjudicielle suivante : « En faisant une distinction, lorsqu’un accident est causé par l’employeur de la victime ou par un préposé de cet employeur, entre les victimes d’un accident du travail et les victimes d’un accident survenu sur le chemin du travail et en excluant, sur la simple base de cette distinction, les victimes d’un accident du travail de la réparation intégrale selon le droit commun qui est accordée à tout citoyen ainsi qu’à la victime d’un accident survenu sur le chemin du travail, l’article 46 de la loi de 1971 viole-t-il les principes constitutionnels d’égalité et de non discrimination contenus dans les articles 10 et 11 de la Constitution ? ».397. Cette question présentait une acuité encore plus vive antérieurement à l’introduction dans la loi de 1971 des articles 48bis et 48ter398, puisque une controverse se fit jour en doctrine quant à l’application de l’article 29bis

390 Seize leçons sur le droit du travail, Collection scientifique de la Faculté de droit de Liège, 1994, p 144 ; pour plus de détails voir M. JAMOULLE « Les bénéficiaires d’immunité dans le droit des accidents du travail », RCJB, 1976, pp. 1996-197.391 M. JAMOULLE, Seize leçons sur le droit du travail, op cit, pp. 53-54.392 Gand 30 juin 1994, RGDC, 1996, p 225, note N.JEGER ; Gand, 22 septembre 1995, AJT, 1995-96, p 309, note B. LIETAERT.393 Cass, 29 avril 1988, Bull, 1988, p 1032 ; Bull Ass, 1988, p 452, note LVG.394 Cass, 5 janvier 1970, Pas, 1970, p 364.395 Cass, 10 mai 1989, Rev. dr. pén., 1989, p 889, et note.396 Cass, 5 mai 1992, Bull, 1992, p 780 ; RGAR, 1994, n° 12.266 ; cette jurisprudence vaut pareillement pour l’action civile dirigée contre l’employeur.397 Pol. Gand, 6 mars 1996, MB, 27 avril 1996, p 10.369 ; voir aussi Observations de M. HIRSCH sous Cass, ( fr.) 2 février 1990, précité.398 J. HIRSCH, « Récentes modifications législatives en matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles », RGAR, 1997, n° 12708 ; N. DENOEL, «  L’indemnisation des usagers faibles – l’article 29

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de la loi du 21 novembre 1989399 à la victime d’un accident de circulation qui est passagère d’un transport organisé par l’employeur.400

Pour trancher le problème, la Cour constitutionnelle, dans son arrêt du 16 janvier 1997, résonne en deux étapes. Tout d’abord, elle indique que la distinction établie par la loi de 1971 entre les victimes d’un accident survenu sur le chemin du travail et les victimes d’un accident du travail répond à un objectif légitime « à savoir le souci de garantir à toutes les victimes l’indemnisation de base fixée par loi sur les accidents du travail et d’offrir à la victime, dans les cas où il n’existe aucun motif de maintenir les restrictions prévues par la loi, une réparation aussi complète possible du dommage.» Et la Cour de préciser « en fondant la distinction entre les deux catégories de victimes sur la constatation que la différence d’apporter la preuve du dommage et du lien causal entre le dommage et la faute de l’employeur, ses mandataires ou ses préposés diffère pour ces deux sortes d’accidents et que, dans le cas d’un accident du travail, la preuve est souvent difficile à faire sans porter atteinte à la paix sociale et aux relations de travail dans les entreprises, le législateur a établi une différence de traitement sur la base de critères qui justifient objectivement et raisonnablement l’établissement de cette différence entre les deux catégories de victimes ».401 La Haute Cour constate ensuite que la discrimination opérée entre les victimes d’un accident de roulage – occasionné sans intention par l’employeur, son mandataire ou son préposé - selon qu’elles sont – ce qui est considéré comme un accident du travail sensu stricto402 - ou ne sont pas – ce qui est considéré comme un accident sur le chemin du travail - sous l’autorité de l’employeur réduit l’étendue des droits du travailleur dans la première hypothèse puisqu’il ne peut plus prétendre qu’à l’indemnisation forfaitaire alors que dans la seconde hypothèse, il conserve la faculté d’exercer une action sur la base du droit commun. La Cour en conclut : «s’agissant de la possibilité d’intenter une action en responsabilité civile de droit commun, la distinction instaurée entre les victimes d’un accident de roulage causé involontairement par l’employeur, ses mandataires ou ses préposés, selon qu’elles se trouvent ou non sous l’autorité de l’employeur n’est pas justifiée, ce critère de distinction étant dénué de la pertinence qu’exige la Constitution.»403 Aux fins de s’aligner sur la jurisprudence de la Cour d’Arbitrage404, le législateur a complété l’article 46 §1er de la loi de 1971 en retenant qu’une action selon les règles du droit commun peut être diligentée contre « l’employeur, ses mandataires ou préposés, lorsque l’accident concerne un accident de la circulation. ». Dans le but d’établir un parallèle avec l’article 29bis de la loi du 21 novembre 1989405, la loi définit la notion d’accident de la circulation comme « tout accident sur la voie publique et sur les terrains ouverts au public ou seulement à un certain nombre de personnes ayant le droit de les

bis de la loi du 21 novembre 1989 relative à l’assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs. » in CUP, formation permanente, Volume XIII, 1997, p 137.399 Relative à l’assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs. L’article 29bis vise l’indemnisation des usagers faibles victime d’un accident de roulage 400 voir notamment N. SIMAR, « Refoulement du droit – Massacre du droit – Retour au droit commun… ? », JLMB, 1997, p 297 ; comparer avec J. HUYS, «  Wijzigingen van de arbeidsongevallenwet van 10 april 1971 door de wet van 29 april 1996 houdende sociale bepalingen », RBSS, 1996, p 894.401 CA 16 janvier 1997, MB, 21 février 1997, p 3.571 ; JLMB, 1997, p 292 et note N SIMAR ; JT, 1997, p 316 et note M. MAHIEU ; Dr Circ, 1997, p 117 ; JTT, 1997, p 289 et note ; JJP, 1997, p 238 ; RBSS, 1997, p 955, note M. SISCOT ; voir aussi Cass, 2 novembre 1994, Bull , 1994, p 890 ; JT, 1995, p 383 ; Bull Ass, 1996, p 611 et note J. VANHOREN.402 Voir par exemple Trib trav Anvers, 8 décembre 1988, Bull Ass, 1991, p 838.403 CA 16 janvier 1997 précité.404. Sénat, Proposition de loi n° 750/1, Doc. Parl, session de 1997-1998, 21 octobre 1997, 750/1 ; Chambre, Rapport, Doc Parl., session 97-98, n° 1476/2.405 Sénat, Proposition de loi n° 750/1, Doc. Parl, session de 1997-1998, 21 octobre 1997, 750/1, p 2.

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fréquenter, et dans lequel sont impliqués un ou plusieurs véhicules ou montures.»406 L’encre de ce nouvel article fut à peine sèche que la loi du 25 janvier 1999 le remplaçait par la disposition suivante : une action civile peut être exercée « contre l’employeur, ses mandataires ou préposés lorsque l’accident est un accident de roulage. Par accident de roulage, on entend tout accident de la circulation routière407 impliquant un ou plusieurs véhicules, automoteurs ou non, et lié à la circulation sur la voie publique.»408 Par conséquent, le sinistre survenu sur les terrains de l’entreprise, sur les chantiers de construction, dans des parkings privés etc. ne pourra donner naissance à une action en dommages et intérêts, en application du droit commun, à l’encontre de l’employeur, de ses préposés ou de ses mandataires.409

7.5 L’interdiction de cumul de l’indemnisation d’un même dommage.La coexistence de deux modes de réparation, dans les hypothèses où elle n’est pas exclue410, a crée des situations de concours entre la réparation forfaitaire et la réparation de droit commun. Le législateur a, par conséquent, précisé, dans l’article 46, § 2 alinéa 2 de la loi de 1971 que la réparation en droit commun qui ne peut se rapporter à l’indemnisation des dommages corporels dans la mesure où elle est couverte par la loi peut se cumuler avec les indemnités forfaitaires.411 En réalité, la victime dispose d’une action complémentaire en droit commun contre le tiers responsable pour obtenir, d’une part, réparation des dommages non couverts par l’assurance loi 412et, d’autre part, la différence entre la réparation forfaitaire et la réparation en droit commun du même préjudice matériel.413 Pour déterminer si la réparation intégrale excède le montant des indemnités dues par l’assurance loi, il y a lieu de comparer le montant des allocations légales, cotisations de sécurité sociale inclues, et le montant des indemnités de droit commun.414 Depuis de longues années, la doctrine et la jurisprudence s’accordent sur le principe de l’unicité du dommage couvert en loi et en droit commun.415 Trois arrêts prononcés par la cour de Cassation entre 1988 et 1991 ont toutefois semé le trouble.416 En effet, la Haute Cour en matière d’incapacités permanentes décida qu’est légale « la décision qui calcule l’indemnité due, suivant le droit commun, pour incapacité permanente pendant la période allant jusqu’à l’âge de la pension et en déduit la partie du capital de l’assurance loi qui se

406 Loi du 20 mai 1998 modifiant l’article 46 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail, MB, 1 août 1998, p 24.745 entrée en vigueur le 11 août 1998.407 Dès lors pas un accident aérien, ferroviaire ou fluvial.408 Loi portant des dispositions sociales article 7, MB, 6 février 1999, p 3553, aucune date spécifique d’entrée en vigueur n’est précisée.409 Doc Parl. n° 1722/1-97/98, Chambre, sessions ordinaire, 1997-1998, 25 août 1998, p 4 et 5.410 voir les points consacrés aux immunités civiles.411 Cette règle est d’ordre public : voir C. trav Gand, 19 novembre 1992, Intern. Vervoerr., 1993, p 257.412 Ainsi des efforts accrus durant une ITT fournis par le travailleur réclamés en droit commun se rapporte au même dommage corporel que celui qui est réparé en loi : Cass, 21 octobre 1992, Bull, 1992, p 1178.413 Cass, 25 avril 1990, RGAR, 1992, n° 11.973 ; Bull, 1990, p 968 ; Cass, 21 octobre 1992, Bull, 1992, p 1178 ; Dr Circ, 1993, p 85 arrêt dans lequel la cour précise le juge est tenu de vérifier si et dans quelle mesure l’indemnité calculée en droit commun est supérieure à celle versée par l’assurance loi ; Cass, 1 juin 1993, Bull, 1993, p 527 ; JT, 1994, p 233 relatif au rejet d’une réclamation d’une indemnité supplémentaire en réparation du préjudice subi dans l’exercice d’une activité accessoire d’indépendant; L. VAN GOSSUM et J VANHOREN, «Du recours de l’assureur-loi », Bull Ass, 1992, p 614.414 Cass, 1 décembre 1997, en cause de SA R I c/ Les assurances fédérales, RG C 96.333.N, inédit.415 L. VAN GOSSUM et J VANHOREN, «Du recours de l’assureur-loi », Bull Ass, 1992, p 614 et suivantes ; N. SIMAR, « L’assurance loi face à l’assureur de responsabilité », in problèmes actuels de la réparation du dommage corporel, Actes du colloque tenu à l’ULB, 10 février 1993, Bruylant, Bruxelles, 1993, p 232 ; J. CLESSE, « La réparation des accidents du travail et la responsabilité civile », RGAR, 1984, n° 10797, n° 37 ; N. SIMAR, observations sous JP Liège, 3 février 1984, JL, 1984/;p 469 et suivantes ; pour la jurisprudence voir notamment, Cass, 26 septembre 1985, Bull Ass, 1985, p 345 ; Cass, 7 novembre 1983, JTT, 1985, p 256.416 Cass, 27 septembre 1988, Bull, 1989, p 98 ; RW, 1988-1989, p 717 ; Cass 5 décembre 1990, Bull Ass, 1991, p 332 ; Cass, 19 mars 1991, Bull, 1991, p 673 ; Bull Ass, 1991, p 876 et note W. PEVERNAGIE.

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rapporte à la même période.».417 De même pour les accidents mortels, la Cour releva « la pension de retraite n’est pas liée au dommage matériel professionnel et trouve son fondement dans la législation relative aux pensions de retraite et de survie des travailleurs, de sorte que l’indemnité octroyée en droit commun pour cette perte et celle forfaitaire due sur la base de la loi sur les accidents du travail concernent des dommages distincts. Qu’en ne soustrayant à l’indemnité de droit commun réparant la perte de revenus jusque la pension que la partie de l’indemnité loi qui, selon eux, concerne le même dommage matériel professionnel et en estimant que des indemnités de droit commun pour le perte de la pension de retraite et pour le dommage post lucratif réparent un dommage autre que le dommage matériel professionnel, le juge ne viole pas les articles 1382 du Code civil et 46 § 2 de la loi du 10 avril 1971.»418 L’important arrêt prononcé par la Cour de cassation le 2 novembre 1994419 remet toutefois « les pendules à l’heure » et à le mérite de rétablir la paix judiciaire. En effet, dans cet arrêt, la Cour suprême retient que « la rente viagère versée à la veuve de la victime d’un accident du travail (…) et les dommages et intérêts qui seraient dus en raison du préjudice matériel professionnel calculés selon le droit commun constituent deux modes de réparation, l’un forfaitaire et l’autre concret, d’un même dommage. ». Le principe de l’unicité du dommage est dès lors réaffirmer. Il en va de même pour la règle de la non interférence des principes d’évaluation dans l’un et l’autre régime d’indemnisation.420 Comme l’écrivent, au demeurant, Mme TINANT et M SIMAR, la Cour confirme indirectement « que les comparaisons entre les évaluations suivant le régime du forfait et celui de la réparation intégrale doivent se faire globalement, sans tirer de l’un ou de l’autre mécanisme, des interférences inopportunes. »421

7.6 L’option de responsabilités.Depuis sa modification par la loi du 7 juillet 1978, l’article 46 § 2 de la loi de 1971 ne confère plus au travailleur victime d’un accident du travail un choix entre la réparation forfaitaire et la réparation en droit commun ; l’intéressé doit opter, par priorité, pour la réparation en loi.422 En revanche, cette faculté est maintenue pour les travailleurs du secteur public.423 Cette différence de traitement a été soulignée par le tribunal de police de Westerlo424 qui constate que la victime d’un accident du travail engagée dans les liens d’un contrat de travail dans le secteur privé ne peut introduire une demande d’indemnisation sur la base du droit commun que postérieurement à la fixation des indemnités en loi, alors que la victime d’un accident du travail engagé sous contrat par l’autorité publique dispose, quant à elle, du droit d’option. Le tribunal en a conclut qu’il y avait matière à question préjudicielle et a dès lors soumis cette discrimination à l’appréciation de la Cour d’Arbitrage. Dans son arrêt du 21 octobre 1998 la Cour se limite a apprécier si l’ordre dans lequel peuvent être intentées l’action en indemnisation fondée d’une part sur la loi et d’autre part sur la responsabilité civile de l’auteur du dommage constitue une différence de traitement dénuée de justifications objectives et raisonnables. La Cour, lors de son examen de constitutionnalité, retient que « la différence de traitement qui découle de l’ordre dans lequel peuvent être demandées les indemnisations respectives – celle en vertu du droit commun et celle en vertu de la loi relative

417 Cass, 27 septembre 1998 précité.418 Cass, 19 mars 1991 précité.419 JLMB, 1995, p 474 et note J. TINANT et N. SIMAR ; RGAR, 1995, n° 12.454 et note L. VAN GOSSUM et J. VANHOREN ; JT, 1995, p 282 ; Dr. Circ., 1995, p 176 ; Bull 1994, p 884.420 Voir aussi Cass, 1 juin 1993, Bull, 1993, p 527 ; JT, 1994, p 233.421 « Le recours de l’assureur-loi : un arrêt capital », JLMB, 1995, p 483.422 C. trav Gand, 4 septembre 1992, JTT, 1993, p 25 ; Corr Liège, 9ième chambre, MP C/ G, L, et FCGA, 23 novembre 1998 inédit.423 Voir article 14 § 1 et 2 de la loi du 3 juillet 1967 sur la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public ; M. RESPENTINO, « Les accidents du travail dans le secteur public », Story Scienticia, 1989, p 146-147.424 24 juin 1997, en cause de MP C/ V S et D.

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aux accidents du travail – ne saurait être considérée comme étant disproportionnée au but poursuivi qui est d’assurer l’indemnisation du dommage subi par les victimes d’un accident du travail. »425 La question pertinente ne porte, dès lors, pas sur l’ordre dans lequel les actions peuvent être exercées mais sur les conséquences de cet ordre, au point de vue de la réparation du dommage subi par la victime et de l’indemnisation à laquelle est tenue le tiers responsable.

Section 8 : Le recours de l’assurance loi.

8.1 Généralités.L’article 47 de la loi de 1971 permet à l’assureur accident du travail et au Fonds des accidents du travail (FAT) d’exercer une action subrogatoire426 contre le responsable civilement du sinistre dans la limite des débours effectués au profit de la victime ou de ses ayants droit. L’action de l’assurance loi ou du FAT ne peut cependant excéder les sommes que la victime ou ses ayants droit auraient pu revendiquer en droit commun.427 Le recours de l’assurance loi ou du FAT est circonscris au montant de la plus faible de ces deux sommes.428

8.2 Les débours de l’assurance loi.L’objet du recours de l’assureur porte sur l’ensemble des décaissements réalisés conformément à la loi du 10 avril 1971429 et ce quelque soit le destinataire final des sommes déboursées.430 De ce fait, les cotisations de sécurité sociale et fiscales, qui doivent être payées par la victime, et qui sont retenues par l’assureur loi431 pour être versées à l’organisme chargée de leur perception, sont comprises dans les débours effectués par l’assureur à titre d’indemnité légale pour accident du travail.432 De même, la réduction du capital représentatif de l’allocation annuelle ou de la rente dont l’assureur loi est redevable pour les incapacités permanentes de travail inférieure à 10 % ne limite pas le recours subrogatoire de l’assureur contre le tiers responsable à concurrence de ce qui a été alloué à la victime.433 La cour de Cassation a pareillement décidé que « le chargement représentant les frais de gestion relatifs à la constitution de la rente fait partie intégrante de la somme que l’assureur loi peut réclamer ».434 Il est, ainsi, mis fin aux hésitations qui animaient la jurisprudence, lors de la

425 CA 21 octobre 1998, n° 101/98, MB, 1 décembre 1998, 2ième édition, p 38492.426 La doctrine analyse davantage cette action comme une action iure proprio à caractère subrogatoire : voir L. VAN GOSSUM et J. VANHOREN, loc. cit., RGAR, 1995, n°12454/5 et les références citées ; N. SIMAR, « L’assurance loi face à l’assureur de responsabilité », in problèmes actuels de la réparation du dommage corporel, Actes du colloque tenu à l’ULB, 10 février 1993, Bruylant, Bruxelles, 1993, p 211-212 ; sur les conséquences du caractère subrogatoire du recours voir : J. CLESSE, « La réparation des accidents du travail et la responsabilité civile », RGAR, 1984, n° 10797, n° 45-50 ; voir aussi Bruxelles, 16 mars 1994, RGAR, 1995, n° 12.411.427 Voir notamment Cass, 5 septembre 1996, JT, 1997, p 44 ; Bull, 1996, p 763 ; L. VAN GOSSUM, op. cit., 4é édition, p 190-193.428 Voir par exemple Bruxelles, 5 décembre 1996, RGAR, 1998, n° 12.944.429 voir article 47 qui vise les articles 46 §2, 42bis, 51bis, 51ter, 51quinquies ; la cour de Cassation rappelle que la subrogation vise le capital constitué respectivement pour les incapacités temporaires et les incapacités permanentes consécutives à l’accident : Cass, 17 septembre 1997, RG P 97.480 F, inédit; Il faut encore tenir compte des frais médicaux, de déplacement….430 Cass, 2 novembre 1994, JLMB, 1995, p 474 et note de J. TINANT et N. SIMAR « Le recours de l’assureur loi : un arrêt capital », p 483.431 Voir article 43 de la loi de 1971.432 Cass, 26 octobre 1993, Bull, 1993, p 866 ; Cass, 26 mars 1991, JT, 1991, p 766 ; Bruxelles, 16 septembre 1998, RGAR, 1990, n° 11.755 ; Corr Liège, 28 mars 1996, Bull Ass, 1996, p 702 ; Corr Turnhout, 19 octobre 1995, Pas, III, p 41.433 Précisons toutefois que la subrogation vaut toujours à concurrence de ce que l’assurance à déboursé dans les limites du droit commun : Corr. Liège, 14 mars 1994, JLMB, 1994, p 1374 et note N. SIMAR « L’amputation de la rente et le recours de l’assureur-loi »434 Cass, 2 novembre 1994, cité.

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détermination de l’assiette de la réserve mathématique, qui oscillait entre le calcul suivant le barème E ( avec chargement ) ou le barème F (sans chargement ), et dont l’assurance réclamait le remboursement. En effet, c’est dans la limite de ce qui est dû en droit commun, le barème E qui doit être pris en considération.

8.3 Les éléments composants la créance de l’assureur loi.Comme le relève M CLESSE « l’assureur ne peut prétendre exercer l’action de droit commun fondée sur les préjudices qu’il n’a pas indemnisés ; seuls, les dommages et intérêts correspondant aux préjudices couverts par le forfait peuvent constituer l’assiette du recours.»435 Durant la période recensée, la cour de Cassation a considéré que l’assureur loi n’est pas subrogé aux droits de la victime pour la réparation d’une atteinte à l’intégrité physique pour laquelle une réparation en droit commun est due mais qui n’est pas couverte par la loi sur les accidents du travail.436. Il en va différemment pour le capital prothèse constitué par l’assureur au profit du travailleur qu’il peut, dans les limites de l’indemnité due en vertu du droit commun, récupérer auprès du tiers responsable.437. Il a encore été jugé que le tiers responsable condamné à l’indemnisation de la victime, selon les règles du droit commun, au payement d’un préjudice complémentaire à celui supporté par l’assureur loi - ce préjudice complémentaire comportant différents postes parmi lesquels le dommage ménager permanent que le jugement estime être distinct du dommage matériel indemnisé par l’assureur loi – échappe, par conséquent, au recours subrogatoire de l’assureur. Le pourvoi contre cette décision a été rejeté par la cour de Cassation qui précise que « sur la base des circonstances de la cause, le tribunal correctionnel a apprécier en fait l’étendue d’un dommage composé d’éléments distincts donnant chacun droit à réparation en droit commun ; qu’il n’a pas violé, les articles 46 et 47 de la loi sur les accidents du travail, en condamnant le tiers responsable à rembourser à l’assureur loi les sommes payées à la victime en réparation du préjudice matériel résultant de la réduction de sa capacité de travail professionnel » et ce sans tenir compte du préjudice ménager qui est indépendant du dommage corporel indemnisé en loi.438. La cour de Cassation relève encore que la créance de la victime d’un accident du travail ou de ses ayants droit contre le tiers responsable peut comporter des intérêts compensatoires à titre de réparation d’un élément du dommage causé par un acte illicite. Il en résulte, poursuit la Cour, que la subrogation de l’assureur loi, s’opérant « notamment par la constitution d’un capital représentatif de la rente, l’assureur subrogé peut éventuellement prétendre à des intérêts compensatoires sur ledit capital depuis la subrogation ».439 Et la Haute cour de dire encore « l’action récursoire de l’assurance loi ne peut toutefois pas excéder le montant de l’indemnisation que la victime aurait pu obtenir pour le même dommage en vertu du droit commun ; ( … ) qu’il s’en suit que lorsque l’action récursoire de l’assureur loi comprend les intérêts compensatoires à partir d’une date antérieure à la décision, elle ne peut excéder le total de l’indemnisation que la victime aurait pu obtenir pour le même dommage en vertu du droit commun, y compris les intérêts compensatoires jusqu’à la date de la décision »440 In casu, le juge doit, avant d’octroyer des intérêts compensatoires sur les indemnités et le capital alloués par l’assurance loi, apprécier, si à la date de la décision, l’indemnisation en vertu du 435 J. CLESSE, loc. cit, RGAR, 1984, n° 10797, n° 31 ; voir aussi les n° 33-35.436 Cass, 2 février 1988, Bull, 1988, p 367.437 C. trav Gand, 13 octobre 1995, Bull Ass, 1996, p 427, note J. VANHOREN.438 Cass, 22 septembre 1993, Bull, 1993, p 730 ; Dr Circ, 1994, p 40 ; voir aussi Corr Liège, 9ième chambre en cause de M.C M. et I. et SMAP, 14 avril 1995, inédit.439 C’est-à-dire suivant les cas à la date des décaissements ou de la constitution du capital représentatif de la rente : Bruxelles, 13 février 1989, RGAR, 1992, n° 11.987 ; Mons, 5 décembre 1989, JLMB, 1990, p 664 ; Mons, 14 novembre 1990, Bull Ass, 1991, p 887 et obs M.L.440 Cass, 18 janvier 1994, Bull, 1994, p 59 ; RW, 1994-1995, p 634 ; Cass, 9 octobre 1996, Bull, 1996, p 953 ; Cass, 18 septembre 1996, Bull, 1996, p 824 ; JT, 1997, p 175 ; Dr. Circ., 1997, p 15 ; Mons, 28 octobre 1993, Bull Ass, 1994, p 294, note M. LAMBERT.

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droit commun, intérêts compensatoires y compris, n’a pas été dépassée. Les intérêts moratoires sur une indemnité délictuelle, quant à eux, ne sont dus qu’à partir de la date à laquelle la décision est rendue.441 Un dernier problème doit encore être épinglé en cas de réparation d’accident mortel. En effet, la cour de Cassation enseigne que « l’indemnité allouée, selon le droit commun, à la veuve de la victime d’un accident du travail pour le préjudice matériel qu’elle a subi par suite du décès de cette victime, ne répare pas le même dommage que la rente en matière d’accident du travail alloué aux enfants ou le capital représentant cette rente, même si, lors de la fixation du montant de l’indemnité de droit commun, il est tenu compte de la composition du ménage de la victime. »442 L’assureur loi est, par conséquent, tenue d’établir une distinction entre la réparation du dommage de la mère et celui des enfants.443

8.4 Le recours de l’assurance loi contre l’employeur en cas d’accident sur le chemin du travail.Par une décision du 8 septembre 1992 444– dont malheureusement seul le sommaire est publié dans le Bulletin des arrêts de la cour de Cassation – la cour suprême rappelle sa jurisprudence, consacrée dans un arrêt du 12 juin 1973445, selon laquelle l’assureur-loi qui a payé les indemnités forfaitaires à la victime d’un accident survenu sur le chemin du travail, imputable à la faute de l’employeur ou de l’un de ses préposés, ne peut exercer aucun recours contre l’employeur. La Haute Cour motive sa position en relevant que « en raison de l’assurance (souscrite par l’employeur ) contre les accidents du travail des indemnités résultant de la loi sur les accidents du travail sont payées aux victimes, l’assureur-loi, parce qu’il doit s’acquitter des obligations résultant du contrat d’assurance, ne peut exercer un recours contre l’employeur, son assuré.»446

8.5 Partage de responsabilité. Entre la victime et un tiers.

La cour de Cassation dans un important arrêt du 10 janvier 1992447 tranche la délicate question de l’étendue des droits de l’assurance loi subrogé aux droits de la victime dans les hypothèses où une part seulement de responsabilité est mise à charge d’un tiers. En effet, deux solutions peuvent se concevoir soit l’action récursoire de l’assureur loi est limitée à la fraction de la responsabilité retenue à charge du tiers, soit l’étendue de l’action récursoire de l’assurance loi est déterminée en regard de l’indemnisation réduite allouée à l’intéressé, en application du droit commun, au prorata de sa part de responsabilité.448 C’est cette seconde solution qui a été

441 Cass, 5 mars 1993, Bull, 1993, p 255.442 Cass, 25 janvier 1994, Bull, 1994, p 94 ; Cass, 21 mars 1989, Bull, 1989, p 758 ; JT, 1990, p 238 ; RGAR, 1992, n° 11.915, note J. HIRSCH.443 N. SIMAR, « L’assurance loi face à l’assureur de responsabilité », in problèmes actuels de la réparation du dommage corporel, Actes du colloque tenu à l’ULB, 10 février 1993, Bruylant, Bruxelles, 1993, p 232-233.444 Bull, 1992, p 1009.445 Bull, 1973, p 944 ; Cass, 14 mars 1974, Bull, 1974, p 729.446 Cass, 5 février 1980, Bull, 1980, p 658 ; en revanche, dans le même cas, un recours contre le compagnon de travail, responsable de l’accident, est possible.447 RGAR, 1992, n° 12.058, note J. SCHRIJVERS ; Bull, 1992, p 398 ; comparer avec Cass, 25 avril 1990, RGAR, 1992, n° 11973.448 Voir observations de J. SCHRIJVERS, RGAR, 1992, n° 12.058 ; J.CLESSE, loc. cit., RGAR, 1984, n° 10797, n° 40 et 41 ; N. SIMAR, « L’assurance loi face à l’assureur de responsabilité », in problèmes actuels de la réparation du dommage corporel, Actes du colloque tenu à l’ULB, 10 février 1993, Bruylant, Bruxelles, 1993, p 237-238 ; Pour reprendre l’exemple chiffrée de M. CLESSE si la perte de capacité économique est fixée à 100 en droit commun et 80 en loi, 50 % de responsabilité étant imputable au tiers. La premier solution décrite entraîne que l’assurance loi qui a payé 80 peut réclamer 50 au tiers ; Dans la seconde solution préconisée par la

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privilégiée par la Haute Cour qui énonce « la subrogation ( de l’assurance loi ) n’est pas limitée à la fraction des indemnités légales payées correspondant à la part de responsabilité mise à charge du tiers ; que la limitation du droit de subrogation de l’assureur loi à cette fraction permettrait soit à la victime ou ses ayants droit, contrairement aux dispositions prévues à l’article 46 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail, de cumuler pour le même dommage les indemnités légales avec la réparation en droit commun, soit au tiers de se procurer un avantage illicite, en ce qu’il ne répare pas intégralement le dommage qu’il a causé.»449

Entre un tiers et une personne immunisée civilement.

Si, à notre connaissance, aucune décision n’a été publiée sur ce sujet durant la période recensée, il nous semble toutefois opportun de rappeler la position claire et précise adoptée par la cour de Cassation. En effet, la Cour suprême décrète que « lorsqu’un dommage est causé par la faute concurrente de deux personnes, la circonstance que le dommage résulte d’un accident revêtant à l’égard de la victime le caractère d’un accident du travail est sans effet sur l’obligation à réparation intégrale à laquelle est tenue, envers la victime, en l’absence de faute de celle-ci, celle des personnes qui n’est ni l’employeur de la victime ni son mandataire ni son préposé. ».450 Dès lors, le recours contributoire du tiers, qui est tenu à la réparation intégrale de la dette, contre le bénéficiaire de l’immunité civile visé par l’article 46 de la loi de 1971 est purement hypothétique puisque ladite immunité lui est opposable.

8.6 Concours entre la victime et l’assureur-loi.Nous le savons, la victime d’un accident du travail dispose contre le tiers responsable d’une action en droit commun pour la partie du préjudice qui n’a pas été réparée en loi. Ce droit peut entrer en concurrence avec l’action récursoire de l’assurance loi. Comment faudra-t-il dès lors résoudre le conflit ? Une première solution consiste à appliquer la règle tirée de l’article 1252 du Code civil qui veut que la subrogation ne puisse nuire au créancier lorsqu’il n’a été payé qu’en partie. Une seconde solution conduit à répartir la créance au marc le franc.451 La cour d’appel de Liège, dans un arrêt du 16 février 1988, a privilégié cette deuxième voie.452 A notre connaissance, la cour de Cassation n’a pas dans la matière des accidents du travail pris position.453

8.7 L’action en déclaration de jugement commun devant les juridictions sociales.Il est acquis que l’assurance loi peut faire appeler en déclaration de jugement commun le tiers responsable dans l’instance mue devant les juridictions du travail.454

cour de Cassation, l’assurance loi peut réclamer 50 au tiers. La victime n’obtenant que 80 ( indemnisation en loi ) l’indemnisation en droit commun étant in casu moins avantageuse.449 Cass, 10 janvier 1992 précité ; pour reprendre l’exemple cité ci avant la cour vaut éviter la situation suivante la victime recevrait 80 en loi. L’assurance loi 40 ce qui permettrait à la victime d’obtenir encore en droit commun une indemnité de 10 ( 50( part de responsabilité ) – 40 ), pour une indemnisation totale de 90 pour une créance en droit commun de 50 450 Cass, 27 novembre 1986, Bull, 1987, p 350 ; JT, 1987, p 149 ; Bull Ass, 1987, p 416 et note LVG ; voir aussi Mons 14 novembre 1990, Bull Ass, 1991, p 887 et note M. LAMBERT visant le recours de l’assurance loi contre un seul des tiers responsable au payement de l’intégralité des décaissements.451 J.CLESSE, loc. cit., RGAR, 1984, n° 10797, n°43-44.452 JLMB, 1988, p 885 et note.453 N. SIMAR, « L’assurance loi face à l’assureur de responsabilité », in problèmes actuels de la réparation du dommage corporel, Actes du colloque tenu à l’ULB, 10 février 1993, Bruylant, Bruxelles, 1993, p 225-226 qui établit un parallèle avec un arrêt de la Haute Cour prononcé en matière de Fonds d’indemnisation des travailleurs : Cass, 16 octobre 1989, Bull, 1990, p 184.

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8.8 L’action subrogatoire de l’assureur-loi dans les hypothèses d’accident de la circulation.En application de l’article 601bis du Code judiciaire, le tribunal de police connaît de toute demande relative à la réparation d’un dommage résultant d’un accident de la circulation. La volonté du législateur fut d’attribuer à cette juridiction une compétence exclusive pour connaître du contentieux engendré par les accidents de roulage.455 Le tribunal d’arrondissement de Louvain en a déduit que l’action subrogatoire de l’assurance loi, née d’un accident sur le chemin du travail, est, dès lors, de la compétence du tribunal de police.456

8.9 Faute intentionnelle de la victime.Les indemnités établies par la loi de 1971 ne sont pas dues lorsque l’accident a été intentionnellement provoqué par la victime. La cour de Cassation précise que l’accident résultant d’une « imprudence anormale » d’un travailleur, de son « attitude téméraire » et sa « faute très lourde » ne peut être assimilée à une faute intentionnelle.457 De même, la cour du travail d’Anvers a estimé que ni les circonstances apparemment inexplicables dans lesquelles l’accident s’est produit, ni la situation familiale problématique de la victime ne permettent d’établir de manière certaine que l’accident de roulage dans lequel le travailleur a perdu la vie a été occasionné intentionnellement par celui-ci.458

Chapitre 3: L’assurance.

3.1 L’organisme assureur.L’employeur, en application de l’article 49 de la loi de 1971, est tenu de contracter une assurance contre les accidents du travail auprès d’une compagnie agréée. Aussi, lorsqu’il fait assurer le risque accident du travail pour tous les employés de son entreprise mais omet de faire de même pour les ouvriers, il y a à l’égard de cette partie du personnel, défaut d’assurance.459. Il en sera de même si l’employeur contracte une assurance postérieurement à la réalisation du risque ; un tel contrat étant nul.460 En fait, si l’employeur néglige de s’assurer contre le risque accident du travail, il est affilié d’office auprès du Fonds des accidents du travail (FAT ).461 Face à ce constat, le tribunal correctionnel de Mons a rejeté une réclamation de dommage moral formulée par une victime qui entendait être indemnisée pour l’angoisse occasionnée par le fait que son employeur n’avait pas d’assurance loi.462 Il a encore été jugé

454 C. trav Bruxelles, 17 mai 1993, Dr. Circ., 1994, p 81 ; C. trav Liège, 16 mai 1990, JLMB, 1990, p 1361 ; C. trav Liège, 15 juin 1990, RDS, 1990, p 385 ; C. trav Mons, 19 mars 1990, JTT, 1991, p 215 ; V. LEBE DESSARD, «  La procédure du FAT » in Chronique de droit à l’usage du Palais, t VI, Risques professionnels droit social et droit fiscal, p 3-5.455 Voir Cass, 27 février 1997, JLMB, 1997, p 412 ; JT, 1997, p 434.456 22 novembre 1995, Dr. Circ., 1996, p 56 ; voir aussi le cas de l’action récursoire exercée par l’assurance contre son assuré qui relève également de la compétence du tribunal de police : Cass, 5 janvier 1996, RCJB, 1996, p 387 et note F. RIGAUX ; JT, 1996, p 156 ; Bull, 1996, p 20.457 Cass, 16 février 1987, JT, 1998, JTT, 1988, p 71 ; Chron.D.S., 1989, p 241.458 C. trav Anvers, 9 janvier 1990, Chron.D.S., 1992, p 194.459 Cass, 13 octobre 1997, Bull Ass, 1998, p 33 et note L. VAN GOSSUM ; Dr. Circ., 1998, p 147 ; voir aussi Cass, 2 juin 1997, JTT, 1997, p 404 et note ; Bull Ass, 1997, p 604 et note L.VG ; Dans cette hypothèse, il incombe au Fonds des accidents du travail ( FAT ) d’accorder la réparation légalement prévue aux ouvriers victimes d’un accident du travail460 C. trav Liège, ( section Namur ) 22 octobre 1996, Chron.D.S., 1998, p 426.461 C.trav Liège, 16 décembre 1993, RBSS, 1994, p 591, note J. HUYS, voir article 50 de la loi de 1971 ; l’action en prescription de la récupération des cotisations dues par l’employeur au fonds est de cinq ans depuis le 1 juillet 1996 ( article 69, alinéa 3 auparavant elle était de 3 ans ) le défaut de contracter une assurance constituant un délit continué de sorte que le délai de prescription prend cours après le dernier fait : C. trav Gand, 4 octobre 1990, JTT, 1991, p 143 ; voir aussi C. trav Bruxelles, 26 janvier 1990, Jur trav. Brux., 1990, p 136.462 24 mai 1994, Chron.D.S., 1997, p 80 et note.

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que s’il est légalement possible pour l’employeur de s’affilier auprès d’assureurs distincts pour les ouvriers et pour les employés, celui-ci demeure toutefois soumis à l’obligation de couvrir l’ensemble de son personnel et, partant, si pour telle catégorie de travailleur il a décidé, le cas échéant délibérément, de ne pas l’assurer contre le risque des accidents du travail, il ne peut imposer ses propres carences à sa compagnie d’assurance.463 3.2 Le Fonds des accidents du travail.Parmi les nombreuses missions qui incombent au FAT, on relèvera qu’il est tenu d’indemniser les victimes d’un accident lorsque l’employeur n’a pas conclu d’assurance contre les accidents du travail ou lorsque l’assureur reste en défaut de s’acquitter des ses obligations.464 Les débours effectués par le FAT dans ces cas ne constitue par pour celui-ci un préjudice causé par le défaut d’assurance mais l’accomplissement d’une mission légale. La cour de Cassation en infère que « l’action en récupération de ces indemnités que le Fonds intente contre l’employeur ne tend pas à la réparation d’un dommage causé par une infraction ; que cette action ne découle pas de l’infraction de défaut d’assurance mais trouve directement son fondement dans l’article 60 alinéa 1er de la loi du 10 avril 1971 ; que la prescription de l’article 26 du titre préliminaire du CIC ne lui est, dès lors, pas applicable. » La Haute Cour précise encore que « si les actions visées à l’alinéa 1er et à l’alinéa 2 de l’article 60 doivent permettre au Fonds de récupérer les indemnités payées en application de l’article 58 § 1er 3°, elles n’en sont pas moins distinctes de sorte que lorsqu’il intente, en vue de cette récupération, une action contre l’employeur qui n’a pas conclu de contrat d’assurance, le Fonds n’agit pas nécessairement en qualité de subrogé dans les droits de la victime à l’égard de l’employeur.»465 Le FAT possède, dès lors, une action personnelle en récupération des indemnités payées en cas de défaut d’assurance dans le chef de l’employeur.466 Il a été jugé que la victime peut, avant de pouvoir déterminer qui sera en définitive le débiteur des indemnités légales ( à savoir l’assureur ou l’employeur ), obtenir une provision467 à charge du FAT et ce en raison de la mission d’ordre social et de protection de la victime qui est impartie à ce fonds.468 Il nous faut encore insister sur le fait que le FAT dispose, de façon générale, d’une mission de contrôle et de surveillance de la bonne application de la loi sur les accidents du travail. La cour de Cassation considère, par conséquent, que « les fonctionnaires et les agents visés par la loi sont compétents pour recueillir (…) les informations nécessaires auprès des victimes ou de leurs parents469 ». C’est pourquoi, la position du Fonds qui refuse d’entériner un accord 470entre les parents de la victime et l’assureur-loi leur octroyant une rente viagère, conformément à l’article 20bis de la loi de 1971471, sur la base d’une enquête réalisée par un inspecteur du FAT - qui a recueilli objectivement des informations sur la composition de famille, la totalité des revenus familiaux et la part de la victime dans ceux-ci –

463 C. trav Liège, 28 octobre 1996, Chron.D.S., 1998, p 428 ; C. trav Liège, 17 décembre 1992, Bull Ass, 1994, p 70 et note LVG.464 Article 58, § 1er 3° de la loi du 10 avril 1971 ; voir aussi Trib trav Liège ( réf. ) 3 avril 1995, Chron.D.S., 1997, p 81 et note qui octroi une provision à charge du FAT si l’urgence est justifiée.465 Cass, 18 septembre 1989, JTT, 1989, p 361 et note ; RDS, 1989, p 427 ; Chron.D.S., 1990, p 50 ; Bull, 1990, p 66 ; voir aussi C. trav Mons, 15 mai 1996, JLMB, 1996, p 1412.466 Voir article 60 alinéa 1 de la loi du 10 avril 1971.467 Voir l’article 66 de la loi du 10 avril 1971.468 Trib trav Bruxelles, 23 décembre 1994, Chron.D.S., 1997, p 96.469 Voir les articles 87 et 88 de loi sur les accidents du travail ; voir aussi loi du 16 novembre 1972 concernant l’inspection du travail ; voir aussi, mutatis mutandis, J.M SOUVERIJNS, J.C. HEIRMAN, G. SCHREIBER, «  L’inspection des loi sociales – ses compétences et ses relations avec le pouvoir judiciaire », in CUP Le droit pénal social et les contrats de travail spéciaux, Larcier 1997, p 38 et suivantes.470 Voir article 58, 13° de la loi sur les accidents du travail.471 C’est à dire après 25 ans quant le défunt est le principal soutien de la famille

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est valablement confirmée par les juridictions sociales sans qu’il ne puisse en être déduit que la décision du FAT est entachée d’un excès de pouvoir.472

3.3 Procédure : relation assureur loi – organisme assureur.L’assurance loi qui estime qu’il existe un doute quant à l’application de la loi du 10 avril 1971 ou qui refuse de prendre en charge ou de reconnaître l’accident comme étant un accident du travail est tenu d’avertir l’organisme assureur de la victime, quel que soit le motif du refus, dans le délai imposé par le législateur.473 Cette obligation demeure quant bien même l’intéressé a informé de sa propre initiative sa mutuelle.474 La cour de Cassation retient encore que l’assureur loi n’est pas déchargée de son obligation d’aviser l’organisme assureur « pour la seule raison que l’identité de ( celui-ci ) ne lui a pas été communiquée parce qu’il n’en a pas été fait mention dans le formulaire de déclaration ».475 Le tribunal du travail de Gand estime que l’assureur loi s’est correctement conformé à ses obligations s’il prévient la mutuelle dont l’identité lui a été indiquée par la victime et ce, même si entre-temps, une autre mutuelle s’est substituée à l’organisme initialement informé.476 La Haute Cour observe qu’il ne peut être question, au regard de la loi de 1971, de postposer le point de départ du délai imparti à l’assurance loi jusqu’à la date à laquelle il est renseigné sur l’identité de cet organisme assureur.477 L’assureur loi qui omet de réaliser la déclaration en temps utile s’expose à prendre en charge les indemnités d’incapacité de travail prévues par l’assurance obligatoire contre la maladie et l’invalidité du début de l’incapacité jusqu’au jour de la déclaration inclus dans la mesure où la victime satisfait aux conditions pour se les voir attribuer.478 En pratique cependant, ces indemnités sont versées par l’organisme assureur et récupérées par lui directement auprès de l’assurance loi. La cour de Cassation précise que cette action en remboursement, qui est la résultante de la négligence par l’assureur loi de ses obligation, n’est pas soumise à la prescription quinquennale de l’article 2277 du Code civil.479 De même lorsqu’une modification intervient dans le pourcentage d’incapacité reconnu à la victime, l’assureur doit prévenir la mutuelle dans les sept jours qui suivent la date à laquelle intervient la modification du taux d’incapacité.480 En cas de non respect de cette obligation, la même sanction que celle énoncée ci-avant s’applique.481

3.4 Entérinement des accords.Jusqu’au 31 décembre 1987, les accords conclus entre l’assureur loi et la victime concernant les indemnités dues en raison du sinistre étaient soumis à la procédure d’homologation se déroulant devant le tribunal du travail. La cour du travail de Liège, rappelle, dans un arrêt du 28 mai 1990, que cette procédure est une forme de juridiction gracieuse si bien que la décision

472 Cass, 19 décembre 1994, JTT, 1995, p 119 ; Bull, 1994, p 1124.473 Cass, 13 mars 1995, JTT, 1995, p 471 et note ; Bull, 1995, p 305 ; voir article 63 § 1aliéna 2 de la loi de 1971.474 Cass, 6 mars 1989, JTT, 1989, p 363 et note ; Bull 1989, p 688.475 Cass, 14 janvier 1991, Bull, 1991, p 433 ; JTT, 1991, p 77 et note ; contra C. trav Mons, 8 novembre 1991, Bull Ass, 1992, p 442, note LVG.476 Trib trav Gand, 3 novembre 1997, Bull Ass, 1998, p 57, note L. VAN GOSSUM ; voir C. trav Gand, 15 novembre 1990, JTT, 1991, p 86 et note arrêt dans lequel la Cour insiste sur le fait que l’assureur accident du travail doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour retrouver l’identité de la mutuelle compétente pour échapper à la sanction liée à la déclaration tardive.477 Ibidem. 478 Cass, 6 novembre 1989, JTT, 1990, p 49 et note ; Bull, 1990, p 286. ; Cass, 3 octobre 1994, JTT, 1995, p 127 et note ; Bull, 1994, p 797 ; voir article 63 § 2 aliéna 3 de la loi de 1971479 Cass, 3 octobre 1994, Chron.D.S, 1995, p 18 ; JLMB, 1995, p 385 ; JTT, 1995, p 127 et note ; Bull, 1994, p 794 ; on en revient à la prescription trentenaire : C. trav Gand, 17 janvier 1991, JTT, 1991, p 241.480 Trib trav Tongres, 21 septembre 1990, Bull Ass, 1991, p 91 et note LVG.481 Cass, 3 octobre 1994, JTT, 1995, p 127 ; C. trav Bruxelles, 28 mai 1990, Chron.D.S., 1992, p 200 et note.

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rendue n’est pas susceptible d’appel.482 Relevons néanmoins que l’accord d’indemnisation intervenue entre la victime et l’assurance, soumis pour homologation au tribunal du travail, implique l’existence d’un accident du travail. Dès lors, la cour de Cassation en infère « un tel accord, allouant des indemnités en vertu de la loi du 10 avril 1971 en raison d’un dommage qui n’a pas été causé par un accident remplissant les conditions d’existence d’un accident du travail, (….) peut être annulé sur la base de l’article 6 de ladite loi ».483Depuis le 1 janvier 1988, il appartient au Fonds des accidents du travail d’entériner ces accords.484 L’accord doit être motivé et doit mentionner la rémunération de base, la nature des lésions, le taux d’incapacité de travail et la date de consolidation. S’il ne réunit pas ces conditions, l’accord est nul.485 Lorsque le FAT refuse l’entérinement il en informe les parties par une décision motivée. Dans ce cas, le litige peut être porté devant le tribunal du travail par la partie la plus diligente.486 Le tribunal du travail de Bruxelles487 relève qu’il ne faut pas confondre l’accord entériné avec l’acte d’entérinement de l’accord. En effet, l’entérinement est un acte administratif qui ne peut être annulé alors que l’accord, quant à lui, fut-il entériné, reste un contrat solennel, rescindable ou annulable pour vice de consentement. Encore faut-il bien entendu établir la preuve de ce vice. A ce propos, le tribunal du travail de Verviers a retenu qu’une victime n’a pas pu signer par erreur un accord en révision s’il ressort que la révision a également été approuvée par son médecin traitant.488 Il nous faut enfin mentionner qu’une proposition de règlement amiable, fixant un taux d’incapacité permanente de travail, rejetée par la victime, préalablement à une procédure judiciaire, ne peut lier, dans le cadre du déroulement de celle-ci, ni l’assureur loi, ni l’expert judiciaire, ni la juridiction du travail saisie.489

3.5 Les dépens.L’article 68 de la loi de 1971 dispose que « sauf si la demande est téméraire et vexatoire, les dépens de toutes actions fondées sur la présente loi sont à charge de l’assureur.». La cour de Cassation édicte que cette règle s’applique pareillement à l’action exercée par une victime ou ses ayants droit contre le FAT490 et au désistement du pourvoi en cassation de la victime fait à l’intervention d’un avocat à la cour de Cassation491. En revanche, le pourvoi dirigé par l’assureur en responsabilité civile de la victime contre l’assureur loi échappe à l’application de l’article 68 de la loi de 1971.492 Il en est de même pour l’action diligentée par un organisme 482 JLMB, 1990, p 1025 ; cet accord implique néanmoins l’existence d’un accident du travail : Cass, 11 avril 1994, JTT, 1994, p 422 et note ; Chron.D.S., 1994, p 327 ; Bull, 1994, p 353.483 Cass, 11 avril 1994, JTT, 1994, p 422, note ; Chron.D.S., 1994, p 327 ; Bull, 1994, p 353.484 C’est l’AR du 10 décembre 1987 qui fixe les modalités et les conditions de l’entérinement des accords, cette procédure ne lie pas l’expert commis pour évaluer l’IPP : Trib trav Mons, 8 février 1989, JLMB, 1992, p 1426 ; Cette procédure vaut également pour les accords relatifs aux accidents mortels, en révision et concernant les prothèses : L. VAN GOSSUM, op cit, 3ième édition, 1994, p 111.485 Voir article 65 alinéa 3 de la loi de 1971 ; Cass, 19 septembre 1994, Chron.D.S., 1995, p 19 ; Bull, 1994, p 738 ; JT, 1995, p 124.486 Trib trav Louvain, 17 janvier 1991, JDS, 1991, p 223.487 30 mai 1997, Bull Ass, 1997, p 641, note L. VAN GOSSUM ; voir aussi M. BOLLAND, « Approche juridique de la procédure d’octroi des rentes pour invalidité permanente en matière d’accident du travail », JTT, 1991, p 337.488 Trib trav Verviers, 16 décembre 1993, Bull Ass, 1994, p 263, note P. MICHEL.489 Voir C. trav Gand, 6 juin 1996, Bull Ass, 1997, p 89, note Y. GHIJSELS ; C.trav Anvers, 17 janvier 1997, Bull Ass, 1998, p 37 et note J. VANHOREN ; C. trav Bruxelles, 17 septembre 1990, Bull Ass, 1991, p 299, note W. DE BRAEKELEER.490 Cass, 7 décembre 1992, RDS, 1993, p 12 ; Chron.D.S, 1993, p 307 ; Bull, 1992, p 1339 ; Cass, 22 mai 1989, JTT, 1990, p 54 ; Chron.D.S., 1989, p 386 ; Bull, 1989, p 997.491 Cass, 17 mars 1997, D. C/ SA CUB, RG S 96.166 F , inédit.492 Cass, 18 janvier 1993, Bull, 1993, p 55 conclusions H. LENAERTS ; Bull Ass, 1993, p 205 note F. VAN AERDE ; il en est de même pour les litiges entre le FAT et un assureur concernant l’action en remboursement d’indemnités :Cass, 21 novembre 1988, Bull, 1989, p 317 ; RW, 1988-89, p 814.

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assureur contre l’assureur loi puisqu’une telle demande n’est pas fondée sur la loi de 1971.493 Il a été jugé que constitue une action téméraire et vexatoire la demande de désignation d’un expert médecin qui se fonde sur des documents médicaux établis sur la base de déclarations manifestement inexactes du travailleur494 ou le fait pour un travailleur, qui néglige son action sans la moindre explication, de produire de nouvelles données médicales plus de deux ans après l’introduction du litige.495

3.6 La prescription.496

Nous savons que le travailleur, victime d’un accident du travail, dispose d’un délai de trois ans ( article 69 de la loi de 1971 ) pour exercer une action en payement des indemnités contre l’assureur. Le même délai de prescription s’applique à l’action diligentée par l’assureur loi en répétition des indemnités indues établies par la loi sur les accidents du travail. La cour de Cassation en déduit que cette prescription triennale est étrangère à l'action en récupération d'indemnités d'incapacité de travail exercée par l'organisme assureur sur la base de l'article 63 de la loi de 1971.497 La Haute Cour enseigne encore que le délai de prescription de l'action en payement d'une indemnité débute dès l’instant où le droit à l'indemnité est né.498 Dans le même ordre d’idée, la cour du travail de Liège estime, à propos des actions en récupération d'indu, que le délai de prescription prend cours au moment où les payements indus ont été effectués.499 L’action en répétition d’indemnités obtenues à la suite de manœuvres frauduleuses ou de déclarations fausses ou sciemment incomplètes se prescrit, quant à elle, par cinq ans. Il convient d’entendre par les termes manœuvre frauduleuses « tout agissement volontairement illicite dont le bénéficiaire des prestations use pour en obtenir indûment l’octroi ; la création de l’indu dans ce cas a pour cause la volonté malicieuse de tendre à ce résultat ». Les notions de déclarations fausses et de déclarations sciemment incomplètes ont en commun de requérir un élément intentionnel correspondant au dol général c’est à dire à la volonté libre et consciente d’enfreindre la loi, tandis que le concept de manœuvres frauduleuses se montre plus exigeant puisqu’il suppose en outre une intention malicieuse.500

Ces prescriptions peuvent être interrompues ou suspendue de la manière ordinaire ou selon les modalités fixées par l’article 70 de la loi de 1971. Il a été jugé que cet article s’applique aux actions en répétition des indemnités, rentes, capitaux de rentes, allocations et frais pour soins médicaux payés indûment par le FAT501. La cour suprême remarque «  qu’aux termes de

493 C. trav Liège, 18 novembre 1993, JTT, 1994, p 200 et note ; C. trav Liège, 17 novembre 1993, JTT, 1994, p 189, et note ; JLMB, 1994, p 632 ; C. trav Mons, 12 juillet 1994, Bull Ass, 1995, p 115 et note L. VAN GOSSUM ; voir dans le même sens Cass, 2 décembre 1985, Pas, 1986, p 408 cité par l’arrêt de la cour du travail de Mons du 12 juillet 1994 ; Dans un arrêt du 13 octobre 1997 la cour de Cassation a considéré que l’article 68 ne s’applique pas aux litige entre l’employeur ou l’assureur en responsabilité civile professionnelle du courtier en assurances de l’employeur, et le Fonds des accidents du travail, concernant l’action en remboursement des indemnités intentée par le Fonds : Bull Ass, 1998, p 33, note L. VAN GOSSUM ; Dr Circ, 1998, p 147.494 Trib trav Nivelles, 5 octobre 1990, Bull Ass, 1991, p 602 note LVG ; sur un pourvoi jugé téméraire et vexatoire voir Cass, 30 mars 1992, Bull, 1992, p 687.495 C. trav Bruxelles, 8 janvier 1990, Bull Ass, 1991, p 288, note P. MICHEL.496 Les règles relatives à la prescription sont d’ordre public : Cass, 22 février 1982, Pas, 1982, p 766 ; Cass, 6 septembre 1982, Pas, 1983, p 10.497 Cass, 12 décembre 1988, JTT, 1989, p 101; RDS, 1989, p 60; Bull, 1989, p 408 ; C. trav Mons, 13 janvier 1992, JTT, 1992, p 332, note; Contra C. trav. Anvers, 15 mars 1993, Limb. Rechtsl. 1993, p 54. ; sur l’article 63 voir notre point 9.3498 Cass, 8 février 1993, JTT, 1993, p 200; Bull, 1993, p 154 ; Trib trav Hasselt, 20 septembre 1994, Bull Ass, 1995, p 249, note F. VAN AERDE.499 20 janvier 1993, JTT, 1994, p 202500 C. trav Liège, 26 septembre 1994, JTT, 1995, p 128, et note.501 en application de l’article 60 bis § 2 de la loi de 1971 ; Cass, 17 février 1992, Chron.D.S., 1992, p 183 ; JTT, 1992, p 322 ; Bull, 1992, p 536.

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l’article 73 de loi de 1971, la victime ou ses ayants droit et la personne qui a supporté les frais funéraires, les frais médicaux, pharmaceutiques, chirurgicaux et d’hospitalisation exercent leur recours contre l’assureur ou contre le Fonds des accidents du travail si l’employeur n’a pas conclu un contrat d’assurance ou si l’assureur est en défaut de s’acquitter de ses obligations ; que si, en vertu de cette dernière disposition, les droits que confère la loi ne peuvent être exercés contre l’employeur de la victime, il n’en résulte pas que la prescription de l’action en payement des indemnités prévues par la loi ne puisse être interrompue par une action en payement du chef de l’accident du travail, fondée sur une autre cause, intentée par la victime ou ses ayants droit contre l’employeur. »502 En revanche ne constitue pas une cause de suspension ou d’interruption de la prescription de l’action en payement des indemnités, le déroulement de la procédure administrative relative à l’octroi d’une allocation d’aggravation devant le FAT503, l’action dirigée par un organisme assureur subrogé aux droits de la victime contre l’assureur loi504, les payements effectués à des personnes étrangères aux obligations nées de la relation entre la compagnie d’assurances et la victime505 et l’action en référé qui ne peut, de près ou de loin, être assimilée à une action indemnitaire506

A ce stade, il nous semble important d’insister sur les innovations apportées par loi du 20 mai 1997507 aux règles qui régissent la matière de la prescription de l’action en réparation des accidents du travail dans le secteur public. Pour rappel, la cour de Cassation, respectueuse de la volonté du législateur d’aligner les principes de la prescription dans le secteur public sur celles du secteur privé, a toujours considéré que les aléas de la procédure administrative n’avaient aucun effet suspensif ou interruptif de la prescription.508 Les conséquences parfois inévitables de cette position a fait dire à la cour du travail de Bruxelles que «  le travailleur du secteur public peut être victime des lenteurs de l’administration à se prononcer alors qu’il est entretenu dans un faux climat de confiance né de cette procédure administrative apparemment pour lui, préalable à toute action future, procédure administrative à laquelle il peut croire devoir légitimement se plier. »509 La loi du 20 mai 1997510 prévoit que désormais « les actions en payement des indemnités se prescrivent par trois ans à dater de la notification de l’acte juridique administratif contesté. ». Les travaux préparatoires indiquent qu’il faut entendre par acte administratif « toute décision qui serait prise par l’employeur ou par le service de santé administratif pendant la durée de la procédure administrative » 511 Le point de départ du délai de prescription peut, dès lors, varié en fonction de l’acte administratif querellé.512 Le législateur a encore assorti cette modification majeure d’une mesure transitoire particulière à

502 Cass, 7 décembre 1992, RDS, 1993, p 12 ; Chron.D.S., 1993, p 307 ; Bull, 1992, p 1339.503 Cass, 1 mars 1993, JT, 1993, p 516 ; Chron.D.S., 1993, p 308 ; Bull, 1993, p 223.504 Cass, 6 mai 1991, Pas, 1991, p 786 ; comparer avec C. trav Gand, 21 décembre 1989, JTT, 1990, p 232 et note.505 C. trav Mons, 22 novembre 1995, JLMB, 1996, p 506 in casu les payements avaient été effectués à un office de tarification.506 C. trav Mons, 3 décembre 1996, Bull Ass, 1997, p 429 et note LVG ; qui cite Cass, 17 février 1989, Bull, 1989, p 621.507 Portant diverses mesures en matière de fonction publique.508 O. MICHIELS, «  Conséquences de la saisine du service médical sur l’écoulement du délai de la prescription en matière d’accident du travail dans le secteur public », JTT, 1996, p 248-250 ; M. RESPENTINO, «  Les accidents du travail dans le secteur public », Chron.D.S., 1991, p 372 ; Cass, 13 novembre 1995, JTT, 1996, p 247 ; Cass, 18 novembre 1996, JTT, 1997, p 101 et note ; Cass, 18 novembre 1996, JTT, 1997, p 26 et note.509 C. trav Bruxelles, 18 avril 1983, Chron.D.S., 1984, p 144 avec note de B. GRAULICH «  Les délais d’action en réparation d’un accident du travail dans le secteur public ».510 Portant diverses mesures en matière de fonction publique.511 Doc. Parl., Chambre, 1995-1996, n° 645/1, p 6.512 J. JACQMAIN, « La prescription de l’action en réparation d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle dans le secteur public », Chron.D.S, 1998, p 418

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savoir une application immédiate aux litiges qui, lors de son entrée en vigueur, n’ont pas fait l’objet d’une décision passée en force de chose jugée.513

3.7 L’action en révision.Une demande en révision des indemnités fondée sur une modification de la perte de capacité de travail de la victime ou sur son décès, due aux conséquences de l’accident, peut être introduite par le travailleur ou ses ayants droit dans les trois ans qui suivent l’entérinement de l’accord entre les parties ou de la décision judiciaire. Ce délai, qui est d’ordre public514, n’est ni un délai de prescription ni un délai de procédure mais constitue un délai préfix dont l’expiration entraîne la forclusion du droit.515 Il ne peut, par conséquent, souffrir aucune interruption ou suspension.516 Aussi, une citation introduite à temps mais frappée de nullité en vertu de la législation sur l’emploi des langues est dénuée de tout retentissement sur l’écoulement du délai de révision 517.La prise de cours du délai de révision est fixée à la date d’entérinement de l’accord ou, en cas de procédure judiciaire, lorsque le jugement ou l’arrêt est passé en force de chose jugée.518 A juste titre, selon nous, la cour du travail de Liège considère que l’action reconventionnelle introduite par le travailleur, après l’expiration du délai de révision, dans le cadre de la demande principale en révision diligentée à temps par l’assureur loi doit être déclarée recevable.519 La révision sollicitée doit se fonder sur des éléments nouveaux 520qui étaient inconnus ou ne pouvaient être décelés au moment de l’entérinement ou de la décision judiciaire définitive.521 Trois motifs 522 peuvent donner lieu à révision à savoir l’évolution d’une lésion qui a engendré un degré existant d’incapacité de travail, l’apparition d’une nouvelle lésion, ou l’aggravation d’un état pathologique existant – qui n’a pas été causé par l’accident du travail – lorsque cette aggravation est la conséquence de l’accident.523 La cour du travail d’Anvers estime que pour apprécier, s’il y a lieu à révision, il faut tenir compte de l’incidence de traitements médicaux et pharmaceutiques – in casu sur des crises d’épilepsie – car si leur efficacité est démontrée, ils sont de nature à avoir des répercussions sur la capacité de travail de l’intéressé.524 La même cour constate à bon droit que l’action en révision ne peut avoir pour objet la rectification d’une erreur commise dans la constatation et l’évaluation des séquelles de l’accident.525 Si l’aggravation ou l’amélioration de l’état de la victime doit nécessairement intervenir dans les trois ans, il n’est pas requis que

513 C. trav Liège, 11 février 1998, Chron.D.S., 1998, p 424, note J. JACQMAIN.514 Cass, 17 octobre 1998, JTT, 1989, p 105 ; Bull, 1989, p 165 ; RDS, 1989, p 47 ; Trib trav Furnes, 2 novembre 1989, Bull Ass, 1990, p 709, note LVG ; un acquiescement n’est dès lors pas possible : C. trav Bruxelles, 12 décembre 1989, Bull Ass, 1990, p 88 et note LVG.515 Cass, 1 mars 1993, JT, 1993, p 515 ; Chron.D.S., 1993, p 308 ; Bull, 1993, p 232 ; Trib trav Liège, 1 octobre 1990, JLMB, 1991, p 314.516 Cass, 23 janvier 1995, Chron.D.S., 1995, p 166 ; JTT, 1995, p 236 et note ; Bull, 1995, p 56.517 Trib trav Bruxelles, 26 juin 1990, RGAR, 1992, n° 11.917.518 Cass, 17 octobre 1998, JTT, 1989, p 105 ; Bull, 1989, p 165 ; RDS, 1989, p 47 ; C. trav Bruxelles, 12 décembre 1989, Bull Ass, 1990, p 88 et note LVG.519 C. trav Liège, ( section Neufchâteau ) 15 janvier 1992, JTT, 1992, p 331.520 Voir C. trav Mons, 12 février 1997, Chron.D.S., 1998, p 430 ; C. trav Liège, 28 mars 1997, Chron.D.S., 1998, p 431 ; Trib trav Bruxelles, 8 mai 1990, JTT, 1990, p 274 et note ; Trib trav Courtrai, 28 mai 1991, Bull Ass, 1991, p 610, note LVG ; 521 Trib trav Liège, 12 octobre 1995, Bull Ass, 1996, p 446, note P. MICHEL jugement dans lequel le tribunal précise qu’une gêne accrue ne constitue pas une modification imprévue ou imprévisible ; Trib trav Bruxelles, 30 juin 1995, Bull Ass, 1996, p 66, note L. VAN GOSSUM qui constate que des éléments médicaux nouveaux doivent exister avant la signification de la citation introductive d’instance.522 C. trav Gand, 5 septembre 1996, TGR, 1996, p 219.523 Cass, 23 octobre 1989, JTT, 1990, p 51 ; Chron.D.S., 1990, p 147 ; Bull, 1990, p 216 : la cour précise que les variations du marché général de l’emploi ne constitue pas un fondement à révision.524 C. trav Anvers, 31 juillet 1992, Chron.D.S., 1996, p 586.525 C. trav Anvers, 23 janvier1990, Bull Ass, 1990, p 485, note LVG.

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la permanence de la nouvelle incapacité de travail soit acquise dans ce même délai.526 La nouvelle date de consolidation doit cependant être fixée postérieurement à l’époque de l’entérinement ou de la première décision passée en force de chose jugée.527 Le tribunal du travail d’Ypres a ainsi fixé la date de l’amélioration de l’état de la victime qui s’est manifestée dans le délai de révision, au moment où cette amélioration a été constatée et non exclusivement à compter de la citation introductive d’instance.528

3.8 Indépendance de l’action en indemnisation loi et de l’action publique.L’article 74, alinéa 1 de la loi de 1971 prévoit que l’action en payement ou en révision des indemnités d’accident du travail ne peut, en aucun cas, être poursuivie devant les juridictions répressives ; l’exercice en est indépendant de l’action publique à laquelle l’accident donnerait éventuellement ouverture. La portée de cette disposition a été clairement mise en évidence par la cour de Cassation dans un arrêt du 12 janvier 1993. Les faits de la cause peuvent se résumer de la manière suivante : un travailleur, dans le cours de l’exécution de son contrat, est victime de coups et blessures. L’auteur est poursuivi devant les juridictions répressives du chef coups et blessures volontaires ayant entraîné une incapacité permanente de travail. ( article 400 du Code pénal ). La cour d’appel de Bruxelles condamne le prévenu mais disqualifie la prévention en coups et blessures ayant causés une incapacité temporaire de travail. ( article 399 du Code pénal ). La victime saisit, par la suite, les juridictions sociales d’une action en indemnisation de son accident du travail. Les premiers juges estimèrent devoir désigner un expert médecin avec mission notamment de proposer le taux d’incapacité permanente de travail résultant de l’accident. La cour du travail confirma cette décision. L’assurance loi ne put s’y contraindre et forma, dès lors, un pourvoi en cassation. L’assureur, demandeur en cassation, alléguait que la cour du travail méconnaissait l’autorité de chose jugée qui s’attache à l’arrêt de la cour d’appel qui en avait conclu à l’absence d’incapacité permanente de travail. La Haute Cour rejeta ce pourvoi aux motifs que l’article 74 alinéa 1 renferme une exception au principe du « criminel tient le civil en état » ; il en résulte que si la question de l’incapacité permanente de travail dont se prévaut la victime avait été soulevée d’abord devant le tribunal du travail celui-ci « n’aurait pas été tenu de surseoir à statuer jusqu’à la décision du juge pénal ; que l’exercice de cette action étant indépendant de l’exercice de l’action publique, l’appréciation par le juge pénal du caractère permanent ou temporaire de l’incapacité de travail de la victime ne forme titre, en matière d’accident du travail, ni pour elle, ni contre elle ».529

3.9 La question préjudicielle.L’article 74 alinéa 2 de la loi de 1971 énonce :« les questions préjudicielles qui se posent devant la juridiction répressive au sujet de l’interprétation de la loi sur les accidents du travail sont tranchées par la juridiction sociale ». La cour d’appel de Liège constate que la loi de 1971 décrète l’incompétence du juge pénal pour se prononcer sur l’existence d’un accident du travail, la réalité de celui devant au préalable être appréciée par la juridiction sociale. Cependant, ajoute la cour, cette disposition ne vise pas les tribunaux civils. Par conséquent, l’article 74 alinéa 2 dérogeant aux principes fondamentaux de la procédure civile doit être interprété strictement et de ce fait ne peut s’appliquer qu’aux seules juridictions répressives.530

Le juge pénal, quant à lui, qui constate que l’accident doit être considéré comme un accident survenu sur le chemin du travail mais qui conclut qu’il n’y a pas lieu de saisir la juridiction du

526 C. trav Mons, 26 mars 1993, RGAR, 1995, n° 12.537 ; C. trav Bruxelles, 15 janvier 1990, JTT, 1990, p 271.527 Cass, 10 février 1997, JTT, 1997, p 291 ; Bull, 1997, p 202.528 Bull Ass, 1992, p 461, note F. VAN AERDE.529 Cass, 12 octobre 1992, JTT, 1992, p 477 ; Rev. dr. Pén., 1993, p 222 ; Bull, 1992, p 1148, conclusions J.F. LECLERCQ ; RRD, 1993, p 51.530 Liège, 20 octobre 1994, JLMB, 1997, p 1075, note L. VAN GOSSUM ; Rev. dr. Santé, 1996-1997, p 182, note N.COLETTE BASECQZ.

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travail d’une question préjudicielle, en l’absence d’une telle question, ne se conforme pas à l’article 74 alinéa 2, puisque la motivation retenue revient d’abord à trancher la question préjudicielle puis à constater qu’il n’y a lieu de poser une telle question.531 Il a encore été jugé par la cour d’appel d’Anvers qu’il appartient au tribunal du travail d’apprécier si le décès d’un joueur de football des suites d’un traitement effectué par le médecin attaché à un club constitue ou non un accident du travail.532 Pour terminer, il nous semble important d’insister sur le fait d’une part que la question préjudicielle n’a aucune incidence sur le déroulement de l’action publique et que d’autre part dès l’instant où la réparation du dommage sollicité devant le juge pénal trouve son origine dans un accident du travail, la juridiction répressive doit, en raison du caractère d’ordre public de la loi, surseoir à statuer sur ce point.533

Chapitre 4 : Régimes spéciaux.

Section 1 : risques spéciaux.Les dommages résultant d’accidents du travail par suite de l’action de matière explosives, inflammables, corrosives ou toxiques au cours du chargement, du déchargement ou de la manutention d’engins de guerre ou par suite d’explosions provoquées par la simple présence de ces engins, sont réparés par l’assureur loi.534 Sur cette base, la cour du travail de Bruxelles avait estimé que l’explosion d’une voiture piégée, délaissée sur la chaussée pour endommager des biens et blesser des passants, représente un engin de guerre susceptible d’occasion l’intervention de l’assureur.535 La cour de Cassation a censuré cet arrêt en indiquant qu’il y a lieu d’entendre par engin de guerre « tout matériel qui est effectivement utilisé ou qui est effectivement destiné à faire la guerre ; la seule circonstance que du matériel similaire peut être utilisé pour faire la guerre, ne suffit pas pour considérer ce matériel comme engin de guerre ». De ce fait, les actes de terrorisme occasionnant des accidents mais qui ne présentent aucun lien avec des faits de guerre ne peuvent s’apparenter à un conflit ou des hostilités entre troupes régulières ou irrégulières.536

Chapitre 5 : Surveillance et sanction.

Section 1 : Les sanctions.La loi sur les accidents du travail comporte des dispositions pénales applicables notamment à l’employeur, ses préposés ou ses mandataires qui ne se sont pas conformés aux obligations imposées par ou en vertu de ladite loi. Ainsi, l’employeur qui n’a pas contracté une assurance contre les accidents du travail auprès d’une société d’assurances à primes fixes agréée, soit auprès d’une caisse commune d’assurance agréée537 ou qui n’a pas déclaré l’accident survenu à l’un de ses travailleurs estimant de sa propre initiative qu’il n’y a pas d’accident du travail 538 s’exposent à des sanctions pénales consistant en une peine d’emprisonnement de huit jours à un mois et/ou une amende de 26 à 500 francs. La poursuite de ces infractions relève toujours à l’heure actuelle de la compétence de l’auditorat du travail.539 Avec l’entrée en vigueur des réformes nées de l’accord octopus, c’est la section auditorat du parquet qui exercera l’action

531 Cass, 12 janvier 1993, Bull, 1993, p 35 ; RW, 1993-1994, p 18.532 Anvers, 14 septembre 1994, Rev. dr. Santé, 1997-98, p 31.533 J. CLESSE, loc.cit., RGAR, 1984, n° 10797, n° 19 ; Liège, 4ième ch. AGT C/ G et M, 26 mai 1999, n° 1293.534 Voir article 84 de la loi de 1971.535 C. trav Bruxelles, 23 octobre 1987, Bull Ass, 1988, p 288.536 Cass, 21 novembre 1988, Bull, 1989, p 317 ; R.W., 1988-89, p 814.537 Voir notamment : Corr. Liège, 13ième chambre, Auditeur du travail C/ G., 19 septembre 1996, plumitif 1674 ; Corr Liège, 13ième chambre, Auditeur du travail C/ B., 12 mars 1999, plumitif n° 718.538 Corr. Liège, 13ième chambre, Auditeur du travail C/ M., 9 mai 1997, plumitif 931 ; l’appel formé contre ce jugement a été rejeté : Liège, 4ième ch. AGT C/ G et M, 26 mai 1999, n° de répertoire 1293, inédit.

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publique devant le tribunal correctionnel et devant la cour d’appel du chef de ces infractions.540

Chapitre 6 : Divers.

6.1 Fiscalité.La cour de Cassation estime « qu’il ressort des travaux préparatoires que, par l’article 32bis, alinéa 1er,( devenu article 34 CIR/92 ) conjointement avec l’article 20, 5°, du CIR, le législateur vise à imposer comme revenus professionnels entre autres les indemnités allouées aux travailleurs à titre de revenus de remplacement pour une incapacité permanente de travail, notamment une incapacité permanente causée par un accident du travail ; (…) pour l’application de l’article 32bis, il n’est pas requis que, pendant la période imposable, le redevable ait subi, comparativement à sa rémunération antérieure, une perte effective de salaire à la suite de ladite incapacité de travail. »541 Comme l’écrit J. THILMANY « la jurisprudence semble désormais s’accorder unanimement sur le caractère taxable des indemnités versées en vertu de la législation sociale, soit qu’elles réparent la perte effective de revenus professionnels, soit que, en l’absence de cet élément, elles présentent un lien direct ou indirect avec l’activité professionnelle exercée.»542 Dès lors, les indemnités versées à la suite d’un accident du travail ou sur le chemin du travail sont imposables.543 En revanche, les indemnités de droit commun accordée pour incapacité permanente qui ne réparent pas une perte de revenus professionnels ne sont pas soumises à l’impôt.544 C’est pourquoi un contribuable victime d’un accident sur le chemin du travail a soutenu devant la cour d’appel de Bruxelles que la taxation des indemnités forfaitaires versées en réparation de son incapacité permanente de travail mais n’entraînant aucune perte de revenus 545 constituait une discrimination dès lors que les mêmes indemnités allouées à un préjudicié selon le droit commun, en raison par exemple d’un accident relevant de la vie privée, ne sont quant à elles pas imposables. La cour d’appel accepta de soumettre ce problème à la cour d’Arbitrage par le biais d’une question préjudicielle. La cour constitutionnelle en conclut qu’aucun raison « ne peut justifier d’inclure dans la catégorie des revenus imposables, les pensions, rentes et allocations versées à la suite d’un accident reconnu comme accident du travail au sens de la loi du 10 avril 1971 sans pour autant qu’il porte atteinte aux revenus professionnels de la victime. L’indemnisation, à laquelle la victime a droit n’a pas, dans cette hypothèse, le caractère d’un revenu de remplacement. Il en résulte que la victime subit en ce cas une discrimination par rapport à d’autres victimes d’un accident qui ne s’est produit ni sur le chemin ni sur les lieux du travail puisqu’elle est soumise à l’impôt sur les revenus tant pour l’indemnité due en raison de l’accident que pour les revenus professionnels que, par hypothèse, elle continue de percevoir. ».546 Par conséquent, l’imposition des indemnités attribuées en raison d’une incapacité permanente de travail résultant d’un accident du travail

539 Voir article 155 alinéa 1 du Code judiciaire et en cas de connexité avec d’autres infractions de droit commun voir article 155 alinéa 2 et Cass, 8 octobre 1996, JT, 1997, p 496 et note de O. MICHIELS, Le contrôle des juridictions de fond sur la désignation par le procureur général du magistrat compétent en application de l’article 155 alinéa 2 du Code judiciaire.540 Voir à ce sujet : N. MEUNIER et O. MICHIELS, « Les conséquences de la réforme octopus sur l’auditorat du travail – instantané. », JUGER, 1999, n° 16-17, pp. 34-36.541 Cass, 15 mai 1987, Bull, 1987, p 1114 ; JT, 1988, p 127; FJF, n° 87/159 ; Courrier fiscal, 1987, p343 et obs J. THILMANY ; voir aussi Cass, 26 mars 1991, JF., 1991, p 766 ; Cass, 27 novembre 1992, FJF, 93/83.542 J. THILMANY, « Le caractère imposable des indemnités réparant les conséquences d’une incapacité de travail », CUP, formation permanente, volume XIV, février 97, pp. 74 et 75543 Liège, 27 mars 1991, JLMB, 192, p 351 ; Mons, 19 mars 1993, FJF, n° 93/207 ; Anvers, 14 octobre 1993, FJF, 92/25 ; Gand, 12 février 1991, JDF, 1993, p 57.544 Voir à propos d’un accident de roulage relevant de la vie privée : Bruxelles, 29 février 1996, FJF, 1996, p 299.545 En vertu de l’article 32bis du CIR devenu 34 du CIR 92.

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qui n’engendre pas de perte de revenu est contraire au principe d’égalité garanti par la Constitution. Les indemnités allouées pour incapacité temporaire, totale ou partielle, ne sont quant à elles imposables que si elles réparent une perte réelle et effective de revenus professionnels.547 Il apparaît encore que ne sont pas taxables – puisqu’elles ne s’accompagnent pas de pertes de revenus - les indemnités pour l’aide d’une tierce personne et les indemnités réparant une perte de capacité de travail ou des efforts accrus.548

6.2 Droit judiciaire.On relève que: L’action diligentée devant la juridiction sociale pour obtenir l’indemnisation d’un accident

du travail doit l’être par voie de citation. Dès lors, l’utilisation d’une requête débouche nécessairement sur une irrecevabilité.549

En se fondant sur l’article 6 de la loi de 1971, la cour de Cassation a admis que l’assureur loi puisse invoquer des moyens nouveaux à l’appui de son appel même si le jugement entrepris est conforme à ses conclusions.550

La cour du travail de Mons considère qu’un appel contre un jugement d’accord est recevable si un élément nouveau inconnu des parties apparaît.551

La cour du travail de Liège a jugé que le travailleur qui a fondé initialement sa demande sur l’existence d’un accident sur le chemin du travail peut, par voie de conclusions, modifier celle-ci au fin que son accident soit considéré comme un accident de travail sensu stricto à la condition que son action repose sur le même fait.552

La cour du travail de Mons a estimé que la victime d’un accident du travail qui introduit avant l’échéance de la prescription une demande qu’elle qualifie d’action en révision contre une décision de guérison sans séquelles sollicite en fait une indemnisation de son préjudice ce d’autant plus que dans sa citation elle fait référence à la notion de consolidation et au salaire de base.553

Le tribunal d’arrondissement de Liège dans un litige concernant l’action intentée par l’assureur loi contre un employeur qui restait en défaut de payer ces primes d’assurance a considéré que «  l’article 579 du code judiciaire donne compétence au tribunal du travail pour connaître des demandes relatives à la réparation des dommages résultant des accidents du travail ; en vertu de l’article 49 de la loi du 10 avril 1971 l’employeur est tenu de contracter une assurance contre les accidents du travail (…) Ce n’est pas la mise en œuvre de la loi du 10 avril 1971 qui détermine la compétence mais la cause de l’action aux termes de l’article 579 du Code judiciaire ; en l’espèce, la cause de l’action est

546 CA 9 décembre 1998, MB, 19 mars 1999, p 8879 ; Fisc. Act. 1998, liv. 44, 1 ; Fiscologue, 1999, liv. 691, 6 ; J. THILMANY, «  Indemnités d’incapacité permanente et égalité devant l’impôt », IDj, 1999/3, pp. 71-72.547 Voir JP BOURS et F DELOBBE, « Illustration des principes et applications pratiques en matière d’incapacité temporaire et permanente de travail », CUP, formation permanente, volume XIV, février 97, pp. 87-90.548 Bruxelles, 20 novembre 1990, RGF, 1991, p 198 note THILMANY ; JP BOURS et F DELOBBE, loc. cit., p 91.549 Trib trav Gand, 9 mars 1992, Pas, 1992, III, p 61 ; voir aussi, Cass, 27 mai 1994, JLMB, 1995, p 8 ; G. de LEVAL, «  Le miroir de la procédure », CUP, formation permanente, volume IV, 13.10.1995, p 15-16.550 Cass, 23 avril 1990, JTT, 1990, p 261 et note ; Bull, 1990, p 959.551 RGAR, 1996, n° 12.574 ; Bull Ass, 1995, p 389, note L. VAN GOSSUM ; comparer avec article 1043 du code judiciaire et A. FETTWEIS, « Manuel de procédure civile », Faculté de droit, d’économie et de sciences sociale de Liège, 1985, p 496, n° 743.552 C. trav Liège, 8 octobre 1990, JTT, 1991, p 94 et note ; JLMB, 1991, p 306, note N. SIMAR ; voir article 807 du Code judiciaire et J. VAN COMPERNOLLE et G. CLOSSET MARCHAL, Examen de jurisprudence – droit judiciaire privé, 1985-1996, RCJB, 4e trim. 1997, n° 60-65, pp. 545-548.553 C. trav Mons, 6 septembre 1995, RGAR, 1997, n° 12.799 ; voir aussi E. KRINGS «  L’office du juge. Evolution, révolution ou tradition », JT, 1993, p 17.

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l’exécution du contrat d’assurance et non la réparation d’un accident du travail ; les juridictions ordinaires sont donc compétentes. »554

Dans le secteur public, le débiteur des rentes et indemnités demeure l’employeur public. Aussi, comme le relève le tribunal du travail de Liège, la victime d’un accident du travail ne dispose pas d’un droit propre ou d’une action directe contre l’assureur de l’administration.555 La référence à l’article 86 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre qui concerne le « droit propre de la personne lésée » ne sera d’aucun secours au personnel du secteur public. En effet, à juste titre, le tribunal du travail de Liège estime que « l’assurance contractée librement par l’administration ou l’établissement visé par la loi du 3 juillet 1967 est une assurance de personnes ; que l’objet de la prestation d’assurance est bien, en effet, de couvrir la survenance d’un événement incertain ( l’accident ) susceptible d’affecter la vie ou l’intégrité physique du bénéficiaire ( le travailleur ) ; que l’article 86 de la loi concerne les assurances de responsabilité, c’est à dire celles qui portent sur l’intégralité du patrimoine. Exemples : l’assurance RC automobile, l’assurance RC familiale, les assurances RC professionnelles ; qu’or l’intervention de l’assurance contre les risques accidents du travail ou d’accidents survenus sur le chemin du travail n’est pas liée à la responsabilité de l’assuré ; celui-ci est couvert contre les risques précités par le seul fait de sa qualité d’employeur de la victime de l’événement dont la réalisation conditionne l’intervention de l’assurance, et ce en dehors de toute question liée à sa responsabilité dans la réalisation dudit événement ».556 Les juges en concluent qu’il n’existe, dès lors, pas d’incompatibilité légale entre la loi du 3 juin 1967 et la loi du 25 juin 1992. En conséquence de quoi, l’action de la victime d’un accident du travail dirigée contre l’assureur de l’administration qui l’occupe doit être déclarée irrecevable.

La loi du 18 mars 1999557 modifie l’article 1410 § 2, 5° du Code judiciaire qui prévoit dorénavant que ne sont ni cessibles ni saisissables les sommes à payer à titre de soins médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et hospitaliers ou de frais d’appareils de prothèse et d’orthopédie à une personne victime d’un accident du travail conformément à la législation sur les accidents du travail.

Olivier MICHIELS,Stagiaire judiciaire près le Tribunal de 1er instance de Liège.

554 Trib Arr. Liège, 28 novembre 1996, RTA, 96/49/E.555 Trib trav Liège, 7ième chambre, M. C/ SMAP et CHP, 25 mars 1999, RG 285.238 qui cite Cass, 4 juin 1984, JTT, 1985, p 200 ; M. RESPENTINO, « Les accidents du travail dans le secteur public », Chron. de droit à l’usage du Palais, T VI, 1989, pp. 19 et suivantes.556 Trib trav Liège, 7ième chambre, M. C/ SMAP et CHP, 25 mars 1999, RG 285.238.557 modifiant l’article 1410 § 2 du code judiciaire et l’article 2071 du Code civil, MB, 29.05.1999, p 19325 ; comparer avec C.A, n° 66/96, 13 novembre 1996, MB, 25.01.1997, p 1442.

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Page 65: Synthèse de jurisprudence Accident du travail

TABLE DES MATIERES.

Avant propos.

Chapitre I : Dispositions préliminaires.

Section 1 : champ d’application.

1.1 Champ d’application.1.2 Les trois règles contenues dans l’article 6 de la loi du 10 avril 1971.

Section 2 : Définition.

2.1 Généralités.

2.2 L’accident doit survenir dans le cours et par le fait de l’exécution du contrat de travail.

2.3 La lésion.

2.4 L’événement soudain.

2.4.1 Généralités.2.4.2 La jurisprudence recensée.2.4.3 La preuve de l’événement soudain.

2.5 Les accidents sur le chemin du travail.

2.5.1 Généralités.2.5.2 La notion de résidence.2.5.3 Les interruptions.2.5.4 Les détours.2.5.5 L’anticipation du départ.2.5.7 Le travailleur en mission.2.5.8 Le transport organisé par l’employeur.2.5.9 Les trajets assimilés.2.5.10 Divers : licenciement pour motif grave, l’article 18 de la loi sur le contrat de travail, demande nouvelle et autorité de chose jugée.

Chapitre 2 : La réparation.

Section 1 : Les accidents du travail mortel.

Section 2 : Incapacité de travail.

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Page 66: Synthèse de jurisprudence Accident du travail

2.1 Généralités.

2.2 L’incapacité temporaire et la remise au travail.

2.3 La guérison sans incapacité.2.4 L’incapacité permanente.

2.5 La consolidation.

2.6 L’état antérieur et les accidents successifs.

2.7 Les incapacités permanentes inférieures à 10 %.

2.8 L’allocation pour l’aide d’une tierce personne.

2.9 Les rechutes en incapacité temporaire totale.

2.10 Le nouvel article 25 ter de la loi de 1971 : la récupération du salaire garanti.

Section 3 : Les autres allocations.

Section 4 : Les soins médicaux et prothèses.

4.1 Les soins médicaux.

4.2 Les prothèses.

4.3 Les frais de déplacement.

Section 5 : La rémunération de base.

5.1 Généralités.

5.2 La rémunération à laquelle le travailleur a droit.

5.3 La période de référence.

5.4 Les pensionnés.

5.5 Les travailleurs à temps partiel.

5.6 Le plafond de la rémunération de base.

Section 6 : Le payement.

6.1 Les intérêts.

6.2 Le cumul entre rentre accordée en accident du travail et pension de survie.

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6.3 Tiers en capital.

Section 7 Responsabilité civile.

7.1 Généralités.

7.2 L’immunité civile de l’employeur.

7.3 L’immunité civile des préposés et mandataires.

7.4 La responsabilité civile et l’accident survenu sur le chemin du travail.

7.5 L’interdiction de cumul de l’indemnisation d’un même dommage.

7.6 L’option de responsabilités.

Section 8 : Le recours de l’assurance loi.

8.1 Généralités.

8.2 Les débours de l’assurance loi.

8.3 Les éléments composants la créance de l’assureur loi.

8.4 Le recours de l’assurance loi contre l’employeur en cas d’accident sur le chemin du travail.

8.5 Partage de responsabilité : entre la victime et un tiers – entre un tiers et une personne immunisée civilement.

8.6 Concours entre la victime et l’assureur loi.

8.7 L’action en déclaration de jugement commun devant les juridictions sociales.

8.8 L’action subrogatoire de l’assureur loi dans les hypothèses d’accident de la circulation.

8.9 Faute intentionnelle de la victime.

Chapitre 3 : L’assurance.

3.1 L’organisme assureur.

3.2 Le Fonds des accidents du travail.

3.3 Procédure : relation assureur loi – organisme assureur.

3.4 Entérinement des accords.

3.5 Les dépens.

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3.6 La prescription.

3.7 L’action en révision.

3.8 Indépendance de l’action en indemnisation loi et de l’action publique.

3.9 La question préjudicielle.

Chapitre 4 : Régimes spéciaux.

Section 1 : risques spéciaux.

Chapitre 5 : Surveillance et sanction.

Section 1 : Les sanctions.

Chapitre 6 : Divers.

6.1 Fiscalité.

6.2 Droit judiciaire.

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