5
Journal de pédiatrie et de puériculture (2013) 26, 6—10 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com ARTICLE ORIGINAL Tentative de suicide chez l’enfant et l’adolescent : une expérience Marocaine Suicide attempts in children and adolescents in Moroccan clinical sample S. Salimi a,b,, S. Bouhdadi a,c , A. Rachid a,c , R. Atlas a,c , F. Dehbi a,b a Service de pédiatrie II, hôpital Abderrahim Harouchi, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc b Faculté de médecine et de pharmacie Hassan II, 19, rue Tarik Bnou Ziad, Mers Sultan, 9154 Casablanca, Maroc c CHU Ibn Rochd, 1, rue des Hôpitaux, Casablanca, Maroc Rec ¸u le 18 juillet 2012 ; accepté le 23 octobre 2012 MOTS CLÉS Tentatives de suicide ; Enfants ; Facteurs de risque Résumé Les conduites suicidaires chez l’enfant et l’adolescent représentent un problème de santé publique. C’est la deuxième cause de mortalité en France chez les sujets masculins de 15—25 ans après les accidents et troisième cause chez les sujets féminins. Elles restent, chez l’enfant, un phénomène sous-estimé et peu étudié au Maroc. Objectif. Évaluer les facteurs de risque des tentatives de suicide (TS) chez l’enfant. Méthodologies. Étude descriptive, rétrospective, chez 43 enfants âgés de moins de 14 ans, hospitalisés au service de pédiatrie du CHU Ibn Rochd, hôpital Abderrahim Harouchi de Casa- blanca de janvier 2009 à décembre 2011 pour TS. Résultats. Le conflit familial (34,14 %) et l’échec scolaire (24,34 %) étaient les facteurs déclen- chant les plus fréquents. La prise médicamenteuse était le moyen le plus utilisé (87,80 %). Dix-sept pour cent des enfants avaient des troubles de comportement. Aucune symptomatologie particulière n’a été trouvée chez nos patients (58,53 %). Conclusion. La prévention reste le seul moyen efficace pour éviter le passage à l’acte suici- daire. © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresses e-mail : [email protected] (S. Salimi), [email protected] (S. Bouhdadi), dr [email protected] (A. Rachid), [email protected] (R. Atlas), dehbi [email protected] (F. Dehbi). 0987-7983/$ see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2012.10.001

Tentative de suicide chez l’enfant et l’adolescent : une expérience Marocaine

  • Upload
    f

  • View
    219

  • Download
    5

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Tentative de suicide chez l’enfant et l’adolescent : une expérience Marocaine

J

A

Tu

S

a

0h

ournal de pédiatrie et de puériculture (2013) 26, 6—10

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

RTICLE ORIGINAL

entative de suicide chez l’enfant et l’adolescent :ne expérience Marocaine

uicide attempts in children and adolescents in Moroccan clinical sample

S. Salimia,b,∗, S. Bouhdadia,c, A. Rachida,c, R. Atlasa,c,F. Dehbia,b

a Service de pédiatrie II, hôpital Abderrahim Harouchi, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Marocb Faculté de médecine et de pharmacie Hassan II, 19, rue Tarik Bnou Ziad, Mers Sultan, 9154Casablanca, Marocc CHU Ibn Rochd, 1, rue des Hôpitaux, Casablanca, Maroc

Recu le 18 juillet 2012 ; accepté le 23 octobre 2012

MOTS CLÉSTentatives desuicide ;Enfants ;Facteurs de risque

Résumé Les conduites suicidaires chez l’enfant et l’adolescent représentent un problème desanté publique. C’est la deuxième cause de mortalité en France chez les sujets masculins de15—25 ans après les accidents et troisième cause chez les sujets féminins. Elles restent, chezl’enfant, un phénomène sous-estimé et peu étudié au Maroc.Objectif. — Évaluer les facteurs de risque des tentatives de suicide (TS) chez l’enfant.Méthodologies. — Étude descriptive, rétrospective, chez 43 enfants âgés de moins de 14 ans,hospitalisés au service de pédiatrie du CHU Ibn Rochd, hôpital Abderrahim Harouchi de Casa-blanca de janvier 2009 à décembre 2011 pour TS.Résultats. — Le conflit familial (34,14 %) et l’échec scolaire (24,34 %) étaient les facteurs déclen-chant les plus fréquents. La prise médicamenteuse était le moyen le plus utilisé (87,80 %).Dix-sept pour cent des enfants avaient des troubles de comportement. Aucune symptomatologieparticulière n’a été trouvée chez nos patients (58,53 %).

Conclusion. — La prévention reste le seul moyen efficace pour éviter le passage à l’acte suici-daire.

. Tous droits réservés.

© 2012 Elsevier Masson SAS

∗ Auteur correspondant.Adresses e-mail : [email protected] (S. Salimi), [email protected] (S. Bouhdadi), dr [email protected] (A. Rachid),

[email protected] (R. Atlas), dehbi [email protected] (F. Dehbi).

987-7983/$ — see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.ttp://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2012.10.001

Page 2: Tentative de suicide chez l’enfant et l’adolescent : une expérience Marocaine

Tentative de suicide chez l’enfant et l’adolescent : une expérience Marocaine 7

KEYWORDSSuicide attempts;Children;Risk factors

Summary The suicidal lines between the child and adolescent represent a public health pro-blem. This is the second cause of mortality in France in male subjects in the 15—25 years afterthe accidents and third cause in female subjects. Suicide attempts in childhood are rare andinfrequently reported excusive in Morocco.Objectives. — The aim of this study was to evaluate the risk factors of suicide attempts ofchildren.Methods. — It is a retrospective, descriptive study of 43 patients aged less or equal to 14 yearsof the department of child of Ibn Rochd Hospital Abderrahim Harouchi in Casablanca, whoattempted suicide in the period from January 2009 through December 2011.Results. — The family conflict (34.14%) and the school failure (24.34%) were the factors thattrigger the most frequent. The drug intoxication was the most used method in 87.8%. Seventeenpercent of the children had a behavioral disorder. No particular symptomatology has been foundamong our patients (58.53%).Conclusion. — The prevention remains the only effective mean to avoid the transition to thesuicidal act.© 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Tableau 1 Antécédents personnels.

Antécédents de l’enfant Nombre de cas %

Antécédents psychologiques 14 34,40Troubles du comportement 7 17TS antérieure 2 4,80Syndrome dépressif 5 12,19Abandon dans l’enfance 2 4,80Maltraitance 5 12,19Abus sexuels 3 7,30Divorce des parents 22Le décès d’un paient ou d’un

membre de la fratrie1 2,40

Abandon par un parent 2 4,80Pathologie organique lourde 1 2,40

nspé1vdQ(neassf(

Introduction

Les conduites suicidaires chez l’enfant et l’adolescent sonten nette augmentation. Elles constituent un problème desanté publique au Maroc. En effet, les conduites suicidairesreprésentent la deuxième cause de mortalité en France chezles sujets masculins de 15—25 ans et la troisième cause dedécès chez les dix à 24 ans aux États-Unis [1]. Ces conduitessuicidaires sont à l’origine d’une mortalité et d’une morbi-dité importante.

Plusieurs facteurs sont incriminés dans la genèse destentatives de suicide (TS) chez les enfants (individuels, fami-liaux, sociaux, etc.), mais elles sont dues le plus souvent àune vulnérabilité psychique sous-jacente retrouvée chez cesenfants. D’ou la nécessité de mettre en place un protocolerigoureux d’évaluation après toute TS chez l’enfant.

Ce travail se propose de décrire la situation épidémio-logique et plus particulièrement d’identifier les facteursdéclenchant l’acte suicidaire chez l’enfant de moins de14 ans hospitalisé au service de pédiatrie à l’hôpitald’enfants, Abderrahim Harouchi, de Casablanca.

Patients et méthodes

Il s’agit d’une étude rétrospective où nous avons regroupé43 dossiers de TS confirmées sur toutes les hospitalisationspour intoxication volontaire, chez des enfants âgés de moinsde 14 ans, entre janvier 2009 et juin 2011 au service depédiatrie du CHU Ibn Rochd de Casablanca.

Les données cliniques ont été recueillies à l’aide d’unefiche d’exploitation préétablie.

Résultats

L’âge moyen de nos patients était de 12 ans et demiavec des extrêmes d’âge maximal de 14 ans et minimalde sept ans. Nous avons trouvé une prédominance fémi-nine (58,53 %) avec un sex-ratio de 1,5. La scolarité était

d2dé

Un conflit familial 12 29,26

ormale chez 30 enfants (69,76 %) et perturbée (un écheccolaire (24,39 %) chez huit patients (18,6 %) alors que cinqatients n’étaient pas scolarisés (11,62 %). Le niveau socio-conomique bas a été trouvé chez 28 enfants, moyen chez3 enfants. Une symptomatologie dépressive a été trou-ée chez 12,19 % des patients. Des troubles de conduite ete comportement ont été trouvés chez 17 % des enfants.uatorze patients étaient suivis chez un pédopsychiatre

Tableau 1). Alors qu’aucune symptomatologie particulière’a été trouvée chez 58,53 % des patients. La majorité desnfants suicident avaient un conflit familial (34,14 %). Nousvons trouvé la notion de suicide dans la fratrie chez uneeule patiente dont les deux frères sont décédés suite à unuicide. Ainsi que 17 cas de maladie psychiatrique dans laamille à type de : dépression (huit cas), trouble bipolairesix cas) et psychose (cinq cas) (Tableau 2).

Les relations intrafamiliales étaient jugées mauvaisesans tous les cas. L’environnement familial était perturbé :

2 patients dont les parents sont séparés ou en instance deivorce, 12 enfants ayant un conflit familial, cinq enfantstaient victime de maltraitance physique, deux patients
Page 3: Tentative de suicide chez l’enfant et l’adolescent : une expérience Marocaine

8

Tableau 2 Antécédents familiaux.

Antécédents familiaux Nombre de cas

Antécédentspsychiatriques parentaux

17

Antécédents somatiques 4Tentative de suicide 1Alcoolisme 2Prison 1

Tableau 3 Différentes causes des tentatives de suicide(TS).

Cause de la TS %

Conflits familial 34,14Échec scolaire 24,39Dépression 19,12Déception amoureuse 2,4Tentative de viol 7,3Aucune cause identifiée 19,51

dp

Lcsue(

lvpt

d

àdvg

D

Lmddldpslé

ledlpnlcé

f

F

LVqsvsev

LCqtij9

ont le père était alcoolique, un enfant ayant un père enrison et un autre dont le père est décédé.

La majorité des TS ont eu lieu au domicile familial (97 %).es facteurs déclenchant de suicides étaient variables : unonflit familial a été trouvé chez 34,14 % des cas, un écheccolaire chez 24,34 %, une déception amoureuse chez 2,4 %,ne tentative de viol chez 7,3 %, une dépression chez 12,19 %t aucune cause n’était identifiée chez 19,51 % des enfantsTableau 3).

Les moyens utilisés pour le suicide étaient variables, maise plus souvent il s’agit d’une intoxication médicamenteuseolontaire (87,80 % ; 38cas) dont les psychotropes sont leslus incriminés. Quatre patients avaient recours à d’autresoxiques : Takaout, eau de javel (Tableau 4).

L’évolution était favorable chez 18 patients seulement ;eux enfants ont été transférés en réanimation.

Le geste suicidaire chez l’enfant n’est pas un pas simple franchir, c’est un appel au secours et surtout une volonté’attirer l’attention de son entourage et cache souvent uneolonté de se libérer de son entourage, qui est lui-même

énérateur d’agressivité et d’idées suicidaires.

Tableau 4 Moyens utilisés.

Moyen de la TS Nombrede cas

%

Intoxication médicamenteusevolontaire

36 87,80

Défenestration 2 4,80Pendaison 2 4,80Ingestion de l’eau de javel 1 2,40Ingestion de Takout 1 2,40

TS : tentative de suicide.

uLCqeppdn

qg[jqsa

S. Salimi et al.

iscussion

es TS de l’enfant de moins de 13 ans restent un phéno-ène rare mais non exceptionnel puisque 10 à 15 % des TSe l’enfant et de l’adolescent concerneraient des enfantse moins de 12 ans. Dans une revue des études épidémio-ogiques concernant les TS, Choquet [2] déplore la raretées enquêtes menées en population générale. Celles-ci ontermis cependant de mettre en évidence que 7 % des jeunescolarises, entre 11 et 19 ans, déclarent avoir fait une TS ;es jeunes de scolarisées présentent un taux deux fois pluslevé [2].

Les résultats d’une étude rétrospective aux urgences de’hôpital Avicenne en France portant sur une comparaisonntre les TS des adolescents d’origine maghrébine et celleses adolescents de parents non migrants [3] indiquent quees TS des jeunes d’origine maghrébine ne se différenciaientas de celles des jeunes de parents non migrants concer-ant leur déroulement, leur contexte psychopathologique,eur fréquence ou encore les idées suicidaires. La spécifi-ité des TS des jeunes d’origine maghrébine concernait leurvénement déclenchant et leur devenir.

Plusieurs facteurs sont incriminés dans la TS ; individuelsamiliaux, sociaux et environnementaux.

acteurs individuels

’âgeariait de sept à 14 ans avec une moyenne de 12 ans, ceui concorde avec les données de la littérature, en effet ilemblerait que le geste suicidaire commence à apparaîtreers 12 ans [4,5]. Chez l’enfant, l’intention suicidaire estouvent remise en cause, voire niée et le geste suicidairest considéré comme un accident durant cette période deie [5,6].

e sexeertaines données démographiques de notre population sontuant à elles conformes aux résultats de la littérature : leaux de filles suicidantes est supérieur à celui des garcons etl y a une tendance à l’égalisation des genres chez les pluseunes. En effet, l’étude de Delamare et al. [7] portant sur7 enfants de moins de 13 ans suivis pour une TS a retrouvéne proportion de 58,3 % de filles et de 42,7 % de garcons.es filles ont plus d’idéations suicidaires graves (23,6 %).’est à partir de la préadolescence et début d’adolescence,ue la proportion de filles suicidantes devient importantet ce d’autant plus que l’on avance en âge, pour atteindrerogressivement les taux connus de l’adolescence. Elles pré-arent le plus souvent un plan spécifique et commettent pluse tentatives que les garcons [8,9], ce qui est constaté dansotre étude.

Le taux des TS est par ailleurs plus élevé chez les fillesue chez les garcons, alors que la mortalité concerne plus lesarcons que les filles [2]. Par ailleurs, Choquet et Granboulan10] ont mené une étude longitudinale sur 12 mois, auprès de

eunes hospitalisés à la suite d’une TS. Cette étude montreue la majorité des suicidants sont des filles ; le pic de l’âgee situe entre 15 et 16 ans ; 30 % des suicidants majeurs sontu chômage.
Page 4: Tentative de suicide chez l’enfant et l’adolescent : une expérience Marocaine

rien

dtlsltp

eséédirdm

cpn«s

têd

prEmrnfRpd

ddsanrdsacvptmhsu[

Tentative de suicide chez l’enfant et l’adolescent : une expé

Pathologie psychiatrique sous-jacenteSelon la littérature, un trouble dépressif est retrouvé chez49 à 64 % des suicidants. La présence d’un tel trouble mul-tiplie d’un facteur de 11 à 27 le risque de TS par rapportà la population générale. Un antécédent de TS sembleraitaugmenter de 25 % le risque de récidive [11]. La récidiveconcerne un tiers des suicidants. Dans une étude menéeauprès d’un échantillon représentatif des jeunes entre 11 et19 ans, scolarisés dans le cycle secondaire, Choquet etLedoux [2] ont pu montrer que 23,3 % des répondants ontdes idées suicidaires et 6,5 % ont déjà fait une TS. Un quartde ces suicidants a récidivé.

Facteurs familiaux et environnementaux

Les facteurs de risques environnementaux étaient forte-ment corrélés aux TS dans notre échantillon. Il s’agissaitalors des conduites les plus bénignes, en particulier, cellesréactionnelles à un facteur de stress, sans réel désir demort. Les facteurs de risques étaient représentés essentiel-lement par les perturbations du fonctionnement familial.Ces constats sont conformes en termes de fréquence auxrésultats de la littérature [12]. Les facteurs de risquesétaient multiples dans notre série. D’autres facteurs derisques ont été relevés dans notre étude : maltraitances,abus sexuels et négligences. Ces mêmes facteurs ont étérapportés également dans la littérature [12,13]. Dix à 40 %des sujets présentaient une pathologie psychiatrique (unedépression) au moment du geste suicidaire, [12]. Les TSétaient violentes quand elles se produisaient dans le cadred’un trouble psychiatrique (essentiellement trouble psy-chotique, trouble bipolaire), elles étaient récidivantes etassociées à fort désir de mort en cas de trouble dépres-sif. Même si des idées suicidaires peuvent être retrouvéeschez l’adolescent normal n’ayant pas passé à l’acte (15 %des adolescents de l’enquête de Lazreg et al. [14] enpopulation générale), leur présence ne doit pas être bana-lisée, car elles restent surtout lorsqu’elles sont associées àd’autres manifestations, un facteur de risque sérieux. Cer-taines conduites à risque étaient relativement faiblementreprésentées en comparaison aux populations occidentales[15] où l’abus d’alcool et de substances est fortement liéau risque de passage à l’acte suicidaire chez l’adolescent.Les jeunes Marocains restent heureusement peu exposésà ce type de conduites, probablement du fait du rôleprotecteur de la famille élargie. Deux grands types deTS peuvent êtres distinguées selon Halayem et al. [12] :celles réactionnelles et celles entrant dans le cadre d’unepathologie psychiatrique avérée. Dans le groupe des TS réac-tionnelles, on retrouve peu de facteurs de risques, pasd’idées suicidaires, peu ou pas de désir de mort, pas detrouble psychiatrique, une grande fréquence de facteursdéclenchant et une grande impulsivité. Le passage à l’actesuicidaire apparaît alors disproportionné. Plusieurs significa-tions ont été attribuées au geste suicidaire en fonction dessituations cliniques : fuite, appel à l’aide, moyen maladroitde réamorcer le dialogue, recherche de bénéfices secon-

daires. L’autre groupe est caractérisé par la survenue de TSdans un contexte pathologique. Elles sont alors caractéri-sées par leur gravité, leur caractère prémédité, inattenduvoire bizarre.

dflr

ce Marocaine 9

Le suicide parental multiplie par un facteur 2 le risquee suicide chez l’adolescent [16]. De même la psychopa-hologie parentale influe le passage à l’acte suicidaire chez’enfant, c’est le cas pour les parents suivis pour dépres-ion ou autre maladie mentale. Les jeunes suicidants vivente plus souvent dans un environnement familial perturbé,el qu’un divorce ou le décès ou un alcoolisme de l’un desarents.

Une relation conflictuelle est souvent retrouvée chez cesnfants qui peuvent être soit maltraités physiquement, ouujets à un état de stress psychologique : un abus sexuel, unchec scolaire ou amoureux. Enfin un faible niveau socio-conomique pourrait représenter aussi un facteur de risquees TS [10]. Les événements déclenchant le plus souventnvoqués par les jeunes sont d’ordre affectif (difficultés etuptures sentimentales, la solitude affective et le manque’une relation sentimentale) ou familial (problèmes intrafa-iliaux).La TS est rarement le premier signe d’une souffrance

hez l’enfant d’où l’importance du dépistage des enfantsrésentant des facteurs de risque par les profession-els de l’enfance (médicoscolaire). Les formes cliniquesinsidieuses » doivent être activement recherchées par leoignant [11].

Bien que la pauvreté ait été décrite comme étant un fac-eur de vulnérabilité aux TS [12], aucune conclusion ne peuttre portée concernant notre population du fait d’un biaise recrutement de nos patients.

Les médicaments représentent le moyen le plus utiliséar les filles. Les garcons ont en revanche plus fréquemmentecours à la phlébotomie, ainsi qu’aux moyens violents.nviron 20 % des suicidants ont consommé de l’alcool ou desédicaments avant le passage à l’acte [5]. Le recours majo-

itaire à l’ingestion médicamenteuse a été retrouvé dans deombreux travaux et ce pour des populations de cultures dif-érentes : en Tunisie [12], en France [17] au Congo [18], auoyaume-Uni [19]. Cette modalité était, dans notre travail,lus spécifique aux filles, ce qui est également conforme auxonnées de la littérature [20].

Il paraît difficile d’élaborer un plan d’action en matièree prévention des suicides chez les enfants d’où l’intérêt duépistage des signes pouvant nous orienter vers un risqueuicidaire chez tel ou tel enfant. Ainsi le moyen le plusdéquat serait-il d’augmenter la prise de conscience du phé-omène suicidaire et faciliter l’identification des sujets àisque. Il faut former le personnel capable de sensibiliser ouu moins repérer les enfants à risque suicidaire. Plusieursignes doivent constituer une alerte chez l’enfant tel unbandon des activités extérieures, une baisse inexpliquée etontinuelle des résultats scolaires, une provocation ou acti-ité inhabituelles, changement brutal de comportement,rise excessive et continue de toxiques, une dévalorisa-ion ou mauvaise image de soi et surtout des consultationsultiples pour des plaintes somatiques inexpliquées. Une

ospitalisation systématique en pédiatrie de tous les enfantsuicidants ou à risque est préconisée afin de permettrene évaluation psychosociale de l’enfant et de sa famille18,19]. Un suivi psychiatrique sur une période minimale

’une année des enfants suicidants est recommandé. Ilaut insister sur la nécessité de l’accompagnement fami-ial. L’alliance familiale lorsqu’elle est possible, diminue leisque important d’une rupture thérapeutique prématurée.
Page 5: Tentative de suicide chez l’enfant et l’adolescent : une expérience Marocaine

1

Lg

C

Llpletdem

D

Lr

R

[

[

[

[

[

[

[

[

[

[

0

es formes sans troubles du comportement associés sonténéralement de meilleur pronostic [11,19].

onclusion

a TS est rarement le premier signe d’une souffrance chez’enfant. Le plus souvent, elle n’est pas rattachée à uneathologie psychiatrique. L’environnement sociofamilial de’enfant est remarquable par son caractère peu sécurisantt peu contenant. Les principaux risques à court et à moyenermes sont les récidives avec une augmentation du risquee morbidité et de mortalité. Au Maroc, l’évolution des TSst difficilement quantifiable. La prévention reste le seuloyen efficace pour éviter le passage à l’acte suicidaire.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

éférences

[1] American Psychiatric Association. Diagnostic and statisticalannals of mental disorder (DSM IV). Washington DC: Americanpsychiatric Association; 1994.

[2] Choquet M. Panorama du suicide. In: Braconnier A, Chiland C,Choquet M, editors. Idées de vie, idées de mort. Paris: Masson;2004.

[3] Skandrani S, Le Toumelin P, Taïeb O, Baubet T, Wargon M,Moro MR. Facteurs associés aux tentatives de suicide des ado-lescents d’origine maghrébine en France. Ann Med Psychol2008;166:473—80.

[4] Lewinsohn PM, Rohde P, Seeley JR, Bald CL. Gender differencesin suicide attempts from adolescence to young adulthood. J AmAcad Child Adolesc Psychiatry 2001;40:427—34.

[5] Okokoa AR, Ekouya Bowassaa G, Okoa APG, Mbika-CardorelleaA, Dzalamoub M, Moyena GM. Tentatives de suicide de l’enfant

et de l’adolescent à Brazzaville Suicide attempts by childrenand teenagers in Brazzaville. Arch Pediatr 2011;18:809—11.

[6] Walha A, Hachicha H, Ghribi F. Les facteurs de risque des ten-tatives de suicide en Tunisie. À propos de 50 cas d’enfants et

[

S. Salimi et al.

d’adolescents suicidant dans la ville de Sfax (Tunisie). Rev FrPsychiatr Psychol Med 2005;9:23—8.

[7] Delamare C, Martin Y, Blanchon C. Tentatives de suicide chezl’enfant de moins de 13 ans. Neuropsychiatr Enfance Adolesc2007;55:41—51.

[8] Grundbaum JA, Kann L, Kinchen SA, Williams B, Ross JG, LowryR, et al. Youth risk behaviour surveillance-United states. MMWRSurveill Summ 2002;51:1—62.

[9] Gould M, Greenberg T, Velting D, Shaffer D. Youth suicide riskof preventive interventions: a review of the past 10 years. JAm Acad Child Adolesc Psychiatry 2003;42:386—405.

10] Choquet M, Granboulan V. Les jeunes suicidants à l’hôpital.Paris: Éditions EDK; 2004.

11] Bobin E, Sarfati Y. Tentatives de suicide répetition : peut-on arrêter les « récidivistes » ? Nervure 2003;16(no special):14—8.

12] Halayem S, Bouden A, Othman S, Halayem MB. Profil du sui-cidant en population clinique : une expérience tunisienne.Neuropsychiatr Enfance Adolesc 2010;58:120—5 [Article origi-nal].

13] Ben Miled E, Nrugham L, Larsson BO, Sund AM. Analysedes conditions familiales de vie et du niveau de maturitépsychologique des écoliers tunisiens de 6 ans. Cah Psychol2008;109:35—45.

14] Lazreg F, Ben Abdelaziz A, Gaha R, Ghedira A, Boussaadia A,Ghannem H. Comportements et besoins de santé des adoles-cents scolarisés dans la ville de Sousse (Tunisie). Tunis Med2005;83:713—38.

15] Bridge JA, Goldstein TR, Brent DA. Adolescent suicide and sui-cidal behaviour. J Child Psychol Psychiatry 2006;47:372—94.

16] McGuffin P, Maruzic A, Farmer A. What can psychiatric geneticsoffer suicidology? Crisis 2001;22:61—5.

17] Ferguson DM, Woodward LJ, Horwood LJ. Risk factors andlife processes associated with the onset of suicidal beha-viour during adolescence and early adulthood. Psychol Med2000;30:23—39.

18] Nrugham L, Larsson BO, Sund AM. Predictors of suicidal actsacross adolescence: Influences of familial, peer and individualfactors. J Affect Disord 2008;109:35—45.

19] Laurent A, Bosson JL, Bost M, Boucharlat J. Tentatives de sui-cide d’enfants et d’adolescents : à propos de 102 observationsdans un service de pédopsychiatrie. Neuropsychiatr Enfance

Adolesc 1992;41:198—205.

20] Harrington R. Depression and suicidal behaviour in children. In:Harrington R, editor. Psychiatry. Oxford: The Medicine Publi-shing Company; 2005. p. 85—8.