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Thérapies ciblées et carcinomes basocellulaires Targeted therapies and basal cell carcinoma N. Basset-Seguin Hôpital Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, F-75010 Paris, France Reçu le 25 octobre 2012 ; accepté le 22 janvier 2013 Abstract: Basal cell carcinomas (BCCs) are the most frequent can- cers in fair-skin adult patients. While most of them are accessible to medical or surgical treatment, some rare locally destructive forms (so called locally advanced BCC or some exceptional metastatic forms) cannot be treated by surgery or radiotherapy. Conventional chemo- therapy (cisplatin, doxorubicine) is often difficult to perform as it is mostly palliative and not well tole- rated in elderly patients. In 1996, the molecular pathway involved in BCC formation was identified: the patch/sonic/hedgehog pathway. Since then, major efforts have been performed to develop a targeted therapy to control the abnormal activation of the pathway. In 2009, results of the first phase I study were published using an anti-smo: the GDC-449 or vismodegib sho- wing tolerability and anti-tumoral efficacy of this product. Response rates around 50% for both locally advanced and metastatic BCC have been obtained which were never achieved before. Since then several phase II studies have confirmed the efficacy of anti-smo molecules and extended their trial in the high risk for BCC Gorlin syndrome for multi- ple operable BCC. Long-term tolera- bility for these molecules is still not optimal and must be improved. Tar- geted anti-smo molecule dramati- cally changes the strategy of care of patients with locally advanced or metastatic BCC. In early 2012, vis- modegib was approved by the FDA for the treatment of locally advan- ced or metastatic BCC. Keywords: Targeted therapy Advanced basal cell carcinoma Metastatic basal cell carcinoma Treatment Résumé : Les carcinomes basocel- lulaires (CBC) sont les cancers les plus fréquents chez ladulte à peau claire. La plupart des CBC sont ac- cessibles à un traitement médical ou chirurgical : traitement de réfé- rence. Les formes rares de CBC localement destructrices appelées CBC localement avancés (CBCla) ou les formes exceptionnelles de CBC métastatiques (CBCm) ne peu- vent pas être traitées par chirurgie ou radiothérapie. Lutilisation dune chimiothérapie conventionnelle (cisplatine, doxorubicine) na pas fait lobjet détudes validantes. Elle est volontiers mal tolérée par cette population de patients âgés, et na quun effet palliatif. Depuis 1996, la voie moléculaire impliquée dans la formation des CBC a été identifiée : il sagit de la voie patch/sonic/hed- gehog. Cette découverte a conduit en 2009 à la publication de la pre- mière étude de phase I utilisant un anti-smo, le GDC449 ou vismode- gib. Cette étude a montré la toléra- bilité et lefficacité de ce produit. Des réponses thérapeutiques sont obtenues pour la première fois dans environ un cas sur deux pour les CBCla et les CBCm. Plusieurs études de phase II sont venues confirmer lefficacité du vismode- gib dans ces indications et pour des CBC opérables dans le cadre du syndrome de Gorlin caractérisé par la survenue précoce de très nombreux CBC. La tolérance du vismogenib à long terme nest pas encore optimale et doit être amélio- rée. Les thérapies ciblées anti-smo révolutionnent la prise en charge des CBCla ou CBCm. Depuis début 2012, la FDA a approuvé lutilisation du vismodegib pour la prise en charge des CBCla et des CBCm. Mots clés : Thérapie ciblée Carcinomes basocellulaires avan- cés Carcinomes basocellulaires métastatiques Traitement Généralités sur les carcinomes basocellulaires Les carcinomes basocellulaires (CBC) sont les cancers cutanés les plus fréquents. Ils représentent 80 % des carcinomes cutanés [11]. Leur incidence varie selon le sexe, la situation géographique et lenso- leillement allant de 75,4 pour lhomme (H) et 60,5 pour la femme (F)/100 000 habitants en France, 128 H et 105 F/100 000 habitants en Grande-Bretagne, 407 H et 212 F aux États-Unis et jusquà 2 % de la population dans certaines régions dAustralie [7,10,11]. Les CBC ont une croissance tumorale lente. Ils métastasent exceptionnellement. Les CBC représentent un groupe hétérogène de tumeurs allant du CBC superficiel au CBC nodulaire, et enfin CBC sclérodermiforme [4]. La plupart de ces formes sont accessibles à une chirurgie avec des marges dexérèse plus ou moins importantes. Des critères cliniques (localisation, taille, réci- dive) et histologiques (CBC infil- trant, sclérodermiforme, avec inva- sion périneurale) permettent une classification pronostique du CBC Correspondance : [email protected] Mise au point Update Oncologie (2013) 15: 101105 © Springer-Verlag France 2013 DOI 10.1007/s10269-013-2259-9 101

Thérapies ciblées et carcinomes basocellulaires

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Page 1: Thérapies ciblées et carcinomes basocellulaires

Thérapies ciblées et carcinomes basocellulaires

Targeted therapies and basal cell carcinomaN. Basset-Seguin

Hôpital Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, F-75010 Paris, France

Reçu le 25 octobre 2012 ; accepté le 22 janvier 2013

Abstract: Basal cell carcinomas

(BCCs) are the most frequent can-

cers in fair-skin adult patients.

While most of them are accessible

to medical or surgical treatment,

some rare locally destructive forms

(so called locally advanced BCC or

someexceptionalmetastatic forms)

cannot be treated by surgery or

radiotherapy. Conventional chemo-

therapy (cisplatin, doxorubicine) is

often difficult to perform as it is

mostly palliative and not well tole-

rated in elderly patients. In 1996,

the molecular pathway involved

in BCC formation was identified:

the patch/sonic/hedgehogpathway.

Since then, major efforts have been

performed to develop a targeted

therapy to control the abnormal

activation of the pathway. In 2009,

results of the first phase I study

were published using an anti-smo:

the GDC-449 or vismodegib sho-

wing tolerability and anti-tumoral

efficacy of this product. Response

rates around 50% for both locally

advanced and metastatic BCC have

been obtained which were never

achieved before. Since then several

phase II studies have confirmed the

efficacy of anti-smo molecules and

extended their trial in the high risk

for BCC Gorlin syndrome for multi-

ple operableBCC. Long-term tolera-

bility for these molecules is still not

optimal andmust be improved. Tar-

geted anti-smo molecule dramati-

cally changes the strategy of care

of patients with locally advanced

ormetastatic BCC. In early 2012, vis-

modegib was approved by the FDA

for the treatment of locally advan-

ced or metastatic BCC.

Keywords: Targeted therapy –

Advanced basal cell carcinoma –

Metastatic basal cell carcinoma –

Treatment

Résumé : Les carcinomes basocel-

lulaires (CBC) sont les cancers les

plus fréquents chez l’adulte à peau

claire. La plupart des CBC sont ac-

cessibles à un traitement médical

ou chirurgical : traitement de réfé-

rence. Les formes rares de CBC

localement destructrices appelées

CBC localement avancés (CBCla)

ou les formes exceptionnelles de

CBC métastatiques (CBCm) ne peu-

vent pas être traitées par chirurgie

ou radiothérapie. L’utilisation d’une

chimiothérapie conventionnelle

(cisplatine, doxorubicine) n’a pas

fait l’objet d’études validantes. Elle

est volontiers mal tolérée par cette

population de patients âgés, et n’a

qu’un effet palliatif. Depuis 1996, la

voie moléculaire impliquée dans la

formation des CBC a été identifiée :

il s’agit de la voie patch/sonic/hed-

gehog. Cette découverte a conduit

en 2009 à la publication de la pre-

mière étude de phase I utilisant un

anti-smo, le GDC449 ou vismode-

gib. Cette étude a montré la toléra-

bilité et l’efficacité de ce produit.

Des réponses thérapeutiques sont

obtenues pour la première fois dans

environ un cas sur deux pour les

CBCla et les CBCm. Plusieurs

études de phase II sont venues

confirmer l’efficacité du vismode-

gib dans ces indications et pour

des CBC opérables dans le cadre

du syndrome de Gorlin caractérisé

par la survenue précoce de très

nombreux CBC. La tolérance du

vismogenib à long terme n’est pas

encore optimale et doit être amélio-

rée. Les thérapies ciblées anti-smo

révolutionnent la prise en charge

des CBCla ou CBCm. Depuis début

2012, la FDA a approuvé l’utilisation

du vismodegib pour la prise en

charge des CBCla et des CBCm.

Mots clés : Thérapie ciblée –

Carcinomes basocellulaires avan-

cés – Carcinomes basocellulaires

métastatiques – Traitement

Généralités sur les carcinomesbasocellulaires

Les carcinomes basocellulaires

(CBC) sont les cancers cutanés les

plus fréquents. Ils représentent

80 % des carcinomes cutanés [11].

Leur incidence varie selon le sexe,

la situation géographique et l’enso-

leillement allant de 75,4 pour

l’homme (H) et 60,5 pour la femme

(F)/100 000 habitants en France, 128

H et 105 F/100 000 habitants en

Grande-Bretagne, 407 H et 212 F

aux États-Unis et jusqu’à 2 % de la

population dans certaines régions

d’Australie [7,10,11].

Les CBC ont une croissance

tumorale lente. Ils métastasent

exceptionnellement.

Les CBC représentent ungroupe

hétérogène de tumeurs allant du

CBC superficiel au CBC nodulaire,

et enfin CBC sclérodermiforme [4].

La plupart de ces formes sont

accessibles à une chirurgie avec

des marges d’exérèse plus ou

moins importantes. Des critères

cliniques (localisation, taille, réci-

dive) et histologiques (CBC infil-

trant, sclérodermiforme, avec inva-

sion périneurale) permettent une

classification pronostique du CBCCorrespondance : [email protected]

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■Oncologie (2013) 15: 101–105© Springer-Verlag France 2013DOI 10.1007/s10269-013-2259-9

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en fonction du risque de récidive et

une adaptation des marges d’exé-

rèse.Différents guidelinesont défini

les modalités de la prise en charge

du CBC [4,15,19].

Carcinomes basocellulaireslocalement avancéset métastatiques

Les carcinomes basocellulaires

localement avancés (CBCla) corres-

pondent à des formes cliniques

rapidement évolutives et destructri-

ces comme certains CBC térébrants

volontiers localisés dans les zones

périorificielles de la face, ou à

des formes d’évolution lente et pro-

gressive pendant des années, négli-

gées par le malade, et aboutissant

à des lésions très étendues et

destructrices. Le bilan morpholo-

gique de ces CBCla fait appel à

l’IRM ou à la TDM afin de préciser

au mieux l’extension aux plans

sous-cutanés profonds (cartilage,

os, structures nobles). Le traitement

chirurgical du CBCla peut être tech-

niquement impossible ou conduire

à des séquelles esthétiques et fonc-

tionnelles inacceptables (amputa-

tion du nez, exentération par exem-

ple). Leur prise en charge relève

d’une réunion de concertation pluri-

disciplinaire.

Les carcinomes basocellulaires

métastatiques (CBCm) sont excep-

tionnels (0,0028 à 0,55 %). L’exten-

sion se fait par voie lymphatique ou

hématogène. Les principaux sites

métastatiques extraganglionnaires

sont le poumon et l’os. La durée

de survie des CBC avec métastases

est de huit mois en moyenne. Le

traitement des CBCm fait appel

classiquement à une chimiothé-

rapie à base de cysplatine et de

doxorubicine, dont l’efficacité est

partielle, limitée dans le temps, et

qui est source d’effets secondaires

notables chez des malades souvent

âgés.

Voie patch/sonic/hedgehoget carcinome basocellulaire

La voie patch/sonic/hedgehog

contrôle la prolifération et la diffé-

renciation cellulaire au cours de

l’embryogenèse [8]. Une activation

anormale de cette voie de signalisa-

tion est associée audéveloppement

de certains cancers comme le CBC,

qu’il soit sporadique (mutations

acquises sur la voie) ou que sur-

vienne dans le cadre d’un syn-

drome de Gorlin une génoderma-

tose associant une augmentation

du risque de survenue de certains

cancers comme les médulloblasto-

mes et les CBC et des anomalies

du développement comme des

pits palmoplantaires et des kystes

odontogéniques (unemutation ger-

minale dans toutes les cellules et

une mutation acquise additionnelle

dans les tumeurs). Elle est compo-

sée de deux récepteurs trans-

membranaires, PTCH et smo. En

l’absence de son ligand hedgehog

(HH), PTCH inhibe l’activation de

smo (Fig. 1A). Lorsque le ligand

(HH) se lie à PTCH, il y a alors

levée de l’inhibition de smo par

PTCH et activation de la voie molé-

culaire d’aval entraînant l’activa-

tion, via diverses protéines inter-

actives, des membres de la famille

PTCH SMO

Membres de la famille GLI

Fig. 1A.En l’absence de ligand, HH Patch inhibe smoPTCH : protéine patched ; HH : ligand hedgehog ; smo : protéine smothened.

PTCH SMO

Activation de GLI, Gli2, Gl3

HH

Activation de la prolifération cellulaire

Fig. 1B.En présence du ligand, HH Patch est inhibé

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Page 3: Thérapies ciblées et carcinomes basocellulaires

Gli (Gli1, Gli2, Gli3), qui sont des

activateurs transcriptionnels, indui-

sant la transcription dedivers gènes

impliqués dans le contrôle de la

prolifération et de la différenciation

cellulaires [8] (Fig. 1B).

Molécules anti-smodisponibles

Il existe actuellement deux molécu-

les anti-smo à l’essai dans le traite-

ment des CBCla et des CBCm : le

GDC449 ou vismodegib (laboratoi-

res Roche) et le LDE225 (laboratoi-

res Novartis). Le vismogegib pour

lequel on dispose d’études clini-

ques plus avancées a été retenu

par la FDA en janvier 2012 pour

l’indication du traitement des

CBCla et des CBCm.

Résultats des essais cliniquesavec les anti-smo

Phase I

Les résultats d’une phase I ayant

pour objectifs la tolérance, l’étude

pharmacocinétique et l’efficacité

du vismodegib dans les CBCla et

les CBCm ont été publiés en 2009

[20]. Dans ce travail, 33 patients

avec un CBCla ou un CBCm ont

pris du vismodegib à une des trois

doses étudiées (150 mg [(n = 17],

250 mg [n = 15], 450 mg [n = 1]).

Dix-huit sur 33 (54 %) patients ont

eu une réponse objective clinique

(n = 10), sur l’imagerie (n = 7) ou

sur les deux (n = 1). Parmi les autres

patients, 11 sont restés stables

(33 %) et quatre ont progressé

(12 %).

Parmi les patients ayant un

CBCla (n = 15) et qui ont été suivis

entre 2,1 et 19 mois au moment de

la publication, deux (13 %) étaient

en rémission complète, sept (46 %)

étaient en rémission partielle et

quatre (26 %) étaient stables. Enfin,

deux (13 %) patients CBCla étaient

en progression. Le taux de réponse

pour les CBCla était de 60 %

(IC 95 % : [33–83]).

Parmi les patients CBCm, le taux

de réponse observée était de 50 %

(IC 95 % : [29–71]).

Il n’y a pas eu pendant l’étude

d’effet indésirable dose-limitant ou

de grade 5. Parmi les effets indési-

rables observés, on notait : une

hyponatrémie asymptomatique de

grade 3 ou 4, une fatigue, une

perte de poids, une dyspnée, des

crampes musculaires, une fibrilla-

tion auriculaire parmi les autres

effets indésirables de grade 3 les

plus fréquents. Un seul patient est

sorti de cette étude à cause des

effets secondaires.

Cette étude de phase I a montré

l’efficacité antitumorale et la toléra-

bilité du vismodegib dans le traite-

ment des CBCla et CBCm.

Ces résultats sont remarquables

étant donné l’absence de traitement

efficace connu jusqu’à ce jour pour

ce type de CBC.

Phase II

Un essai de phase II international

multicentrique a été publié en 2012

[13]. L’objectif primaire de cette

étude était le taux de réponse objec-

tive indépendante du vismodegib

dans les CBCla et CBCm (évaluée

par un panel d’experts indépen-

dants de l’essai à partir des don-

nées photographiques et d’image-

rie). Dans cette étude, 33 patients

avaient un CBCm, et leur taux de

réponse indépendante était de

30% (IC 95% : [16–48]). Les patients

avec un CBCla (n = 63) avaient un

taux de réponse de 43 % (IC 95 % :

[31–56]) dont 13 réponses complè-

tes (21 %). Ces chiffres sont légère-

ment plus bas à la fois pour les

CBCm et les CNCLa que lors de

l’étude de phase I, mais cela est

en partie lié à la stringence de l’ana-

lyse indépendante qui n’a raisonné

que sur des documents iconogra-

phiques.

Les effets indésirables étaient

observés chez 30 % des patients.

Les plus fréquents étaient crampes,

alopécie, dysgueusie, perte de

poids et fatigue et correspondent

aux effets secondaires reportés

dans les études de phases I et II

avec le vismodegib ouavec d’autres

inhibiteurs de hedgehog (LDE225)

[1]. Au moment de la publication,

environ la moitié des patients

avaient arrêté le traitement du fait

d’effets indésirables, et le temps

moyen de prise du médicament

était dedixmoisdans les deuxgrou-

pes de patients (CBCla et CBCm).

L’arrêt du médicament était lié le

plus souvent à la progression de la

maladie pour les patients CBCm et

par décision du patient dans le

groupe des CBCla. Des effets indési-

rables sérieux étaient notés chez

25 % des patients. Chez sept

patients, un effet indésirable de

grade 5 (décès) était rapporté.

Dans trois cas, la cause de la mort

est restée inconnue. Dans les quatre

autres cas, le décès était dû à un

choc hypovolémique, une atteinte

méningée, un infarctus du myo-

carde, un accident vasculaire. Ces

effets indésirables graves sont

survenus chez des patients à risque.

La responsabilité du vismodegib

dans ces effets secondaires graves

n’est pas connue.

Ce travail a donc confirmé l’effi-

cacité antitumorale du vismodegib

dans la prise en charge des patients

atteints de CBCm ou de CBCla. Les

effets secondaires fréquents et par-

fois graves survenus sous vismode-

gib ont justifié la mise en place

d’une nouvelle étude STEVIE dont

l’objectif principal est d’apprécier

la tolérance du traitement et l’objec-

tif secondaire, l’efficacité. Cette

étude qui prévoit d’inclure 700

patients dans lemonde est toujours

en cours.

Phase II : syndrome de Gorlin

Le syndrome de Gorlin est une

génodermatose caractérisée par la

survenue précoce de très nom-

breux CBC. La place du vismogedib

dans la prise en charge des CBC

au cours de ce syndrome a été

évaluée dans une étude randomi-

sée en double insu contre placebo

[16]. L’objectif principal de ce travail

était la diminution de l’incidence de

nouveaux CBC opérables. L’objectif

secondaire était la diminution de

la taille des CBC existants.

Quarante et un patients ont été

inclus. Après une durée moyenne

de suivi de huit mois, le nombre

de nouveaux CBC opérables était

significativement différent dans les

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Page 4: Thérapies ciblées et carcinomes basocellulaires

deux groupes : deux pour le vismo-

degib contre 29 pour le placebo

(p < 0,001), et la taille des CBC exis-

tants avait diminué de 65 % pour

le vismodegib contre 11 % pour le

placebo (p < 0,003). Chez certains

patients, tous les CBC avaient clini-

quement régressé, les effets indési-

rables observés similaires à ceux

précédemment cités. Ils étaient res-

ponsables d’un arrêt du traitement

chez 54%des patients. Après l’arrêt

du vismodegib, la dysgueusie et les

crampes disparaissaient en un

mois, et les cheveux et les poils

repoussaient dans un délai de trois

mois. Le vismodegib était aussi effi-

cace sur les pits palmoplantaires et

les kystes ondontogéniques, signes

majeurs du syndrome de Gorlin [5].

Après l’arrêt du traitement et du

blocage de la voie SHH, la plupart

des tumeurs repoussaient confir-

mant le rôle central de cette voie

de signalisation dans le développe-

ment des CBC et l’effet suspensif

du traitement.

Essais de formulationstopiques

Deux études publiées sur les formes

topiques d’inhibiteurs de hedgehog

montrent des résultats discordants.

La première étude a utilisé dans

un modèle murin le CUR61414 et

a montré une inhibition de la voie

Hh avec un blocage de la pousse

des poils anagènes et une régres-

sion des CBC existants. Un essai

clinique mené chez l’homme en

parallèle n’a pas permis d’obtenir

un effet antitumoral [18]. La seconde

étude utilisant une formule topique

du LDE225 (crème à 0,75 %) mon-

trait un effet antitumoral à la fois

dans un modèle murin et sur des

CBC humains [14]. Cette forme

topique n’a pas pu pour le moment

être développée.

Inhibiteurs de SHhet résistance thérapeutique

L’enthousiasme engendré par les

anti-Braf dans le mélanome a été

rapidement tempéré par la fré-

quence des résistances acquises

après quelques mois de traitement

par réactivation paradoxale de la

voieMAPK [2]. Ce typede résistance

acquise, qui n’est pas rapporté à ce

jour chez les patients atteints de

CBCla ou de CBCm sous vismode-

gib, est en revanche observé au

cours du traitement du médullo-

blastome, une autre tumeur pour

laquelle la voie Hh est impliquée

[9,12]. Il est possible que des résis-

tances secondaires puissent éga-

lement se développer dans les

CBC.

Autres molécules intervenantsur la voie patch/sonic/hedgehog

D’autres molécules intervenant sur

la voie hedgehog sont en cours de

développement [6]. La vitamine D3

qui a montré un puissant effet inhi-

biteur de la voie hedgehog pourrait

faire l’objet d’études par voie

topique quant à un potentiel rôle

antitumoral [3,17].

Conclusion

La voie d’activation SPHH joue un

rôle essentiel dans le développe-

ment de tumeurs solides et particu-

lièrement dans les CBC. La mise au

point de petites molécules inhibitri-

ces utilisables par voie orale a per-

mis d’obtenir des réponses théra-

peutiques significatives sur des

formes de CBCla ou de CBCm. Le

vismodegib inhibiteur de smo est

la première molécule qui autorise

un espoir de traitementmédical effi-

cace dans ce typedeCBCmais aussi

dans des formes de CBC multiples

comme le syndrome de Gorlin. Les

effets secondaires fréquents et le

caractère suspensif du traitement

sont les principaux facteurs limi-

tants du produit. Une meilleure

connaissance des mécanismes

de résistances initiales et peut-

être une adaptation des modali-

tés d’administration (dose et fré-

quence) pourraient optimiser le

bénéfice thérapeutique, en atten-

dant la mise au point future de

nouvelles molécules.

Conflit d’intérêt : l’auteur dé-

clare les conflits d’intérêt suivant -

Investigateur pour Leo, Meda,

Novartis, Roche ; Consulsting pour

Roche, Leo, Meda.

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