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POUR UNE GESTI ON I NTGRE DES RESSOURCES EN EAU SUR UN TERRI TOI RE DE MONTAGNE. LE CAS DU BASSI N VERSANT DU GI FFRE (HAUTE-SAVOI E)Sout enue l e 26 mar s 2010 parBr engr e CHARNAYRappor t eurRappor t eurExami nat eurDi r ect eurde t hseCo-di r ect eurInvi t Thse de Doct or atde Gogr aphi epr sent e l Uni ver si t de Savoi e (E. D.SISEO)Composi t i on du j ur y :Emmanuel l e Mar cel poi l ,Char ge de r echer che,CEMAGREF de Gr enobl eEmmanuelReynar d,Pr of esseur,Uni ver si t de LausanneNat hal i e Car caud,Pr of esseur,Agr ocampus Ouest ,Cent r e d Anger s Jean-Jacques Del annoy,Pr of esseur,Uni ver si t de Savoi eAl ai n Mar nezy,Pr of esseur,Uni ver si t de Savoi ePi er r e Fr anci l l ar d,Responsabl e du ser vi ce envi r onnement ,SED Haut e-Savoi etel-00472979, version 1 - 13 Apr 201021 23 41:DescentederaftingsurleGiffre, entreSixt-Fer--ChevaletSamons. Clich : B. Charnay, 20082:Pcheursdanslaplainealluviale duGiffre,loccasiondelajournede dcouverte de la pche en valle du Haut-Giffre. Clich : B. Charnay, 20083 : Cascade du Rouget, sur la commune de Sixt-Fer--Cheval. Clich : B. Charnay, 20064 :Micro-centrale hydrolectrique du Giffrenant, situe sur le Giffre Sixt-Fer--Cheval. Clich : B. Charnay, 2007tel-00472979, version 1 - 13 Apr 20103POUR UNE GESTION INTGRE DES RESSOURCES EN EAU SUR UN TERRITOIRE DE MONTAGNE. LE CAS DU BASSIN VERSANT DU GIFFRE (HAUTE-SAVOIE)Soutenue le 26 mars 2010 parBrengre CHARNAYThse de Doctorat de Gographieprsente lUniversit de Savoie (E.D. SISEO)RapporteurRapporteurExaminateurDirecteur de thseCo-directeur InvitComposition du jury :Emmanuelle Marcelpoil, Chercheur, CEMAGREF de GrenobleEmmanuel Reynard, Professeur, Universit de LausanneNathalie Carcaud, Professeur, Agrocampus Ouest, Centre dAngersJean-Jacques Delannoy, Professeur, Universit de ChambryAlain Marnezy, Professeur, Universit de ChambryPierre Francillard, Responsable du service environnement, SED Haute-Savoietel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010tel-00472979, version 1 - 13 Apr 20105A ma famille et mes amis Ne jette pas la provision deau de la jarre parce que la pluie sannonce (Proverbe africain) Leau, si on sait lentendre, si on apprend lalangue,ouvriratoutelaconnaissancedes tres et des choses(Yves Thirault, extrait de le Ru dIkou )tel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010tel-00472979, version 1 - 13 Apr 20107AVANT-PROPOSCetravailsinscritdansleprogrammeEauenMontagneportparlaSocitdEconomie AlpestredeHaute-Savoie(SEA74)etlaSocitdEquipementduDpartementdeHaute-Savoie (SED Haute-Savoie). IlatralisaveclesoutiennancierdelAssociationNationaledelaRechercheetdela Technologie (bourse CIFRE), et de lAssemble des Pays de Savoie. Avertissement : Cette thse traduit ltat de la question au dbut de lanne 2009. Certains faits ont pu voluer depuis.tel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010tel-00472979, version 1 - 13 Apr 20109REMERCIEMENTSEpreuve solitaire, la thse nen demeure pas moins un cheminement collectif. Que ce soit sur un plan scientique ou personnel, vous mavez, dune faon ou dune autre, soutenue et aide dans ce travail de quatre annes.Toutdabord,letravailralisestlefruitdunecollaborationentrelentrepriseSEDHaute-Savoie et le laboratoire EDYTEM. Cest la raison pour laquelle, je souhaite en premier remercier les diffrentes personnes de ces deux organismes qui ont contribu la concrtisation de ce travail.En premier lieu, de chaleureux remerciements lquipe des 3 Pierre , Pierre Lachenal, Pierre Francillard et Pier Carlo Zingari, qui sont lorigine du programme Eau en Montagne dans lequel sinscrit ce travail de recherche. Sans leur gnrosit, leur dvouement et leur got pour laventure, ce projet naurait jamais vu le jour. Merci vous trois de mavoir introduite dans ce programme, de mavoir donn lopportunit de raliser cette thse et davoir cru en mes capacits mener bien ce travail. Je remercie particulirement Pierre Francillard, responsable du service environnement de la SED Haute-Savoie qui a supervis mes travaux, la fois de recherche et danimation du programme Eau en Montagne durant trois annes.Un grand merci galement plusieurs personnes de la SED Haute-Savoie : 1/Mescollguesduserviceenvironnementpourleursoutienpermanent,lesapports constructifs,etleuramitignreuse.Sansvotrecoopration,lathseseraitloindtrecequelle est. Vous mavez ouvert au monde professionnel de leau en me transmettant vos savoirs-faires, vos connaissances ainsi que des donnes appliques mon terrain dtudes.2/Leservicetudesterritoriales,quejaisouventsollicitpourdesdonneschiffressur lconomie du dpartement et du bassin versant du Giffre. 3/ Mes plus sincres remerciements M. Fernand Peilloud, Prsident Directeur Gnral, et M. PhilippeGouyouBeauchamps,DirecteurSEDHaute-Savoiequiontsoutenuceprojetdethseet particip au comit de pilotage. Ductdulaboratoirederecherche,mesremerciementsvonttoutdabordJean-Jacques Delannoy et Alain Marnezy qui ont dirig et encadr mes travaux. Merci vous deux pour vos prcieuses corrections et critiques, votre conance que vous avez accorde une conomiste qui dbarquait chez les gographes sans vritable connaissance du sujet en 2005, ainsi que pour votre souplesse et ouverture desprit qui ont su me laisser une large marge de libert. Merci toi, Jean-Jacques en tant que directeur du laboratoire EDYTEM, de mavoir accueillie au sein du laboratoire et accept cette proposition de thse. Je te suis galement reconnaissante pour tes relectures si denses et rigoureuses qui te caractrisent et pour la systmique que tu mas enseigne et qui est devenue le l conducteur de mes travaux de recherches.tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201010ToutemasympathievaauxmembresdulaboratoireEDYTEMquisemontraienttoujours disponibles pour maider, me conseiller et maiguiller dans mes recherches. Un salut lquipe des doctorants pour lambiance de travail et lentraide. Je tiens ici remercier plus particulirement Pierre Paccard qui ma enseign le SIG sans compter son temps, Stphanie Gallino pour la mise en page de la thse sous Indesign, Mlanie Duval, Estelle Ployon et Andr Paillet pour leurs prcieux conseils sur Illustrator et Indesign, et sans oublier Vincent Blanc, notre joyeux et serviable informaticien qui ma secourue plus dune fois des caprices informatiques. MesplussincresremerciementsvontgalementEmmanuelleMarcelpoiletEmmanuel Reynard qui mont fait lhonneur dtre rapporteurs de ma thse, ainsi qu Nathalie Carcaud et Pierre Francillard pour avoir accept de faire partie du jury.Cettethsenauraitpaspusefairesanslaparticipationdetouteslespersonnesinterroges, travaillant dans le milieu de leau, tous les chelons, et plus ou moins en lien avec le bassin versant du Giffre. Leur disponibilit et leur coopration mont permis de mener bien ce travail. Un grand merci vous tous, qui tes trop nombreux pour vous citer. Je pense tout spcialement ici la sympathique quipe du SIVM du Haut Giffre et je la remercie chaleureusement pour son accueil dans ses locaux, pour nos changes constructifs autour du contrat de rivire du Giffre et pour toutes les donnes qui mont t transmises. Ce travail doit beaucoup plusieurs amis qui mont aide, aussi bien sur le plan professionnel que plus personnel, en partageant dagrables sorties en montagne. Je pense une personne en particulier qui ma soutenue pendant toute la dure de la thse, fait dcouvrir le bassin versant du Giffre sous toutes ses coutures, ses acteurs, sa fort alluviale, ses sommets les plus escarps, ses bonnes adresses culinairesettoutenrestantincollablemesquestions,pourtantnombreuses,surlagestionde leau. Je ne sais comment te remercier, Dom, pour tout.Cesremerciementsneseraientpascompletssansunepensemafamille.Mercivous,mes parents, mon frre, mon grand pre et mes grandes tantes, pour votre soutien moral et matriel qui ma permis de travailler dans dexcellentes conditions, mais aussi pour votre comprhension quand je devais quitter les repas de famille du dimanche pour matteler mon travail de recherche. Enn Sylvain, laisse moi te remercier pour ta patience et tes encouragements durant la difcile priode de rdaction de la thse, et pour tout simplement ta prsence mes cts tous les jours. tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201011RESUMELa gestion des ressources en eau est un domaine complexe matriser pour plusieurs raisons : multiplication et concentration des usages en situation dinterdpendance, diversit de lorganisation socio-conomique des usagers, responsabilits clates entre acteurs publics et privs, superposition detextesrglementairessectorielsetparfoiscontradictoiresentreeux,oppositiondessystmesde reprsentations Cette complexit nous interroge sur la pertinence et la faisabilit dune gestion intgre et durable des ressources en eau sur un territoire de montagne un niveau local. Est-ellelasolutionauxproblmesdegestionsuruntelterritoire,autrementditpeut-elleapporterdes solutions durables pour concilier les usages conomiques et la prservation des ressources en eau ? Sicetteproblmatiqueconcerneenpremierlieulesterritoiresdemontagne,elleconcerne galementlesterritoiressitussurlespimontscomptetenudeslogiqueshydrologiquesamont-aval. Pour y rpondre, nous nous attachons dans la premire partie dnir les concepts et analyser lesystmedegestiondesressourceseneaudanssaglobalit.Lamthodesystmiquesemblela mieux adapte pour comprendre la nature de ces relations et identier les facteurs dterminants dune politique intgre et durable de leau. Les trois parties suivantes sont consacres ltude de chaque paramtre du systme, appliqu au bassin versant du Giffre (Haute-Savoie) : (i) caractrisation des ressources en eau et des milieux aquatiques propres un territoire de montagne ; (ii) diagnostic des usages de leau et de leurs impacts (quantitatifs et qualitatifs) sur le milieu et les autres usages ; et (iii) prsentation des diffrents acteurs intervenant dans le systme de gestion. Une enqute de terrain a permis dvaluer leur contribution la mise en place dune gestion intgre, mettant laccent sur laconcertationetleschanges(partieIV).Lacinquimepartie(V)questionnelesinteractionsdu systmeenproposantdesindicateursvisantvaluerladurabilitdusystmedegestion.Enn, ladernirepartie(VI)synthtiselesforagesdusystmeenintgrant,moyenterme,lesprojets damnagement des acteurs et les volutions prvisibles sur la croissance dmographique, et plus long terme, le changement climatique. La prise en compte de lvolution de lensemble des paramtres dusystmedegestiondeleauetdesonenvironnementestncessairepourasseoirunegestion durable. Cette dernire partie conclut sur des prconisations pour une gestion intgre de leau. Sont proposs deux modles : un modle thorique et un modle appliqu prenant en compte le contexte politique local.Mots cls : ressources en eau, gestion intgre, territoire de montagne, bassin versant du Giffre (Haute-Savoie), usages de leau, jeux dacteurs, dveloppement durable.tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201012ABSTRACTWaterresourcesmanagementisacomplexissueforseveralreasons:multiplicationand concentrationofusesinasituationofinterdependence,diversityofsocio-economicusers, responsibilitiessplitbetweenpublicandprivate,sectoralandsometimesmutuallycontradictory regulations overlap, opposition of representation systems This complexity relates to the relevance and feasibility of integrated and sustainable water resourcesmanagementinmountainwatershedsatalocallevel.Isthisthesolutiontothe management problems in such areas, i.e. can it provide sustainable solutions to reconcile economic use and water resources conservation?This issue concerns both mountain and downstream areas because of catchment processes. The thesis includes six parts. The rst part presents the concepts and a holistic analysis of water resources management systems. The systems approach is especially relevant to understanding links and identifying the factors of equitable and sustainable policies. The following three parts examine each component of the water management system applied to the Giffre watershed (Department of Haute-Savoie): (i) characterization of water resources and aquatic environments specic to mountain areas; (ii) inventory of water uses and their impacts (both quantitative and qualitative) on the environment and other uses; and (iii) identication of the different actors involved in the water management system. A eld survey was used to assess their contribution to the implementation ofintegrated management, focusing on dialogue and exchanges (Part IV). Part V examines the system interactions by providing indicatorsfortheassessmentofsustainablewatermanagement.Finally,thelastsection(partVI) summarizessystemforcing,whichintegratesmedium-termlanddevelopmentprojects,population growthforecasts,andlongertermclimatechange. Takingintoaccounttheevolutionofallsystem components and its environment is necessary to establish sustainable water management. This part concludeswithrecommendationsforintegratedwatermanagement.Twomodelsareproposed:a theoretical model and an applied model taking into account the local political context.Keywords : water resources, integrated management, mountain areas, Giffre watershed (Haute-Savoie), water uses, actors, sustainable development. tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201013SOMMAIRESOMMAIRE ................................................................................................................................................... 13INTRODUCTION GNRALE .................................................................................................................. 17PARTIE I : CADRE THEORIQUE DE LA GESTION INTEGREE DES RESSOURCES EN EAU SUR UN TERRITOIRE DE MONTAGNE .......................................................................................................... 31CHAPITRE 1 : LAPPROCHE SYSTMIQUE ET LES CONCEPTS .................................................................... 33CHAPITRE 2 : LTAT DE LA RECHERCHE SUR LA GESTION INTGRE DES RESSOURCES EN EAU ................. 41CHAPITRE3:LESYSTMEDEGESTIONINTGREDESRESSOURCESENEAUSURUNTERRITOIREDE MONTAGNE ....................................................................................................................................... 53PARTIEII:LESRESSOURCESENEAUDUNTERRITOIREDEMONTAGNE,ATOUTSET CONTRAINTES. LEXEMPLE DU BASSIN VERSANT DU GIFFRE .................................................. 81CHAPITRE4:CARACTRISTIQUESPHYSIQUESDUBASSINVERSANTDUGIFFREETSESRESSOURCESEN EAU ................................................................................................................................................. 83CHAPITRE 5 : CARACTRISTIQUES ENVIRONNEMENTALES DES MILIEUX AQUATIQUES DU BASSIN VERSANT DU GIFFRE .......................................................................................................................................... 101PARTIE III : ACTIVITS HUMAINES ET ENJEUX AUTOUR DES RESSOURCES EN EAU SUR LE BASSIN VERSANT DU GIFFRE .............................................................................................................. 127CHAPITRE 6 : LES USAGES DE LEAU CARACTRISTIQUES DUN TERRITOIRE DE MONTAGNE .................... 129CHAPITRE 7 : LES ACTIVITS POLLUANTES SUR LE BASSIN VERSANT DU GIFFRE .................................... 149CHAPITRE 8 : LE PATRIMOINE NATUREL ET LES ACTIVITS TOURISTIQUES LIES LEAU ........................ 173PARTIE IV : LES ACTEURS ET LE SYSTME DE DCISION DANS LA GESTION INTGRE DE LEAU.......................................................................................................................................................... 187CHAPITRE 9 : LES PRINCIPAUX ACTEURS DE LEAU ET LEURS COMPTENCES ......................................... 189CHAPITRE10:LACONTRIBUTIONDESACTEURSLAMISEENPLACEDUNEGESTIONINTGREDE LEAU ............................................................................................................................................ 205CHAPITRE 11 : LES FLUX DINFORMATION DU SYSTME DE GESTION DE LEAU ...................................... 217SOMMAIREtel-00472979, version 1 - 13 Apr 201014PARTIE V :VALUATION DES INTERACTIONS ENTRE LES PARAMTRES DU SYSTME DE GESTION DE LEAU .................................................................................................................................. 239CHAPITRE12:INDICATEURSSURLESRELATIONSENTRELAMNAGEMENT,LESUSAGESETLES RESSOURCES ................................................................................................................................... 241CHAPITRE 13 : EVALUATION DE LA SATISFACTION DES USAGES DE LEAU ............................................. 273PARTIEVI:DUNSYSTMEDEGESTIONSECTORIELLEAUNEGESTIONINTGRE. PROSPECTIVE ET PRCONISATIONS............................................................................................... 291CHAPITRE14:LIMITESDEFONCTIONNEMENTDUSYSTMEACTUELGESTIONDELEAUCOURTET MOYEN TERME............................................................................................................................... 293CHAPITRE 15 : LA GESTION DE LEAU DANS UN CONTEXTE DE CHANGEMENT CLIMATIQUE.................... 305CHAPITRE 16 : PRCONISATIONS POUR UNE GESTION INTGRE DE LEAU. UNE GESTION DURABLE FACE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ............................................................................................................... 319CONCLUSION GENERALE ..................................................................................................................... 335BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................................... 345ANNEXES .................................................................................................................................................... 367TABLE DES ILLUSTRATIONS ................................................................................................................ 481TABLE DES MATIRES ........................................................................................................................... 491LISTE DES ABRVIATIONS .................................................................................................................... 503tel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010I NTRODUCTI ON GNRALEtel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201017Les chteaux deau de la plante : une apparente prospritLes montagnes sont gnralement qualies de chteaux deau de la plante . Ce qualicatif repose sur le potentiel de prcipitations lies au relief et la rtention nivo-glaciaire. Leffet barrire (vis--visdesmassesdairhumides)etleffetaltitudinalsetraduisentpardesprcipitationsplus abondantes et par un stockage nivo-glaciaire (selon laltitude) des prcipitations ; stockage restitu aux coulements superciels et souterrains lors des saisons estivales. Leau en montagne apparat dans ce schma comme une ressource abondante et inpuisable se renouvelant dune anne sur lautre. Cetteperceptionestcommunebonnombredepersonneshabitantettravaillantdansles montagnes.Sicetteimagenestpasfausse,ilfautnanmoinslarelativiserenfonctiondesaires montagneusesetenfonctiondesvariationsclimatiquesquaconnuesnotreplante.Lamontagne est un milieu htrogne qui entretient des liens spciques avec leau. Les prcipitations sont trs variables dun massif lautre et en fonction de laltitude. A cette htrognit climatique sajoutent des variabilits en termes de relief et de gologie qui inuent sur la part entre les ruissellements et les coulements souterrains. Des pentes fortes, une gologie dfavorable la constitution de rservoirs, des aquifres de petite dimension, sont autant de facteurs qui peuvent expliquer une rpartition et une disponibilit ingale de leau dans le temps et dans lespace.Ilimportedesoulignerquunefortepartdustockageeneauenmontagneestdordrenivo-glaciaire,toutaumoinspourlesAlpes.Cestockageestdirectementdpendantdesconditions climatiques (temprature, prcipitations nivales et maintien de la couverture en t). Les inquitudes liesauchangementclimatiqueactueletvenirremettentencausecetteidedabondanceetde cycle . Cette perception dun changement de la disponibilit en eau est de plus en plus prise en compte,sinonparlesutilisateurs,toutaumoinsparcertainsacteursetdcideurs.Laquestiondu changement climatique actuel et de ses effets sur les ressources en eau en montagne est au coeur de nombreuxdbatsetrexionsactuels;mmesipourcertainsacteurslechangementclimatique venir reste de lordre de lhypothse malgr les tendances fortes observes ces dernires annes. Cela montre limportance du dialogue entre les scientiques et les acteurs de terrain. La prise en compte du changement climatique et de ses effets sur les ressources sera un levier majeur pour une gestion intgre et durable de leau en montagne.Leauapparatenralitsoustroistypesderessourcesplusoumoinsmobilisablespourun gestionnaire : les eaux stockes sous forme de neige et de glace, les eaux souterraines et les eaux de surface. Chaque type de ressources a ses spcicits propres en termes de disponibilit, de quantit et de qualit. Ces spcicits impliquent (devraient impliquer) une gestion adapte en fonction du type de ressource. Dans notre sujet de thse, le terme de ressources sera gnralement employ au pluriel pour dsigner les diffrents types de ressources disponibles sur un territoire de montagne. INTRODUCTION GNRALEtel-00472979, version 1 - 13 Apr 201018Introduction gnraleLes usages de leau spciques dun territoire de montagneAu-deldunecertainefragilitdesressourceseneau,lesystmedegestionsurunterritoire de montagne se caractrise par des usages spciques. Une concentration spatiale et temporelle de certains usages de leau entrane des pressions sur les ressources et remet parfois en cause le principe deconciliationdesusagesentreeux. Avecledveloppementdelconomiebasesurletourisme notamment dans les Alpes, de nouveaux usages sont apparus et sont entrs en comptition avec des usages plus traditionnels. Se pose ds lors en t la question de la conciliation entre les besoins en eau potable des communes, le maintien du pastoralisme et de la sylviculture, la recharge des retenues pourlhydrolectricitetlesactivitsenrivirecommelapcheetlessportsdeauxvives.Cette questionseposetantauniveaudelusagedeleauquedesamnagements.Lasaisonhivernale, quant elle, qui correspond la priode dtiage, est marque par une comptition essentiellement entrelesbesoinseneaupotable,auplusfortdanslescommunestouristiques,etlesbesoinspour lenneigement articiel.Danscecontextedeconcurrenceentreusagesetdefortevariabilitdesressourceseneau,la gestiondesressourceseneauentantquesupportdusagesconomiquesdevientcomplexe.Des situations de pnuries peuvent contraindre ponctuellement et temporairement certains usages. Citons lexemple de la commune des Gets qui a connu des coupures deau de son rseau dalimentation en eau potable plusieurs hivers de suite (2005, 2006) et un t (2003), alors que, paradoxalement, cest lastationlaplusarrosedeHaute-Savoieavecplusde1800mmdeprcipitationsannuelles.Cet exemple nest pas isol et dautres communes touristiques de montagne rencontrent ou rencontreront des difcults de gestion, compte tenu de lurbanisation croissante et de la variabilit des ressources en eau. Les territoires de montagne seront de plus en plus appels raliser des bilans quantitatifs globaux des ressources pour prvenir ces situations de pnuries et apprcier le cumul des pressions sur les cours deau de tte de bassin versant. Des expriences existent. Citons ltude ralise dans le cadre du contrat de bassin versant Isre en Tarentaise . Elle est une des premires en termes de bilan global sur les usages et la ressource en eau et pose les bases dune gestion intgre.Une double approche environnementale des ressources en eauLesystmedegestiondesressourceseneausintgredansuneapprocheglobale.Ildoittenir compte des dimensions cologique et patrimoniale des milieux aquatiques, qui sont par ailleurs de plus en plus imposes par la rglementation, et en particulier par la loi sur leau de 1992. Celle-ci, rappelons-le,qualielesressourceseneaude patrimoinecommunpourlanation.Lesystme degestionestaujourdhuiconfrontunedoubleproblmatique:commentgrerintelligemment etdurablementlesressourceseneau,enconciliantlasatisfactiondesdiffrentsusagestouten garantissant les fonctions naturelles et patrimoniales des milieux aquatiques ? Lactuel systme prsente des limites, notamment dans la prservation des milieux aquatiques. En effet, malgr les difcults de gestion voques, les usages conomiques priment et sont assurs par le recours aux solutions techniques et aux infrastructures lourdes (retenues daltitude). La question que nous devons poser est : est-ce que ces infrastructures assurent une durabilit des ressources en eau et une bonne qualit cologique des milieux aquatiques ? Sinon vers quel modle faut-il aller en termes dinfrastructures ou de gestion ? Cest autour de ce double questionnement que sarticule notre travail de recherche. tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201019 Introduction gnraleOn sait aujourdhui que les milieux aquatiques ont t fortement perturbs, avec notamment la constructiondesgrandsamnagementshydrolectriquesdelapriodeaprsguerre,aulendemain delanationalisationdusecteurdellectricitetdelacrationdelasocitElectricitDeFrance (EDF). Durant cette priode, la priorit tait la production dlectricit et la question des impacts sur lemilieuaquatiqueneseposaitpasdanslesmmestermesquaujourdhui.Cesperturbationssur les dynamiques uviales sajoutent aux impactslis lurbanisation dans les ttes de bassin versant (stations de ski). Ces amnagements lis aux sports dhiver ont modi les espaces montagnards et dgrad le fonctionnement naturel des hydrosystmes : drainage et comblement de zones humides, modication du rgime des cours deau, impermabilisation des sols, remodelage des pentes Iciencore,ilfaudraanalyseravecacuitetrecullesdiffrentsimpactssurlesressourcesen eau et leur mode de gestion. Il est clair que les diffrentes infrastructures actuelles conduisent une irrversibilit.CetteirrversibilitestreconnueparlaDirectiveCadresurlEauquidclasse les masses deau impactes par les amnagements les plus importants (essentiellement les barrages hydrolectriques)enmassesdeaufortementmodies,cest--diredesmassesdeauquine pourront atteindre quun bon potentiel cologique la place du bon tat cologique vis dici 2015. La faible capacit de rsilience du systme face aux perturbations nest pas seulement lie ces amnagements. Elle rsulte aussi de la gestion sectorielle des usages et dune urbanisation croissante qui contribue modier la structure et le fonctionnement de lhydrosystme (Ployon, 1997). Lun des effets les plus visibles de ces perturbations est celui affectant le peuplement piscicole. Or, lindicateur poisson , du fait de sa forte dpendance la qualit de lhabitat, demande des prcautions dusages. Il permet dvaluer ltat cologique dun cours deau, mais il doit tre complt par dautres indicateurs physiques et biologiques pour faire ressortir les altrations dorigine anthropique. Une rexion sur des indicateurs et des mthodes dvaluation est ncessaire pour apprhender les impacts des usages sur les ressources et tester la pertinence du contexte rglementaire actuel. La notion datteinte du bon tatdesmassesdeauimpliqueuneprservationdelaqualitdesmilieuxaquatiques,devenueun objectif en soi pour leurs valeurs non seulement cologiques mais aussi patrimoniales. La complexit du systme de gestionLa gestion des ressources en eau est un sujet complexe. Ont t dj voques la multiplication des usages, leur interdpendance, la vulnrabilit des ressources en eau en montagne, la prservation dumilieuaquatiqueimposeparlarglementationeuropenne,etc.Acescontraintessajoute lorganisationmmedesacteursdelagestion.Ladcentralisationdansledomainedeleausest traduiteparunedclinaisonrgionale,dpartementaleetlocaledespouvoirspublics.Silestvrai quelescommunessontdevenuesdesacteursincontournablesdegestiondeleau(rseaupublic dalimentation en eau potable et de collecte des eaux uses, contrle des dispositifs dassainissement noncollectif,rglementationdesusageslintrieurdesprimtresdeprotectiondescaptages) au mme titre que le dpartement qui a vu son rle de soutien technique renforc par la dernire loi sur leau et les milieux aquatiques (articles 28 et 28bis, 2006), aucune structure territoriale na ce jour le monopole de la politique de leau. De la commune la rgion en passant par la communaut de communes ou le dpartement, chacun a sa part de responsabilit et dintervention (Ghiotti, 2007). Mais la singularit de la politique de leau franaise reste la planication participative impulse par les Agences de lEau qui se concrtise travers des outils rglementaires (schma damnagement de gestion de leau ou contrat de bassin), et dans la mise en place de structures de concertation et de dcision. Il en rsulte une multiplicit des centres de pouvoir et une diversit des chelles dintervention. Or la tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201020Introduction gnralemultiplicit des intervenants dans le domaine de leau ne facilite pas toujours une bonne cohrence de lensemble du dispositif, en raison dinstruments de coordination insufsants : chevauchement des comptences, manque de coordination, statuts diffrents, volution des responsabilits (par exemple larorganisationdesservicesdelEtat),peudelisibilitetdeclartsurleursrles,divergences dintrts entre acteurs. Le concept de gouvernance, qui sous-tend la politique de leau dcentralise enFrance,sappuiesurunetellecomplexitdacteursprivsetpublicsquilfragiliselesystme lui-mme. Dailleurs certains auteurs nhsitent pas parler de crise des institutions qui savre tre troitement lie la multiplicit des acteurs et leurs rapports (Vitali, 2003). La dcentralisation a ainsi abouti la construction dun nouveau territoire daction publique : le bassin versant.Ce territoire qui a t en premier appropri par les Agences de lEau et les dpartements, restesurtoutvucommeunespaceosorganiselensembledesrexionsetdesconcertations.Il nest que trs rarement reconnu comme un espace fonctionnel de gestion oprationnelle, par manque de lgitimit politique. Ainsi apparaissent plusieurs territoires de gestion et de dcision, tmoignant de la multiplicit des dynamiques sociales (Ghiotti, 2007).Le concept de gestion intgre des ressources en eau en questionAu vue des spcicits de gestion des ressources en eau sur un territoire de montagne et de la complexit de lorganisation territoriale, il est lgitime de sinterroger sur la pertinence et la faisabilit dun systme de gestion dit intgre , que tout le monde appelle de ses voeux. En effet, le concept de gestion intgre lchelle de bassin versant a t pos, il y a dj plus de 40 ans en France. La loi sur leau de 1964, lorigine de la mise en place des Agences de lEau (dite nancires), rvolutionnaire lpoque, a t une premire tentative pour appliquer les principes de la gestion intgre des ressources en eau : une dcentralisation au niveau de chaque bassin versant correspondant trs approximativement aux limites gographiques des agences, des ngociations entre tous les acteurs de leau intrts fortement opposs et rassembls pour la premire fois autour des problmatiques lies aux ressources en eau, et le partage des cots et des bnces (rgle du pollueur/payeuretcelleduconsommateur/payeur).Lagestionintgreapparattreunesolutiondansles discoursinstitutionnelsfranaisetinternationaux.PourlePartenariatFranaispourlEau(2000), elle vise un triple objectif : (i) maintenir le respect des quilibres naturels lis leau en vitant les prlvements excessifs et les pollutions ; (ii) dvelopper et matriser la mobilisation de la ressource et prvenir les risques associs ; (iii) et assurer une allocation quitable entre les diffrents usagers . Ce concept, repris dans les forums mondiaux sur leau, a t largement dvelopp au niveau international pardesorganisationscommelONU,OIEAU,UNESCOpoursattaquerauxdsdeleauet optimiser la contribution de leau dans le dveloppement durable (Global Water Partnership, 2004). Il a t aussi adopt au niveau europen par la Directive Cadre sur lEau en octobre 2000, avec un objectif de rsultat afch qui est latteinte du bon tat des masses deau dici 2015.Silagestionintgreestpluttbienassimileaujourdhuiparlesinstancesgouvernementales et organismes de bassin, ce nest pas toujours le cas aux chelles plus locales. En effet, la mise en uvre locale dune gestion intgre est rapidement confronte divers obstacles comme la structure non adapte du gestionnaire, le dcoupage administratif du territoire, un manque de connaissances et de partage dinformations, les moyens techniques et nanciers, la matrise foncire Ces obstacles expliquent encore actuellement la mise en uvre de modes de gestion sectorielle pouvant entraner tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201021 Introduction gnrale des situations de pnurie et de conits en montagne qui ne sont pas lies des situations de raret de la ressource (Reynard, 2000). La gestion intgre est-elle adapte et peut-elle se mettre en place un niveau local ? Est-elle un mode de gestion durable, face la complexit et aux spcicits territoriales dun systme de gestion des ressources en eau ? Est-elle la solution au problme de gestion sur un territoire de montagne, autrement dit peut-elle apporter des solutions durables pour concilier les usages conomiques et la prservation des ressources en eau ? Doit-on lapprhender comme solution ou symptme dune crise des systmes daction existants ? (Grandgirard, 2007)Si cette problmatique concerne en premier lieu les territoires de montagne et la responsabilit delensembledesacteursdusystmedegestion,elleconcernegalementlesterritoiressitussur lespimontscomptetenudeslogiqueshydrologiquesamont-avalquelesacteursetdcideursont souvent tendance oublier. Le cas du bassin versant du GiffrePourillustrerlacomplexitdelagestionactuelledesressourceseneausurunterritoirede montagne, nous nous appuierons sur le bassin versant du Giffre dans le dpartement de la Haute-Savoie (gure 1). Ce territoire a t choisi car il permet daborder lensemble des problmatiques lies la gestion de leau en montagne dans les Alpes du Nord. Il prsente plusieurs atouts et intrts.Du point de vue des ressources en eau, sa position gographique et sa structure topographique lui confrent un fort potentiel de prcipitations. Dlimit lest et au sud-est par les hauts reliefs des Aiguilles Rouges (3000 m daltitude), il reoit dabondantes prcipitations sous forme de neige, se traduisant notamment en t par ses nombreuses cascades qui font lattrait touristique de la rserve naturelledeSixt-Fer--Cheval(photographie1).Saforteamplitudealtitudinale(450m-3050m) coupleunegologiecomplexeentranegalementuneimportantevariabilitspatio-temporelle desressourceseneaudisponibles,propreauxterritoiresdaltitude.Cettedisponibilitingalede leau dans le bassin versant explique en partie des problmes de gestion de leau qui contrastent avec 0 300 kmCHAMONIXANNECYGENEVETHONONLac LmanBassin versant du Gifre

Figure1:Localisationdu bassinversantduGiffredansle dpartement de la Haute-Savoie.Ralisation : SED Haute-Savoietel-00472979, version 1 - 13 Apr 201022Introduction gnralelapparente prosprit de ses ressources en eau.Ceterritoiredtudeagalementlavantagedoffrirlensembledesusagescaractristiques desterritoiresdemontagnealpins.Bassinversantruralcompos92%deterritoiresnaturels, ilopposedesterritoiresurbanissdesterritoiresrestsrurauxosesuperposentlesusagesde lconomie montagnarde traditionnelle agro-sylvo-pastorale aux usages lis lindustrialisation puis au dveloppement touristique. Ainsi, il concentre sur 450 km tous les usages de leau propres un territoire de montagne : hydrolectricit, enneigement articiel, agro-pastoralisme, sports deaux vives. Lanalyse de ces usages et des ressources disponibles mettra en exergue des cas dinadquation entre ressources et besoins en priode dtiage. Cette diversit dusages a galement des impacts importants sur le milieu aquatique. Le bassin versant du Giffre prsente deux masses deau dclasses en masses deau fortement modies laval du barrage hydrolectrique de Pressy sur la commune de Taninges, court-circuitant 16 km du linaireduGiffre.LeGiffreestgalementlecoursdeaudeHaute-Savoiequialaplusmauvaise qualitpiscicoleavecunpeuplementperturbsurlensembledesstationsduGiffre(GenTereo, 2008). Une des incidences de cette perturbation est la disparition de la souche autochtone de la truite fario. Les raisons de cette disparition sont multiples. La prsence et la composition du peuplement piscicole sont lies plusieurs paramtres : la capacit daccueil du milieu cologique, la continuit biologique, la temprature de leau, les pressions de la pche Laltration de la qualit piscicole du Giffre permet daborder (i) la complexit du systme, les difcults (ii) valuer les interactions entre usages et milieu aquatique, et (iii) dnir des indicateurs pertinents de qualit des eaux. Enn, dun point de vue des acteurs, les difcults de mise en place de lactuel contrat de rivire souligne labsence de solidarit amont-aval des communes et un manque gnral de concertation et de communication entre les diffrents gestionnaires et usagers de leau. Le bassin versant du Giffre apparat donc un terrain particulirement privilgi pour tester une mthode de gestion intgre en la confrontant, dune part, aux nombreuses interdpendances entre les usages et les ressources en eau, et dautre part, une organisation complexe des acteurs de leau.Photographie 1 : Cascades de la rserve naturelle de Sixt-Fer--Cheval.Clich : B. Charnay tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201023 Introduction gnralePlan de la recherche1/Pourrpondrecetteproblmatiquederecherche,nousnousattacheronsdansunpremier temps dnir les concepts et analyser le systme de gestion des ressources en eau dans sa globalit. La gestion de leau et de ses usages sinscrit dans un systme complexe dinuences et de relations conomiques, sociales, culturelles et politiques. Pourcomprendrelanaturedecesrelationsetidentierlesfacteursdterminantsdune politiqueintgreetdurabledeleau,lamthodesystmiquenousestapparuelamieuxadapte. En considrant que ce sont les interactions entre les lments qui caractrisent un systme, et non la sommedeslments,lamthodesystmiquepermetuneanalyseglobaleparlesinteractionsentre les composantes du systme. La mthode systmique et ses principes ne seront repris que brivement danslapremirepartie,tantelleestaujourdhuiutiliseetvalidepartouslesscientiques.Elle permettra de cadrer notre dmarche et de construire une mthode rpondant la problmatique pose. Le systme propos sappuie largement sur ses principes : notion de relations avec un environnement, notiondorganisationetdvolutiondansletemps,bouclesdertroactionsetforagesextrieurs (Walliser, 1977). La construction de tout modle saccompagne dune rexion autour dindicateurs pertinents,applicablesettransposablesdontlobjectifestdouble:mettreenexerguelesrelations entre un grand nombre de paramtres agissant sur la gestion de leau, et tudier la capacit du systme sautorgulercomptetenudesforagesextrieursinuenantsonfonctionnement.Cesforages sonticide naturetrsdiverse:changement climatique, volution culturelle de lopinion publique, volution du contexte conomique et politique, nouvelles rglementations europennes Une analyse diachronique des usages illustre les boucles de rtroaction et les forages qui ont marqu le systme de gestion des ressources en eau en montagne durant le sicle dernier. Pourprendreencomptelensembledesinteractionsentreusagesetressourceseneau,nous proposons un modle une unit gographique cohrente : le bassin versant. Le systme dapplication appelgestiondeleaucorrespondaubassinversantduGiffre.Quatresous-systmesontt identis : ressources en eau , amnagement du territoire , usages et acteurs . Les composantes de chaque sous-systme sont synthtises dans cette premire partie. Nous avons fait lechoixdedtaillerchaquesous-systmedanslespartiessuivantes,avantdemenerunerexion globale sur les relations et les forages extrieurs du systme.Cette premire partie a pour objet de poser le degr de pertinence du concept de gestion intgre au vu de la complexit territoriale.2/ La seconde partie de notre travail vise tudier le sous-systme ressources en eau . Elle poselaquestiondeladisponibilitdesressourcesunmomentdonnsurlebassinversant,etla compare aux besoins. Cette disponibilit dpend des paramtres la fois topographiques, gologiques et climatiques du bassin versant, et de lamnagement du territoire (niveau dinfrastructures, rseaux, captages). Les ressources en eau sont apprhendes de deux manires diffrentes et complmentaires : (i) par les rseaux de mesures existants sur les dbits des cours deau, les dbits dtiage des sources, linventaire dpartemental des zones humides (pour leur fonction hydrologique) ; (ii) par un modle hydrologique qui repose sur un bilan des entres et des sorties mensuelles au travers des paramtres classiquesdunbilanhydrologique(prcipitation,temprature,dbitetvapotranspiration)(SED Haute-Savoie et al., 2008).Lutilisation de ce modle permettra dintgrer la question du changement climatique et dtudier ses consquences sur les coulements et sur les usages. tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201024Introduction gnraleNotretravailmetenavantunerpartitionspatialeingaledesressourceseneauetmilieux aquatiques (zones humides) entre les communes du bassin versant. Il soulve galement les manques de donnes et de connaissances sur les ressources en eau : manque de rseaux de mesures sur les dbits naturels des cours deau et les sources, manque de mthodes pour comprendre, par exemple, les liens entre la qualit biologique, physique et chimique dun cours deau, ou pour mesurer les fonctions hydrologiques dune zone humide Lefonctionnementdesbassinsversantsestaucurdedomainesolaconnaissancereste insufsante.Orlesconnaissancessurlesressourcesetlefonctionnementdusystmerestentun pralable incontournable une gestion intgre, base sur les ressources et non plus sur les besoins. Certainsacteursrestentimpuissantsfautedeconnaissances,commelesservicesdconcentrsde lEtat xant un pourcentage thorique de 10% pour estimer le dbit biologique ncessaire au maintien des cosystmes. 3/ Les sous-systmes usages et amnagement du territoire , troitement lis, font lobjet de la troisime partie. Les usages de leau prsents dans le bassin versant du Giffre correspondent aux activits propres un territoire de montagne :-lurbanisation disperse, -lagriculture de montagne, le pastoralisme et la sylviculture,-le tourisme dt, en particulier les sports deaux vives et lalimentation en eau des refuges, -le tourisme dhiver avec lusage de leau pour la fabrication de la neige de culture,-lhydrolectricit,-et le milieu aquatique pour ses fonctions cologiques et patrimoniales.La diversit des usages dpend du territoire, de son conomie et occupation du sol. Sur le bassin versant du Giffre, deux conomies sopposent : dune part, lconomie des communes proximit de la valle de lArve essentiellement industrielles, et dautre part, les communes dconomie touristique de la haute valle. Ces diffrences de support conomique jouent un rle direct sur le mode dusages de leau et sur les modes de gestion.Lobjectif nest pas dtudier ici de faon approfondie lensemble des usages lis leau sur le bassinversantduGiffre.CetexerciceseraitredondantavecletravailduSyndicatduHautGiffre, charg de la mise en place dun contrat de rivire sur le bassin versant, et qui sappuie sur des moyens techniquesethumainsbiensuprieurspourraliserlediagnostic.Lobjectifestpournousdefaire ressortir les besoins et les impacts des principaux usages sur les ressources en eau, et de mettre en avant les manques de donnes et de connaissances pour les valuer dans loptique dune gestion intgre. Les manques de donnes soulevs sur les usages concernent plus particulirement les prlvements eneaupourlagricultureetlesamnagementsagricoles,lesquantitsdrivespourlaproduction hydrolectrique et certains rseaux deau potable. De plus, ces donnes, quand elles existent sur les usages, sont rapportes lchelle de gestion (domaine skiable pour un exploitant, commune pour leaupotableetlassainissement).Letraitementdesinformationslchelledubassinversant exige une certaine connaissance du territoire. Le recours un Systme dInformation Gographique facilitera la transposition dchelles des donnes. Le diagnostic de ces deux parties (II et III) pose la problmatique de la durabilit de la gestion actuelle des ressources en eau, en soulignant chaque fois la spcicit montagne. Il synthtise les tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201025 Introduction gnraledonnes disponibles sur les ressources en eau et les usages dun territoire de montagne. Trois types dedonnessontrecenses:(i)desdonnescaractreofcielduSystmedEvaluationdelEau issues des rseaux de mesures de lEtat, de ses services dconcentrs et tablissements publics, (ii) desdonnescentralisesparledpartementdeHaute-Savoie,et(iii)desdonnesspciquesau bassin versant produites par des tudes dans le cadre du contrat de rivire. 4/ Le sous-systme acteurs est trait dans une quatrime partie. Il est essentiel, car il intervient surlestroisautressous-systmes.Ilprendencomptelensembledesacteursquiserapportent auxdiffrentesactivitsconstituantlagestion:utilisationdesressourcesetdumilieu,actions damnagement et dentretien, rglementation, incitations conomiques, concertation, connaissance du milieu, prestations intellectuelles et techniques. Chaque acteur intervient directement sur un sous-systmeparunedcisiondamnagement,degestiondunusage,ouparsonsavoiretexpertise. Son action se rpercute, des chelles spatio-temporelles variables, sur lensemble des lments du systme, volontairement ou non. La gestion intgre applique grande chelle par les Agences de lEau semble insufsante devant le nombre dacteurs qui inuencent le fonctionnement du systme. Ilestdonclgitimedesinterrogersurlacapacitdechaqueacteurmettreenplaceunegestion intgre des chelles plus rduites et oprationnelles.Quatre grandes catgories dacteurs ont t iciidenties:lesacteursrgulateursdelapolitiquedelEau(Etatet AgencedelEau),les acteurs dcideurs oprateurs , soit publics (collectivits territoriales), soit privs (exploitants) en charge dun usage conomique ou du milieu aquatique, les acteurs ralisateurs matrise duvre (entreprises, bureaux dtudes) et les acteurs socitaux (scientiques, associations et usagers).Leur capacit dintgration dpend de plusieurs facteurs :-leurs relations plus ou moins formalises entre eux, dterminantes dans la connaissance des autres usages et du milieu, -leurs degrs de responsabilisation et leurs intrts,-la part de la concertation et de la ngociation dans la prise de dcision, -leurs comptences et leur rle stratgique dans la prise de dcision, -la structure mise en place, sa lgitimit et sa proximit avec le terrain, -leurs moyens nanciers, humains, techniques, institutionnels, rglementairesLtude du jeu dacteurs apporte des lments dclairage, dune part dans la rexion prospective sur la rsilience du systme gestion de leau , dautre part dans les prconisations de modication des pratiques des gestionnaires. Un questionnaire type a servi de l conducteur aux entretiens pour connatre lusage (importance conomique en terme demplois, de revenus ou de frquentation), ses relationsleauetaveclesautresusages,sondegrdesatisfactionactueletfutur,sesprincipales contraintes (hydrogologiques, cologiques, sociales, conomiques), et sa capacit dvoluer vers uneintgration.Ilenressortunegrandehtrognitdessystmesdegestion,entrecatgories dacteurs et en fonction de lusage. Les paramtres nont pas non plus le mme poids dans le systme degestionenfonctiondelacatgoriedelacteur,sesresponsabilitsetsesactions.Parexemple, lagestiondeleaupotableestcontrainteessentiellementparlhydrologieetleprix,alorsquela prservationdumilieuaquatiqueestcontrainteparledroitdepropritetlemanquedacteurs dcideurs (matrise douvrage) comptence milieu. Lapproche par acteurrenvoie directement la question de la gouvernance et de la participation. Descritiquessontfaitessurlaconcertationmiseenplace,lorganisationetlembotementdes tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201026Introduction gnralediffrentes chelles de gestion qui sont des obstacles une gestion intgre.Un clairage est fait sur la place des acteurs socitaux, et en particulier des scientiques, issus de nombreuses disciplines, qui sont passs du rle dobservateur celui dexpert et dacteur (Durand, 1997). Quelle est la place des scientiquesdanslesystme?Commentpeuvent-ilsexprimerleursconnaissancesetincertitudes pour quelles soient rutilises dans les processus de dcision ? Concrtement, limplication des scientiques dans le systme de gestion renvoie deux formes dintgration:(i)lesrelationsaveclesscientiques,privilgiesdanslecadredeconseilsou commissions scientiques par exemple, et (ii) les comptences et la formation des acteurs eux-mmes. Lintgration des scientiques est la plus forte pour les acteurs rgulateurs de la politique de leau et les autres acteurs socitaux de type associations. A loppos, ce sont les collectivits locales ou les syndicats, acteurs pourtant incontournables de la politique de leau, qui sappuient principalement sur les bureaux dtudes et qui intgrent le moins les scientiques dans leur systme de dcision, lacune encore non rsorbe par les outils de gestion intgre comme les contrats de rivire. Cette partie (IV) montre la manire dont les acteurs agissent par rapport aux points faibles du systme, sils ont conscience ou non des limites du systme et si le jeu dacteurs actuels contribue apporter des solutions, ou linverse amplier les points faibles.5/Lediagnosticdesprcdentespartiessurlesdiffrentssous-systmesapermisdeposerla mthodologie ncessaire une gestion intgre, objet de la cinquime partie de notre mmoire. Elle vise prendre en compte les interactions entre les quatre-sous systmes identis. Lesindicateursetmthodespropossonttconstruitspartirdesdonnesetconnaissances existantespourchaquesous-systme,synthtisesdansunSystmedInformationGographique (SIG).LechoixdunSIGsejustiepoursonintrtcroiseretconfronterplusieurscouches dinformation sur un espace dni. Il est utilis dans la prsente dmarche dans plusieurs objectifs : -faire ressortir des interactions spatiales entre les paramtres du systme,-calculer des surfaces, des distances, ou des ratios (par exemple prlvements/coulements un endroit prcis) pour crer ou afner des indicateurs,-produire des cartes gnrales et thmatiques de la thse.Cet outil a particulirement servi renseigner ici les indicateurs sur les liens physiques du systme : taux de prlvement, indice de pollution, taux de vulnrabilit, degr daltration (sur les coulements et sur la morphologie des cours deau), ainsi que les taux de satisfaction.Le croisement spatial et temporel des usages permet didentier des possibles conits dusages et de les localiser sur le bassin versant. Les ttes de bassins versants apparaissent notamment comme deslaboratoiresdegestionintgre,caractrisesparuneconcentrationdusagesconomiqueset diffrentes formes doccupation du sol (urbanisation, domaine skiable, agro-pastoralisme, sylviculture) dans des zones vulnrables (zones humides, primtres de protection des sources deau potable, cours deau faible dbit). A titre dexemple, prs de la moiti des zones humides sont situes dans lesalpagesetplusde60%dessourcesdeaupotable,enfort.Ainsi,letravaildeconfrontation desdonnespermetdemodulerlagestionintgre,selonladisponibilitdesressourceseneau, laconcentrationdesusages,lapriseencomptedesinteractionsamont-aval(impactssurles ressources et les autres usages) ainsi que loccupation du sol du bassin versant.tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201027 Introduction gnraleCette partie (V) apporte des prconisations en termes de donnes et de mthodes pour une gestion intgre. Elle propose des indicateurs dvaluation des interactions du systme, lchelle du bassin versant, pour mettre en avant des dysfonctionnements du systme actuel. Elle amorce la rexion de la prochaine partie sur le fonctionnement global du systme. 6/Ladernirepartieestconsacrelanalysedufonctionnementdusystme,enprenanten compte son environnement et les volutions prvisibles moyen et long terme. En effet, le systme surlequelnoustravaillonsestunsystmeouvertausensstrictdunpointdevuesystmique, puisquilentretientdenombreuxliens,soitphysiquesvialesous-systmeressourceseneau, soit socio-conomiques, culturels, rglementaires et politiques via le sous-systme acteurs . Ces changesinterviennentdirectementdanslefonctionnementetlvolutiondusystmedubassin versant du Giffre. Linuence du sous-systme acteurs sur les autres sous-systmes a t apprhende par une analysestatistique.Lerecoursloutilstatistiqueexigedesdonnesdisponiblesnombreuseset facilement codiables . Une analyse des composantes principales a pu tre applique sur les zones humides du bassin versant du Giffre, en sappuyant sur linventaire dpartemental des zones humides. Elle fait ressortir les paramtres qui inuent le plus sur ltat des zones humides : altitude, protection rglementaire, matrise foncire, zonage dans les documents de planication durbanisme, niveau de connaissances Lobjectif est double. Elle illustre une forme dinteractions entre le sous-systme acteurs et les trois autres sous-systmes. Elle vise galement identier les leviers pour prserver au mieux les zones humides, soit par une gestion intgre, soit par une simple conservation via une rglementation efcace ou une matrise foncire.Notre travail souligne qu ce jour, le systme de gestion de leau dans les Alpes du Nord na pas encore atteint un tat de crise dans le sens o les conits dusages actuels sont encore occasionnels ou latents. Cependant lvolution des besoins en eau, lurbanisation croissante et les projections lies au changement climatique posent concrtement les limites du systme actuel de gestion. La rsilience du systme est teste dans une rexion prospective en intgrant, moyen terme, lesprojetsconnusdesgestionnairesdeleauetlurbanisationcroissante,etpluslongtermele changementclimatique.Unelvationdestempraturessupposedanslesrgionsalpinesentre +1Cet+5Cdici2100(Seiler,2006)atintgredanslemodlehydrologiquepourvaluer lavariabilitdescoulements. Aprcipitationconstante,ladiminutiondustockneigeuxentrane undcalagedelapriodedtiagedesressourcesent.Lesusagesvoluerontaussi,causede lurbanisationcroissanteetdelahaussedelalimitedunenneigementablede150mtrespar degrdetempraturesupplmentaire(OCDE,2007).Lasensibilitdesrgimeshydrologiqueset les pressions des usages sur les ressources feront invitablement voluer lorganisation du systme. Nous montrerons quune crise du systme peut tre vite par la mise en place dune gestion intgre quiestunerponselacomplexit.Ellevisegarantirdurablementunequantitetunequalit deauncessairelasatisfactiondesusagesetdumilieuaquatique.Enintgrantlensembledes composantesdusystmegestiondeleau,elleprivilgieralaconcertationetlasensibilisation pourfairevoluerlesperceptions,etproposeradessolutionsdamnagementsplusterritoriales, enfreinantlerecourssystmatiqueauxtechniques.Avecuneintgrationeauetterritoire,le changement climatique devient une opportunit pour les territoires de montagne pour promouvoir un tourisme quatre saisons et asseoir un dveloppement territorial durable.tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201028Introduction gnraleAu vu des points faibles et des forages du systme, deux modles sont proposs au terme de cemmoire.(1)Lepremiermodleestunmodlethoriquedegestionintgrequineprendpas encomptelecontextesocio-conomiqueetpolitique.Ilmetnotammentlaccentsurlebesoinde connaissances sur les ressources, sur une meilleure sensibilisation des usagers, sur une concertation accrue,notammententrelesdcideursetlesscientiquesetsuruncadrelgislatifassociantle dveloppementdesterritoiresdemontagnelafragilitdesressourceseneau.(2)Lemodledit ralisable , intgre les enjeux gopolitiques. Les prconisations portent plus sur le dveloppement doutilsdegestionintgresurdesterritoiresciblspourcontournerlesrivalitsdepouvoirqui soprent lchelle dun bassin versant. tel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010PARTI E ICADRE THORIQUE DE LA GESTION INTGRE DES RESSOURCES EN EAU SUR UN TERRITOIRE DE MONTAGNEtel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201031Cette premire partie a pour objet de nous interroger sur la pertinence du concept de gestion intgre au vu de la complexit de la gestion actuelle des ressources en eau sur un territoire de montagne. Elle sorganise en trois chapitres. (i) Aprs avoir justi le choix dune approche systmique, sont abords les diffrents concepts utiliss dans la gestion des ressources en eau en montagne (gestion, ressources, usages, territoire de montagne, acteurs). Le systme idal de gestion qui est propos servira de lconducteurnotrerexionetlapriseencomptedesdiffrentsfacteursintervenantdansla gestion de leau. Nous poserons ensuite (ii) le concept de la gestion intgre des ressources en eau, appele GIRE . Ltat des connaissances, ncessaire tout questionnement global sur leau, est trait dans le deuxime chapitre.Seront abords le concept de la gestion intgre, ses principes, son historique, sa reconnaissance en tant que gestion durable des ressources en eau sur la scne politique internationaleetsonadaptabilitauxchangementsetauxdiverscontextes.Silagestionintgre etsesimplicationsonttlargementcouvertespardesrecherchesscientiquesinternationales,il demeuredeslacunesdansdeuxdomainesessentiellement.PeuderecherchesconsidrentlaGIRE comme un processus dynamique pour aborder la complexit dune part, et dautre part son application unsystmemontagnarddanslespaysdveloppsattrspeutudie. Auvudecesmanques, la problmatique du travail de recherche trouve toute sa pertinence en proposant une mthodologie degestionintgreappliqueunterritoiredemontagnedanslesAlpesfranaisesetbasesur une analyse systmique o la dynamique a toute sa place. Le troisime chapitre (iii) synthtise les paramtres et les dimensions spatiales et temporelles du systme gestion de leau , en sappuyant sur une tude diachronique des usages de leau. PARTIE I : CADRE THEORIQUE DE LA GESTION INTEGREE DES RESSOURCES EN EAU SUR UN TERRITOIRE DE MONTAGNEtel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201033CHAPITRE 1 : LAPPROCHE SYSTMIQUE ET LES CONCEPTS1. LE CHOIX DE LAPPROCHE SYSTMIQUEModedepensepourapprhenderlacomplexitdesgrandssystmesnaturels,conomiques etsociaux,lapprochesystmiqueavulejourauxEtats-Unisaudbutdesannes50,connueet pratique ensuite en France depuis les annes 70. Elle consiste aborder des objets jugs complexes de faon globale en vitant leur parcellisation et leur rduction comme le ferait une approche analytique (Guigoetal.,1995).Cettedmarcheatdclinedansdenombreuxdomaines:enbiologie,en cologie, en conomie, dans les thrapies familiales, en management des entreprises, en urbanisme, enamnagementduterritoire,etc.Lalittraturesurlasystmiquenemanquepas.Couramment utilise par la recherche aujourdhui en tant quoutil danalyse ou outil dintervention, il nest plus ncessairedelaprsenterdansledtail,desouvragesderfrences1ainsiquedesrevuescomme laRevueInternationaledeSystmiqueysontconsacrs.Cettepremirepartieapourobjetde rappeler au lecteur les grands principes de cette approche pour, dans un deuxime temps, justier son choix comme mthode danalyse notre problmatique de recherche.1.1 DnitionLapprochesystmiquenestpasunescience,thorieoudiscipline.Cestunemthodologie permettantderassembleretdorganiserlesconnaissancesenvueduneplusgrandeefcacitde laction (De Rosnay, 1975). A la diffrence de lapproche analytique, lapproche systmique englobe latotalitdeslmentsdusystmetudietsattacheleursinteractionsetinterdpendances.Un systme peut tre dni comme tant un ensemble dlments en interaction dynamique organis en fonction dun but (De Rosnay, 1975). Ce nest pas la somme des lments qui fait un systme mais les interactions entre ces lments. Le concept de systme sous-tend trois notions fondamentales (Walliser, 1977) :-une unit compose de sous-systmes,-uneunitidentiabledansunenvironnementdonnetpossdantdesrelationsaveccet environnement, de telle sorte quelle possde une certaine autonomie,-uneunitsubissantdesmodicationsdansletempstoutenconservantunecertaine permanence.Les deux premires proprits du systme qui ressortent de cette dnition sont louverture et la complexit . Le systme est quali de systme ouvert en entretenant avec lenvironnement des changes dnergie, de matire et dinformation. Le systme est aussi quali de systme complexe du fait dune grande varit de composants ou dlments et de liaisons qui le constituent. Ainsi, lanalyse dun systme consiste dnir les limites du systme modliser, identier 1 Citons quelques incontournables chercheurs sur lapproche systmique comme De Rosnay, 1975 ; Walliser, 1977 ; Le Moigne, 1990tel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010PARTIE I : Chapitre 134les lments importants et les types dinteractions entre ces lments, dterminer les liaisons qui les intgrent en un tout organis () et faire ressortir notamment les variables de ux, variables dtats et les boucles de rtroaction positives et ngatives (De Rosnay, 1975). Chaque boucle est considre sparment pour valuer son inuence sur le comportement des diffrents sous-ensembles dusystme.Leslmentsettypesdeliaisonsdevronttreclasssethirarchiss.Lasimulation tudie le comportement dans le temps dun systme complexe en faisant varier ses paramtres et son environnement.Cettesimulationnedonnejamaisloptimumoulasolutionexacteunproblme pos, elle ne fait que dgager les tendances gnrales du comportement dun systme, ses directions probables dvolution tout en suggrant de nouvelles hypothses.Cettebrveprsentationdelapprochesystmiqueposelafoislesbasesetlesdifcultsdu prsent travail de recherche.1.2 Approche systmique et gestion des ressources en eauLa gestion de leau et de ses usages sinscrit effectivement dans un systme complexe dinuences et de relations conomiques, sociales, culturelles et politiques. Cette complexit se manifeste dans les relations des paramtres de la gestion de leau qui existent des chelles spatio-temporelles diffrentes (logiquehydrologiqueamont-aval,effetsretardsdepollutiondeseauxsouterraines).Pour comprendre la nature de ces relations et identier les facteurs dterminants dune politique quitable et durable de leau, la mthode systmique nous est apparue la plus adapte. Elle rpond parfaitement la problmatique pose, car elle permet de poser les diffrents facteurs et processus intervenant dans le fonctionnement, la structure et lvolution de la gestion intgre de leau. Elle permet, par ailleurs, desinterrogersurleslimitesspatialesetfonctionnellesdusystmegestiondeleauetsurles diffrents sous-systmes qui le composent. Lunit du systme gestion de leau correspond au bassin versant.Lunit du bassin versant aticichoisietantpoursadimensionterritoiredeleauquepoursondcoupagenaturel confrontauxapprochesgologiqueethydrogologique.Leslimitesspatialescorrespondentaux limites hydrographiques. La gestion des ressources en eau sorganise en fonction des ressources en eau disponibles, des besoinsdesusagerssatisfaire,ainsiqueduniveaudamnagementduterritoiredterminantla foislesusagesetlacapacitdexploitationdesressourcesdisponibles.Quatresous-systmesen interactions ont t identis (gure I-1): -sous-systme ressources en eau -sous-systme amnagement du territoire -sous-systme usages -sous-systme acteursCesquatresous-systmessinscriventlintrieurdusystmebassinversantprcdemment voqu. Ils assurent le fonctionnement, la cohrence et lvolution du systme gestion de leau . La gure I-1 montre que le systme gestion de leau est galement inuenc par dautres facteurs : topographiques,gologiques,climatologiques,lecontextesocio-conomique,lenvironnement tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201035Lapproche systme et les conceptsculturel, le cadre politique et lgislatif Ces relations avec son environnement constituent des entres et des sorties pour le systme. Elles inuencent plus ou moins lorganisation du systme, en fonction de ses rsistances internes. Ces entres et sorties peuvent tre de trois natures diffrentes : matire, nergie et informations. On parlera d nergies ou de ux dnergie pour faire rfrence ces changes qui agissent sur lorganisation du systme dans le temps. Ces nergies sont ici de deux ordres :-naturelles (climat, topographie du bassin versant), -anthropiques (socioconomique, technique, culturel, rglementaire, connaissances...).Comme dans tout systme ouvert caractris par des changes avec son environnement,lvolution dusystmesetraduitparunestructuredeplusenplusorganisedansletemps.Lorganisationdu systme dpend des changes dnergies mais aussi des boucles de rtroaction entre les quatre sous-systmes. Ainsi, il est particulirement difcile dtudier la dynamique du systme qui demande une connaissance large sur les changes entre le systme et son environnement et les rsistances propres toute organisation. Cest en ce sens que lapproche systmique constitue un d notre travail de recherche.Une autre notion fondamentale dans ltude de la dynamique du systme est la notion dentropie. Elle exprime la capacit dun systme sadapter et rorganiser sa structure. Les systmes ouverts ont une faible entropie, cest--dire une forte capacit ragir et sadapter aux modications tant internes quexternes. Le systme de gestion des ressources en eau sapparente un systme de faible Systme "gestion de l'eau"EauUsagesActeursAmnagementLiens amontavalAltitude ReliefClimatGologieConnaissanceRglementationTechniqueCulturelSocio - conomiqueSous-systme Sous-systmeSous-systmeSous-systmeComposition du systme : Paramtres internes (appels sous-systmes)Paramtres de Environnement du systme : Interactions entre les Echanges avec paramtres internesl'environnementle sytmeFigure I-1 : Cadre thorique du systme de gestion des ressources en eau sur un territoire de montagne.tel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010PARTIE I : Chapitre 136entropie jusqu prsent. Nous verrons plus loin dans ltude du processus que son contexte le fait fortement voluer. Ltude rtrospective de la dynamique du systme vise dgager des tendances gnralesdvolutionpourpouvoiranticiperdeschangementsdeparamtresconnuscommele changement climatique. En effet, un des enjeux de ce travail est de mesurer la capacit du systme gestion de leau sadapter au changement climatique. Deux volutions sont possibles du fait de sa faible entropie :-soit une adaptation et r-organisation du systme : le systme a les capacits structurelles et fonctionnelles de sadapter aux modications ;-soit une auto-organisation et cration : un nouveau systme merge, faute dadaptation.Cedernierscnarioestassimilunesituationdecrise.Lesconnaissancesacquisesmontrent qu ce jour, le systme de gestion de leau dans les Alpes du Nord na pas encore atteint un tel tat decrisedanslesensolesconitsdusagesactuelssontencorecontenus.Cependantlvolution desbesoinseneau,lesprvisionssurlechangementclimatiqueetsesimpactssurlesressources hydriques ainsi que les effets irrversibles de certains amnagements posent concrtement les limites du systme et remettent en cause son chelle spatiale et organisationnelle. Autrementdit,cetteproblmatiquerenvoieladnitionduseuildenonretourdu systme et ltude de son temps de structuration pour sadapter dans un contexte dincertitude. Une adaptation peut tre prvisible ds lors que les relations avec lextrieur ont t dnies. En revanche uneruptureetunetotaleauto-organisationnepeuventtreabordesquedanslincertitude.Sion peut apprhender un systme tendant vers une rupture, on ne peut dnir prcisment le moment o celui-ci rompt. Lun des objectifs de ce travail de recherche est de limiter autant que possible cette incertitude et dviter que le systme actuel de gestion de leau ne dbouche sur de telles situations de rupture ; et ce, en dcryptant les relations du systme et en proposant une mthodologie de gestion intgre visant faire voluer les pratiques. Ce travail ne prtend pas pouvoir rpondre la totalit des interrogations poses par lapproche systmique, compte tenu du degr actuel des connaissances pour identier ethirarchiser tous les moteurs et les boucles de rtroactions du systme. De plus, notre travail se limite principalement des liens qualitatifs souvent reprochs pour leur imprcision. Cependant, lexercice intellectuel sur la complexit et lincertitude a le mrite de mettre en avant les difcults auxquelles est confront tout gestionnaire responsable de leau en montagne. Il a le mrite de suggrer des orientations dans le domaine de la recherche pour une utilisation plus efciente de lapprochesystmiqueentantquoutildanalyseetdinterventiondansunsystmedegestiondes ressources en eau. Lesparamtresdusystmesontprcissautermedecettepremirepartie(chapitreIII).Elle ncessite en pralable un clairage sur les concepts utiliss. Cest lobjet de la partie suivante.2. LES CONCEPTS2.1 Le concept de ressources Letermederessourcerenvoiedeuxnotionsquilfautdissocier:lutileetlutilis.Siles ressources renouvelables peuvent tre dans certains contextes le prlvement dune activit humaine, tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201037Lapproche systme et les conceptscetermerecouvreaussilaproductiondunco-hydro-gosystme(Weberetal.,1990). Ainsi, la perception de la ressource en tant que support dexploitation devrait tre tendue aux conditions dexistence et de reproductibilit de la ressource.Ces deux perceptions se rejoignent lorsque lactivit anthropique est importante. La perception de la notion de ressource et celle de la notion defcacit de lactivit humaine lie celle-ci sont troitement imbriques. Cette confusion se justie galement dans un systme de gestion considrant que toute ressource est accessible aux usages humains et peut donner lieu une exploitation. Dansledomainedeleau,leconceptderessourceestapparuaveclaprisedeconscience desararetetdelancessitdelvaluerprcismentpourlagreraumieux.Uncoulementde surface ou souterrain ne devient ressource que sil est possible techniquement, conomiquement et cologiquement, de lexploiter tout en le matrisant et en le prservant.Le passage de leau dlment naturel une ressource est directement li aux relations Homme/Nature. Leau, du fait de son cycle naturel, prsente un caractre renouvelable. Mais il est essentieldedistinguerplusieurstypesderessourcesquinontpaslesmmescaractristiquesen termes de disponibilit, de quantit et de qualit : les eaux souterraines et les eaux de surface en tant que ressource ux , et les rserves en tant que ressource stock .2.2 Le concept de gestion DaprsM.G.Durand(1997),lagestionviseenpremierlieumaintenirlefonctionnement dunterritoireenassurantlerenouvellementdesesdiffrentesressourcestantdunpointdevue conomique qu des ns cologiques, concernant aussi bien la faune, la ore, lair, leau et la qualit des sols. La gestion sous-tend ici trois dimensions : une dimension cologique qui recouvre la notion dcosystme, une dimension temporelle et une dimension fonctionnelle (celle du territoire). Elleimpliqueparailleursuneinterventionhumaine:lesacteursduterritoire(producteurs, gestionnaires,utilisateursdesterritoires),incluantainsilesdimensionssociologiques,historiques, gographiques,conomiques,politiques,juridiquesetculturelles.Lareconnaissancedelavaleur patrimoniale diffre de la valeur vnale. Cette nouvelle valeur peut sapparenter la valeur accorde un objet o interviennent les notions culturelles desthtique, daffectif et de raret. Leconceptdegestionintgrelacomplexitdefonctionnementetdvolutiondetout territoire puisquil aborde aussi bien les chanes biologiques, les contraintes physiques et les actions anthropiques. La notion de systme apparat, ce titre, incontournable, pour traiter toute forme de gestion globale. 2.3 La gestion des ressources en eauCe concept rassemble les deux prcdents concepts. Leau en tant que bien commun est cone un ensemble dacteurs (privs et publics) dans le but de rpondre aux besoins du territoire, tout en assurantlerenouvellementetladurabilitdesressources.Pourqueleaudevienneuneressource exploitable,celasupposelaconstructiondunestructureintgrantlafoislesprlvements,le stockageetletransport,adapteauxquantitsdeaudisponiblesetlademandeterritoriale.La gestion doit, de fait, tre adapte aux diffrents types de ressources exploitables (souterraines, surface ou sous forme de stock), tenir compte des interactions entre ces ressources et rpondre aux attentes tel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010PARTIE I : Chapitre 138des usagers. Elle fait donc intervenir un grand nombre dacteurs diffrents niveaux dchelles et de rapports avec le milieu. L. Mermet (1992) dissocie deux modes de gestion : une gestion effective rsultant dun ensemble dactions anthropiques qui affectent lenvironnement, comme une pollution, et une gestion intentionnelle qui est une initiative entreprise par un acteur spcialis pour faire voluer ltat du milieu dans un certain sens. Les concepts prcdemment prsents se rapportent la gestion intentionnelle. 2.4 Les territoires de montagneSans entrer dans les dbats sur la dnition de ce quest la montagne (Veyret et al., 2001), nous nouscontenteronsdapprhenderlamontagnecommelecadredtudedusystmedegestiondes ressourceseneau.Quelquesrfrencesbibliographiquessurlamontagneentantquobjetsont prsentes dans le prochain chapitre. Leterritoiredemontagneestunsystmespatialismettantenrelationdemultiplesacteurs (Lvy et Lussault, 2003) avec une organisation et un fonctionnement propres. Lapproche territoriale delagestiondesressourceseneaurevienttudierlesdynamiquesterritorialesrelativesleau etaudveloppement.Lesvolutionsdmographiques,sociales,conomiques,politiqueset environnementales remettent sans cesse en question la dnition dune bonne gouvernance de leau (Ghiotti, 2007). Nous insisterons sur les spcicits dun territoire de montagne dun point de vue hydrogologique et topographique pour leurs liens et inuences sur les usages, lamnagement et lorganisation des acteurs. Les concentrations spatiales et temporelles des usages ne seront pas sans consquence sur le systme de gestion. Nous insisterons galement sur les logiques amont-aval qui sont plus directes quedansdautresespaces,tantspatialementquetemporellement(forteractivitdesterritoiresde montagne aux modications de son environnement). 2.5 Le concept de gestion intgreEnrponselacomplexitdelagestiondeleauatdveloppleconceptditdegestion intgre . Les premiers acteurs le promouvoir sont les ONG internationales. Elles soulignent toutes cebesoinduneapprocheintgredelagestionprenantencomptetouteslescaractristiques ducycledeleauetsesinteractionsaveclesautresressourcesetcosystmesnaturels()et galement les divers services et fonctions lis leau (Global Water Partnership, 2000). La premire caractristique de ce mode de gestion est la prise en compte de la complexit aussi bien au niveau du cycle de leau quau niveau des usages. Lunit de gestion est devenue celle du bassin hydrographique dans lequel les eaux de surface etleseauxsouterrainessontinextricablementliesentreellesetaveclutilisationdessols (Brschweiler, 2003). La gestion intgre est un processus qui encourage la mise en valeur et la gestion coordonne de leau, des terres et des ressources associes en vue de maximiser le bien-tre conomique et social qui en rsulte dune manire quitable, sans compromettre la durabilit dcosystmes vitaux (Global Water Partnership, 2000). Son objectif afch est double, dune part le partage des ressources entre tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201039Lapproche systme et les conceptsusagers,enconsidrantlesressourcescommesupportdusage;dautrepart,laprservationdes ressources pour elles-mmes en tant que patrimoine commun. En prenant en compte les dimensions conomique,socialeetenvironnementaledelagestiondeleauetdescosystmesaquatiques,la gestion intgre vise long terme le dveloppement durable.LeconceptdelaGIREajouteauconceptdegestiondeleaulesnotionsdorganisation, dinterdpendance,dehirarchisation,decoordinationetdintgration(Reynard,2000).Ilsignie autantuneintgrationhorizontaledelaressource,desusagesetdesacteurs,quuneintgration verticale des diffrentes chelles de gestion (gure I-2). Figure I-2 : Double intgration de la gestion intgre : verticale et horizontale.Source : Reynard, 2000Cette double intgration repose sur la participation et la dcentralisation du systme. Lidentication et la prise en compte des interactions demandent une implication de lensemble des acteurs de leau, ceuxquiparticipentlaprisededcisiondansledomainedegestiondeleauetdessolsetceux qui seront affects par les dcisions (Global Water Partnership, 2009). La participation des acteurs tous les chelons est facilite dans un contexte de dcentralisation o la prise de dcision relve du principe de subsidiarit, cest--dire la plus petite unit possible de gestion. Les acteurs locaux sont, de ce fait, impliqus par leurs rles dans le systme de gestion. La participation de la socit civile joueaussiunrleessentieldanslaplanicationetladnitiondespolitiques.Ellepeutamliorer lefcacit de la prise de dcision en apportant de nouvelles informations et solutions innovatrices (Rseau International des Organismes de Bassins, 2002).La gestion intgre vise une gouvernance efcace de leau. Par gouvernance , on entend la mise en oeuvre effective dallocations et de rglementations socialement acceptables labores dans LONG TERMEMOYEN TERMEPlanificationGestion intgredes ressourcesIntgration desorganes de gestionGestion intgredes utilisationsOBJECTIFSGENERAUXRgulationEvaluationEvaluationCOURT TERMELONG TERMEMOYEN TERMEPlanificationMise en oeuvreSYSTEME INTERNATIONALObjectifs sectoriels Objectifs sectoriels Objectifs sectorielsLONG TERMEMOYEN TERMEPlanificationGestion intgredes ressourcesIntgration desorganes de gestionGestion intgredes utilisationsOBJECTIFSGENERAUXRgulationEvaluationEvaluationCOURT TERMELONG TERMEMOYEN TERMEPlanificationMise en oeuvreSYSTEME NATIONALObjectifs sectoriels Objectifs sectoriels Objectifs sectorielsLONG TERMEMOYEN TERMEPlanificationGestion intgredes ressourcesIntgration desorganes de gestionGestion intgredes utilisationsOBJECTIFSGENERAUXRgulationEvaluationEvaluationCOURT TERMELONG TERMEMOYEN TERMEPlanificationMise en oeuvreSYSTEME REGIONALObjectifs sectoriels Objectifs sectoriels Objectifs sectorielsLONG TERMEMOYEN TERMEPlanificationGestion intgredes ressourcesIntgration desorganes de gestionGestion intgredes utilisationsOBJECTIFSGENERAUXRgulationEvaluationEvaluationCOURT TERMELONG TERMEMOYEN TERMEPlanificationMise en oeuvreIntgration verticaleSYSTEME LOCALObjectifs sectoriels Objectifs sectoriels Objectifs sectorielstel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010PARTIE I : Chapitre 140la concertation avec les acteurs tous les niveaux. Des auteurs comme E. Marcelpoil et V. Boudires (2006)intgrentladimensionterritorialelanotiondegouvernance,andedpasserleseuljeu dacteurs et prendre en compte le contexte institutionnel, socioconomique et politique. La gouvernance couvreaussilamaniredontlespolitiquesrglementairesetdallocationssontappliquesdansla gestiondesressources(naturelles,conomiquesetsociales),etenglobelesinstitutionsformelles etinformellesparlebiaisdesquelleslautoritsexerce.Silagouvernanceestunprincipedebon sens,ilfautposerlesmodesefcacesetpertinentsdegouvernance.Celareposenouveausurla structureetlesprocessusquiinterviennentdanslefonctionnementetlvolutiondetoutsystme, quil soit social, territorial, conomique, etc. Ces modes impliquent la cration dun environnement favorable,facilitantlesinitiativesefcacesdessecteurspublicetprivetlimplicationdesparties prenantesdanslarticulationdesbesoins(GlobalWaterPartnership,2004).Lagouvernancedans lespaysanglo-saxonssappuiesurdesoutilsdeconstructiondeconsensuscommunmentappels policy network , largement dvelopps dans ces pays pour amliorer lefcacit de la gestion des ressources en eau (Glasbergen, 1990). Au-del des dimensions cologiques, sociales et institutionnelles du concept de gestion intgre, la dimension conomique est incontournable. La gestion intgre sappuie, en effet, sur la mise en place de systme de nancement reposant sur la contribution et la solidarit des consommateurs et pollueurs. La question du nancement renvoie la controverse sur le statut de leau, considr soit comme un bien commun, soit comme un bien conomique. Enn, lun des volets essentiels la GIRE est la connaissance du systme. Elle suppose, en effet, de partir des ressources et dadapter les demandes. La connaissance apparat comme le fondement mme de la GIRE pour certains auteurs (Lasserre, Descroix, 2003) ou comme une recommandation pour son application (Global Water Partnership, 2009). Or la connaissance fait souvent dfaut et cette lacune sera mise en avant tout au long du travail de recherche. ConclusionLa gestion intgre constitue une rponse la complexit de la gestion de leau. La question de la pertinence de ce concept renvoie ltude du systme dans sa globalit et de ses interdpendances qui le caractrisent. Lapproche systmique semble la mieux adapte pour comprendre la nature de ces relations et identier les facteurs dterminants dune politique intgre et durable de leau. Autermedecettepartieposantlesdiffrentsconceptsetlesensquenousymettonsdansce travail, il apparat important de sinterroger sur ltat des recherches qui ont t menes sur la gestion intgre, notamment en territoire de montagne. tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201041CHAPITRE2:LTATDELARECHERCHESURLAGESTION INTGRE DES RESSOURCES EN EAU1. DU MODLE FRANAIS UNE RECONNAISSANCE INTERNATIONALE1.1 La rglementation franaise avant-gardisteLa gestion intgre simpose aujourdhui comme une approche incontournable pour une gestion durable, et ce depuis le sommet de Rio en 1992 et les grands forums mondiaux sur leau qui ont suivi. Paradoxalement,ceconceptquiformelabasedelapolitiquedeleaunetrouvepasdednition clairedanslesrglementations.SesprincipesvoqusprcdemmentonttappliqusenFrance depuis une quarantaine dannes avant lapparition et lutilisation du terme intgr qui a ensuite connu des difcults avant de simposer.En effet, la gestion intgre lchelle de bassin versant a t mise en uvre en France dans le cadre de la loi sur leau (1964). Celle-ci, en crant les Agences de lEau en France, a t une premire tentative pour appliquer les principes de la gestion intgre des ressources en eau : une dcentralisation au niveau de chaque bassin versant correspondant trs approximativement aux limites gographiques des agences, des ngociations entre tous les acteurs de leau intrts fortement opposs mais pour la premire fois rassembls autour des problmatiques lies aux ressources en eau, et le partage des cots et des bnces qui se traduit travers les deux rgles mises en place par les Agences (rgle du pollueur/payeur et celle du consommateur/payeur). Le concept proprement dit de gestion intgre est apparu en France dans les rapports prcdant laloisurleaude1992,etenparticulierdansunrapportdugroupedetravailmisenplaceparle ComitinterministrieldelaQualitdelaVieenjuillet1986chargdednirlesactions mener pour mettre en place une gestion intgre et innovante des rivires (Vitali, 2003). Ce rapport prconisait notamment la constitution dun document de synthse dpartemental donnant les lignes directrices de la politique de leau et des rivires dans le dpartement rpondant aux principes mmes de gestion intgre. Il sagissait (i) de prserver le milieu naturel en tant que patrimoine collectif et lment essentiel du cadre de vie, (ii) de permettre la satisfaction au mieux et de faon quilibre des besoins de lensemble des usagers de leau et de la rivire, (iii) et de protger les populations contre les risques lis leau (inondation et insalubrit en particulier). En outre, les contraintes lies la gestion de leau devaient intgrer les diffrentes pratiques et modes de gestion des sols. Ce document a t lorigine de la loi sur leau de 1992 et reste aujourdhui encore avant-gardiste, dans ses principes.Cetteloisurleauajouunrlemoteurdanslarexionetladnitiondesprincipesdune gestion intgre, voire mme de ce concept. Elle gnralise le statut de patrimoine commun de leau considrcommeunbienrescomunisomnium,cest--direunbiennepouvanttreappropri parpersonnemaisdontseullusagepeuttrerpartientrelesriverainsetautresayant-droits.Elle apporte une planication participative unique en crant des outils de planication un chelon local tel-00472979, version 1 - 13 Apr 2010PARTIE I: Chapitre 242(les SDAGE1et SAGE2 ), et des communauts locales de leau pour dmultiplier la gestion intgre bauche trente ans plus tt avec les agences et comits de bassin. Elle contribue galement une plus grande transparence de la politique en rendant publics les documents de planication et les donnes sur la qualit de leau, et en multipliant les procdures soumises enqute publique (autorisations, dtermination des primtres de protection, travaux raliss dans le cadre du SAGE, dtermination des zones dassainissement). Le droit de leau franais a ensuite inspir le lgislateur europen qui impose aux Etats membres de dnir les bassins hydrographiques relevant de leur territoire national etdassocierceux-ciunezonegographiquedebassinspciqueetdtablirunplandegestion pour chaque zone. La Directive Cadre sur lEau (Water Framework Directive 2000/60/EC) cre une obligation de rsultats en imposant aux Etats membres latteinte dun bon tat cologique de leurs eauxcontinentalesdici2015.Elleestdanslacontinuitdelaloifranaisesurleaude1992en faisant de la reconqute de la qualit des milieux aquatiques un objectif en soi (Barraqu, 2001).1.2 Une reconnaissance internationaleSilesprincipesdelaGIREsontlesfondementsdesnouvellesrglementationssurleau,en revancheaucuntextenedonneunednitionclaireduconceptenlui-mme.Cestsurlascne internationalequeleconceptdelaGIREestapparuentantquetel.LapprochedelaGIREat formule pour la premire fois lors de la Confrence Internationale sur lEau et le Dveloppement Dublin en 1992. Elle a ensuite t reprise par les forums mondiaux de leau qui ont suivi. A loccasion du Sommet mondial sur le dveloppement durable de 2002, de nombreux pays se sont engags laborer des plans nationaux de GIRE et defcience de leau. La GIRE est reconnue maintenant comme une des meilleures approches pour une gestion durable des ressources en eau (GWP, 2009). De nombreux pays ont aujourdhui bas leur lgislation nationale sur leau sur le concept de la GIRE,ouilslexprimententdansdesbassinspilotesnationauxoutransfrontaliers.SilaGIREa connu un dveloppement rapide, cest grce la mise en place de multiples rseaux internationaux visant promouvoir ses principes en tant que gestion durable des ressources en eau tous les chelons. Citons plusieurs rseaux :-le Rseau International des Organismes de bassins (RIOB), cr en 1994 Aix les Bains et qui compte ce jour 185 membres ou observateurs dans 68 pays, -lerseaueuropenIWRM.NetetsonactionEra_net,rseaudchangespour lamliorationdeladiffusiondesrsultatsderecherchesurlaGIREetquicompte17 partenaires de 14 pays, ainsi quun certain nombre dobservateurs,-le Global Water Partnership (GWP), rseau international cr en 1996, ouvert toutes les organisations impliques dans la gestion des ressources en eau (institutions gouvernementales despaysdveloppsetenvoiededveloppement,agencesdesNationsUnies,banquesde 1SDAGE : schma directeur damnagement de gestion des eaux. Il xe pour chacun des 6 grands bassins hydrographiques mtropolitains les orientations fondamentales dune gestion quilibre de la ressource en eau (art. 3) dans lintrt gnral et dans le respect des principes de la loi sur leau. Document dorientation de porte juridique, il est revu et approuv par le comit de bassin et prfet coordonnateur du bassin hydrographique tous les 5 ans.2SAGE:schmadamnagementdegestiondeleau.Ilestunoutildeplanicationlocaledclinantlesenjeuxxspar leSDAGEunechellehydrographiqueplusrduitemaispertinente(bassinversantdelordrede2000km3000km).Il se traduit par un arrt prfectoral qui identie sur le territoire local les mesures de protection des milieux aquatiques, xe des objectifs de qualit atteindre, dnit des rgles de partage de la ressource en eau, dtermine les actions engager ncessaires pour atteindre les objectifs xs.tel-00472979, version 1 - 13 Apr 201043Ltat de la Recherche sur la gestion intgre des ressources en eaudveloppement, associations professionnelles, instituts de recherche, ONG, secteur priv),-lerseauinternationalCap-netinitidanslecadreduprogrammedesNationsUnies pour le dveloppement, entre institutions et gestionnaires en partenariat avec le Global Water Partnership etlUNESCO dans le but de renforcer les capacits sur la GIRE,-les rseaux du Programme Hydrologique International (PHI) de lUNESCO, et en particulier le rseau HELP, rseau mondial de bassins versants visant amliorer les liens entre lhydrologie et les besoins de la socit (Bonnell, 2004), -et plus rcemment le rseau GIRE qui est lun des cinq rseaux de recherche thmatique crsdanslecadreduSystmedInformationScientiqueetTechnique(SIST),projetde coopration du ministre franais des Affaires Etrangres.LesONGinternationalesontaussidonndesdnitionsprciseslaGIREdanslecadrede leursmissionsdedveloppementetdchangesdeconnaissancesauniveauinternational.Pourle GlobalWaterPartnership,laGIREnestpasunbutenelle-mme,cestunoutilquipermetde sattaquer aux ds de leau et doptimiser la contribution de leau au dveloppement durable. Elle consiste renforcer des cadres pour la gouvernance de leau an dencourager des prises de dcision appropries en rponse des situations et des besoins changeants (Global Water Partnership, 2004). LOfce International de lEau (OIEAU) lui reconnat trois fonctions principales : (i) la satisfaction desbesoinsrationnelsetlgitimesdesdiffrentescatgoriesdusagers,encohrenceavecun amnagement appropri des territoires de bassin, (ii) la prservation durable des ressources et des cosystmes lis leau,et (iii) la protection contre les risques dinondation, scheresse, rosion (OIEAU, 2001). Le Partenariat Franais pour leau reprend ces trois objectifs dans dautres termes : (i) maintenir le respect des quilibres naturels lis leau en vitant les prlvements excessifs et lespollutions;(ii)dvelopperetmatriserlamobilisationdelaressourceetprvenirlesrisques associs;(iii)etassureruneallocationquitableentrelesdiffrentsusagers.PourlUNESCO, dans ses rapports mondiaux de leau tri-annuels, la GIRE vise une gestion de leau devenue plus efcace et plus quitable grce une coopration accrue (UNESCO, 2006). Quant au Global Water Partnership, il insiste plus sur une intgration entre les ressources en eau et le sol travers un objectif de dveloppement et de gestion coordonne de leau, des terres et des ressources connexes, en vue de maximiser de manire quitable l