Download pdf - Conc Plachetare

Transcript
Page 1: Conc Plachetare

De l’usage des concentrés plaquettairesautologues en application topique

Autologous platelet concentrates for topical useS. Dohan a, A. Dohan a, J. Choukroun b, A. Diss (Assistanthospitalo-universitaire) c, A. Simonpieri d, M.-O. Girard e, D. Dohan(Assistant hospitalo-universitaire) a,f,*a Hôpital Albert Chenevier, 40, rue de Mesly, 94000 Créteil, Franceb Centre anti-douleur, 49, rue Gioffredo, 06000 Nice, Francec LASIO (laboratoire de surface interface en odontologie), Faculté de chirurgie dentaire, Pôleuniversitaire Saint-Jean d’Angély, 24, rue des Diables bleus, 06357 Nice cedex 4, Franced 65, cours Pierre-Puget, 13006 Marseille, Francee 3ter, place de l’Hôtel de Ville, 01100 Bellignat, Francef Laboratoire de Radiologie-Imagerie-Biophysique, Faculté de chirurgie dentaire, 1, rue Maurice-Arnoux,92120 Montrouge, France

MOTS CLÉSColle de fibrine ;Concentré plaquettaire ;Facteurs de croissanceplaquettaires ;Gel de fibrine ;Gel de plaquettes ;PRF (platelet-rich fibrin) ;PRP (platelet-rich plasma)

KEYWORDSFibrin gel;Fibrin glue;Platelet concentrate;Platelet gel;Platelet growth factors;

Résumé La recherche de protocoles favorisant l’hémostase et la cicatrisation est unproblème récurrent dans toutes les disciplines chirurgicales. Les concentrés plaquettaires,en tant que colles biologiques enrichies en cytokines, offrent de nouvelles voies derecherche innovantes. La première génération de ces adjuvants chirurgicaux, généralementdénommés concentrated platelet-rich plasma (cPRP), est issue des technologies des collesde fibrine autologues. Les différentes sortes de cPRP furent testées dans de nombreusessituations cliniques, en particulier en chirurgie orale et maxillofaciale. Mais c’est la secondegénération de concentrés plaquettaires, le platelet-rich fibrin (PRF), qui offre les applica-tions cliniques les plus performantes. En effet, le PRF induit la cicatrisation accélérée destissus grâce au développement d’une néovascularisation efficace, à une fermeture accélé-rée des plaies avec remodelage rapide du tissu cicatriciel et à une absence quasi totale desuites infectieuses. Les concentrés plaquettaires à usage topique, en particulier le PRF,représentent ainsi de nouveaux adjuvants thérapeutiques complémentaires, à conditiond’être capables d’en évaluer de manière impartiale et rigoureuse les effets réels.© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract Research for protocols supporting haemostasis and cicatrisation is a recurrentproblem in all types of surgery. Platelet concentrates, as cytokines-enriched biologicaladhesives constitute some novel research fields. The first generation of these surgicaladditives, generally named cPRP (concentrated platelet-rich plasma), come from theautologous fibrin adhesives technologies. The different kinds of cPRP were tested in manyclinical situations, particularly in oral and maxillofacial surgery. Moreover, the secondplatelet concentrate generation, the PRF (platelet-rich fibrin), offers the more efficient

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (D. Dohan).

EMC-Ondontologie 1 (2005) 141–180

http://france.elsevier.com/direct/EMCODO/

1769-6836/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi: 10.1016/j.emcodo.2005.04.001

Page 2: Conc Plachetare

PRF (platelet-rich fibrin);PRP (platelet-rich plasma)

clinical applications. Indeed, PRF induces accelerated tissue healing owing to the deve-lopment of effective neovascularization, accelerated wound closing with fast cicatricialtissue remodelling and almost total absence of infectious events. Platelet concentratesfor topical use, particularly the PRF, thus represent some new complementary therapeu-tic additives, provided its real effects are impartially and strictly evaluated.© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Introduction

La mise au point d’adjuvants chirurgicaux bioactifscapables de réguler l’inflammation et de potentia-liser la cicatrisation fait partie des grands défis dela recherche clinique. En effet, toutes les discipli-nes médicochirurgicales, en faisant appel aux capa-cités d’autoréparation des tissus, doivent faire faceà des phénomènes de remodelage tissulaire diffici-lement contrôlables et dont les conséquences àl’échelle de l’individu peuvent être dramatiques.Parmi les nombreux protocoles développés, l’uti-

lisation de colles de fibrine est déjà bien documen-tée. Mais leurs applications restèrent pendant long-temps limitées en raison de la complexité de leurmode de production et des risques de contamina-tion de pathologies infectieuses. L’essor de techno-logies sœurs, celles des concentrés plaquettaires, apermis la mise au point de modes de productionsimplifiés et optimisés de ces colles de fibrine.L’une d’entre elle va même jusqu’à mimer unematrice cicatricielle ad integrum : le platelet-richfibrin (PRF).

Protocoles et technologies

Jusqu’en 1997, les concentrés plaquettaires appar-tenaient de façon quasi exclusive aux domainesd’investigation de l’hématologie, principalementdans le cadre de recherches visant à améliorer lestransfusions sanguines dans certaines situationschirurgicales extrêmes, telles que les greffes car-diaques ou les pontages coronariens. Depuis lors,1

ces technologies ont inspiré des travaux toujoursplus nombreux, d’une qualité très hétérogène, surla capacité réelle ou prétendue des cytokines relar-guées par les plaquettes à promouvoir des cicatri-sations plus rapides et mieux coordonnées, tant auplan cutanéomuqueux qu’au sein des sites osseux.À l’origine, ces techniques devaient servir à ob-

tenir une colle biologique à base de fibrine autolo-gue,2 mais le rôle présumé des cytokines plaquet-taires a masqué cet aspect pourtant crucial. D’unecolle biologique « intelligente », nombre de clini-ciens ont dérivé vers le rôle espéré des plaquettespiégées dans un gel de fibrine et massivementactivées au moment opportun.

Définitions

Qu’est-ce qu’un concentré plaquettaire ?À l’origine, les concentrés plaquettaires pouvaientêtre définis comme des produits sanguins faisantfonction de médicament dans certaines pathologiesgraves. En effet, les transfusions plaquettaires sontessentiellement indiquées, en milieu spécialisé,pour la prévention et le traitement des hémorragiesdues à des thrombopénies graves, inférieures à 20 ×109 plaquettes/l, d’origine centrale : aplasie mé-dullaire, leucémie aiguë. Elles demeurent doncd’un usage très limité.Au plan strictement hématologique, le concen-

tré plaquettaire standard est défini comme le sur-nageant enrichi en plaquettes, obtenu après centri-fugation de sang total prélevé sous anticoagulant.C’est ce qui est dénommé plasma riche en plaquet-tes ou platelet-rich plasma (PRP). Chaque unitécontient 0,5 × 1011 plaquettes, associées à desleucocytes et à une petite quantité résiduelle d’hé-maties. Il faut de six à huit unités en moyenne pourtraiter un adulte, ce qui signifie qu’un patientreçoit un mélange d’unités provenant de six à huitpatients. Dans de telles circonstances, le risque detransmission de pathologies infectieuses est doncsérieusement accru.Il existe deux autres protocoles pour améliorer

les concentrations de plaquettes à visée transfu-sionnelle. Ces deux protocoles ont fait l’objet detoutes les attentions lorsque ces technologies onttrouvé des applications hors transfusion.Le concentré unitaire de plaquettes est obtenu à

partir d’un seul donneur dont les plaquettes sontconcentrées à l’aide d’appareils « séparateurs decellules », opérant par soustraction des plaquettespar centrifugation différentielle et réinjectioncontinue des hématies et du plasma durant de1 heure 30 à 3 heures. Le concentré unitairecontient entre 2 et 6 × 1011 plaquettes viables, soitde quatre à douze unités standards. Il permet ainside limiter le risque infectieux d’une transfusionplaquettaire.Le concentré plaquettaire de plasmaphérèse est

également obtenu à partir d’un seul donneur àl’aide d’un séparateur de cellules. La grande diffé-rence réside dans le fait que le patient n’est pasbranché sur la machine : on lui prélève du sang sous

142 S. Dohan et al.

Page 3: Conc Plachetare

anticoagulant, puis ce sang est traité de telle sorteque l’on récupère du plasma acellulaire d’une part,un concentré plaquettaire et un culot d’hématiesd’autre part. Les hématies et le plasma peuventêtre réinjectés. L’inconvénient de cette méthode,c’est qu’elle ne permet pas d’extraire autant deplaquettes que la précédente, puisque le patientne reste pas branché sur la machine. Le concentréobtenu ne contient que l’équivalent de quatre à sixconcentrés plaquettaires standards. Cependant, ceprotocole a l’avantage d’être moins contraignantpour le donneur.Les concentrés plaquettaires ainsi préparés ne

peuvent être conservés que 5 jours, entre 20 et24 °C et en agitation.

Petite histoire naturelle des colles biologiquesLa recherche de protocoles favorisant l’hémostaseet permettant le scellement des berges de plaiesest un problème récurrent dans toutes les discipli-nes chirurgicales. Et l’on est encore bien loin deposséder la colle miracle qui permettrait de scellersans provoquer de nécroses, tout en prévenant lessuites opératoires douloureuses (drains, hémato-mes et autres tiraillements de plaies) et en poten-tialisant une cicatrisation saine et coordonnée. Il yeut cependant quelques avancées significatives, lesplus intéressantes étant issues de l’utilisation deproduits dérivés du sang.Les colles de fibrine ont été décrites pour la

première fois en 1970.3 Elles sont composées defibrinogène polymérisant sous l’action de throm-bine et de calcium. À l’origine, elles étaient prépa-rées à partir de plasma collecté par des banques desang ; cependant, à cause des faibles concentra-tions de fibrinogène collecté dans le plasma, lastabilité et la qualité de ces colles étaient bienmodestes... L’utilisation de colles de fibrine à basede cryoprécipités apporta de bien meilleurs résul-tats. Mais son utilisation se retrouva limitée enraison des risques de transmission de pathologiesinfectieuses.4-6 Plus récemment, des produits descellement à base de fibrine, tels que le Tisseel®

(Baxter Healthcare Corp.), ont été mis sur le mar-ché. Ces produits sont thermotraités, ce qui réduiténormément, mais pas totalement, le risque detransmission de maladies infectieuses.7

Quant aux colles de fibrine autologues, bienqu’elles fussent reconnues comme d’excellentsagents hémostatiques, leur utilisation fut limitéepar la complexité des protocoles disponibles (quinécessitaient des prises de sang préopératoires) etdes coûts de production élevés.8 Lorsque Tayapong-sak décrit son autologous fibrin adhesive (AFA) en1994,2 colle de fibrine autologue lui servant à main-tenir les fragments des greffes osseuses dans une

masse cohérente (afin d’éviter les séquestres os-seux postopératoires), il utilise un sang prélevé 1 à3 semaines avant l’intervention et nécessitant2 jours de manipulations avant d’être prêt à l’em-ploi ! Mais on reconnaît déjà dans cette méthode(similaire aux protocoles utilisés pour fabriquer lescolles de fibrine issues de banques de sang) lesprémices des concentrés plaquettaires, même si àl’époque on cherchait surtout à concentrer le fibri-nogène. Mais curieusement, en cherchant unplasma riche en fibrinogène, Tayapongsak fut lepremier à obtenir, mais il l’ignorait alors, unplasma que l’on décrira plus tard comme riche enplaquettes...Le développement des protocoles simplifiés a

rapidement fait évoluer la situation. C’est l’avène-ment des PRP, les mal nommés. En effet, ce qu’ondésigne sous le nom de PRP, ce sont des concentrésplaquettaires standards de l’hématologie transfu-sionnelle. Or, les protocoles décrits utilisent engénéral une double centrifugation, afin de concen-trer davantage les plaquettes à recueillir. Pourreprendre cette erreur de vocabulaire, bien desnoms ont été proposés : cPRP (concentrated PRP),9

PRGF (plasma rich growth factors),10 etc. Il semblecependant que le terme de cPRP soit le plus simpleet le plus adéquat.Ces protocoles sont fondés sur une idée simple :

la prise de sang se fait juste avant l’intervention, etle prélèvement est immédiatement transformé enconcentré plaquettaire à l’aide d’un séparateur decellules tout droit sorti du laboratoire d’hématolo-gie (les premières années) puis à l’aide de machinesde plus en plus spécifiques, simples et automati-sées (dont l’exemple le plus étonnant est la HarvestSmartPReP®). Le concentré plaquettaire est en-suite combiné avec de la thrombine et du chlorurede calcium afin de provoquer une gélification de lapréparation.En France, privés du droit accordé aux praticiens

américains et du reste de l’Europe de manipulerdes produits sanguins (ajout d’anticoagulants, dethrombine), il fallut réinventer le concept deconcentrés plaquettaires dans le cadre de la loi.C’est ainsi que fut créé le PRF, dont le protocolereste le plus simple pour obtenir des colles defibrine autologues.

CentrifugationLa centrifugeuse est un appareil qui permet dedécanter les différentes particules suspendues dansune solution liquide. Ces particules de nature, detaille et de masse différentes vont se déposer à desdistances différentes du fond du tube et sont de cefait séparées à la fin de l’opération. Pour ce faire,on communique à la solution contenue dans un tube

143De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 4: Conc Plachetare

(dans notre cas, le sang prélevé) une rotation trèsrapide de vitesse angulaire x autour d’un axe. Laforce centrifuge engendre alors un champ G intenseet horizontal, très largement supérieur au champd’attraction terrestre (g), de sorte que le champrésultant est pratiquement confondu avec G(Fig. 1).Bien souvent dans la littérature, les protocoles

de centrifugation sont indiqués en tours par mi-nute. Or, pour évaluer une force centrifuge appli-quée, les valeurs en g seules ne peuvent avoir designification. En effet, une vitesse de rotation seulene reflète pas une force, car celle-ci dépend toutautant de la distance moyenne entre le tube etl’axe de rotation.L’équation fonctionne ainsi :Si V est la vitesse de rotation en tours par se-

conde et L la distance moyenne (en mètres) entrele tube et l’axe de rotation, alors : x = vitesseangulaire = 2 p V radians/s, et G = x2 L ms–2.Par exemple, pour 3 000 tours/min avec L = 4 cm

(centrifugeuse de PRF) : x = 2p × 3 000/60 = 100 p etG = x2 × L = 4 000 m s–2.Or, g (gravitation terrestre) = 10 ms–2, donc G

= 400 g.La conséquence théorique d’une telle équation

est évidente : la force centrifuge exercée n’est pasla même d’un bout à l’autre du tube. Et plus ons’éloigne de l’axe de rotation, plus elle est impor-tante. Il faut donc raisonner en termes de forcemoyenne.

Colles de fibrine, ancêtres des concentrésplaquettaires

Malgré le développement de techniques chirurgica-les antihémorragiques efficaces, la recherched’agents hémostatiques est un problème récurrent.Il en existe une grande variété, qu’il s’agissed’éponges de collagène, de cellulose oxydée ou decolles cyanoacrylates synthétiques. Au sein de no-tre arsenal thérapeutique, les colles de fibrine sont

certainement les mieux documentées ; elles exis-tent depuis plus de 30 ans3 et ont fait l’objetd’essais thérapeutiques dans toutes les configura-tions chirurgicales. Leur principal atout provient deleur nature même. À base de fibrinogène, ellescorrespondent à un mécanisme biologique naturelamplifié de manière artificielle : la polymérisationde la fibrine au cours de l’hémostase.Mais pendant longtemps, elles présentaient l’in-

convénient d’être des produits dérivés du sang :produites par l’industrie pharmaceutique (parexemple, le Tisseel® de Baxter Healthcare Corp.),elles présentaient un risque de contamination vi-rale, minime mais pas nul. Et les outils simplifiésnécessaires à la fabrication de colles de fibrineautologues ne furent développés qu’avec l’essor detechnologies sœurs, celles des concentrés plaquet-taires de type cPRP.

Modus operandiLe mode de fonctionnement des colles de fibrinereproduit les dernières étapes des cascades enzy-matiques de la coagulation, au cours desquelles lefibrinogène est converti en fibrine en présence dethrombine, de facteur XIII, de fibronectine etd’ions calcium.7

Le kit commercialisé par Baxter HealthcareCorp. (Tisseel®) en est le parfait exemple. Il secompose :

• d’un concentré de fibrinogène lyophylisé, asso-cié à de la fibronectine et à du facteur XIII ;

• d’une solution d’aprotinine (inhibiteur des pro-téases) d’origine bovine, à l’activité antifibrino-lytique permettant d’accroître la durée de viedu scellement de fibrine ;

• d’un concentré de thrombine bovine ;• d’une solution de chlorure de calcium.Dans un premier temps, le fibrinogène est mélangéà la solution d’aprotinine, et la solution A ainsiconstituée est réchauffée à 37 °C. Puis, la throm-bine bovine est mélangée à la solution de chlorurede calcium : on obtient alors la solution B.Les solutions A et B sont mélangées au moment

de l’application de la colle grâce à un emboutautomélangeur monté sur une seringue à deux car-touches.Il est important de noter que la rapidité de la

prise de la colle est fonction des quantités dethrombine utilisées pour reconstituer la solution B.En général, on recherche une activité hémostati-que, ce qui implique une prise rapide de la colle etun taux de thrombine élevé. Cependant, il demeurepossible de choisir une prise lente, même si l’onsacrifie alors une grande part de l’intérêt chirurgi-cal de cet adjuvant.Ce dernier point est important pour comprendre

le devenir biologique de la colle.

Figure 1 Les constituants du sang sont décantés selon leurmasse et leur taille. Les plus gros et lourds se déposent au fonddu tube (hématies) tandis que les éléments les plus légersrestent proches de l’axe de rotation (fibrinogène, fibronectineet autres molécules plasmatiques...).

144 S. Dohan et al.

Page 5: Conc Plachetare

De nombreuses applications cliniquesMalgré de considérables variations entre tous lesprotocoles décrits dans la littérature, la plupart desétudes démontrent l’efficacité des colles de fibrinepour contrôler des foyers de saignements lents etdiffus, ainsi que les exsudats lymphatiques, lescollections séreuses et de manière générale tous lessaignements diffus des parenchymes. Cependant,ces colles ne permettent pas le contrôle d’hémor-ragies artérielles ou veineuses importantes, et neremplacent en aucun cas la maîtrise d’une techni-que chirurgicale de contrôle des hémorragies enamont.7

Les colles de fibrine trouvèrent de nombreusesapplications en chirurgie cardiothoracique et vas-culaire. Par exemple, en chirurgie cardiaque, cescolles ont été utilisées avec succès pour le scelle-ment des foyers de saignements microvasculairesdiffus par application en spray.Mais les colles de fibrine sont avant tout connues

pour leurs applications idéales dans le scellementdes berges de plaies et la réapplication des revête-ments cutanés en chirurgie plastique et générale.Les chirurgiens utilisent alors tant les propriétésmécaniques de la colle que les propriétés biologi-ques cicatricielles de la fibrine.Ces colles furent également particulièrement

bien décrites en chirurgie orale et maxillofaciale.Le scellement par colle de fibrine est classique-ment décrit pour réduire le risque d’hématomepostopératoire et accélérer la cicatrisation.6

Au final, de nombreuses disciplines chirurgicalestentèrent l’application de ces colles dans la plupartdes sites opératoires, d’abord chez l’animal puisparfois chez l’homme. Les résultats sont assez hé-térogènes et même parfois controversés : c’est enparticulier le cas en orthopédie ou en neurochirur-gie, où le scellement de dure-mère ou de nerfs enchirurgie réparatrice traumatique ou tumorale de-meure peu documenté.Au final, ces adjuvants demeurent avant tout des

colles dont les principales activités biologiques sontl’adhérence aux tissus et la biodégradabilité.

cPRP, les premiers concentrés plaquettairesà usage topique

Des colles de fibrine aux concentrésplaquettairesFace au risque de transmission des hépatites, lescolles de fibrine commercialisées furent interditesaux États-Unis dès 1978. Dès lors, les tentatives demise au point de colles de fibrine autologues devin-rent de plus en plus nombreuses, mais avec dessuccès mitigés. En effet, il était difficile d’obtenir

par une technique « artisanale » des taux de fibri-nogène aussi élevés que dans un produit industrielde type Tisseel®. Et lorsque la technologie permet-tait la production d’une colle autologue accepta-ble, le praticien se heurtait à des protocoles extrê-mement longs et complexes.2

Ces efforts auraient pu rester vains, mais l’appa-rition d’un nouveau concept thérapeutique permitle brutal essor de ces technologies si longtempsquiescentes : les concentrés plaquettaires, en sur-fant sur l’engouement des cliniciens pour leconcept de thérapie cellulaire par facteurs decroissance, ont relancé la recherche technologiquesur les colles de fibrine autologues. En effet, si cesnouvelles technologies cherchent désormais à ré-colter les plaquettes présentes dans un prélève-ment sanguin, elles reposent toujours sur l’extrac-tion et la polymérisation de la fibrine.11

Les premiers concentrés plaquettaires utiliséscomme adjuvants chirurgicaux ont été arbitraire-ment dénommés PRP, comme les concentrés pla-quettaires standards de l’hématologie transfusion-nelle. Or, les protocoles décrits utilisent en généralune double centrifugation, afin de concentrer da-vantage les plaquettes à recueillir. Parmi les diffé-rents noms proposés pour reprendre cette erreur devocabulaire, le terme de cPRP demeure le plussimple et le plus adéquat.

Différentes technologies du cPRP

Concept

Il existe de nombreux protocoles différents pourmettre en application le concept de cPRP. Mais onpeut schématiquement les diviser en deux fa-milles : les techniques lourdes utilisant des sépara-teurs de cellules d’hématologie et les techniquessimplifiées, commercialisées sous forme de kits,qui utilisent une centrifugation en deux temps pourrécupérer un culot de concentré plaquettaire. Cesderniers systèmes sont de plus en plus automatisés,ce qui a permis le développement exponentiel deleur mise en œuvre clinique.Dans un premier temps, il faut envisager le

concept général de production des cPRP plus qu’unsystème particulier.Le sang veineux est prélevé sous anticoagulant

CPDA (citrate, phosphate, dextrose, adénosine) ouACD-A (citrate-dextrose-adenosine acide). L’utili-sation d’EDTA (ethylene diamine tetraacetic acid)est à éviter car cet anticoagulant fragmente lesplaquettes.12 Le prélèvement sous anticoagulantpermet d’éviter l’activation et la dégranulationplaquettaires.

145De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 6: Conc Plachetare

Une première centrifugation (soft spin) permetla séparation du sang en trois strates distinctes(Fig. 2) :

• au fond du tube, un culot d’hématies et deleucocytes, qui occupe 55 % du volume total ;

• en surface, un plasma acellulaire, principale-ment constitué de molécules plasmatiques cir-culantes (en particulier le fibrinogène) et pau-vre en plaquettes, dénommé platelet-poorplasma (PPP) ou plasma pauvre en plaquettes ; iloccupe 40 % du volume total ;

• entre les deux, une strate où les concentrationsen plaquettes (et en fibrinogène) sont large-ment accrues ; elle ne fait que 5 % du volumetotal et son aspect blanchâtre caractéristiquel’a fait appeler buffy coat (manteau blanchâ-tre) ; c’est elle qui composera la majeure partiedu futur cPRP mais à ce stade, elle est encoredifficilement séparable de façon scientifiquedes autres strates, bien que quelques auteurs sesoient attelés à prouver le contraire13 en allantla recueillir « à vue d’œil », à l’aide d’uneseringue ; Anitua10 a ainsi réussi à décrire et ànommer quatre strates distinctes au sein de lafraction plasmatique obtenue après cette pre-mière centrifugation ; mais une telle manœuvredemeure très empirique.

À l’aide d’une seringue stérile, on aspire le PPP, lePRP et un peu d’hématies (attirées de manièremalencontreuse et systématique au cours de lamanœuvre). Puis l’ensemble est transféré dans unautre tube, sans anticoagulant.Ce second tube subit à son tour une centrifuga-

tion, décrite comme devant être plus longue et plus

rapide que la précédente (hard spin). Elle permetde faire sédimenter les plaquettes au fond du tube,de manière à obtenir à nouveau trois strates dis-tinctes (Fig. 2) :

• quelques hématies résiduelles piégées au fonddu tube ;

• une masse de plasma acellulaire (PPP) occupant80 % du volume total ;

• entre les deux, une couche blanchâtre, le cPRP.À ce stade, il devient aisé de recueillir le cPRP.Avec une seringue, on se débarrasse de la majeurepartie du PPP, de manière à n’en laisser que lestrict nécessaire à la remise en suspension desplaquettes concentrées. Puis on agite l’ensembleet l’on obtient un cPRP en suspension prêt à l’em-ploi.À noter que les hématies piégées au fond du tube

sont, elles aussi, remises en suspension par cettedernière manœuvre, ce qui explique l’aspect rosédu cPRP final.Il ne reste plus qu’à mélanger le cPRP avec de la

thrombine bovine et du chlorure de calcium aumoment de l’application grâce à une seringued’automélange (Fig. 3). Cette dernière étape per-met la gélification du concentré plaquettaire par la

Figure 2 Concept technologique de production de concentrated platelet-rich plasma.

Figure 3 Seringue d’application de gel de concentré plaquet-taire. Le concentrated platelet-rich plasma est mixé à la throm-bine dans l’embout mélangeur, ce qui permet le dépôt d’un gelhémostatique et adhésif à base de fibrine en cours de polyméri-sation.

146 S. Dohan et al.

Page 7: Conc Plachetare

polymérisation du fibrinogène (concentré égale-ment au cours de la préparation du cPRP) qui cons-titue une trame de fibrine aux propriétés hémosta-tiques et adhésives particulièrement intéressantesdans le cadre de nombreuses chirurgies. À noterque la thrombine peut être remplacée par l’ITA, unagent gélifiant synthétique.12

De plus, l’application du cPRP peut se faire engel ou en spray (selon l’embout choisi pour laseringue). Dans les deux cas, la polymérisation dela fibrine se fait en quelques minutes. À noter quepour obtenir un gel plus dense, voire une mem-brane à base de cPRP, il est possible de rajouter duTisseel® à notre mixture.14

Plasmaphérèse

Ce fut la première méthode développée pour obte-nir des concentrés plaquettaires.15 Qu’elle soitfaite à flux discontinu (c’est-à-dire que le patientreste connecté à la machine qui lui filtre le sangjusqu’à obtenir le nombre de plaquettes souhaité)ou à partir d’une poche de 500 ml de sang prélevésous anticoagulant, le concept reste le même. Ce-pendant, ce protocole issu des techniques transfu-sionnelles est lourd et compliqué à mettre en œu-vre (Fig. 4). De ce fait, même si de nombreusesétudes y font encore référence,16,17 il n’est quetrès rarement utilisé en clinique.Une ultracentrifugation différentielle (3 000 g

en général) sépare dans un premier temps leplasma acellulaire (PPP) des éléments figurés dusang et l’évacue, soit vers une poche qui peut être

réinfusée plus tard, soit directement vers le patient(si celui-ci est encore connecté à la machine).Puis, un lecteur optique constate que la centri-

fugation commence à séparer un sérum beaucoupplus blanchâtre (le buffy coat) correspondant à unconcentré plaquettaire (cPRP), et fait basculerautomatiquement le liquide décanté vers une po-che différente, tout en ralentissant la vitesse decentrifugation (pour permettre un clivage précisentre cPRP et culot d’hématies).Enfin, dès que le lecteur optique détecte les

premiers éléments rouges, il sait qu’il s’agit duculot d’hématies et le transfère soit vers une troi-sième poche qui peut être réinfusée plus tard, soitdirectement vers le patient (si celui-ci est encoreconnecté à la machine).Cette méthode permet d’obtenir 30 à 40 ml de

cPRP à partir de 450 ml de sang total. À fluxdiscontinu, on peut même récolter jusqu’à 300 mlde cPRP.À noter que l’on retrouve toujours une petite

quantité d’hématies dans notre poche de concentréplaquettaire, liée aux difficultés techniques d’uneséparation parfaite des différentes strates de sédi-mentation obtenue par centrifugation. C’est ce quiexplique que, une fois remis en suspension (dans duPPP résiduel, par exemple), le concentré plaquet-taire prenne un aspect rosé.

Protocoles Curasan et Friadent-Schutze :une application basique du conceptIls utilisent tous les deux des centrifugeuses delaboratoire standards et leur jeu de tubes de 10 ml

Figure 4 La plasmaphérèse utilise un séparateur de cellules automatisé.

147De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 8: Conc Plachetare

remplis de sang citraté (anticoagulant CPDA). Lesressemblances entre les deux systèmes sont crian-tes ; elles vont jusqu’aux temps et aux vitesses decentrifugation :18,19

• une première centrifugation de 10 minutes à2 400 tours/min (soit environ 400 g selon noscalculs), permettant de séparer le sang total enPPP, PRP et culot d’hématies (Fig. 5) ;

• à l’aide d’une seringue, on aspire le PPP, le PRPet un peu d’hématies ; puis l’ensemble esttransféré dans un autre tube, sans anticoagu-lant ;

• une deuxième centrifugation de 15 minutes à3 600 tours/min (soit environ 600 g selon noscalculs) permet de faire la séparation entre PPPet cPRP (Fig. 6) ; à noter que les quelqueshématies résiduelles aspirées au cours du trans-fert se déposent au fond du tube.

Il ne reste plus qu’à retirer la majeure partie duPPP. Une quantité résiduelle de PPP est utiliséepour remettre les plaquettes en suspension : enthéorie, 0,4 ml (Curasan) ou 0,8 ml (Friadent).Seulement, il faut noter que ce volume est trèsvariable d’un auteur à l’autre et que, de surcroît, ilse mesure toujours « à vue d’œil »... Pourtant, enfonction du volume utilisé pour remettre le cPRP ensuspension, les concentrations de plaquettes mesu-rées varient énormément, ce qui en dit long sur lafiabilité des mesures, qu’il s’agisse de comptage deplaquettes ou d’évaluation de concentrations encytokines plaquettaires, réalisées au cours desnombreuses études sur le sujet.Il ne reste plus qu’à placer le cPRP dans une

seringue d’automélange couplée à de la thrombine

bovine (et du chlorure de calcium), pour obtenir ungel utilisable cliniquement.

« Platelet concentrate collection system » (PCCS)®

de 3I : vers des machines plus spécifiquesLe PCCS® reprend les mêmes principes, si ce n’estqu’il apporte un début d’automatisation du proto-cole.20 C’est une centrifugeuse classique aménagéepour recevoir un dispositif adapté à la productionde cPRP : deux poches plastiques solidarisées parun anneau (qui permet leur mise en place dans lacentrifugeuse) et reliées par une tubule clampée.Soixante millilitres de sang citraté sont transfé-

rés dans la première poche et le dispositif estcentrifugé à 3 000 tours/min (soit près de 800 gselon nos évaluations) durant 3 minutes 45 secon-des, afin d’obtenir la première séparation en troisstrates du sang total.Le praticien retire le clamp de la tubule et, à

l’aide d’une seringue, il insuffle de l’air par unevalve dans la première poche, ce qui a pour effet dechasser le liquide le plus superficiel (cPRP et PPP)vers la seconde poche via la tubule ouverte. Lamanœuvre est accomplie lorsque les premières hé-maties pénètrent dans la seconde poche.La tubule est à nouveau clampée et on lance une

deuxième centrifugation à 3 000 tours/min durant13 minutes, afin d’obtenir la sédimentation desplaquettes au fond de la seconde poche.Le clamp est à nouveau retiré, de l’air est insuf-

flé par une valve dans la deuxième poche et le PPPest évacué en sens inverse vers la première poche.Il ne reste plus alors, dans la deuxième poche,

que le cPRP, quelques hématies résiduelles, etsuffisamment de PPP pour remettre l’ensemble ensuspension. Le concentré plaquettaire est alorsprêt à être placé dans une seringue à emboutautomélangeur aux côtés de la thrombine et duchlorure de calcium.Cette technique correspond au premier pas de

l’industrie médicoscientifique pour fournir aux pro-fessionnels de santé des machines et des protocolessimplifiés parfaitement adaptés aux conditions del’exercice chirurgical. Cependant, ce protocole de-mande encore plusieurs interventions humaines dé-licates, ce qui disparaît avec la SmartPReP®.

Harvest SmartPReP® ou la machine à faire du cPRPC’est la méthode la plus évoluée pour produire ducPRP. Au point que cette machine ne peut servirqu’à ça. Automatisée et facile d’utilisation, cettecentrifugeuse fait figure de leader dans le domainede la production de concentrés plaquettaires àvisée chirurgicale.16

Son fonctionnement repose sur une idée astu-cieuse : un dispositif constitué d’une double cham-

Figure 5 Une première centrifugation permet la séparation dusang en trois strates distinctes.

Figure 6 Une seconde centrifugation permet de concentrer lesprécieuses plaquettes au fond du tube, ce qui facilitera desurcroît leur prélèvement.

148 S. Dohan et al.

Page 9: Conc Plachetare

bre de centrifugation, l’une pour le sang et l’autrepour le plasma, permettant une décantation et uneséparation automatique des différentes strates dusang centrifugé (Fig. 7).

Comment produire des membranes de cPRP ?La technique décrite par Sonnleitner14 consiste àmélanger la fraction de concentré plaquettaire aufibrinogène composant la colle biologique Tisseel®,selon un rapport de 1/1. Le gel activé de cPRP peutalors être transformé en membrane biorésorbableen 5 à 7 minutes. Pour cela, il suffit de placer 2 à3 ml de gel sur une surface lisse. Après 5 à 7 minu-tes, ce gel peut être récupéré sous la forme d’unemembrane de fibrine chargée en plaquettes.Une autre technique consiste en l’utilisation de

membranes synthétiques dont la texture permetl’absorption du gel de cPRP. Cela permet de rendreces membranes bioactives par ajout de facteurs decroissance.

De l’empirisme de ces technologies

Limites de la centrifugation

Il faut avant tout bien comprendre que la centrifu-gation ne peut être considérée comme une mé-thode de séparation précise et fiable. Elle agitselon un gradient de sédimentation des différentséléments du sang, ce qui signifie que les plaquettesne sont jamais concentrées massivement en un seulpoint du tube : leur nombre par microlitre est justestatistiquement plus élevé dans la zone intermé-diaire, ou zone tampon, entre la masse des héma-ties (éléments les plus lourds et volumineux dusang) et le plasma acellulaire (chargé de moléculesplasmatiques telles que le fibrinogène, les facteursde coagulation, les cytokines, la fibronectine...).Seulement, il faut être conscient que la majeurepartie des plaquettes restent piégées au sein duculot d’hématies...14

Figure 7 L’ingénieuse SmartPReP® est entièrement automatisée. À partir d’un prélèvement de 60 ml de sang citraté, elle permetd’obtenir, après resuspension dans le platelet-poor plasma résiduel, environ 8 ml de concentrated platelet-rich plasma prêt àl’emploi. À noter que le programme standard de préparation (en trois étapes à trois vitesses différentes) utilisé par cette machine nedure que 12 minutes et qu’il est impossible d’en modifier les paramètres (temps ou vitesse).

149De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 10: Conc Plachetare

Afin d’accroître cette concentration statistiqueen un point précis du tube, il faut pouvoir affiner laséparation des éléments figurés du sang (hématies,leucocytes, plaquettes). Pour cela, il n’existequ’une seule possibilité : accroître la force decentrifugation appliquée au prélèvement sanguin.C’est ainsi que les séparateurs de cellules utilisésen hématologie fonctionnent : ils centrifugent enmoyenne à 3 000 g... L’inconvénient d’une telleméthode, c’est qu’elle augmente considérable-ment l’activation des plaquettes, qui relarguentalors ces précieux facteurs de croissance que l’oncherche précisément à concentrer .17 Or, évidem-ment, il faut s’attendre à en perdre la majeurepartie dans le plasma acellulaire qui est presquetotalement éliminé dans ces protocoles de plasma-phérèse (le plasma acellulaire est éliminé en pre-mier).C’est ainsi que tous les protocoles couramment

utilisés pour obtenir du cPRP s’appliquent à main-tenir des forces comprises entre 160 g et 800 g lorsde la première centrifugation. À 400 g, le pourcen-tage d’activation des plaquettes est de l’ordre de5 % seulement,21 contre entre 40 et 70 % à 3 000g.17 Cependant, l’une des premières études sur lesbénéfices du cPRP, qui démontrait alors les bien-faits présumés de ces gels de plaquettes pour lamaturation des greffes osseuses,15 fut réalisée avecdes vitesses initiales atteignant, selon nos évalua-tions, plus de 1 200 g. Et pourtant, dès 1 650 g,le pourcentage d’activation atteint entre 20 et40 %...17

De même, le temps de centrifugation devraitavoir un rôle prépondérant. Cependant, là encore,on découvre dans la littérature des temps allant de3 minutes 45 secondes20,22 à 20 minutes9 en pre-mière centrifugation. Quant aux associations vi-tesse et temps, elles ont presque toutes été tes-tées : 6 minutes à 160 g,13 10 minutes à 160 g,21

20 minutes à 205 g,9 3 minutes 45 secondes à800 g...20

Il est en réalité strictement impossible de fonderla moindre corrélation précise et sérieuse entrecritères de centrifugation et qualité du cPRP (cf.infra), ceci étant dû aux grandes variations interin-dividuelles de constitution du sang et au manque dedéfinition des technologies de centrifugation,puisqu’on leur cherche une fonction qui n’est pas laleur. Il n’en demeure pas moins que, tant que l’onreste dans des forces modestes (en moyenne 400 g),on peut espérer ne pas trop stresser les plaquettes.De même, les temps de centrifugation se doiventd’être suffisants pour permettre la séparation deséléments sanguins et il semble couramment admisque l’on obtient des séparations nettes en unedizaine de minutes.

À noter que le problème est légèrement diffé-rent en cas de deuxième centrifugation : en effet,on n’a alors plus qu’à séparer tous les élémentsfigurés résiduels (les plaquettes, mais aussi quel-ques hématies et leucocytes) de la masse du plasmaacellulaire. Tout en maintenant des forces modes-tes pour ne pas endommager les plaquettes, unesimple centrifugation permet d’obtenir de bonsrésultats. Elle est en général décrite comme devantêtre nécessairement plus longue et plus rapide quela première, mais en réalité, et la comparaison desdifférents protocoles le démontre (certains préco-nisant des paramètres que l’on retrouve souvent enpremière centrifugation), on peut conserver lamême force et le même temps.Tout ceci met en évidence un point crucial : la

centrifugation, malgré une base physique parfaite-ment scientifique (loi d’hydrodynamique de Stoke),s’est vu affublée, de par la complexité des liquidesbiologiques, de fonctions partiellement empiri-ques, tout autant fondées sur l’expérience que surla physique des fluides. Il est donc très présomp-tueux de vouloir lui attribuer la capacité deconcentrer avec discernement des plaquettes via-bles et leur précieux contenu ad integrum.

Quelle concentration de plaquettes doit-onchercher à obtenir ?Cette question fut l’objet d’un très grand nombred’études. Sur ce sujet, toutes les machines et tousles protocoles ont été comparés, et il est totale-ment inutile d’en faire une liste exhaustive. Celapour une simple raison : dans un sang humain totalsain, les concentrations plaquettaires par microli-tres peuvent osciller de 150 000 à 450 000, ce qui apour conséquence de faire varier les concentrationsplaquettaires au sein des cPRP de 50 000 à plus de2 000 000. Autrement dit, il n’existe aucune corré-lation entre les concentrations plaquettaires mesu-rées dans le sang total et celles obtenues dans lecPRP issu de ce même sang.23

Même en utilisant un séparateur de cellules àflux discontinu emprunté aux hématologues (mé-thode nettement plus précise que les systèmessimplifiés), on a des variations interindividuellesallant de 600 000 à 2 500 000 plaquettes/ll au seindu cPRP ainsi produit. Et aucune corrélation fiableavec l’âge et le sexe du donneur n’a pu être mise enévidence.23 Certains ont donc défini le cPRP commeun concentré à plus d’un million de plaquettes/ll,dans la mesure où ils considèrent avoir eu desrésultats cliniques significatifs à des concentrationsde cet ordre.24

Les chiffres cités précédemment ne servent qu’àdonner des ordres d’idée. Et cela nous amène àévoquer ce redoutable écueil : en cherchant à

150 S. Dohan et al.

Page 11: Conc Plachetare

compter minutieusement des plaquettes et à com-parer des protocoles très proches, on finit partrouver des écarts significatifs qui n’ont aucunsens. C’est là tout le problème de la significationque l’on peut accorder aux résultats chiffrés et lapart de l’interprétation humaine dans le raisonne-ment scientifique.Au final, presque tout le monde a oublié l’origine

de ces technologies : les colles biologiques. Etpersonne n’est en mesure de dire si l’effet positifdes concentrés plaquettaires, s’il y en a, est dû auxplaquettes ou à la colle de fibrine autologue pro-duite simultanément.

Quelles corrélations avec les précieuses cytokinesplaquettaires ?Si l’on cherche à concentrer des plaquettes, c’estpour les cytokines qu’on espère les voir relarguer.Là encore, de nombreuses études ont tenté d’enévaluer les concentrations. Cependant, quel inté-rêt de mesurer des concentrations en cytokinesplaquettaires si l’on ignore le pourcentage de pla-quettes activées au cours de la préparation duconcentré ? En effet, si les cytokines comptabiliséesviennent des plaquettes, plus l’activation est im-portante, plus la quantité de cytokines mesurée estélevée. Mais comment connaître avec précision leniveau d’activation plaquettaire ?Pour cela, il existe un marqueur très fiable :

l’antigène CD 62. Bien peu de publications y fontréférence17,21 et pourtant il démontre que, enfonction de la vitesse de centrifugation, on a unpourcentage d’activation plaquettaire qui évolueénormément : de 5 % à 400 g à plus de 60 % à3 000 g.Dans de telles circonstances, quel crédit donner

à des mesures de concentration de cytokines sid’une méthode à l’autre, de par les nuances deprotocoles, on obtient des activations plaquettairestrès variables. Ces concentrations n’ont donc aucunsens au plan technologique. Si l’on rajoute à celades variations interindividuelles au moins aussicriantes que pour le nombre de plaquettes, onimagine bien le flou complet qui règne dans cedomaine.La conséquence de toutes ces remarques se dé-

couvre dans la littérature : aucune corrélation n’apu être mise en évidence entre concentrations encytokines du cPRP et concentrations plaquettairesdu sang total ou même du cPRP.22,25 Aucune corré-lation également entre concentrations de cytokinesdu cPRP et l’âge ou le sexe du donneur.25

Au final, la seule certitude concernant les cyto-kines plaquettaires, c’est qu’elles sont toutes mas-sivement relarguées au moment de la gélification,lorsque thrombine et chlorure de calcium provo-

quent l’activation massive de toutes les plaquettesdu cPRP (ce qui est confirmé par la recherche del’antigène CD 62).21 Malheureusement, à cemoment-là, la formation du gel rend impossible lesdosages de ces cytokines (la lecture optique destests enzym-linked immunosorbent assay [ELISA] nepeut se faire que dans un liquide de faible visco-sité).De plus, il faut bien comprendre que, quelle que

soit la quantité de plaquettes ou de cytokines quel’on piège dans la colle de fibrine, personne n’esten mesure de démontrer que ces ajouts soientsuffisants pour avoir les effets biologiques escomp-tés.

Technologie du PRF

Modus operandiLe PRF a été mis au point en France par Choukrounet al.26 Cette technique ne nécessite ni anticoagu-lant, ni thrombine bovine (ou tout autre agentgélifiant). Il ne s’agit que de sang centrifugé, sansaucun ajout, ce qui lui permet d’esquiver toutes lesrestrictions des lois françaises liées à la réimplan-tation de ce qui pourrait être considéré comme undérivé de produit sanguin.Le protocole est très simple : un prélèvement de

sang total est réalisé dans des tubes de 10 ml sansanticoagulant qui sont immédiatement centrifugésà 3 000 tours/min (soit environ 400 g selon noscalculs) durant 10 minutes.L’absence d’anticoagulant induit l’activation, en

quelques minutes, d’une grande partie des plaquet-tes contenues dans le prélèvement au contact desparois du tube, et le déclenchement des cascadesde réaction de la coagulation. Le fibrinogène estdans un premier temps concentré dans la partiehaute du tube, avant que la thrombine circulantene fasse son effet et ne le transforme en fibrine. Onobtient ainsi un caillot de fibrine en plein cœur dela masse de plasma acellulaire (Fig. 8), avec unmaximum de plaquettes piégées au sein des maillesde fibrine.

Figure 8 La centrifugation de sang total, immédiatement aprèsle prélèvement, permet la constitution d’un caillot de fibrinestructuré et résistant au cœur du plasma acellulaire et s’éten-dant jusque dans les premières strates du culot d’hématies.

151De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 12: Conc Plachetare

La réussite de cette technique repose entière-ment sur la rapidité du prélèvement et du transfertvers la centrifugeuse : en effet, sans anticoagulant,le sang prélevé commence à coaguler dès qu’ilentre en contact avec le verre du tube. Or, il fautau moins quelques minutes de centrifugation pourconcentrer le fibrinogène dans la zone médiane etsupérieure du tube, seule solution pour obtenir uncaillot de fibrine chargé de sérum et de plaquettesutilisable cliniquement. Si le temps mis pour préle-ver le sang et lancer la centrifugation est tropimportant, c’est l’échec, et la fibrine polymérisede façon diffuse dans le tube. On n’obtient qu’unamas flasque et sans consistance de sang vague-ment centrifugé.Au final, le protocole PRF permet donc de re-

cueillir un caillot de fibrine chargé de sérum plas-matique et enrichi en plaquettes. Et en chassant lesfluides piégés dans cette trame de fibrine, on ob-tient une membrane très résistante à base de fi-brine pontée (Fig. 9).La grande particularité de cette méthode pro-

vient de l’absence d’anticoagulant : elle déclenchedonc inexorablement l’activation massive d’unegrande partie des plaquettes, et ainsi le relargagede toutes les cytokines qu’elles contiennent. Et lesétudes les plus récentes (par dosage comparatif)semblent mettre en évidence que ces moléculessolubles sont massivement piégées dans les maillesde fibrine du PRF.27-29

Plaquettes et PRFDes études hématologiques préliminaires nous ontdémontré qu’il ne subsistait aucune plaquette nidans le surnageant acellulaire (PPP), ni dans leculot d’hématies. Quelques analyses histologiquessuffirent à déterminer le positionnement des pla-quettes au sein des différentes strates du tube :elles s’accumulent dans la partie basse du caillot defibrine, principalement à la jonction entre la por-tion contaminée par les hématies (thrombus rouge)et le caillot de fibrine PRF à proprement parler(Fig. 10,11). Cette dernière observation renforcel’idée que la portion rouge à l’extrémité basse duPRF serait non seulement utilisable, mais mêmecertainement plus efficace encore que la partiehaute (Fig. 12).Enfin, il est très intéressant de noter que le gel

de fibrine PRF est imbibé de glycosaminoglycanescirculants et plaquettaires (héparine, acide hyalu-ronique...). Leur aspect en histologie au bleu al-cyan (Fig. 13) suit l’architecture fibrillaire de lafibrine, ce qui laisse présager que ces chaînonsglycaniques sont incorporés au sein même des poly-mères de fibrine. Les glycosaminoglycanes ont uneforte affinité pour les petits peptides circulants

(tels que les cytokines plaquettaires...) et présen-tent une grande capacité à guider les migrationscellulaires et l’ensemble des phénomènes de cica-trisation.

Biologie associée

L’engouement brutal pour les préparations à basede concentrés plaquettaires fait souvent appel auxdonnées fondamentales de la recherche en biologiecellulaire pour se justifier. Cependant, si l’on étu-die en détail les idées fondatrices de ces technolo-gies, il est intéressant de constater l’importancedes flous, les omissions, voire des contradictions.Avant d’entrer en détail dans les biologies que

l’on peut associer aux différents types de prépara-tion (cPRP ou PRF), il semble nécessaire de rappe-ler quelques notions élémentaires.30

Fibrine : molécule clé des concentrésplaquettaires

Biologie moléculaire et mécanismesélémentaires

Qu’est-ce que la fibrine ?La fibrine est la forme activée d’une moléculeplasmatique dénommée fibrinogène. Cette molé-cule fibrillaire soluble circule dans le plasma san-guin à une concentration de 2 à 4,5 g/l. C’est unemolécule de 46 nm de long dont la masse molécu-laire est de 340 kDa. Elle est faite de six chaînespolypeptidiques identiques deux à deux : deuxchaînes aA, deux chaînes bB et deux chaînes c. Leschaînes identiques se lient par leur extrémitéN-terminale au centre de la molécule au niveau dudomaine globulaire E. Les deux extrémités de lamolécule contenant les extrémités C-terminalessont des domaines globulaires, appelés domaines D.Le domaine E est lié aux domaines D par des seg-ments où les trois chaînes sont spiralées (Fig. 14).31

Conclusion

La recherche de colles biologiques perfor-mantes a donc amené au développement detechnologies parallèles dont l’engouementsemble intarissable. Et si beaucoup de succèscliniques sont mis en avant, il n’en demeure pasmoins une kyrielle de modes de préparation deconcentrés plaquettaires.Pour comprendre leur mode d’action, il est

nécessaire de se plonger plus avant dans lesmécanismes fondamentaux qui les régissent etessayer d’éclaircir la biologie qui leur estassociée.

152 S. Dohan et al.

Page 13: Conc Plachetare

Le fibrinogène est massivement présent à lafois dans le plasma et les granules a des plaquettescar il joue un rôle déterminant dans l’agrégationdes plaquettes entre elles au cours de l’hémostase :il se transforme en une véritable colle capablede consolider l’amas plaquettaire dans un pre-mier temps, puis de former un véritable mur de

protection le long d’une brèche vasculaire au coursde la coagulation. En fait, le fibrinogène est lesubstrat final de toutes les réactions de coagula-tion : protéine soluble, il est transformé en fibrineinsoluble par la thrombine. Le gel ainsi forméconstitue la première matrice cicatricielle du sitelésé.

Figure 9 La centrifugeuse PC02® de Process (A) permet la production simultanée de huit caillots de fibrine platelet-rich fibrin (PRF)(B). Le PRF correspond à la strate solide intermédiaire entre le culot d’hématies (rouge) et le plasma acellulaire surnageant (C). Pourrécolter le PRF, il suffit de le sortir du tube, de le séparer avec un ciseau des hématies adhérentes (D, E). Une fois comprimé, le caillotPRF devient une membrane souple et solide prête à l’emploi (F).

153De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 14: Conc Plachetare

Fibrine et hémostaseL’hémostase pourrait presque se résumer au colma-tage d’une brèche vasculaire à l’aide d’un lit defibrine, matrice initiale de tout processus de cica-trisation.La coagulation plasmatique est la succession des

réactions enzymatiques qui aboutissent à la forma-

tion du réseau de fibrine qui enserre l’amas deplaquettes fixées sur une brèche vasculaire. Ellefonctionne comme une cascade des réactions d’ac-tivation des douze facteurs de coagulation entreeux jusqu’à constituer de la thrombine.Deux voies d’activation de la coagulation sont

classiquement décrites : la voie extrinsèque et lavoie intrinsèque qui se rejoignent au niveau del’activation du facteur X. Dans les deux cas, la voiefinale commune correspond à l’activation du fac-teur X. Ce facteur, une fois activé, s’intègre dansun complexe appelé prothrombinase qui com-prend également le facteur V activé, des phospho-lipides de la surface cellulaire et du calcium. Cecomplexe protéolyse la prothrombine en throm-bine. Et la thrombine clive alors le fibrinogènesoluble en monomère de fibrine permettant l’ini-tiation de la polymérisation du gel de fibrine.La thrombine devient alors le nœud de régula-

tion de la coagulation :• elle amplifie immédiatement sa propre forma-tion en recrutant et activant les plaquettes pas-sant à proximité, et en amplifiant les réactionsqui mènent à sa propre production ;

• elle peut aussi activer d’autres types cellulaires,en particulier les leucocytes et les cellules en-dothéliales ; en fait, c’est elle qui déclenche lespremières étapes de l’inflammation, du remo-delage et de la cicatrisation.

Cette dernière remarque pourrait être considéréecomme particulièrement troublante : en effet, onajoute un important volume de thrombine pourfaire gélifier le cPRP. Seulement personne n’est enmesure de dire si ces molécules n’ont pas autantd’effets que le concentré plaquettaire lui-même.Lorsque la concentration de thrombine formée

atteint un certain seuil, la thrombine convertit lefibrinogène soluble en fibrine insoluble. Cette fi-brine forme alors une solide enveloppe autour del’agrégat de plaquettes pour réaliser le caillot.Une molécule de thrombine peut permettre la

polymérisation de 1 000 fois son poids de fibrino-

Figure 10 La partie inférieure du gel de fibrine platelet-richfibrin est occupée par des rainures blanchâtres qui apparaissentcomme des agrégats de fragments cellulaires : ce sont nosplaquettes qui s’accumulent et constituent un buffy coat (colo-ration hémalun-éosine, G = 52 ×).

Figure 11 La partie supérieure du gel de fibrine platelet-richfibrin est totalement vierge de structures cellulaires (colorationhémalun-éosine, G = 52 ×).

Figure 12 Le caillot de fibrine obtenu selon le protocole PRO-CESS peut se décomposer en trois parties : un thrombus rouge aucontact du culot d’hématies, un gel de fibrine acellulaire et unréseau de colonnes blanchâtres qui correspondent à l’accumu-lation des plaquettes.

Figure 13 Distribution des structures glycaniques au sein ducaillot platelet-rich fibrin (coloration bleu alcyan pH 1,G = 52 ×).

154 S. Dohan et al.

Page 15: Conc Plachetare

gène. Enfin, il est important de noter le rôle fonda-mental du calcium en tant que cofacteur au coursdes cascades de réactions enzymatiques menant àla constitution du gel de fibrine.La fibrinolyse est la dernière étape de la coagu-

lation, lorsqu’une résorption graduelle du mur defibrine permet un retour du site lésé à une norma-lité physiologique. Cette destruction du maillagede fibrine est régulée par l’avancée des travauxcellulaires : le remodelage et la cicatrisation.En effet, la dissolution progressive de la fibrine

se fait sous l’action de la plasmine, une sérine-protéase issue de l’activation du plasminogèneplasmatique. Or, ces mécanismes sont soumis à desinhibiteurs extrêmement puissants qui maintien-nent un équilibre fibrinolytique très poussé, detelle sorte que la fibrinolyse n’agisse que là où elleest nécessaire.

Mécanismes biochimiques de la constitution du gelde fibrineLa thrombine clive d’abord l’extrémité N-terminaledes chaînes aA du fibrinogène. Cela démasque alorsles premiers sites de polymérisation du domaine E,qui se lient de façon non covalente aux domaines Dde monomères adjacents. Ce même phénomène sedéroule dans des chaînes bB du fibrinogène.L’établissement progressif de ces liaisons

(liaisons D-E) non covalentes entre monomères per-met la constitution d’une fibrille de fibrine, puis deprotofibrilles double-brin et enfin d’un réseau tri-dimensionnel qui gélifie la solution.31

Cependant, ce premier polymère de fibrine estinstable, soluble dans l’urée. Il va être stabilisé parun dernier facteur de la coagulation, le facteur XIII(facteur stabilisant la fibrine [FSF]) qui est activépar la thrombine. Ce facteur XIIIa permet aux mo-nomères de se lier entre eux de façon covalente parleurs domaines D (liaison D-D), l’alignement desmonomères réalisé par les liaisons non covalentes

(liaisons D-E) ayant permis le rapprochement de cesdomaines D (Fig. 15).Le réseau tridimensionnel de fibrine est alors

insoluble et emprisonne les globules rouges : lethrombus rouge définitif est ainsi formé.

Fibrine et cicatrisationSuite à une lésion tissulaire, le caillot de fibrine vaêtre rapidement colonisé par des cellules inflam-matoires, des fibroblastes, des cellules endothélia-les qui vont le remodeler en un tissu de granulationpuis en tissu conjonctif mature.32

En effet, si la matrice de fibrine constituée lorsde la coagulation permet d’obturer la brèche vas-culaire, elle constitue également un guide essentielpour orchestrer cette cicatrisation. Par sa configu-ration spatiale, par l’exposition de ses résidus seliant aux intégrines et par les facteurs de croissancequ’elle renferme, cette matrice de fibrine va per-mettre le recrutement, la migration, l’adhésion, etorienter la différenciation des différents types cel-lulaires nécessaires à la reconstruction tissulaire.De plus, l’association de cette matrice provisoire

de fibrine avec la fibronectine stimule l’afflux desmonocytes,33 des fibroblastes34 et des cellules en-dothéliales. En fait, il a même été montré qu’unematrice de fibrine ou de fibronectine pouvait mo-duler la réponse des fibroblastes à certaines cyto-kines et moduler l’expression des intégrines à lasurface des cellules endothéliales.35

L’effet capital de cette matrice transitoire surles différents types cellulaires peut être égalementévalué lorsqu’elle persiste dans le tissu suite à undéfaut de la fibrinolyse. En effet, quand cettematrice ne peut être dégradée, elle semble induireune fibrose du site. Ainsi, des dépôts de fibrineassociés à une suppression de la fibrinolyse ont étédétectés chez les patients atteints de fibroses pul-monaires. De même, des souris transgéniques su-rexprimant l’inhibiteur de l’activateur du plasmi-nogène accumulent plus de collagène suite à une

Figure 14 Modélisation simplifiée en images de synthèse d’une molécule de fibrinogène (D-TEP©v1.3).

155De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 16: Conc Plachetare

blessure et celles n’exprimant pas le plasminogèneont une cicatrisation cutanée sérieusement retar-dée.32

Enfin, au plan immunitaire, les fibrinopeptidesissus de la dégradation de la fibrine par la plas-mine36 sont de puissants chémoattractants pour lesneutrophiles et les monocytes.

Fibrine et angiogenèseL’angiogenèse correspond à la formation de nou-veaux vaisseaux à partir des cellules endothélialesdes vaisseaux résiduelles. C’est une étape fonda-mentale pour tout phénomène de cicatrisation.La rupture de la membrane basale provoque la

première stimulation « matricielle » des cellulesendothéliales, puis c’est la matrice transitoireconstituée de fibrine, de glycoprotéines circulantes(fibronectine, vitronectine...) et de cytokines asso-ciées qui orchestre l’angiogenèse. Ces moléculesvont en particulier orienter la prolifération de cescellules ainsi que leur expression de protéases re-modelant la matrice.Pour comprendre les mécanismes qui génèrent la

formation des tubes et l’invasion de la matrice de

fibrine par les cellules endothéliales, il existe unmodèle : des cellules endothéliales de microvais-seaux humains sont incorporées dans une matricetridimensionnelle de fibrine et forment des struc-tures tubulaires de type capillaire.37

Dans ce modèle, pour que l’angiogenèse s’initie,il faut que les cellules soient exposées simultané-ment à un facteur angiogénique (vascular endothe-lial growth factor [VEGF], fibroblast growth factor[FGF] a, b, hepatocyte growth factor et angiopoïé-tine) et à du tumor necrosis factor [TNF] a.37 Lesstructures tubulaires sont visibles dès le deuxièmeou le troisième jour, puis s’étendent dans le gel defibrine en un réseau complexe en 5 à 10 jours.L’étude en microscope électronique de ces gels

révèle une dégradation importante de la fibrineadjacente aux cellules envahissantes. Ce qui sug-gère que de nombreux processus de protéolyse sontmenés par les cellules endothéliales. À ce titre, lesactivités de la plasmine et du PA-u membranaire(activateur du plasminogène) jouent un rôle majeurdans l’invasion de la fibrine par les cellules endo-théliales, comme l’ont montré les différentes expé-rimentations visant à inhiber ces deux protéa-

Figure 15 Modélisation théorique en images de synthèse de la constitution d’une fibrille de fibrine. Dans un premier temps, desliaisons non covalentes permettent l’alignement des molécules de fibrinogène activé (A), puis l’action du facteur XIII permetl’établissement de liaisons covalentes qui stabilisent la molécule de fibrine (B) et permettent l’assemblage d’un long polymèrestabilisé (C) (D-TEP©v1.3).

156 S. Dohan et al.

Page 17: Conc Plachetare

ses.37,38 Ceci pourrait expliquer l’importance duTNF-a dans l’angiogenèse. En effet, il induit à lafois l’expression du PA-u et de nombreuses métal-loprotéases matricielles (MMP) par les cellules en-dothéliales.39

S’ils permettent d’étudier l’effet des différentescytokines, les modèles d’angiogenèse permettentégalement de démontrer à quel point les propriétésstructurales de la matrice de fibrine dictent l’an-giogenèse. Ainsi, une étude40 s’est attachée à com-parer le comportement des cellules endothélialesdans des gels de fibrine différents au plan structu-ral de par leur pH de polymérisation. Ceux polymé-risés à pH 7 sont malléables et opaques, constituésde fibres épaisses. En revanche, polymérisés à pH7,8, les gels sont rigides, translucides, faits defibres fines et moins sensibles à la plasmine. Ceuxpolymérisés à pH 7,4 ont des propriétés intermé-diaires. Les cellules endothéliales sont déposées àla surface de ces différents gels. Suite à une induc-tion de type FGFb/TNF-a ou de type VEGF/TNF-a,la croissance des capillaires est beaucoup plus im-portante dans les gels souples. Cependant, plus legel est rigide, plus ces structures naissantes sontstables. En effet, les gels pH 7 rapidement lysésperdent prématurément leur fonction de charpentematricielle.Cette importance de la stabilisation de la ma-

trice de fibrine est connue, en particulier cellepermise par le facteur XIIIa ou par la transglutami-nase tissulaire. On sait, en effet, que l’administra-tion in vivo de transglutaminase tissulaire et lesliaisons covalentes stabilisatrices de la fibrine quis’ensuivent améliorent la cicatrisation.41

D’autres auteurs42 ont modifié la structure desgels de fibrine en incorporant des héparinoïdes. Onaboutit alors à des gels plus rigides, mais égalementà une croissance plus réduite des structures vascu-laires. De même, l’expression d’une fibrine mutéesur un site cible de la transglutaminase tissulaire(stabilisation) modifie l’angiogenèse. L’adhérencedes cellules endothéliales n’est pas modifiée, maisla formation des structures tubulaires est remar-quablement ralentie43 en raison de cette diffé-rence structurale de la fibrine.La structure spatiale de la fibrine est donc un

élément déterminant de la progression de l’angio-genèse in vitro, tout d’abord parce qu’elle déter-mine la sensibilité de la fibrine à la protéolyse, etensuite parce qu’elle module la croissance des cel-lules endothéliales. De plus, l’incorporation de vi-tronectine et d’autres protéines plasmatiques amé-liorerait la colonisation du gel par les différentstypes cellulaires.Ainsi, toutes ces études permettent de montrer

que la vitesse et la qualité de l’angiogenèse sont

modulées par la structure de la matrice de fibrine,les molécules qui y sont associées, mais aussi lesprotéases que synthétisent les cellules endothélia-les et les autres cellules colonisant le caillot.

Fibrine des concentrés plaquettaires :une matrice idéaleSi la fibrine permet la formation d’un clou plaquet-taire dense et résistant au cours de l’hémostase,elle n’a pas qu’une simple fonction de collage.Grâce à son mode de polymérisation qui lui confèreune structure pontée capable former un maillagedense, elle est avant tout une matrice très cohé-rente. Ce qui signifie que la colonisation du caillotde fibrine se fait aisément par les divers typescellulaires participant à la cicatrisation d’un sitelésé.

Cellules et gels de cultureLa prolifération cellulaire est stimulée par la pré-sence d’une matrice vierge à conquérir. C’est cequ’on appelle parfois, en culture cellulaire, un« appel à confluence », un peu comme l’on provo-que un appel d’air. Les cellules colonisent et semultiplient. Quel que soit le modèle de cultureorganotypique, les cellules cherchent toujours àoccuper l’espace libre, quitte à se dédifférencierd’un phénotype ostéoblastique jusqu’à un typemyofibroblastique, si le milieu dans lequel ellesévoluent le nécessite pour leur survie et leur expan-sion. Et elles ne perdent cette dynamique quelorsque leur matrice (avec laquelle elles entretien-nent une relation intime et vitale par le jeu depuissants rétrocontrôles) leur convient et que le jeudes messagers intercellulaires leur donne un « si-gnal tissulaire » : c’est l’information selon laquelleelles ne sont plus seules et doivent réguler leurphysiologie en fonction des autres, pour le bien etla survie de la communauté cellulaire organisée àlaquelle désormais elles appartiennent. C’est àpartir du moment où les signaux reçus par la celluleconvergent vers cette sensation d’appartenancetissulaire que le remodelage de l’ensemble du mi-lieu peut se réaliser de façon globalement cohé-rente.C’est ce qui est observé au sein des cultures

organotypiques et cela explique l’importanced’une matrice organisée, facilement colonisable etmodelable, pour potentialiser une cicatrisation,qu’elle soit muqueuse ou osseuse.

Fibrine et cellules épithéliomésenchymateusesPour les fibroblastes et les cellules endothéliales,cette trame de fibrine permet une colonisationrapide, et organisée selon les grands axes du réseaude fibrine, du site lésé.44 Une fois cette première

157De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 18: Conc Plachetare

étape d’expansion réalisée, ces cellules peuventalors passer au remodelage de leur matrice extra-cellulaire et remplacer peu à peu la fibrine par deséléments matriciels plus classiques (collagène I,glycosaminoglycanes, protéoglycanes, glycoprotéi-nes de structure).45 Parallèlement, le réseau endo-thélial va se reconstituer afin d’irriguer le site d’unflux vasculaire chargé en plasmine qui finit dedégrader les restes du caillot de fibrine.Ces mécanismes expliquent l’accélération de la

cicatrisation observée sur les tissus mous restaurésà l’aide des différents types de colles de fibrine. Siles facteurs de croissance plaquettaires entrent enjeu, cela ne peut l’être que de façon anecdotique,car pour reconstituer une matrice aussi structuréequ’une gencive, rien ne sert d’accroître massive-ment le nombre de cellules : il faut seulementrationaliser et faciliter leur travail. C’est à cela quesert une matrice biologique. C’est à cela que ser-vent les colles biologiques à base de fibrine. C’est àcela que servent les concentrés plaquettaires.

Fibrine et cellules osseuses

Pour les sites intraosseux, les phénomènes sontdifférents. Si la matrice de fibrine permet la colo-nisation du site par les ostéoblastes du greffon etles cellules endothéliales des rameaux vasculairesadjacents, elle induit également une réponse os-téogénique très cohérente.46 Les mécanismes decette réponse ont été explorés in vitro, et il sem-blerait que la fibrine puisse diriger la conversiondes cellules souches mésenchymateuses en cellulesostéogéniques.En effet, Gurevich et al.47 ont démontré en

2002 que le contact prolongé de cellules souchesmésenchymateuses médullaires avec des lattis defibrine induisait la constitution de phénotypes os-téogéniques extrêmement puissants. À ce stade dedifférenciation, on ne peut même plus parler d’os-téoblastes : les cellules récupérées après un pas-sage sur un lattis de fibrine produisent et organi-sent spontanément des structures osseuses in vitroet surtout in vivo, et cela dans un site de greffeaussi isolé qu’une capsule rénale.Il faut rappeler que ces cellules souches mésen-

chymateuses sont connues pour leur capacité dedifférenciation in situ en une vaste gamme de typescellulaires, ce qui leur permet de s’intégrer sansdifficulté à des tissus aussi variés que la peau,l’intestin, l’estomac, les poumons, le cœur, le mus-cle squelettique, l’os, le cartilage, le tendon, letissu adipeux ou encore le tissu nerveux : ellespeuvent donc, en fonction du site, acquérir desphénotypes extrêmement variés.

Ces cellules ne sont pas habituées à rester aucontact de la fibrine de façon prolongée, sauf dansune seule circonstance : en cas de fracture osseuseavec brèche vasculaire. En effet, dans tous lesautres cas de lésions nécessitant la constitutiond’un caillot de fibrine, le flux vasculaire se charged’amener sur site du plasminogène qui, devenuplasmine sous l’effet d’activateurs tissulaires (prin-cipalement issus des parois vasculaires), va peu àpeu lyser notre fibrine. Seulement, en cas de lésionimportante d’un site osseux, une partie du caillotde fibrine se retrouve piégée au milieu des éclatsosseux, avec un accès très limité au flux vasculaire.La durée de vie de la fibrine et des rapports qu’elleentretient avec les cellules souches mésenchyma-teuses, et les cellules piégées sur site de façon plusgénérale, est donc très augmentée par rapport à lanorme physiologiquement constatée. On peut doncenvisager une fonction ostéogénique pour la fi-brine, même si ce phénomène reste à approfondir.

Plaquettes

Plaquettes et fibrinogèneFormées dans la moelle osseuse à partir des méga-caryocytes, ce sont des structures discoïdes et anu-cléées. Leur durée de vie est de 8 à 10 jours. Àl’intérieur de leur cytoplasme se trouvent de nom-breux granules dont le contenu est secrété au mo-ment de l’activation.Les granules a contiennent de nombreuses pro-

téines spécifiques de la plaquette (facteur 4 pla-quettaire, b-thromboglobuline) ou non (fibronec-tine, thrombospondine, fibrinogène et autresfacteurs de coagulation, facteur Willebrand, fac-teurs de croissance, inhibiteurs de la fibrinolyse,immunoglobulines). Les granules denses contien-nent de l’acide adénosine diphosphorique (ADP), ducalcium et de la sérotonine... À noter égalementque la membrane plaquettaire est formée d’unebicouche de phospholipides dans laquelle sont insé-rés des récepteurs pour un certain nombre de molé-cules (ADP, collagène, thrombine...).Le fibrinogène est massivement présent à la fois

dans le plasma et les granules a des plaquettes. Iljoue un rôle déterminant dans l’agrégation desplaquettes entre elles au cours de l’hémostaseprimaire et il se transforme en une véritable collecapable de consolider l’amas plaquettaire dans unpremier temps, puis de former un véritable mur deprotection le long d’une brèche vasculaire au coursde la coagulation.En fait, le fibrinogène est le substrat final de

toutes les réactions de coagulation : protéine solu-ble, il est transformé en fibrine insoluble par lathrombine.

158 S. Dohan et al.

Page 19: Conc Plachetare

Mécanismes d’action des plaquettesLeur fonctionnement est indissociable des cascadesde réaction de l’hémostase primaire. L’adhésiondes plaquettes à une surface lésée (telle que lesous-endothélium, grâce à l’action déterminantedu facteur Willebrand) déclenche des signaux intra-cytoplasmiques qui aboutissent à une série de ré-ponses :

• les plaquettes deviennent sphériques et for-ment des pseudopodes ; les granules se regrou-pent et fusionnent avec la membrane plaquet-taire ;

• la sécrétion du contenu des granules est bru-tale ; nombre des molécules libérées ont pourfonction d’amplifier l’agrégation plaquettaire(ADP, sérotonine...), d’autres de la consolider(fibrinogène...).

À ce stade, l’activation des premières plaquettesinduit un recrutement en chaîne de toutes les pla-quettes passant à proximité, grâce aux actionsconjuguées des molécules sécrétées et de cellesproduites par la plaquette activée (la voie duthromboxane A2). Il s’ensuit la formation d’un clouplaquettaire dense et prêt à supporter le dévelop-pement de la coagulation.À noter que l’antigène CD 62 permettant de

déterminer le degré d’activation plaquettaire ausein de nos préparations17 n’est autre que laP-sélectine, une molécule exprimée sur les facesinternes des membranes des granules a et mise àjour au cours de la fusion des granules avec lamembrane cytoplasmique, au moment de l’activa-tion plaquettaire.

Cytokines plaquettaires : que peut-onattendre d’elles ?

Cytokines et cellulesS’il est toujours question, dans les publicationsassociées aux concentrés plaquettaires, de facteursde croissance, il convient d’en éclaircir la défini-tion et les fonctions.Les cytokines sont de petites molécules protéi-

ques dont la fonction primordiale est la communi-cation entre les cellules. Leur mode d’action estdonc principalement autocrine (c’est-à-dire qu’el-les agissent directement sur le type cellulaire quiles sécrète) ou paracrine (c’est-à-dire qu’elles agis-sent sur des types cellulaires différents situés àproximité), rarement endocrine (c’est-à-dire ac-tion lointaine après transport par voie sanguine, cequi est le mode d’action des hormones). Et ellessont produites en grande quantité par tous les typescellulaires. Elles sont ce qui se rapproche le plusd’un langage biochimique grâce auquel les cellulesprennent connaissance de la présence de leurs voi-sines et de leur appartenance à un tissu.

Chaque réaction cellulaire dépend d’un grandnombre de facteurs : l’état de la cellule, son degréde différenciation, et son environnement matricielet cellulaire. Au milieu de tous ces signaux rare-ment concordants, il appartient à la cellule de fairela synthèse des informations pour en tirer le com-portement que la logique biologique codée dans sonacide désoxyribonucléique lui impose.Ainsi, l’association coordonnée dans l’espace et

le temps de plusieurs de ces facteurs peut engen-drer des réponses très diverses. Et un ajout massifde cytokines plaquettaires au milieu de mécanis-mes de régulation aussi sensibles pourrait paraîtreplus que hasardeux.Il faut donc bien comprendre cette notion :

lorsqu’une cytokine stimule une cellule, elle peutl’orienter vers la mitose aussi facilement que versle suicide programmé (apoptose). Les cytokines nesont que les mots du langage cellulaire. Sans coor-dination, ils peuvent dire tout et son contraire.Dans une telle situation, les informations matriciel-les demeurent un référentiel incontournable.Autrement dit, lorsque les cytokines sont incohé-rentes, la cellule prend ses ordres dans la matricequi la soutient.À noter que certaines cytokines à spectre large

ont été surnommées facteurs de croissance (growthfactors). Si cela ne change rien à leur mode defonctionnement, les principales cytokines relar-guées par les plaquettes activées en font partie :transforming growth factor (TGF) b-1, platelet-derived growth factor (PDGF), insulin-like growthfactors (IGF) et platelet-derived endothelial cellgrowth factor (PD-ECGF).

Principales cytokines plaquettaires

« Transforming growth factor-b1 » : l’agentfibrosantLes TGF-b sont une vaste superfamille de plus de30 membres, parmi lesquels on retrouve certainesbone morphogenetic proteins (BMP). La molécule àlaquelle on fait souvent référence en parlant « du »TGF-b est en réalité le TGF-b-1. C’est l’isoforme leplus souvent rencontrée et le plus massivementproduite, non seulement dans les granules a desplaquettes, mais de manière plus générale au coursdu dialogue intercellulaire.48

In vitro, ses effets sont extrêmement variés enfonction de la dose appliquée, de l’environnementmatriciel et du type cellulaire. Par exemple, il a étédémontré qu’il pouvait stimuler la prolifération desostéoblastes tout aussi facilement qu’il pouvaitl’inhiber.49

Si ses effets en termes de prolifération sont trèsvariables, il n’en reste pas moins, pour la plupart

159De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 20: Conc Plachetare

des types cellulaires, l’agent fibrosant le plus puis-sant de toutes les cytokines.50 Autrement dit, ilinduit la synthèse massive de molécules matriciel-les telles que le collagène I et la fibronectine, quece soit par les ostéoblastes ou les fibroblastes.Ainsi, bien que ses mécanismes de régulation

soient particulièrement complexes, le TGF-b peutêtre considéré un modérateur de l’inflammation,par sa capacité à induire une cicatrisation fibreuse.

« Platelet-derived growth factor » : le stimulantdes lignées mésenchymateusesLes PDGF sont des régulateurs essentiels de la mi-gration, de la prolifération et de la survie descellules de la lignée mésenchymateuse.51 En fonc-tion de la répartition de leurs différents récep-teurs, ils peuvent induire tout aussi facilement unestimulation qu’une inhibition du développement deces cellules.52

Cette position de nœud de régulation joue unrôle fondamental au cours du développement em-bryonnaire et de tous les mécanismes de remode-lage tissulaire. À ce titre, les PDGF jouent un rôlecritique dans les mécanismes de cicatrisation phy-siologique et sur la pathogénie de l’athéroscléroseet de nombreuses maladies fibroprolifératives(néoplasies, fibroses pulmonaires et rénales...).53

Axe « insulin-like growth factor » : l’agentprotecteur des cellulesLes IGF I et II sont des régulateurs positifs de laprolifération et la différenciation cellulaire. Demode d’action autocrine/paracrine mais aussi en-docrine, leur pouvoir est considéré comme positifsur la majeure partie des types cellulaires,54 ce quiinclut malheureusement les cellules cancéreuses(qui détournent le système IGF pour accroître leurcapacité de survie).55 Car, si ces cytokines serventde médiateur de croissance cellulaire, elles consti-tuent avant tout l’axe majeur de régulation de lamort cellulaire programmée (apoptose), en indui-sant des signaux de survie qui protègent les cellulesde nombreux stimuli apoptotiques présents dans lemilieu.56

« Epithelial growth factor » et « platelet-derivedendothelial cell growth factor » : les stimulantsendothéliauxDe découverte récente, le PD-ECGF est une cyto-kine plaquettaire qui n’agit que sur les cellulesendothéliales.L’epithelial growth factor est une cytokine de

croissance et de différenciation pour les cellules delignée ectodermique, ce qui lui permet de stimulerla cicatrisation épidermique et l’angiogenèse.

Un ensemble cohérent de signauxIl est intéressant de constater que les catégories decytokines contenues dans les plaquettes ont princi-palement pour objectif de stimuler la colonisationet le remodelage du site lésé par les deux typescellulaires essentiels aux premiers temps de touteréparation tissulaire :

• les cellules endothéliales pour remettre enplace une vascularisation ;

• les cellules peu différenciées de lignée mésen-chymateuse (qui prennent rapidement des allu-res morphométriques de fibroblastes) pour colo-niser et réorganiser la trame matriciellecicatricielle ;57,58 or, aux premiers temps de lacicatrisation, cette trame est constituée quasiexclusivement de fibrine.

Cytokines plaquettaires et cPRP : des signauxpositifs mais brutaux et ponctuelsS’il est impossible d’évaluer précisément les quan-tités de cytokines pouvant induire un effet positifsur la cicatrisation cutanéomuqueuse ou le remode-lage osseux, ni même les quantités de cytokinesréellement contenues dans les gels de plaquettes(étant donné l’importance des variations interindi-viduelles), il est cependant possible d’établir desordres de grandeur permettant de développer unpremier raisonnement.En culture, un prélèvement de tissu gingival pro-

duit quelques centaines de picogrammes par milli-litre (par milligramme de tissu en culture) desdifférentes cytokines qui nous intéressent : TGF-b-1, PDGF, IGF. En revanche, une simple extrapo-lation (à partir des résultats d’une étude ayantévalué le pourcentage d’activation plaquettaireavant la mesure du taux de cytokines)17 permet dedire que les quantités des différentes cytokinespotentiellement relarguées par un cPRP à 1 millionde plaquettes par microlitre (concentrationmoyenne espérée dans un cPRP) sont de l’ordre dequelques centaines de nanogrammes par millilitre,soit environ 1 000 fois plus que ce que peuventproduire des cellules en culture. On doit doncconsidérer que la concentration en cytokines pla-quettaires de notre colle de fibrine est importante.Cependant, l’étape de gélification impliquant

forcément l’activation plaquettaire, toutes les cy-tokines sont relarguées dans la préparation au mo-ment de sa mise en place sur le site opératoire. Or,les cytokines libérées sont instables et n’ont qu’unedurée de vie très limitée dans le plasma de façontrès générale,17 et dans un tissu en remodelage enparticulier (elles sont endocytosées et souvent dé-truites après utilisation).Notons que, in vivo, tout phénomène tissulaire

ne peut être obtenu sans une étroite coordination

160 S. Dohan et al.

Page 21: Conc Plachetare

spatiotemporelle des signaux biologiques. Et unapport massif et brutal de cytokines ne peut engen-drer qu’un repli des cellules ainsi traitées sur desinformations plus fiables telles que leur environne-ment matriciel : la fibrine.Ceci est d’autant plus vrai chez les cellules dif-

férenciées : dans ce domaine, les études in vitrodémontrent que ces cytokines (pourtant considé-rées comme stimulantes) engendrent des réactionscellulaires qui pourraient paraître contradictoi-res.59

Cette notion évolue lorsqu’il s’agit de types cel-lulaires indifférenciés : l’ajout de cytokines (extrai-tes de concentrés plaquettaires) sur des cellulessouches mésenchymateuses médullaires (indiffé-renciées donc sensibles aux signaux de stimulation)en culture augmente leur prolifération. Mais seul unsupport à base de gel de fibrine permet leur diffé-renciation en un phénotype ostéoblastique puis-sant.60,61 Ainsi, dans le cadre de cet article, ilsemblerait que si les cytokines sont suffisantes pourobtenir des effets locaux temporaires sur les typescellulaires les plus primitifs, les cytokines plaquet-taires libérées ne pourraient avoir d’effets à longterme à l’échelle du remodelage d’un tissu.

Cytokines plaquettaires et PRFL’usage du PRF est récent et les études biochimi-ques le concernant sont encore peu nombreuses.Cependant, de premiers résultats publiés ont per-mis d’établir d’importantes hypothèses de travailconcernant la biologie du PRF. En effet, en compa-rant les valeurs obtenues par dosage ELISA dans leplasma acellulaire et dans l’exsudat du caillot defibrine PRF avec celles obtenues par d’autresauteurs avec du cPRP, et cela selon une vastegamme de protocoles différents, il est possibled’affirmer que les cytokines plaquettaires restentmajoritairement piégées au sein des mailles defibrine du PRF, et même vraisemblablement au seindes polymères de fibrine.27

En effet, il faut tout d’abord rappeler que, aucours du protocole PRF, l’absence d’anticoagulantdans le tube de prélèvement induit nécessairementune activation massive des plaquettes, renforcéepar la présence d’une phase minérale sur les paroisdu tube sec (poudre de verre résiduelle). Ces cyto-kines sont de petites molécules que la centrifuga-tion devrait tout naturellement concentrer dans lapartie haute du tube, c’est-à-dire dans le surna-geant. Or, ce n’est absolument pas le cas. En fait,on ne retrouve la majorité de ces cytokines ni dansle surnageant, ni dans l’exsudat. Elles sont doncrestées piégées dans le PRF, au point de ne mêmeplus pouvoir être exsudées, ce qui implique néces-sairement une incorporation intime de ces molécu-les au sein même des polymères de fibrine (Fig. 16).

L’IGF-1 n’y fait pas exception. Seulement, l’IGF-1 est une molécule principalement circulante : dèsles premières étapes de la centrifugation, cettecytokine se retrouve concentrée dans la partiehaute du tube, ce qui explique l’importance desconcentrations qui y sont mesurées. En revanche,l’IGF-1 issu de la dégranulation des plaquettes su-bira très certainement le même phénomème d’in-corporation matricielle que le TGF-b-1 et lePDGF-BB plaquettaires.

Cytokines immunitaires et PRF

La centrifugation de sang total implique nécessai-rement une activation des leucocytes présents dansle prélèvement. Cependant, seule une étude sur lePRF s’est intéressée à cette problématique, grâce àdes dosages comparatifs de cinq cytokines inflam-matoires et cicatricielles.29

En effet, le PRF présente de nombreux paramè-tres de développement et de consolidation associésaux gels de culture organotypiques, ce qui a permisde l’assimiler à un « milieu de culture in vivo ». Etles données cliniques semblent démontrer qu’il secomporte comme une matrice propice au dévelop-pement d’une cicatrisation cohérente sans excèsinflammatoire. Cette dernière idée nous a toutnaturellement amenés à rechercher, au sein de cecaillot de fibrine, des éléments de régulation et demaintien de l’homéostasie cellulaire et moléculairesuffisamment puissants pour contre-balancer lesexcès d’une inflammation postchirurgicale. Car, si

Figure 16 Les dosages de cytokines par test ELISA ont étéréalisés dans le plasma acellulaire (platelet-poor plasma), ainsique dans l’exsudat du caillot de fibrine platelet-rich fibrin(PRF). La comparaison de ces dosages avec ceux issus destravaux sur les concentrated platelet-rich plasma semble met-tre en évidence que les cytokines plaquettaires demeurentpiégées au sein des mailles de fibrine du PRF.

161De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 22: Conc Plachetare

l’on peut prédire un rôle important aux sécrétionsplaquettaires, il ne faut pas oublier que le sang estun tissu à part entière, ce qui implique une multi-tude de paramètres pouvant intervenir dans lecontrôle des réactions inflammatoires.

Qu’est-ce que l’inflammation ?L’inflammation se définit par l’ensemble des phé-nomènes réactionnels déclenchés par l’organismeen réponse à une agression. Le processus inflamma-toire se déroule en trois phases successives : unephase vasculaire, une phase cellulaire et une phasede cicatrisation.La phase vasculaire se caractérise par l’ensem-

ble des phénomènes permettant le développementde l’hémostase (c’est-à-dire la constitution d’unematrice de cicatrisation à base de fibrine) et facili-tant la mise en place d’un nœud leucocytaire(c’est-à-dire l’arrivée sur le site de la lésion decellules inflammatoires capables de coordonnertoutes les forces cellulaires en présence pour lesmener à la couverture anti-infectieuse du site et àla protection du développement de la cicatrisationinitiale). Au final, il s’agit des processus hémosta-tiques menant à une coagulation le long de labrèche vasculaire et à la formation d’un lit defibrine.Les phénomènes vasoexsudatifs initiaux permet-

tent l’arrivée des leucocytes dans le foyer inflam-matoire. Les premiers en place sont les polynu-cléaires, puis ils sont remplacés par les cellulesmononucléées ; parmi celles-ci, les macrophages,qui participent à cette phase grâce à leur plusgrande capacité de phagocytose. S’y associent deslymphocytes et des plasmocytes qui participent à laréponse immune spécifique de l’antigène.Toutes les cellules présentes sur le site inflam-

matoire sont activées et sécrètent de nombreusescytokines et des facteurs de croissance. Les média-teurs de l’inflammation participent au recrutementdes fibroblastes, induisent leur prolifération et sti-mulent leur activité biosynthétique, conduisant à lasécrétion de protéases (métalloprotéases matri-cielles et plasmine entre autres) et à la néosyn-thèse des macromolécules du tissu conjonctif. Lesmédiateurs de l’inflammation mettent en jeu desphénomènes de production en cascade, des syner-gies d’effet et des boucles d’amplification par lebiais notamment du système du complément.Le processus inflammatoire est donc inhérent à

l’acte chirurgical lui-même. Mais l’on constate quel’adjonction de PRF en diminue certains effets né-fastes, principalement en corrigeant les excès desprocessus destructeurs et délétères difficilementcontrôlables dans le processus de remodelage ra-pide mis en œuvre lors d’une agression.

Cytokines de l’inflammationLe nombre de médiateurs impliqués dans les pous-sées inflammatoires est très important. Nous noussommes donc spécifiquement intéressés à trois desprincipales cytokines associées à l’inflammation,l’interleukine (IL) 1b, l’IL-6 et le TNF-a. Noter que,au cours d’un phénomène inflammatoire, les picsde sécrétion de ces trois cytokines sont synchroni-sés dans l’espace et le temps. En fait, ces troismolécules constituent à elles toutes seules un chaî-non clé de l’inflammation.

Interleukine 1bL’IL-1 est produite par les macrophages activés, lesneutrophiles, les cellules endothéliales, les fibro-blastes, les kératinocytes, les cellules de Langer-hans... C’est l’un des médiateurs clés du contrôlede l’inflammation.Elle existe sous deux formes, a et b, qui corres-

pondent à deux gènes différents mais conservent27 % d’homologie au niveau protéique. L’IL-1b de-meure la forme prédominante.La synthèse de l’IL-1 est médiée par le TNF-a, les

interférons a, b, c et les endotoxines bactériennes.Sa principale activité est la stimulation des lympho-cytes T helper.À noter que, en combinaison avec le TNF-a,

l’IL-1 apparaît être impliquée dans les lyses osseu-ses : en effet, il active les ostéoclastes et inhibe laformation d’os.

Interleukine 6L’IL-6 est une cytokine inflammatoire associée aucircuit de l’IL-1b et du TNF-a.62 Ses sources princi-pales in vivo sont les monocytes stimulés, les fibro-blastes et les cellules endothéliales. Les macropha-ges, les lymphocytes T et B, les granulocytes, lesmastocytes, les chondrocytes et les ostéoblastesproduisent aussi de l’IL-6 après stimulation.Physiologiquement, l’IL-6 est stimulée par l’IL-1,

les endotoxines bactériennes, le TNF-a, le PDGF...L’IL-6 peut aussi stimuler ou inhiber sa propre syn-thèse.L’IL-6 est un facteur de différenciation des lym-

phocytes B in vivo comme in vitro et un activateurdes lymphocytes T. En présence d’IL-2, elle induitla différenciation des lymphocytes T matures etimmatures en lymphocytes T cytotoxiques.L’IL-6 est capable d’induire la maturation finale

des lymphocytes B en plasmocytes sécréteurs d’im-munoglobulines, à condition que ceux-ci aient étépréalablement préactivés par l’IL-4. Au sein despopulations de lymphocytes B, l’IL-6 stimule vio-lemment la sécrétion d’anticorps : ce taux peutaugmenter de 120 à 400 fois.

162 S. Dohan et al.

Page 23: Conc Plachetare

Enfin, il faut noter que l’IL-6 et l’IL-3 agissent defaçon synergique in vitro pour promouvoir la proli-fération de cellules souches hématopoïétiques.L’IL-6 constitue donc avant tout une voie d’am-

plification majeure des signaux transmis aux cellu-les de l’immunité. Ainsi, IL-6 favorise le déroule-ment des cascades de réaction qui mènent àl’inflammation, avec tous les phénomènes de des-truction ou de remodelage qui s’y associent.

« Tumor necrosis factor � »Le TNF-a est l’une des premières cytokines de lacascade inflammatoire mise en œuvre en réponseaux endotoxines bactériennes. Après stimulationpar les lipopolysaccharides bactériens, le TNF-a estsécrété par les macrophages, les monocytes, lespolynucléaires neutrophiles et les lymphocytes T.Sa production est sous-régulée par l’IL-6 et leTGF-b.Le TNF-a active les monocytes et stimule le

pouvoir de remodelage des fibroblastes. De plus, ilaugmente la phagocytose et la cytotoxicité desneutrophiles, et module l’expression de médiateursclés tels que l’IL-1 et l’IL-6.

Cytokines de cicatrisationUn pouvoir cicatriciel peut être défini selon deuxaspects :

• soit il inhibe les voies inflammatoires, et sous-régule leur amplification et son lot de destruc-tions tissulaires : c’est le cas de l’IL-4 ;

• soit il favorise la mise en place des structuresinitiales fondamentales pour le développementd’une cicatrisation saine et coordonnée : c’estle cas du VEGF.

Interleukine 4L’IL-4 est produite principalement par une sous-population de cellules T activées (TH2, CD4+) quisécrètent aussi l’IL-6. Elle favorise la proliférationet la différenciation des cellules B activées. Maisses effets plus généraux sont totalement dépen-dants de son environnement en cytokines.Au cours des phénomènes inflammatoires, sa

fonction principale semble être de favoriser la cica-trisation en modérant l’inflammation et son cortègede destructions. Par exemple, elle augmente lasynthèse de collagène fibrillaire par le fibroblaste63

et inhibe la stimulation de mmP-1 et mmP-3 parl’IL-1b. En fait, elle supprime les voies de transduc-tion des signaux médiés par IL-1b, tels que la stimu-lation de la synthèse de PGE2.

64

Ce rôle de modérateur de l’inflammation estdonc très prononcé. Au point que le prétraitementdes macrophages par l’IL-4 prévient la productiond’IL-1b, de TNF-a et de prostaglandines en réponse

à l’activation des cellules par les endotoxines bac-tériennes ou l’IFN-c.

« Vascular endothelial growth factor »Le VEGF est le plus puissant et le plus ubiquitairedes facteurs de croissance vasculaires connus. Iljoue un rôle directeur dans le contrôle de nom-breux aspects du comportement des cellules endo-théliales, qu’il s’agisse de prolifération, de migra-tion, de spécialisation ou tout simplement desurvie. En fait, la simple présence de cette cytokinesuffit à déclencher l’angiogenèse, et c’est la com-binaison de ses différentes isoformes qui permet dediriger et d’affiner le schéma de croissance duréseau vasculaire.

PRF : un nœud immunitaire ?Avec les cinq cytokines précédemment décrites,nous pouvons visualiser une part importante deschaînons inflammatoires, tant dans leur aspectsimmunitaires (IL-1b, IL-6, TNF-a) que cicatriciels(IL-4, VEGF...). Il était donc intéressant de recher-cher leur présence au sein du caillot PRF, dont lepouvoir de stimulation de l’immunité et de contrôledes destructions inflammatoires est cliniquementétabli.Pour cela, il fallait étudier, par dosage ELISA, le

profil de sécrétion de ces cytokines par les élé-ments figurés du sang en mesure de le faire (c’est-à-dire principalement les leucocytes) au cours de laréalisation de la matrice PRF.29 Ces dosages per-mettent d’évaluer leurs effets potentiels sur desmatrices en cours de cicatrisation, qu’elles soientminéralisées (os, cartilage) ou non (gencives,peau).Les résultats publiés semblent mettre en évi-

dence une sécrétion accrue de toutes les interleu-kines testées, qu’elles soient inflammatoires oucicatricielles. Leur origine ne peut être que leuco-cytaire, ce qui signifierait que le mode d’activationlente du sang suffirait à induire une dégranulationaccrue des populations de leucocytes. En effet, lescomparaisons avec des sangs totaux non activés(plasma) ou activés (sérums) indiquent très claire-ment qu’un phénomème d’activation se produit aucours de la centrifugation de production de PRF.De plus, lorsque l’on observe les résultats obte-

nus sur les cytokines plaquettaires, on peut imagi-ner que les cytokines que nous avons testées se-raient elles aussi piégées au fur et à mesure dans legel de fibrine en cours de polymérisation : commepour les molécules plaquettaires, ces cytokines leu-cocytaires sont relarguées peu à peu dans le milieuet bénéficient certainement d’un piégeage dans lesmailles de fibrine.Seul le VEGF présente des concentrations sérolo-

giques significativement plus élevées que toutes les

163De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 24: Conc Plachetare

autres valeurs : il est vraisemblable qu’une partiedu VEGF dosé soit issue des plaquettes, ce quiexplique l’importance des concentrations sur sangactivé. La sécrétion leucocytaire de VEGF peutdonc être considérée comme négligeable. Mais lesdifférences constatées entre sang activé et surna-geant PPP (ou exsudat PRF) nous rappellent encoreune fois l’importance du piégeage des cytokinesdans la matrice de fibrine PRF.Avec une telle teneur en cytokines clés de l’im-

munité (pro- ou anti-inflammatoires) et de l’angio-genèse, le caillot de fibrine PRF peut tenir lieu denœud immunitaire. Ses capacités de défense faceaux infections ne seraient pas négligeables, tantpar le pouvoir chimiotactique de ces cytokines quepar leur capacité à faciliter l’accès au site agressé(néovascularisation). Enfin, il est très intéressantde constater la présence de cytokines de rétrocon-trôle de l’inflammation, en particulier l’IL-4.

cPRP et PRF : une même famille d’ajuvantschirurgicaux, mais deux biologies trèsdifférentes

Fibrine : une matrice solide et éprouvée pourle développement cellulaire et tissulaireAu sein de tous les protocoles de culture cellulaireou tissulaire, la fibrine est considérée comme unsupport de culture supérieur en termes d’attache-ment et de colonisation cellulaire.47,65 De plus, lesprotocoles de préparation des concentrés plaquet-taires utilisant des prélèvements sanguins, cela im-

plique que le gel de fibrine sera associé à d’autresmolécules circulantes, en particulier la fibronec-tine, qui est une des protéines clés de l’ancrage etde la motilité cellulaire au sein des matrices extra-cellulaires. La fibronectine circulante a d’ailleursdéjà été décrite comme capable de potentialiserles effets mitogéniques des PDGF sur les cellulesmésenchymateuses66 et d’accroître ainsi le poten-tiel de cicatrisation des plaies conjonctives.De plus, si de nombreuses expérimentations uti-

lisent déjà diverses matrices comme support dediffusion de cytokines, la capacité de la matrice defibrine à jouer ce rôle est l’une des plus pronon-cées. En effet, elle est en mesure de se charger dequantités importantes de cytokines (de l’ordre dumicrogramme) ; mais, in vitro, elle diffuse plus de90 % de son contenu au cours des trois premiersjours de culture.65 Ainsi, lorsque les cytokines sontajoutées sur une matrice de fibrine déjà polyméri-sée, celle-ci ne semble pas en mesure de servir dediffuseur à long terme.

cPRP : une biologie de colleÀ l’aide de toutes les informations issues du raison-nement fondamental, on peut désormais commen-cer à envisager les effets biologiques de nos prépa-rations.Le cPRP utilise un sang citraté, c’est-à-dire dont

le calcium (cofacteur clé de la coagulation) a éténeutralisé par le citrate de sodium. Le fait dedéclencher la coagulation plus tardivement à l’aided’un rajout massif de chlorure de calcium et del’amplifier artificiellement par de la thrombine bo-vine (dont le rôle est de provoquer la transforma-tion du fibrinogène en fibrine et la constitutiond’un gel malléable) implique deux conséquences :

• la texture de la préparation rend aisée l’impré-gnation des surfaces d’un site opératoire par ungel souple de fibrine, contenant des cytokines ;la gélification prend quelques minutes et l’effetde collage n’en est que plus puissant ;

• le mode de polymérisation de la fibrine et d’ac-tivation des plaquettes est artificiel, brutal,voire totalement contraire à la physiologie del’hémostase (cf. supra) ; la matrice de fibrineest donc nécessairement polymérisée de ma-nière violente et désordonnée, ce qui induit unedurée de vie relativement faible pour ce réseaude fibrine.

Ces quelques éléments permettent de considérer lecPRP comme une colle biologique dont les effetsseraient positifs, mais limités aux temps opératoi-res (hémostase, ajustage de fragments osseux...)et postopératoires immédiats (fermeture facilitéedes berges de plaies). Ce rôle de liant biologiqueest très positif, dans la mesure où il est mécanique-

En résumé

L’homéostasie tissulaire dépend d’un équili-bre fragile entre les activités anaboliques etcataboliques. Et les cytokines jouent un rôleimportant dans cet équilibre. Si les aspectsplaquettaires des cPRP et PRF commencent àêtre bien connus, il n’en est pas de même desaspects inflammatoires. Les premiers résultatspubliés ouvrent donc une nouvelle voie de re-cherche pour la compréhension de ces techno-logies, car ils démontrent que le PRF n’est passeulement un concentré plaquettaire, maiségalement un concentré immunitaire capablede stimuler les mécanismes de défense del’hôte au niveau d’un site lésé. Et il est mêmevraisemblable que la parfaite régulation del’inflammation constatée sur les sites traitéspar PRF soit due au rétrocontrôle des cytokinespiégées dans le réseau de fibrine et relarguéesau cours du remodelage de cette matriceinitiale.

164 S. Dohan et al.

Page 25: Conc Plachetare

ment capable de faciliter certains actes chirurgi-caux et de limiter leurs conséquences immédiates :moins de stress biologique, un meilleur contrôle dusite opératoire, moins de suites néfastes et donc,au final, une meilleure cicatrisation. Mais il nesemble pas que l’on puisse lui accorder une activitébiologique à plus long terme.

PRF : une biologie de milieu de cultureDe nombreux systèmes de culture cellulaire outissulaire utilisent des gels à base de collagène oude fibrine, dans un sérum de culture adapté. Or, onpeut tout à fait considérer que le PRF n’est autrequ’un gel de fibrine enrichi en sérum, une matricechargée en éléments nutritifs adaptée à une colo-nisation cellulaire efficace.Utilisé en gel, le PRF peut donc être considéré

comme un support de culture tissulaire in vivo. Entant que tel, il se doit d’être incorporé à des sitessujets à des remaniements importants, où sa tramede fibrine saurait diriger le développement et leremodelage. Malgré ces étonnantes propriétés bio-logiques, le PRF présente un inconvénient clinique :étant donné sa consistance massive de caillot, il nepeut pas être utilisé comme une colle, tout au pluscomme un liant biologique.Son utilisation en membrane, après expression

de tout le sérum contenu dans le caillot, permet deprotéger les sites opératoires et de favoriser lescicatrisations en plans superposés, c’est-à-direprincipalement la cicatrisation des tissus mous. Elleagit à la manière d’un lattis de culture en monocou-che et facilite la fermeture des plaies cutanéomu-queuses ou gingivales.L’autre particularité du PRF vient de son mode

de polymérisation. L’absence de manipulation dusang (pas d’ajout d’anticoagulants, de thrombine,etc.) signifie que le caillot de fibrine se sera forméde manière naturelle et que la polymérisation de lafibrine aura été parfaitement physiologique. Celalaisse nécessairement entrevoir des différencesbiologiques importantes entre cPRP et PRF, en par-ticulier au sein des processus de remodelage tissu-laire.

Influence du mode de gélification surl’architecture moléculaire des polymèresde fibrineL’une des principales différences entre les colles defibrine, les cPRP et le PRF provient de leur mode degélification. En effet, colles de fibrine et cPRPutilisent une association de thrombine bovine et dechlorure de calcium pour déclencher les dernièresétapes de la coagulation et la polymérisation bru-tale de la fibrine. La rapidité de cette réaction estdictée par le mode d’utilisation de ces adjuvants

chirurgicaux, et leur fonction hémostatique impli-que une prise quasi immédiate et donc des quanti-tés de thrombine importantes. Un tel mode depolymérisation influe considérablement sur les pro-priétés mécaniques et biologiques de la trame defibrine ainsi constituée.31

Le PRF, quant à lui, a la particularité de polymé-riser naturellement et lentement au cours de lacentrifugation. Et les concentrations de thrombineagissant sur le fibrinogène du prélèvement sontquasiment physiologiques, puisqu’il n’y a aucunrajout de thrombine bovine.Cet aspect est crucial pour déterminer l’organi-

sation tridimensionnelle d’un réseau de fibrine. Eneffet, lors de leur gélification, les fibrilles de fi-brine peuvent s’assembler entre elles selon deuxarchitectures biochimiques différentes : jonctionscondensées tétramoléculaires ou bilatérales, etjonctions branchées trimoléculaires ou équilatéra-les.31 Les jonctions bilatérales se constituent à defortes concentrations de thrombine et permettentl’épaississement des polymères de fibrine : celamène à la constitution d’un réseau rigide, peupropice à la migration cellulaire et au piégeage descytokines (Fig. 17). Cependant, de par sa granderésistance, un tel gel convient totalement poursceller solidement des tissus : on a donc une collede fibrine, et par extension un cPRP.À l’inverse, à de faibles concentrations de

thrombine, on obtient un très fort pourcentage dejonctions équilatérales. Ces jonctions branchéespermettent l’établissement d’un réseau de fibrineen forme de filet à fine maille, favorisant la migra-tion cellulaire et le piégeage des cytokines(Fig. 18). De plus, cette organisation tridimension-nelle donne une grande élasticité au gel de fibrine :c’est ce que l’on observe au sein d’une membranePRF, solide mais souple et élastique.Les différentes technologies des fibrines ont

donc des modes de polymérisation différents quiimpliquent des mécanismes d’intégration biologi-que très différents.

Figure 17 Modélisation théorique en images de synthèse dejonctions condensées tétramoléculaires ou bilatérales. Noter larigidité de cette architecture (D-TEP©v1.3).

165De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 26: Conc Plachetare

PRF et cPRP : polymérisations différentes,biologies différentesÀ la différence des matrices de fibrine obtenuesdans les protocoles de colles tissulaires, qu’ils’agisse de colles de fibrine simples (Fig. 19) ou deconcentrés plaquettaires de type cPRP (Fig. 20), lePRF est issu d’une polymérisation naturelle et pro-gressive au cours de la centrifugation. Le réseau defibrine ainsi formé présente une organisation tridi-mensionnelle particulièrement homogène, plus en-core que celle des caillots de fibrine obtenus invivo. C’est ce qu’on observe sur les colorations aubleu alcyan : les chaînes glycaniques suivent scru-puleusement l’architecture fibrillaire de la tramede fibrine, ce qui laisse présager des résultats équi-valents pour des glycoprotéines de structure aussiimportantes pour la prolifération cellulaire que lafibronectine (Fig. 21,22).De plus, un mode de polymérisation progressif

implique une incorporation accrue des cytokinescirculantes au sein des mailles de polymérisation(cytokines intrinsèques). Une telle configurationimplique une durée de vie accrue pour ces cytoki-nes, puisqu’elles ne sont libérées et utilisées qu’au

moment du remodelage de la matrice cicatricielleinitiale, lors de la dénudation du brin de fibrine(effet à plus long terme). Cela implique égalementun effet stimulant pour la cicatrisation puisque cesfacteurs de croissance n’atteindront leur ciblequ’au moment où les cellules seront exactementsur le site de cicatrisation. Les cytokines se main-tiennent et sont donc disponibles in situ au momentopportun, lorsque les cellules entament la réduc-tion des matrices cicatricielles du site lésé, c’est-à-dire lorsqu’elles doivent être stimulées pour pré-parer la reconstruction du site.Enfin, une polymérisation lente à concentrations

de thrombine physiologiques implique une archi-tecture matricielle très élastique (jonctions bran-chées équilatérales entre fibrilles de fibrine) parti-culièrement propice à la migration cellulaire et à larétention des molécules en solution (pontage molé-culaire en filet).À l’inverse, le mode de polymérisation brutal des

cPRP (et des colles de fibrine) nuit à l’incorporationintime des cytokines au sein de la matrice de fi-brine. En raison des taux de thrombine élevés né-cessaires à la prise rapide de la colle, cette fibrineest pontée de manière rigide (jonctions condenséesbilatérales), ce qui rend d’autant plus difficile lepiégeage des petites molécules en solution : lescytokines relarguées par les plaquettes sont doncextrinsèques, c’est-à-dire piégées dans la suspen-sion colloïdale entre les mailles du réseau de fibrineau cours de la gélification (Fig. 19,20). Leur élimi-

Figure 18 Modélisation théorique en images de synthèse dejonctions branchées trimoléculaires ou équilatérales. Noter lasouplesse de cette architecture en filet (D-TEP©v1.3).

Figure 19 Modélisation théorique en images de synthèse d’unréseau de fibrine issu de la polymérisation d’une colle de fibrine.Noter que dans cet exemple on n’a pas représenté de fibronec-tine piégée dans les mailles du gel, ce qui est pourtant le caspour une colle telle que le Tisseel® (D-TEP©v1.3).

Figure 20 Modélisation théorique en images de synthèse d’unréseau de fibrine issu de la polymérisation d’un concentratedplatelet-rich plasma. Les plaquettes activées sont piégées dansla trame de fibrine et dégranulent, libérant ainsi dans le milieuune importante quantité de cytokines qui restent piégées ensolution de manière extrinsèque aux fibrilles de fibrine (échellesnon respectées) (D-TEP©v1.3).

166 S. Dohan et al.

Page 27: Conc Plachetare

nation physiologique est donc nécessairement ra-pide, et l’on perd alors une grande part des syner-gies cytokines/fibrine, ou plus généralementcytokines/matrice, que l’on doit observer au seindu PRF.L’ensemble de ces paramètres comparatifs per-

met de considérer le PRF comme un biomatériau depotentialisation de la cicatrisation, et non commeune « simple » colle biologique à base fibrine.Cette première analyse biochimique des diffé-

rentes strates du PRF semble indiquer que ce bio-matériau serait constitué d’un assemblage intimede cytokines, de chaînes glycaniques et de glyco-protéines de structure entremêlées au sein d’unréseau de fibrine lentement polymérisée. L’ensem-ble de ces composants biochimiques ont des effetssynergiques avérés sur la cicatrisation : c’est parexemple le cas de la fibronectine et du PDGF-BB. Eneffet, en tant que rail à la prolifération et à lamigration cellulaire, la fibronectine potentialise leseffets stimulants obtenus par le PDGF-BB. Ces don-nées préliminaires mènent donc à penser que le PRFserait un concentré de cicatrisation particulière-ment efficace.

Fibrine, concentrés plaquettaireset processus tumoraux

Il s’agit là d’une question récurrente, quelle quesoit la technologie des fibrines utilisée.

Figure 21 Modélisation théorique en images de synthèse d’une fibrille de fibrine constituée selon une technique platelet-rich fibrin(PRF). Noter que ce mode de polymérisation lent permettrait l’incorporation de glycosaminoglycanes et de cytokines au sein mêmedu polymère de fibrine, ce qui rapproche la structure de notre gel PRF des thrombus de fibrine naturels (échelles non respectées)(D-TEP©v1.3).

Figure 22 Modélisation théorique en images de synthèse d’uncaillot de fibrine platelet-rich fibrin. Noter la présence deglycoprotéines de structure piégées dans la trame de fibrine,ainsi que de cytokines extrinsèques (en solution) et surtoutintrinsèques, c’est-à-dire piégées dans les fibrilles de fibrine aucours de leur polymérisation (échelles non respectées) (D-TEP©v1.3).

167De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 28: Conc Plachetare

De manière générale, la mise en place d’unmatériau, même autogène, censé accélérer la cica-trisation se doit de prouver son innocuité. Ceci estd’autant plus important sur des sites de cicatrisa-tion après exérèse tumorale, car les cellules mu-tées ont toujours des réactions prolifératives beau-coup plus rapides que les cellules normales. Etpourtant, ce sont souvent les patients atteints parces pathologies qui présentent les plus gros trou-bles de la cicatrisation (chimiothérapies, radiothé-rapies, polymédications...) et qui auraient donc enthéorie le plus besoin d’une potentialisation de leurmodeste potentiel d’autoréparation. Les donnéesactuelles associant fibrine et processus tumorauxpermettent de développer des raisonnements thé-rapeutiques au cas par cas, dans le respect le plusstrict du principe de précaution.Des dépôts de fibrine ou de fibrinogène sont

observés dans le stroma de la majorité des types detumeurs où ils contrôleraient la croissance des cel-lules tumorales et la progression des métastases. Ilssont disposés selon des schémas très hétérogènesdans les différents types de tumeurs.67 Cependant,on les trouve généralement à l’interface entre lescellules saines et les cellules tumorales,68 ou entreles cellules tumorales et le stroma environnant. Unamas de fibrinogène est une caractéristique desmésothéliomes, des cancers du côlon et des lym-phomes.La matrice extracellulaire de fibrine peut

contrôler la prolifération cellulaire de par sa confi-guration et ses motifs de liaison aux cellules, maisaussi de par sa capacité à séquestrer certains fac-teurs de croissance. On sait par exemple que lefibrinogène est capable de séquestrer le FGFb69 etle VEGF.70 Le VEGF étant très impliqué dans l’an-giogenèse, cette séquestration modulerait la vas-cularisation de la tumeur nécessaire à sa crois-sance.Cependant, il est important de rappeler que la

fibrine des sites tumoraux est très différente decelle issue de la polymérisation de fibrinogène cir-culant.En effet, l’étude des cellules tumorales a permis

de montrer que de nombreuses cellules autres queles hépatocytes pouvaient synthétiser le fibrino-gène : c’est en particulier le cas des cellules decarcinomes intestinaux, utérins ou pulmonai-res.71,72 Le fibrinogène sécrété par ces cellulestumorales est souvent incomplet, ne présentantseulement, par exemple, qu’une chaîne bB et unechaîne c.73 Cette observation est très rare pour lefibrinogène des hépatocytes sains : en effet, lestrois chaînes sont assemblées avant sécrétion et defaçon généralement complète. Il est vraisemblableque ces fibrinogènes anormalement constitués, sé-

crétés par les cellules tumorales, doivent ensuitegénérer dans la matrice extracellulaire des signauxhérétiques, ce qui contribuerait à entretenir leprocessus tumoral.En l’état actuel de nos connaissances, il est

encore difficile de porter un jugement sur le risquepotentiel de l’utilisation de biomatériaux à base defibrine sur des sites anciennement tumoraux. Ce-pendant, il faut bien se souvenir que tout sitechirurgical se remplit de toute façon d’un caillot defibrine très proche du PRF, et cela de façon tout àfait physiologique : cela s’appelle tout simplementl’hémostase et la cicatrisation naturelle.L’adjonction d’un gel de fibrine issu du fibrino-

gène circulant présente donc en soi un risque mo-déré en termes de prolifération tumorale, mais unintérêt très élevé en termes de protection du sitechirurgical et de contrôle de la cicatrisation.La question change de nature lorsque l’on parle

de concentrés plaquettaires. En effet, l’ajout ponc-tuel d’une colle de fibrine enrichie en cytokinesplaquettaires peut-il déclencher ou raviver laconversion tumorale d’une cellule ?Les cytokines plaquettaires sont en quantité im-

portante, mais leur durée de vie dans un tissuvivant en remaniement est très faible : elles sontabsorbées et détruites par le tissu, avant même quele drainage vasculaire ne se soit complètementremis en place. Cependant, si leur action est limi-tée dans le temps, elle peut être suffisante pourraviver violemment la prolifération tumorale : lescellules immortalisées sont bien plus sensibles queles autres aux signaux de croissance.53,56

Pour la fibrine, bien qu’elle ne puisse évidem-ment pas être considérée comme promotrice dudéveloppement des tumorisations, le problème estsimilaire : un lattis de fibrine pourrait servir desupport idéal pour la prolifération initiale de cellu-les immortalisées par un processus tumoral. Lephénomène demeure peu probable, tant les verrousde sécurité antitumoraux sont nombreux. Cepen-dant, sur un site osseux en plein remaniement, lavascularisation, et son lot de lymphocytes antitu-moraux, macrophages et polynucléaires, prend uncertain temps avant d’être totalement reconsti-tuée de façon optimale et cohérente, et ce tempspeut être suffisant pour permettre à un reste decellules cancéreuses de proliférer avec une viru-lence amplifiée par la qualité de la matrice qu’onleur offre.C’est pour cette raison que les colles de fibrine

autologue, et par extension les différentes techni-ques de concentrés plaquettaires, doivent encoreêtre manipulées avec intelligence et précaution, enparticulier sur les sites d’exérèse tumorale.

168 S. Dohan et al.

Page 29: Conc Plachetare

Applications cliniques

Les récents développements des technologies deconcentrés plaquettaires se sont accompagnésd’une multitude d’essais thérapeutiques visant àleur trouver un maximum d’applications clini-ques.74 Si le volume des publications sur le sujet està la hauteur du violent engouement qu’il a suscité,il n’en demeure pas moins que les résultats obtenussont excessivement variables et rarement interpré-tables.Ce flou en matière d’évaluation clinique des

effets strictement plaquettaires de ces prépara-tions ramène au doute que suscite leur identitébiologique : sont-elles des gels aux effets biochimi-ques induits par les cytokines plaquettaires ou desimples colles biologiques à base de fibrine concen-trée ?Cette question doit guider notre analyse des

résultats cliniques publiés.

Applications cliniques des cPRP

Chirurgie ophtalmique : une applicationanecdotique mais hautement significativeLes concentrés plaquettaires de type cPRP ont étéutilisés localement en ophtalmologie en tantqu’adjuvant au traitement chirurgical des déchiru-res de la macula.75 L’idée était astucieuse,puisqu’elle reposait sur l’idée que pour comblerune déchirure ou un trou il fallait utiliser un liantbiologique capable de jouer le rôle de colle. Et sil’on rêvait d’une stimulation biochimique fibropro-liférative, au moins espérait-on une meilleure cica-trisation mécanique.Les résultats dans ce domaine sont intéressants,

mais décevants. Si le taux de succès strictementanatomiques de ces interventions est significative-ment accru grâce aux concentrés plaquettaires,l’acuité visuelle restaurée demeure identique.76 Deplus, et c’est bien plus grave, l’utilisation de cesgels de plaquettes induit une augmentation signifi-cative du nombre de réouvertures des trous macu-laires fermés chirurgicalement.77

Ces premiers résultats nous ramènent aux idéesessentielles développées auparavant : les concen-trés plaquettaires (les cPRP pour être exact) nesont rien d’autre que des colles biologiques. Enaucune façon elles n’induisent un remodelagestructuré et cohérent au sein du tissu traité. Ce nesont que des adjuvants chirurgicaux et il ne faut pasleur conférer de propriétés biologiques à moyen oulong terme.Cette notion se retrouve dans tous les domaines

où les cPRP furent appliqués.

Chirurgie plastiqueLa grande particularité des chirurgiens plasticiensvient de leur connaissance déjà très ancienne descolles biologiques à visée thérapeutique,78 tellesque le Tisseel®, qu’ils utilisaient déjà courammentafin de limiter le risque de formation de cicatriceschéloïdes, au rendu esthétique et aux qualités mé-caniques très préjudiciables. Forts de cette longueexpérience, ils détournent partiellement de leurrôle initial les protocoles de préparation dévelop-pés pour obtenir des concentrés plaquettaires.En effet, s’ils utilisent le cPRP, ils n’en gardent

pas moins le PPP pour jouer les colles de fibrineautologue.79 En mélangeant la thrombine (et lechlorure de calcium) au PPP, on obtient un gel quiressemble à peu de choses près à celui de cPRP. Cegel peut être appliqué sur les plaies cutanées aprèslifting de la face et du cou ou après incision thora-cique pour pose de prothèses mammaires en sili-cone.Noter qu’il ne s’agit là que d’interventions où les

incisions sont minimes et le rendu esthétique essen-

Conclusion

En analysant de façon critique l’ensembledes publications portant sur les concentrés pla-quettaires de type cPRP, on ne peut que cons-tater l’étendue des spéculations biologiques surlesquelles sont fondés ces travaux. Cependant,tous reposent sur une idée simple : ces prépa-rations sont au moins des colles ou des liantsbiologiques à base de fibrine autologue, méca-niquement capables d’améliorer les protocoleschirurgicaux.Bien qu’appartenant à la grande famille des

concentrés plaquettaires comme les cPRP, lePRF représente une biologie alternative, com-plexe et encore méconnue, qui fait de lui unbiomatériau de cicatrisation autologue très dif-férent des autres adjuvants à base de fibrine.Les premières données établies permettent aumoins de le définir comme une matrice perfor-mante de fibrine, de glycosaminoglycanes et deglycoprotéines ayant incorporé de manière in-trinsèque une grande quantité de cytokines pla-quettaires et immunitaires, le tout gorgé d’unsérum non immunogène car issu de l’individureceveur.Ainsi, le PRF, bien plus qu’un clou de fibrine

piégeant des plaquettes stressées, activées etvidées depuis fort longtemps de leur contenu,est un véritable milieu de culture utilisable invitro et surtout in vivo. Ce biomatériau extrê-mement complet offre un champ d’applicationsthérapeutiques vaste et encore largementinexploré.

169De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 30: Conc Plachetare

tiel. Il est bien évidemment possible d’appliquerces gels dans une multitude d’autres sites, maisl’on comprendra aisément que le problème de lacicatrisation disgracieuse est moins crucial lorsqueles plaies sont très importantes (comme par exem-ple après mammoplastie).80 À cela se rajoute leproblème de la quantité de cPRP que l’on peutaisément produire au cours de ces interventions.C’est donc dans ce domaine d’application que

l’on se pose le moins de questions : les colles à basede fibrine de type Tisseel® y sont utilisées depuisfort longtemps, et leur utilité n’est plus à démon-trer.

cPRP et chirurgies parodontales et implantairesCe champ d’application intervient sur deux typesde tissus à la physiologie radicalement opposée : lessurfaces mucogingivales (organisées en strates épi-thélioconjonctives capables d’un remodelage ra-pide) et l’os alvéolaire (au remodelage lent etcomplexe).Utilisé comme une colle biologique, le cPRP sert

de liant entre les différents éléments d’une greffeosseuse ou gingivale et de gel de protection du siteopératoire, au même titre que les colles de fibrineutilisées antérieurement.81,82

Pour les tissus mous, tous les résultats concor-dent, même s’ils ne sont jamais mesurés à l’aide decritères quantitatifs : on observe moins de douleurspostopératoires, moins de complications infectieu-ses ou mécaniques (décollement). La cicatrisationmucogingivale étant fondée sur une colonisationrapide du site et un remodelage linéaire, elle estlogiquement stimulée par les synergies de signauxbiologiques issus du gel de plaquettes : fibrine etcytokines très actives sur les lignées fibroblastiqueset endothéliales. C’est ce qu’on retrouve dans lestentatives de potentialisation des greffes épithélio-conjonctives par l’ajout d’un gel de cPRP pourcoller et protéger :83 si le résultat final est identi-que, les auteurs estiment que les patients souffrentmoins et que le site est mieux protégé. De tellesconclusions pourraient prêter à sourire, mais cesont les seules actuellement disponibles.On retrouve la même problématique dans le trai-

tement des defects osseux alvéolaires. Il existe denombreuses études sur les effets potentiels du cPRPen combinaison avec divers matériaux de substitu-tion osseuse (os humain anorganique de banqued’os,84,85 os bovin anorganique Bio-Oss®86,87,88)pour combler des lésions alvéolaires angulaires in-terproximales,87 interradiculaires89 ou péri-implantaires.85 Mais toutes souffrent de la mêmedifficulté à analyser scientifiquement les résultatset à prouver que l’ajout de cPRP est bien responsa-ble d’une réussite de l’acte, dans la mesure où les

différents protocoles utilisés sont déjà référencéscomme étant capables seuls de générer des résul-tats similaires. Par exemple, le cPRP associé à duBio-Oss® et à une membrane de collagène (régéné-ration tissulaire guidée) donne des résultats positifsdans le traitement des alvéolyses angulaires,87 maisil en aurait été de même sans cPRP, voire avecuniquement du Bio-Oss® ou une membrane seule.Ces études, basées sur une poignée de cas sans la

moindre logique analytique, laissent derrière ellesune impression de flou particulièrement gênantepour l’esprit scientifique.Enfin, dans le domaine de la chirurgie implan-

taire, il a été mis en évidence que l’application decPRP sur les parois alvéolaires avant la pose del’implant induit une surface de contact os-implantaccrue au cours des premiers temps de la cicatrisa-tion (6 semaines). Cependant, à plus long terme(12 semaines), on ne retrouve plus aucune diffé-rence entre les sites traités par le cPRP et ceux quine le sont pas.90

Ainsi, l’incapacité systématique des auteurs àdisséquer les phénomènes cliniques en donnéesbiologiques ne fait que renforcer le raisonnementfondamental. En effet, les données accumuléesmènent à l’idée toute simple que, en tant que collebiologique, le cPRP est un atout chirurgical permet-tant un meilleur contrôle du site d’intervention etune meilleure cooptation des différents élémentstissulaires dans les premiers temps de la cicatrisa-tion. Mais on ne peut lui attribuer un pouvoir biolo-gique à long terme sur la maturation des tissus.

cPRP et greffes osseusesL’utilisation de colles de fibrine autologue poursolidariser les fragments composant les greffes os-seuses est une idée connue et acceptée par tous,2,6

car elle permet de limiter les micromouvements,voire les déplacements, incontrôlables des greffonssous l’action des contraintes mécaniques. Or, cesont ces microtraumatismes répétés qui induisentinexorablement la formation de séquestres osseux,en empêchant le tissu greffé de se remodeler defaçon cohérente au sein du site receveur.De plus, l’implantation de fibrine dans des de-

fects osseux maxillofaciaux est déjà connue pourstimuler la colonisation osseuse du site.46

Cependant, si la fibrine semble posséder ce po-tentiel ostéogénique très puissant, elle n’en de-meure pas moins qu’un gel de support au dévelop-pement cellulaire. En aucune façon elle ne peutservir seule de nœud d’organisation à un tissu os-seux. Cette idée est très clairement illustrée parl’une des rares études véritablement scientifiquesdans le domaine de l’évaluation des résultats degreffes osseuses associées au cPRP :91 dans un crâne

170 S. Dohan et al.

Page 31: Conc Plachetare

de lapin, quatre trous identiques sont faits, puiscomblés différemment, le premier avec de l’osautogène de calvaria seul, le second avec de l’os decalvaria et du cPRP, le troisième avec du cPRP seul,et le quatrième est laissé sans rien. Les résultatshistologiques sont clairs et précis : la présence d’osautogène permet un comblement parfait, ce quin’est pas le cas sans ; l’absence ou la présence decPRP ne change strictement rien aux résultats ob-servés à 1, 2 ou 4 mois.Face à des résultats aussi limpides, il faut donc

rester très lucide quant à la capacité des prépara-tions plaquettaires à avoir des effets spontanés. Ilsn’en demeurent pas moins une excellente collebiologique apte à rendre de nombreux services aucours des temps chirurgicaux.

Le cas d’école : cPRP et comblement de sinusmaxillaireIl s’agit là de la situation clinique la mieux docu-mentée. En effet, au cours de la conférence deconsensus sur les comblements sinusiens, l’excel-lent pronostic de la greffe endosinusienne a étéétabli.Dans ce domaine, quasiment toutes les associa-

tions de matériaux ont été faites avec le cPRP : osbovin anorganique (Bio-Oss®), os humain anorgani-que (os de banque), os autogène iliaque,15 tempo-ral92 ou mentonnier, b-tricalciumphosphate (b-TCP, Cerasorb®)...93 Mais un grand nombre de cesétudes souffrent de biais importants, le premierd’entre eux provenant de l’incapacité à évaluer lesrésultats : la densitométrie osseuse par radiologien’est pas fiable pour étudier une loge aussi com-plexe qu’un sinus maxillaire, et les analyses histo-logiques sont sujettes à l’interprétation du clini-cien.En effet, à la différence des études de greffes

osseuses en chirurgie parodontale ou péri-implantaire, le comblement de sinus présente ungros avantage analytique : puisqu’il sert à ménagerun volume osseux suffisant pour poser des implants,cela signifie que l’on interviendra à nouveau sur lesite greffé quelques mois plus tard et que l’onpourra prélever un fragment du greffon avant deposer les implants. Cette particularité a permis àtous les auteurs qui se sont intéressés aux applica-tions du cPRP au cours des greffes osseuses endosi-nusiennes de présenter des analyses histologiquesde leurs greffons.S’il s’agit là d’un premier pas vers une cohérence

scientifique au sein des études menées sur lesconcentrés plaquettaires, la démarche souffre d’ungros handicap : l’histologie est délicate sur tissuminéralisé, et il faut savoir ce que l’on cherche àmontrer. Or, jusqu’à présent, en l’absence de tech-

nologies fiables pour évaluer de manière quantita-tive ou semi-quantitative le degré de maturationdes greffes, au mieux certains15 se contentent-ilsde localiser par immunodétection des récepteursaux TGF-b au sein de cellules du tissu osseux enremodelage : récepteurs quasi ubiquitaires...Toutes ces remarques nous montrent à quel point

il est délicat d’interpréter les résultats publiés dansce champ d’application clinique. Ceux-ci sontd’ailleurs souvent contradictoires.Certains trouvent leurs résultats positifs, selon

des critères cruellement qualitatifs. On est donccontraint de leur faire confiance lorsqu’ils affir-ment que leur fragment de greffon est constituéd’un os viable. Seulement, n’aurait-on pas obtenule même résultat sans cPRP ? En effet, il s’agitd’études utilisant de l’os anorganique bovin (Bio-Oss®)94 ou humain (os de banque),84 ou encore del’os autogène de calvaria.92 Or, tous ces matériauxde comblement sont déjà connus pour leur fiabilitédans ce genre de greffes, sans l’aide du moindreadjuvant...D’autres trouvent des résultats nettement plus

inquiétants en poussant l’analyse histologique surdes critères plus pointus : à partir d’une vastegamme de matériaux de comblement, ils sont tousarrivés à la conclusion que le cPRP favorisait laconstitution de nœuds fibroprolifératifs au sein dugreffon osseux. Qu’il s’agisse de b-TCP,93 d’os anor-ganique bovin (Bio-Oss®)95,96 ou humain,95 oumême de verres bioactifs,95 tous ces matériauxsemblaient évoluer dans un greffon osseux de via-bilité réduite (peu d’ostéoblastes) et à la teneurélevée en matrice fibroconjonctive. Et si certainspostulaient que la forte teneur en TGF-b du cPRPétait responsable d’une attraction accrue des fibro-blastes sur le site de greffe,93 personne n’a osépousser plus loin la réflexion.Noter que la pose d’implants dans un site de

greffe associé au cPRP ne semble pas augmenterleur degré d’intégration à 7 mois.96

Comprendre le PRF : de la biologiedes fibrines au biomatériau de cicatrisation

Le PRF se définit comme un concentré plaquettaireet immunitaire permettant de rassembler en uneseule membrane de fibrine l’ensemble des consti-tuants favorables à la cicatrisation et à l’immunitéprésents dans un prélèvement sanguin. Si les cyto-kines plaquettaires et leucocytaires jouent certai-nement un rôle important dans la biologie de cebiomatériau, la matrice de fibrine qui leur sert desupport demeure sans conteste l’élément détermi-nant à prendre en compte pour tenter d’évaluer lepotentiel thérapeutique réel du PRF.

171De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 32: Conc Plachetare

Afin de mettre en évidence les effets réels decette matrice de fibrine, il est important d’isolernos observations cliniques selon quatre aspectsbien spécifiques de la cicatrisation : l’angiogenèse,le contrôle immunitaire, la captation des cellulessouches circulantes et l’épithélialisation de couver-ture de la plaie.

Angiogenèse, immunité et couvertureépithélialeCe sont les trois éléments clés de la cicatrisation etde la maturation des tissus mous. Les membranesde PRF peuvent y jouer le rôle d’un pansement defibrine, c’est-à-dire d’une matrice capable de sup-porter simultanément le développement de cestrois phénomènes.

Fibrine, guide naturel de l’angiogenèseL’angiogenèse, qui consiste en la formation de nou-veaux vaisseaux, requiert une matrice extracellu-laire dans le lit de la plaie afin de permettre auxcellules endothéliales de migrer, de se diviser et dechanger de phénotype.Les principaux facteurs solubles impliqués dans

l’angiogenèse sont le FGFb, le VEGF, l’angiopoïé-tine et le PDGF. Quant à la matrice de fibrine, il aété montré qu’elle est capable d’induire directe-ment l’angiogenèse.97 Cette propriété capitalepeut s’expliquer par la structure tridimensionnelledu gel de fibrine, mais également par l’actionconjuguée des cytokines qu’il enserre dans sesmailles. Certains auteurs35,69 indiquent en effetque le FGFb et le PDGF peuvent se lier à la fibrineavec une assez haute affinité. La liaison de nom-breux facteurs de croissance différents à la matricede fibrine pourrait expliquer cette induction di-recte de l’angiogenèse.De plus, les modèles développés par Nehls et

Herrmann98 ont permis de montrer que la structurede cette matrice est également déterminante,puisque la rigidité de celle-ci influence considéra-blement la formation de tubes par les cellulesendothéliales en réponse au FGFb ou au VEGF. Cetaspect a déjà été discuté précédemment, car il estcrucial pour comprendre la différence de cinétiquebiologique entre colle de fibrine, cPRP et PRF.Enfin, il est important de rappeler que l’expres-

sion de l’intégrine atb3 (qui permet aux cellules dese lier à la fibrine, à la fibronectine et à la vitro-nectine entre autres) par les cellules endothélialesest une étape importante de l’angiogenèse. Or, unefine régulation de l’expression de cette intégrinepar les cellules endothéliales serait dirigée par lamatrice de fibrine elle-même. En effet, en culture,la fibrine induit l’expression de l’intégrine atb3 à lasurface des cellules endothéliales humaines,35 in-duction dont n’est pas capable le collagène...

Fibrine, support naturel de l’immunitéLes produits de dégradation de la fibrine et dufibrinogène stimulent la migration des neutrophileset augmentent l’expression à leur surface du récep-teur CD11/CD18. Ce récepteur permet l’adhérencedes neutrophiles à l’endothélium et leur transmi-gration, mais aussi l’adhésion des neutrophiles aufibrinogène.99 De plus, ces éléments issus de lafibrine modulent la phagocytose et les processus dedégradation enzymatique menés par ces cellu-les.100

Les monocytes arrivent plus tard que les neutro-philes. Il a été montré que la colonisation de laplaie par les macrophages est contrôlée par lafibronectine, par les propriétés physicochimiquesde la matrice tridimensionnelle de fibrine et par lesagents chémoattractants qu’elle enserre dans sesmailles.33 Par exemple, les dimères de fragments Dde fibrine ajoutés au milieu de culture de promo-nocytes humains augmentent leur sécrétion d’IL-1 et de PA-u,101 ce qui implique un rétrocontrôlepositif de la fibrine sur les cascades inflammatoi-res.

Fibrine et recouvrement des plaiesLa matrice de fibrine guide la cicatrisation de cou-verture des sites lésés en intervenant sur deuxgrands types cellulaires qui constituent les stratesdes tissus de recouvrement : cellules épithéliales etfibroblastes.Sur les berges d’une plaie, les cellules épithélia-

les perdent leur polarité basoapicale pour émettreun prolongement du côté basolatéral libre. Lescellules migrent alors sur la matrice transitoirefaite de fibrinogène, de fibronectine, de tenascineet de vitronectine. Cette migration consiste plus enune véritable digestion de cette matrice guidequ’en une simple translation.La fibrine, la fibronectine, le PDGF et le TGF-b

sont autant d’agents essentiels pour la modulationde la prolifération, de l’expression des intégrines etde la migration des fibroblastes de la plaie.102

Ceux-ci peuvent se lier directement avec la fibrinepar différentes intégrines dont l’intégrine atb3. Etils développent une importante activité protéolyti-que pour se déplacer au sein du caillot de fibrine(grâce à l’expression de deux activateurs du plas-minogène). De plus, la migration de fibroblastes derat dans des gels de fibrine (in vitro) est optimalelorsqu’il existe un maximum de liaisons croiséesentre chaînes a.34 Cet aspect représente l’une desprincipales différences entre les polymérisationsviolentes des colles de fibrine (et par extension descPRP) et la gélification lente du PRF (cf. supra).Après la migration et la digestion de la fibrine,

les fibroblastes s’orientent vers la synthèse colla-

172 S. Dohan et al.

Page 33: Conc Plachetare

génique comme le montre un modèle de cicatrisa-tion in vitro fait de fibroblastes ensemencés dansdes gels de fibrine.103

Implication cliniqueCes éléments de réflexion fondamentaux nous per-mettent d’envisager le PRF comme un pansementde fibrine perméable au développement d’une mi-crovascularisation et capable de guider la migrationdes cellules épithéliales à sa surface. Les intérêtsd’une telle membrane sont donc évidents : proté-ger les plaies ouvertes et accélérer leur fermeture.À cela se rajoute l’effet stimulant d’un maillage defibrine sur la colonisation d’un site lésé par lescellules immunitaires, ce qui est d’autant plus im-portant pour des plaies ouvertes soumises auxagressions bactériennes extérieures, ou au seind’un site déjà infecté dont on aimerait faciliter lacicatrisation en contrôlant les phénomènes inflam-matoires souvent violents qui s’y déroulent.L’exemple le plus simple demeure l’obturation

d’une alvéole à l’aide d’un caillot PRF : on observerapidement une néovascularisation se former à tra-vers le caillot et le recouvrement rapide de lasurface de PRF par des couches épithéliales de plusen plus épaisses. Enfin, malgré l’état inflammatoireet infectieux de certains sites alvéolaires atteintsde parodontopathie, on observe une cicatrisationrapide du site sans douleur ni suites, sèches oupurulentes (alvéolites, etc.) (Fig. 23).

Angiogenèse et captation des cellules souchesAu cours de tout phénomène d’hémostase et decicatrisation, le caillot de fibrine piège les cellulessouches circulantes amenées sur le site lésé grâceaux néovascularisations initiales. Enchâssées dansla matrice de fibrine, ces cellules convergent versun phénotype sécrétoire permettant l’accélérationde la fermeture des brèches vasculaires et tissulai-res.Le PRF, en tant que pansement de fibrine, peut

servir de filet à cellules souches circulantes, enparticulier lorsque une angiogenèse accélérée s’estétendue au sein de cette membrane de fibrine. Cetaspect est d’autant mieux évalué au sein de sitesosseux ayant subi de grands délabrements. En ef-fet, de telles cicatrisations nécessitent l’accumula-tion de cellules souches médullaires sur site et leurconversion vers un phénotype ostéoblastique.

Fibrine et cellules souches mésenchymateusesLes cellules souches mésenchymateuses issues de lamoelle osseuse contribuent au renouvellement del’ensemble des types cellulaires mésenchymateuxde l’os, mais participent également à la cicatrisa-tion de nombreux autres tissus. Ces cellules indif-

férenciées seraient recrutées à partir du sang defaçon privilégiée vers les tissus conjonctifs lé-sés,104,105 où elles seraient alors capables de sedifférencier en de nombreux types cellulaires dif-férents. Mais cette différenciation initiale se réa-lise nécessairement au sein d’une matrice transi-toire cicatricielle constituée de fibrine et defibronectine.C’est pourquoi on utilise préférentiellement la

fibrine comme support matriciel pour greffer cescellules. Plusieurs auteurs ont ainsi démontréqu’une matrice de fibrine est un bon support pourgreffer des cellules souches mésenchymateuses surun site osseux afin d’obtenir une régénérationosseuse.106-108 Ainsi, une matrice de fibrine consti-tuée par 18 mg/ml de fibrinogène et 100 UI/mld’activité de thrombine est un support optimalpour la prolifération et la migration de ces cellulessouches.106 Une telle matrice artificielle est àpeine plus dense qu’un caillot de fibrine naturel detype PRF.

Fibrine et osLes interactions directes entre la fibrine et lescellules osseuses au cours des phénomènes de cica-trisation sont peu documentées. En revanche, ilexiste de nombreuses études chez l’animal éva-luant l’effet de la fibrine sur la cicatrisation os-seuse. Les résultats s’avèrent contradictoires, lacicatrisation osseuse étant soit améliorée, soit in-changée. Ces divergences seraient liées aux diffé-rences entre les modèles utilisés : le type d’animal,de défaut osseux et de gel de fibrine.109

Néanmoins, la fibrine est un support matricielreconnu pour la greffe de BMP. Ainsi, une matricede fibrine associée à des BMP a des propriétésangiotrophiques, hémostatiques et ostéoconductri-ces.110 De l’os s’est même formé après que celle-ciait été greffée en intramusculaire, ce qui impliqueune libération progressive des BMP contenus dansles mailles de fibrine. Ce mode de relargage pro-gressif des cytokines fait partie de la biologie descaillots de fibrine in vivo et, vraisemblablement, decelle du PRF.

Implication cliniqueLe rappel de ces éléments fondamentaux se trouveillustré aisément lors de l’exérèse kystique au seinde maxillaire. On dispose alors de loge osseuseisolée. Normalement, si l’exérèse kystique com-plète est réalisée, la cavité kystique se remplitrapidement de sang et le caillot qui s’y forme n’estautre qu’une version « allégée », car physiologique,du PRF. La matrice de fibrine du thrombus sert depièges aux cellules souches circulantes, et l’onobserve toujours dans ces cas des comblementsosseux naturels complets entre 6 mois et 1 an.

173De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 34: Conc Plachetare

En ajoutant du PRF au caillot naturel, on accé-lère un phénomène strictement physiologiquegrâce à une matrice de fibrine mieux organisée,capable de diriger de manière plus efficace la cap-tation des cellules souches et la cicatrisation matri-cielle. Un volume osseux kystique comblé à l’aidede PRF est totalement cicatrisé à 2 mois au lieu des10 à 12 mois nécessaires naturellement (Fig. 24). Etl’on doit en grande partie cette accélération à unsimple phénomène de guidage tissulaire et decontrôle cicatriciel exercé par une membrane PRF

nécessairement plus structurée que le thrombushémostatique naturel.

PRF et greffes osseuses

L’utilisation de substituts osseux pour la réalisationde greffes de grande étendue demeure une démar-che délicate en raison de la difficulté relative pourl’organisme receveur d’intégrer rapidement ce ma-tériau à son architecture propre. Cependant, l’uti-lisation du PRF au cours de ces interventions per-

Figure 23 Les avulsions dentaires et le comblement osseux sur site alvéolaire de grande étendue en parodontite terminale (A)demeurent des interventions délicates en raison de l’impossibilité de refermer de manière non traumatique les berges de la plaieau-dessus des alvéoles et de contrôler totalement les séquelles infectieuses et kystiques au moment de leur débridement (B). Aprèscomblement des alvéoles résiduelle à l’aide d’os allogénique Phœnix de TBF® (C), l’utilisation du platelet-rich fibrin commemembrane de couverture (D, E) permet une néoangiogenèse et une épithélialisation rapides du site tout en neutralisant lesphénomènes infectieux, ou au moins inflammatoires, générés par l’infection entretenue de ce secteur alvéolaire. À 48 heures, la plaieest totalement refermée et les fils de suture peuvent être retirés (F).

174 S. Dohan et al.

Page 35: Conc Plachetare

met de faciliter le contrôle opératoire du sitechirurgical et d’accélérer l’intégration et le remo-delage du biomatériau greffé.111,112

Le PRF est constitué d’une matrice de fibrineautologue ayant incorporé de manière intrinsèqueune grande quantité de cytokines plaquettaires etleucocytaires sécrétées au cours de sa préparationpar centrifugation.27-29 Ce mode de piégeage descytokines implique un relargage progressif et pro-longé dans le temps, tout au long de la dégradationde la trame de fibrine. À l’une de ses extrémités, lePRF concentre également l’ensemble des plaquet-tes et des leucocytes présents dans le tube de sangde 10 ml dont il est issu.Les conséquences d’un tel concentré plaquet-

taire et immunitaire sur un site de greffe osseusesont de quatre ordres.En premier lieu, le caillot de fibrine joue un rôle

mécanique important ; bien qu’il ne possède pas depropriétés adhésives très prononcées, la rigiditédes membranes de PRF permet le maintien dubiomatériau et sa protection contre certaines for-ces parasites modérées. De plus, mélangés au gref-fon, les fragments de PRF servent de liant biologi-que entre les particules d’os, donnant ainsi au

greffon une consistance biomécanique crucialedans les premiers temps de la cicatrisation.En second lieu, l’intégration de ce réseau de

fibrine entre les fragments de greffon allogènefavorise les migrations cellulaires, en particulierpour les cellules endothéliales à l’origine d’unenéoangiogenèse fondamentale pour la vascularisa-tion et la survie du greffon.En troisième lieu, les cytokines plaquettaires,

essentiellement des PDGF, TGF-b-1 et des IGF, sontrelarguées au fur et à mesure de la résorption de lamatrice de fibrine, ce qui permet d’obtenir unphénomène cicatriciel entretenu. Ces mécanismesde relargage progressif sont classiquement utiliséspar l’organisme pour guider les remodelages destissus conjonctifs (tels que l’os) et la cicatrisation,mais un tel phénomène est très difficile à repro-duire de manière synthétique.Enfin, l’aspect immunitaire est fondamental,

tant par la présence dans le caillot d’un volumeimportant de leucocytes qui semblent activés aucours de la centrifugation, que par l’incorporationde cytokines inflammatoires et anti-inflammatoiresau sein du réseau de fibrine. Le relargage progressifde ces molécules semble jouer un rôle autorégula-

Figure 24 Lors des exérèses kystiques volumineuses des maxillaires (A, B), la présence de parois résiduelles sur le site chirurgicalsuffit à permettre la reconstitution naturelle d’un tissu osseux au bout de 1 année : le thrombus constitué sur le site d’interventionsuffit à piéger les cellules souches circulantes et à guider la cicatrisation. L’obturation de la cavité kystique avec du platelet-richfibrin (C) permet d’accélérer ce phénomène naturel. En moins de 2 mois et demi, le site d’exérèse est complètement comblé par untissu osseux dense et corticalisé (D).

175De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 36: Conc Plachetare

teur des phénomènes inflammatoires et infectieuxau sein de la greffe.Toutes ces qualités mécaniques et biologiques ne

sont rien d’autres que les caractéristiques les plusévidentes d’un caillot de fibrine naturelle manipuléavec soin. Le PRF n’est en cela rien de plus qu’unconcentré de cicatrisation : il est le concentré, enune seule membrane, à grande échelle et de ma-nière parfaitement contrôlable par le praticien, del’ensemble des phénomènes les plus élémentairesde l’hémostase et de la cicatrisation. Il offre ainsiune solution innovante pour accélérer certains phé-nomènes de cicatrisation et simplifier les protoco-les chirurgicaux les plus complexes.

Quel champ d’application pour le PRF ?

En première approche, il faut considérer le PRFcomme un pansement de fibrine. Son architecturemoléculaire à faible concentration de thrombine(favorisant les jonctions moléculaires équilatéra-les) rend cette membrane de fibrine particulière-ment propice et perméable aux migrations cellulai-res, tant fibroblastiques qu’endothéliales. Celaimplique une angiogenèse rapide et un remodelageaisé de la matrice de fibrine en un tissu conjonctifplus résistant. Ainsi, cette membrane de PRF peutêtre utilisée dans toutes les cicatrisations superfi-cielles, cutanées et muqueuses.Mais le PRF n’est pas qu’une simple membrane

de fibrine. C’est une matrice complète contenantl’ensemble des éléments cellulaires et moléculai-res nécessaires à une cicatrisation optimale : enpiégeant la majeure partie des constituants favora-bles à la cicatrisation et à l’immunité présents dansun prélèvement sanguin, le PRF peut être considérécomme un concentré de cicatrisation totalementphysiologique, sans ajout ni manipulation.Il y aurait donc de nombreuses applications ex-

traorales à entrevoir, en particulier en chirurgieplastique, où la recherche de biomatériaux permet-tant d’améliorer le rendu esthétique des plaiescutanées est un problème récurrent. C’estd’ailleurs dans cette discipline que les colles defibrine furent, et sont encore, les plus utilisées, enraison de leur capacité à accélérer et améliorer lacicatrisation et à diminuer le risque de constitu-tions de chéloïdes particulièrement disgracieuses.Il existe cependant une limite importante à l’uti-

lisation systématique du PRF dans de nombreusessituations chirurgicales : les volumes de PRF quel’on peut produire sont nécessairement limités. Cebiomatériau est totalement autologue : issu du sangdu patient, on ne peut en obtenir qu’une quantitémodeste. Et impossible d’utiliser une banque dePRF issus de donneurs : chaque PRF est profondé-

ment marqué par son organisme d’originepuisqu’on y trouve toutes les cellules immunitairescirculantes et une vaste gamme de molécules plas-matiques hautement antigéniques. Ainsi, la tropgrande qualité intrinsèque de cette matrice defibrine naturelle la rend totalement spécifique à unindividu et à un seul.

Conclusion

Les concentrés plaquettaires en usage topique sontdes technologies encore récentes, mais leurs appli-cations sont déjà nombreuses, particulièrement enchirurgie orale et maxillofaciale. Malheureuse-ment, malgré l’engouement provoqué par ces adju-vants chirurgicaux, bien peu d’études s’y rappor-tant peuvent être considérées comme fiables. Dansle domaine des chirurgies parodontales, implantai-res et des greffes osseuses en particulier, les lacu-nes analytiques des travaux présentés sur les cPRPmènent parfois à des contradictions et confortentnos doutes sur l’identité biologique de ces prépara-tions : gel plaquettaire innovant ou simple colle defibrine autologue ?Pour le PRF, l’équation est différente. C’est un

biomatériau de cicatrisation dont les vertus ont étéparfaitement mises en évidence cliniquement. Ildemeure cependant nécessaire de mener des étu-

En résumé

Le PRF peut désormais être considéré commeun biomatériau de cicatrisation synthétisant enune seule membrane l’ensemble des paramè-tres nécessaires à une cicatrisation optimale :une matrice de fibrine polymérisée en architec-ture tétramoléculaire, l’incorporation intrinsè-que des cytokines plaquettaires et leucocytai-res dans la maille de fibrine, des plaquettes,des leucocytes et également quelques cellulessouches circulantes. Cependant, bien que lescytokines piégées dans le PRF et relarguéesprogressivement permettent l’accélération detous les phénomènes cellulaires, la matrice defibrine, cohérente et structurée, demeure né-cessairement l’élément clé de toutes les cica-trisations potentialisées par le PRF.Loin des controverses et des doutes associés

aux cPRP, ce biomatériau totalement naturelsemble effectivement accélérer les phénomè-nes de cicatrisation physiologiques. Cependant,il demeure important de ne pas espérer du PRFdes vertus miraculeuses : c’est un adjuvantchirugical et il ne saurait remplacer la justemaîtrise des thérapeutiques conventionnelles.

176 S. Dohan et al.

Page 37: Conc Plachetare

des cliniques selon des protocoles rationalisés etreproductibles afin de progresser dans la compré-hension de ce biomatériau, de valider ses utilisa-tions les plus simples et d’entrevoir de nouveauxchamps d’application toujours plus prometteurs.

Références

1. Whitman DH, Berry RL, Green DM. Platelet gel: an autolo-gous alternative to fibrin glue with applications in oral andmaxillofacial surgery. J Oral Maxillofac Surg 1997;55:1294–9.

2. Tayapongsak P, O’Brien DA, Monteiro CB, Arceo-Diaz LY.Autologous fibrin adhesive in mandibular reconstructionwith particulate cancellous bone and marrow. J Oral Max-illofac Surg 1994;52:161–6.

3. Matras H. Effect of various fibrin preparations on reimplan-tations in the rat skin. Osterr Z Stomatol 1970;67:338–59.

4. Matras H. Fibrin seal: the state of the art. J Oral MaxillofacSurg 1985;43:605–11.

5. Vinazzer H. Fibrin sealing: physiologic and biochemicalbackground. Facial Plast Surg 1985;2:291–5.

6. Matras H. Fibrin sealant in maxillofacial surgery. Develop-ment and indications. A review of the past 12 years. FacialPlast Surg 1985;2:297–313.

7. Gibble JW, Ness PM. Fibrin glue: the perfect operativesealant? Transfusion 1990;30:741–7.

8. Oz MC, Jeevanandam V, Smith CR, Williams MR, Kaynar AM,Frank RA, et al. Autologous fibrin glue from intraopera-tively collected platelet-rich plasma. Ann Thorac Surg1992;53:530–1.

9. Dugrillon A, Eichler H, Kern S, Kluter H. Autologous con-centrated platelet-rich plasma (cPRP) for local applicationin bone regeneration. Int J Oral Maxillofac Surg 2002;31:615–9.

10. Anitua E. The use of plasma-rich growth factors (PRGF) inoral surgery. Pract Proced Aesthet Dent 2001;13:487–93.

11. Dohan D, Donsimoni JM, Navarro G, Gaultier F. PlateletConcentrates. Part 1: technologies. Implantodontie 2003;12:5–16.

12. Landesberg R, Roy M, Glickman RS. Quantification ofgrowth factor levels using a simplified method of platelet-rich plasma gel preparation. J Oral Maxillofac Surg 2000;58:297–301.

13. Anitua E. Plasma rich in growth factors: preliminary resultsof use in the preparation of future sites for implants. Int JOral Maxillofac Implants 1999;14:529–35.

14. Sonnleitner D, Huemer P, Sullivan DY. A simplified tech-nique for producing platelet-rich plasma and platelet con-centrate for intraoral bone grafting techniques: a techni-cal note. Int J Oral Maxillofac Implants 2000;15:879–82.

15. Marx RE, Carlson ER, Eichstaedt RM, Schimmele SR,Strauss JE, Georgeff KR. Platelet-rich plasma: Growth fac-tor enhancement for bone grafts. Oral Surg Oral Med OralPathol Oral Radiol Endod 1998;85:638–46.

16. Lozada JL, Caplanis N, Proussaefs P, Willardsen J, Kam-meyer G. Platelet-rich plasma application in sinus graftsurgery: Part I--Background and processing techniques. JOral Implantol 2001;27:38–42.

17. Zimmermann R, Jakubietz R, Jakubietz M, Strasser E,Schlegel A, Wiltfang J, et al. Different preparation meth-ods to obtain platelet components as a source of growthfactors for local application. Transfusion 2001;41:1217–24.

18. Weibrich G, Kleis WK, Hafner G, Hitzler WE, Wagner W.Comparison of platelet, leukocyte, and growth factor lev-els in point-of-care platelet-enriched plasma, preparedusing a modified Curasan kit, with preparations receivedfrom a local blood bank. Clin Oral Implants Res 2003;14:357–62.

19. Weibrich G, Kleis WK, Buch R, Hitzler WE, Hafner G. TheHarvest Smart PRePTM system versus the Friadent-Schutzeplatelet-rich plasma kit. Clin Oral Implants Res 2003;14:233–9.

20. Appel TR, Potzsch B, Muller J, Von Lindern JJ, Berge SJ,Reich RH. Comparison of three different preparations ofplatelet concentrates for growth factor enrichment. ClinOral Implants Res 2002;13:522–8.

21. Gonshor A. Technique for producing platelet-rich plasmaand platelet concentrate: background and process. Int JPeriodontics Restorative Dent 2002;22:547–57.

22. Weibrich G, Kleis WK, Hafner G. Growth factor levels in theplatelet-rich plasma produced by 2 different methods:Curasan-type PRP kit versus PCCS PRP system. Int J OralMaxillofac Implants 2002;17:184–90.

23. Weibrich G, Kleis WK, Kunz-Kostomanolakis M, Loos AH,Wagner W. Correlation of platelet concentration inplatelet-rich plasma to the extraction method, age, sex,and platelet count of the donor. Int J Oral MaxillofacImplants 2001;16:693–9.

24. Marx RE. Platelet-rich plasma (PRP): what is PRP and whatis not PRP? Implant Dent 2001;10:225–8.

25. Weibrich G, Kleis WK, Hafner G, Hitzler WE. Growth factorlevels in platelet-rich plasma and correlations with donorage, sex, and platelet count. J Craniomaxillofac Surg2002;30:97–102.

26. Choukroun J, Adda F, Schoeffler C, Vervelle A. Une oppor-tunité en paro-implantologie : le PRF. Implantodontie2001;41:55–62.

27. Dohan S, Choukroun J, Dohan A, Donsimoni JM, Gabriel-eff D, Fioretti F, et al. Platelet rich fibrin (PRF): a newhealing biomaterial. Part 2: platelets and cytokines.Implantodontie 2004;13:99–108.

28. Dohan S, Choukroun J, Dohan A, Donsimoni JM, Gabriel-eff D, Fioretti F, et al. Platelet rich fibrin (PRF): a newhealing biomaterial. Part 1: biotechnologies and fibrin.Implantodontie 2004;13:87–97.

29. Dohan S, Choukroun J, Dohan A, Donsimoni JM, Gabriel-eff D, Fioretti F, et al. Platelet rich fibrin (PRF): a newhealing biomaterial. Part 3: immune features. Implant-odontie 2004;13:109–15.

30. Dohan D, Donsimoni JM, Navarro G, Gaultier F. PlateletConcentrates. Part 2: associated biology. Implantodontie2003;12:17–25.

31. Mosesson MW, Siebenlist KR, Meh DA. The structure andbiological features of fibrinogen and fibrin. Ann N Y AcadSci 2001;936:11–30.

32. Clark RA. Fibrin and wound healing. Ann N Y Acad Sci2001;936:355–67.

33. Lanir N, Ciano PS, Van de Water L, McDonagh J, Dvorak AM,Dvorak HF. Macrophage migration in fibrin gel matrices. II.Effects of clotting factor XIII, fibronectin, and glycosami-noglycan content on cell migration. J Immunol 1988;140:2340–9.

34. Brown LF, Lanir N, McDonagh J, Tognazzi K, Dvorak AM,Dvorak HF. Fibroblast migration in fibrin gel matrices. AmJ Pathol 1993;142:273–83.

35. Feng X, Clark RA, Galanakis D, Tonnesen MG. Fibrin andcollagen differentially regulate human dermal microvascu-lar endothelial cell integrins: stabilization ofalphav/beta3 mRNA by fibrin1. J Invest Dermatol 1999;113:913–9.

177De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 38: Conc Plachetare

36. Gross TJ, Leavell KJ, Peterson MW. CD11b/CD18 mediatesthe neutrophil chemotactic activity of fibrin degradationproduct D domain. Thromb Haemost 1997;77:894–900.

37. Koolwijk P, Van Erck MG, De Vree WJ, Vermeer MA,Weich HA, Hanemaaijer R, et al. Cooperative effect ofTNFalpha, bFGF, and VEGF on the formation of tubularstructures of human microvascular endothelial cells in afibrin matrix. Role of urokinase activity. J Cell Biol 1996;132:1177–88.

38. Collen A, Koolwijk P, Kroon M, Van Hinsbergh VW. Influ-ence of fibrin structure on the formation and maintenanceof capillary-like tubules by human microvascular endothe-lial cells. Angiogenesis 1998;2:153–65.

39. Van Hinsbergh VW, Kooistra T, Scheffer MA, Hajo vanBockel J, Van Muijen GN. Tumor necrosis factor inducesthe production of urokinase-type plasminogen activator byhuman endothelial cells. Blood 1990;75:1991–8.

40. Van Hinsbergh VW, Collen A, Koolwijk P. Role of fibrinmatrix in angiogenesis. Ann N Y Acad Sci 2001;936:426–37.

41. Haroon ZA, Hettasch JM, Lai TS, Dewhirst MW, Green-berg CS. Tissue transglutaminase is expressed, active, anddirectly involved in rat dermal wound healing and angio-genesis. FASEB J 1999;13:1787–95.

42. Collen A, Smorenburg SM, Peters E, Lupu F, Koolwijk P, VanNoorden C, et al. Unfractionated and low molecular weightheparin affect fibrin structure and angiogenesis in vitro.Cancer Res 2000;60:6196–200.

43. Collen A, Maas A, Kooistra T, Lupu F, Grimbergen J,Haas FJ, et al. Aberrant fibrin formation and cross-linkingof fibrinogen Nieuwegein, a variant with a shortenedAalpha-chain, alters endothelial capillary tube formation.Blood 2001;97:973–80.

44. Lorimier S, Hornebeck W, Godeau G, Pellat B, Gillery P,Maquart FX, et al. Morphometric studies of collagen andfibrin lattices contracted by human gingival fibroblasts;comparison with dermal fibroblasts. J Dent Res 1998;77:1717–29.

45. Lorimier S, Bouthors S, Droulle C, Maquin DL, Maquart FX,Gillery P, et al. The rate of fibrinolysis is increased by freeretraction of human gingival fibroblast populated fibrinlattices. Int J Biochem Cell Biol 1997;29:181–9.

46. Bonucci E, Marini E, Valdinucci F, Fortunato G. Osteogenicresponse to hydroxyapatite-fibrin implants in maxillofacialbone defects. Eur J Oral Sci 1997;105:557–61.

47. Gurevich O, Vexler A, Marx G, Prigozhina T, Levdansky L,Slavin S, et al. Fibrin microbeads for isolating and growingbone marrow-derived progenitor cells capable of formingbone tissue. Tissue Eng 2002;8:661–72.

48. Schilephake H. Bone growth factors in maxillofacial skel-etal reconstruction. Int J Oral Maxillofac Surg 2002;31(5):469–84.

49. Giannobile WV. Periodontal tissue engineering by growthfactors. Bone 1996;19(suppl1):23S–37S.

50. Border WA, Noble NA. Transforming growth factor beta intissue fibrosis. N Engl J Med 1994;331:1286–92.

51. Rosenkranz S, Kazlauskas A. Evidence for distinct signalingproperties and biological responses induced by the PDGFreceptor alpha and beta subtypes. Growth Factors 1999;16:201–16.

52. Heldin CH. Simultaneous induction of stimulatory andinhibitory signals by PDGF. FEBS Lett 1997;410:17–21.

53. Yu J, Ustach C, Kim HR. Platelet-derived growth factorsignaling and human cancer. J Biochem Mol Biol 2003;36:49–59.

54. Zapf J, Donath MY, Schmid C. Spectrum of effectiveness ofinsulin-like growth factors (IGF). Schweiz Med Wochenschr2000;130:190–5.

55. Winkler R, Pasleau F, Boussif N, Hodzic D. The IGF system:summary and recent data. Rev Med Liege 2000;55:725–39.

56. Butt AJ, Firth SM, Baxter RC. The IGF axis and programmedcell death. Immunol Cell Biol 1999;77:256–62.

57. Pierce GF, Mustoe TA, Lingelbach J, Masakowski VR, Grif-fin GL, Senior RM, et al. Platelet-derived growth factor andtransforming growth factor-beta enhance tissue repairactivities by unique mechanisms. J Cell Biol 1989;109:429–40.

58. Giannobile WV, Hernandez RA, Finkelman RD, Ryan S,Kiritsy CP, D’Andrea M, et al. Comparative effects ofplatelet-derived growth factor-BB and insulin-like growthfactor-I, individually and in combination, on periodontalregeneration in Macaca fascicularis. J Periodontal Res1996;31:301–12.

59. Piche JE, Graves DT. Study of the growth factor require-ments of human bone-derived cells: a comparison withhuman fibroblasts. Bone 1989;10:131–8.

60. Oprea WE, Karp JM, Hosseini MM, Davies JE. Effect ofplatelet releasate on bone cell migration and recruitmentin vitro. J Craniofac Surg 2003;14:292–300.

61. Gruber R, Varga F, Fischer MB, Watzek G. Platelets stimu-late proliferation of bone cells: involvement of platelet-derived growth factor, microparticles and membranes.Clin Oral Implants Res 2002;13:529–35.

62. Tiggelman AM, Boers W, Linthorst C, Brand HS, Sala M,Chamuleau RA. Interleukin-6 production by human liver(myo)fibroblasts in culture. Evidence for a regulatory roleof LPS, IL-1 beta and TNF alpha. J Hepatol 1995;23:295–306.

63. Tiggelman AM, Boers W, Linthorst C, Sala M, Chamu-leau RA. Collagen synthesis by human liver (myo)fibroblasts in culture: evidence for a regulatory role ofIL-1 beta, IL-4, TGF beta and IFN gamma. J Hepatol 1995;23:307–17.

64. Hayashi Y, Kobayashi M, Kuwata H, Atsumi G, Deguchi K,Feng Wei X, et al. Interferon-gamma and interleukin4 inhibit interleukin-1 beta-induced delayed prostaglandinE(2) generation through suppression of cyclooxygenase-2 expression in human fibroblasts. Cytokine 2000;12:603–12.

65. Santhosh Kumar TR, Krishnan LK. Endothelial cell growthfactor (ECGF) enmeshed with fibrin matrix enhances pro-liferation of EC in vitro. Biomaterials 2001;22:2769–76.

66. Lariviere B, Rouleau M, Picard S, Beaulieu AD. Humanplasma fibronectin potentiates the mitogenic activity ofplatelet-derived growth factor and complements its woundhealing effects. Wound Repair Regen 2003;11:79–89.

67. Costantini V, Zacharski LR. Fibrin and cancer. ThrombHaemost 1993;69:406–14.

68. Brown LF, Van de Water L, Harvey VS, Dvorak HF. Fibrino-gen influx and accumulation of cross-linked fibrin in heal-ing wounds and in tumor stroma. Am J Pathol 1988;130:455–65.

69. Sahni A, Odrljin T, Francis CW. Binding of basic fibroblastgrowth factor to fibrinogen and fibrin. J Biol Chem 1998;273:7554–9.

70. Sahni A, Francis CW. Vascular endothelial growth factorbinds to fibrinogen and fibrin and stimulates endothelialcell proliferation. Blood 2000;96:3772–8.

71. Simpson-Haidaris PJ, Rybarczyk B. Tumors and fibrinogen.The role of fibrinogen as an extracellular matrix protein.Ann N Y Acad Sci 2001;936:406–25.

72. Lee SY, Lee KP, Lim JW. Identification and biosynthesis offibrinogen in human uterine cervix carcinoma cells.Thromb Haemost 1996;75:466–70.

178 S. Dohan et al.

Page 39: Conc Plachetare

73. Parrott JA, Whaley PD, Skinner MK. Extrahepatic expres-sion of fibrinogen by granulosa cells: potential role inovulation. Endocrinology 1993;133:1645–9.

74. Gaultier F, Navarro G, Donsimoni JM, Dohan D. Plateletconcentrates. Part 3: clinical applications. Implantodontie2004;13:3–11.

75. Gehring S, Hoerauf H, Laqua H, Kirchner H, Kluter H.Preparation of autologous platelets for the ophthalmologictreatment of macular holes. Transfusion 1999;39:144–8.

76. Mulhern MG, Cullinane A, Cleary PE. Visual and anatomicalsuccess with short-term macular tamponade and autolo-gous platelet concentrate. Graefes Arch Clin Exp Ophthal-mol 2000;238:577–83.

77. Paques M, Chastang C, Mathis A, Sahel J, Massin P,Dosquet C, et al. Effect of autologous platelet concentratein surgery for idiopathic macular hole: results of a multi-center, double-masked, randomized trial. Platelets inMacular Hole Surgery Group. Ophthalmology 1999;106:932–8.

78. Saltz R, Sierra D, Feldman D, Saltz MB, Dimick A, Vas-conez LO. Experimental and clinical applications of fibringlue. Plast Reconstr Surg 1991;88:1005–17.

79. Man D, Plosker H, Winland-Brown JE. The use of autologousplatelet-rich plasma (platelet gel) and autologous platelet-poor plasma (fibrin glue) in cosmetic surgery. Plast Recon-str Surg 2001;107:229–39.

80. Moore MM, Freeman MG. Fibrin sealant in breast surgery. JLong Term Eff Med Implants 1998;8:133–42.

81. Hotz G. Alveolar ridge augmentation with hydroxylapatiteusing fibrin sealant for fixation. Part II: Clinical applica-tion. Int J Oral Maxillofac Surg 1991;20:208–13.

82. Hotz G. Alveolar ridge augmentation with hydroxylapatiteusing fibrin sealant for fixation. Part I: An experimentalstudy. Int J Oral Maxillofac Surg 1991;20:204–7.

83. Petrungaro PS. Using platelet-rich plasma to acceleratesoft tissue maturation in esthetic periodontal surgery.Compend Contin Educ Dent 2001;22:729–34.

84. Kassolis JD, Rosen PS, Reynolds MA. Alveolar ridge andsinus augmentation utilizing platelet-rich plasma in com-bination with freeze-dried bone allograft: case series. JPeriodontol 2000;71:1654–61.

85. Petrungaro PS. Treatment of the infected implant siteusing platelet-rich plasma. Compend Contin Educ Dent2002;23:363–70.

86. De Obarrio JJ, Arauz-Dutari JI, Chamberlain TM, Croston A.The use of autologous growth factors in periodontal surgi-cal therapy: platelet gel biotechnology--case reports. Int JPeriodontics Restorative Dent 2000;20:486–97.

87. Lekovic V, Camargo PM, Weinlaender M, Vasilic N, Ken-ney EB. Comparison of platelet-rich plasma, bovine porousbone mineral, and guided tissue regeneration versusplatelet-rich plasma and bovine porous bone mineral in thetreatment of intrabony defects: a reentry study. J Period-ontol 2002;73:198–205.

88. Camargo PM, Lekovic V, Weinlaender M, Vasilic N, Madza-revic M, Kenney EB. Platelet-rich plasma and bovine porousbone mineral combined with guided tissue regeneration inthe treatment of intrabony defects in humans. J Periodon-tal Res 2002;37:300–6.

89. Lekovic V, Camargo PM, Weinlaender M, Vasilic N, Ale-ksic Z, Kenney EB. Effectiveness of a combination ofplatelet-rich plasma, bovine porous bone mineral andguided tissue regeneration in the treatment of mandibulargrade II molar furcations in humans. J Clin Periodontol2003;30:746–51.

90. Zechner W, Tangl S, Tepper G, Furst G, Bernhart T, Haas R,et al. Influence of platelet-rich plasma on osseous healingof dental implants: a histologic and histomorphometricstudy in minipigs. Int J Oral Maxillofac Implants 2003;18:15–22.

91. Aghaloo TL, Moy PK, Freymiller EG. Investigation ofplatelet-rich plasma in rabbit cranial defects: A pilotstudy. J Oral Maxillofac Surg 2002;60:1176–81.

92. Philippart P, Brasseur M, Hoyaux D, Pochet R. Humanrecombinant tissue factor, platelet-rich plasma, and tet-racycline induce a high-quality human bone graft: a 5-yearsurvey. Int J Oral Maxillofac Implants 2003;18:411–6.

93. Wiltfang J, Schlegel KA, Schultze-Mosgau S, Nkenke E,Zimmermann R, Kessler P. Sinus floor augmentation withbeta-tricalciumphosphate (beta-TCP): does platelet-richplasma promote its osseous integration and degradation?Clin Oral Implants Res 2003;14:213–8.

94. Rodriguez A, Anastassov GE, Lee H, Buchbinder D, Wet-tan H. Maxillary sinus augmentation with deproteinatedbovine bone and platelet rich plasma with simultaneousinsertion of endosseous implants. J Oral Maxillofac Surg2003;61:157–63.

95. Danesh-Meyer MJ, Filstein MR, Shanaman R. Histologicalevaluation of sinus augmentation using platelet richplasma (PRP): a case series. J Int Acad Periodontol 2001;3:48–56.

96. Froum SJ, Wallace SS, Tarnow DP, Cho SC. Effect ofplatelet-rich plasma on bone growth and osseointegrationin human maxillary sinus grafts: three bilateral casereports. Int J Periodontics Restorative Dent 2002;22:45–53.

97. Dvorak HF, Harvey VS, Estrella P, Brown LF, McDonagh J,Dvorak AM. Fibrin containing gels induce angiogenesis.Implications for tumor stroma generation and wound heal-ing. Lab Invest 1987;57:673–86.

98. Nehls V, Herrmann R. The configuration of fibrin clotsdetermines capillary morphogenesis and endothelial cellmigration. Microvasc Res 1996;51:347–64.

99. Loike JD, Sodeik B, Cao L, Leucona S, Weitz JI, Detmers PA,et al. CD11c/CD18 on neutrophils recognizes a domain atthe N terminus of the A alpha chain of fibrinogen. Proc NatlAcad Sci USA 1991;88:1044–8.

100. Kazura JW, Wenger JD, Salata RA, Budzynski AZ, Gold-smith GH. Modulation of polymorphonuclear leukocytemicrobicidal activity and oxidative metabolism by fibrino-gen degradation products D and E. J Clin Invest 1989;83:1916–24.

101. Hamaguchi M, Morishita Y, Takahashi I, Ogura M, Taka-matsu J, Saito H. FDP D-dimer induces the secretion ofinterleukin-1, urokinase-type plasminogen activator, andplasminogen activator inhibitor-2 in a human promono-cytic leukemia cell line. Blood 1991;77:94–100.

102. Gray AJ, Bishop JE, Reeves JT, Laurent GJ. A alpha and Bbeta chains of fibrinogen stimulate proliferation of humanfibroblasts. J Cell Sci 1993;104(Pt2):409–13.

103. Tuan TL, Song A, Chang S, Younai S, Nimni ME. In vitrofibroplasia: matrix contraction, cell growth, and collagenproduction of fibroblasts cultured in fibrin gels. Exp CellRes 1996;223:127–34.

104. Bucala R, Spiegel LA, Chesney J, Hogan M, Cerami A.Circulating fibrocytes define a new leukocyte subpopula-tion that mediates tissue repair. Mol Med 1994;1:71–81.

179De l’usage des concentrés plaquettaires autologues en application topique

Page 40: Conc Plachetare

105. Badiavas EV, Abedi M, Butmarc J, Falanga V, Quesen-berry P. Participation of bone marrow derived cells incutaneous wound healing. J Cell Physiol 2003;196:245–50.

106. Bensaid W, Triffitt JT, Blanchat C, Oudina K, Sedel L,Petite H. A biodegradable fibrin scaffold for mesenchymalstem cell transplantation. Biomaterials 2003;24:2497–502.

107. Yamada Y, Boo JS, Ozawa R, Nagasaka T, Okazaki Y,Hata K, et al. Bone regeneration following injection ofmesenchymal stem cells and fibrin glue with a biodegrad-able scaffold. J Craniomaxillofac Surg 2003;31:27–33.

108. Boo JS, Yamada Y, Okazaki Y, Hibino Y, Okada K, Hata K,et al. Tissue-engineered bone using mesenchymal stemcells and a biodegradable scaffold. J Craniofac Surg 2002;13:231–43.

109. Soffer E, Ouhayoun JP, Anagnostou F. Fibrin sealants andplatelet preparations in bone and periodontal healing.Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod 2003;95:521–8.

110. Kawamura M, Urist MR. Human fibrin is a physiologic deliv-ery system for bone morphogenetic protein. Clin Orthop1988;235:302–10.

111. Choukroun J, Simonpieri A, Girard MO, Schoeffler C,Dohan S, Dohan D. Platelet Concentrates. Part 4: histologi-cal analysis. Implantodontie 2004;13:167–72.

112. Simonpieri A, Choukroun J, Girard MO, Ouaknine T,Dohan D. Immediate post-extraction implantation: inter-est of the PRF. Implantodontie 2004;13:177–89.

180 S. Dohan et al.