Download pdf - Studia Orontica VI

Transcript
Page 1: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

1

Studia Orontica دراسات العاصي

VI 2009

Page 2: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

2

Page 3: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

3

Studia Orontica est le bulletin du Centre Syrien de la Recherche Archéologique

Vallée de l'Oronte - Palais Tabet

Publié à Damas par la Direction Générale des Antiquités et des Musées de Syrie

RESPONSABLE DE LA PUBLICATION : Bassam JAMOUS.

REDACTEUR EN CHEF : Michel AL-MAQDISSI.

COMITE DE REDACTION : Mouhamed MUHAFEL, Fayssal ABDALLAH, Mammoun

ABDULKARIM, Antoine SOULEIMAN et Ahmad TARAQJI.

REALISATION : Bassel CHEHADE ET YASMINE KANHOUCHE.

SOMMAIRE

AL-MAQDISSI Michel : Première leçon d’un déchirement archéologique annoncé ?

FREU Jacques : Qatna et les Hittites.

MAKINSON Martin : Mansuâte (Emesa?), porte d’Aram-Damas. CLUZAN Sophie, TARAQJI Ahmad : Mission archéologique de Tulul el-Far première campagne. AL-MAQDISSI Michel, PARAYRE Dominique, SAUVAGE Martin : La mission Conjointe franco-syrienne de l’Oronte : première campagne. CAVIGNEAUX Antoine, COLONNA d’ISTRIA Laurent : Les découverts épigraphiques des fouilles récentes de Mari. État des recherches en janvier 2009. JAGHNOON Malathios : Note à propos des symboles de la mosaïque de l’église de Taybet el- Imam. JAGHNOON Malathios : Note sur quatre sarcophages trouvés à Homs en 2006. JAGHNOON Malathios : Note sur les noms anciens de l’Oronte et leurs significations.

Numéro publié avec le soutien de l’Institut Français du Proche-Orient

www.StudiaOrontica.org

7

9

24

33

42

79

87

89

51

Page 4: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

4

Page 5: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

5

Adnan Bounni

(Homs, 8 juin 1926 – Damas, 21 octobre 2008)

Le dernier géant des pionniers de l’archéologie syrienne

عدنان البني )2008 تشرين األول 21 دمشق – 1926 حزيران 8حمص (

آخر عمالقة علم اآلثار السورية

Photographie de H. Weiss : Rome 6 avril 2004

Page 6: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

6

Page 7: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

7

Première leçon d’un déchirement archéologique annoncé ?

Michel Al-Maqdissi DGAM, Damas

Pour mon maître le Dr Adnan BOUNNI

Il est des victoires au goût amer : le grand succès des découvertes archéologiques réalisées récemment en terre syrienne apporte de nombreuses interprétations cruciales qui devraient, une fois connues, dévoiler un déchirement réel. Dans de nombreux chantiers, des équipes sont en crise, je dirais même en déchirement total. L’archéologie syrienne se cherche, elle est malade d’un siècle et demi d’héritage. Tirant objectivement les conclusions de cette situation, nous pouvons affirmer solennellement que presque chaque équipe connaît ses propres difficultés. Depuis 1970, aucune fouille n’est parvenue à son terme. L’affaiblissement continu des deux grandes écoles qui ont dominé la vie archéologique depuis l’indépendance va

Page 8: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

8

avoir des conséquences dramatiques à plusieurs niveaux : science, publications, études, rapports et analyses… Cette situation s’est aggravée à un rythme effréné avec l’apparition massive sur la scène archéologique des nouvelles écoles européennes et anglo-saxonnes. En effet, cela va accélérer le caractère délicat de la solution sur le terrain et l’archéologie syrienne risque réellement un déchirement profond. Un déchirement éclatant qui se manifeste par une crise de conscience. Un déchirement lié à un égoïsme mortel. Quelle que soit la réaction, bonne ou mauvaise, la prochaine génération d’archéologues syriens devrait être confrontée à un règlement de compte radical, car avec la crise actuelle et au fil des prochaines années apparaîtra un obstacle à toute solution qui serait le point d’équilibre entre l’objectif scientifique de notre chère archéologie nationale et les intérêts des archéologues et institutions étrangères. Ainsi, la conclusion de cette première leçon n’est pas écrite et ne sera pas dévoilée avant le départ de l’actuelle génération. Il faut espérer que cette histoire se termine sans trop de dégâts. On n’a jamais vu, depuis le début de l’aventure archéologique en Syrie, il y a presque un siècle et demi, une situation qui amène notre discipline à l’épreuve d’une crise réelle de conscience. Etat dicté par des propos tenus récemment par un flamboyant de l’archéologie syrienne qui ne peuvent que susciter d’inquiétantes interrogations sur leurs retombées au niveau scientifique, voire même humain. L’archéologie, science du passé, tire son charme de son « espace de noblesse ». Lorsque l’on applique cette douce discipline à la « politique », dans le but de devenir roi à la place du roi, elle se transforme radicalement en archéologie de « catastrophe » en réduisant ses valeurs au plus bas ou plutôt à son « espace de paranoïa ». Il en effet est regrettable qu’actuellement plusieurs équipes et missions raisonnent ici-bas sur des bases et des idées malades. Ils cherchent, malheureusement, à travers la science une « archéologie de personnalité » ou plutôt par un raisonnement purement interne une « archéologie d’égoïsme ». La cible est toujours la même : l’« archéologie de principe » doit éliminer l’« archéologie de l’inquiétude » afin d’éviter que l’« espace archéologique du déchirement » m’amène à la peur de passer vers le destin inévitable de « l’espace archéologique de l’absurdité ».

Grand Café, Oldenburg 22 septembre 2008

Page 9: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

9

Qatna et les Hittites

Jacques Freu Université de Nice, Nice Introduction L’antique cité de Qatna dont les ruines jouxtent le village moderne de Mišrife/ Mishirfeh était située à proximité et à l’est de la vallée de l’Oronte, à 18 km au nord-est de Homs. Le tell, entouré de remparts, forme un quadrilatère d’une superficie de 110 ha. Des fouilles entreprises au cours des années 1924-1929 avaient permis de dégager divers bâtiments, le palais en particulier, et de mettre à jour des dizaines de tablettes cunéiformes1. En 1994 une équipe archéologique syrienne dirigée par Michel Al-Maqdissi a engagé une nouvelle série de recherches dont la suite a été confiée à partir de 1999 à une équipe syro-germano-italienne2. La découverte en 2002 de 67 tablettes cunéiformes complètes ou fragmentaires dans un corridor dépendant du palais a profondément modifié ce que l’on croyait savoir de l’histoire de la cité et de la Syrie à l’époque amarnienne. Les interventions du roi hittite Šuppiluliuma (c.1350-1319 av. J.C.) dans la région et ses guerres contre le roi de

1 Du Mesnil du Buisson, R., Le site archéologique de Mishrifé-Qatna, Paris 1935 ; Bottéro, J., « Les inventaires de Qatna », RA 43, 1949, pp. 1-40 ; 137-215 ; « Autres textes de Qatna », RA 44, 1950, pp. 105-122. 2 Al-Maqdissi, M., Luciani, M., Morandi Bonacossi, D., Novák, M., Pfälzner, P., Excavating Qatna I, Damascus 2002, Introduction pp.7-16.

Page 10: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

10

Mitanni, Tušratta, ont reçu ainsi un éclairage nouveau qui nécessite une réécriture du récit des évènements ayant précédé le triomphe du roi de Hatti3. Qatna avait été un important royaume dès l’âge du Bronze Moyen, rival de celui de Yamhad (Alep), et ses rois, Iš’ī-Haddu et son fils Amut-pi-‘El avaient joué un rôle important dans les relations internationales à l’époque des rois d’Aššur, de Mari et de Babylone, Šamši-Adad, Zimri-Lim et Hammurabi (1792-1750 av. J.C.), en « chronologie moyenne »)4. Mais Qatna est ignorée des « annales » des rois hittites de l’Ancien Royaume (Hattušili I et Muršili I) qui ont attaqué la Syrie, détruit Alep et pillé Babylone à la fin de cette époque (1595 av. J.C.). La mention d’une victoire remportée par le roi d’Alep (Yamhad) Yarim-Lim III sur les troupes de Qatna (AlT 6)5 montre que la vieille hostilité entre les deux royaumes avait perduré longtemps, ce qui faisait de Qatna l’alliée objective des Hittites avant la destruction d’Alep par ces derniers. Il y a peu de doute que, malgré les campagnes, menées jusqu’à l’Euphrate en l’an XXXIII de son règne, par le pharaon conquérant, Thutmosis III (1479-1425 av. J.C.), les opérations conduites dans la vallée de l’Oronte par son fils Aménophis II en l’an VII (1419 av.J.C.), l’intervention des rois hittites Tuthaliya I et Hattušili II en Syrie et l’alliance entre Hittites et Egyptiens (traité de Kuruštama), la ville « amorrite » est restée, comme sa voisine Qadeš (pays de Kinza), sous la domination des rois du Mitanni au cours du 15ème siècle et a subi une forte pénétration d’éléments hourrites. La présence dans les ruines datées du Bronze Récent d’exemplaires de la « céramique de Nuzi », caractéristique du monde mitannien6, et l’abondance des termes hourrites dans les textes de cette époque retrouvés à Qatna7, montrent que la ville était alors soumise aux monarques mitanniens qui portaient des noms védiques mais qui régnaient sur un pays peuplé majoritairement de Hourrites en haute Mésopotamie (pays de Hurri/Mitanni/Hanigalbat) et sur une population mêlée de Sémites occidentaux (Amorrites) et de Hourrites en Syrie du nord. La réconciliation du Mitanni et de l’Egypte en 1419 av. J.C., puis une série de mariages dynastiques, trois pharaons ayant épousé successivement les filles de leur allié hourrite, ont assuré la paix en Syrie. Les deux empires cohabitaient pacifique-ment. Le pharaon tenait les pays de Canaan, d’Ube (Apina, la Damascène) et d’Amurru alors que le roi de Mitanni étendait sa domination plus au nord, sur les pays d’Alep, de Mukiš (Alalakh), de Nukhašše, de Qadeš et de Qatna8. Seule Ugarit restait « égyptienne » dans cette région.

3 Richter, Th., « Der ‘einjährige Feldzug’ Šuppiluliumas I. von Hatti in Syrien nach Textfunden des Jahres 2002 in Mišrife/Qatna », UF 34, 2002, pp.603-618; « Das Archiv des Idanda », MDOG 135, 2003, pp. 167-188. 4 Klengel, H., GS II, 1965, pp. 117-131; Syria 3000 to 300 B.C., Berlin 1965, pp. 65-70; « Qatna—Ein historischer Überblick », MDOG 132, 2000, pp. 239-252; Morandi Bonacossi D., Eidem, J., « A Royal Seal of Ishi-Addu, King of Qatna », Akkadica 127, 2006, pp. 41-57. 5 Wiseman, D., The Alalakh Tablets, London 1953, pp. 33-34, où la lecture « homme d’Ešnunna » doit être remplacée par celle de « l’homme de Qatna », Klengel, H., GS II, p. 106 ; MDOG 132, 2000, p. 247. 6 Novák, M., « The Chronology of the Royal Palace of Qatna », Äg.Lev. 14, 2004, pp. 299-317, pp.306-309. 7 Richter, Th., « Kleine Beiträge zum hurritischen Wörterbuc », AoF 32, 2005, pp. 23-44 8 Freu, J., « Histoire du Mitanni », 2003, pp. 65-98.

Page 11: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

11

La dure crise qui s’était abattue sur le royaume hittite au cours du règne de Tuthaliya III (c.1370-1350 av. J.C.) avait écarté toute menace venue du nord et avait consolidé la paix en Syrie. Les ambitions de son fils, Šuppiluliuma (c.1350-1319 av. J.C.), vont rapidement modifier la donne. Le jeune roi hittite après avoir aidé son père, vieux et malade, à redresser la situation en Asie mineure a repris le chemin des riches pays du sud avec la ferme intention de briser la puissance mitannienne et d’enlever au roi Tušratta ses possessions syriennes. L’apport des nouveaux textes de Qatna et leur arrière-plan chronologique ne peuvent être appréciés qu’en tenant compte de la situation nouvelle créée par les initiatives du roi hittite et par la politique de passivité du « pharaon hérétique », Akhenaton. Les premières offensives de Šuppiluliuma en Išuwa et en Syrie a) EA 17 et l’Išuwa La lettre amarnienne EA 17, adressée par le jeune roi de Mitanni, Tušratta, au pharaon Aménophis III, son « beau-frère », marquait la reprise des relations entre les deux cours après le meurtre du roi hourrite Artašumara, fils de Šutarna II et frère aîné de Tušratta. Ce dernier avait subi quelque temps la tutelle du meurtrier, le « vizir » UD-hi, avant de pouvoir se débarrasser de lui, retrouver sa liberté d’action et rétablir des relations cordiales avec son « beau-frère », le pharaon. La fin du message, en prélude à l’annonce de l’envoi de « présents d’hommage » au roi d’Egypte, mentionnait un événement récent : « [...] l’année suivante [de la mort] de mon frère [je fus attaqué] par tout le pays de Hatti. Quand l’ennemi s’avança contre mon pays, Tešub, mon seigneur, le livra dans ma main et je le vainquis. Pas un seul ne retourna dans son pays. Je t’envoie en conséquence un char, deux chevaux, un serviteur et une servante du butin pris aux Hittites »9. Cet échec de Šuppiluliuma correspond certainement à sa première tentative pour reconquérir l’Išuwa. Lui-même l’a reconnu dans le traité qu’il a conclu bien plus tard avec le fils de Tušratta, Šattiwaza, en insistant sur le fait que lors de son expédition victorieuse il avait traversé l’Euphrate et soumis le pays d’Išuwa « pour la seconde fois » (CTH 51 § 2)10. La date de la lettre EA 17, la première du dossier égypto-mitannien, doit se situer au début de la « correspondance amarnienne » dont les tablettes conservées ont commencé à arriver en Egypte vers l’an XXXII du vieux pharaon (1349/1348 av. J.C.), correspondant à l’an VI d’Akhenaton si on admet une corégence entre ce roi d’Egypte et son fils, sinon 1359/1358 av. J.C.). L’attaque hittite aurait donc suivi d’assez près l’avènement de Šuppiluliuma.

9 Moran, W., « The Amarna Letters », 1992, pp. 41-42 (EA 17); cf. Kühne, C., « Die Chronologie der internationalen Korrespondenz von El-Amarna », AOAT 17, 1983, pp. 17-23; Kitchen, K., « Suppiluliuma and the Amarna Pharaohs », Liverpool 1962, p. 39, date EA 17 (comme Kempinski EA 31) de l’an XVIII de ce pharaon, 15 ans trop tôt. 10 Beckman, G., HDT n°6A, 38-44, pp. 38-39.

Page 12: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

12

b) Le raid syrien (the first foray) : le Nuhašše Le roi hittite a cherché une occasion de prendre sa revanche et l’a trouvée dans l’appel que lui a lancé un vassal du roi de Mitanni, Šarrupši, « roi » (où l’un des « rois ») de Nuhašše, vaste région de steppe située entre Alep et la vallée de l’Oronte qui était divisée entre plusieurs principautés mais dont l’un des « seigneurs » disposait d’une sorte de prééminence et était reconnu comme le roi suprême du pays par ses compatriotes et par les puissances11. Le traité conclu bien des années plus tard avec « Tette le habiru », reconnu comme roi de Nuhašše par Šuppiluliuma (CTH 53), prétend que Tušratta ayant cherché à tuer Šarrupši et étant entré avec troupes et chars dans son pays, Šuppiluliuma avait envoyé ses forces dégager ce dernier de l’emprise hourrite : « Quand le roi de Mitanni chercha à tuer Šarrupši et que le roi de Mitanni entra dans le pays de Nuhašše avec ses troupes-huradu et ses chars et l’opprima, Šarrupši envoya son messager au roi de Hatti, disant : « Je suis le sujet du roi de hatti. Qu’il me sauve ! » Et moi, le Soleil, j’envoyai troupes et chars à son aide et ils chassèrent le roi de Mitanni avec ses troupes-huradu et ses chars hors du pays de Nuhašše »12. Mais l’aide fournie à Šarrupši n’a pas suffi à rétablir définitivement la situation de celui-ci et le roi hittite, dans le même texte, prétextait de l’hostilité du pays d’Išuwa pour expliquer le retard qu’il avait pris à revenir en Nuhašše, selon le topos habituel. Le texte de CTH 53 se poursuit, avant une longue lacune, par le récit du début de la « guerre d’un an » dont il ne reste que quelques lignes mais qui est préservé dans l’introduction historique du traité conclu avec Šattiwaza, le fils de Tušratta, des années plus tard (CTH 51). Ce texte, intact, nous apprend que lors de son arrivée en Nuhašše, au cours de la « campagne syrienne d’un an » Šuppiluliuma avait dû constater que Šarrupši « avait disparu » ou « s’était caché ». Il avait fait déporter les membres de sa famille13. La première grande offensive hittite, antérieure à la « campagne d’un an » (le « first foray »), avait donc pénétré très loin en territoire syrien. Le traité avec Šattiwaza en précise l’étendue : « Quand Moi, le Héros, le roi de Hatti, je tournai mon attention vers Tušratta, le roi de Mitanni, je pillai les pays de la rive occidentale du fleuve (Euphrate) et je pris le mont Liban (comme frontière) »14. D’après le roi hittite Tušratta aurait répondu à ses provocations en menaçant de piller à son tour les mêmes régions, ce qui était la justification de la seconde offensive des Hittites en Išuwa et en Syrie menée par Šuppiluliuma quelques années plus tard (la « one year syrian campaign »). Des lettres amarniennes et les textes de Qatna permettent d’apprécier l’ampleur réelle d’un événement que K.Kitchen avait défini comme le « first foray » de Šuppiluliuma en

11 RGTC 6, 291-292; Klengel, H., GS II, 18-57, pp.33-57. 12 CTH 53 ; Weidner, E., PDK , 1923, 58-71 ; Beckman, G., HDT n°7, 50-54, p.50 (§ 1); Altman, A., « The Submission of Šarrupši of Nuhašše to Šuppiluliuma I », UF 33, 2001, pp. 27-47, pp. 27-29. 13 Beckman, G., HDT n°6A, CTH 51 § 8 (A I 38-40); Altman,, A., ibid., 39-40; Wilhelm, G., TUAT 2, 2005, n.22 p.116. 14 Beckman, G., ibid., § 1 (KBo I 1 ro 1-4); cf. RGTC 6, 285 (ŒUR.SAG Niplani).

Page 13: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

13

Syrie15 et dont le bref « compte-rendu » fait par CTH 51 dissimule volontairement l’importance. c) La lettre de Rib-Hadda, EA 75 L’un des plus fidèles vassaux du pharaon, le hazannu (« maire ») de Gubla (Byblos), Rib-Hadda, en général plus préoccupé des affaires locales que de la politique des puissances et dont toutes les lettres adressées à Aménophis III sont un catalogue de dénonciations des « crimes » de son principal ennemi, le prince d’Amurru, ‘Abdi-Aširta, redoutable trublion qui s’était emparé de plusieurs cités au nord de Byblos, tuant leurs princes et lançant des appels à la révolte tout en se déclarant fidèle à l’autorité égyptienne. Le pharaon laissait souvent faire dans de tels cas avant de réagir quand il le jugeait nécessaire16. Dans la lettre EA 75, après avoir déploré sa pénible situation face aux attaques des bandes de ‘Apiru (« dissidents/hors-la-loi ») et aux meurtres de ses « frères », Rib-Hadda en venait à un événement de grande portée qui bouleversait l’équilibre des forces en Syrie : « Que le roi soit informé que le roi de Hatti a pris tous les pays (KUR.KUR) qui sont les ‘domaines de vie’ (KUŠ=ašibat ; TI.TI=balati) du roi de Mitanni. Vois le roi de Nah<ri>ma [a perdu] le pays des Grands Rois (LUGAL. LUGAL) [alors que] ‘Abdi-Aširta, [l’esclave] et le chien ne cesse de prendre les pays du roi] » (EA 75 : 35-42)17. La date de ce message n’est pas douteuse malgré le refus de certains spécialistes de reconnaître que de nombreuses lettres de vassaux arrivées à el Amarna avaient été adressées à Aménophis III ou à ses officiers18. Toutes les tablettes qui mentionnent ‘Abdi-Aširta vivant sont antérieures à l’expédition, envoyée tardivement par ce pharaon en Amurru, qui l’a capturé et ramené en Egypte où il est mort. Or le sire de Byblos, dont on possède plus de soixante lettres, fait explicitement référence au « père du roi » dans des messages adressés à Akhenaton et se rapportant à cette affaire. Plusieurs tablettes parlent de la capture du « roi » d’Amurru. La missive EA 117, de peu postérieure à l’avènement d’Akhenaton (comme seul roi si on admet la corégence) est sans équivoque. Elle précise comment s’était terminée la carrière de ‘Abdi-Aširta : « Autrefois j’avais envoyé un homme à ton père. Quand Amanappa est venu avec une petite troupe j’ai écrit (de nouveau) au palais que le roi envoie une grande armée. N’a-t-elle pas capturé ‘Abdi-Aširta et tous ses biens comme je l’avais dit ? » (EA 117 : 21-28). 15 Kitchen, K., « Suppiluliuma and the Amarna Pharaohs », Liverpool 1962, p. 26 et n.1; Kitchen date les lettres EA 75, p. 85-86 et 95, la mort de ‘Abdi-Aširta et l’avènement d’Aziru de l’an XI d’Akhenaton, la corégence débutant en l’an XXX de son père ; de même, sans corégence, Parker, V., AoF 29, table pp.59-61 (an XI=1344 av. J.-C.). 16 Freu, J., « Les guerres syriennes de Suppiluliuma et la fin de l’ère amarnienne », Heth 11, 1992, pp. 39-101. 17 Moran, W., « The Amarna Letters », pp. 145-146 (EA 75); Liverani, M., Lettere I, pp. 173-174 (LA 136) ; Singer, I., in Izre’el, Sh., Singer, I., « The General’s Letter from Ugarit », Tel Aviv, 1990, pp. 124-126 ; Na’aman, N., « Ammishtammru’s Letter to Akhenaten (EA 45) and Hittite Chronology », AulOr 14, 1996, pp. 253-254 (EA 75). 18 Wilhelm, G., Boese, J., « Absolute Chronologie und die hethitische Geschichte des 15. und 14. Jahrhunderts v. Chr. », in P.Ǻström (éd.), High, Middle or Low?, Göteborg 1987, pp. 74-117, p.87 et passim.

Page 14: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

14

Les tablettes EA 68-95 et EA 101(dont EA 75), antérieures à la capture de l’Amorrite ont été indiscutablement adressées à Aménophis III au cours des dernières années de son règne. EA 75, qui appartient au premier lot des messages de Byblos, doit dater des années 1347/1346 av. J.C. en cas de corégence en Egypte. Si Akhenaton a succédé à son père lors du décès de celui-ci de c.1356/1355 av. J.C. L’importance du raid hittite a été souvent minimisée. T. Bryce, qui n’a pu tenir compte des trouvailles récentes faites à Qatna, refuse de reconnaître son existence dans la nouvelle édition de son important ouvrage, réduisant par là-même à peu de chose la valeur des données fournies par EA 7519. d) Les textes de Qatna La reprise des fouilles au tell Mišrife, l’antique Qatna, a mis à jour dans une annexe du palais 67 tablettes ou fragments dont 5 lettres, 4 textes juridiques et des documents administratifs (dont 8 inventaires) qui jettent une vive et inattendue lumière sur le raid de Šuppiluliuma en Syrie qu’évoquaient sans autre précision les lettres EA 75 (de Byblos) et EA 45 (d’Ugarit) ainsi que CTH 51 (le traité Šuppiluliuma-Šattiwaza)20. La synthèse historique présentée par l’éditeur de ces textes, Th.Richter, est malheureusement faussée par le rapprochement qu’a fait en premier lieu cet auteur entre les événements connus par les lettres de Qatna et ceux de la « great syrian (one year) war » que détaille le traité Šattiwaza (CTH 51 I 10-47), auquel les tablettes de Ras Shamra concernant le ralliement d’Ugarit au roi hittite sont adjointes, ce qui ne fait qu’aggraver la confusion. Parmi les nouveaux documents publiés une lettre du général hittite, Hannutti, au roi de Qatna, Ida(n)da, a une formule : « i-du-ku-nu-ù KUR Mi-id-da-an-ni haliq » (« Vous savez que le pays de Mitanni est détruit »)21 qui est simplement une réplique à l’affirmation de Rib-Hadda en EA 75 selon laquelle les Hittites avaient conquis tous les pays (syriens) du roi de Mitanni. Les textes de Qatna, à la différence de CTH 51 (KBo I 1), ne parlent en effet que des opérations menées en Syrie et ignorent le pays hourrite proprement dit à l’est de l’Euphrate. L’introduction de CTH 51 signale le pillage de Qatna (ibid., I 37) par les forces hittite au cours de la guerre d’un an mais ne mentionne pas son prince, Akizzi, qui avait échappé. Celui-ci, n’espérant plus rien de Tušratta, s’est tourné vers le pharaon Namkhuriya, c’est-à-dire Akhenaton, après la tourmente (EA 52-55+56). La preuve est ainsi faite qu’Akizzi a succédé, sans doute immédiatement, au roi Idanda/Idada, l’allié du

19 Bryce, T., « The Kingdom », 2005, 161 et n. 35 p. 434. 20 Novák, M., Pfälzner, P., « Ausgrabungen inTall Mišrife-Qatna », MDOG 132, 2000, pp. 253-295 ; MDOG 133, 2001, pp. 157-198 ; MDOG 134, 2002, pp. 207-246 ; MDOG 135, 2003, pp. 131-165 ; Richter, Th., « Der “Einjährige Feldzug” Šuppiluliumas I. von hatti in Syrien nach textfunden des Jahres 2002 in Mišrife/Qatna », UF 34, 2002, pp. 603-618 ; « Das ‘Archiv des Idanda’ », MDOG 135, 2003, pp. 167-188 ; Al-Maqdissi, M., et al., Excavating Qatna I, Damas 2002 ; Novák, M., «The Chronology of the Royal Palace of Qatna», ÄgLev 14, 2004, pp. 299-317 ; Richter, Th., « Ein Tafelfund der Grabungskampagne 2003 in Tall Mišrife/Qatna », MDOG 136, 2004, pp. 217-221 ; « Kleine Beiträge zum hurritischen Wörterbuch », AoF 32, 2005, pp. 23-44. 21 Richter, Th., UF 34, 2002, p. 612.

Page 15: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

15

roi hittite connu par les nouveaux documents, qui a subi les effets de la contre-offensive du roi de Mitanni et a disparu avant le déclanchement de la « guerre d’un an ». Conscient de cette difficulté Th. Richter propose de dater le règne d’Akizzi à Qatna de la seconde guerre syrienne du roi hittite, la « guerre hourrite de six ans » qui a terminé son règne22. Cette option est impossible, tout d’abord parce que le pillage de Qatna est formellement mentionné par le récit précis et détaillé de la « guerre d’un an » fourni par CTH 51 (KBo I 1 I 37) alors que les textes, y compris CTH 51, qui parlent de la « guerre de six ans » ignorent totalement Qatna et son roi. Par ailleurs la « guerre hourrite de six ans » a certainement débuté l’année de la mort de Tutankhamon (c.1325 av. J.C.) alors que le bureau d’Akhetaton (el Amarna) où étaient enregistrées et déposées les tablettes des correspondants étrangers était fermé depuis l’an II, au plus tard, du jeune pharaon23. Th.Richter, sans doute gêné par les difficultés insurmontables que rencontrait sa reconstruction des événements révélés par les nouveaux textes, a présenté en 2005 une nouvelle hypothèse, plus invraisemblable que la précédente. Il veut maintenant faire des tablettes de Qatna des témoins de la « seconde guerre hourrite » de Šuppiluliuma. On sait que ce conflit, la « guerre de six ans », bien daté de la fin du règne (c.1325-1320 av. J.C) a été mené en Haute Mésopotamie par son fils, le roi de Karkemiš, Šarri-Kušuœ, et son gendre, Šattiwaza, le fils de Tušratta. Le Mitanni a été reconquis malgré l’opposition des forces assyriennes et Šattiwaza est monté sur le trône de son père. Parallèlement l’héritier de Šuppiluliuma, le tuhkanti Arnuwanda, a mené une opération de représailles contre les Egyptiens qui avaient tué le prince hittite envoyé sur les bords du Nil pour épouser la veuve de Tutankhamon. Rien dans ces événements n’a un rapport quelconque avec les faits connus par les textes de Qatna. La ville était détruite et avait perdu toute importance après la « guerre d’un an ». Il est paradoxal de vouloir faire d’Idanda le successeur d’Akizzi à une époque où Tušratta, disparu, et les Mitanniens avaient définitivement abandonné toutes leurs positions en Syrie24. Les textes de Qatna sont bien plutôt les précieux témoins du raid lancé en Syrie par Šuppiluliuma, que ce denier évoque sans trop insister en CTH 51, I 1-9, avant d’en venir à la « one year syrian war », et qui s’est soldé par un grave échec, ce qui explique la discrétion du roi hittite. Le roi de Qatna, Idanda/Idada, vassal du roi de Mitanni est passé dans le camp hittite en profitant de l’intervention de Šuppiluliuma au profit de Šarrupši de Nuhašše. Le message adressé à Idanda par le général hittite, Hannutti, connu comme le « maréchal » par les textes de Boğazköy (« GAL LÚ.MEŠ KUŠ7 », en KUB XIX 22 : 8 et en KBo V 6 I 12)25, invite son correspondant à rassembler tous les hommes de Qatna26 pour entendre les paroles du Grand Roi. Celui-ci déclarait : « Ce que Šarrutaše (!) a fait est ceci : 22 Richter, Th., UF 34, 2002, pp. 615-616. 23 Freu, J., « Šuppiluliuma et la Veuve du Pharaon », Paris, 2004, pp. 39-92. 24 Th. Richter, « Qatna in the Late Bronze Age : Preliminary Remarks », SCCNH 15, 2005, 109-126 ; contra J.Freu, « Les Débuts du Nouvel Empire Hittite », Paris, 2007, pp. 228-229. 25 Beal, R., « The Hittite Military », 1992, pp. 368-375. 26 La lecture LÚ.MEŠURU-ia-né-na ša URU Qàt-na (l.4) désigne les habitants de Qatna et non une ville de *Ianina ; cf. Dietrich, M. in Richter, Th., MDOG 136, 2004, p. 120

Page 16: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

16

Šarrutaše était lié au roi du pays de Hurri. Ensuite il est venu vers moi et a dit : « Sauve-moi ! » J’ai envoyé (quelqu’un) et il a été sauvé. Maintenant je suis arrivé...... Šarrutaše a touché la frange de mon vêtement (en signe de soumission). Qui a pillé les champs de Barga et Tunanat avant de piller les champs de Yaruqad et d’Ukulzat ? » (lettre MSH02G-i0193). Il est certain que le dit Šarrutaše (!) dont la lecture du nom fait problème se confond, ce qu’admet Th.Richter, avec le « roi » (ou l’un des rois) de Nuhašše, Šarrupši. La même expression : « Sauve-moi ! », qui se retrouve mot à mot dans le traité CTH 53 (Tette, §1) et la lettre de Qatna, ne laisse aucun doute à ce sujet et prouve que le fait mentionné dans les deux textes, le ralliement de Šarrupši à Šuppiluliuma, est antérieur au « retour » du roi hittite en Nuhašše lors de la guerre d’un an où il constatera que Šarrupši « avait disparu ». L’alliance entre le roi hittite et les princes syriens a été entérinée par des accords formels. Dans la lettre MSH02G-i0274 (1-11) Hannutti et un dénommé Takuwa, sans doute le roi de Niya connu par CTH 51 et les textes d’Ugarit, s’adressent à Idanda, leur « frère » : « Que pour toi tout aille bien ! Le messager Ansab-pān-šarri est venu, (disant) ce qui suit : « Fortifiez Qatna ! ». Takuwa, après avoir parlé de l’alliance d’Idanda avec les Sutu (« bédouins ») ajoutait : « J’envoie d’autres troupes-huradu en aide à Qatna » (lettre MSH02G-i0276 : 15-17). Le roi hittite était apparemment sur le retour quand ces lettres sont arrivées au palais d’Idanda. Il avait, de conserve avec Hannutti, ravagé la cité d’Armatte, proche du Mukiš (Alalakh) qui était l’ennemie de Takuwa. Le pillage des champs de Barga, Tunanat, Yaruqad et Ukulzat signalé par Hannutti dans sa lettre –i0193, certainement par les troupes de Tušratta, montre que le roi de Mitanni avait entrepris une contre-offensive qui va rapidement réduire à rien les succès hittites. Le fait est attesté par des lettres amarniennes postérieures à EA 75 (cf. EA 58, 60, 62, 85, 86, 95, 100) et par des passages de traités hittites (cf. CTH 51, 53 et 63) qui montrent que le souverain hourrite était de nouveau le maître de la situation en Syrie du nord après le « raid » de Šuppiluliuma. C’est peut-être Tušratta qui a laissé les hommes de Šehlal, sans doute une localité du Nuhašše, attaquer la base égyptienne de Sumur en Amurru (EA 62 : 10-36) et persuadé « tous les rois (vassaux) du roi des guerriers hourrites » à s’emparer du pays (EA 60 : 13-19), comme feint de le déplorer ‘Abdi-Aširta qui a profité de la situation pour occuper Sumur27. Tušratta a même saisi l’occasion pour intervenir en Amurru, pays vassal en principe du pharaon, négocier avec ‘Abdi-Aširta et s’avancer en direction de Gubla au grand dam de Rib-Hadda (EA 85 : 51-63)28. La datation de ce dernier message, qui est assurée, permet de constater que le souverain hourrite avait retrouvé toute sa puissance après la fin de l’offensive hittite dénoncée par le sire de Byblos en EA 75. Une lettre dont ne reste que quelques lignes, EA 58, avertissait le pharaon que « le roi de Mitanni était sorti avec [ses chars] et son armée », sans doute à cette occasion29. Un « arbitrage » de Muršili II renvoie sûrement aux conséquences de ces événements : « Autrefois la cité de Yaruwatta appartenait au pays de Barga. Puis elle fut enlevée de force au grand-père d’Abiradda (le prince de

27 Moran, W., « The Amarna Letters », 1992, pp. 131-133 (EA 60, de ‘Abdi-Aširta au pharaon); pp. 133-134 (EA 62, au « haut-commissaire »). 28 Moran, W., ibid., pp. 156-158 (EA 85). 29 Moran, W., ibid., pp. 129-130 (EA 58).

Page 17: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

17

Barga) par le pouvoir du roi de Hurri qui la donna au grand-père de Tette, le habiru » (CTH 63/KBo III 3 § 2)30. Le changement de statut d’une localité située à l’ouest du Nuhašše a été l’une des décisions prises par Tušratta pour réorganiser « l’empire syrien » du Mitanni après le raid hittite et punir ceux qui l’avaient trahi. Les textes de Qatna qui signalent le pillage par l’ennemi des champs aux alentours de Barga, Tunanat, Yaruqad et Ukulzat sont la preuve de la rapidité de réaction des forces hourrites. Quand Šuppiluliuma est arrivé en Nuhašše à la fin de la « campagne d’un an » la situation avait beaucoup évolué : « Quand j’allai au pays de Nuhašše, je conquis tout son territoire. Šarrupši seul avait disparu mais je capturai sa mère, ses frères et ses fils et je les déportai au Œatti. J’installai Takibšarri, un sujet de Šarrupši, comme roi de la cité d’Ukulzat » (KBo I 1 I 38-40). Il est évident que quelques années ont séparé le « first foray » du roi hittite de son offensive victorieuse décrite par le traité Šattiwaza (CTH 51). Il est impossible de suivre Th.Richter quand il suppose que Šuppiluliuma, après avoir éliminé un certain Adad-nirari en Nuhašše au cours de la campagne syrienne d’un an, aurait installé Takuwa à Niya, Idanda à Qatna, Šarrupši en Nuhašše et Takibšarri à Ukulzat, ce que contredit le texte très clair de CTH 5131. Le souverain hittite a dû se replier après sa première chevauchée au sud de l’Amanus et a abandonné à leur triste sort ses éphémères alliés syriens, Šarrupši, Idanda et autres. Le « roi » de Nuhašše s’est peut-être soumis à nouveau au roi hourrite, comme Takuwa de Niya, avant de disparaître, ou bien a été éliminé par sa propre famille. Un Adadnirari, qui n’a rien à voir avec celui connu par les « inventaires du temple de Belet-Ekallim (NIN-EGAL) » à Qatna, a pris le pouvoir en Nuhašše à ce moment ou peu après. Après la fin de la « guerre d’un an » il enverra la lettre EA 51, sans doute au pharaon Ankhkheprurê (Smenkhkarê), alors qu’il résistait au roi hittite32. A Qatna la contre-offensive hourrite a sûrement abouti à l’élimination du roi Idanda et peut-être à la ruine du palais, ce que Th.Richter déduit du fait que «l’archive » contenant les lettres qui lui étaient destinées a été retrouvée dans la couche de destruction de l’édifice. La ville aurait été saccagée quelques années plus tard par les troupes hittites comme le rapporte CTH 51 et les lettres du roi Akizzi (EA 52-56) adressées au pharaon Akhenaton33.

30 Klengel, H., « Die Schiedesspruch des Muršili II. hinsichtlich Barga... », OR 32, 1963, pp. 32-35 ; Beckman, G., HDT n°30, pp. 155-158 ; Altman, A., « Some remarks on the so-called ‚Arbitrage concerning Barga’», UF 32, 2000, pp. 1-10 ; Freu, J., Histoire du Mitanni, 2003, pp. 104-106 (La contre-offensive de Tušratta’). 31 Richter, Th., UF 34, 2002, tableau p. 613. 32 Richter, Th., UF 34, p. 613 (tableau), veut identifier les deux personnages et prétend que Adad-nirari a été défait par Šuppiluliuma à Arahti avec Aki-Tešup de Niya, ce que dément, CTH 51 I 1, pp. 30-37 (§4) qui l’ignore. 33 Richter, Th., MDOG 135, p. 170 et n. 7-8.

Page 18: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

18

e) La lettre EA 45 Une missive amarnienne adressée au pharaon Aménophis III par le roi d’Ugarit, Ammištamru, EA 45, fournit une bonne illustration de la situation qui a suivi l’échec du « raid » hittite. Après avoir promis de renvoyer en Egypte fugitifs et transfuges (égyptiens et syriens) présents à Ugarit (EA 45 : 8-21), il dénonçait la menace que le roi hittite faisait peser sur lui : « Cependant le [roi de Hatti m’a écrit ceci :] « Pourquoi as-tu saisi ces hommes ? » Et il m’a envoyé [ses messagers] une seconde fois et il a parlé ainsi : « Si tu envoies ces hommes [en Mitanni ?] ou en Egypte, [alors je me tournerai contre toi] ». Pourtant je suis un [serviteur] du Soleil (le pharaon), [mon seigneur]. Aussi ai-je peur que le [roi de Hatti] se tourne contre moi » (EA 45 : 22-31) 34. Les restaurations des lignes 22 et 31 proposées par A.Knudtzon, reprises par N.Na’aman et d’autres sont certaines malgré les réserves formulées par W.Moran et M.Liverani35. Le message doit être daté, contrairement à la proposition de N.Na’aman, du règne d’Aménophis III du fait du rapprochement, que cet auteur reconnaît, entre EA 45 et EA 75. Il a été envoyé après le raid hittite et avant la capture de ‘Abdi-Aširta par le corps expéditionnaire égyptien. Šuppiluliuma était furieux de l’attitude du prince d’Ugarit qui s’apprêtait à remettre aux Egyptiens et sans doute à Tušratta les réfugiés qui fuyaient la répression menée par le roi de Mitanni contre ceux qui avaient rallié le roi hittite lors de son avance en Syrie. Le rétablissement de l’ordre ancien a été assuré par la collaboration entre le Mitanni, l’Egypte et les princes syriens restés fidèles. C’est peu après ces événements, mais alors que le vieil Aménophis III vivait encore, que les « archers » et la flotte égyptienne ont réoccupé l’Amurru et Sumur et capturé ‘Abdi-Aširta (cf.EA 101, EA 117 et lettres suivantes)36. Un interrègne de quelques mois ou de quelques années a séparé en Amurru l’époque de ‘Abdi-Aširta, qui n’a jamais eu de contacts avec les Hittites, malgré ce qui est parfois avancé, du règne de son fils, Aziru, qui finira par abandonner le camp égyptien pour rallier celui de Šuppiluliuma vers 1330 av.J.C. Le roi d’Ugarit, Niqmaddu III fera de même vers la même époque. L’attaque qui sera alors menée contre lui par Ituraddu de Mukiš, Aki-Tešub de Niya et Addunirari de Nuhašše n’a rien à voir avec la guerre d’un an narrée par CTH 51. Les textes de Qatna et l’histoire de l’ère amarnienne Les « inventaires » du temple de Belet-Ekallim (dNIN.É.GAL) ont permis de reconstituer une liste probable des « rois de Qatna » qui ont précédé Akizzi, l’auteur des

34 Moran, W., « The Amarna Letters », pp. 117-118 ; Na’aman, N., « Ammishtamru’s Letter to Akhenaton (EA 45) and Hittite Chronology », AulOr 14, 1996, pp. 251-257; Freu, J., « Histoire Politique du Royaume d’Ugarit », Paris, 2006, pp. 36-43. 35 Knudtzon, K., , Weber, E., Ebeling, E., « Die El-Amarna Tafeln », Leipzig 1915, I, pp. 308-311 ; II, 1098 Freu, J., Semitica 50, 2000, pp. 13-15; Na’aman, N., op.cit., n. 6 ; contra Liverani, M., « Storia di Ugarit », Roma 1962, pp. 23-24 ; Moran, W., op.cit. n.5 p.118 ; cf. Klengel, H., GS II, p. 340 et n. 6 p. 480. 36 Moran, W., « The Amarna Letters », pp. 174-175 (EA 101) ; Liverani, M., « Le Lettere di El-Amarna I ». Le Lettere dei “Piccoli Re”, Brescia 1998, pp. 197-198 (LA 159); « How to kill Abdi-Aširta: EA 101 again », IOS 18, 1998, pp. 387-394.

Page 19: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

19

lettres d’Amarna EA 52-55 (+56) et dernier prince connu de la cité. Celui-ci a assisté au ravage de son pays par les troupes hittites vers 1341/1340 av.J.C. et a survécu à la catastrophe si on en croit les messages qu’il a adressés au pharaon Namhuriya (Neferkheprwrê), c’est-à-dire Akhenaton, après la tourmente. Les « inventaires » mentionnent les dons faits par les princes de la ville à dNIN.É.GAL et, dans un cas, ceux dédiés à la déesse par le « roi de Qadeš », Duruša37, sans doute le contemporain du premier personnage cité, Naplimma. Il est probable que les quatre rois de Qatna qui ont précédé Akizzi figurent dans ces documents : Naplimma, Sinadu, Addunirari et Ida(n)da, si on exclut le dénommé Ulašuda dont il n’est pas sûr qu’il ait régné avant Idanda, son probable fils. Les mentions de l’an 45 d’Addunirari et de l’an 1 d’Idanda précisent les dates de certaines des donations faites au temple de la déesse poliade. Le premier prince de Qatna à l’âge du Bronze Récent connu par ces tablettes, Naplimma, a donc dû régner plus d’un siècle avant Akizzi, vers 1450 av.J.C., si l’on tient compte des 45 ans au minimum au cours desquels Addunirari a occupé le trône de la ville. Il est probable que les raids égyptiens et hittites en Syrie à cette époque lui ont imposé une attitude de réserve. Il se peut que Duruša, prince de Qadeš, son probable contemporain ait été l’un des fidèles du roi hourrite et l’adversaire tenace du pharaon Thutmosis III38. Mais il est certain que Qatna et Qadeš sont redevenues des royaumes vassaux du roi de Mitanni dès la fin des grandes offensives égyptiennes et hittites. La paix conclue avec le roi de Mitanni, Šauštatar II, par Aménophis II au retour de son expédition en Syrie où il avait affronté les troupes de Qatna (1419 av.J.C.) a laissé aux rois hourrites la suzeraineté des deux cités. A Qadeš des princes aux noms védiques ont gardé ou pris le pouvoir alors qu’à Qatna la dynastie amorrite a conservé son onomastique « ouest-sémitique » tout en subissant de fortes influences hourrites. L’an 1 du roi Idanda étant le seul mentionné par les « inventaires » il est probable que son règne a été court et que l’intervention de Šuppiluliuma en faveur de Šarrupši en Nuhašše s’est produite alors qu’il régnait depuis peu de temps. Plusieurs points de la reconstruction de la suite des évènements présentée par Th.Richter semblent incompatibles avec les données des textes : 1°) Il est évident que le « roi » de Nuhašše, Addunirari, connu par la lettre EA 51 et par le texte d’Ugarit39 n’est pas le roi de Qatna homonyme connu par les « inventaires ». Il prétendait que son ancêtre avait été « oint » par Thutmosis III lors du séjour de ce dernier en Nuhašše et se vantait d’avoir refusé les offres de Šuppiluliuma, ce qui l’autorisait à réclamer l’envoi à son secours d’une force égyptienne conduite par un « commissaire » (milku). Si, comme il est probable, l’appel reçu tardivement à el Amarna, entre 1337 et 1335 avant notre ère, avait pour destinataire le pharaon

37 Virolleaud, Ch., Syria 11, 1990, p. 311ss. ; Bottéro, J., RA 43, 1949, pp. 32-33; Klengel, GS II, 1965, pp. 107, 132-133. 38 Epstein, Cl., JNES 22, 1963, pp. 242-246. 39 Moran, W., « The Amarna Letters », p.122 ; Nougayrol, J., PRU IV, 1956, pp. 48-52 ; Lackenbacher, S., TAU, 2002, pp. 71-73 ; Freu, J., « Histoire Politique du Royaume d’Ugarit », Paris 2006, pp. 58-60.

Page 20: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

20

Ankhkheprurê (Smenkhkarê) ou, peut-être, Tutankhamon, il a été l’un des derniers messages arrivés dans la résidence du « pharaon hérétique ». Son contenu apporte la preuve qu’il est postérieur à la « campagne d’un an » du roi hittite et antérieur au ralliement d’Ugarit et de l’Amurru au Grand Roi hittite qu’il faut dater de c.1330 environ. Addunirari n’a reçu aucun secours du pharaon, s’est soumis à Šuppiluliuma pour se révolter quelques années plus tard, en compagnie d’Ituraddu de Mukiš et d’Aki- Tešub de Niya, sans doute le personnage de ce nom connu par CTH 51 et le texte d’Ugarit . Il est impossible d’accepter l’idée que « Aki-Teššup und Adad-nirari unterliegen Šuppiluliuma I. in Arah(a)ti », comme le propose Th.Richter40 alors que ce roi de Nuhašše est ignoré par le texte très clair du traité Šattiwaza (CTH 51). 2°) Au cours de sa « campagne syrienne d’un an » dont le seul récit détaillé est fourni par le traité Šattiwaza (CTH 51)41, Šuppiluliuma n’a pas installé Šarrupši en Nuhašše mais constaté au contraire que ce dernier « avait disparu ». Il a déporté sa famille et installé un vassal de Šarrupši, Takipšarri, à Ukulzat. Il n’a pas à cette occasion intronisé Idanda, dont il ne parle pas, à Qatna, mais a pillé la ville dont le roi, Akizzi, certainement installé dans la place avec l’appui des Mitanniens après la chute d’Idanda et qui a échappé aux Hittites, s’est empressé de se proclamer le « fidèle serviteur » du pharaon Akhenaton. Il a demandé aide et protection à « Namhuriya », donnant ainsi au roi d’Egypte son nom solaire, ce qui est la preuve qu’il ne faisait pas partie auparavant du groupe des fidèles vassaux de ce dernier qui ne s’adressent jamais à leur suzerain en l’appelant par son nom ou son « prénom solaire »42. Sa correspondance prouve qu’il est resté quelques années dans la zone d’influence égyptienne. Il reconnaît l’autorité du grand prince de Damas, Biryawaza, l’un des principaux vassaux du pharaon43. Il rappelle le désastre qui s’est abattu sur sa cité : « Mon seigneur le sait... Ses ancêtres (leurs statues) [étaient ici]. Mais maintenant le roi de Hatti les a livrés aux flammes. Le roi de Hatti a pris les dieux et les guerriers de Qatna... Mon seigneur, tes ancêtres avaient fait (une statue de) Šimigi (le dieu Soleil), le dieu de mon père et, à cause de lui, il était devenu fameux. Mon seigneur sait comment sont faites les statues divines. Maintenant puisse Šimigi, le dieu de mon père, être réconcilié avec moi ! Qu’il plaise à mon seigneur de me donner autant d’or qu’il est nécessaire pour (la statue de) Šimigi, le dieu de mon père, qu’on le façonne pour moi. Alors mon seigneur, à cause de Šimigi, deviendra plus fameux qu’auparavant ! » (EA 55 : 53-66)44. Akizzi est menacé par les actions hostiles d’Aziru, roi d’Amurru, qui a capturé et emmené au loin des hommes de Qatna, serviteurs d’Akizzi. Aussi encourage-t-il

40 Richter, Th., UF 34, 2002, tableau, p. 613. 41 Beckman, G., HDT n° 6A, pp. 38-44, §§1-5, pp. 38-40. 42 Mynářová, J., « Akizzi of Qatna—A case of a Diplomatic faux pas ? », UF 37, 2005, pp.445-459. 43 EA 52 : 46 ; EA 53: 34 ; Moran, W., ibid., p. 123. 44 Moran, W., ibid., pp. 127-128

Page 21: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

21

Akhenaton à faire sortir le corps expéditionnaire égyptien en Nuhašše pour qu’il s’empare d’Aziru (EA 55 : 16-24, 44-52)45. Mais l’ennemi le plus redoutable d’Akizzi est le roi de Qadeš (Kinza), Etakama, que Šuppiluliuma avait fait prisonnier avec son père au cours de la guerre d’un an mais qu’il avait très rapidement rétabli sur son trône et qui était devenu l’agent recruteur du roi hittite en Syrie et, malgré les protestations indignées du pharaon, l’allié d’Aziru contre Biryawaza (cf.EA 162) : « Mon seigneur… j’ai survécu et n’ai pas déserté. J’appartiens à mon seigneur. De mon seigneur seul je suis le serviteur dans sa cité et dans le pays de Tešup (le dieu de l’Orage)… Maintenant le roi de Hatti a envoyé Etakama contre moi et il en veut à ma vie. Et maintenant Etakama m’a écrit. Il dit : « Viens avec moi chez le roi de Hatti ! ». Moi je dis : « Comment pourrais-je aller chez le roi de Hatti ? Je suis le serviteur du roi, mon seigneur, le roi d’Egypte » (EA 53 : 4-16)46. 3°) Toutes les précisions fournies par la correspondance d’Akizzi apportent la preuve que ses missives ont suivi de très près la « one year syrian campaign », alors que la situation dans la région n’était pas stabilisée. Une notation importante est fournie par la lettre EA 53 : « Mon seigneur, de même que j’aime le roi, ainsi le roi de Nuhašše (sûrement Addunirari), le roi de Nii (Niya), le roi de Zinzar (Shaizar de l’Oronte), et le roi de Tunanab, tous ces rois sont les serviteurs de mon seigneur ». Une vive résistance de divers princes et cités de Syrie a donc suivi la campagne syrienne d’un an de Šuppiluliuma. La lettre EA 57, proche de la correspondance de Qatna et qui mentionne Akizzi permet d’y joindre le « roi de Barga » et la ville de Tunip47, ce que confirme l’appel au pharaon des « citoyens » de Tunip, EA 5948 ainsi que les lettres d’Aziru lui-même après qu’il se soit emparé de cette cité (EA 164- 167)49. Il est impossible dans ces conditions de supposer que le roi de Qatna lors de la guerre d’un an ait été Idanda, comme l’a d’abord proposé Th.Richter. Le rapprochement inévitable entre la notation de CTH 51 I 37 concernant le pillage de Qatna par les Hittites suivi par la déportation de nombreux habitants de la ville et la mention des mêmes faits dans la correspondance d’Akizzi ne permet aucune échappatoire. Idanda était l’allié de Šuppiluliuma alors qu’Akizzi a été sa victime. Idanda ne peut donc être qu’un prédécesseur d’Akizzi, très certainement son prédécesseur immédiat. Lors du « first foray » du roi hittite Šarrupši était le roi (ou l’un des petits rois) du Nuhašše alors qu’Idanda était le puissant seigneur de Qatna. Les « inventaires » du temple de Belet-Ekallim mentionnent ce dernier alors qu’ils ignorent Akizzi. Il est donc très probable que c’est la contre-offensive du roi de Mitanni, Tušratta, qui a mis fin au règne d’Idanda alors qu’Aménophis III terminait son long règne en Egypte. Akizzi

45 Moran, W., ibid., p. 127 46 Moran, W., ibid., p. 125. 47 Moran, W., ibid., p. 129. 48 Moran, W., ibid., pp. 130-131. 49 Moran, W., ibid., pp. 251-255.

Page 22: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

22

installé ou reconnu par le souverain hourrite a subi quelques années plus tard l’attaque des troupes hittites. Il a survécu quelque temps à la ruine de sa ville et a cherché la protection du pharaon. Le peu d’intérêt porté par Akhenaton aux affaires d’Asie et le fait que tous ses efforts visaient à réaliser sa réforme religieuse et à bâtir la capitale de son dieu, Akhetaton, « l’horizon du disque », ont laissé peu d’espoir aux princes syriens qui résistaient aux Hittites d’être secourus par l’Egypte. Il est probable que Qatna, déchue, est passée dans la zone d’influence hittite après le règne d’Akizzi. Sa position au nord-est de Qadeš était intenable alors que cette dernière ville et le pays de Kinza étaient aux mains d’un vassal du roi hittite, le redoutable Etakama. Le dernier chapitre de l’histoire de Qatna à l’âge du Bronze Récent a été écrit par Akizzi dans la correspondance qu’il a adressée à Akhenaton. Cette correspondance ne peut pas avoir été contemporaine de la « guerre hourrite de six ans » qui a terminé le règne de Šuppiluliuma alors qu’Akhenaton avait disparu depuis plusieurs années, quelle que soit la date retenue pour l’appel que la veuve d’un pharaon (Ankhesenamon, veuve de Tutankhamon très certainement) a adressé au roi hittite, celle du meurtre du prince hittite destiné à l’épouser et celle du déclenchement de la guerre hourrite de six ans.

Page 23: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

23

Abréviations ÄgLev : Ägypten und Levante. Internationale Zeitschrift für ägyptischen Archäologie, Wien. AoF : Altorientalische Forschungen, Berlin. AOAT : Alter Orient und Alter Testament, Neukirchen-Vluyn. CTH : E.Laroche, Catalogue des Textes Hittites, Paris, 1971, Supplément, RHA 30, 1972, pp.94-133. EA : tablettes d’el Amarna, numérotation de J.A.Knudtzon, E.Ebeling, O.Weber in Die El-Amarna-Tafeln, Leipzig, 1915 et W.Moran, The Amarna Tablets, Baltimore, 1992. GS : H.Klengel, Geschichte Syriens im 2.Jahrtausend v.u.Z., I/II/III, Berlin, 1965/1969/1970. HDT : G.Beckman, Hittite Diplomatic Texts, SBL, Atlanta, 1996, 21999. Hittite Military : R.Beal, The Organisation of the Hittite Military, TdH 20, Heidelberg IOS : Israel Oriental Studies, Jerusalem. JNES : Journal of Near Eastern Studies, Chicago. LA : numérotation des tablettes d’el Amarna de M.Liverani in Le lettere di el-Amarna, 1/2, Brescia, 1998/1999. MDOG : Mitteilungen der deutschen Orient-Gesellschaft, Berlin. OR : Orientalia (nova series), Roma. PDK : E.Weidner, Politische Dokumente aus Kleinasien, Leipzig, 1923. RA : Revue d’Assyriologie et d’Archéologie Orientale, Paris. RGTC : Répertoire Géographique des Textes Cunéiformes, Wiesbaden. RHA : Revue Hittite et Asianique, Paris. SBL : Society of Biblical Literature, Atlanta. SCCNH : Studies in the Civilization and Culture of Nuzi and the Hurrians, Winona Lake/Indiana. TAU : S.Lackenbacher, Textes Akkadiens d’Ugarit, Paris, 2002. TUAT : Texte aus der Umwelt des Alten Testament, Neue Folge, 2., 2005, 3., 2006. UF : Ugarit Forschungen, Neukirchen-Vluyn. ZA : Zeitschrift für Assyriologie und vorderasien Archäologie, Berlin.

Page 24: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

24

Mansuâte (Emesa?) porte d’Aram-Damas

Martin Makinson Université de Paris I, Paris

Le premier millénaire avant notre ère a débuté avec la création d’États territoriaux en Syrie intérieure, en Anatolie du sud-est, en Transjordanie et sur la côte Levantine. Avant cette nouvelle évolution politique, trois Empires s’étaient partagés le Proche-Orient pendant plus de trois siècles : concurrents dans le “Grand Jeu”, l’Égypte, les Hittites puis l’Assyrie s’étaient affrontés lors d’une “guerre froide”, étaient entrés en conflit ouvert (comme à Qadesh en 1286 av. J.-C.) ou avaient manipulé vassaux et alliés les uns contre les autres. Toutefois le deuxième millénaire avant J.-C., tout comme le troisième, avait été l’ère de la cité-État centrée sur le pouvoir et l’économie palatiale. La chute brutale du système caractérisant le Bronze récent et le déclin soudain de l’Empire hittite ont marqué le début d’une nouvelle ère. Les citadins de l’ex-Empire hittite en Syrie centrale et du nord écrivant en hiéroglyphes louvites s’étaient progressivement mélangés à une population plus rurale d’Araméens migrant de terres plus à l’est. L’expansion progressive de royaumes territoriaux de taille plus ou moins égale, gouvernés par des dynasties descendant d’un héros fondateur (d’où le nom Bît + NP, comme dans les noms de Bît Aguši Arpad, Bît Gabbar Sam’al ou Bît Haza’îli/Damas), s’est traduite par une concurrence permanente pour la suprématie régionale. L’échange d’articles de prestige n’était plus un monopole du palais ; elle a motivé l’apparition d’une classe de marchants s’enrichissant grâce au commerce caravanier avec l’Arabie du sud et par le biais de relations avec les cités-États phéniciennes de la côte.

Page 25: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

25

Deux royaumes araméens en Syrie du nord et du sud ont vu leur territoire et leur influence s’accroître à la même époque, c’est-à-dire autour de 900 av. J.-C. Ces deux entités, tout d’abord limitées à quelques villes, ont progressivement absorbé d’autres principautés concurrentes. En fait, aux alentours de 850-800 av. J.-C., ces deux États sont devenus des puissances régionales défiant la suprématie assyrienne entre la chaîne du Taurus et le plateau de Transjordanie. C’est pourquoi, dans des traités comme ceux des stèles de Sfireh, ces royaumes en expansion (Bît Aguši/Arpad et Aram-Damas sont nommés « Aram-d’en-haut » et « Aram-d’en-bas »). Les confins de ces deux États étaient sans cesse en expansion, un phénomène se traduisant part la lutte pour la primauté régionale avec d’autres formations politiques syriennes (en particulier le Hamath-Lu’aš). Le roi assyrien Adad-Narâri III (810-786 avant J.-C.) a tenté plusieurs reprises mettre en échec l’extension territoriale d’Arpad dans la vallée de l’Oronte, et pour ce faire a offert la ville de Nahlasi « val de l’Oronte » au roi Zakkur du Hamath.1 Plus au sud, la frontière septentrionale de Damas après le règne de Hazaël semble avoir été située quelque part à l’extrémité nord de la Beqa‘ : le site de Leb’oa, la Lebô-Hamath de la Bible, aurait constitué une des limites nord d’Aram. Mansuâte, le site d’une fameuse bataille en 796 av. J.-C entre assyriens et le mystérieux Marê « seigneur » de Damas – en toute probabilité Bar-Hadad II, fils de Hazaêl - pourrait avoir été une des forteresses ou villes aux marches d’Aram, dont la conquête aurait permis un accès direct à la plaine fertile de la Beqa‘ ou à la Ghouta damascène. L’emplacement exact de Mansuâte est resté une question débattue depuis la découverte de ce toponyme dans les listes d’éponymes des rois d’Aššur.2 Les débuts, l’apogée et la chute du royaume araméen de Damas (1,050-732 BC) Le Premier Livre des Rois fournit un Sitz in Leben illustrant l’ascension de l’une des plus grandes puissances du Levant sud. Les inscriptions royales assyriennes et les annales, une plaque ornementale en bronze provenant de l’Heraïon (temple d’Héra) de Samos, la plaque en ivoire mentionnant l’année où « Hazaêl a traversé le fleuve » (d’Arslan Taş/Hadatu) et, plus significatif encore, la stèle retrouvée en contexte secondaire à Tell el-Qadi dans la vallée du Jourdain, sont autant de textes illustrant l’extension territoriale maximale d’Aram après que cet État est devenu Bît Hazaël. Notre propos n’est pas de discuter en détail de l’Histoire du royaume de Damas durant le premier siècle avant notre ère : une foule d’historiens3 ont fourni des informations détaillés sur l’avènement d’Aram en tant que puissance régionale et ont montré comment ce royaume a forcé ou convaincu ses voisins d’entrer dans des

1 Grayson A. K. 1996 p. 203 A.0.104.1 l. pp. 4-5. 2 Les éponymes sont de hauts fonctionnaires (limmu en assyrien) donnant leur nom à une année particulière. Les textes juridiques et économiques assyriens peuvent donc être datés très précisément avant 648 av. J.-C., date de l’apparition de limmu post-canoniques. 3 Dion 1997 Les Araméens à l’âge du Fer: « histoire politique et structures sociales ». Droz, Genève. Pitard W. 1984 Ancient Damascus.

Page 26: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

26

coalitions anti-assyriennes : les guerres « syro-éphraïmites » décrites dans le Livre des Rois, les expéditions contre Zakkur roi du Hamath-Lua’š culminant avec le siège avorté de Hatarikka (décrit dans la stèle d’Afis),4 sont autant de témoignages de l’expansionnisme d’Aram. Il suffit de mentionner qu’au Bronze récent, Damas, avant son appellation d’Aram, n’était qu’une cité-État nommée Apum ou Upe et confinée à la Ghouta. Le nom même d’Apum évoque une cannaie au cœur d’une région marécageuse, ce qui indiquerait que le pays que cette ville contrôlait était situé sur les rives des nombreuses branches du Barada.

Aram n’était même pas l’État le plus riche ou le plus puissant de Syrie du sud avant 1 000 avant J.-C. Sobah, également connu sous le nom assyrien de Supîte, était une autre entité araméenne contrôlant la vallée de la Beqa‘. 1R 1 : 20 décrit comment Rezon, roi de Damas, a annexé ce territoire stratégique et fertile situé à l’ouest des Monts de l’Anti-Liban (le Sanîru et l’Amannana des textes néo-assyriens). La conquête de la Galilée septentrionale et la prise de forteresses comme Tell al-Qâdi/Dan a dû être entreprise au plus tard dans les dernières années du IXe siècle, comme le montre la couche de destruction du niveau IX de ce site situé près des sources du Jourdain. A l’avènement d’Hazaël, le plus grand roi d’Aram, toute la région céréalière du Bashan (le Hauran et le Bashan à l’est et à l’ouest de la ville de 30 hectares d’Aštartu/Tell ‘Ashtara), tout comme les collines boisées de Gile’ad) autour d’ ‘Ajloun, Jerash et Salt en Jordanie devait déjà être aux mains de ce souverain. Les annales de Salmanazar III (858-824 av. J.-C.) établissent en effet qu’en 841, afin de défaire Hazaël, les Assyriens ont dû monter à l’assaut du « Mont fortifié de Sanîru », le pic qui se trouve devant le Mont Liban » (l’Hermon), puis ont « passé au fil de l’épée 16 000 de ses guerriers » et pris « 1 121 de ses chariots »5. En outre, le roi assyrien s’est avancé « ver le Mont Haurânu (et) a rasé, détruit, brûlé (et) pillé des villes sans nombre ».6 Le Mont Haurânu est probablement le Jebel al-‘Arab à l’est du Haurân, à moins que le sumérogramme devant le toponyme se réfère à un « pays » et à la plaine elle-même. Aram apparaît donc déjà au milieu du IXe siècle comme un royaume fortement urbanisé, aux cités nombreuses : Salmanazar III insiste sur le fait que « [toutes] les villes ont pris peur (et) se sont enfuies dans les montagnes pour se protéger ». Il ajoute qu’il a « conquis au moyen de [tunnels], de beliers (et) de tours de siege les villes de Ia... [...,...], Danabu, Mallahu, des villes fortifiées7.

4 Stela A 1 “La [s]tèle que Zakkur, roi du [Ha]math et Lugath (Lua’aš), a érigé pour Ilu-Wêr, [son dieu]. 2 Je suis Zakkur, roi du Hamath et Lugath. Je suis un homme d’ ‘Anah (sur l’Euphrate), mais 3 le Baal des Cieux (Baalšamîn) [a fait appel] à moi et s’est tenu à mes côtés, et le Baal des Cieu[x] m’a fait roi [à Ha]-darik. Puis Bar-Haddad, fils d’Hazaël, roi d’Aram, a mobilisé se[i]ze rois 4 ensemble contre moi : Bar-Haddad et son armée, Bar-Guš et son armée, le [ro6i] de Quwê et son armée, le roi d’‘Umq et son armée, le roi de Gurgu[m 7 et] son [a]rmée, le roi de Sam’al et son a[rmée], le roi de Melid [et sona]r[mée, le roi 8 du Tabal(?) et son armée, le roi de Kittik(?) et son] a[rm]ée, e[t] sept r[ois d’A]murru et ses armées. Et tous ces rois ont mis le siège devant Hadari[k],10 et ont bâti un rempart plus au que le rempart de, et ont creusé un fossé plus profond que [son] foss[é]. Mais j’ai levé les bras au baal des Cieux, et les Baal des Cieu[x] m’a répondu…” 5 Grayson A. K. 1996 p. 48, A.0. 102.8 6 Grayson A. K. 1996 p. 48, A.0. 102.8 A.0. 102. 10 iv 5. 7 Grayson A. K. 1996 p. 203, A.0. 102.16, pp. 155-159

Page 27: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

27

Quelle qu’ait été l’étendue d’Aram au IXe siècle avant notre ère, le fait est que ce royaume a pu mobiliser suffisamment de troupes et de chariots et forcer la plupart des États du Levant à intégrer des coalitions anti-assyriennes. La conséquence de cette hégémonie régionale s’est traduite en 853 par la victoire remportée par Hadad-idri de Damas à Qarqar, une des plus célèbres batailles de l’Antiquité. Il s’agissait là d’un rare moment d’unité face au danger assyrien. Qarqar est décrite comme une « ville royale » (URUqar-qa-ra URUMAN-ti-šu) d’Urhilina de Hamath. C’est l’endroit où « une alliance avait été forgée entre douze rois : 1 200 chariots, 1 200 cavaliers (et) 20 000 troupes d’Hadad-idri le Damascène; 700 chariots, 700 cavaliers (et) 10 000 troupes appartenant à Irhulênu le Hamathéen, 2 000 chariots (et) 10 000 soldats d’Ahabbu l’Israélite (Sir’alâia) ; 500 soldats de Byblos ; 1 000 soldats de Muri (Égypte, Cilicie ou Mauwari/Til Barsip ?) ; 10 chariots et 10 000 soldats du pays d’Iraqanâtu ; 200 troupes de Matinu-Ba‘al de la ville d’Arwad ; 200 soldats du pays d’Usanâtu (et) [N] 000 soldats d’Adunu-Ba‘al du pays de Šiannu ; 1 000 chameaux de Gindibu l’Arabe ; [N] centaines de soldats de Ba‘asa de Bît Ruhûbi l’Ammanéen (ou l’Ammonite) »8. Salmanazar III affirme avoir été vainqueur en cette occasion, mais sans doute s’agissait-il d’une victoire à la Pyrrhus, puisque l’offensive assyrienne vers le sud semble avoir été effectivement stoppée pour une dizaine d’années. L’expansion d’Aram vers le nord s’est prolongée jusqu’à la fin du règne d’Hazaël ou de son successeur Bar-Hadad II : ceci est démontré par le siège d’Hazrek/Hatarrikaa, capitale du Lua’aš, la région nord du Hamath, le point d’arrêt de leur offensive. Les douze rois coalisés autour de Bar-Haddad de Damas ont été obligés de lever le siège de la cité lorsqu’Adad-narâri III d’Assyrie (810-786 avant J.-C.) est intervenu pour prêter assistance à Zakkur. De la même façon, l’expansionnisme d’Aram vers le sud a été mis en échec par l’arrivée du « roi des Murites », un épisode mentionné en 2R 7 : 6. Ce dernier n’est pas le pharaon égyptien, mais Šamši-ilu, turtânu (général en chef et second personnage de l’Empire) gouvernant la province de Harran et l’Euphrate syrien depuis Kar-Šalmanezer/Mauwari9. Les facteurs limitant les ambitions territoriales et hégémoniques d’Aram étaient, en ce neuvième siècle finissant, au nombre de deux : l’intervention directe des Assyriens et la diplomatie active dotant Aššur d’un rôle d’arbitrage. Cette dernière faisait en général intervenir quatre ou cinq alliés syriens d’Aššur : le royaume israélite de Samarie, le Hamath-Lu’aš, la principauté de KTK/Kittika, Kummukh et parfois le Sam’al/Bît Gabbar. On sait peu de choses d’Aram-Damas entre 796 et 732 avant J.-C. Ceci n’implique pas un déclin, bien au contraire. Ce silence est en grande partie dû à une pauvreté des sources assyriennes durant les règnes de Salmanazar IV (786-774), d’Aššur-narâri V (774-754) et d’Aššur-dan III (754-745). Les vicissitudes internes de l’Assyrie impliquaient un relatif retrait impérial de Transeuphratène, ce qui pourrait s’être traduit par un renouveau de l’expansionnisme des deux irréductibles États araméens qu’étaient

8 La traduction de KURa-ma-na-a-a sous la forme de royaume Ammonite kingdom est d’après moi erronée, puisque Bît-Ruhubi est le Bêt-Rehov de la Bible, l’autre nom de Sobah ou de Supîte (i.e. la Beqa‘). Le contingent pourrait avoir été constitué d’irréguliers de l’Anti-Liban, qui, tels les Habîru du Bronze récent ou les Ituéens de l’époque d’Assarhaddon, auraient rejoint les armées des cités. 9 « Prenez garde, le roi d’Israël a loué contre nous les services du roi du Hatti et du roi de Muri ».

Page 28: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

28

Aram-Damas et Arpad. Mais de cette période de plus d’un demi-siècle, nous ne savons que peu de choses en dehors des renseignements fournis par le Livre des Rois et les Chroniques de l’Ancien Testament.

En ce qui concerne l’âge du Fer, il est utile de souligner la rareté des données archéologiques provenant soit de Damas, soit du Hauran et de la Beqa‘. On sait donc peut de chose de la culture matérielle de cet État. Quelques restes de la période ont été retrouvées hors contexte archéologique dans la vieille ville de Damas, le plus connu de ces vestiges étant le sphinx égyptisant décorant sans doute anciennement le temple d’Hadad-Rimmon, Dieu de l’Orage, œuvre en basalte retrouvée insérée au sein d’un mur de la Grande Mosquée des Omeyyades. L’influence de l’art damascène durant l’âge du Fer a fait l’objet d’un débat, suite à cette découverte. Irène Winter, historienne de l’art spécialisée dans l’art de cour mésopotamien et syrien, a en effet émis l’hypothèse d’une école artistique « sud syrienne » en ce qui concerne les ivoires des IXe et VIIIe siècles avant J.-C., elles-mêmes d’un style copiant celui des reliefs. Cette tradition est d’après elle distincte de celles de même époque en Syrie du nord et en Anatolie du sud-est – par exemple de la Flame-and-Frond School de Guzana/Tell Halaf. Le style damascène est en effet plus ouvert aux influences de la côte, en particulier aux motifs égyptisants. En fait, la présence d’écoles dans le domaine des ivoires ne fait que traduire le degré de prospérité et de puissance de chacun des états syriens : au VIIIe siècle, en dehors de Carchemish, ville ša kišâd purattim10, Aram devait avoir pour rival un autre foyer artistique, celui de Hamath ša kišâd Aranta11. Une autre spécificité de Damas et du sud du Levant réside peut-être dans la façon de représenter les divinités. Dans le Hauran et à Beit Sa‘ida dans le Jawlan ont été retrouvés deux blocs de basalte montrant une sorte de « minotaure » : le corps, même très stylisé, est clairement celui d’un homme, alors que la tête est celle d’un taureau. Cette forme de représentation reflète peut-être une tendance commune à la fois à la Mésopotamie et au Levant, qui se manifeste par une abstraction croissante. En effet, les dieux babyloniens et assyriens étaient souvent représentés par des symboles, même si, comme dans les reliefs de Sennacherib à Bavian ou les stèles représentant Ishtar de Tell Ahmar, ils ne dédaignaient pas l’anthropomorphisme : Sîn de Harran, en l’occurrence, n’est quasiment jamais représenté sous forme humaine12, mais apparaît plutôt comme un croissant de lune sur un étendard planté sur un podium ; Marduk de Babylone est le plus souvent montré sous forme de bêche. De la même manière, c’est vers le VIIIe siècle avant notre ère que la déesse Tanit est représentée systématiquement par un symbole dérivé de l’ankh égyptien qui sera populaire dans toute l’Afrique du nord punique13. Ce symbole phénicien traversera aussitôt la Méditerranée pour atteindre Carthage, la Libye et la Sicile. En

10 Winter, I. J. 1983 : « Carchemish ša kišâd purattim », Anatolian Studies. 11 Il est par ailleurs étonnant qu’aucun style ou école ne soit associé à Arpad, mais il est vrai que ce royaume demeure quasiment inconnu en ce qui concerne sa culture matérielle et artistique. 12 A l’exception du sommet d’une stèle encore non publiée, en brèche, provenant du cimetière du village moderne de Tell Ahmar, qui représente le Dieu portant une tiare à croissant de lune, et d’une autre retrouvée par F. Thureau-Dangin et Dunand, donc une moitié se trouve au Musée d’Alep et l’autre au Louvre. 13 La première attestation d’un « signe de Tanit » sur la côte levantine a été retrouvée sur un chaton de bague ou un sceau découvert lors des fouilles américaines de Sarepta (Pritchard D. 1973).

Page 29: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

29

conclusion, ce « minotaure » est une façon de représenter Hadad-Rimmon en le dotant d’attributs évidents et simplifiés : ce style est unique à la Syrie du sud (Aram), mais participe d’une tendance progressive à l’abstraction commune à toute la région. Schémas récurrents dans la stratégie de conquête des Assyriens On connaissait les Assyriens, de l’avènement de Salmanazar I (1305-1274 av.J.-C.) à la chute de l’Empire en 612 av. N.è., pour leur extrême brutalité et cruauté envers les populations insoumises de Syrie. Les récits de la destruction totale d’États rebelles sont légion, les images d’atrocités sont nombreuses tant sur les reliefs (par exemple ceux décrivant la prise de Lachish par Sennacherib, en 701, ou celui montrant le roi Tutâmmu du Pattina-‘Umqi, littéralement aveuglé par Tiglath-phalazar III). Les déportations, invention Hittite reprise par lesMédio-assyriens de la fin du Bronze récent, devinrent un phénomène de plus en plus notoire à partir du règne d’Assurnnasirpal II (889-858 av. J.-C.). Ceci ne doit pas entièrement masquer le fait que les Assyriens optaient parfois pour une stratégie destinée à minimiser le sang versé afin de conquérir un pays en temps record. La conquête du Pattina-‘Umqi, un état au nord et à l’ouest d’Alep, par le souverain Assurnasirpal II, l’expédition de son successeur Salmanazar III contre la « coalition du sud » et contre Qarqar et la bataille de Mansuâte dans la foulée de l’expédition punitive d’adad-narâri III sont révélateurs d’une tactique commune. Ces trois rois d’Assur avaient des visées et un objectif semblables : terroriser les rois levantins et syriens rebelles afin de les soumettre et extraire une quantité maximale de tribut en or, argent, en fer et autre produits de luxe. Ces trois rois ont tenté, en ne livrant réellement qu’une seule grande bataille sur les frontières septentrionales ou orientales d’un royaume syrien, de démoraliser l’ennemi et minimiser les efforts et les coûts d’une conquête autrement trop onéreuse. Qarqar est avec certitude Tell Qarqur, un site explore depuis les années 1980 par une expédition américaine sous la direction du Professeur R. Dornemann. Ce double tell d’une trentaine d’hectares est localisé au croisement de deux routes, à proximité de la ville moderne de Jisr esh-Shughur. La route moderne allant d’Alep à Lattakié passe par une trouée dans le Jebel al-Ansariyé située à quelques kilomètres du site, rare ouverture à travers une chaine de 1500 m raide, peu franchissable et parsemée de blocs coupant en calcaire et d’un très dense maquis. En outre, Qarqar est une ville située sur un corridor nord-sud s’étendant le long du Ghâb. Nahlasi, ville où a dû être gravée la stèle d’Antioche d’Adad-narâri III et de Šamši-ilu, devait être cise quelque peu au nord, à l’entrée des gorges de Darkoush menant à l’‘Amuq. Qarqar est la première grande ville sur la frontière nord de Hamath et sur celle, occidentale, du Lua‘aš, territoire annexé par ce même Hamath. En capturant la ville de Qarqar et en écrasant toute une coalition de rois de Syrie du sud et de la côte, Salmanazar III espérait en finir avec tous les Etats du Levant sud sans avoir à conquérir tout le Hamath en assiégeant les centres urbains les uns

Page 30: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

30

après les autres14. Cette tentative de porter en une seule un coup fatal à une coalition armée a connu le relatif échec que l’on sait. Mansuâte, qui est restée une ville importante et même une capitale provinciale après la destruction d’Aram par Tiglath-phalazar III (en 734), était en toute probabilité localisée de façon analogue à Qarqar : sur la frontière nord d’un royaume syrien, sur les marges septentrionale de Sobah/Supîte et de Damas. Pour avoir été un chef-lieu de province gouverné en 680 av. J.-C. par Danunu, fonctionnaire limmu (éponyme) en 680 av. J.-C., il devait s’agir d’une ville de grande taille située à un emplacement stratégique. La conquête de Mansuâte par Adad-narâri III devait répondre aux mêmes impératifs stratégiques que ceux de Salmanazar III à Qarqar, à une volonté de victoire définitive sur la frontière nord d’un Etat syrien rebelle, et ce afin de ne pas subir les efforts d’une capture des autres centres fortifiés les uns après les autres, ou même de la prise de la capitale elle-même après un siège prolongé15. Adâd-narâri met l’accent sur le fait qu’il a « [confiné] Mari (ou Marê’) dans la ville de Damas ». Ce dernier, après la bataille de Mansuâte, lui aurait donné « 100 talents d’or (et) 1 000 talents d’argent comme tribut »16. Ceci ne reflète pas automatiquement un siège prolongé de Damas, mais montre clairement les craintes de Mari (probablement le titre royal de Bar-Hadad III, le successeur de Hazaël) à la suite de sa défaite à Mansuâte. Mansuâte, ville sur la frontière nord du royaume araméen de Damas Le toponyme de Mansuâte a été à la source de bien des controverses parmi les assyriologues, qui l’ont localisé à des endroits aussi divers et éloignés géographiquement que Til Barsib/Tell Ahmar et ou des sites de la Beqa‘. Etablir un lien linguistique ou historique avec Masuwâri/Til Barsip sur l’Euphrate n’a pas de sens : Til Barsip est resté aux mains des Assyriens de façon ininterrompue, et se trouvait à des centaines de kilomètres de la zone de confrontation militaire entre Aššur et Damas. L’identification suggérée par S. Dalley17 ne mérite donc pas plus de considération, ne serait-ce que parce qu’une missive assyrienne mentionne l’envoi de prisonniers de Til Barsip à Mansuâte !18

14 Les annales royales annoncent la capture de nombreuses villes du Hamath-Lu‘aš comme Aštammaku/Tell Mastuma, mais rien n’indique un siège prolongé ou une grande bataille. 15 De façon analogue, une grande partie de l’effort de conquête de la Judée par Sennacherib semble s’être porté sur Lachish, ville sur la frontière occidentale du royaume, à proximité des cités-Etats de la pentapole philistine. Cet effort n’élimine pas la portée de ceux mis en avant lors du siège de Jérusalem, qui aux dires de sennacherib, a enfermé le roi Hezekiah « comme un oiseau en cage ». 16 Grayson A. K. 1996 1.0.104.6: pp. 19-20. 17 Dalley 1997 « Neo-Assyrian tablets from Til Barsip, Abr Nahrain », Vol XXIV 1997, pp. 66-91 18 Saggs 1955: pp. 141-142: K.1533 rev.4 ND2680: ana pâni ša URUMan-su-a-te ina muhhiya ittalka. … « among the la[ter] captives that the king, my lord, gave to [me] from Til Bar[sip], I said: « He should know th[at] indeed there are n[o…] among them ». Hara-ammu, the chiliarch of Mansuate, came for me. He has sent his five sons [to… but the re]st of [his] people [are with] him ».

Page 31: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

31

Le philologue E. Lipiński19 a pour sa part établi un lien entre Massyaf, à 40 kilomètres à l’ouest de Hama, et Mansuâte. Il fonde son raisonnement sur la similitude de ce toponyme de l’âge du Fer avec Massyat, nom de la ville à l’époque des Croisades. Bien que cela soit une possibilité d’un strict point de vue linguistique, cette hypothèse est toutefois difficile à soutenir pour deux raisons : l’absence de vestiges du fer sur le site même, la localisation du lieu au cœur même du royaume de Hamath, un Etat gouverné à l’époque de la bataille de Mansuâte par Zakkur, lui-même allié des Assyriens. D’autres historiens, archéologues ou philologues ont propose une localisation dans la partie centrale de la Beqa‘. Le philologue allemand A. Kuschke identifie le toponyme avec Tell Masîs, un site à 3.5 Km à l’est de la ville moderne de Rayak. D’autres se sont concentrés sur l’étymologie du mot, dérivé de l’Araméen massa’ , un état construit signifiant « le marécage ». Bien que la Beqa‘ centrale apparaisse comme une étape logique de l’expédition d’Adad-narâriIII contre Damas, les identifications proposées sont purement spéculatives. On peut suivre E. Lipiński lorsqu’il affirme que “puisque la localisation de Mansuâte dans la Beqa‘ est loin d’être certaine, ces tentatives de situer de manière exacte la ville de sont que des conjectures » 20. Le nom de Mansuâte se termine par un suffixe géographique fort courant dans les texts assyriens, celui de –âte (ou -îte) dénotant un pluriel. Ce suffixe est souvent rajouté à des noms géographiques d’origine araméenne : la ville de Mallanah, un centre provincial entre le Balikh et l’Euphrate ayant livré des archives cunéiformes et alphabétiques, est écrit ML’N’ ou ML’NH en assyrien, mais Mallanâte en Assyrien ; la région de Sobah dans la Beqa‘ devient, sous Tiglath-Phalazar III, la province de Supîte. Mansuâte aurait été la version assyrienne d’une ville nommée MNSH ou MNS’. La lettre « N » étant souvent assimilée en SS, MNSH ou MNS’ aurait été écrit MSSH ou MSS’, un nom présentant une ressemblance troublante avec le nom ancien de Homs à l’époque hellénistique et romaine : Emèse. Homs, une ville bâtie autour d’un tell de 30 mètres de hauteur cadre bien avec une localisation de Mansuâte à la frontière nord du royaume de Damas, au départ de voies vers la côte à travers la Trouée du même nom, ainsi que de routes à travers la Beqa‘ et le long de l’Anti-Liban. Les textes affirment que Mansuâte était au nord de Qadisi, nom assyrien de Qadeš, ainsi que de Rablah ; site à la frontière libanaise où Nabuchodonosor a rassemblé son armée avant l’assaut final contre Judah, en 587 av. J.-C. La ville, probablement en raison de son éloignement de Damas et de son importance stratégique, est devenue le siège d’un gouverneur provincial sous Sargon II, en 716 avant J.-C. Une bataille majeure à cet emplacement, une confrontation sur les bords marécageux de l’Oronte, au croisement de routes nord-sud avec d’autres menant de la steppe à la mer, auraient porté un coup décisif à l’expansionnisme affiché de Damas. The city became the seat of a province independent from Damascus and Sobah/Supîte (the Beqa‘valley) in 716 BC, under the Assyrian king Sargon II. A major

19 Lipiński E. 1971 « The Assyrian campaign to Mansuâte and the Zakkir stela » Annali dell’Istituto Orientale di Napoli, Vol 31 Fsc 3 N.S. XXI, pp. 393-399. 20 Lipiński E. 1971, p. 395.

Page 32: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

32

battle at a strategic crossroads, where north-south routes meet the corridor of winds and rains, blowing from the Mediterranean to the coast, would have been a perfect way of securing once and for all the loyalty of an expanding an rebellious Aram.

Page 33: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

33

Mission archéologique de Tulul el-Far première campagne

Sophie Cluzan Musée du Louvre, Paris Ahmad Ferzat Taraqji DGAM, Damas

La mission archéologique syro française de Tulul el-Far, Tell Taouil et Tell el-Kharaze a été constituée dans le cadre de l’accord de coopération scientifique et culturelle signé entre la Direction Générale des Antiquités et des Musées de Syrie (DGAM) et le Musée du Louvre (ML). L’année 2007 a vu se dérouler la première mission, composée d’Ahmad Taraqji (DGAM), Sophie française (ML), Dominique Beyer (Université de Strasbourg) et Jean-Marc Michaud (Université de Sherbrooke), Yousef Khacho (architecte DGAM), et Atef Abou Araj (topographe). La documentation cartographique a été constituée grâce au concours de Mohamed al-Dbiyat de l’Institut Français du Proche-Orient (IFPO). Enfin la mission a bénéficié du soutien logistique de l’IFPO.

Page 34: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

34

Le programme de cette mission conjointe s’est fixé d’étudier un ensemble de sites de l’âge du Bronze, période encore mal documentée dans la région de Damas. En effet, si le site de Tell Sakka fournit une importante référence pour la période du Bronze moyen, l’époque du Bronze ancien demeure pratiquement ignorée. Les trois sites que nous proposons d’étudier ont livré du matériel de surface datable de ces deux périodes1.

Situation et description générale des tells

Les tells se trouvent au sud-est de Damas, à plus d’une vingtaine de Km, non loin de Ghizlaniye (fig. 1). Le plus grand des trois sites, Tulul el-Far, est situé à la longitude N 33°22’ et à la latitude E 36°27’. L’ensemble des trois éminences dessine une sorte de rectangle orienté NO-SE, dont la partie nord-ouest est constituée par Tulul el-Far et la partie sud-est par Tell Taouil et Tell el-Kharaze. Une zone apparemment vide d’occupation archéologique s’étend au centre de ce rectangle.

Tulul el-Far couvre une superficie de vingt-cinq hectares, tandis que Tell Taouil et Tell el-Kharaze s’étendent respectivement sur deux et un hectare. Leur altitude moyenne est d’environ 623 m2. Les trois sites ne sont distants les uns des autres que de 150 à 200 m. Combinée à l’apparente uniformité des périodes représentées par le matériel de surface, cette proximité pose la question des relations qu’ils entretenaient à l’origine, soit qu’ils n’aient formé qu’une seule et même installation, progressivement divisée en trois unités par les modifications topographiques que leur infligea le système hydraulique du Nahr el-A’ouaj, soit qu’ils aient été indépendants mais reliés dans un système de complémentarité3.

Hydrologie et géologie

Situées dans la zone fertile et bien arrosée de l’oasis de Damas, ces installations bénéficiaient d’une abondante irrigation naturelle, grâce au Nahr el-A’ouaj et à ses nombreuses ramifications. Les tells se trouvent dans une zone de dépôts alluvionnaires datés du Quaternaire récent, à proximité de plusieurs Jebel du Néocène, riches en basaltes, pierre que l’on retrouve en quantité à la surface des sites. Par l’aspect de sa surface, Tulul el-Far se distingue de ses deux voisins. Une grande partie du site est en

1 Repéré lors de campagnes de prospections menées par Michel al-Maqdissi et Ahmad Taraqji puis par ce dernier et Sophie (Nord-Est). 2 Les cartes géographiques disponibles fournissent quelques altitudes pour ces sites. La carte de la région de Damas sud, éditée en 1942, donne un point topographique à 626 m sur Tell el-Kharaze. La carte des environs de Damas, éditée en 1993, fournit une altitude de 623 m sur Tulul el-Far, 626 sur Tell Taouil et 623 m près de Tell el-Kharaze. 3 A l’appui de la première hypothèse, on retiendra la nature particulière du Nahr el-A’ouaj, qui se divise en de multiples ramifications au moment de la montée des eaux printanières issues du Djebel Cheikh,, où il prend naissance. Les inondations et petits nahr qu’il a suscités durant des millénaires ont pu infliger de lourdes transformations à la zone des sites. On notera que la première cartographie de la région, en 1942, montre déjà l’existence de trois tells, entourés des nombreuses ramifications du Nahr el-A’ouaj.

Page 35: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

35

effet parsemée d’un cailloutis plus ou moins gros, de débris de basalte, de petits nodules d’albâtre et de nombreux tessons recassés4.

Topographie et aspect général des sites

La mission de 2007 s’est attachée à réaliser un relevé topographique détaillé de l’ensemble de la zone délimitée par les trois tells, soit une superficie d’environ quatre-vingts hectares. Sur le terrain comme sur le relevé topographique, on s’aperçoit que les sites se distinguent les uns des autres par l’allure générale de leur relief.. Tulul el-Far se présente comme un vaste tell relativement plat, que le regard a parfois du mal à englober et dont la forme, irrégulière, pourrait avoir été circulaire. Il comprend quatre éminences principales, au Centre, au Nord-Ouest, au Nord Nord-Est et au Sud-Ouest, ce qui explique le pluriel attaché à son nom. A contrario, Tell Taouil est une colline allongée, dont le sommet émerge nettement au-dessus de la plaine, encadré par des pentes relativement franches. De son côté, Tell el-Kharaze est un petit tell ovale composé d’un sommet entouré de pentes relativement douces, ce qui en fait une éminence peu visible dans le paysage environnant.

Périodisation des tells Les ramassages de surface ont permis de dater les sites de manière relativement homogène, bien que certaines tendances semblent se dessiner. Tulul el-Far a livré du matériel qui pourrait remonter au-delà du IIIe millénaire (certains silex) et s’étend jusqu’à la période ottomane. Néanmoins, la période du Bronze ancien est majoritaire dans l’ensemble des ramassages, en dehors de quelques zones plus particulièrement liées semble-t-il aux périodes récentes (époque romaine et byzantine à l’Est par exemple). De son côté, Tell Taouil présente un faciès matériel plus clairement lié à l’époque du Bronze moyen, n’excluant toutefois pas la présence de restes du Bronze ancien, image également renvoyée par le petit site de Tell el-Kharaze.

But et implantation du sondage

La campagne de 2007 a permis de réaliser un premier sondage sur Tulul el-Far, dans le but d’évaluer la nature des premières couches archéologiques rencontrées sous la surface d’un des sommets du site. Un secteur fut implanté dans la région du centre ouest, le chantier A, auquel treize jours de travail furent consacrés. La première phase du travail s’est concentrée sur un carré de 10 x 10 m, qui, au vu des premiers résultats, fut ensuite réduit de moitié dans le sens sud nord, puis agrandi de 5m vers l’Ouest après la découverte d’une construction circulaire dans laquelle des éléments de datation semblaient pouvoir être trouvés.

4 L’homogénéité des modules des tessons permet de penser qu’ils ne sont pas le résultat d’une fragmentation naturelle mais plutôt d’une action liée soit à la mise en œuvre de la brique, soit à celle d’un système de drainage pour des voies de communication. Nous remercions Jean-Claude Margueron pour l’ensemble des remarques et suggestions qu’il nous a faites au cours de ses différentes visites pendant cette première campagne d’évaluation.

Page 36: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

36

Le résultat de ce travail de sondage fut de constater que les couches situées directement sous la surface contenaient des restes architecturaux que l’on pouvait dater du Bronze ancien, datation qui nous a été fournie grâce aux céramiques retrouvées sur le sol d’occupation d’une construction circulaire. La phase exacte à laquelle il convient de raccrocher ce matériel reste à préciser mais pourrait correspondre au Bronze ancien III. Ce résultat confirme donc l’intérêt de cette zone sommitale pour documenter la période de l’âge du Bronze et nous fournit un point de départ pour le programme de l’année à venir.

Les aménagements

Au moins quatre niveaux de briques ont été découverts au cours de cette campagne, composés de murs délimitant des espaces quadrangulaires, à l’exception d’un espace circulaire (fig. 2, 3). L’orientation générale des murs est constante : SE/NO et SO/NE. Ces quatre phases représentent une faible profondeur, les restes architecturaux retrouvés au chantier A de Tulul el-Far étant conservés sur de faibles épaisseurs et directement situés au contact les uns des autres. Il s’agit manifestement d’une architecture domestique, souvent remaniée.

Le niveau de brique le plus récent est constitué par les murs A12 et A13, qui recouvrent l’espace défini par le mur circulaire A7. Les murs A12 et A13 n’ont pas été fouillés. A la jonction avec la coupe ouest de la zone 1 du sondage, le mur A12 se trouve directement sous la surface du tell.

Au second niveau appartiennent les murs A3, A4 et A5, restes de fondations. Postérieur à la structure circulaire, son lien stratigraphique avec les murs A12 et A13 n’est pas encore confirmé. Le mur A3 est composé de briques d’un module de 46 x 35 cm (fig. 4). Une construction circulaire correspond au troisième niveau d’aménagements, définie par le mur A7 qui semble avoir été composé par deux anneaux de briques. Conservé sur deux assises, ce mur a été coupé dans sa portion sud-est par une fosse (Locus A10), coupant le lien stratigraphique avec le Locus A1, délimité par les murs A2 et A9. La relation entre l’intérieur de la structure circulaire (Locus A13) et le mur A1, qui l’occupe en partie, reste à préciser. Ce point pourra être vérifié lors de la poursuite de la fouille du sol A2 retrouvé à l’intérieur de la construction ronde. Apparu le dernier jour de la campagne, avec des céramiques brisées en place, ce sol n’a pas pu faire l’objet d’une fouille minutieuse. Sa relation avec le mur A7 reste à vérifier, de même qu’avec le mur A12 et A1. Cependant, grâce aux céramiques qui y ont été retrouvées, il fournit des éléments de datation, apparemment du Bronze ancien III (fig. 5). En fonction de la relation stratigraphique entre le sol A2 et le mur A7, cette datation pourra être mise en relation soit avec le Locus A13, soit avec une occupation antérieure à celui-ci. En tout état de cause, elle apporte une première situation chronologique de l’ensemble des couches retrouvées lors de cette campagne.

Page 37: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

37

Un quatrième niveau de brique est représenté dans ce sondage par le mur A8 et par les murs A10 et A11, qui lui sont vraisemblablement contemporains. Le mur A8 est un mur rectiligne sur lequel repose directement le mur A7 (fig. 2, 3). Il est composé d’une seule assise de briques, dont le module est de 67 x 50 cm. Situés à l’autre extrémité du sondage, les murs A10 et A11 ainsi que le sol A1 qui leur est lié sont probablement contemporains du mur A8. Ils passent sous le mur A5, dont ils sont séparés par une couche de terre.

Fosses et tombe

Un certain nombre de fosses ont été dégagées au cours de cette campagne. La fosse du Locus 10 est la plus intéressante. Creusée au nord-ouest du locus A1, qu’elle a vraisemblablement détruit en partie, elle a également perturbé les murs A7 et A1. Sur ses pentes, la découverte d’un vase en fragments et d’ossements, qui semblent pris sous le mur A2, laissent penser qu’elle a également détruit une tombe.

Matériel du sondage

Le basalte : divers éléments d’outillage en basalte ont été retrouvés lors des opérations de sondage de 2007 au chantier A. Ce matériel, relativement abondant, comporte de l’outillage de broyage et de la vaisselle.

La céramique : la principale information fournie par le matériel du sondage de 2007 au chantier A concerne la datation du Bronze ancien des couches retrouvées. En dehors des céramiques communes et grossières, les couches dégagées en 2007 ont fourni de nombreux exemples de céramique décoré de bandes lustrées plus ou moins ondulées ainsi que de céramique peignée, caractéristiques des productions du IIIe millénaire (fig. 6). On notera enfin le vase retrouvé en deux morceaux dans la fosse du Locus A10, qui a dû appartenir à la tombe visible sous le mur A2 (fig. 7).

Le silex : de nombreuses lames de silex ont été recueillies dans les couches du sondage du chantier A de 2007 (fig. 8). On notera un ensemble de quatre lames, au tranchant lustré, retrouvées groupées à l’Est du mur A8.

Conclusion

Ce rapide sondage laisse nombre de questions stratigraphiques en suspens mais il a permis de dater les couches directement accessibles en ce point d’un des sommets du site et de confirmer le choix de cette implantation pour les campagnes à venir. Parallèlement, d’autres chantiers devront être ouverts au fur et à mesure, notamment sur les tells du nord-ouest, sud-ouest et sur celui du nord, où des murs de brique affleurent en surface. Enfin, le programme s’attachera à préciser les relations entretenues par l’ensemble des sites de la zone et à préciser leur insertion dans le peuplement de la région du Nahr el-A’ouaj, dans le cadre d’une analyse régionale.

Page 38: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

38

La campagne de 2008 se concentrera sur la poursuite du chantier A, en extension, ainsi que sur la reprise des prospections et sur l’étude de la céramique. De nouveaux chantiers pourraient être ouverts à partir de 2009, parallèlement aux débuts de l’étude paléogéographique de l’ensemble.

Fig. 1 : Vue générale des tells, image Google Earth : Tulul el-Far au nord, Tell Taouil au sud, Tell el-Kharaze à l’est.

Fig. 2 : Plan final du sondage de 2007. Y. Khacho.

Page 39: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

39

Fig. 3 : Vue vers l’Ouest de la construction circulaire (mur A7) reposant sur le mur A8. A l’avant de la photo : mur A3.

Fig. 4 : Détail du mur de fondation A3 et petit mortier de basalte retrouvé contre les briques.

Page 40: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

40

Fig. 5 : Vue vers le sud : construction circulaire et sol A2 avec restes de céramiques brisées en place. Au-dessus de l’espace circulaire : mur A12 et A1.

Fig. 6 : Céramique à bandes lustrées et céramique incisée.

Page 41: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

41

Fig. 7 : Vase provenant de la tombe située en partie sous le mur A2

et probablement partiellement détruite par la fosse Locus A10.

Fig. 8 : Lames de silex retrouvées groupées à l’ouest du mur A8.

Page 42: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

42

La mission conjointe

syro-française de l’Oronte première campagne (aout 2007)

Michel Al-Maqdissi DGAM, Damas Dominique Parayre Université Charles de Gaulle-Lille 3, Lille Martin Sauvage EPHE, Paris Depuis 2006, un projet de recherche interdisciplinaire (archéologie, épigraphie, environnement1) a été mis en place pour l’étude d’une micro-région située sur la rive droite de l’Oronte en aval de Hama (Syrie). La vallée de l’Oronte, et le Nord du Levant en général, font l’objet à l’heure actuelle d’un intérêt accru de la part d’archéologues de toutes nationalités. Notre programme s’articule autour de l’étude de deux sites principaux Tell Massin et Tell al-Nasriyah, deux sites quadrangulaires plutôt atypiques et curieusement très proches l’un de l’autre (fig. 1). 1La mission était dirigée en Syrie par Michel al-Maqdissi, directeur des fouilles archéologiques et des études archéologiques à la Direction générale des Antiquités et musées de Damas, et en France par Dominique Parayre, professeur à l’université Lille 3 (UMR 8164 HALMA-IPEL). Elle associe également des chercheurs de l’UMR ArScAn (CNRS, Nanterre), de l’EPHE (Section des sciences historiques et philologiques, Paris) et prend en charge la formation d’étudiants syriens à l’université Lille 3.

Page 43: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

43

Fig. 1: Localisation de Tell Massin et de Tell al-Nasriyah

dans la vallée de l’Oronte. Tell Massin est localisé sur le plateau à quelques 25 km au nord-est de Hama, Tell al-Nasriyah jouxte le cours de l’Oronte à moins de 15 km de cette ville. La campagne de 2007 a été consacrée aux travaux de prospection et de relevés sur les deux sites. (fig. 2)

Page 44: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

44

Fig. 2 : Tell Massin. Plan topographique provisoire.

Tell Massin est un site de plan à peu près carré constitué d’une butte culminant à 14 m au-dessus du niveau de la plaine environnante et couvrant une superficie de 5,35ha. En contrebas du tell, au nord, une occupation de ville basse a également existé; sa superficie est plus difficile à estimer, elle doit représenter au moins 3 ha. Le tell lui-même a fait l’objet d’une campagne de fouilles rapide par le comte du Mesnil du Buisson en 19301. Nous avons entrepris un relevé géophysique de Tell Massin en juin 20072, il a indiqué 1« Sourân et Masin », Berytus, II (1935), p. 121-134. La mission a repris, grâce à l’amabilité du département des Antiquités orientales du musée du Louvre, et en particulier d’Elisabeth Fontan, l’étude du matériel issu de cette fouille afin de le re-publier. 2Relevé effectué du 5 au 23 juin 2007 par Claire Brisson (élève ingénieur à l’université Paris 6) avec l’aide de Pierre Dubœuf, sous la direction de Christophe Benech (Maison de l’Orient méditerranéen, université Lyon 2). La poursuite du programme à Tell al-Nasriyah est également prévue.

Page 45: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

45

des zones fortement perturbées qui correspondent principalement aux fouilles de du Mesnil du Buisson ainsi qu’une zone centrale beaucoup plus « calme », sans doute due à l’importance du comblement ancien (érosion naturelle) et moderne (travaux des paysans). Le relevé topographique du tell (hors ville basse) fait en août 20071, que l’on a pu comparer avec le schéma publié par du Mesnil du Buisson, montre une forte érosion du site. Elle est due principalement aux travaux de terrassement agricoles : la levée sud a été entièrement arasée pour laisser la place à une plantation de pistachiers, les levées nord et est ont été taillées au bulldozer pour aménager des voies d’accès au sommet du site pour les machines agricoles. La majeure partie du tell est par ailleurs fortement endommagée par les labours qui arasent les levées et les buttes et comblent les dépressions. À l’heure actuelle, non seulement les fouilles de 1930 ne sont absolument plus visibles, mais un certain nombre d’éléments topographiques relevés par le comte ont totalement disparu : grottes, glacis, etc. En ville basse, où une occupation d’époque classique est probable, les travaux agricoles ont également détérioré la topographie antique. Le relevé de la ville basse sera entrepris lors d’une prochaine campagne afin de préciser les zones d’occupation et de préparer une étude géomorphologique de l’environnement du tell. Cette dernière est en effet nécessaire à la bonne compréhension du réseau hydrographique, complexe dans ce milieu karstique, et de la topographie originelle au moment de l’installation humaine qui s’est faite sur d’importants affleurements rocheux. Nous avons procédé lors de la campagne de 2007 à une prospection céramique de surface sur l’ensemble du site (hors ville basse)2. Dix-sept zones ont été définies (fig. 3) sur lesquelles nous avons ramassé près de 2000 tessons.

1Relevé effectué du 3 au 6 août 2007 par François Lenoir (ingénieur topographe ESTP) et Thomas Soubret (élève ingénieur topographe ESGT). 2Prospection céramique de surface effectuée du 3 au 6 août 2007 par Abdallah Ahmed Bassal (Service des Antiquités de Syrie), Dominique Parayre (université Lille 3) et Martin Sauvage (EPHE, Paris).

Page 46: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

46

Fig. 3 : Tell Massin. Zones de prospection céramique.

Un tiers environ du matériel a pu être étudié avec l’aide de Michel al-Maqdissi et de Massoud Badaoui. La céramique prospectée indique deux périodes majeures d’occupation à Tell Massin : le BA IV et le BM I (fig. 4), et le BM II (fig. 5).

Fig. 4 : Tell Massin.

Céramique du Bronze ancien IV.

Page 47: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

47

Fig. 5 : Tell Massin.

Céramique du Bronze moyen II. Le nettoyage de coupes artificielles taillées par les chemins d’accès des tracteurs dans les levées nord et est a permis de repérer très précisément les niveaux du BA IV-BM I de couleur grise, et le remplissage de terre et de cailloutis de couleur ocre rouge des levées qui ont été directement installées sur les niveaux antérieurs. La céramique prélevée dans ces coupes indique clairement que les levées ont été mises en place au début du BM II, en s’appuyant, au moins au nord et à l’est du site, sur la pente des niveaux antérieurs du BA IV-BM I. C’est donc au début du Bronze moyen II que le site de Tell Massin a été aménagé en site quadrangulaire. Dans l’une des coupes, on note que le remblai de la levée est surmonté d’un mur de briques crues. Dans la mesure où des fragments de murs de briques crues avaient également été relevés par du Mesnil du Buisson sur le pourtour du site, on peut penser que les levées étaient surmontées d’un rempart ceignant l’ensemble du tell.

Fig. 6 : Tell al-Nasriyah, plan topographique provisoire.

Page 48: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

48

Tell al-Nasriyah est un très gros site (800 m de côté, au moins 70 ha de superficie) installé sur les berges de l’Oronte (fig. 6). Il a été pourvu d’au moins deux levées qui forment un angle droit au nord-est et dont la taille s’apparente à celles de Qatnâ. Nasriyah n’a jamais fait l’objet de fouilles mais seulement de prospections. La campagne de 2007 a permis d’en faire un relevé topographique presque complet1, la prochaine campagne devrait permettre de l’achever et de le géo-référencer. Le site a été occupé dès le paléolithique2, probablement en relation avec les grottes qui bordent l’Oronte au nord-ouest. Pour les époques historiques, il a été occupé d’abord dans sa partie sud-est qui présente une acropole bien marquée contre laquelle la levée orientale a été plaquée. Les deux levées nord et est ont une ampleur considérable : 800 m de longueur, jusqu’à 100 m de large. Elles sont doublées à l’extérieur d’un fossé dans lequel on a, semble-t-il, prélevé la terre mélangée de cailloutis qui compose les levées. Il est encore difficile, en l’absence d’un relevé complet et d’une étude géomorphologique des variations du cours de l’Oronte et de ses terrasses, de savoir comment s’organisait le site du côté du fleuve. On a cependant relevé plusieurs emplacements qui donnaient accès à l’Oronte ainsi que la trace en coupe d’une rue ou d’un quai qui pourrait avoir longé le cours ancien du fleuve. Ces indices, ainsi que la présence des infranchissables gorges de Cheizar en aval, donnent à penser que Tell al-Nasriyah a pu être un point de rupture de charge pour les marchandises transitant sur l’Oronte ou arrivant par voie de terre Nous avons procédé à une prospection de surface à Tell al-Nasriyah3 où nous avons défini 19 zones (fig. 7).

1 Relevé effectué du 8 au 27 août 2007 par François Lenoir et Thomas Soubret. 2Du matériel lithique de cette période a en effet été ramassé sur le site lors d’une prospection antérieure (comm. pers. de M. Badaoui). Cf. K. Bartl et M. Al-Maqdissi, "Ancient Settlements in the Middle Orontes Region between ar-Rastan and Qal'at Shayzar. First Results of Archaeological Surface Investigations 2003-2004. A Cooperation Project of the German Archaeological Institute Damascus and the Direction Générale des Antiquités et des Musées", in Urban and Natural Landscapes of an Ancient Syrian Capital, Settlement and Environnement at Tell Mishrife/Qatna in Central-Western Syria, Documents d'Archéologie Syrienne XII, Studi Archeologici su Qatna 01, Udine, p. 243-252, 2007..Cf.aussi P. Sanlaville et al éds., Le Paléolithique de la vallée moyenne de l'Oronte (Syrie). Peuplement et environnement, BAR International Series, 587, 1993. 3Prospection céramique de surface effectuée du 8 au 23 août 2007 par Bachar Baaj (université Lille 3), Abdallah Ahmed Bassal, Dominique Parayre et Martin Sauvage.

Page 49: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

49

Fig. 7 : Tell al-Nasriyah. Zones de prospection céramique.

L’étude d’environ un cinquième des quelques 3 600 tessons ramassés indique deux pics d’occupation. L’occupation de la butte principale a pu débuter dès le quatrième millénaire et s’est surtout développée au BA IV. La majorité des tessons étudiés date du Bronze moyen où âge amorrite (60% du total), période où Nasriyah est devenu quadrangulaire. La distinction entre le BM I et le BM II reste à affiner ; il semble que l’occupation du Bronze moyen ait concerné l’ensemble du site. Les tessons du Bronze récent représentent 7% du total, mais la localisation précise de l’occupation de cette période reste à établir. Le second pic concerne l’âge du Fer (25% du matériel étudié; (fig. 8).

Fig. 8 : Tell al-Nasriyah.

Céramique du Fer II.

Page 50: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

50

Les niveaux de l’époque araméenne affleurent en plusieurs endroits à la surface du tell si bien que les travaux de labour profond ont attaqué des structures en place : nous avons repéré lors de la prospection plusieurs zones de jarres de stockage cassées. Enfin, quelques tessons indiquent que le site a été occupé aux époques achéménide, classique et mamelouk, au moins en partie (plutôt les zones ouest en bordure de l’Oronte). La prochaine campagne (août 2008) sera consacrée à la fin de l’étude du matériel céramique des prospections, à la fin du relevé topographique de Tell al-Nasriyah et au début des travaux de fouilles sur ce dernier site.

Page 51: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

51

Les découvertes épigraphiques des fouilles récentes de Mari.

État des recherches en janvier 2009. Antoine Cavigneaux Laurent Colonna d'Istria Université de Genève, FNRS En 2003 le professeur J.-C. Margueron nous a confié la publication des tablettes cunéiformes qu'il avait découvertes à Tell Hariri/Mari entre 1998 et 2002. Ces tablettes se répartissent essentiellement en deux groupes : 1) le chantier K, une maison située à l'Est du Grand Palais Royal (GPR), semble avoir été une sorte d'école; on y a découvert plus de 1000 tablettes à contenu surtout scolaire, mais aussi administratif, datant de l'époque paléo-babylonienne (XVIIIe siècle av. J.C. ; 2) le chantier du GPR, dont les niveaux supérieurs, paléo-babyloniens eux aussi, ont été fouillés dans les années 30 ; depuis les années soixante on explore lentement, secteur par secteur, les niveaux inférieurs, datant du troisième millénaire (ce sont les palais dits 'présargoniques' P3 à P-zéro et le palais des 'shakkanakku', les gouverneurs qui ont régné à Mari après la conquête par Sargon). Dans le secteur Nord Ouest, on a découvert dans un radier plusieurs centaines de tablettes administratives remontant à l'époque des 'shakkanakku'.

Page 52: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

52

1. Le chantier K Nous avons consacré l'été 2004 à cataloguer et à étudier les textes du chantier K au musée de Damas. Ce sont des textes administratifs, quelques contrats et lettres, mais surtout des lentilles et des textes scolaires contenant des extraits de listes lexicales et métrologiques. Les quelques textes littéraires retrouvés sont presque tous en sumérien : entre autres l'épopée de Lugalbanda (première partie), Shulgi B (plusieurs témoins), un extrait de la correspondance littéraire, des fragments de textes liturgiques (parfois avec gloses akkadiennes) etc. La grande révélation de ce chantier est donc que Mari connaissait des méthodes d'enseignement très proches de celles de la Mésopotamie, basées en grande partie sur l'apprentissage de la langue sumérienne par les listes lexicales et la littérature. Un des habitants de la maison avait selon toute vraisemblance des responsabilités administratives, particulièrement dans le domaine de la gestion du personnel, puisque les différents textes administratifs concernent le personnel et que les contrats sont des ventes de personne, mais cet homme devait consacrer une partie de son activité à enseigner. On n'a retrouvé aucune trace de documentation privée, mais il ne faut peut-être pas s'en étonner, dans la mesure où toutes les archives que nous avons retrouvées étaient jetées au rebut, enfouies sous les sols ou dans l'appareil des murs. Les documents privés avaient dû être récupérés et mis à l'abri auparavant. Aucun texte déchiffré jusqu'ici n'était daté, pas même les contrats, mais comme la pièce centrale était recouverte d'un pavement inscrit au nom de Zimri-Lim scellant les tablettes, on admettra qu'elles sont au plus tard du début de son règne ou plus vraisemblablement de peu antérieures : on peut même risquer l'hypothèse que la présence d'un enseignement 'classique' à Mari est liée aux réformes administratives introduites sous Yahdun-Lim, et que J.-M. Durand a mises en évidence1. Peut-être des lettrés mésopotamiens ont-ils été engagés pour réformer l'enseignement et la formation des scribes à Mari? Dédicace d'une statue à Adad (pl. 1) Au moins un des textes du chantier K porte le nom de Yahdun-Lim; cela ne saurait constituer une preuve irréfutable pour la datation de l'ensemble, mais c'est un indice confirmant l'hypothèse émise à l'instant : il s'agit de la fin d'un texte en sumérien à caractère hymnique, qui nous semble être une inscription dédicatoire ou peut-être le nom officiel d'une année du roi. Vu son intérêt, nous en présentons ici une édition provisoire :

1 Durand J.-M., « La situation historique des Šakkanakku : nouvelle approche », M.A.R.I. 4, 1985, p. 147-

172.

Page 53: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

53

TH00-T68 (la face est détruite, sauf quelques traces à la dernière ligne) ... 1'. ⌈diskur x x x x⌉ [...] r. 2'. nam-bi-še3 n[am-...] 3'. Ia-aḫ-du-li-im lu[gal ma-riki...] 4'. kur dumu-me[š] si-im-⌈a⌉-[al ...] 5'. ḫa-naki ⌈a-na⌉ [me-a-bi (?) ...] 6'. alan ku3-sig17 ku3-babbar [...] 7'. kig2 a2

? šu? x [...] 8'. diskur-ra mu-u[n?-na-dim2/ku4 ?] Traduction : "... Adad ... Pour cela ... [...] Yahdun-li'im, roi de Mari ..., du pays des fils de Sim'al, ... et du Ḫana tout entier, une image d'or et d'argent ..., dont le travail des bras et des mains (?) ... pour Adad [il fabriqua/introduisit (?)]."

La face décrivait sans doute une campagne victorieuse du roi. L'écriture maladroite trahit l'exercice scolaire. Le simple fait que l'inscription soit en sumérien est étonnant, même si le sumérien n'est pas impeccable (dumu-meš est fautif et trahit une réalisation sémitique!). Les épithètes du roi sont également remarquables, surtout 'roi des Sim'alites'; elles rappellent celles du sceau de la fille de Yahdun-Li'im (lugal ma-riki u3 ma-at DUMU si-im-[a-al]) et confirment les observations de J.-M. Durand et D. Charpin2. On peut aussi légitimement voir dans ce petit fragment un indice du lien entre le pouvoir de Yahdun-Lim et l'effort de sumérisation de l'enseignement à Mari. 2. Le chantier « palais nord » ; les textes de l'époque 'shakkanakku tardive' C'est sur ce groupe de textes que portent en ce moment tous nos efforts. Notre projet, soutenu à l'origine par l'Université de Genève et la fondation Schmidheiny, est financé depuis deux ans par le FNRS (Fonds National de la Recherche Suisse), avec une participation de notre université et du projet CISA ; son objectif est de parvenir en trois ans à publier les 1141 items (= ca 1500 tablettes et fragments de tablettes cunéiformes et de scellements) découverts entre 2000 et 2002 dans le chantier du palais. Le noyau du groupe comprend deux assistants financés par le FNRS, Laurent Colonna d'Istria depuis oct. 2006, Grégoire Nicolet depuis juin 2008, et la photographe de notre Faculté, Viviane Siffert ; il s'augmente, en fonction des disponibilités et des circonstances, du Prof. Manfred Krebernik (université de Jena), du Dr. Margaret Jaques (chargée de cours à l'université de Zurich et maître-assistante au projet FN du CISA), du Prof. Imad Samir 2 Charpin D. et Durand J.-M., « « Fils de Sim’al » : les origines tribales des rois de Mari », RA 80, 1986, pp. 141-183, particulièrement p. 152.

Page 54: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

54

(université de Damas), des doctorands et étudiants qui acceptent de s'engager dans ce travail ou d'y participer pour leur formation : Mathilde Crevoisier (MA), Anne-Caroline Rendu (doctorande) ; Aude Seigne (étudiante en MA) et quelques autres. Le Prof. Dominique Beyer (université de Strasbourg) étudie les scellements. Tout ce projet n'est possible que grâce à la collaboration avec les membres de la Direction Générale des Antiquités et des Musées de Syrie, son directeur le Dr. Bassam Jamous, le Directeur des Fouilles, le Dr. Michel Al-Maqdissi et la conservatrice Mme Muyassar Yabroudi. Dans l'ensemble, les textes sont par la date, l'origine et la typologie, très proches de ceux déjà publiés par H. Limet (ARM XIX) ; le déchiffrement progressif nous a permis de comprendre un peu mieux le fonctionnement de l'administration du palais à l'époque des gouverneurs shakkanakku. Presque tous les textes vus jusqu'à aujourd'hui sont en effet administratifs. Ce type de textes ne peut être étudié efficacement que de manière quantitative, mais on a déjà acquis certains résultats concernant en particulier : 1) le dialecte, encore très mal connu, de Mari à l'époque. Malgré le nombre restreint de formes verbales et le caractère formulaire de la langue, il y a assez de termes akkadiens pour nous permettre de mieux connaître quelques particularités grammaticales et lexicales de la langue ; 2) l'histoire de la fin de la période dite 'shakkanakku'. Il est désormais définitivement établi que, comme l'avait déjà montré J.-M. Durand 3, nos textes datent de l'extrême fin de la période, peut-être de la toute dernière année où fonctionna le système administratif dans cette configuration. Un lot de textes un peu particulier concernant de riches tissus et d'autres biens de prestige recèle une quantité d'informations très importantes. Les récipiendaires de ces cadeaux ou échanges (souvent inégaux) de prestige peuvent être des chefs, des personnages importants parfois attestés dans la documentation épistolaire et historique des années immédiatement suivantes : on retrouve en particulier Iagid-li'im, père de Iahdun-li'im, qui ne tardera pas à régner à Mari ; Il'e-kabkabu, père de Samsi-Addu, le fondateur du royaume de Haute Mésopotamie, qui englobera toute la Jezire d'Assur à Mari ; et aussi un certain Aminum (Yaminum?), un autre conquérant audacieux, peut-être un frère de Samsi-Addu, connu par la liste royale assyrienne comme un ancêtre des rois assyriens et par les chroniques éponymales comme un adversaire du roi d'Eshnunna Ipiq-Adad4 (voir les textes cités ci-dessous sub présents somptuaires). Nous présentons ci-dessous quelques extraits des dossiers que nous pouvons déjà interpréter, au moins partiellement, avec assez de vraisemblance. Nous n'avons pas encore attribué de numérotation continue aux textes, ce que nous ne ferons qu'au moment de l'édition finale, mais nous avons déjà regroupé les textes thématiquement proches. a) système graphique et la langue des textes : À ce jour, nous avons relevé de nombreuses particularités dialectales qui rapprochent

3 Durand J.-M, art. cit., M.A.R.I. 4, p. 160-170. 4 Birot M., « Les chroniques « assyriennes » de Mari », M.A.R.I. 4, 1985, p. 219-242, plus particulièrement

p. 221.

Page 55: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

55

la langue de Mari du monde nord-syrien et ouest-sémitique 5. Parmi les particularités morphologiques on peut relever entre autres une alternance de la nunation et de la mimation, parfois dans le même texte ; -ši (SI) comme pronom suffixe génitif 3ème pers. fém. sing. etc... Parmi les particularités lexicographiques caractéristiques on citera entre autres : --- pu-U (puwū?), un produit utilisé pour la tannerie ou la teinturerie (correspondant à l'akkadien ḫūratum), qu'on retrouve à Ougarit6.

TH02-T356 f. 1. 60 maš-a-nu / sa2-pu-u-tum | 2. 50 GIN2 pu-U | 3. 85 GURUŠ / šu ⌈’a3⌉-pa2-šim | tr. inf. et r. 4. iš [(x)] ⌈x⌉ / [(x)] | 5. espace vide | 6. E3-A | 7. [i]-din-il3-a-ba4 | 8. 28 UD ITI / d⌈da⌉-[gan]

60 paires de sandales épaisses 50 sicles de puwū 85 hommes qui les traitent pour …. Sortie Iddin-Ilaba Jour 28, mois viii

Voir également dans l’ARM XIX :

ARM XIX 290 f. 1. 10 GIN2 / pu-U | 10 sicles de puwū 2. iš 2 maš-a-ni-/in4 | pour 2 paires de sandales (espace vide) r. 3. [UD].DU-A | Sortie 4. i-din-il3-a-ba4 | Iddin-Ilaba. 5. 20 UD ITI / KIN Jour 20, mois xii.

ARM XIX 306 f. 1. 5 GIN2 / pu-U | 5 sicles de puwū 2. iš ta2-aḫ-pi2-sa2-tin | pour des baudriers 7 3. E3-A | Sortie r. 4. sil2-l[a2-d]/nu-[nu] | Silla-Nunu 5. [n UD ITI … ] Date

5 Voir pour plus de détails Colonna d'Istria Laurent, Évolution des traditions culturelles dans la vallée du Moyen Euphrate de la fin du Bronze ancien au début du Bronze moyen (thèse Lyon II Lumière, soutenance prévue en 2009). 6 Del Olmo Lete G. et Sanmartin J., A Dictionary of the Ugaritic Language in the Alphabetic Tradition, 2004 (2ème éd.), p. 688-689. 7 Le terme ta2-aḫ-pi2-sa2-tin, forme fém. pl. pourrait être une forme dialectale de taḫapšum.

Page 56: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

56

WA-an-tum, duel : WA-an-ta2-an, pluriel : WA-na-tum < sem. yawnatun 'colombe', avec abrègement de la première syllabe (?) ; le mot akkadien correspondant est summatum, comme le montre clairement la glose émariote :

Emar 555, l. 71’. 8

SUMERIEN akkadien émariote

F. (Msk 74158r) K (Msk 7467)

[…] MIN TU

su-um-ma-tu su !-ma-tu4

PI(wa)-at-tu4

TH02-T376 f. et tr. inf. 1. 2 Wa-⌈an⌉-/ta2-an | 2. ŠU KIR11 | 3. E3-A | 4. i-din-i3-li2 | r. 5. espace vide | 6. 6 UD ITI / la2-ḫi-im

TH02-T345 f. 1. 1 Wa-an-tum | 2. ŠU KIR11 | 3. E3-[A] | 4. i-din-i3-li2 | r. 5. espace vide | 6. 7 UD ITI / la2-ḫi-im

TH02-T39 f. et tr. inf. 1. 3 Wa-na-tum | 2. ⌈ŠU KIR11⌉ | 3. 1 Wa-an-tum / UŠ2 | 4. E3-A | 5. i-din-i3-li2 | r. 6. espace vide | 7. 8 UD ITI / la2-ḫi-im

Remarque. Le ŠU KIR11, auquel est destinée la colombe dans de nombreux textes, y compris ceux cités ci-dessus, reste inexpliqué. Le logogramme KUR employé pour 'champ' trahit une lecture šadûm, comme en ougaritique šd 9 (et non eqlum comme en akkadien). On le trouve dans le texte TH02-T290a, un texte exceptionnel que nous donnons ici : il mentionne les dépenses effectuées pour les travaux de préparation des champs. 8 Arnaud D., EMAR VI.4, 1987, p. 131. 9 Del Olmo Lete G. et Sanmartin J., A Dictionary of the Ugaritic Language in the Alphabetic Tradition, 2004 (2ème éd.), p. 807-809.

Page 57: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

57

TH02-T290a f. 1'. [x] ⌈x⌉ [x] ⌈x⌉ | 2'. ⌈šu?⌉ ma-WA-[ri2] | 3'. ⌈24?⌉ gišAPIN šu ⌈ŠE⌉ / 1BARIGA 4BAN2 iš 1 GANA2 KUR | 4'. 1 A-GAR3 5 GUR ŠE-NUMUN / šu 60 GANA2 KUR 3BAN2-TA 1 GANA2 | 5'. 24 TUR.UŠ šu 6 ⌈SILA3-TA⌉ / za-ar-u2-⌈tum⌉ | tr. inf. 6'. 24 TUR.UŠ šu 6 [SILA3-(TA?)] / šu kir-ba-ni u2 ma-⌈i⌉ | r. 7'. 2BAN2 4 SILA3 NINDA 4BAN2 8 SILA3 ⌈KAŠ⌉ / 24 u2-ka3-ku-tum / 1 SILA3 ⌈NINDA 2 SILA3⌉ KAŠ-TA | 8'. [n] GUR tal-qi2-tu[m] | 9'. [š]u ŠE-NUMUN | 10'. ⌈1⌉ ME-AT 10 TUR.UŠ / [š]u 6 SILA3-TA ⌈x⌉ ba-tu ⌈i?⌉-in4 u2 [...] | 11'. [x x] ⌈x⌉ [x] ⌈x⌉ NINDA? | ... Traduction : 1'. …… 2'. … des glèbes 3'. 24? charrues à (semer) le grain, 100 litres pour 1 iku de champs. 4'. 1800 litres de semence correspondant à 60 iku de champ à 30 litres par iku 5'. 24 gars à 6 litres chacun : semailles 6'. 24 gars à 6 litres chacun affectés aux mottes et à l’eau 7'. 24 litres de pain et 48 litres de bière

24 (gars) : binage à 1 litre de pain et deux litres de bière chacun 8'. [n × 120] litres : glanage 9'. de semence 10'. 110 gars à 6 litres chacun …

b) Structures administratives et datation des textes : De très nombreux documents concernent la gestion des céréales, souvent issues par les mêmes administrateurs. Même à ce stade intermédiaire de notre travail, les recoupements nous permettent d'évaluer si nos documents couvrent une ou plusieurs années, car nous n'avons aucun autre repère chronologique (les textes déchiffrés jusqu'ici ne sont au mieux datés que du jour et du mois). Sans préjuger des résultats de nos recherches futures, la vraisemblance est très forte qu'on a à faire avec cette archive à une

Page 58: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

58

seule année, peut-être même moins pour certains bureaux.

TH02-T155 f. 1. 5BAN2 4 1/2 SILA3 / ku-ku-šu | 2. espace vide | r. 3. GURUM2 ra-ma-/dda-gan | 4. 6 UD ITI / a-bi

TH02-T86 f. 1. ⌈3BAN2⌉ 6 SILA3 / ku-ku-šu | r. 2. GURUM2 it-lal3-/dda-gan | 3. 28 UD ITI / li-li2-a-tin

TH02-T27 f. 1. 1 PA2-AN / 3 1/2 SILA3 / ku-ku-šu | tr. inf et r. 2. GURUM2 ra-ma-/dda-⌈gan⌉ | 3. espace vide | 4. 1 UD I[TI] / dKUR |

TH02-T222 f. 1. 1BAN2 ⌈5⌉ 1/2 SILA3 / ⌈ku-ku-šu⌉ | r. 2. GURUM2 / it-lal3-/d⌈da⌉-gan | 3. 3 UD ITI / ⌈KIN⌉

TH02-T266 f. 1. [4BA]N2 1/2 SILA3 / ⌈ku-ku-šu⌉ | tr. inf. et r. 2. espace vide | 3. GURUM2 ra-ma-/dda-gan | 4. 20 LA2 1 UD / [IT]I dKUR

TH02-T107 f. 1. 4BAN2 LA2 1/2 SILA3 / ⌈ku-ku-šu⌉ | 2. GURUM2 it-lal3-/dda-gan | r. 3. 5 UD ITI / taš-ni-tin

TH02-T181 f. 1. 1 PA2-AN / 3 SILA3 / ku-ku-šu | r. 2. espace vide | 3. GURUM2 ra-[ma]-/dda-gan | 4. 1 UD ITI / dAMA!.KI

TH02-T253 f. 1. 3BAN2 5 SILA3 / ku-ku-šu | 2. GURUM2 ⌈it-lal3⌉-/d⌈da-gan⌉ | r. 3. 6 UD ITI / taš-ni-tin

TH02-T427 f. 1. 3BAN2 6 ½ ⌈SILA3⌉ / ku-⌈ku⌉-šu | 2. ⌈GURUM2⌉ ra-ma-/[d]⌈da⌉-gan | tr. inf. et r. 3. 21 UD ITI / IM-UD.UD |

TH02-T193 f. 1. 3BAN2 3 SILA3 / ku-ku-šu | 2. GURUM2 it-lal3-/dda-gan | r. 3. ⌈10 UD ITI⌉ / taš-ni-⌈tin⌉ 4.

TH02-T268 f. 1. 5BAN2 3 1/2 SILA3 / ku-ku-šu | tr. inf. 2. espace vide | r. 3. GURUM2 ra-⌈ma⌉-/dda-gan | 4. 28 ⌈UD⌉ ITI / [I]M-UD.UD

TH02-T241 f. 1. 1BAN2 / ⌈k⌉u-ku-šu | tr. inf. et r. 2. espace vide | 3. GURUM2 ⌈it⌉-lal3-/⌈dda-gan⌉ | 4. 30 LA2 1 UD ⌈ITI⌉ / ⌈taš-ni-tin⌉

Page 59: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

59

D'après la ménologie, il semble que la gestion du bureau concerné soit passée de Rama-Dagan, qui contrôle (GURUM2) pour les mois iv, vi, vii, viii et xi, à Itlal-Dagan, qui le fait au mois xii et au mois intercalaire. Nos textes contiennent de nombreux logogrammes, dont certains mots-clefs, comme mu-DU 'entrée', E3-A 'sortie', empruntés à l'administration sumérienne et dont la lecture akkadienne est difficile à déterminer. Les mots-clefs akkadiens, comme mu-KU-tum (muqūtum/muquttum? littéralement 'échéance'?), ne sont pas toujours plus clairs. Notre reliquat d'archive donne une sorte de vue en coupe de l'organisation économique du palais à cette époque, qui reposait sur divers bureaux dirigés par des fonctionnaires détenteurs de diverses responsabilités. Les tablettes sont souvent très mal préservées, mais si standardisées qu'on peut les restituer, malgré leur délabrement, à condition de reconnaître la typologie ou l'administrateur responsable. Nous avons observé par exemple que l'intendante (MUNUS.AGRIG), déjà bien attestée dans ARM XIX, fait sortir (E3-A) du pain (NINDA) et de la farine d'épeautre (ZI3 ZIZ2-AN), mais contrôle (GURUM2) le pain SUR (= ?) et la farine GU : la première catégorie était sans doute issue directement par son administration, tandis que la deuxième transitait seulement par elle. En rassemblant les informations de ce type, on peut essayer de reconstituer schématiquement la chaîne des produits alimentaires dans le palais.

A-Sortie (E3-A) du NINDA, et ZI3-ZIZ2-AN

B- Contrôle (GURUM2) de SUR, GU et ZI3-GU

TH02-T435 f. et tr. inf. 1. 1BAN2 4 ½ SILA3 / NINDA | 2. ½ SILA3 ZI3 ZIZ2-AN | tr. inf. et r. 3. espace vide | 4. E3-A | 5. MUNUS-AGRIG | 6. 27 UD ITI / e-bir5-tin

TH02-T225 f. 1. 8 SILA3 / SUR | 2. 1BAN2 G[U] | r. 3. espace vide | 4. GURUM2 MUNUS.IGI./DUB | 5. 5 UD ITI / ma-al-/⌈ka3⌉-ni

TH02-T165 f. 1. 1BAN2 3 SILA3 / NINDA | 2. 1BAN2 5 1/2 SILA3 / ZI3 ZIZ2-AN | tr. inf. et r. 3. espace vide | 4. E3-A | 5. MUNUS.AGRIG | 6. 1 UD ITI / dda-gan

TH02-T411 f. 1. 8 SILA3 / SUR | 2. 1BAN2 ZI3-GU | 3. espace vide | r. 4. GURUM2 MUNUS.IGI-/DUB | 5. 7 UD ITI / la2-ḫi-im

TH02-T139 f. 1. 4BAN2 3 1/2 SILA3 / NINDA | 2. espace vide | r. 3. ⌈E3-A⌉ | 4. MUNUS.⌈AGRIG⌉ | 5. 30 LA2 ⌈1 UD⌉ ITI / ⌈d⌉NIN-KI-TUL2

TH02-T59 f. 1. 8 SILA3 SUR | 2. espace vide | r. 3. ⌈GURUM2⌉ MUNUS.IGI./DUB | 4. 6 UD ITI / dKUR

Page 60: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

60

TH02-T373 f. et t. inf. 1. nBAN2 3+n SILA3 / ⌈NINDA⌉ | 2. 1BAN2 ZI3 ZIZ2-AN | tr. inf. et r. 3. espace vide | 4. [E3]-A | 5. [MUNUS.IGI].⌈DUB⌉ | 6. n ⌈UD ITI⌉ / KIN

TH02-T306b f. 1. 8 SILA3 SUR | 2. 5BAN2 GU | 3. [espace vide] | r. 4. [GURUM2 MUNUS.]IGI./DUB | 5. 14 UD ITI / KIN

TH02-T166 sqq., datés du mois de laḫḫum, montrent des livraisons de pains lahhum (la2-ḫi-im) ; comme les dates tournent toutes autour du 20, on a une hypothèse pour la date d'une fête qui donnait son nom à un pain et à un mois. Malheureusement les détails concrets sur les rituels sont rarissimes.

TH02-T073 f. 1. 1 M[UNUS] 2. iš NINDA ⌈la2⌉-[ḫi]-/⌈im⌉ r. 3. espace vide 4. E3-A 5. Za-na-Pum 6. 20 LA2 1 UD ITI / la2-ḫi-[im]

TH02-T166 f. 1. 1 MUNUS 2. iš NINDA la2-ḫi-im r. 3. espace vide 4. E3-A 5. Za-na-Pum 6. 21 UD ITI / la2-ḫi-im

TH02-T095 f. 1. 1 MUNUS 2. iš NINDA la2-ḫi-/im r. 3. espace vide 4. ⌈E3⌉-A 5. [Za]-⌈na⌉-Pum 6. [n] ⌈UD⌉ ITI / [la2]-ḫi-im

TH02-T309c f. 1. 1 PA2-AN ŠE 2. 1BAN2

2 SILA3 ZIZ2-AN

3. iš NINDA la2-ḫi-/im r. 4. espace vide 5. ⌈E3⌉-A 6. [Za]-na-Pum 7. [n] ⌈UD ITI⌉ / [la2]-⌈ḫi-im⌉

TH02-T236 f. 1. [1 PA2-AN ŠE] 2. [1BAN2

] ⌈2 SILA3 ZIZ2-AN⌉

3. iš NINDA la2-ḫi-im tr. inf. et r. 4. espace vide 5. E3-A 6. Za-na-Pum 7. 18 UD ITI / la2-ḫi-im

TH02-T382 f. 1. 1 PA2-AN ŠE 2. 1BAN2 2 SILA3 ZIZ2-AN 3. iš NINDA la2-[ḫi]-/im tr. inf. et r. 4. espace vide 5. E3-⌈A⌉ 6. Za-na-⌈Pum⌉ 7. 20 + n UD ITI / ⌈la2⌉-[ḫi]-⌈im⌉

La technologie : A l'occasion nos textes contiennent des détails intéressants dans ce domaine. Le forgeron šu billim 'd'alliage' était déjà connu par ARM XIX ; nos textes ajoutent des détails sur les proportions de l'alliage : en moyenne 16 p. cent (certainement d'étain par rapport au cuivre).

Page 61: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

61

TH02-T50 f. 1. 8 ⌈MA⌉-NA / 55 GIN2 / bi-lum | 2. šu 20 GIN2-TA | 3. ⌈KI⌉-LA2-BI | tr. inf. 4. n ḪAR-’a3-tin TUR | 5. ⌈sa2⌉ IR11 LUGAL | r. 6. ir3-ib-dda-gan | 7. im-ḫur | 8. espace vide | 9. E3-A | 10. a-ḫi-la2-ab-la2-at | 11. 11 UD ITI / dKUR

8 mines et 55 sicles d’alliage à 20 sicles par mine, poids de n petites boucles du serviteur du roi. Ir’ib-Dagan a reçu. Sortie Aḫi-lablat. Jour 11, mois vi.

TH02-T461 f. 1. 20 LA2 ½ G[IN2] / bi-lum | 2. ⌈šu⌉ 8 GIN2-⌈TA⌉ | 3. KI-LA2-BI | 4. ⌈6⌉ ḪAR-’a3-tin TUR | tr. inf. et r. 5. iš TUR.UŠ | 6. ⌈ir3⌉-ib-d/da-⌈gan⌉ | 7. ⌈im-ḫur⌉ | 8. espace vide | 9. ⌈UD⌉.[DU]-⌈a⌉ | 10. [NP] | 11. [n UD ITI] / ⌈a-bi⌉

19 sicles et demi d’alliage à 8 sicles par mine, poids de de 6 petites boucles pour le(s) domestique(s) ; Ir’ib-Dagan a reçu. Sortie NP Jour n, mois iv.

c) Données d'intérêt historique plus large : Deux dossiers sont particulièrement intéressants : celui des présents somptuaires et celui que nous pourrions appeler « des prix ». Ils donnent pour des raisons de gestion qui nous échappent, l'équivalent argent de certains biens.

Page 62: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

62

Les présents somptuaires Ce sont les textes les plus parlants de notre corpus. Dans TH02-T144 Aminum reçoit un vêtement nazizum à galon et un repose-pied. Il s'agit certainement de cadeaux de prestige. Les prix sont indiqués, comme c'est normalement le cas pour les objets les plus précieux, mais beaucoup plus rarement pour l'huile fine. Quand la sortie d'objets précieux du palais répond à un apport de moutons, comme c'est assez souvent le cas, la valeur des objets mariotes est toujours plus élevée que celle des moutons. Le contre-don a plus de valeur que le don. Le fait essentiel est qu'on constate des rapports policés entre les chefs amorrites et la ville de Mari, puisque les biens s'échangeaient fréquemment. Nous avons donc désormais acquis grâce à ces textes un ancrage chronologique et historique certain et une meilleure documentation du processus qui mena à la dislocation du pouvoir urbain de Mari et à son remplacement par des chefs de tribus amorrites. Les quelques autres personnages mentionnés dans les mêmes contextes, Zakirum, Inud-Li'im (Yanud-Li'im) et d'autres, nous sont inconnus, mais ils ont dû être eux aussi des acteurs importants dans la vie politique de ces temps mouvementés. D'autres récipiendaires de ces présents ont pu être des personnages sans lien avec la politique, récompensés pour une raison ou une autre. Par ailleurs nos textes n'éclairent guère sur la structure du pouvoir à Mari : un šakkanakku est encore présent, mais il est aussi fait allusion à un roi, dont nous ne savons même pas s'il résidait à Mari.

TH02-T20

f. 1. 2 UDU 3 IGI.4 GIN2 /

SA10-šu-ni | 2. MU-DU | 3. šu za-ki-ri2-im | 4. 1 TUG2 na-zi-zum /

šu su2-nim | tr. inf. 5. 10 GIN2 / SA10-šu | r. 6. za-ki-ru-um | 7. i-da-eš4-tar2 / NAR | 8. u-bil3-šum | 9. 6 UD ITI / dNIN-KI-TUL2

2 moutons : leur prix 3 1/4 de sicle, apport de Zakīrum. 1 vêtement nazīzum à galon : 10 sicles : son prix, (à) Zakīrum Idā-Eštar, le chantre, lui a porté. Jour 6, mois x.

Page 63: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

63

TH02-T23

f. 1. 1 TUG2 na-⌈zi-zum⌉ / 12 GIN2 ⌈SA10-šu⌉ 2. 1 ḪAR-ŠU KU3.BABBAR / 10 GIN2 KI-LA2-BI tr. inf. et r. 3. NIG2-GU2-DU | 4. ad-ba-ni-/ma 5. ni-in4 nu-ur2-/i3-li2 NAR 6. nu-šu-bil3-/šum 7. 20 LA2 1 UD ITI / IM-UD.UD

1 vêtement nazīzum : son prix 12 sicles, 1 bracelet d’argent dont le poids est de 10 sicles, présents ; (à) Adbanima nous, par Nūr-ili, le chantre, lui avons fait porter. Jour 19, mois xi.

TH02-T96

f. 1. 3 SILA3 I3-DU10 | 2. i-ki-id-li-im | 3. i-din-ma-ma | 4. espace vide | 5. 3 SILA3 I3-DU10 | tr. inf. 6. ir3-ra-ḫa-/bi-it | r. 7. i-šar-i3-li2 | 8. espace vide | 9. u-ub-la2-šu-/ni-iš | 10. 12 UD ITI / KIN

3 litres d’huile fine, (à) Igīd-Li’im Iddin-Mamma. -------------------- 3 litres d’huile fine, (à) Erra-ḫābit Išar-ilī. -------------------- Ils(duel) leur(duel) ont porté Jour 12, mois xii

l. 9. yublāšuniš ; la forme verbale est « mise en facteur » : les sujets sont Iddin-Mamma et Išar-ilī (ce qui explique le -a du duel) et les deux destinataires sont Igīd-Li’im et Erra-ḫābit (-šuniš)

Page 64: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

64

TH02-T144

f. 1. 1 TUG2 na-zi-⌈zum⌉ /

šu su2-nim | 2. 16 GIN2 SA10-šu | 3. 1 kiš-tap-pum | 4. 7 ½ GIN2 / SA10-si | tr. inf. et r. 5. a-mi3-num | 6. espace vide | 7. ri2-⌈im⌉-[sa2-]/i3-li2 /

DUMU ab-ba | 8. u-bil3-šum | 9. espace vide | 10. 13 UD ITI / e-bir5-tin

1 vêtement nazīzum à galon : 16 sicles : son prix, 1 repose-pied : 7 ½ sicles : son prix, (à) Aminum, -------------------- Rimša-ili, fils de Abba, lui a porté -------------------- Jour 13, mois v.

TH02-T171

f. 1. 1 TUG2 4 LA2 IGI.4 GIN2 /

SA10-šu | 2. 2 GIN2 KU3.BABBAR | 3. i3-la2-⌈am?-ma⌉-lik / si-pi[r6] | tr. inf. 4. i-ki-id-/li-im | r.

5. ab-ba / AGA.UŠ-ŠU | 6. i-din-šum | 7. 12 UD ITI / ma-al-ka3-ni

1 vêtement : son prix 3 sicles 3/4, 2 sicles d’argent, (à) Ilam-malik, envoyé d’Igīd-Li’im, Abba, le soldat, lui a donné. Jour 12, mois ii.

Remarque. Les documents de ce bureau peuvent, encore qu'exceptionnellement, être formulés à la première personne du pluriel : ni-in4 nu-ur2-i3-li2 NAR nu-šu-bil3-šum "nous lui avons fait porter par Nur-ili le chantre" (TH02-T23). Qui parle? Certainement quelqu'un du palais, très proche du pouvoir.

Page 65: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

65

Les prix : Un des bureaux gérant les ovins mentionne également la valeur en argent avec l'équivalence en orge. Curieusement deux systèmes d'équivalence sont attestés, l'un où le sicle d'argent vaut environ 3 gur, l'autre environ 1 gur et demi.

TH02-T400 f. 1. 3 1/2 GIN2 10 ŠE / KU3-BABBAR | 2. ⌈SA10⌉ 6 UDU.UDU | 3. in 3 GUR-TA| 4. iš 1 GIN2 | tr. inf. 5. iš E2-GAL | r. 6. ab-ba-la2-[i3] | 7. im-ḫur | 8. E3-A | 9. i3-li2-bi | 10. 8 UD ITI / NIG2 NI-SAG

TH02-T68 f. 1. 1 ⌈GIN2⌉ KU3.⌈BABBAR⌉ / 3 SILA3 ⌈ŠE⌉ | 2. SA10 ⌈1⌉ UDU | 3. in 1GUR 1BARIGA GUR-TA | 4. 1 PA2-AN ŠE | tr. inf. et r. 5. ⌈iš⌉ NINDA u2 ⌈KAŠ⌉ | 6. iš GANUN sa2 : / : UR | 7. eš4-tar2-a-li-a | 8. espace vide | 9. E3-A | 10. i3-la2-ak-⌈al⌉-⌈ni⌉ | 11. 14 UD ITI / a-bi

f. 1. 3 sicles et demi et 10 grains d’argent 2. prix de 6 moutons, 3. selon (un taux) de 3 gur 4. pour un sicle, tr. inf. 5. pour le palais, r. 6. Abba-la’i 7. a reçu. 8. Sortie 9. Ili-ibi 10. Jour 8, mois i.

f. 1. 1 sicle d’argent et 3 litres de grain 2. prix d’un mouton, 3. selon (un taux) d’un gur et demi (pour un sicle), 4. un demi gur de grain tr. inf. et r. 5. pour du pain et de la bière 6. pour le magasin de …. 7. Eštar-āliya 8. ---------- 9. Sortie 10. Ilak-alni. 11. Jour 14, mois iv.

3. Les dernières fouilles Les fouilles de Mari sont désormais dirigées par P. Butterlin (université de Saint-Quentin en Yvelines). Durant les campagnes 2006 et 2007 on a travaillé dans le secteur Sud-Ouest du palais et retrouvé dans les fondations du palais shakkanakku une dizaine de tablettes éparses remontant, à en juger par la paléographie, à l'époque des grands shakkanakku, correspondant à l'époque d'Ur ou peut-être même plus haut10. Malgré leur petit nombre, ces tablettes ont donc une importance particulière.

10 Voir le rapport des campagnes 2005-2006 Butterlin P., « Les nouvelles recherches archéologiques

françaises à Mari (2005-2006) », Studia Orontica II, 2008, pp. 61-82 (article également disponible sous forme électronique sur le site http://studiaorontica.org//).

Page 66: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

66

TH07-T5

f. 1. 16 SIMUG 2. 2BAN2 2 2/3 SILA3 NINDA-šu-nu 3. 1BARIGA LA2 1BAN2 2 SILA3 KAŠ-šu-nu 4. 6 SIMUG 5. 1BAN2 2 SILA3 KAŠ-šu-nu 6. šu 1 UD r. 7. A.RA2 27-KAM 8. espace vide 9. ITI Gi-iZ-Gi-Zum

16 forgerons, 22 2/3 litres : leur pain, 48 litres : leur bière 6 forgerons, 12 litres : leur bière (quantité) pour 1 jour 27ème fois ------------------- Mois de Kiskisum

Notez le mois de Kiskisum, qu'on retrouvera à l'époque amorrite.

Campagne 2008 Du 15 septembre au 20 octobre 2008 Anne-Caroline Rendu a participé, grâce au soutien du CISA, aux fouilles comme archéologue et épigraphiste. Elle a rédigé le rapport épigraphique sur l'unique document découvert : une inscription de fondation du shakkanakku Apil-kin (contemporain d'Ur-Nammu d'Ur, ca 2100 av. J.C.) déjà connue par la publication d'André Parrot et Georges Dossin11 et souvent republiée. Son importance est désormais grandie, car elle fut retrouvée in situ dans le « mur du temenos », liaisonné à l’angle Sud-Est du 'massif rouge'. Cette découverte nous permet d'une part de dater le dernier état du 'massif rouge', qu'on croyait jusque-là beaucoup plus ancien, d'autre part de mieux cerner la nature des constructions entreprises par ce souverain : ce qu'on croyait être une entrée monumentale comprenait aussi une haute terrasse. Bilan et perspective Quel que soit le point que nous aurons atteint dans l'exploitation du matériel, nous nous sommes engagés à présenter une publication pour la fin de l'an 2009. Même si tout n'est pas étudié, notre travail devrait au moins représenter une avancée importante dans l'étude de l'époque des shakkanakku.

11 Parrot A., « Les fouilles de Mari, sixième campagne (automne 1938) », Syria 21, 1940, pp. 6-8 et Dossin G., « Inscriptions de fondation provenant de Mari », Syria 21, 1940, pp. 159-161.

Page 67: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

67

Avancement du travail d'édition Le travail est souvent monotone et ardu, les tablettes souvent sales et brisées en tout petits fragments. En termes quantitatifs nous avons traité au terme de deux campagnes cinq cartons sur quatorze, c'est à dire environ 500 boîtes (mais un nombre plus considérable de tablettes, car une boîte peut receler des fragments de diverses tablettes), sur un total d'environ 1140, donc un peu plus du tiers. Les progrès dans l'interprétation du matériel sont lents, mais assez importants : nous en avons évoqué quelques uns plus haut. Si monotones que soient ces textes, ils nous font revivre à leur façon une époque de transition précédant la prise de pouvoir par des condottieri amorrites avides de remplacer les aristocraties locales. Publications prévues : nous comptons imprimer le corpus avec l'interprétation archéologique du fouilleur qui nous l'a confié, Jean-Claude Margueron, dans la série MAM (Mission Archéologique de Mari) et diffuser à terme les documents sur le site du CDLI, dont la vocation est de publier électroniquement et gratuitement les documents cunéiformes sous forme de photos et translittérations, offrant aux étudiants et aux chercheurs un outil inestimable. Abréviations ARM : Archives royales de Mari. CDLI : Cuneiform Digital Library Initiative. CISA : Centre international de sciences affectives (projet FNRS). FNRS : Fonds National de la Recherche Suisse.

Page 68: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

68

(Pl. 1)

(Photo V. Siffert, Université de Genève) (Damas – Musée National)

Page 69: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

69

وجدير بالذكر . كما ھي عليه اليومالواجھة الجنوبية لمدخل كنيسة مار سمعان العمودي: )7(الشكل عند إنشاء الكنيسة، بل ھي تعديل أضيف عليھا في أن ھذه الواجھة لم تكن موجودة أصال

نراھا ممثلة على صورة فسيفساء طيبة اإلمام لذا ال. وقت الحق .

Page 70: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

70

:دوس وأنھاره األربعة وترجمتھا الكتابة التكريسية في أسفل مشھد جبل الفر :)5(الشكل روموتوس وكارتيريا وكل بيتھا فرشوا بالفسيفساءپأليكساندرا مع ثيودوسيوس و "

." وفاء لنذرالموضع أمام الھيكل

كنيسة مار سمعان العمودي إلى ما " ترميم"منظور بعين الطائر يعيد ) : 6(الشكل

ويالحظ الشبه الكبير بين مجمل ھذا. إلى آثارھا الباقية اليومكانت عليه استنادا . الرسم وصورة فسيفساء طيبة اإلمام

Page 71: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

71

مشھد جبل الفردوس وأنھاره األربعة المجاور مباشرة لموقع ھيكل التقديس الذي) : 4(الشكل . ة التأسيسية الرئيسة الحاوية على التأريخ، وتدنوه الكتابة التكريسسيةعفا أثره اليوم وتعلوه الكتاب

والتي تعود لفرشة فسيفساء ) فوق الطاووس األيمن(ويمكننا مشاھدة صورة اإلوزتين المقلوبتين .الھيكل التي تمت إزالتھا في وقت الحق

Page 72: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

72

ي أرضية صورة الكنيسة متصالبة الشكل كما تظھر ف: ) 2(الشكل .كنيسة الشھداء القديسين بطيبة اإلمام

الكتابة التأسيسية األساسية باليونانية وھي التي يظھر عليھا التأريخ الذي خلق االلتباس ) : 3(الشكل .فرشة األرضية الفسيفسائية لتاريخ إنشاء كنيسة مار سمعان العمودي" أسبقية"في مسألة

:ترجمة الكتابة

ن أ" ي زم وسف ب دومن ة والمح ي القداس قفنا الكل س وط ى البردي ي التق ا الكل وكاھنن انيوس پ إ1 يف

والكاھن الكلي التقى ام إنجاز الھيكل وفرشه بالفسيفساءـالنتوس تم ڤ شھر ذيوس من الع ة 754 ب بھم . م442ويعادل ھذا التاريخ سنة ." يستوس الشماس المبتدئپأحد أبناء ثيو

اھن 1 ي الك ة تعن ر"البرديوط تعريب للفظة بيريوذفتوس اليونانية التي تفيد رتبة كنسية كھنوتي د " االجوال او الزائ وق .طل استخدامھا اليومب

Page 73: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

73

ى . يسة وإتمام فرشھا بالفسيفساءتجديد الكن شير إل سية ت ة الرئي ة أن الكتاب شبھة حقيق ذه ال د ھ ا يؤي ومم سة" فرشه بالفسيفساء"وإنجاز " الھيكل " إنجاز ساء أرضية الكني ة فسيف . تحديدا وليس إلى إنجاز بقي

ديسيبق إال ما يدل على أن فلم. وھذا الھيكل وتلك الفسيفساء قد عفا أثرھما اليوم كان ھناك ھيكل للتقساء . وكان مفروشا بالفسيفساء شاء الھيكل وفرشه بالفسيف أريخ إن د ت ا تعي ذه إنم وإن الكتابة الرئيسة ھ

ام ام 754بتاريخ سابق ھو شھر ذيوس من ع ادل للع ذكر 442 سلوقي المع يالدي وال تتعرض ل الما ا(بقية فسيفساء الكنيسة اأي الفرشة الفسيفسائية التي نراھ وم بأكملھ دنو ). لي ي ت ة الت ة الثاني ا الكتاب أم

فھي تشير إلى واقعة أخرى ليس لھا عالقة ال ) 5انظر الشكل (مشھد جبل الفردوس وأنھاره األربعة اره ببناء الھيكل وال بفسفيسائه بل ردوس وأنھ لتوثق حقيقة أن مشھد جبل الف ام الھيك ا تبرعت أم إنم

.)4انظر الشكل (يھا وآخرون من ذوببنائه ألكساندرا

بھتنا ھو ،لھيكل وفرشه بالفسيفساء ليس إالم يوثق لبناء ا 442إذن فالتاريخ ى ش د عل ا يؤك وممت ي أزيل سابقة الت ة ال ساء القديم ا الفسيف ن بقاي ا م وم وھم ى الي اھرتين إل ا ظ ا زالت ين م صورة إوزت

وم ا الي ي نراھ وم، وھا. واستعيض عنھا بفرشة الفسيفساء الت ا المرء الي اد يالحظھم ان بالك ان اإلوزت تين اإلوزة ى يم ة إل ن والثاني اووس األيم وق الط داھما ف ان إح شھد وموجودت ى الم ان عل ا دخيلت وھم

ن سماوي األيم راغ العرش ال ى ضمن ف شكل (األول ل ). 4انظر ال ا لك وبتين خالف ان مقل ا ممثلت وھم، وذلك ألنھا كانت جزءا مكمال للمشھالمشھد ساء أرضية سابق لفسيف د الذي كان في أرضية الھيكل ال

صلوات ، داديس وال امتھم للق اء إق ة أثن ى الخدم الكنيسة وكان مقصودأ منه أن يراه الكھنة القائمون علولذلك صورت األشكال ة" ة " مقلوب ان الكھن ا ك ل، بينم انوا يواجھون الھيك ذين ك سبة للمصلين ال بالن

سابقة .)غير مقلوبة بالنسبة لھم( صحيحة يرون األشكال ساء ال ا الفسيف وھذا إثبات على أنھما من بقاي .التي تمت إزالتھا واالستعانة عنھا بالفرشة الفسيفسائية التي نراھا اليوم

نستنتج من كل ما تقدم

ديس سمعان العمودي وعلى حقيقة أن ال شيء مشھد الكنيسة المتصالبة إنما يمثل فعال كنيسة الق

ا، شكل غيرھ ذا ال ردة بھ شكل ( وھي المتف ائس سورية ) 6انظر ال زال، درة كن ا ت ت، وم ا كان وألنھ .فكان ال بد من وضعھا في وسط اللوحة بسبب مكانتھا المتميزة ھذه. القديمة وأضخمھا مقاسا آنذاك

سه ق نف تخدام المنط ةوباس ات مماثل ى ب وبمحاكم ضا عل سري أي ك ي إن ذل يالت ، ف ة التمث قي

ا ف البيم شھد خل ذا الم ي ھ ة ف ة الخمس الباقي وس(المعماري ار أن ) الثرون ن اعتب يرا م د ض وال نجا آخر ل عمال ھام ا تمث ع إنم صالبة والمصورة ضمن إطار مرب سة المت و الكني الكنيسة التي تعل ه لعل

رجين كنيسة قلب لوزة ة استنتاجا من شكلھا البازيليكي ومن وجود الب ا الغربي دمان واجھتھ ذين يتق اللدويمكننا االشتباه أيضا بأن الكنيسة التي تدنو الكنيسة المتصالبة. ومدخلھا الرئيس ومن حنية الھيكل ق

التي تختص بھذه الباحة المروقة كنيسة بابسقاتمثل ).ذات األروقة المحيطة بباحتھا(

Page 74: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

74

سؤال ي: وھنا يطرح ال اذا ال يصح تعم ذه لم ي أرضية ھ يالت الظاھرة ف ة التمث ى بقي ول عل ذا الق م ھذاك الكنيسة، ولكن، دون أن يكون الفنان قد عرف بأسمائھا نظرا لشھرتھا التي تغنيھا عن التعريف آن ا ى نطاق واسع أنھ شتبه عل ي ي وخاصة منھا الكنيسة المتصالبة المسقط التي تشغل وسط المشھد والت

عان العمودي في شمال سوريا؟إنما تمثل كنيسة سمسؤال ذا ال ى،إن اإلجابة على ھ ة األول سيط وھو ، للوھل سبب ب النفي ال باإليجاب ل تأتي ب ا س دو أنھ تب

:نفسه الذي ذكرناه في فقرة اإلشكالية أعاله الميالدي حسبما يفيدنا نصھا المجاور 442إن التأريخ الظاھر في كتابة التكريس الرئيسة محدد بالعام

وم(للھيكل مباشرة د موجودا الي م يع ذا الھيكل ل ار سمعان ). وھ سة م شاء كني اريخ إن م أن ت ا نعل بينمام 490العمودي إنما يعود إلى العام د الع ل442 الميالدي أي بع ى األق ا عل ين عام ة وأربع أو. بثماني

ا رن؟ طبع ا بنصف ق ل بنائھ سة قب ل كني البتعبير آخر، كيف يمكن أن نجد صورة تمث ذا أمر مح . ھشغل وسط المشھد ي ت صالبة المسقط الت سة المت ذه، أن تكون الكني ة ھ وبالتالي، فإنه ال يمكن، والحال

.ممثلة فعال لكنيسة مار سمعان العمودي التي أتت بعد كنيسة طيبة اإلمام بنصف قرن من الزمن

المحاكمات واإلثباتات واألدلة سة ولكن، ومن جھة أخرى، أفال ذه الكني يما وأن ھ اثال؟ س ر م سؤال المحي ى ال ان يبق ا الفن ميزھ

شھد ب الم ي قل عھا ف أن وض واھا ب ن س ساء ع سة بالفسيف ذي رصف الكني ى !! ال ذا عل دل ھ ال ي أفاز !! شيء؟؟ سة يمت ذه الكني ألوف لھ ر الم تثنائي وغي شكل االس ھذا من جھة، ومن جھة أخرى، فإن ال

:ويتفرد بما يلي . تتألف من أربع بازيليكات الكنيسة - 1 .وھذه البازيليكات تجتمع إلى بعضھا بعضا على ھيئة صليب - 2 .وفي منطقة اجتماعھا وسط المنشأة تقوم فوقھا قبة - 3 . تتوسط البازيليكات األربعوأن ھذه القبة تقوم فوق طبلة ثمانية األضالع - 4 .والقبة نفسھا تردد األضالع الثمانية في تكوين سطحھا الخارجي - 5

ومن معرفتنا المؤكدة أنه ال توجد حتى اآلن كنيسة أثرية مكتشفة ال في سورية وال في سواھا وھي مازالت تتربع، بدون منازع، على . تنفرد بھذا التكوين إال كنيسة مار سمعان العمودي حصرا

زي المتميز فلماذا خصھا الفنان بھذا الموضع المرك. عرش كافة كنائس سورية المكتشفة حتى اآلنفي قلب المشھد؟ وحيث أن الفنان ال يمكنه اختراع أو ابتداع مشاھد معمارية من تلقاء نفسه دون أن يكون قد شاھد مثيلھا فعال على أرض الواقع، وخاصة لشكل متفرد وغريب ال يخطر ببال وھو

وجريا . نطقة اتصالھاطريقة الجمع بين البازيليكات األربع ومن ثم القبة المثمنة التي ترتفع فوق معلى مبدأ أن التمثيالت المعمارية ھي ألبنية قائمة فعال قياسا على ما نعرفه من كافة اللوحات

وعلى أنھا ليست مجرد ، المكتشفة التي تضم تمثيالت معمارية كما سبق وأسلفنا أعالهئيةالفسيفسافلماذا تكون . يسة للزينة فقطأشكال معمارية زخرفية تصورھا الفنان ووضعھا على أرضية الكن

تمثيالت طيبة اإلمام استثناء من القاعدة؟ ونحن، والحالة ھذه ليس أمامنا سوى حل واحد للخروج من الفرشة الفسيفسائية في كنيسة الشھداء القديسين أن وھو :تضارب التواريخ وإشكاليتھا" معضلة"

وبعبارة أكثر وضوحا . مرحلتين بفاصل زمنيبطيبة اإلمام لم تنفذ جميعھا في زمن واحد، بل على ودقة إن الفرشة الفسيفسائية ألرضية الكنيسة لم تنفذ إال متأخرة جدا بعد إنجاز الھيكل وفرشه

وكان ال بد لآلمرين بتنفيذ ھذه الفرشة، في زمن أتى بعد فترة طويلة من بناء الكنيسة . بالفسيفساء إنجاز فسيفساء الھيكل، أو أن يعيدوا توثيقه حرصا منھم ووضعھا في الخدمة من أن يوثقوا تاريخوأن ثمة فسيفساء كانت تسبقھا تم تنفيذھا قبال في أرضية . على أمانة ذكر أسماء الذين قاموا بتنفيذھا

ثم حلت الفسيفساء التي نراھا اليوم محلھا في سياق أعمال . الھيكل والمنطقة المجاورة له مباشرة

Page 75: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

75

مار سمعان العمودي شكالية كنيسةإ

ع خلف ذي يق ة 1)الثرونوس(في قلب المشھد ال ي طيب سين ف شھداء القدي ساء ال في أرضية فسيفزا ا متمي ا منظوري يال معماري بعة، تمث ة س يالت معماري ين تمث اإلمام يشاھد المرء، من ب ين الطائر بع

). 2انظر الشكل (لوھا قبة مثمنة تع) مسقطھا المعماري على ھيئة صليب(لكنيسة متصالبة اعتقد أول اآلثاريين والدارسين لھا أنھا إنما تمثل كنيسة القديس سمعان العمودي في جبل سمعان ولقد

شكل ( ر ال رى لفسي). 7انظ سية الكب ة التأسي طدموا بالكتاب ؤالء اص ر أن ھ سة غي ية كني ساء أرض فسين والتي تؤرخ للعام الشھداء القدي و) 3انظر الشكل (م، 442 دي في حين أن كنيسة مار سمعان العم

ام د الع ز إال بع م تنج ل ا !!م 490 رعان م ين س اريين والدارس ؤالء اآلث إن ھ ك، ف ى ذل اء عل ؟؟ وبنذا ام ھ اقض"تراجعوا أم ل صورة "التن ساء ، إذ كيف يمكن أن تمث ي فسيف ي ف صالبة الت سة المت الكني

م 442أرضية كنيسة الشھداء القديسين كنيسة مار سمعان العمودي التي لم تكن موجودة عام م بعد ولتنجز إال بعدھا بأكثر من نصف قرن؟

ن ا م ا أوتين ي، بم ا يل نبرھن فيم كالية، وس ذه اإلش ل ھ ى ح عينا إل ة، س ة المتأني د الدراس ن، بع ونحودي وال محاكم ار سمعان العم سة م ل فعال كني صودة تمث صورة المق ى أن ال ة، عل ات وأدل ات وإثبات

. شيء آخر غيرھا

توطئة

شفة ساءات المكت ة الفسيف ين كاف ن ب ام م ة اإلم ي طيب سين ف شھداء القدي سة ال ساء كني رد فسيف تنفتثناء الفرشة باحتوائھا على عدد من التمضمن األراضي السورية حتى تاريخه ة باس يالت المعماري ثوم(الفسيفسائية للكنيسة المكتشفة في دافني ات الي ة والمحفوظة في ) الحربي وب غرب أنطاكي ي جن ف

تثناء ضا باس ضا، وأي ة أي شاھد معماري ا م ر ضمن إطارھ ي تظھ وجي والت ة األركيول متحف أنطاكي ة . ة حمصتمثيل كنيسة ذات رواق خارجي اكتشفت مؤخرا في كاتدرائي د من أمثل شاھد العدي ا ن ولكنن

ا ديس يوحن سة الق ل كني ة مث يالت معماري أرضيات الكنائس المكتشفة في األردن وقد احتوت على تمثساء ي أم الرصاص وفسيف تيفانوس ف ديس اس سة الق ي كني اعين وف وليس م ي أكروب رش وف ي ج ف

.الخريطة الشھيرة في كنيسة القديس جيورجيوس في مادبادور يستنت ذا ال ة في ھ يالت معماري ا تمث ي تظھر فيھ ساءات الت يالت ج من جميع الفسيف ذه التمث أن ھ

ي شرقي األردن، . تخص معابد مسيحية محددة بعينھا ومسماة بأسمائھا وفي فسيفساء أم الرصاص فة(فإن ھذه التمثيالت تحمل تعاريف لھا بأسمائھا ي فسيف) باليوناني اعين وف ساء م ذلك في فسيف ساء وك

. خريطة مادبا

وھل فسيفساء الطيبة ھي استثناء من القاعدة؟

ى دنا إل دوإذا ع ذا التقلي ا ال تخرج عن ھ ام، فإنھ ة اإلم سين بطيب شھداء القدي سة ال ساء كني . فسيفي مدينتي القدس وبيت لحم اللتين تعرف بھما كتابتان يونانيتانوتتأكد قراءاتنا ھذه من تمثيل .

علـى هـذه ΒΗΜΑ" البيما " وكان األثريون يطلقون اسم " العرش"لفظة يونانية تعني ΘΡΟΝΟΣ الثرونوس 1

. المنشأة ذات الوظيفة الملتبسة والتي تظهر ضمن جوف بعض الكنائس السورية القديمة

Page 76: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

76

ا ع سيح الجموع من أم سيد الم ا ال م فيھ ي أطع ة الت ى األعجوب ه ال يقتصر عل سمكة فمدلول ز ال ن رمديم والمشرق (باليونانية " سمكة" بل ألن لفظ السمكات فحسب، الم الق سائدة في الع ة ال التي كانت اللغ

يس"ھو ) ضمنا كما االنكليزية اليوم في العالم كله ة . ІХΘΥΣ" إخث ة اليوناني ذه الكلم ي وھ ي تعن التا " السمكة" ة ترجمتھ ارة يوناني صارا لعب ن " صادف وأن أحرفھا الخمسة تصح اخت سوع المسيح اب ي

يھم وللتعارف بعضھم " المخلصهللا ة عل زا سرانيا للدالل فاتخذھا المسيحيون األوائل شعارا لھم ورم يالت وال. بالبعض اآلخر ي الرسوم والتمث ي سادت في فلذا نشاھد رمز السمكة يتكرر ف ات الت منحوت

.العصور المسيحية

صورة المشھد المجاور للھيكل والذي) : 1(الشكل

.البحث حول الرموز الظاھرة فيه يدور

Page 77: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

77

رمز الوعول والظباء البرية - 6

اه الخال ة، مي اه المقدس ن المي ل م ي تنھ صورة وھ ا م ا ھن ار ونراھ ن أنھ سكبة م ص المنى ى الخالص والحصول عل ا إل ة وتوقھ ة اإللھي ى المعرف ا إل روي ظمأھ ة لت ردوس األربع الف

.وھي، بذلك ترمز إلى المؤمنين الساعين إلى الخالص. الحياة األبدية

صورة مدينة لحم - 7

والدة ى ال ا إل ة المقدسة ترمز ھن ذه المدين إن ھ ى ألن السيد المسيح ولد فيھا، ف شوء، إل والن .البداية

) القدس( صورة مدينة أورشليم - 8

الي م، فإن ھذه المدينة المقدسة ترمزألن السيد المسيح مات فيھا ثم قا ة وبالت ى القيام ھنا إل

.إلى الحياة األبدية

األشجار المثمرة - 9

ى ال ز إل ة ترم ي الحال خاء ف اء وس األرض عط ؤمن، ف شھا الم ي يعي رة الت اة المثم حي .فال جدوى من حياة عقيمة دون عطاء. الفردوسية

األشجار دائمة الخضرة -10

ز، ا ترم ردوس إنم ار الف اه أنھ ن مي ل م ي تنھ شى الت اء العط ين الظب اھر ب سرو الظ كال

. وديمومتھابخضرتھا الدائمة، إلى استمرار الحياة

رمز السمكة -11

ام ة اإلم ي طيب سين ف شھداء القدي وھو . ويتكرر ھذا الرمز مرات عديدة في فرشة كنيسة الا سيحية ومعتنقيھ ى الم ة عل صليب للدالل ة . رمز مسيحي قديم سبق رمز ال رون الميالدي ي الق فف

االثالثة األولى، لم يكن رمز الصليب متداوال بعد كرمز للمسيحية ان رمز . أو كشعار لھ ل ك بذاب رارة وع ذوقون م انوا ي ذين ك سيحيين ال سيحية والم سراني للم ز ال و الرم سمكة ھ ال ك ى المل ى أن أت يھم إل ان عل اطرة الروم ن األب دد م ھا ع ي مارس ة الت االضطھادات الروماني

ام شھير ع يالن ال ذ313قسطنطين الكبير في مطلع القرن الرابع وأصدر مرسوم م ي سمح م الى أيامه ي كانت محظورة حت دأ . بموجبه للمسيحيين بممارسة شعائرھم الت ك الحين ب ذ ذل ومن

رمز الصليب يبرز شيئا فشيئا، كشعار للمسيحية، وھو يمثل آالم السيد المسيح الخالصية ألجل .البشر ومن بعدھا القيامة

Page 78: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

78

مخلدا بعيدا عن ة أحزان العالم الدنيوي الفاني و داء بقيام ذلك انسجاما مع ما تعلمه المسيحية واقت .موته، وذلك ھو ما ترمز إليه ھذه القيامة السيد المسيح بعد

ذا العمل ا في ھ ه ھن وبمعنى آخر، فإن ھذا الرمز المغرق في القدم، أعيد استخدامه وتوظيف

ة بع اء الجسدوفي أعمال أخرى، لخدمة اإليمان المسيحي بالقيام ه . د فن ه وتعلم ؤمن ب ا ت ذا م وھ .فالروح إلى خلود، فيما الجسد إلى فناء. الديانات السماوية األخرى أيضا

.أما بقية الطيور الظاھرة في المشھد، فھي من طيور الفردوس وتكمل مشھد الفردوس

رمز الحمل - 2

يظھر الحمل واقفا على أرضية العرش األوسط المم سماء ة في ال ة معلق ة خيم ى ھيئ ل عل ثحمل هللا"ويرمز ھذا الحمل إلى . وإلى يساره ويمينه عرشان آخران الوديع في ملكوته السماوي "

رتين . يدنوه نسر سنأتي على شرح مدلوله الرمزي أيضا وقد ورد تشبيه السيد المسيح بحمل هللا م الم) "29 :1يو: (في اإلصحاح األول من إنجيل يوحنا ا الع سع خطاي ذي ي ضا "حمل هللا ال ، وأي

".ھو ذا حمل هللا") 36 : 1يو(

رمز النسر - 3

سيد المسيح ذي . قلما استخدمت المسيحية رمز النسر للداللة على ال سر ال ى الن ا إل شير ھن وني ا اإلنجيل ديس يوحن ز للق رى . يرم ردوس ن ل الف ة جب ى قم ثم عل ذي يج سر ال ي صورة الن وف

ور . األرضي لحمل هللا" السلطان"األرضي و" التجلي" يد طي ذي ھو س سر، ال ة الن وتحمل دوني ة ة عظيم ة رمزي ع، تحمل دالل ه للحمل الودي السماء ومن أھم الضواري بقوته وسطوته وعنفوان

ع ه الودي ا هللا لحمل ي وھبھ ة الت شيئة اإللھي روت تخضعان للم مفادھا ھنا أن القوة والجب ول وبحل. .ھذا السلطان، تتفجر ينابيع أنھار الفردوس األربعة التي سنأتي على شرحھا أدناه

الفردوس وأنھار الفردوس األربعة جبل - 4

ى س ه إل درة من قمت ة منح ردوس األربع ار الف اه أنھ ساب مي اء تن سكاب م زا الن فوحه رم

اة ة(الحي اليم الم،)األبدي سيحي والتع ان الم ز لإليم ي ترم ادي ،سيحية الت الم الم ات الع ى جھ إلن ووا م وى ليرت ر والتق ى الب نھم العطاش إل ا وخاصة م ل منھ شر أن تنھ يح للب ي تت ع لك األرب

ونشاھد في الماء أسماكا وطيورا مائية رمزا للحياة بمفھومھا عكس الموت. مياھھا . ات األ ى الجھ ا، عل ة ،رمزي ي للدالل ة فھ ار األربع تخدام األنھ ا اس مولية أم سكونة وش ع للم رب

.البشارة المسيحية على الكون رمز الطاووس - 5

ة ة المتعلق ين العروش الثالث رتين ب وھو ھنا مصور جبھيا بذيله المنتشر على شكل دائرة مة فصائل . في السماء وق كاف ال والروعة ف وحيث أن الطاووس يتربع على عرش البھاء والجم

ر ال شك، يرمز . الطي ه وب ى فإن ا إل وك األرض"ھن ك مل ة ،"مل ة الحيواني وك المملك يس مل ولFauna 5 : 1 انظر سفر الرؤيا( ، بل ممالك األرض من البشر.(

Page 79: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

79

حول الرموز المستخدمة في فسيفساء ودالالتھا كنيسة الشھداء القديسين في طيبة اإلمام

المھندس مالتيوس جبرائيل جغنون

لمشاھد الرموز حسب ورودھا في ا

) 1لشكلا(ردوس وأنھاره األربعة مشھد جبل الف - أ

ين سائية والمحصورة ب يقع ھذا المشھد في المساحة الكائنة في أقصى شرق األرضية الفسيفره (ھيكل التقديس ا أث ا عف ذي ربم ر المكتشف وال ى وغي ع خارج حوزة المبن ين ) أصالالواق وب

ا ذي يت) أي العرشالثرونوس(البيم سةال ة . وسط أرضية الكني ى الكتاب ذا المشھد عل وي ھ ويحتين . وفرشته الفسيفسائية) المندثر(التدشينية لما يفترض أن يكون ھيكل التقديس كما يحتوي، من ب

وعلى كتابة توثق فرش مشھد جبل ) القدس(مثيل لمدينتي بيت لحم وأورشليم أشياء أخرى، على ت .ساءالفردوس وأنھاره األربعة بالفسيف

رمز طائر الفينيق الذي تنبثق من رأسه ھالة مشعة - 1

شرقية حيث ة ال شرقية والجنوبي يرد ھذا الرمز مرتين في ھذا المشھد في زاويتيه الشمالية الاه داخل المشھد ا وينظر باتج يكمن في . يظھر الطير واقف اريخي ف اه األسطوري الت ا عن معن أم

كان قدماء المصريين يعتقدون أنه يعمر لعدة قرون قد تمتد إلى ستة حقيقة أن ھذا الطائر الخرافي اء ر بھ قرون يقوم بعدھا الفينيق بإحراق نفسه مستحيال بذلك إلى رماد لكي ينبعث مجددا وھو أكث وجماال وإشراقا مما كان عليه قبال، ومن ھنا الھالة المشرقة والمشعة بالضياء التي تحيط برأسه .

د أما ع ة بع ان بالقيام ى اإليم د عل ا ھو للتأكي ساء المسيحية فإنم ذه الفسيف ن داللة ھذا الرمز في ھالموت بالنسبة للمؤمنين وذلك في العالم السماوي العلي غير المادي ليعيش المؤمن في حبور

Page 80: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

80

.الناووس الثالث الذي يتميز بحمله رمز العنقاء : )6(الصورة

.لناووس الرابعا : )7(الصورة

Page 81: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

81

الناووس الثاني الذي يحمل كتابة يونانية مختصرة على : )4(الصورة .5عصابته العلوية وھي مكسورة تظھرھا الصورة التالية رقم

العصابة العلوية للناووس الثاني وھي مكسورة : )5(الصورة .كما ھو واضح وتحمل كتابة يونانية مختصرة

Page 82: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

82

.الناووس األول قبل نقله وإدخاله إلى متحف حمص : )2(الصورة

.الناووس األول الذي يحمل كتابة مطولة على العصابة العلوية : )3الصورة (

Page 83: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

83

رأس وأجنحة Griffin) جمع عنقاء(أضاف الفنان أربعة عنقاوات • وھي مخلوقات خرافية ب

ربما . نسر وبجسم أسد تنسب إليھا القدرة الفائقة على السھر والحراسة لمناجم الذھب والكنوزوضعھا الفنان ھنا كحرز لحماية محتويات الناووس من بقايا بشرية ومن نفائس قد توضع مع

.المتوفى من لصوص ونھابي القبور .نھما زھرة في وسط أسفلهالحبلين نباتيين تتوسط كل م •

)7الصورة (الرابع الناووس . 4

ا طه تقريب ي وس سور ف اؤه مك ن . غط را ع اووس كثي ذا الن ى ھ صور عل شھد الم ف الم ال يختلالناووس الثالث إال بأن استعاض الفنان عن طيور العنقاء األربعة التي شاھدناھا على الناووس الثالث

.و رأس كل منھمابعرق نباتي ملتف جميل يدن

.الناووس األول لحظة اكتشافه: ) 1الصورة (

Page 84: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

84

ات د المم روءة وھي . بع دة ومق ة جي ة وصلتنا بحال ة يوناني ي كتاب شھد فھ و الم ي تعل ة الت ا الكتاب أم

اووس في وفيما يلي استنساخنا للكتابة حس) العام والشھر واليوم(مؤرخة بدقة تامة ى الن بما وردت عل : األصل تليھا قراءتنا لھا مكتوبة بالحرف اليوناني الصغير المشكول وأخيرا ترجمتنا للكتابة

: االستنساخ

ام " شر 463الع ادي ع ھر(، الح ن ش وس أ) م وس(و ذي اووس ) بي ذا الن وس خصص ھ أنطونين ."لنفسهان شرين الث وفمبر(يويوافق ھذا التاريخ شھر ت ام ) ن يالدي152من الع رة . الم ي فت ع ف وھو يق

اني أنطونينوس بيوس م اإلمبراطور الروم ين عامي Antoninus Piusحك ا ب م م ذي حك -138 ال .أي أواسط القرن الثاني الميالدي. م161

)4الصورة : ( الناووس الثاني. 2 ه المكسور ه أعاله بأن اووس مع األول بوصف وي. وھو الناووس الذي أشرنا إلي ذا الن شترك ھ

: المشھد المصور على جانبه الطويل المكسور مع الفوارق التاليةين والموصوفة تفصيال • ة للحبل ة الحامل شرية الثالث ان النحات عن األشكال الب استعاض الفن

ى كرات وتمسك روت، وھي تقف عل أعاله، بثالثة نسور بديعة النقش وتعج بالحيوية والجبة الجارحة ا المعقوف اتيين بمناقيرھ ين النب ا وردت . أطراف الحبل ا وحيثم سور ھن وترمز الن

اء ى األحي ا وسلطانھا عل دار وحتميتھ روت األق ى جب ا . على الناووسين الثالث والرابع، إل كم .ترمز الكرات التي تقف ھذه النسور عليھا على شمولية ھذا السلطان بحيث ال مفر ألحد منه

ار كما است • عاض النحات عن حبلي الكرمة في الناووس األول بحبل من نبات الغ ا( ى يمينن ) إل ).إلى يسارنا(وحبل كرمي

ى ثالث قطعالعصابة التي تحمل كتاب صورة ( .ة يونانية مكسورة إل ا )5ال ة مختصرة ، أم الكتاب :مقارنة بالكتابة على الناووس األول وھي ال تحوي تأريخا

.أولبيوس كالوديانوس الفارس الروماني

)6الصورة (لثالناووس الثا. 3

ات . غطاؤه كامل سور والغورغوني ة الن اني لجھ اووس الث ى الن ا جاء عل تكوين المشھد يحاكي م :مع الفوارق التالية

Page 85: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

85

اك بانتظار وفي اليوم الرابع، أي نھار األربعاء تم إدخالھا إلى أحد أبھاء المتحف حيث تستقر ھن .عمليات الترميم الضرورية إلصالح التلف الذي أصاب بعضھا جراء أعمال الكشف والنقل

وصف عام للنواويس األربعة وحالتھا -أ

النواويس و. سنتمترا بدون الغطاء200x100x100تبلغ األبعاد التقريبية للناووس الواحد كل حسب النموذج الرائج كثيرا في الفترة جميعھا مجھزة بأغطية حجرية جملونية الش

النواويس منحوتة جميعھا من الحجر الكلسي ـ الرملي الطري األبيض المتجانس شديد .الرومانيةوھي مصورة جميعھا على أحد الوجھين الطويلين فقط مع بقاء الوجوه الثالثة األخرى . االرتصاص

ء الناووس الثاني المكسورة حافته المصورة من لكل ناووس خلوا من أية نقوش أو كتابات، باستثنا .األعلى، حيث يحمل أحد وجھيه الصغيرين نحتا دائري الشكل

ودالالتھاتوصيف األشكال النحتية على النواويس - ب )3الصورة (الناووس األول. 1

و ار المنحوت وھ وق اإلط ة ف ى العصابة العلوي ابي عل ى نقش كت اوي عل امي الو. الح ه األم جللناووس يحمل تصويرا بطريقة النقش النافر على خلفية مسطحة خالية من أية نقوش ويتكون المشھد

ه رأسي اظر قوام من تكوين متن ا" دليان من " غورغوني يالن مت دمھما حبالن ثق انبين يتق من كال الجة د(الكرم شرية) أوراق وعناقي كال ب ة أش ا ثالث ى ا: تحملھم ا عل ان منھ ف اثن ديان وخل رفين مرت لط

ة ا الكوكبي ى صفتھما أو طبيعتھم شيران إل ان ي ي . رأسيھما يظھر شكالن ھاللي ى نجمت زان إل إذ يرمساء سبيروس (الم صبو) Hesperosأو إي فوروس (ح اال طورة ) Phosphorosأو فوس ن األس م

ه سه، ولكن ألن رة نف ة كوكب الزھ ي الحقيق ا ف ا ھم ان إنم ذان الكوكب ة وھ ي اليوناني أول الكواكب التتظھر قبيل الغروب جھة الغرب في السماء وآخر كوكب يبقى ظاھرا قبيل الشروق جھة الشرق نظرا

لشدة لمعانه وبريقه، فإنه عرف باسمين متباينين لكوكب واحد ى . ا عل ولذلك، فإن داللتھما الرمزية ھنھذا الناووس تكمن في حقيقة أنھما يفصالن فصال واضحا بين ى ذي يرمز إل ل أو الظالم ال ة اللي حلك

وات(الموت الم األم ى ع اة )أو إل ى الحي ل إل ز، بالمقاب ذي يرم ار ال ين ضياء النھ الم (، وب ى ع أو إلالم األموات) األحياء ا وع ين عالمن شاھدھما . أي أنھما يسدالن ستارة الموت التي تفصل ب ا ن ذا فإنن ول

ھنا يحمالن حبلين ثقيلين متدليين وات الم األم من أغصان الكرمة وأوراقھا وعناقيدھا يفصالن بھما عذا ى ھ الذي يقع خلف ھذين الحبلين الكرميين، أي على الحجر، عن عالمنا نحن األحياء الذين ننظر إل ا ي الغورغوني ه برأس ز إلي ذي رم وات ال الم األم ين ع ف الحبل ع خل ا يقب ا، بينم ن عالمن شھد م الم .

ن والغورغو اال وك تينو وأوري ا وس ن ميدوس الث ھ وات ث ن أخ ة، ك طورة اليوناني ات، حسب األس ني واني رھيب ولھن ا شعر أفع دلى منھ رة ورؤوس يت ون كبي شعة وعي ه ب ات ذوات أوج ات مخيف كائن

أجنحة ذھبية يطرن بھا في الھواء يھن . ل كل من ينظر إل ى تحوي درتھن عل زھن ق ا يمي ولكن أبرز ماتإلى ح الم الظلم جر فورا، وكن يسكن في ع روس . ه إي وين كل ي (يتوسط التك د ف ه كيوبي ذي يقابل ال

د المعروف ) األسطورة الرومانية ل عار حسب التقلي شكل طف ا مصورا ب ده ھن وھو رمز للحب ونجذا المشھد. ميين من كال جانبيهوھو يشد الحبلين الكر ي وسط ھ ه ف ذا اإلل ل حضور ھ ا مث ربم زا رم

للحب الذي ربط بين المتوفى وقرينته في الحياة، على أمل أن يستمر ھذا الحب أيضا ويبقى خالدا

Page 86: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

86

حول النواويس األربعة التي اكتشفت في مدينة حمص 2006 نيسان 21 و 17في الفترة ما بين

المھندس مالتيوس جبرائيل جغنون

توثيق واقعة االكتشاف

، وأثناء قيام آليات تنفيذ مشروع الصرف 2006 نيسان 16بتاريخ نھار األحد المصادف

بمدينة حمص، تم العثور صدفة ) طريق دمشق–شرقي الصالة الرياضية (الصحي في شارع األغر وتم على اإلثر إبالغ محافظة حمص باالكتشاف، ). 1الصورة (على أحد النواويس في حفرية القناة

طلبت المحافظة إلى مديرية آثار حمص بالكشف الفوري على موضع الحدث، حيث لبت ھذه فاألخيرة الطلب على الفور وبادرت بالكشف على الموقع باليوم نفسه وشرعت بعملية الكشف عن

وأثناء تقدم ، بعد أن وضعت المكان قيد الحراسة نيسان18الناووس المذكور بتاريخ يوم الثالثاء في الكشف، ظھر ناووس ثان تبعه اكتشاف ناووس ثالث ورابععملية .

استغرقت عملية الكشف عن النواويس األربعة ورفعھا من الخندق ستة أيام تم بعدھا نقلھا إلى

بقيت .2006 نيسان 23الرصيف المحاذي لمقر مديرية اآلثار والمتاحف من جھة الشرق بتاريخ ولما انتشر خبر ھذا االكتشاف تھافت أھالي . خارج مبنى المتحف مدة ثالثة أيامالنواويس األربعة

، األمر الذي لم يمنع الكثيرين منھم من لمسھا )2الصورة (المدينة لمشاھدة النواويس وتصويرھا والبعض من استعمال أدوات حادة لحزھا واإلساءة إليھا، ما حفزنا مناشدة مديرية اآلثار اإلسراع ما

.أمكن بإدخالھا إلى داخل مبنى المتحف إليوائھا وحفظھا بعيدا عن األذى

Page 87: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

87

بيت " أي Betomarsiasھذه يترافق مع لفظة" الميماس"وإن استخدام لفظة . 1"التطھير بالماءالتي وجدناھا سابقا حيث عثرت على ھذا الترافق في وثيقة خارطة " حمى مارسياس"أو " مارسياس

يبقى االسم العربي المتعارف عليه، أي و .في األردن والتي تعود إلى القرن السادس الميالديمادبا الوارد في عنوان ھذا البحث، وھو السابع بترتيبنا، وتأويله األكثر احتماال أن النھر "العاصي"

تدعوه عصى باتجاه جريانه كل اتجاه مألوف لبقية األنھار في سورية، ولذلك فإن بعض المصادر . للسبب ذاته"بالنھر المقلوب"أيضا

."حمص "المنشور في األسبوعية" الميماس"انظر بحثنا المفصل حول أصل كلمة 1

Page 88: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

88

.وأرجو أن أكون اھتديت إلى الحقائق

إن أقدم اسم عرف به العاصي ھو ما تورده المصادر قاطبة وتجمع عليه كما تجمع الخرائط، ،1األرنط"ھو األرند" أو " االسم أو إلى دون أن تشير أي من ھذه المصادر إلى تأويل معنى ھذا "

إن لفظة األرنط أو األرند مردھا الكلمة اآلرامية السريانية. مصدره حرفيا ، " اللبوة"وتعني " أرنوتو" ، حرفت اللفظة لتصبحيقدونالموبعد دخول الثقافة اليونانية مع االسكندر . أي أنثى األسدΡΟΝΤΗΣО "وتلفظ "بالتاء " ورونتيس ولما كانت ھذه الكلمة تكتب أ. باليونانية" أورونتيس ،

أصوال باليونانية فإن الفاتح العربي أخذھا سماعا من اليونانية لتصبح األرند" بالدال "أوروندس أما . عن لفظة األرنط علما بأن األصل اآلرامي ھو أرنوتو بالتاء وليس بالطاء رغما عن توفر (، "بالطاء"

إنه يؤكد على أن االسم وصلنا عن طريق اليونانية حتما وليس ، ف)حرف الطاء في األبجدية اآلرامية. عند تعريبه" طاء"اليوناني في األسماء ينقلب إلى " الطاو "τفإن حرف . عن طريق األصل اآلرامي

باإلنكليزية Orontes ثم أخذت اللغات الغربية الالتينية والجرمانية اللفظة وأصبح اسم العاصي ھو أوليس نھر العاصي ينبع من نبع اللبوة ".اللبوة"إذن االسم يعني . ة وھلمجرا بالفرنسيOronteو ). أساسيليس بعيدا عن مدينة بعلبك بشكل(

ولم يكتف اإلغريق بإطالق ھذا االسم المحرف عن األصل، بل أطلقوا أسماء أخرى عليه وھي Axios Potamos "النھر المستحق"تعني التي " نھر أكسيوس" أي"أكسيوس بوتاموس "

أما " السريع، الغزير " اآلرامية التي تعني "آتزويو"ولعل ھذه اللفظة تحريف لكلمة باليونانية، ومعناه الدوامة أو " طيفون " Typhon"االسم الثالث الذي أطلقه اليونانيون على العاصي فھو

أطلقه " مارسياس كامبوس" Marsyas Campusأما االسم الرابع فھو . التنين أو اإلعصاراليونانيون على عاصي البقاع قبل بلوغه األراضي السورية وأصل التسمية نجده في األسطورة اليونانية التي تحول فيھا مارسياس إلى نھر في فريجيا ألنه أخفق في تحديه ألبولون إله الفنون

ون باالنتقام لنفسه وصلبه على الجميلة في مبارزة مع ھذا األخير في العزف على المزمار فقام أبولحمى " ويعني االسم بالعربية . شجرة أوال، ثم ما لبث أن ندم فحول متحديه الفاشل مارسياس إلى نھر

كما أطلقوا اسما خامسا وھو" أو بيت مارسياس Belus� "على نھر العاصي في منطقة "بيلوس المولج " بيل"السم كبير اآللھة البابلي ) ننةأو يو(ھذا إال أغرقة " بيلوس "وليس . الغاب وما يليھا

.شؤون الخصب وعطاء األرض

ه عليه أھل مدينة أما االسم الوطني األصيل اآلخر لنھر العاصي، وھو السادس ھنا، فھو ما يطلق وقد سألت الكثيرين من العامة والخاصة من أولي الثقافة والمعرفة من " الميماس" حمص محليا بـ

وبعد الدراسة والبحث توصلت إلى أن اللفظة . مص ولم أحصل على أية إجابة أو تأويالت منھمأھل حعيد التطھير "صود به والمق" عيد الماء"حرفيا، أو " يوم الماء"وتعني " مايوماس"أصلھا آرامي

وحين يشير أھالي مدينة حمص إلى موضع محدد ومعروف جيدا اليوم يشتھر بالـ2"بالماء " ماسمي" التقديس أو "س فإنھم يدلون، دون أن يدركوا، على الموضع الذي كان األقدمون يمارسون به طقو

).معجم البلدان(وياقوت الحموي في ) الدر المنتخب من تاريخ مملكة حلب(ابن الشحنة في : انظر مثال 1إن طقوس االغتسال بالماء أو التطھير به أو التقديس به معروفة جيدا لدى عدد كبير من الديانات ليس أقلھا 2

الوضوء قبل (واإلسالم ) المعمودية وخاصة في نھر األردن(ية والمسيح) االغتسال بنھر الغانج المقدس(الھندوسية ).الصالة

Page 89: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

89

وتأويالت معانيھا حول أسماء نھر العاصي

المھندس مالتيوس جغنون

مقدمة

Studiaه من المفيد، بل ومن الحري أيضا، بمجلة علمية أركيولوجية تحمل اسملعل Orontica" دراسات عاصية تسليط الضوء على األصل اللغوي ) أي تخص حوض العاصي" (

" العاصي"السم النھر، بل ألسمائه التاريخية التي تواترت عليه، وھي سبعة أسماء أخرى غير وفي ھذا البحث المختصر سنحاول استعراض ھذه األسماء . ومداليلھا وتفسير معاني ھذه األسماء

وشرح أصولھا ومعانيھا استدالال من اللغتين اآلرامية واليونانية كل حسب الحال في محاولة غير .مسبوقة على حد علمنا

يظھر عدد من الخرائط القديمة لسورية نھر العاصي تحت أسماء بعضھا مألوف لد ينا ولكن

ومن ھذه الخرائط، أذكر، على سبيل المثال ال الحصر، . معظمھا غير مألوف أو متداول اليوم وخريطة 1670عام 1"جنة عدن " الخريطة التي وضعھا الجغرافي الھولندي نقوال فيشر بعنوان

1828عام Arrowsmith وخريطة اإلنكليزي أروسميث 1764الفرنسي غيوم دو ليل وشقيقه عام ولعل ھذه األخيرة ھي أوفاھا وأكثرھا دقة وتفصيال .

وفي ھذا البحث، سأحاول استعراض كافة أسماء النھر التي تداولتھا ھذه الخرائط أو المصادر

ولن أكتفي بھذا االستعراض، بل . التاريخية المكتوبة األخرى كمصنفات اإلخباريين العرب وسواھموھذه المحاولة غير مسبوقة على حد علمي، ألن كافة . ھذه األسماءسأحاول أيضا تأويل معاني

المصادر تصمت عن ھذه المواضيع وال أثر لھا في متونھا، لذا اعتمدت على االستدالل والحدس ة، إلعداد ھذه الدراسة،واالستقراء والمقارنة، مھتديا، كما يقتضي الحال، بمعرفتي باللغات القديم

من الالفت أن ھذه الخريطة تظھر العاصي بدون اسم 1 ثم أنھا تجعل مصدره أي منبعه عند يبرود، كما أنھا تظھر .

. القارئ مدى فداحة ھذه األخطاء علىوال يخفى" حلب اليوم" مدينة أفاميا وتحت اسمھا عبارة

Page 90: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

0

Page 91: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

1

دراسات العاصي نشرة يصدرھا المركز السوري للبحث األثري

قصر تابت–حوض العاصي

دمشق من قبل المديرية العامة لآلثار و المتاحففي نشرت

.بسام جاموس : المسؤول عن النشر

.ميشيل المقدسي : العلميالمحرر

ر ل، فيصل : لجنة التحري د المحف ريالمحم د الك أمون عب د هللا، م ليمان ، عب م، أنطوان س

. طرقجي فرزتأحمد

.باسل شحادة، ياسمين كنھوش : تنفيذ

الفھرس

.)1(أفكار حول علم اآلثار : المقدسي ميشيل

.قطنا و الحثيين :فرو جاك

.دمشق-، باب آرام)؟إيميسا(مانسويت : ماكينسون مارتن

).الموسم األول(لول الفار البعثة األثرية في موقع ت :كلوزان صوفي، طرقجي أحمد

البعثة األثرية المشتركة السورية الفرنسية :ميشيل، بارير دومينيك، سوفاج مارتن المقدسي ).الموسم األول( لنھر العاصي

.االلواح الطينية المكتشفة حديثا في مملكة ماري :كافينو انطوان، كولونا لوران

لمستخدمة في فسيفساء كنيسة الشھداء القديسين في طيبة اإلمام حول الرموز ا : جغنون ميالتيوس .و دالالتھا

حول النواويس األربعة المكتشفة في مدينة حمص في الفترة مابين : جغنون ميالتيوس .2006 نيسان 17 و 12

.حول أسماء نھر العاصي و تأويالت معانيھا : جغنون ميالتيوس

www.StudiaOrontica.org

7

9

24

33

42

79

86

89

51

Page 92: Studia Orontica VI

Studia Orontica العاصيدراسات

2


Recommended