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Page 1: Technique des membranes induites en chirurgie maxillo-faciale

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Mise au point

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Technique des membranes induites enchirurgie maxillo-faciale

Induced membrane technique in oral & maxillofacialreconstruction

N. Zwetyengaa,*,b, J.-C. Fricainc,d, E. De Monesd,e, F. Gindrauxb,f

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Recu le :21 mai 2012Accepte le :25 mai 2012Disponible en ligne25 juillet 2012

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a Service de chirurgie maxillo-faciale, chirurgie plastique, reconstructrice et esthetique,

chirurgie de la main, faculte de medecine, universite de Bourgogne, centre hospitalieruniversitaire de Dijon, boulevard de Lattre-de-Tassigny, 21000 Dijon, Franceb EA 4268 innovation, imagerie, ingenierie et intervention en sante « I4S », UFR-SMP, SFR FED4234, universite de Franche-Comte, 25030 Besancon, Francec Pole odontologie et sante buccale, hopital Pellegrin, place Amelie-Raba-Leon, 33000Bordeaux, Franced Unite 577 Inserm, universite Victor-Segalen Bordeaux 2, 146, rue Leo-Saignat, 33000Bordeaux, Francee Service d’ORL et chirurgie cervico-faciale, centre hospitalier universitaire de Bordeaux,groupe hospitalier Pellegrin, place Amelie-Raba-Leon, 33076 Bordeaux cedex, Francef Service de chirurgie orthopedique, traumatologique et plastique, CIC-BT, centre hospitalierregional universitaire, hopital Jean-Minjoz, 25030 Besancon, France

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

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SummaryMaxillofacial defects reconstruction represents a formidable chal-

lenge to achieve both functional and aesthetic goals. To succeed,

numerous parameters must be taken into account: patient’s general

conditions, defect’s location, width and type of the defect and

eventual donor sites which can provide the tissues. Routine recon-

structions include bone transplantation (autologous, homologous or

heterologous), implantation of biomaterials and osteogenic distrac-

tion. The advantages of these techniques are evident, but they are

usually limited by their complexity in patients with bad general

health. The technique of induced membranes needs to be more

known in maxillofacial surgery.

� 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Mandible, Reconstruction, Bone substitute, Membrane

ResumeLa reconstruction maxillo-faciale est l’une des reconstructions les

plus difficiles compte tenu du defi fonctionnel et esthetique. Les

differents parametres de reussite dependent de plusieurs facteurs :

etat general du patient, localisation du deficit, taille de la perte de

substance, types de tissus a reconstruire et sites donneurs eventuels.

Les reconstructions conventionnelles comprennent les transplants de

greffe osseuse (autologue, homologue ou heterologue), l’implantation

de biomateriaux et la distraction osteogenique. Si toutes ces techni-

ques presentent des avantages certains, leurs limites sont essen-

tiellement liees a leur complexite chez des patients, souvent en

mauvais etat general. Les auteurs font une mise au point sur la

technique de reconstruction par membranes induites qui d’etre plus

connue en chirurgie maxillo-faciale.

� 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.

Mots cles : Mandibule, Reconstruction, Substitut osseux, Membrane

Introduction

Actuellement, la chirurgie demeure le seul traitementdes pertes de substance osseuse maxillo-faciales. Leur

* Auteur correspondant.e-mail : [email protected] (N. Zwetyenga).

0035-1768/$ - see front matter � 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.http://dx.doi.org/10.1016/j.stomax.2012.05.008 Rev Stomatol Chir Maxillofac 2012;113:231-238

reconstruction peut etre simple ou, en revanche, constituerun defi fonctionnel et esthetique. Les differents parametres aprendre en compte sont l’etat general, la localisation dudeficit, la taille de la perte de substance, les differents typesde tissus a reconstruire et les sites donneurs eventuels [1].En chirurgie maxillo-faciale, les reconstructions convention-nelles comprennent les transplants de greffe osseuse

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(autologue, homologue ou heterologue), l’implantation debiomateriaux et la distraction osteogenique.La reconstruction par greffe non vascularisee est limitee,d’une part, par la necessite de tissus mous en quantite eten qualite suffisantes afin de proteger la greffe le temps del’osteointegration et, d’autre part, par la taille limitee dugreffon (8 a 10 cm maximum) afin de reduire le risque d’infec-tion [1–4]. Elle est peut etre recommandee en cas de radio-therapie postoperatoire ou en terrain irradie. Si lesheterogreffes d’origine animale ou humaine evitent lessequelles liees au site donneur, leurs risques infectieux etimmunitaires ne sont pas a ecarter totalement, malgre lesdifferentes mises en condition [3]. Les indications des greffonsvascularises sont plus larges (radiotherapie postoperatoire,site receveur debilite). Mais, quel que soit le type de greffeenvisage (fibula, parascapulaire, iliaque, etc.), la condition sinequa none a leur realisation est le bon etat general du patient.La reconstruction par plaque de reconstruction, notammentmandibulaire, est souvent temporaire (patients fragiles et/oupresentant un pronostic de survie faible), car leur toleranceest souvent limitee et les expositions frequentes [4,5].La reconstruction par distraction osteogenique (interne ouexterne) presente plusieurs avantages, car elle permet unereconstruction de pertes de substance importantes, evite unedyschromie de la perte de substance reconstruite, et parcequ’il s’agit d’une intervention rapide et simple. L’indicationpremiere de la distraction extra-orale est la perte de sub-stance segmentaire des traumatismes balistiques [6–8]. Sonutilisation n’est pas recommandee en cas d’infection ou deterrain irradie. L’os distracte peut supporter une rehabilitationorale implanto-portee [7,8]. Les inconvenients resident dansl’appareillage, encombrant a porter pendant plusieurs semai-nes. La distraction intra-orale est plutot a but pre-implantaire ; elle permet, a terme, l’amelioration notablede la qualite de patients fortement edentes, avec des sequel-les limitees [9,10].La reconstruction par greffe de biomateriau evite les sequellesliees au site donneur, reduit la duree et la complexite de lareconstruction chez les patients fragiles. Ces biomateriauxpeuvent etre non resorbables (methylmethacrylate), ou resor-bables rapidement (phosphates tricalciques) ou lentement(hydroxyapatite). La reconstruction par biomateriau nonresorbable est aussi indiquee chez les patients fragiles, a laplace des plaques de reconstruction mandibulaire. Mais lescomplications infectieuses (environ 20 % dans les deux pre-mieres annees) et les expositions rendent leur utilisationmarginale [11]. L’utilisation de biomateriau resorbable dansla reconstruction des pertes de substance segmentaires maxi-llo-faciales n’est pas encore routiniere. En effet, seuls quel-ques cas ont ete decrits chez l’homme ; ils requierent, en toutecirconstance, des patients en bon etat general [12,13].Ainsi, si toutes ces techniques presentent des avantages, ellespeuvent etre serieusement limitees, notamment par l’etatgeneral du patient et les comorbidites.

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La technique de reconstruction par membranes induitesmerite d’etre plus connue en chirurgie maxillo-faciale.

Rappels sur la technique de reconstructionpar membranes induites

La technique de reconstruction par membranes induites a eteoriginellement decrite par Masquelet et al. [14] pour la recon-struction des grandes pertes osseuses diaphysaires des oslongs du membre inferieur. Le principe de cette reconstructionconsiste en deux temps chirurgicaux :� lors du premier temps chirurgical, les extremites osseusessont regularisees, les parties molles adjacentes sont prepareeset la perte de substance est comblee par du methylmetha-crylate. L’entretoise neoformee autour du methylmethacry-late preserve le volume de reconstruction necessaire, enempechant le comblement de la perte de substance par dutissu fibreux. Elle participe, en outre, a la stabilite osseuse etjoue un role biologique dans la reparation de la perte desubstance. En effet, cette membrane induite, d’aspectsimilaire aux capsules periprothetiques des implants desilicone ou des membranes d’interposition va progressive-ment etre le siege d’une metaplasie pseudosynoviale [15] ;� lors du second temps, environ deux mois plus tard, lemethylmethacrylate est enleve et la cavite comblee par unegreffe autologue spongieuse, d’origine iliaque. Cette greffed’os va etre rapidement envahie par des bourgeonsvasculaires induits par la membrane [15,16]. Selon Pelissieret al. [16], la membrane induite par le methylmethacrylatesecrete des facteurs de croissance vasculaire et osteoinduc-teurs, capables de stimuler la croissance osseuse. Au membreinferieur, l’os spongieux finit par prendre une allure corticaleet une consolidation radiologique est obtenue au quatriememois avec un appui du membre possible a partir du huitiememois [14,15].

D’excellents resultats ont ete obtenus, meme en cas de litreceveur infecte ou irradie, permettant la reconstruction dedefects osseux diaphysaires pouvant aller jusqu’a 25 cm delongueur [14,15]. Les avantages de cette technique sont nonnegligeables pour plusieurs raisons :� elle peut s’appliquer sur des terrains peu favorables, gracea la capsule fibreuse constituant une barriere isolant legreffon et favorisant sa revascularisation ;� elle est simple et de courte duree, donc adaptee auxpatients fragiles ;� en cas d’echec, elle peut etre realisee a nouveau, apres untemps de latence.

Recemment, cette technique a ete utilisee au niveau dumembre superieur, y compris le poignet et la main, en chi-rurgie reglee comme en urgence [17–19]. Cette technique ameme ete utilisee en urgence.

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Technique des membranes induites en chirurgie maxillo-faciale

Rappels sur la cicatrisation osseuse enpresence de biomateriau

La presence d’un biomateriau non resorbable et non metal-lique provoque une reaction a corps etranger perenne, detype inflammatoire. Elle est liee a la persistance du bioma-teriau qui est isole car l’organisme ne peut l’eliminer. Audebut, il y a une phase vasculaire initiale non specifiquequi succede a une phase cellulaire, impliquant d’abord despolynucleaires et des lymphocytes. Ensuite, cette premierepopulation cellulaire est progressivement remplacee par desmacrophages et des cellules geantes, resultantes de la fusioncellulaire entre monocytes ou histiocytes au contact du corpsetranger. Apres cette phase, des fibroblastes elaborent unecouche dense de collagene a l’interieur de laquelle se trouventdes macrophages et le corps etranger, formant ainsi unecapsule qui n’est autre que la membrane induite. L’epaisseurde cette capsule est fonction du corps etranger, de l’intensiteet de la cinetique de la reaction inflammatoire [20].

Application experimentale de lareconstruction mandibulaire parmembranes induites

Nous avons ete les premiers a montrer experimentalement lafaisabilite de la technique de reconstruction mandibulaire parmembranes induites chez l’animal [21]. Cliniquement, unealimentation normale est obtenue a partir du huitieme jour,apres chaque etape chirurgicale. L’analyse macroscopiquemontre une consolidation avec une reconstruction bicorticale.L’os reconstruit est plus rapidement fonctionnel en cas d’auto-greffe, qu’en cas de greffe de substitut osseux [21]. La colora-tion a l’hematoxyline-eosine-safran (HES) des membranesinduites obtenue revele systematiquement la presenced’une membrane endotheliforme tapissant la face internede la capsule, elle-meme entouree de fibres de collagene detype 1 et de fibroblastes, jouant ainsi son role contre l’infection[21]. L’etude immuno-histochimique qualitative a mis en evi-dence la presence importante d’un facteur de croissanceimplique dans la proliferation vasculaire (VEGF), ainsi qu’uneriche vascularisation des membranes (CD31). Ces observationsqualitatives confirment celles de Pelissier et al. [18].

Etude des capacites osteoinductrices desmembranes induites

Pour certains auteurs, les membranes induites ont une capa-cite osteoinductrice [16]. Si cela ce confirmait, alors la recon-struction par biomateriau sans adjonction d’autogreffepourrait meme etre envisagee. Nous avons compare pourcela, apres une etude in vivo chez l’animal en site heteroto-pique, l’osteogenese induite par un complexe membrane

induite-ceramique de phosphate de calcium et l’osteogeneseinduite par un complexe membrane induite-os-ceramique dephosphate de calcium ; malheureusement, nous n’avons pasmis en evidence d’effet osteoinducteur en presence de cebiomateriau [22].Afin de conforter ou d’infirmer nos resultats, une etude invitro a ete realisee pour analyser l’effet mitogene et sur ladifferenciation des cellules osteoprogenitrices d’extraits desmembranes induites.D’apres notre experience, la quantite de proteine produiteau niveau des membranes induites mandibulaires est supe-rieure a celle observee en site sous-cutane temoin. L’une deshypotheses emises est, qu’au niveau mandibulaire, l’osteo-tomie mandibulaire et la mise en place de la plaque indui-sent une activite de synthese superieure, en rapport avec unprocessus cicatriciel. La quantite maximale de TGFb pro-duite au niveau des membranes induites mandibulairessemble aussi plus importante. Cela laisse presager d’uneffet benefique de ces membranes sur la reparationosseuse, meme si l’effet des membranes sur la croissanceet la differenciation in vitro des cellules osteoprogenitricesn’a pu etre confirme.La quantite de VEGF produite est similaire, quel que soit lesite, avec une localisation preferentielle peripherique permet-tant de deduire l’interet potentiel de ces membranes pourfavoriser la vascularisation du greffon. En outre, l’analyse de laproliferation de cellules de moelle osseuse cultivees en pre-sence d’extraits proteiques issus des membranes semble,apres six jours, montrer une survie des cellules plus impor-tante. Alors que la differenciation cellulaire au contact desextraits de membrane n’a pas permis de mettre en evidencede variation de l’activite enzymatique phosphatase alcalineentre les differents extraits de tissu ou avec les temoins, apresun, trois et six jours de culture.Ainsi, pour nous, la membrane induite n’a pas, in vitro, d’effetmitogene sur les cellules osteoprogenitrices humaines. Enoutre, il ne semble pas non plus que les extraits membranai-res puissent stimuler, in vitro, la differenciation osteoblas-tique. La fonction osteogenique de la membrane induitesemble mineure [22].

Etude de l’influence de la radiotherapiesur la formation des membranes et laneoformation osseuse au sein demateriaux

En carcinologie, la plupart des patients necessitant une recon-struction osseuse maxillaire ou mandibulaire ont ete irradies,ou vont l’etre, apres leur intervention. Il est donc indispen-sable de determiner les effets de la radiotherapie, soit sur laformation des membranes induites, soit sur leur etat.Nous avons effectue une etude experimentale chez 12 lapinsdivises en deux groupes de six : le premier groupe a

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Tableau IRepartition des animaux ayant beneficie d’une irradiation.Groupe Temps initial 1 mois 2 mois 3 mois 6 moisGroupe 1 (n = 6) Irradiation 15 Gy Mise en place MM Ablation MM + greffe

HA-TCP + OsBiopsies pourhistologie + tests Elisa

Sacrifice 3 lapinsEtude histologique

Sacrifice 3 lapinsEtude histologique

Groupe 2 (n = 6) Mise en place MM Irradiation 15 Gy Ablation MM + greffeHA-TCP + OsBiopsies pourhistologie + tests Elisa

Sacrifice 3 lapinsEtude histologique

Sacrifice 3 lapinsEtude histologique

MM : methylmethacrylate ; HA-TCP : hydroxyapatite-tricalcium-phosphate.

beneficie d’une radiotherapie un mois avant l’implantationde biomateriau (methylmethacrylate) et le second a eul’intervention chirurgicale avec implantation du biomate-riau, puis a eu, un mois plus tard, une radiotherapie. Troissites ont ete operes chez des animaux prealablementanesthesies : cuisse droite et gauche et cervicale. Ce derniersite n’a pas ete irradie et a servi de site temoin. La radio-therapie a ete realisee chez des animaux prealablementanesthesies. Un laser guide a permis de definir un champd’irradiation de 6 � 6 cm. Une dose unitaire de 15 Grays deCobalt 60 avec une energie de 5 MeV (Atomic EnergyW,Canada) a ete administree, correspondant a des doses frac-tionnees cumulees de 60 grays utilises chez l’homme dans letraitement des cancers des voies aerodigestives superieures.Les analyses ont ete effectuees a un et a quatre mois apres lamise en place du complexe ceramique de phosphate decalcium (hydroxyapatite-tricalcium-phosphate [HA-TCP])autogreffe iliaque dans les membranes induites. Les echan-tillons ont ete alors preleves pour etre analyses (tableau I).Aucun deces n’a ete constate. Cliniquement, seul un exan-theme rapidement resolutif en une quinzaine de jours a eteconstate.L’analyse macroscopique de chaque echantillon montrait achaque fois une membrane induite bien formee. Histologi-quement, cette membrane etait tapissee d’un revetementendotheliforme pseudosynovial. Les tissus conjonctifs sous-jacents etaient constitues de trousseaux de collagene avecou sans cellules myofibroblastiques. Par plages, les tissusapparaissaient œdematies et les fibres de collagenes sem-blaient dissociees et ce quel que soit le groupe.

Tableau IIRepartition des dosages des facteurs TGFb et PEG2 en fonction du gGroupes PGE2 :

(pg/mgGroupe 1

Irradiation avant mise en place du ciment 7 � 4

Groupe 2Irradiation apres mise en place du ciment 11 � 3

Membrane induite en site cervical sans irradiation 9 � 5

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L’etude immuno-histochimique qualitative a mis en evidencela presence importante de VEGF, ainsi qu’une riche vascula-risation des membranes (CD31). Il n’a pas ete note de diffe-rence selon les conditions d’irradiations. Les resultats del’analyse biochimique du TGFb et les PEG2 sont exposes dansle tableau II. La concentration de PEG2 ne semblait pas varieren fonction du site et du moment de l’irradiation par rapport ala formation de la membrane. La concentration de TGFb

semblait moins importante au niveau des membranes for-mees apres l’irradiation.L’analyse histologique decalcifiee montrait apres un mois uneformation de tissus neoformes dans 66,7 % des cas (n = 6)dans le groupe ayant recu l’irradiation postoperatoire. Dans legroupe ayant prealablement recu une radiotherapie avantl’intervention, il n’y avait pas de tissu osseux neoforme. Apresquatre mois, il existait de l’os neoforme, quelles que soient lesconditions. Cependant, les travees osseuses paraissent plusgreles au niveau du groupe ayant recu une radiotherapiepreoperatoire.L’analyse histologique decalcifiee montrait, apres un mois, unos neoforme en cas d’irradiation postoperatoire, alors qu’iletait peu visible en cas de radiotherapie preoperatoire. Apresquatre mois, l’os neoforme etait present dans les deux cas.La quantite d’os neoforme n’etait pas statistiquement diffe-rente entre le temoin et le groupe ayant recu une irradiationpostoperatoire. En revanche, cette quantite d’os etait infe-rieure dans le groupe ayant recu une radiotherapie preope-ratoire quel que soit le temps etudie (p < 0,05).La quantite d’os greffe etait stable au cours du temps danschaque groupe. Mais celle d’os greffe etait, a un mois,

roupe. moyenne

proteines) � ecart-typeTGFb : moyenne(pg/mg proteines) � ecart-type

12 � 7

52 � 3787 � 45

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Technique des membranes induites en chirurgie maxillo-faciale

inferieure dans le groupe ayant eu une irradiation preopera-toire par rapport au temoin et au groupe irradie en post-operatoire (p < 0,05).La radiotherapie a des effets sur la formation des membranesinduites. La technique de membranes induites fonctionnemieux lorsqu’il n’y a pas eu de radiotherapie au prealable.

Figure 2. Mise en place de la plaque de reconstruction mandibulaire et dumethylmethacrylate.

Application clinique de la technique demembranes induites en chirurgiemaxillo-faciale

Masquelet et al. ont montre qu’il etait possible de recon-struire des pertes de substance osseuse de taille critique desos longs chez l’homme en utilisant la technique des mem-branes induites [16]. Nous avons ete les premiers a appliquercette technique apres des donnees experimentales preala-bles (fig. 1–4) [22]. La taille moyenne de perte de substancemandibulaire segmentaire etait de 11,25 cm (9 a 14 cm) pourdes interventions chirurgicales simples et courtes. Clinique-ment, aucune fracture pathologique preoperatoire n’a eteconstatee.En lumiere polarisee, le tissu osseux avait un aspect trabe-culaire typique d’os secondaire. En outre, les osteoplastescontiennent des osteocytes, ce qui temoigne de la vitalitedu tissu osseux reconstruit (fig. 5). La membrane induite avaitle meme aspect que chez l’animal : aspect de membraneendotheliforme tapissant la face interne de la capsule, elle-meme entouree de fibres de collagene de type 1 et de fibro-blastes. L’analyse immuno-histochimique qualitative mon-trait une forte expression du VEGF et du CD31 (fig. 6).L’analyse en coloration HES a confirme la formation d’un osavec aspect corticospongieux (fig. 7).

Figure 1. Voie d’abord cervicale droite montrant une perte de substancemandibulaire (fleche).

Aucune complication n’a ete notee apres la premiere inter-vention et deux patients ont eu un echec apres la secondephase (50 %). La phase delicate est donc la seconde interven-tion. Plusieurs raisons peuvent expliquer ces resultats :� patients en mauvais etat general, souvent denutris a causede l’impossibilite de s’alimenter ;� interventions multiples sur terrain irradie ;� fragilite de la muqueuse liee a l’effraction precedente ;� tous les patients avaient une fracture pathologique ;� l’association de biomateriau entraıne un risque infectieuxplus important.

Pour les patients en echec, il existe tout de meme un beneficepuisque le traitement necessitait une mandibulectomie

Figure 3. Resultats immediats apres fermeture.

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Figure 4. Figure peroperatoire avant prelevement osseux et ablation de laplaque de reconstruction mandibulaire, montrant une reconstructionosseuse de l’angle et de la branche horizontale gauche.

Figure 6. Expression du CD31 au sein du tissu osseux neoforme.

segmentaire. Cette intervention a permis de soulager lesdouleurs et de juguler la surinfection.Des patients ont beneficie d’une reconstruction favorableavec, a chaque fois, une perte de substance superieure a10 cm. Il s’agit pour eux d’une nette amelioration de leurqualite de vie. L’ideal serait chez eux la rehabilitation pro-thetique implanto-portee. Ces resultats sont encourageants,mais doivent etre confirmes sur une plus grande serie depatients. Le meme type d’analyse actuellement menee sur lamembrane induite generee dans des defects d’os longshumains (humerus) montre des resultats similaires a quatremois (fig. 8), a savoir un tissu tres vascularise compose de troiszones : une zone tres inflammatoire en distale du ciment, unezone de transition riche en fibroblastes et myofibroblastes(les fibres de collagene et des myofibroblastes formant desneovaisseaux) et une zone en proximale du ciment, tissucomparable a l’epithelium synovial.

Figure 5. Observation en lumiere polarisee du prelevement osseuxmontrant un os corticospongieux secondaire et la presence d’osteocytesdans les osteoplastes.

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Perspectives

Remplacement du biomateriau

Afin de limiter l’exposition du methylmethacrylate, materiaudur et erodant facilement la muqueuse fragile, ce dernierpourrait etre remplace par un autre materiau non resorbable :silicone, prothese d’expansion adaptee.

Utilisation de biomateriau et de cellulesosteoprogenitricesCette utilisation permettrait d’eviter les sequelles liees au sitedonneur, notamment par l’utilisation de cellules souchesmesenchymateuses multipotentes associees a un biomate-riau [23] et idealement a des facteurs de croissance comme lesbone morphogenetic protein (BMP) [24] ou le VEGF.

Figure 7. Prelevement osseux a un an montrant un os d’aspectcorticospongieux.

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Figure 8. Analyse histologique (coloration hematoxyline-eosine-safran [HES]) de la membrane induite generee dans le defect osseux d’un os long humain(humerus) a quatre mois avec un tissu tres vascularise compose de trois zones : une zone tres inflammatoire en distal du ciment, une zone de transition(outer zone) riche en fibroblastes et myofibroblastes (avec presence de fibres de collagene et des myofibroblastes (formant des neovaisseaux) et une zoneen proximale du ciment (inner zone).

Utilisation de la reconstruction 3-D

Elle permettrait de realiser des protheses de comblement de laperte de surface sur mesure. Ainsi, la technique obtiendraitdes resultats plus optimaux. Cela pourrait permettre unereconstruction plus facile des defects maxillaires. Actuelle-ment, les protheses sur mesure en grille en titane ou acidepolylactique peuvent deja etre realisees. La reconstruction 3-Dpermettrait aussi, au cours du second temps, la fabricationd’une prothese definitive qui serait remplie de greffe osseuse,et/ou de biomateriaux, et surtout de cellules osteoprogeni-trices [25].

Conclusion

La technique des membranes induites devrait prendre saplace dans la reconstruction maxillo-faciale. Comme toutesles techniques, celle-ci est perfectible grace aux evolutions encours dans le domaine de la reconstruction tridimension-nelle, des biomateriaux et de l’utilisation des cellulesmultipotentes.

Declaration d’interets

Les auteurs declarent ne pas avoir de conflits d’interets enrelation avec cet article.

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