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SOGEA Atlantique Hydraulique – Agence d’Angoulême
Entretien avec Gilles Evenou, chef d’agence de Saint-Yriex
Créée dans les années 50 et située à Saint-Yriex depuis 1989, l’agence SOGEA Atlantique hydraulique, filiale
de Vinci Construction France, intervient sur l’ensemble du Poitou-Charentes dans des travaux relatifs au cycle
de l’eau (réseaux d’eau potable, d’assainissement, tranchées, stations d’épuration, etc.) et à la voirie et
réseaux divers (VRD). L’agence totalise un chiffre d’affaires annuel de 14 millions d’euros et emploie 65
personnes (été 2015) représentant 14 équipes.
La clientèle est composée de « collectivités locales à 90% (mairies, communautés de communes, syndicats
d’eau et d’assainissement) et de quelques privés à la marge ». Ces dernières années, en plus des concurrents
charentais historiques (SADE, ERCTP, SNATP, Castello, Agur), des entreprises de Bretagne, du Centre et du
Limousin sont venues proposer leurs services sur le marché régional. Conséquence de la crise, ces nouveaux
entrants « font tirer les prix vers le bas » car ils « sont compétitifs ». En amont, l’agence se fournit auprès de
revendeurs locaux de tuyaux et de pièces diverses faisant que l’eau va circuler : Point P, Franz Bonhomme,
PMR. Elle achète également des tuyaux spéciaux en fonte à une entreprise située en Lorraine.
Dans ce contexte économique, l’agence privilégie la flexibilité dans la gestion de ses ressources humaines et
matérielles. Conformément à une stratégie de groupe, « entre un tiers et la moitié » de son matériel lui
appartient. Le reste est loué à des locatiers, soit nationaux (ex. Hertz) ou locaux. Malgré le « surcoût par
rapport à du matériel en propre qui serait amorti », cette stratégie représente « un volant variable assez
simple » : « si jamais il y a une baisse d’activité assez brusque, on arrête les quelques intérims mais surtout
les engins, les camions, les pelles… ». Le recours permanent à l’intérim entre aussi dans cette logique de
minimiser les coûts fixes : « C’est un volet variable, c’est triste à dire, qui est quand même intéressant quand
il n’y a pas d’activité ». En revanche, contrairement à ses concurrents ou à d’autres entreprises du groupe,
SOGEA Atlantique Hydraulique sous-traite peu son activité : « j’ai un objectif, c’est de ne pas sous-traiter ou
plutôt de très très peu sous-traiter. C’est pour ça d’ailleurs qu’on fait nos propres réfections de chaussée. La
plupart de mes concurrents font faire les réfections de chaussée. Là où on sous-traite le plus, c’est lorsqu’on
fait des stations d’épuration, quand il y a des prestations du type « espaces verts », clôtures, et les poses de
bâches ».
Après la crise de 2008, surtout ressentie en 2009, l’agence a bénéficié de nombreux projets financés par des
collectivités et de la construction de la LGV SEA pour accroître son activité. Avec 4 775 000 € de contrats
obtenus dans le cadre du projet SEA, soit entre 10% et 15% de son chiffre d’affaires sur 3 ans, SOGEA a accru
son chiffre d’affaires global tout en conservant ses clients habituels : « Le but c’était vraiment de travailler
pour nos clients habituels ! Le projet SEA c’est vraiment un plus ». Terminée en 2014, la participation au plus
grand chantier d’Europe a offert à l’entreprise une rentabilité équivalente à celle qu’elle obtient sur d’autres
projets : « on a travaillé pour les syndicats d’eau, c’étaient les prix classiques et historiques des syndicats
d’eau d’avant COSEA ».
Bien que filiale de Vinci, les principaux contrats obtenus par l’agence dans le cadre du projet SEA n’ont pas été
signés directement avec COSEA, mais avec des syndicats d’eau et d’assainissement de Charente, clients
historiques de l’entreprise : « Tous les déplacements de réseaux d’eau potable ont été faits par les syndicats
d’eau. Chaque syndicat a lancé un appel d’offre puis a choisi une entreprise qui a fait des travaux. Et le
syndicat était remboursé par COSEA au fur et à mesure que les travaux étaient réalisés ». En plus des 3
contrats principaux signés avec des syndicats d’eau et d’assainissement, l’agence a également passé deux
marchés de faible envergure directement avec COSEA : « un déplacement de réseau pour irrigation sur le
Nord d’Angoulême » et « un déplacement de réseau d’assainissement sur la commune de Roullet-Saint-
Estèphe ».
L’opportunité d’une mission de 3 ans offerte par le projet SEA a permis à l’agence d’accroitre ses effectifs et
de qualifier du personnel : « On en a profité pour augmenter nos effectifs en propre, de 70 avant COSEA, on
est monté à 80 en propre. On a aussi utilisé l’intérim, il faut être très clair : au moins une quinzaine
d’intérimaires à un moment donné. Ça a aussi permis de prendre de l’intérim et d’autres types de contrats,
qu’on a formé et que finalement on a embauché, en partie. C’est 10% ou 15% de mon activité, ça permet
d’avoir une certaine vision et de se dire : « on se donne un peu de moyens pour former » ». En plus de qualifier
son personnel, l’agence s’est saisit du chantier pour acheter du matériel en propre : « On a acheté un peu de
gros matériels (pelles, camions) et beaucoup de petit matériel (cabanes, réfectoire, outillages, plaques, etc.).
On garde ce matériel ». Le surplus d’activité généré par le projet SEA a été anticipé et géré bien en amont par
Gilles Evenou, responsable de l’agence : « Faut pas rêver je savais que ça allait rediminuer, donc les achats
faits pendant le chantier tenaient compte de la structure de l’agence avant COSEA ».
Sur un plan plus opérationnel, le chantier SEA n’a pas bouleversé les méthodes de travail de l’entreprise bien
que les contraintes sécuritaires et organisationnelles de COSEA aient nécessité une adaptation des
équipes : « Sur l’aspect purement technique du chantier c’était plutôt classique ce qu’on a fait ». Les
quelques impacts négatifs du chantier pour l’entreprise ont concerné le prix des matériaux, la rareté des
matériels disponibles chez les locatiers et la tension sur le marché du travail : « Sur la partie fourniture de
cailloux, ça a été un peu à la hausse, c’est revenu à des prix un peu plus bas maintenant car les gros carriers
ont un peu moins de travail avec COSEA. Au niveau des locatiers, pour trouver des pelles et des camions,
c’était plus compliqué. On a eu des difficultés à trouver des pelles et des camions. On a eu plus de mal à
trouver du personnel, via l’intérim notamment ».
Depuis début 2014, les effectifs de l’entreprise sont en baisse. Anticipant la chute d’activité liée à la fin du
chantier, aux élections municipales et à la crise que traverse le secteur du BTP, Gilles Evenou a réduit la voilure
de son agence en profitant de départs à la retraite et de départs volontaires : « Diminution graduelle et
naturelle, il n’y a pas eu de plans de licenciement économique » . Cette stratégie lui a permis d’éviter le
chômage partiel : « Je n’ai pas de personnes en chômage partiel contrairement à mes collègues des
autres agences de SOGEA ATLANTIQUE HYDRAULIQUE (Bretagne, Pays de la Loire) ». Symbole de la
crise qui secoue le BTP, le responsable d’agence reçoit de nombreux CV de professionnels du secteur de tout
niveau : « Enormément de CV arrivent, que ce soient des gens du chantier ou d’ailleurs : des ouvriers,
des conducteurs d’engins, des chefs de chantier, personnels administratifs, etc. C’est un peu comme
en 2009 où on avait vu énormément de CV arrivés ». Dans ces conditions, le risque pour son entreprise
serait de perdre des compétences qui ne seraient pas remplacées. Il aimerait donc pouvoir recruter 2 ou 3
nouveaux salariés chaque année comme il en a l’habitude, mais la politique du groupe lui interdit de le faire
tant que le marché n’est pas plus dynamique : « J’ai interdiction de recruter même si moi j’aimerais
recruter. J’espère que dans les mois à venir j’aurai une possibilité. Les gens qui partent c’est quand
même une baisse de compétences. Il faut remplacer ces compétences-là ! »
Un marché atone, une concurrence plus dure et des prix bas…la conjoncture actuelle nécessite un compromis
optimal entre chiffre d’affaires et rentabilité afin de préserver l’activité de l’entreprise: « J’ai un objectif qui m’a
été donné de faire un certain chiffre mais aussi un certain résultat lié à ce chiffre ». Dans ces conditions
Gilles Evenou est catégorique : « ce n’est pas parce que l’agence n’a pas de travail qu’on va prendre des
marchés à n’importe quel prix. Peut-être que je ne ferais pas mon objectif de chiffre d’affaires en 2015,
à côté de çà j’essaie de maintenir un niveau de prix à peu près cohérent pour ne pas avoir de résultats
négatifs à la fin de l’année ». Et de conclure pragmatique et un brin fataliste: « C’est cyclique, c’est la vie
d’une entreprise ».