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TITRE: Versions françaises de la Distress Tolerance Scale et de la Discomfort Intolerance Scale
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Version française de la Distress Tolerance Scale et de la Discomfort
Intolerance Scale
Aurélie Wagener* & Sylvie Blairy
Unité de Psychologie Clinique Comportementale et Cognitive, Département de Psychologie :
Cognition et Comportement, Université de Liège, Belgique
Quartier Agora
Place des Orateurs, 1 (B33)
4000 Liège
Article accepté pour publication dans la revue « Canadian Journal of
Behavioural Science/Revue canadienne des sciences du comportement »
*Toute correspondance concernant le présent article doit être adressée à
Aurélie Wagener : aurelie.wagener@ulg.ac.be
TITRE: Versions françaises de la Distress Tolerance Scale et de la Discomfort Intolerance Scale
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Version française de la Distress Tolerance Scale et de la Discomfort
Intolerance Scale
RÉSUMÉ
Le concept de tolérance à la détresse fait référence à la capacité perçue à expérimenter et à
résister à des états émotionnels négatifs et/ou à d'autres sensations aversives (par exemple,
l'inconfort physique). Deux échelles ont été élaborées pour évaluer ce concept : l’échelle de
tolérance à la détresse (Distress Tolerance Scale, DTS) et l’échelle d'intolérance à l’inconfort
(Discomfort Intolerance Scale, DIS). L'objectif de cette étude est de présenter la traduction et
la validation de ces deux échelles en Français. Pour ce faire, 488 adultes tout-venants ont
participé à une étude en ligne évaluant la tolérance à la détresse et différentes stratégies de
régulation émotionnelle. Des analyses factorielles exploratoires ont été effectuées afin de
déterminer les structures factorielles des versions françaises de ces deux échelles. Pour la DTS,
l’analyse factorielle confirmatoire a mis en évidence une solution à quatre facteurs (tolérance,
absorption, évaluation, régulation) avec un facteur d'ordre supérieur (tolérance à la détresse
générale) comme étant le meilleur ajustement. Pour la DIS, l’analyse factorielle confirmatoire
a mis en évidence une solution à deux facteurs (intolérance, évitement) avec un facteur d'ordre
supérieur (intolérance générale à l’inconfort) comme étant le meilleur ajustement. Les validités
interne et externe ont démontré de bonnes propriétés.
Mots-clés : tolérance à la détresse, intolérance à l’inconfort, échelle de tolérance à la détresse,
échelle d’intolérance à l’inconfort, validation
TITRE: Versions françaises de la Distress Tolerance Scale et de la Discomfort Intolerance Scale
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ABSTRACT
The perceived perspective of the distress tolerance refers to the perceived ability to experience
and to withstand negative emotional states and/or other aversive sensations (e.g. physical
discomfort). Two scales were developed to assess this construct: the Distress Tolerance Scale
(DTS) and the Discomfort Intolerance Scale (DIS).
The objective of this investigation is to present the validation of these two scales in French.
488 non-clinical adults completed an online survey assessing the distress tolerance and
emotional regulation strategies. Factor analyses were performed to determine the factor
structures of the French versions of these scales.
CFA highlighted a four-factor solution (tolerance, absorption, appraisal, regulation) with one
higher-order factor (general distress tolerance) as being the better fit for the DTS. CFA
highlighted a two-factor solution (intolerance and avoidance) with one higher-order factor
(general discomfort intolerance) as being the better fit for the DIS. Intern and extern validity
were assessed and demonstrated good properties.
Keywords: distress tolerance; discomfort intolerance; Distress Tolerance Scale; Discomfort
Intolerance Scale; questionnaire
TITRE: Versions françaises de la Distress Tolerance Scale et de la Discomfort Intolerance Scale
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Introduction
Dans la littérature, la tolérance à la détresse peut être conceptualisée selon deux axes :
un premier de l’ordre de la perception, un second de l’ordre du comportement (Leyro,
Zvolensky & Bernstein, 2010). Le premier axe fait référence à la perception de nos capacités à
expérimenter et à résister à des états émotionnels négatifs et/ou à d’autres états aversifs tels que
l'inconfort physique (Leyro et al., 2010; Simons & Gaher, 2005). Le deuxième axe fait référence
aux comportements que l’individu met en place afin de résister à ces états internes pénibles
(Leyro et al., 2010). Dans cette étude, nous nous intéressons à l’axe de la perception de la
tolérance à la détresse.
Selon Leyro et al. (2010), l’axe de la perception de la tolérance à la détresse est composé
de cinq conceptualisations qui sont la tolérance à la détresse pour des états émotionnels
négatifs, l'intolérance de l'inconfort, la tolérance de l'ambiguïté, l'intolérance à l'incertitude et
la tolérance à la frustration. Selon Simons et Gaher (2005) et Zvolensky, Bernstein et
Vujanovic (2011), ces cinq conceptualisations peuvent être considérées comme étant des traits
influençant les styles de régulation émotionnelle, cognitive et comportementale de chacun. Plus
précisément, l’évaluation de la détresse varie d’un individu à l’autre ce qui influence la
perception de l’intensité et de l’aversion de certains états négatifs et résulte en de nombreuses
différences interindividuelles (Simons & Gaher, 2005). En psychothérapie, augmenter la
tolérance à la détresse est un objectif fréquent puisqu’apprendre à tolérer la détresse peut mener
à des changements comportementaux et à l’adoption de comportements sains (Hayes, Levin,
Plumb-Vilardaga, Villatte & Pistorello, 2013 ; Hayes, Wilson, Gifford, Follette & Strodahl,
1996).
La tolérance à la détresse influence l'étiologie et le maintien de plusieurs
psychopathologies tels que les troubles de l'humeur, les troubles anxieux et les dépendances
(Bernstein, Zvolensky, Vujanovic & Moos, 2009 ; Zvolensky et al., 2011). C’est pourquoi les
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cinq conceptualisations précitées ont fait l'objet d'un intérêt croissant dans le cadre de la
pratique clinique et dans celui de la recherche. Elles ont également été accompagnées du
développement de différents outils d'évaluation. Cette étude se focalise sur deux de ces
conceptualisations de la tolérance à la détresse : la tolérance à la détresse pour des états
émotionnels négatifs et l'intolérance de l'inconfort.
La tolérance à la détresse pour des états émotionnels négatifs est décrite comme un
concept hiérarchique caractérisé par un certain nombre de sous-facettes. Selon Simons et Gaher
(2005), la tolérance à la détresse pour des états émotionnels négatifs peut être considérée
comme « une méta-émotion qui se compose de l'évaluation de l'individu et de ses attentes sur
l'expérience des états émotionnels négatifs en ce qui concerne (1) la capacité à tolérer les états
émotionnels pénibles, (2) la tendance avec laquelle l'attention est absorbée par la détresse
émotionnelle, (3) l'évaluation subjective de la détresse émotionnelle et (4) les efforts de
régulation pour réduire la détresse émotionnelle ». Bien que la notion de tolérance à la détresse
soit commune à différentes psychopathologies, il n’existe aucune mesure évaluant cette
conceptualisation hiérarchique. Afin de pallier ce manque, Simons et Gaher (2005) ont élaboré
l’échelle de tolérance à la détresse (Distress Tolerance Scale, DTS).
L'intolérance à l'inconfort est décrite comme l'absence de la capacité à résister à des
perturbations physiques ou à des états physiques désagréables, même si ces sensations ne sont
pas douloureuses (Bonn-Miller, Zvolensky & Bernstein, 2009; Leyro et al., 2010; Schmidt,
Richey & Fitzpatrick, 2006). Schmidt et al. (2006) ont créé l’échelle d’intolérance à l’inconfort
(Discomfort Intolerance Scale, DIS).
L'intérêt croissant pour les concepts de tolérance à la détresse pour des états émotionnels
négatifs et d'intolérance à l’inconfort suit l'élaboration de stratégies psychothérapeutiques qui
visent principalement à promouvoir la tolérance des affects telles que l'acceptation émotionnelle
de la thérapie d'acceptation et d'engagement (Bernstein et al., 2009; Bonn-Miller et al., 2009;
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Zvolensky & Otto, 2007). Ces approches psychothérapeutiques étant toujours en
développement, il semble intéressant d’avoir à notre disposition des outils d’évaluation
pertinents et fiables.
L'échelle de tolérance à la détresse (Distress Tolerance Scale, DTS)
Simons et Gaher (2005) ont développé la DTS pour que ses items évaluent les quatre
aspects de la tolérance à la détresse pour les états émotionnels négatifs : la tolérance,
l’absorption, l’évaluation et la régulation (Raykos, Byrne & Watson, 2009; Simons & Gaher,
2005). Les analyses factorielles, réalisées sur un échantillon de 823 étudiants universitaires âgés
en moyenne de 19,90 ans (É-T. = 1,60) (67% de femmes) ont mis en évidence une structure à
quatre facteurs d'ordre inférieur (tolérance, absorption, évaluation, régulation) et un facteur
d'ordre supérieur (tolérance générale à la détresse) comme présentant un ajustement adéquat.
Cette structure factorielle présente une bonne cohérence interne puisque les alphas de Cronbach
variaient de 0,70 pour le sous-facteur de régulation à 0,82 pour la tolérance générale à la
détresse. De plus, la fiabilité test-retest sur une période de six mois était satisfaisante pour cette
échelle (r = 0,61). Enfin, la validité convergente de la DTS était soutenue par ses corrélations
négatives modérées avec des mesures de dérégulation et par ses corrélations positives avec une
mesure de l'affectivité positive (Simons & Gaher, 2005). Cette structure à quatre facteurs avec
un facteur d'ordre supérieur a également été reproduite dans un échantillon de fumeurs de
cigarettes quotidiens (Leyro, Bernstein, Vujanovic, McLeish & Zvolensky, 2011).
L’échelle d’intolérance à l’inconfort (Discomfort Intolerance Scale, DIS)
Schmidt et al. (2006) ont créé la DIS afin d’évaluer spécifiquement l'intolérance vis-à-
vis d’états physiques inconfortables. Cette échelle porte sur l’intolérance et l'évitement des
stimuli qui sont objectivement désagréables et, par conséquent, sur la capacité de résister à de
tels états (Schmidt et al., 2006). La DIS a également été développée afin d’évaluer des aspects
distincts de ceux mesurés par la DTS. Pour la validation de leur échelle, Schmidt et al. (2006)
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ont regroupé quatre échantillons différents composant leur échantillon total sur lequel ont été
réalisées les analyses factorielles (1296 participants contrôles tout-venants, 148 patients
souffrant de trouble panique, 45 patients souffrant de trouble panique et 45 sujets contrôles
appariés, 152 militaires). Les analyses factorielles ont indiqué une structure à deux facteurs
d’ordre inférieur (intolérance à l'inconfort, évitement de l’inconfort) et un facteur d’ordre
supérieur (intolérance générale à l’inconfort) comme présentant le meilleur ajustement. Cette
structure factorielle a démontré une bonne consistance interne puisque les alphas de Cronbach
valaient 0,91 pour le facteur d’intolérance et 0,72 pour celui d’évitement. L'alpha de Cronbach
pour l'ensemble de l'échelle était de 0,70. La fiabilité test-retest sur une période de 12 semaines
était acceptable (r facteur intolérance = 0,63, r facteur évitement = 0,66) (Schmidt et al., 2006).
La validité convergente de la DIS était soutenue par ses corrélations positives modérées avec
la sensibilité à l'anxiété et l'anxiété trait.
L’objectif principal de cette étude est de présenter les versions françaises de l'échelle de
tolérance à la détresse (DTS) et de l'échelle d’intolérance à l’inconfort (DIS). Nous avons traduit
ces deux échelles et examiné leurs structures factorielles en supposant que celles-ci mettraient
en évidence des structures factorielles identiques à celles des versions originales. Ensuite, nous
avons examiné leur validité interne et externe. Puisque les personnes ayant un faible niveau de
tolérance à la détresse ont tendance à considérer les expériences émotionnelles intenses comme
étant insupportables (Raykos et al., 2009; Simons & Gaher, 2005) et à utiliser des stratégies de
régulation émotionnelles non adaptées (Leyro et al., 2010), la DTS est supposée être
positivement corrélée à l’utilisation de stratégies de régulation émotionnelle adaptées tandis
que la DIS est supposée être positivement corrélée à des stratégies de régulation émotionnelle
inadaptées.
Méthode
Adaptation française des échelles
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Les traductions des échelles DTS et DIS ont été réalisées selon la procédure de rétro-
traduction décrite par Vallerand (1989). Conformément à cette procédure, les items des deux
échelles ont été traduits de l’Anglais au Français par la première auteure et rétro-traduits du
Français à l’Anglais par un expert bilingue. Les contradictions identifiées entre les versions
originales et les versions rétro-traduites ont été discutées jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé.
Les versions originales et traduites des deux questionnaires ont été proposées à 51 adultes
bilingues. Avant de compléter ces questionnaires, ces participants évaluaient leur niveau de
Français et d’Anglais. Il leur était demandé d’évaluer quatre types de compétences (lecture,
rédaction, compréhension, expression orale) sur une échelle en quatre points de type Likert (1 =
Très peu à 4 = Parfaitement) et ce, pour chacune des deux langues. Un score minimum de 12/16
pour chaque langue était nécessaire pour être inclus dans l’échantillon final. Ainsi, 32
participants ont complété les deux versions des questionnaires à quelques jours d’intervalle (16
dans l’ordre Français-Anglais, 16 dans l’ordre Anglais-Français ; les items étaient mélangés
entre les versions) (Annexe 1). Des tests t de Student ont été réalisés pour chaque item.
Puisqu’aucun test t n’était significatif (p < 0,05), les items peuvent être considérés comme
équivalents (p > 0,10). Par ailleurs, afin d’évaluer l’homogénéité des items entre les versions
originales et traduites, conformément aux recommandations de John et Benet-Martínez (2014)
et de Tavakol et Dennick (2011), des indices de consistance interne (alphas de Cronbach) ont
été calculés. L’alpha de Cronbach pour la DTS était de 0,93 et celui de la DIS de 0,90. Ces
traductions semblent donc correctes et acceptables.
Participants et procédure
Cet échantillon est composé de 488 adultes tout-venants (127 hommes, 361 femmes)
âgés en moyenne de 37,10 ans (intervalle = 18 – 80, É-T. = 14,85). Six pour cent de l'échantillon
n’ont pas obtenu de diplôme de l’enseignement secondaire supérieur, 29% ont obtenu un
diplôme de l’enseignement secondaire supérieur et 65% un diplôme d’études supérieures (type
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court ou type long). Cet échantillon est composé de 22% d’étudiants, 48% de travailleurs, 7%
de chômeurs, 9% de personnes à la retraite, 4% de personnes en congé de maladie et 9% d’«
autres » (les participants n'ont pas précisé leur statut professionnel).
Les participants ont rempli de façon anonyme un questionnaire en ligne. Le recrutement
s’est effectué par e-mails envoyés dans des contacts personnels ainsi que via des annonces sur
des réseaux sociaux (l'objectif de l'étude était décrit et un lien vers le sondage était disponible).
L’étude était composée d’un questionnaire de données sociodémographiques, des versions
françaises de la DTS et de la DIS et de trois autres questionnaires (questionnaire d’acceptation
et d’action, questionnaire des cinq facettes de la pleine conscience, questionnaire de régulation
cognitive et émotionnelle). L'administration de ces échelles faisait partie d'une étude plus large
menée par les auteures de cet article. Le comité d'éthique de la Faculté de Psychologie et des
Sciences de l’Education (Université de Liège) a évalué et approuvé ce protocole.
Questionnaires
Échelle de tolérance à la détresse (DTS) et échelle d’intolérance à l’inconfort (DIS). La DTS
évalue la capacité à résister à un inconfort émotionnel. Elle est composée de 15 items cotés sur
une échelle de type Likert en cinq points (1 = Tout à fait d'accord à 5 = Fortement en désaccord).
Selon Simons et Gaher (2005), le sous-facteur de tolérance (items 1, 3 et 5) évalue la capacité
à tolérer des états émotionnels pénibles, celui d’absorption (items 2, 4 et 15) évalue la mesure
dans laquelle l’attention est absorbée par les états émotionnels pénibles, celui d’évaluation
(items 6, 7, 9 10, 11 et 12) mesure l’évaluation subjective des états émotionnels pénibles, et
celui de régulation (items 8, 13 et 14) évalue les efforts mis en place pour diminuer la détresse
émotionnelle (la cotation de l’item 6 est inversée). Les scores des différents sous-facteurs
correspondent à la moyenne des items constituant le sous-facteur considéré tandis que le score
général de détresse équivaut à la moyenne des quatre scores des sous-facteurs. Des scores élevés
indiquent des niveaux élevés de tolérance à la détresse.
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La DIS évalue le manque de capacité à résister à l'inconfort physique. Elle est composée
de cinq items cotés sur une échelle de type Likert en sept points (0 = Pas du tout comme moi à
6 = Extrêmement comme moi) dont les scores varient de 0 à 30, les scores les plus élevés
indiquant de faibles capacités à tolérer l'inconfort physique. Selon Schmidt et al. (2006), la
dimension de l'intolérance à l’inconfort (items 1 et 2) évalue l’intolérance à l’inconfort physique
et celle de l'évitement de l’inconfort (items 3 à 5) évalue les comportements mis en place par
les individus afin d’éviter l’inconfort physique. Le score général d’intolérance à l’inconfort est
égal à la somme des cinq items. Les scores d’intolérance et d’évitement sont égaux à la somme
des items dont ils sont composés (la cotation des items 1 et 2 est inversée).
Questionnaire d’acceptation et d’action (Acceptance and action questionnaire, AAQ-2).
L'AAQ-2 vise à mesurer l'acceptation des états émotionnels négatifs et la flexibilité
psychologique. L'AAQ-2 est composé de 10 items cotés sur une échelle de type Likert en sept
points (1 = Jamais vrai à 7 = Toujours vrai) avec un total allant de 10 à 70, les scores les plus
élevés indiquant des niveaux élevés de flexibilité psychologique (Bond et al., 2011). La version
française de cette échelle a été utilisée dans cette étude (Monestès, Villatte, Mouras, Loas &
Bond, 2009).
Questionnaire des cinq facettes de la pleine conscience (Five facets mindfulness
questionnaire, FFMQ). Le FFMQ évalue le concept général de pleine conscience et cinq de
ses facettes (observation, description de l’expérience, action en pleine conscience, non-
réactivité aux événements privés, non-jugement de l'expérience intérieure) grâce à 39 items
cotés sur une échelle de type Likert en cinq points (1 = Jamais ou très rarement vrai à 5 = Très
souvent ou toujours vrai) (Baer et al., 2008). Un score total de pleine conscience peut être
calculé en additionnant tous les items. Des scores distincts pour chaque facette peuvent
également être obtenus en additionnant chaque item représentant la facette considérée. Des
scores élevés indiquent une plus haute tendance à la pleine conscience. La version française de
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cette échelle a été utilisée dans cette étude (Heeren, Douillez, Peschard, Debrauwere &
Philippot, 2011).
Questionnaire de régulation émotionnelle et cognitive (Cognitive emotional regulation
questionnaire, CERQ). Le CERQ évalue les stratégies de régulation émotionnelle via 36 items
cotés sur une échelle de type Likert en cinq points (1 = Presque jamais à 5 = Presque toujours)
(Garnefski, Kraaij & Spinhoven, 2001). Le CERQ est composée de neuf sous-échelles (1/blâme
de soi, 2/acceptation, 3/rumination, 4/centration positive, 5/centration sur l’action,
6/réévaluation positive, 7/mise en perspective, 8/dramatisation, 9/blâme d’autrui). Ces sous-
échelles peuvent être regroupées en deux scores plus généraux : stratégies de régulation
émotionnelle adaptatives (sous-échelles 2, 4, 5, 6 et 7) et stratégies de régulation émotionnelle
non-adaptatives (sous-échelles 1, 3, 8 et 9). Ces deux scores sont utilisés dans cette étude. Les
scores de chaque sous-échelle et des facteurs généraux sont obtenus en additionnant chaque
item correspondant à la sous-échelle ou au facteur considéré. Des scores élevés sur les deux
facteurs indiquent, d’une part, des niveaux de stratégies de régulation émotionnelle adaptatives
élevés et, d’autre part, des niveaux stratégies de régulation émotionnelle non-adaptatives élevés.
La version française de cette échelle a été utilisée dans cette étude (Jermann, Van der Linden,
d'Acrement & Zermatten, 2006).
Résultats
Analyses statistiques
Les structures factorielles des versions françaises de la DTS et de la DIS ont été
examinées via des analyses factorielles exploratoires et confirmatoires. Pour ce faire, les
participants (N = 488) ont été aléatoirement divisés en deux groupes : le premier pour réaliser
les analyses factorielles exploratoires (63 hommes, 181 femmes) et le second pour les analyses
factorielles confirmatoires (64 hommes, 180 femmes). Différents indices d’ajustement des
structures factorielles ont été sélectionnés conformément aux recommandations émises par
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Schweizer (2010) : 1) le χ² normé (le ratio du χ² du modèle sur le nombre de degrés de liberté :
sa valeur doit idéalement être inférieure à 2 mais est acceptable si elle est inférieure à 3), 2)
l’erreur quadratique moyenne de l’approximation – RMSEA (les valeurs inférieures à 0,05
indiquent une bonne adéquation, celles inférieures à 0,08 une adéquation raisonnable), 3)
l’indice comparatif de Bentler – CFI (les valeurs comprises entre 0,95 et 1,00 indiquent un bon
ajustement, celles entre 0,90 et 0,95 indiquent un ajustement acceptable) et l’indice de la racine
du carré moyen d’erreur – SRMR (les valeurs doivent être inférieures à 0,10). Enfin, l’écart
entre la matrice de covariance estimée et l’espérance de cette matrice – ECVI est également
rapporté (les plus petites valeurs indiquent un plus petit écart) (Browne & Cudeck, 1993).
Les validités interne et externe ont été explorées par le calcul de l'alpha de Cronbach et
les corrélations de Pearson, réalisés sur l’ensemble de l’échantillon. Le seuil de significativité
était fixé à p < 0,05. Au vu du nombre d’analyses statistiques effectuées, nous avons calculé
une valeur p ajustée avec la méthode du taux de fausses découvertes pour les analyses multiples
(Benjamini & Yekutieli, 2001). Cette méthode s’avère plus puissante que d’autres méthodes
telles que la correction de Bonferroni (Benjamini & Hochberg, 1995; Benjamini & Yekutieli,
2001). La correction Benjamini-Hochberg-Yekutieli a révélé une valeur critique de 0,009.
Échelle de tolérance à la détresse, DTS
Analyse factorielle exploratoire
La normalité univariée a été examinée par le calcul de l'asymétrie et de l'aplatissement
de chaque item. Aucune déviation importante par rapport à la normale n’a été observée puisque
l’asymétrie variait de -0,38 à 0,40 et l'aplatissement de -1,13 à 0,90 (Weston & Gore, 2006). La
corrélation item-total variait de 0,34 à 0,79 avec une moyenne de 0,66. La mesure de
l’adéquation de l’échantillonnage de Kaiser-Meyer-Olkin (KMO) et le test de sphéricité de
Bartlett ont indiqué que les 15 items de la DTS étaient adéquats pour l'analyse factorielle (KMO
= 0,93, χ² de Bartlett = 2245,24, p < 0,01) (Bartlett, 1954; Kaiser & Rice, 1974). Le test de la
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moyenne partielle minimum de Velicer et l'analyse parallèle réalisés sur les items de la DTS
recommandent de retenir un facteur (Velicer, 1976). Une analyse factorielle exploratoire a dès
lors été réalisée : cette solution à un facteur représentait 51,82% de la variance.
Analyse factorielle confirmatoire
La normalité univariée de la DTS a également été examinée dans le deuxième groupe
de participants. L'asymétrie variait de -0,45 à 0,59 et l’aplatissement de -1,15 à -0,27. Ces
valeurs n'ont révélé aucune forte déviation par rapport à la normalité (Weston & Gore, 2006).
Ainsi, des analyses factorielles confirmatoires ont été réalisées afin d'évaluer l'adéquation de la
solution à un facteur dans la version française de la DTS (Tableau 1). Cette solution à un facteur
a démontré un ajustement pouvant être amélioré puisque le χ² normé était égal à 3,59, le
RMSEA à 0,10, le CFI à 0,96, le SRMR à 0,07 et l’ECVI à 1,58 (Modèle A) (Bentler, 1990;
Schermelleh-Engel, Mossbrugger & Müller, 2003). Ainsi, la solution initiale à quatre facteurs
(tolérance, absorption, évaluation, régulation) avec un facteur d’ordre supérieur (tolérance à la
détresse) de Simons et Gaher (2005) a été testée dans cet échantillon. Cette solution a montré
un bon ajustement puisque le χ² normé était égal à 2,33, le RMSEA à 0,07, le CFI à 0,98, le
SRMR à 0,07 et l’ECVI à 1,09 (Modèle B) (Bentler, 1990; Schermelleh-Engel et al., 2003). Par
conséquent, nous recommandons de considérer cette solution à quatre facteurs avec un facteur
d'ordre supérieur comme étant la meilleure1.
Validités interne et externe
La cohérence interne de la DTS et de ses sous-échelles est élevée puisque les alphas de
Cronbach variaient de 0,78 pour la sous-échelle de régulation à 0,93 pour l'échelle totale
(Tableau 2)2. Conformément à nos attentes, chaque sous-échelle était positivement corrélée
avec la dimension « stratégies de régulation émotionnelle adaptatives » du CERQ, avec toutes
les facettes du FFMQ (description de l’expérience, action en pleine conscience, non-réactivité
1 Une figure présentant les saturations factorielles de la DTS est disponible sur demande auprès de la première
auteure. 2 Une table présentant l’effet de la suppression de chaque item de la DTS sur l’alpha de Cronbach est disponible
sur demande auprès de la première auteure.
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aux événements privés, non-jugement de l'expérience intérieure) à l'exception de celle de
l’observation et avec l’AAQ-2. Ces résultats mettent en évidence la validité convergente de la
DTS. La validité discriminante de la DTS était soutenue par les corrélations négatives entre les
sous-échelles de la DTS et la dimension « stratégies de régulation émotionnelle non-
adaptatives » du CERQ (Tableau 3).
Échelle d’intolérance à l’inconfort, DIS
Analyse factorielle exploratoire
La normalité univariée a été examinée comme pour la DTS et aucun écart important par
rapport à la normalité n’a été observé puisque l’asymétrie variait de -0,32 à 0,45 et
l'aplatissement de -0,79 à -0,42 (Weston & Gore, 2006). La corrélation item-total variait de 0,42
à 0,53 avec une moyenne de 0,47. La mesure d’adéquation de l’échantillonnage de Kaiser-
Meyer-Olkin (KMO) et le test de sphéricité de Bartlett ont indiqué que les cinq items de la DIS
étaient également adéquats pour l'analyse factorielle (KMO = 0,66, χ² de Bartlett = 258,37, p <
0,01) (Bartlett, 1954; Kaiser & Rice, 1974). Le test de la moyenne partielle minimum de Velicer
sur les items de la DIS recommande de conserver un facteur (Velicer, 1976). Une analyse
factorielle exploratoire a dès lors été réalisée : la solution à un facteur représentait 46,31% de
la variance.
Analyse factorielle confirmatoire
La normalité univariée de la DIS a également été examinée dans le deuxième groupe de
participants. L'asymétrie variait de -0,10 à 0,98 et l’aplatissement de -0,93 à -0,12 ce qui ne
révèle pas d’écarts importants par rapport à la normalité. Une analyse factorielle confirmatoire
a été réalisée pour évaluer la pertinence de cette solution à un facteur (Tableau 1). Les indices
d’adéquation indiquaient une adéquation pouvant être améliorée puisque le χ² normé était égal
à 20,08, le RMSEA à 0,28, le CFI à 0,72, le SRMR à 0,15 et l’ECVI à 0,50 (Modèle C) (Bentler,
1990; Schermelleh-Engel et al., 2003). Ainsi, la solution initiale à deux facteurs (intolérance,
évitement) avec un facteur d'ordre supérieur (intolérance à l’inconfort) de Schmidt et al. (2006)
a été évaluée et a montré une bonne adéquation puisque le χ² normé était égal à 1,88, le RMSEA
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à 0,06, le CFI à 0,99, le SRMR à 0,05 et l’ECVI à 0,12 (Modèle D) (Bentler, 1990; Schermelleh-
Engel et al., 2003)3.
Insérer ici le Tableau 1 à propos des indices d’ajustement des modèles
Validités interne et externe
La cohérence interne de la DIS et de ses sous-échelles est modérée puisque les alphas
de Cronbach variaient de 0,64 pour la sous-échelle d'évitement de 0,82 pour la sous-échelle de
l'intolérance (Tavakol & Dennick, 2011) (Tableau 2)4. L'alpha de Cronbach pour la sous-échelle
« évitement » peut sembler faible mais, puisque cette dimension n'est composée que de deux
items, cette valeur peut être considérée comme correcte (Tavakol & Dennick, 2011). La validité
convergente est soutenue par la corrélation positive entre la sous-échelle « évitement » et la
dimension « stratégies de régulation émotionnelle non-adaptatives » du CERQ. Conformément
à nos attentes, les corrélations négatives entre la DIS (total et sous-échelles de scores), les sous-
échelles de la DTS, la sous-échelle « stratégies de régulation émotionnelle adaptatives » du
CERQ, l'AAQ-2 et la sous-échelle « non-réactivité aux événements privés » du FFMQ
soutiennent la validité discriminante de cette échelle. La sous-échelle « intolérance » de la DIS
était également négativement corrélée avec le score total de la FFMQ et avec ses sous-échelles
« observation » et « description de l’expérience », ce qui soutient également la validité
discriminante de l'échelle. Les tables des centiles pour les échelles DTS et DIS sont disponibles
sur demande auprès de la première auteure.
Insérer ici le Tableau 2 à propos statistiques descriptives et alphas de Cronbach
Insérer ici le Tableau 3 à propos des validités interne et externe
Discussion
3 Une figure présentant les saturations factorielles de la DIS est disponible sur demande auprès de la première
auteure. 4 Une table présentant l’effet de la suppression de chaque item de la DIS sur l’alpha de Cronbach est disponible
sur demande auprès de la première auteure.
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L'objectif de cette étude était de valider les versions françaises de l'échelle de tolérance
à la détresse développée par Simons et Gaher en 2005 et de l'échelle d'intolérance à l’inconfort
développée par Schmidt et al. en 2006. Cette recherche visait également à présenter les
propriétés psychométriques des versions traduites de ces deux échelles. Les résultats sont
satisfaisants et apportent des éléments de validation des versions françaises de la DTS et de la
DIS5.
Afin de créer les versions françaises de la DTS et de la DIS, la procédure de validation
transculturelle de Vallerand (1989) a été utilisée. Conformément à cette procédure, des alphas
de Cronbach présentant les consistances internes entre les versions de ces échelles ont été
calculés et ont démontré des valeurs permettant de conclure à une homogénéité des deux
versions des questionnaires. L’utilisation conjointe d’un coefficient kappa de Cohen aurait
également été pertinente, permettant aux participants bilingues de juger eux-mêmes du degré
de ressemblance des deux versions (Heyman, Lorber, Eddy & West, 2014).
Bien que l'analyse factorielle exploratoire menée sur la DTS ait recommandé
l’utilisation d’une solution à un facteur, les résultats de l’analyse factorielle confirmatoire
mettent en évidence qu’une solution à quatre facteurs (tolérance, absorption, évaluation,
régulation) avec un facteur d'ordre supérieur (tolérance à la détresse générale) présente un
meilleur ajustement ce qui corrobore les résultats obtenus par Simons et Gaher (2005). En ce
qui concerne la DIS, bien que l’analyse factorielle exploratoire ait suggéré une solution à un
facteur, l’analyse factorielle confirmatoire a démontré que la solution initiale à deux facteurs
(intolérance, évitement) avec un facteur d'ordre supérieur (intolérance à l’inconfort) était un
meilleur ajustement ce qui corrobore également les résultats obtenus par Schmidt et al. (2006).
L’ensemble de ces résultats confirment, d’une part, l’intérêt d’appréhender le concept de
« tolérance à la détresse pour des états émotionnels négatifs » comme étant hiérarchique et
5 Les versions françaises du DTS et du DIS, utilisées dans cette étude, ainsi que les fichiers de cotation sont
disponibles sur demande auprès de la première auteure.
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composé de sous-facettes et d’autre part, l’importance de différencier les sous-facettes de
l’intolérance à l’inconfort. Ensemble, ces deux concepts donnent une représentation partielle
de l’axe de la perception de la tolérance à la détresse.
Les propriétés psychométriques de la DTS et celles de la DIS sont satisfaisantes. En
effet, les alphas de Cronbach indiquent que les consistances internes de ces deux échelles sont
satisfaisantes. La validité convergente de la DTS était soutenue par ses corrélations positives
avec les mesures de stratégies de régulation émotionnelle adaptatives, de pleine conscience et
de flexibilité psychologique. La validité discriminante de la DTS et la validité convergente de
la DIS ont été mises en évidence par leurs corrélations avec les mesures de stratégies de
régulation émotionnelle non-adaptatives. Il est cependant intéressant de souligner l’absence de
corrélation entre la DTS et la sous-dimension « observation » du questionnaire des cinq facettes
de pleine conscience. Cette absence de corrélation met en évidence une différence entre ces
deux échelles bien qu’elles se focalisent toutes deux sur la régulation des émotions. Ainsi, la
DTS semble davantage évaluer la capacité à résister à un inconfort émotionnel alors que la
sous-dimension « observation » du questionnaire des cinq facettes de pleine conscience semble
évaluer la capacité à observer l’inconfort émotionnel, sans jugement. Une utilisation combinée
de ces deux échelles semblent dès lors pertinente puisqu’elle permettrait de savoir comment la
personne prend conscience de son inconfort et comment elle y fait face. Par ailleurs, il nous
semble intéressant de souligner la corrélation négative existant entre la sous-dimension
« intolérance » de la DIS et la sous-dimension « observation » du FFMQ. Cette corrélation
semble confirmer l’utilité des stratégies thérapeutiques proposées par les thérapies
d’acceptation et d’engagement ou par les exercices de pleine conscience. En effet, selon ces
stratégies, afin d’augmenter la tolérance à la détresse générale et à ses différentes facettes dont
l’intolérance à l’inconfort, il est important d’observer sans jugement les sensations désagréables
ressenties (Hayes et al., 2013).
TITRE: Versions françaises de la Distress Tolerance Scale et de la Discomfort Intolerance Scale
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Grâce à la validation en Français de la DTS et de la DIS, les cliniciens psychologues ou
psychiatres et chercheurs de ces disciplines disposent de nouveaux outils de mesure qui leur
permettront d’affiner les diagnostics psychologiques et d’évaluer l’efficacité des prises en
charge proposées. Ceci répond également aux exigences émises par les Codes de Déontologie
des psychologues belges et français (Commission des Psychologues, 2014 ; Commission
Nationale Consultative de Déontologie des Psychologues, 2012). En effet, l’article 31 du Code
de Déontologie des psychologues belges et l’article 24 de celui des psychologues français
insistent sur l’importance d’utiliser des outils scientifiquement validés afin d’évaluer l’impact,
positif ou non, des interventions psychologiques pratiquées. De plus, la DTS et la DIS semblent
être des outils d’évaluation particulièrement intéressants puisque la tolérance à la détresse est
une dimension pertinente du fonctionnement psychologique aussi bien chez des personnes
soignées pour des problèmes psychologiques spécifiques que chez des individus tout-venants
(Mitchell, Riccardi, Keough, Timpano & Schmidt, 2013). En effet, Mitchell et al. (2013) ont
mis en évidence que, d’un point de vue factoriel, la tolérance à la détresse en relation avec la
sensibilité à l’anxiété et l’intolérance à l’inconfort se comporte de la même façon chez des
individus souffrant de problèmes psychologiques et chez des individus tout-venants.
La perception de la tolérance à la détresse recouvre différentes conceptualisations
(tolérance à la détresse pour des états émotionnels négatifs, intolérance de l'inconfort, tolérance
de l'ambiguïté, intolérance à l'incertitude et tolérance à la frustration) (Leyro et al., 2010). Par
conséquent, il semble particulièrement pertinent de combiner l’utilisation de l’échelle de
tolérance à la détresse et de l’échelle d’intolérance à l’inconfort, avec d’autres telles que, par
exemple, le questionnaire d’intolérance à l’incertitude (Freeston, Rhéaume, Letarte, Dugas &
Ladouceur, 1994). Cette combinaison permettra d’obtenir une vision plus globale des capacités
de tolérance à la détresse générale des clients ce qui précisera le bilan du leur fonctionnement
psychologique. Dans cette idée, la traduction et la validation d’échelles évaluant les autres
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conceptualisations de la tolérance à la détresse générale à savoir la tolérance à l’ambiguïté (e.g.,
la MAT-50 de Norton, 1975) et la tolérance à la frustration (e.g., Harrington’s Frustration-
Discomfort Scale de Harrington, 2005) pourraient s’avérer intéressantes. En effet, ces échelles
permettraient une évaluation exhaustive de la tolérance à la détresse générale telle que
conceptualisée par Leyro et al. (2010), ce qui affinera d’autant plus le bilan du fonctionnement
psychologique et la sélection des interventions psychologiques. Par ailleurs, il serait également
intéressant d’étudier les liens pouvant exister entre la perception de la tolérance à la détresse et
d’autres concepts tels que la réactivité émotionnelle, notamment mesurée par l’échelle de
réactivité émotionnelle (Lannoy et al., 2014). Nock et al. (2010) définissent la réactivité
émotionnelle comme étant « la façon avec laquelle un individu expérimente les émotions (1) en
réponse à une large gamme de stimuli (sensibilité émotionnelle), (2) de façon forte et intense
(intensité émotionnelle) et (3) pour une longue durée avant de retrouver un état d’activation
émotionnelle de base (persistance émotionnelle) ». L’évaluation de ces trois aspects de la
réactivité émotionnelle, réalisée via l’échelle de réactivité émotionnelle, semblent compléter les
quatre aspects de la tolérance à la détresse, évalué par l’échelle de tolérance à la détresse, à
savoir la tolérance, l’absorption, l’évaluation et la régulation. Les différentes combinaisons des
évaluations proposées ci-dessus permettront d’affiner le bilan du fonctionnement
psychologique de nos clients ainsi que leur prise en charge.
Cette étude présente certaines limites. Tout d'abord, l'échantillon avait un niveau
d'éducation élevé et est principalement composé de femmes. Ainsi, l'utilisation de la DTS et de
la DIS dans d'autres échantillons doit être faite avec prudence. Par ailleurs, les participants n'ont
pas été recrutés dans les milieux cliniques, il pourrait ainsi être intéressant d'évaluer la structure
factorielle de la DTS et de la DIS dans des échantillons cliniques. Enfin, il serait intéressant
d’évaluer les liens qui pourraient exister entre les concepts de tolérance à la détresse pour les
états émotionnels négatifs, l’intolérance à l’inconfort et la réactivité émotionnelle.
TITRE: Versions françaises de la Distress Tolerance Scale et de la Discomfort Intolerance Scale
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Conclusion
Les versions françaises de la DTS et de la DIS semblent être des évaluations fiables de
l’axe de la perception de la tolérance à la détresse. Par conséquent, ces deux échelles peuvent
être utilisées comme outils de dépistage dans la recherche et la pratique clinique. Compte tenu
de l'intérêt de ces deux échelles, il pourrait être intéressant de les traduire et de les valider dans
d'autres langues que l'Anglais et le Français.
REMERCIEMENTS
Cette recherche a été financée par une bourse de doctorat subventionnée par le « Fonds
national belge de la recherche scientifique » (FNRS-FRESH accordée à Aurélie Wagener). Le
FNRS-FRESH n'a exercé aucune influence sur ce document. Nous remercions également les
auteurs des échelles originales pour avoir autorisé leur traduction et leur validation en Français.
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TITRE: Versions françaises de la Distress Tolerance Scale et de la Discomfort Intolerance Scale
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Annexe 1. Versions originale et traduite de la DTS.
Version originale Version traduite Dimension
1. Feeling distressed or upset is unbearable to me. 1. Me sentir tourmenté(e) ou contrarié(e) m’est
insupportable.
Tolérance
2. When I feel distressed or upset, all I can think about is
how bad I feel.
2. Quand je me sens tourmenté(e) ou contrarié(e), la seule
chose à laquelle je pense est l’intensité de ma détresse.
Absorption
3. I can’t handle feeling distressed or upset. 3. Je ne supporte pas me sentir tourmenté(e) ou
contrarié(e).
Tolérance
4. My feelings of distress are so intense that they
completely take over.
4. Mon sentiment de détresse est si intense qu’il m’envahit
complètement.
Absorption
5. There’s nothing worse than feeling distressed or upset. 5. Il n’y a rien de pire que de se sentir tourmenté(e) ou
contrarié(e).
Tolérance
6. I can tolerate being distressed or being upset as well as
most people.
6. Ma tolérance à la détresse ou à la contrariété est
comparable à celle de la majorité des gens.
Évaluation
7. My feelings of distress or being upset are not
acceptable.
7. Mon sentiment de détresse ou de contrariété n’est pas
acceptable.
Évaluation
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8. I’ll do anything to avoid feeling distressed or upset. 8. Je ferais n’importe quoi pour éviter de me sentir
tourmenté(e) ou contrarié(e).
Régulation
9. Other people seem to be able to tolerate feeling
distressed or upset better than I can.
9. Les autres semblent davantage capables que moi de
tolérer les sentiments de détresse ou de contrariété.
Évaluation
10. Being distressed or upset is always a major ordeal for
me.
10. Être tourmenté(e) ou contrarié(e) est toujours une
épreuve majeure pour moi.
Évaluation
11. I am ashamed of myself when I feel distressed or upset. 11. J’ai honte de moi-même quand je me sens tourmenté(e)
ou contrarié(e).
Évaluation
12. My feelings of distress or being upset scare me. 12. J’ai peur de mon sentiment de détresse ou de contrariété. Évaluation
13. I’ll do anything to stop feeling distressed or upset. 13. Je ferais n’importe quoi pour cesser de me sentir
tourmenté(e) ou contrarié(e).
Régulation
14. When I feel distressed or upset, I must do something
about it immediately.
14. Quand je me sens tourmenté(e) ou contrarié(e), je dois
immédiatement y remédier.
Régulation
15. When I feel distressed or upset, I cannot help but
concentrate on how bad the distress actually feels.
15. Quand je me sens tourmenté(e) ou contrarié(e), je ne
peux pas m’empêcher de me concentrer sur l’intensité de
la détresse ressentie.
Absorption
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Annexe 2. Versions originale et traduite de la DIS.
Version originale Version traduite Dimension
1. I can tolerate a great deal of
physical discomfort.
1. Je suis capable de tolérer un haut
degré d’inconfort physique. Intolérance
2. I have a high pain threshold. 2. Mon seuil de tolérance à la
douleur est élevé. Intolérance
3. I take extreme measures to avoid
feeling physically
uncomfortable.
3. Je prends des mesures extrêmes
pour éviter de ressentir un
inconfort physique.
Évitement
4. When I begin to feel physically
uncomfortable, I quickly take
steps to relieve the discomfort.
4. Quand je commence à ressentir
un inconfort physique, je prends
des mesures rapides pour
soulager cet inconfort.
Évitement
5. I am more sensitive to feeling
physical discomfort compared
to most people.
5. Je suis plus sensible à l’inconfort
que la plupart des personnes. Évitement
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