View
263
Download
6
Category
Preview:
DESCRIPTION
Catalogue d'exposition édité par le Conseil Général de la Corse-du-Sud, à l'occasion de l'exposition au Lazaret Ollandini, à Ajaccio, à l'automne 2009.
Citation preview
orsedu
La
par le charme de l’aquarelleudC S
uzanneS ornillac - 1904-1982C
orsedu
La
par le charme de l’aquarelle
uzanne
udC SS ornillac
1904-1982
C
Catalogue réalisé par Pierre Claude Giansily
Conservateur des antiquités et objets d’art du département de la Corse-du-Sud
À l’occasion de l’exposition au lazaret Ollandini, musée-Marc PetitAjaccio
Automne 2009
IIl m’est apparu utile de favoriser le moyen de mieux faire connaître le
Département de la Corse-du-sud.
Certes des supports plus classiques y sont utilisés, que ce soit le magazine
trimestriel ou des publications plus spécialisées.
De même, il y a quelques années, un guide du Département de la Corse-
du-sud, a été édité sous l’égide sur Conseil général de la Corse-du-sud.
Cette fois, avec la publication de cet ouvrage, « La Corse-du-sud par le
charme de l’aquarelle », c’est un mode particulier qui est utilisé pour
valoriser notre département.
Réalisé par Pierre Claude Giansily, il met en exergue le travail artistique
de Suzanne Cornillac qui, pendant trente ans, a parcouru le territoire
départemental pour en capter la magie des lieux.
Vous pourrez ainsi, en parcourant cet ouvrage, retrouver ou découvrir
maints aspects de ce si beau territoire, que le Conseil général de la Corse-
du-sud s’attache, par la mise en oeuvre de ses politiques publiques, à
développer tout en veillant à le préserver.
Je vous invite au voyage, au travers de chacune des pages de ce bel ouvrage.
Jean-Jacques Panunzi,
Président du Conseil général de la Corse-du-sud
du Conseil général de Corse-du-sudLe mot du président
Sommaire
Première partieSuzanne Cornillac : une vie consacrée à l’expression figurative et à l’écriture ............................. 1
L’enfance de Suzanne et sa formation artistique à Paris ................................................................................. 1
Les années vingt : la Provence et le Sud...................................................................................................................... 4
Suzanne Cornillac et la Corse : 1935, découverte de l’île................................................................................. 6
Les années à Nice : 1938-1956 ........................................................................................................................................ 10
Retour à Paris et région parisienne ............................................................................................................................. 14
Les liens réguliers de Suzanne Cornillac avec la Corse-du-Sud ............................................................... 15
Deuxième partieDessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse .............................................................................. 19
Girolata, Cargèse et la vallée de la Gravona ......................................................................................................... 21
L’Ajaccio de Suzanne Cornillac..................................................................................................................................... 27
Le Sud : Propriano, Fozzano, Sartène, Bonifacio ............................................................................................. 33
Le Nord de la Corse : Bastia, Corte, Vizzavona.................................................................................................. 59
Troisième partieRegards sur d’autres lieux .............................................................................................................................................. 65
Drôme, Aveyron, Provence et Côte d’Azur............................................................................................................ 65
Paris et région parisienne................................................................................................................................................. 72
Quatrième partieLes techniques de Suzanne Cornillac, par Catherine Van den Driessche........................................ 75
Suzanne Cornillac illustrateur et auteur littéraire........................................................................................... 77
Suzanne Cornillac, a 40 ans
par Pierre Claude GiansilyIntroductionLLa peinture de Suzanne Cornillac est un univers
particulier, presque un monde à part tant il est vaste
et diversifié par ses sujets ; domaine sans cesse
renouvelé, toujours étonnant par ses compositions
et ses harmonies de couleurs. En parler est un grand
plaisir car c’est une façon de poursuivre son but
qui était de nous montrer la beauté des lieux et des
choses, la nature et la vie.
Présenter Suzanne Cornillac, c’est évoquer et
montrer le travail, réalisé au cours d’une
cinquantaine d’années dans plusieurs régions
françaises et en Corse, par cette femme au destin si
particulier. Sa vie est à l’image de sa personnalité
et du genre de femme qu’elle a été : une femme à
l’évidence en avance sur son temps, d’une certaine
manière un peu anticonformiste, qui aimait se fixer
des défis, n’avait pas froid aux yeux et voulait
s’exprimer par la peinture et par l’écriture.
La découverte et l’amour de la Corse sont pour
Suzanne Cornillac une affaire de hasard… et de
hasard chanceux… C’est en 1935 qu’elle vient en
Corse sur les conseils d’Émile Ripert, et les circons-
tances font qu’elle séjournera plusieurs mois dans
la tour de Girolata. Peut-on trouver plus bel endroit
pour découvrir la Corse ? Elle y reviendra et
découvrira la Rocca et Fozzano… et y séjournera…
Elle a réalisé de très nombreuses vues de villages
de Corse ainsi que d’Ajaccio ; elle s’est imprégnée
de sa région d’adoption, Fozzano et du Sartenais.
Comme artiste, Suzanne Cornillac se fait progres-
sivement un nom en Corse ; elle est appréciée pour
ses talents et son dynamisme. Sa vie est
passionnante et pleine, en raison de la diversité des
activités qu’elle a déployées tout au long des années
car elle est l’amie des peintres, des écrivains, des
musiciens. Suzanne Cornillac participe activement
à la vie artistique et culturelle corse de cette époque
en relation avec les peintres comme Rifflard, ou
Fabri-Canti, les photographes comme Ange Tomasi,
les écrivains comme Émile Ripert, Paul Arrighi,
Petru Santu Leca ou Roccu Multedo, les musiciens
comme Toni Rocca ou Marfisa.
Suzanne Cornillac a toujours voulu et su rester elle-
même. Elle n’a jamais été attirée par la facilité, les
sujets à la mode, les types corses ou les paysages
pour touristes. Pas d’académisme non plus dans
son art mais une recherche permanente pour être
fidèle à sa formation, à ses idéaux et on appréciera
également son évolution dans sa démarche créatrice,
ses recherches, les techniques utilisées pour aboutir
à une maîtrise parfaite des sujets choisis et parvenir
à l’excellence.
On découvrira, dans l’importante production de
Suzanne Cornillac, la rudesse de ses dessins aux
crayons et à l’encre et la dureté de ses aquarelles
rehaussées de fusains sombres ; et aussi, et surtout,
la légèreté de ces aquarelles : pures, pleines de
lumière, de couleurs et de nuances, avec des compo-
sitions et mises en pages parfaites, pour traduire
nos paysages et ceux des régions françaises qu’elle
a traversées et où elle a vécu. Elle a ainsi traduit, et
c’était sa volonté, des lieux vivants, vibrants, pleins
de vie, pas figés du tout.
Peintre de paysages et de lieux où elle est appelée
ou bien qu’elle sélectionne avec soin et qu’elle
dessine et peint à l’aquarelle d’une manière très
délicate, elle a vécu et visité différentes régions
qu’elle a rendues avec son art si particulier. C’est
Paris, où elle a suivi son enseignement artistique
sous la houlette de Pierre Vignal, un maître
aquarelliste, c’est la Provence, la Côte-d’Azur… et
la Corse où elle vécut longtemps et qui occupe la
plus grande part dans son œuvre peint. Elle a aussi
décrit la région du Sud de Paris où elle passa les
quinze dernières années de sa vie entrecoupées par
ses voyages réguliers en Corse-du-Sud, là où tous
les ans de 1949 à 1980, entre juillet et octobre, elle
était sûre de trouver « ses » lieux d’inspiration.
Suzanne Cornillac tient une place toute particulière
dans l’histoire de la peinture corse de la deuxième
moitié du XXe siècle car elle est la seule artiste de
son temps à poursuivre la tradition des meilleurs
aquarellistes de l’École d’Ajaccio : François
Corbellini et Lucien Peri.
Dans leur sillage, Suzanne Cornillac nous emmène
découvrir des lieux à la magie cachée. Comme chez
Corbellini, on retrouve chez elle des scènes animées
d’Ajaccio, des quais, des ruelles où le linge sèche
entre les maisons et le chatoiement des couleurs
vives, de la ville et de la campagne. Comme chez
Lucien Peri, on part avec elle à la découverte
d’endroits inattendus, en pleine nature, et on
retrouve dans le travail de Cornillac ces plans
agencés avec brio, donnant des paysages dans
lesquels le spectateur reconnaît sa Corse. Comme
Lucien Peri, elle a le mieux traduit ces paysages de
la Rocca, du Taravo, Sartène, Bonifacio… et c’est
avec Peri que le « relais » est le mieux passé à la
disparition de celui-ci, en 1948.
Suzanne Cornillac a connu un franc succès en
Corse à une période où la peinture traversait des
étapes difficiles. À la fin des années trente et après
la guerre où l’activité artistique était réduite, les
années cinquante ont été celles au cours desquelles
peu d’artistes étaient en vogue ou simplement en
activité ; c’est une période de préparation de la
transition qui se produira dans les années soixante
et soixante-dix pour changer radicalement dans
les années quatre-vingt, avec un renouveau
culturel plus général touchant la littérature, le
théâtre, la musique, le chant, et les arts plastiques
également.
Suzanne Cornillac a ainsi poursuivi ce travail de
création des images icônes de la Corse avec ses
pinceaux, ses fusains et ses crayons ; avec ses sujets
simples et familiers, à taille humaine. Elle est ainsi
le meilleur illustrateur de la Corse-du-Sud de notre
époque, de ces paysages qu’elle a su rendre, avec
leur aspect intemporel, pour notre plaisir de ce jour.
L’enfance de Suzanne et sa formation artistique à ParisSuzanne Cornillac naît à Paris, le 20 décembre 1904.
Son père, Alfred Cornillac est négociant en liqueurs ;
il a une usine à Aubervilliers et un magasin à Paris,
rue de l’Échiquier, dans le 10e arrondissement. Sa
mère, Marie-Elise Sornin (dite Élise), est modéliste
pour la maison de haute couture Paquin.
Suzanne est élevée comme une fille unique puisque
Marie, née dix ans avant elle, est décédée à l’âge de
trois ans. Suzanne passe une enfance heureuse et
reçoit une excellente éducation, complétée par une
formation musicale. En 1913, ses parents quittent
la région parisienne pour s’installer dans la Drôme,
à Valence. Son père décide de changer d’activité,
implante des lavandes à Portes lès Valence et produit
de l’essence à l’usage des parfumeurs. Cette
harmonie familiale est brisée très peu de temps
après, en 1914, quand Suzanne Cornillac perd sa
1
Ci-dessus : Élise et Suzanne Cornillac. Photo dans le parc d’ErmenonvilleCi-contre : Alfred Cornillac, Élise et Suzanne. Photo dans le parcd’Ermenonville.
Photos © Raphaël Van den Driessche
Première partieSuzanne Cornillac : une vie consacrée
à l’expression figurative et à l’écriture
mère. Son père se charge d’elle et veille à son
éducation et à sa formation. Il engage Léontine
Deveye qui vient de perdre son mari, pour gérer
sa maison et d’occuper de Suzanne. Elle viendra
vivre chez eux avec sa fille Simone, alors âgée de
deux ans.
Suzanne fera toute sa scolarité dans un
établissement privé de Valence. Comme elle montre
très tôt des dispositions pour le dessin, le professeur
qui enseigne au collège de Valence l’encourage à
continuer dans cette voie. Ces encouragements, dont
elle évoquera plus tard le souvenir, auront pour elle
une grande importance. C’est au lycée de Valence
qu’elle obtient son diplôme de fin d’études. Elève
brillante et douée, elle étudie également le piano et
souhaite ardemment devenir concertiste, mais une
blessure à la main lui abîme un tendon et elle est
contrainte de renoncer à cette passion.
Après son diplôme de fin d’études, son père, qui a
lui même un très bon coup de crayon, voyant son
intérêt pour le dessin, décide de l’envoyer à Paris
pour étudier la peinture à défaut de pouvoir
satisfaire sa passion pour la musique. Suzanne
Cornillac résidera chez son oncle. Dans la capitale,
le destin lui sourit puisqu’elle est admise, en 1922,
à suivre les cours de Pierre Vignal 1, peintre de renom
et très bon pédagogue. De plus, le cadre est idéal
car la jeune fille et les autres élèves sont installés
dans un bel atelier du quai Voltaire sur les bords de
Seine, qui fut l’ancien atelier d’Ingres.
Pierre Vignal, grand spécialiste de l’aquarelle 2 aura
une influence déterminante sur sa carrière et le
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
2
Portrait de SimoneUn des premiersdessins de SuzanneCornillac à l’âge de 19ans© Raphaël Van den Driessche
Ci-dessous, de gauche à droite (Photos© Raphaël Van den Driessche) :•Suzanne Cornillac à l’âge de quatorze ans•Suzanne Cornillac à l’âge de dix-neuf ans•Suzanne Cornillac à l’âge de dix-neuf ans, à Valence
1. Pierre Vignal (1855-1925) aété élève d’Harpignies, peintrede l’école de Barbizon etd’Auvers-sur Oise, précurseurde l’impressionnisme. Il a menéune belle carrière mise encorerécemment en lumière par uneexposition hommage auBouscat en Gironde, sa villenatale en 2001 et peintabondamment au cours deses nombreux voyages en Italieet en Orient.2. Il a illustré de très nombreuxouvrages au cours des annéesvingt dont, en 1922, « Au borddu Rhône de Lyon à Arles », deGabriel Faure, en 1925, « L’Artet le ciel vénitiens » de CamilleMauclair, en 1926, « Villes d’Artde l’Italie du Nord : Milan,Bergame, Brescia, Vérone,Vicence, Bassano », en 1927,« Rome » de Gabriel Faure, et« Le visage de Jérusalem »d’Henry Bordeaux avec desaquarelles très lumineuses.
choix qu’elle fera de se consacrer quasiment unique-
ment à cette technique, qu’elle n’aura de cesse de
perfectionner tout au long de son activité artistique.
Excellent pédagogue, qui emmène ses élèves peindre
sur le motif, son enseignement des bases de
l’aquarelle sera déterminant pour Suzanne Cornillac
qui le mettra en pratique tout au long de sa carrière
et qui évoquera souvent ce maître.
En 1924, l’année de ses vingt ans, Pierre Vignal
estime qu’elle a suffisamment de maîtrise et de
talent et la présente au Salon des Artistes français ;
admise, elle est cette année-là, la plus jeune
exposante du Salon.
En novembre de la même année Suzanne Cornillac
expose à Nyons, région d’origine de son père,
exposition dont on ne connaît ni le contenu ni le
succès. Il est certain que ces deux initiatives
hardies la renforcent dans son désir de peindre.
D’ailleurs, elle ne cessera jamais de peindre,
malgré les épreuves personnelles, et ceci jusqu’à
la fin de sa vie.
Lorsqu’elle termine sa scolarité en 1925,
notamment en raison de la disparition de Pierre
Vignal, Suzanne Cornillac maîtrise très bien les
différentes techniques des modes d’expression de
la représentation physique : dessin, aquarelle,
sépia… ce qui lui permettra d’être un excellent
peintre de paysages, de lieux habités, mais aussi
une illustratrice hors pair. C’est ainsi, et grâce à
son audace et à sa détermination qu’elle se fera
reconnaître rapidement, ce qui lui procurera très
vite une certaine autonomie.
PREMIÈRE PARTIE. Suzanne Cornillac : une vie consacrée à l’expression figurative et à l’écriture
3
Esquisse à l’aquarelle de Pierre Vignal représentant l’atelier, vers 1922Collection Pierre Vignal (fils). © Raphaël Van den Driessche.
Photo de l’atelier du quai Voltaire.Collection Pierre Vignal (fils). © Raphaël Van den Driessche.
Ci-contre, de gauche à droite : •Portrait de Pierre Vignal, vers 1920•Pierre Vignal et ses élèves au jardin du LuxembourgCollection Pierre Vignal (fils). © Raphaël Van den Driessche-DR
Les années vingt : la Provence et le SudL’année 1927 est un mélange d’événements familiaux
très contrastés pour Suzanne Cornillac qui perd son
père et se marie quelques mois plus tard avec Yves
Sadoul de Trémines. Malgré ses charges de famille,
elle poursuit sa vocation d’artiste : elle sillonne la
Provence où elle a rapidement une clientèle pour ses
aquarelles. Les relations établies quelques années en
arrière à Valence lui sont également très utiles. Ainsi,
Suzanne Cornillac a l’occasion de séjourner réguliè-
rement au Palais du Roure 3, chez Jeanne de
Flandreysy, qui est originaire de Valence. Celle-ci
aura une très grande influence sur la jeune femme
en l’incitant et en l’encourageant à poursuivre une
carrière de peintre. Elle sera aussi une amie fidèle et
un soutien moral dans les moments difficiles. La
fréquentation du Palais du Roure, lieu culturel où se
côtoient artistes et intellectuels, va participer très
largement à son évolution personnelle et va fortement
l’encourager et la fortifier dans sa vocation artistique.
On le constate en découvrant qu’un grand nombre
de ses dessins figurent dans les collections de ce lieu
qui est maintenant un musée 4 réputé. Suzanne
Cornillac a ainsi laissé au Palais du Roure un souvenir
encore très vivace aujourd’hui car elle a joué un rôle
très important dans l’histoire de cette institution. On
le constate aussi en comptant le nombre de livres
édités par « Les amis du palais du Roure » au cours
des années trente comportant des illustrations de sa
main : dessins à l’encre ou aquarelles.
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
4
Ci-contre : La maison au lézard, 1957. © Raphaël Van den Driessche
Ci-dessus, de haut en bas :•La maison de roumanille illustration du livre « Avignon au XIXe siècle –La Librairie Roumanille » d’Emile ripert. Dessin. © Raphaël Van den Driessche•Jeanne de Flandreysy, Portrait par Helleu. © Archives iconographiquesdu Palais du Roure, Avignon. DR
3. Le Palais du Roure enAvignon, est un haut lieu de laculture et des traditions proven-çales. Au XIXe siècle, l’hôtel deBaroncelli-Javon est désignépar Mistral qui le fréquentaitassidûment sous le nom dePalais du Roure (palais duchêne) ; il devient alors un foyerdu « félibrige », mouvement pourla renaissance de la cultureprovençale. En 1908, l’Hôtel estvendu par la famille, puis, aprèsavoir subi des préjudices consi-dérables, il est sauvé en 1918par Jeanne de Flandreysy, origi-naire de Valence. Femmeénergique et déterminée, colla-boratrice de Jules-Charles Roux,le mécène marseillais, grandeadmiratrice et amie de Mistral,elle décide alors de seconsacrer corps et âme pourrendre son prestige au lieu. Dèsl’achèvement des travaux deremise en état, elle entreprendd’y créer un foyer de cultureméditerranéenne. Son mariage,en 1936, avec le commandantEspérandieu, éminent archéo-logue et membre de l’Institut,apporte une dimension nouvelleà l’institution, par la création dela Fondation Flandreysy-Espérandieu, dont la villed’Avignon héritera par donationen 1944. De nos jours, le Palaisdu Roure est un « muséed’atmosphère », avec descollections très diversifiées et unimportant domaine consacré àl’ethnographie provençale.4. Le Palais du Roure, conservedans ses collections unnombre important de sesœuvres dont certaines sontexposées en permanence etd’autres ponctuellement, lorsd’expositions temporaires. Unhommage sera rendu àJeanne de Flandreysy en 2009au cours des festivités organi-
PREMIÈRE PARTIE. Suzanne Cornillac : une vie consacrée à l’expression figurative et à l’écriture
5
sées pour le 150e anniversairede la publication de « Mireille »de Frédéric Mistral.5. Émile Ripert (1882-1948), estun universitaire renommé etromancier, spécialisé dans lalittérature provençale, Mistral enparticulier, et auteur de théâtre.Il connaît très bien la Corse qu’ila sillonnée pendant plus devingt ans pour y faire passer lebaccalauréat. Il a vu dans l’îlede Beauté une sorte deProvence restée plus intacte etun conservatoire embaumé detraditions et de légendes.Auteur prolifique, en poésie eten prose, il écrit en 1927 Ledernier vol de l’Aigle, romancorse, qui lui apporte unecertaine notoriété au sein desécrivains, forts nombreux àcette époque, ayant choisi laCorse pour sujet.
En Avignon, Suzanne Cornillac rencontre de
nombreux artistes, peintres, poètes, écrivains et fait
la connaissance d’Émile Ripert 5 avec qui elle entre-
tiendra pendant plus de vingt ans une grande amitié
et une collaboration artistique par des illustrations.
Vers 1935 et 1936, elle séjourne à Sainte Egrève,
dans l’Isère ; elle est invitée au Château du Muret
par le Comte et la Comtesse de Marcieu, née
Françoise de Clermont-Tonnerre. Elle consacre
alors une partie de ces séjours à peindre des
aquarelles dans le domaine.
Ci-contre, de haut en bas :•Portrait de Suzanne Cornillac au Palais du Roure, en février 1937.
© Archives iconographiques du Palais du Roure, Avignon. DR.
•La maison ou est née la mère de MistralCrayon, 1957.
© Archives iconographiques du Palais du Roure, Avignon. DR.
Ci-dessus•Portrait d’Émile Ripert
© DR, avec l’aimable autorisation de Véronique Ripert
Suzanne Cornillac et la Corse : 1935, découverte de l’îleC’est en 1935, au moment où elle doit faire face à des
difficultés dans sa vie personnelle, que son ami Émile
Ripert lui suggère de partir en Corse, pays qu’il connaît
bien et qu’il affectionne, pour changer de lieu et se
ressourcer. Suzanne Cornillac a alors trente et un ans.
Elle suit ce conseil et part pour la Corse, considérée
alors comme une « terre de légende » ; elle va ainsi
séjourner plusieurs mois à Girolata où elle s’installe
dans la tour avec sa fille Fanette alors âgée de neuf
mois. Cette découverte de la Corse, par un de ses
endroits alors les plus isolés, d’une beauté et d’une
pureté extraordinaires, dans un endroit peuplé de
quelques personnes seulement la marquera profon-
dément. À partir de cette expérience, son attachement
pour la Corse ira toujours croissant et Girolata restera
un moment très important dans sa vie. Suzanne
Cornillac retourne quelque temps à Marseille puis,
en 1936, entame un tour de Corse à pied. Elle s’arrête
dans les villages qu’elle traverse pour peindre, souvent
à la demande de clients qui habitent sur le continent
et lui ont fait savoir qu’ils souhaitent avoir des
aquarelles de leurs villages ou de leur maison.
À cette époque, elle fait également des aquarelles
gouachées sur carton, témoignages de son hésitation
sur la manière de rendre les paysages de Corse, même
s’ils lui rappellent la Provence et sa lumière. On voit
décrits de cette manière-là : Ajaccio, avec des vues
des hauteurs de la ville, l’allée des tombeaux à la sortie
de la ville vers les Sanguinaires et les îles Sanguinaires,
Bastia, ainsi que des aspects de Fozzano qui illustrent
le travail de recherche réalisé à cette époque.
Suzanne Cornillac tranchera assez rapidement pour
revenir à l’aquarelle, ce qui lui permet de traiter ces
mêmes lieux d’une manière très délicate. Elle fait aussi
des dessins, comme c’est la mode à l’époque,
rejoignant ainsi les artistes comme Bassoul,
Canavaggio, Brod, Bouchet et Peyrot qui ont donné
de très nombreuses vues de la Corse pour la revue La
Corse Touristique, jusqu’en 1934, mais elle les traitera
à sa manière, fondant dans la matière les différents
plans et les oppositions d’ombres et de lumière.
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
6
Ci-contre, de haut en bas (©Jean Harixçalde) :•Ajaccio, la Parata, vers 1936. Gouache sur carton. 18 x 25 cm.•Ajaccio, le port des pêcheurs, vers 1936. Gouache sur carton. 18 x 25 cm.•Fozzano, vers 1936. Gouache sur carton. 18 x 25 cm.
Son attachement à la partie sud de l’île
En, 1936 Suzanne Cornillac doit se rendre à Fozzano
notamment pour peindre, à la suite d’une
commande reçue du bâtonnier Carabelli, avocat
installé à Marseille, diverses vues du village dont sa
maison… Le destin intervient alors puisqu’elle fait
une chute de cheval qui lui occasionne une fracture ;
elle se trouve immobilisée pour une longue période
à Fozzano et ne rejoint Marseille que plusieurs
semaines plus tard, après la date prévue. Pendant
ce séjour, elle est installée dans une de ces
« pensions de famille » que l’on trouve alors dans
les villages. C’est ainsi qu’elle est logée par Antonia
Durazzo Agostini, qui prend, selon l’usage, grand
soin de cette jeune femme artiste venue visiter et
travailler dans la région.
Lors de ce séjour à Fozzano, elle se lie d’amitié avec
plusieurs personnes du village. Elle restaure la statue
appelée « Notre Dame de Fozzano ou La Madonna
Santissima Del Rosario ». Elle en connaît l’histoire 6,
autre preuve de la grande considération qu’elle voue
à cette statue : elle s’assurera à chacun de ses séjours
à Fozzano que Notre Dame du Rosaire est toujours
en bon état et prête pour le pèlerinage qui a lieu le
premier dimanche d’octobre.
Voici ce qu’elle écrit, à propos de cette statue, en
introduction à l’étude que lui consacre en
septembre 1955 le Révérend Père Fidèle 7, étude
intitulée Notre Dame de Fozzano ou La Madonna
Santissima Del Rosario.
« Les mots deviennent fades, usés, étrangement
plats, quand on frôle le mystère. Pourtant, peut-
on rétorquer, la statue de Notre Dame du Saint
Rosaire, vénérée à Fozzano, est sculptée à même
un tronc de figuier par un artiste inconnu de
l’école italienne ; elle est là depuis des siècles, et
ses mains tendues sont palpables ; son voile, jadis
doré à l’or fin, ombrage ses cheveux bruns ; sa
robe rouge et son manteau sombre, orné de
fleurs, retombent sur son corps gracile en plis
harmonieux, et ses mystérieuses prunelles de
verre, ou les cierges allument des lueurs de vie
semblent scruter les âmes avec une infinie
douceur. »
« Ce qu’il est impossible de décrire, c’est le charme
qui émane d’elle, comme une buée humide et
translucide, et la rend à la fois très proche et très
lointaine. »
« Toutes les prières entendues, toutes les
supplications murmurées avec des
larmes dans la voix, ont tissé depuis des
siècles une trame qui oblige les plus
incroyants à poser le genou sur la
marche usée de sa chapelle. »
« Bien des misères lui ont été
contées, bien des souffrances elle
a dû contempler, et le reflet de toutes
ces larmes, gravé dans ses yeux aux
aspects changeants, lui donne
parfois une apparence douloureu-
sement humaine. »
PREMIÈRE PARTIE. Suzanne Cornillac : une vie consacrée à l’expression figurative et à l’écriture
7
6. Voir Roccu Multedo, LeNouveau Folklore Magique dela Corse, 1998, ImprimerieSammarcelli, p. 196.7. Le révérend Père FranciscainVrydaghs (de son vrai nom), estaussi l’auteur de Notices histo-riques sur la Rocca, publié àAjaccio. Cité par RoccuMultedo in Le Nouveau FolkloreMagique de la Corse, 1998,Sammarcelli, p. 431.
Ci-contre, de haut en bas•Portrait de Suzanne Cornillac à Fozzano en 1937. ©Archives iconogra-phiques du Palais du Roure, Avignon. DR•Suzanne Cornillac avec Bébé Durazzo. © Raphaël Van den Driessche•Encadré : « La vierge de Fozzano ». © Raphaël Van den Driessche
Suzanne Cornillac est enthousiasmée par cette île
singulière et par les régions du Valinco et du
Sartenais. Elle parcourt les villages, rencontre les
habitants ; elle s’informe, se fait conter les histoires
locales et apprend la manière dont vivent les gens.
Elle vit comme eux, s’assimile à cette vie simple et
heureuse des petites communautés, dont les
difficultés quotidiennes, en cette période, ne lui
échappent pas…
Peu de temps après son retour sur le continent, sa
fille aînée Idelette, meurt et ses deux fils restent
auprès de leur père Yves Sadoul de Trémines. Une
nouvelle vie commence pour elle. En 1937 elle
s’installe à Ajaccio dans le quartier de la Barrière.
Elle fait la connaissance de la chanteuse Marfisa,
d’un musicien qui donne des cours de chant et
accompagne les chanteurs qui viennent répéter chez
lui 8 et de Toni Rocca qui habite rue Notre-Dame,
au coin de la rue du Roi de Rome, près du « Son des
Guitares ». C’est dans cette même rue qu’habite le
peintre Raymond Rifflard (1896-1981), qu’elle voit
très régulièrement. Cet artiste qui signe ses travaux
Rif, tient une place particulière au sein de l’École
d’Ajaccio notamment par la durée de sa carrière
artistique de plus de cinquante ans. Peintre de
Montparnasse, il est arrivé à Ajaccio dès le milieu
des années vingt. Il a connu Jean-Baptiste Bassoul,
François Corbellini, Émile Brod, Dominique
Frassati, et les autres peintres ajacciens. Peintre
décorateur, Rif a restauré de nombreuses églises en
Corse et il est de ces artistes qui ont poursuivi une
certaine approche de la peinture « réaliste » à tel
point qu’on le surnomme l’« imagier » de la Corse ;
il fait la jonction avec la nouvelle génération de
peintres corses. C’est un homme attachant, qui aime
se lier avec les autres et parler peinture. Il dessinera
plus tard le portrait de Catherine, la fille cadette de
Suzanne Cornillac.
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
8
•Fozzano, la tourDessin. 14 x 12 cm, signé S. Cornillac de Trémines© Raphaël Van den Driessche •Portrait de Catherine à l’âge de vingt ans, 1959
Par Raymond Rif© Raphaël Van den Driessche
8. Ce musicien quitte la Corseau cours des années 1960 etcompose sous le nom deJean Ledrut une douzaine demusiques de films dont« Austerlitz » d’Abel Gance en1960, « Le Procès » d’OrsonWelles avec A. Perkins etJeanne Moreau en 1962, « Lesaventures extraordinaires deCervantès » de VincentShermann avec Hortz Bucholzet G. Lollobrigida, en 1966…9. En janvier 1937 Frassati estnommé aux fonctions deconservateur du musée Fesch,puis en septembre 1938,conservateur des muséesd’Ajaccio.10. Ange Tomasi (1883-1950),apprend le métier et affirmesa vocation dans le studio deJoseph Moretti à Ajaccio, où ilse fixe en 1907, rue SergentCasalonga. Il a été un despionniers du reportage photo-graphique, fixant sur sapellicule la plupart des sitesde Corse et des événementsqui ont marqué la vie de l’îlependant plus de cinquanteans. Il a réalisé près de30 000 clichés sur plaques deverre. Il possède dans lesannées 1930 le plus célèbrestudio photographique deCorse. Ses photos, que tant deCorses et de touristes ontemmenées avec eux, sontremarquables par leurcomposition et le travail deTomasi, par cet aspect lerapproche parfois des peintresajacciens qu’il fréquente. Son
Pourtant, pendant ces deux années passées à
Ajaccio, Suzanne Cornillac n’est pas été influencée
par les peintres corses de son époque. Elle les
connaît et fréquente assez peu, notamment en raison
des circonstances : Corbellini, alors très âgé, quitte
le poste de conservateur des musées de la ville à la
fin de 1936, puis se retire à Piana ; Lucien Peri et
Canniccioni sont installés à Paris et viennent assez
peu à Ajaccio au cours des années qui précédent la
guerre. Parmi les peintres connus, il y a surtout
Dominique Frassati (1896-1947), seul artiste de son
époque qui ne donne pas la priorité au paysage et
qui se consacre au portrait, aux scènes de la vie
quotidienne, aux scènes de genre, qu’il traite avec
une originalité remarquable 9.
Suzanne Cornillac, femme pleine d’énergie,
apprécie la vie ajaccienne qui est encore très
vivante et animée dans ces années-là. Le réputé
photographe Ange Tomasi 10 la fait poser en
costume Corse en 1936-1937. Cette photo sera
utilisée pour des affiches du syndicat d’initiative
de la Corse, qui a son siège à Ajaccio. Suzanne
Cornillac est liée avec Micheline Tomasi, la mère
de François et de Philippe Léotard et elle gardera
toute sa vie ces liens d’amitiés avec la famille
Tomasi.
Marfisa et Toni Rocca – qui deviendra son
compagnon et le père de sa plus jeune fille
Catherine – font partie des jeunes artistes qui
commencent une carrière à une époque où la
chanson corse connaît une mode certaine, dans la
foulée des succès de Tino Rossi 11. Toni Rocca
interprète avec brio des chansons qui parlent de la
Corse, de ses traditions ; il introduit dans son
répertoire des thèmes nouveaux et puise avec
bonheur dans les œuvres des écrivains de langue
corse 12. Suzanne Cornillac voit ainsi l’évolution dans
le domaine de la création musicale en Corse.
PREMIÈRE PARTIE. Suzanne Cornillac : une vie consacrée à l’expression figurative et à l’écriture
9
fils Toussaint qui prend sa suiteest le photographe de l’Ajacciodes années 1940-1960.11. Tino Rossi (1907-1983), faitses débuts à l’Alcazar deMarseille en 1933. Acteur decinéma (Marinella, 1935) etchanteur, il est lancé par leschansons écrites par VincentScotto : Vieni, vieni et Ô Corse,île d’amour ; après 1937, sagrande carrière nationale etinternationale est lancée.12. Toni Rocca (1910-1960), quia été lauréat du concours duposte Parisien au milieu desannées trente, connaît uncertain succès : en 1940, ilchante dans le film Vénusaveugle d’Abel Gance etpoursuit une belle carrière dechanteur dans les annéescinquante avec « Ti tengucara » : musique de ThéoLacuire, texte de Pierre Leca(cette chanson a été créée parToni Rocca et non par TinoRossi. C’est une longue histoireentre ces trois hommes et ToniRocca en a voulu à Pierre Lecaet à Tino de s’être attribués sacréation ; ils ne se sont récon-ciliés que longtemps après).Parmi d’autres titres qu’il a inter-prété, le « Lamentu d’ucoloniale » de Giovoni ;« Pescador di l’onda » ;« Lamentu serenata diSpanetu », de Casanova etTomasi ; « Canta di unaserenata » de Chélos-Bordin etLloret ; « Pescador d’Ajaccio »de R. Montrelet et Rainéri (AbbéMattei) ; « Nanna ».
Ci-dessous :•Suzanne Cornillac
par Ange TomasiDeux photos en femme corse© Raphaël Van den Driessche
Les années à Nice : 1938-1956En 1938, Suzanne Cornillac et Toni Rocca
s’installent à Nice avec le projet d’aller ensuite à
Paris, mais la guerre les empêchera de finaliser ce
schéma. C’est là qu’elle fera la connaissance de
certains Corses installés à Nice et notamment de
Pierre Leca 13 avec qui elle se liera d’amitié. Au cours
de cette période et des années suivantes, elle
commence à s’occuper des émissions
radiophoniques où il est régulièrement question de
la Corse, de son histoire et de ses artistes : en 1939,
l’émission a pour titre « A travers la Corse ».
La période de la guerre est difficile pour Suzanne
Cornillac qui n’a plus ses occupations habituelles,
ne recevant pas de commandes et ne pouvant vendre
sa production. Elle se réfugiera durant les derniers
mois de la guerre à Eze Village. Avec le concours
d’un de ses amis qui se charge de les vendre, ses
aquarelles sont alors exposées dans une bijouterie
de Monaco et remportent un certain succès. De son
côté, Toni Rocca est arrêté comme résistant et
incarcéré au camp de travail de Salon de Provence ;
il s’en évade en compagnie de l’oncle de Charles
Pasqua ; ils rejoindront ensemble le « maquis » de
Beuil, dans les Alpes-Maritimes. Pour cette conduite
héroïque, Toni Rocca recevra décoration et citations.
Rentrée à Nice peu après la Libération, Suzanne
Cornillac devient journaliste à l’Aurore de Nice. Elle
assure plusieurs rubriques : spectacles, opéra, retour
des prisonniers de guerre, et les comptes rendus
d’audience au Palais de Justice ; occasion pour elle,
car le désir de dessiner est trop fort, de réaliser
quelques croquis des protagonistes, en 1945 et 1946.
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
10
13. Pierre Leca ou Petru SantuLeca (1879-1951), neveu deSantu Casanova et beau-frèrede Paul Arrighi. Professeur àNice. Poète de languesfrançaise et corse, il fut colla-borateur puis, en 1931, directeurde « L’Annu Corsu » etrédacteur en chef de la revue« L’Aloès ». Cette amitié entrePierre Leca et SuzanneCornillac durera plus de vingtans.
Ci-dessus :Toni Rocca, troisième à gauche,entouré de membres de « l’amicale des Corses »lors d’une émission corse, à Radio Nice© Raphaël Van den Driessche
Ci-dessus : Nice, 1946, le Procureur de la République
© Raphaël Van den Driessche
Ci-contre, de gauche à droite :•Suzanne Cornillac à l’âge de trente-six ans (1940)© Raphaël Van den Driessche
•Suzanne Cornillac à l’âge de quarante ans (1944)Photo à Nice© Raphaël Van den Driessche
Elle entame une importante série d’illustrations
des « Contes d’Andersen » à la demande d’un
éditeur Niçois, mais le projet n’aboutira pas. Elle
est ensuite sollicitée pour illustrer le livre de Paul
Arrighi 14 « Corse », publié en 1946, avec quarante-
deux fusains représentant de nombreux lieux du
Sud de l’île et divers endroits de Fozzano. On voit
dans ces œuvres réalisées d’un trait assuré toute
la finesse d’observation accumulée par Suzanne
Cornillac pendant ses années passées en Corse. On
voit aussi combien elle connaît la Corse et ses lieux,
le Cap Corse, la Balagne, la Castagniccia, les côtes
orientale et occidentale, le Niolo, le Sartenais… et
les grandes villes.
Ces lieux dont Paul Arrighi écrit dans son livre :
« Oui, l’âme corse, parfois paradoxale,
s’explique d’abord par ces paysages riches de
contrastes violents ; d’une douceur que le plus
« sentimental » des peintres ne peut exprimer,
d’une rudesse qui n’a pas besoin d’être
amplifiée par des outrances de dessin ou de
couleur, d’une variété que les compositions
réunies dans cet album illustrent avec force. »
« Dès le premier contact visuel, la Corse révèle
son âme austère et hautaine, reflet d’un passé
de luttes et de deuils : montagnes abruptes,
citadelles et tours, tombeaux parmi les cyprès.
Accueil d’une mélancolique noblesse, qui n’a
rien de la facilité des rencontres vulgaires ;
accueil peu engageant : l’âme corse ne s’offre
pas, quémandeuse ou vénale ; il faut la
conquérir, il faut se faire adopter d’elle. »
« Puis, une fois surmontée cette première
impression, vous connaîtrez la douceur des
plages et l’intimité des criques, l’invite de la
vallée s’ouvrant brusquement, confiante,
derrière le mamelon fortifié qui la masquait ;
l’appel des chemins serpentant là où vous
pensiez ne trouver que raidillons à l’usage
des chèvres. »
Alors même qu’elle vit à Nice, son intérêt pour la
Corse est tout aussi grand et elle s’emploie largement
pour en évoquer différents aspects. De 1947 à 1950,
Suzanne Cornillac produit à « Radio Nice » une
émission consacrée à la Corse toutes les semaines ;
pour cette émission intitulée « Une demi-heure de
charme », Toni Rocca et certains membres de
l’amicale Corse participent activement. Elle écrit de
PREMIÈRE PARTIE. Suzanne Cornillac : une vie consacrée à l’expression figurative et à l’écriture
11
14. Paul Arrighi (1895-1975),professeur agrégé d’italien,enseignant à Nice, puis profes-seur à l’université d’Aix-Marseille.Il a animé, avec AntoineBonifacio, de 1923 1939, L’AnnuCorsu, almanach illustré etanthologie régionale duCyrnéisme (ni régionaliste, nicorsiste, ni félibrige) qui arassemblé des textes de trèsgrande qualité et donné uneplace importante aux artsplastiques, faisant régulièrementdes comptes rendus desmanifestations artistiques oupubliant des articles sur lesartistes.
Ci-dessus, de gauche à droite : Fozzano et Sartène. Encres. 14 x 12 cm. © Raphaël Van den Driessche
Ci-dessous : •Photo de Suzanne Cornillac au microde « Radio Nice ». © Raphaël Van den Driessche
nombreuses pièces dramatiques également pour
« Radio Nice ». Les principales pièces sont souvent
inspirées par des légendes comme « La Sposata »,
« Fior di rosa » et bien d’autres comme « Les
Giovanalli » qui passera aussi sur Radio Monte
Carlo, « La véritable histoire de Matéo Falcone »,
classée meilleure dramatique de l’année 1947
diffusée également sur les antennes nationales. À
la même période elle est journaliste au « Magazine
Bleu », journal radiophonique quotidien où elle a
des entretiens avec les artistes de passage et les
personnes organisant des événements : expositions,
carnavals, concerts.
Toujours à Nice, au début des années cinquante,
Suzanne Cornillac a de multiples activités et
enseigne le dessin au lycée de jeunes filles de
l’avenue du Maréchal Foch (actuellement lycée
Calmette). Elle peint également Nice et sa proche
région comme Saint Jean Cap-Ferrat, Èze village,
les Hauts de Cagnes… toujours à la recherche de
lieux où les vielles pierres brillent et chantent dans
de subtils jeux d’ombres et de lumières, grâce à la
magie de son pinceau.
À Nice, ville où elle a noué des liens avec les Corses
qui y sont installés, Suzanne Cornillac expose à
plusieurs reprises. Des publications dans la presse
permettent d’apprécier la façon dont sa peinture est
perçue à cette époque. En 1954, elle est à la librairie
« Au poisson d’or », au 12, rue Paganini. Un article
de presse signé F., publié dans Nice-Matin Corse
relatant cette exposition intitulée « Une vibrante
sensibilité caractérise les aquarelles de S. Cornillac-
Rocca », évoque ces œuvres de facture classique et
précise « On y décèle partout, avec la sobriété des
teintes, l’inhérence du moment qui permit à l’artiste
de capter ses paysages dans le souffle de sa
sensibilité. » « Rien ne m’a plus ému que cette
grande croix protectrice du village de Carbuccia,
contre les mauvais génies, aux bras inclinés par la
vétusté, complétée par ce mausolée effrité de Zicavo.
On se sent attendri par les souvenirs de l’enfance
et inquiets sur les conséquences d’un exode accentué
de la race… » «… Girolata au matin ; Bonifacio sous
divers aspects a retenu à juste raison la hantise de
l’artiste ; Ajaccio au crépuscule ; Soveria avec son
campanile caractéristique de tous les villages corses ;
les calanches de Piana, etc., sont issus de lavis
d’azuline qui rappellent par maints endroits, les
moires et les ors des montagnes que Lucien Péri et
Corbellini ont légué à la pérennité artistique des
paysages cyrnéens. » « Avec Suzanne Cornillac-
Rocca la Corse peut être fière de compter une vestale
de plus pour la faire comprendre et aimer. »
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
12
Ci-dessus : •Suzanne Cornillac chez elle, à Nice© Raphaël Van den Driessche
•Carbuccia, la croix, 1954.Aquarelle. 24 x 32 cm
© Raphaël Van den Driessche
En octobre 1955, Suzanne Cornillac expose des
œuvres de Corse à la galerie « Muratore », avenue
Victor Hugo, lieu renommé dans la ville. Un article
de presse signé Ch. C 15 intitulé « À travers la Côte,
Un court mais passionnant voyage en Corse » publié
dans Nice-Matin Corse le 29 octobre 1955 indique à
propos de cette exposition : « Voici les villages aux
maisons grises montant à l’assaut des rochers de
granit. » « C’est à la fois dépeuplé et plein de vie. »
« Hâtez-vous d’aller voir ces féeries de tons que l’on
ne rencontre nulle part ailleurs. » « Acquérir une de
ces œuvres c’est emporter chez soi un peu de soleil,
une foule de souvenirs condensés dans ces ruelles
étroites. » « Ces rues si chères à nos cœurs d’enfants,
car elles virent nos premières émotions et nos
premiers chocs. » « Il faut féliciter Mme Cornillac-
Rocca et sa fille qui, l’une avec ses couleurs, et l’autre
avec ses santons insulaires figés et vivants à la fois,
nous ont apporté un reflet de l’Île chère où nous
avions tous notre nid, quand nous étions petits. »
PREMIÈRE PARTIE. Suzanne Cornillac : une vie consacrée à l’expression figurative et à l’écriture
13
15. Il doit s’agir de CaruluGiovoni (1879-1963) –dont lesprénoms sont Charles César–écrivain et poète qui a déployéune forte activité en faveur del’expression et du rayonnementde la culture corse. Parmi sesnombreuses publications : Ume paisolu, I profumi di l’isula.Ce pharmacien installé àMarseille est un des fondateursde la revue trimestrielle bilingueU Lariciu en 1927. Il a toujoursentretenu d’excellentes relationsavec les artistes corsesinstallés sur le continent, enAfrique du Nord et en Corse, età Ajaccio, avec J-B Bassoul enparticulier. Il organise lesmanifestations qui ont lieu àMarseille. Jusque dans lesannées 1950, il fait , dans lapresse corse, des comptesrendus d’expositions depeintres corses dont Rifflard etPoggioli.
Ci-dessous : Le chemin de Figaniella, 1954.Aquarelle. 24 x 32 cm
© Raphaël Van den Driessche
Retour à Paris et région...
En 1956, Suzanne Cornillac quitte la côte d’Azur
pour la région parisienne et s’installe à Choisy-le-
Roi (actuellement dans le Val-de-Marne), petite ville
à douze kilomètres en amont de Paris qui présente
la particularité d’être construite sur les deux rives
de la Seine. Le lieu lui plaît, elle se rapproche ainsi
de sa famille et elle peut aller aisément à Paris. Elle
a gardé des liens avec ses amis provençaux qui la
sollicitent pour des illustrations. Dans la capitale,
elle rencontre artistes, éditeurs et producteurs de
radio. À partir de 1957 elle écrit des textes pour
disques accompagnés de diapositives ainsi que des
contes, pièces et histoires diffusées par la radio
nationale.
À Paris, Suzanne Cornillac est en contact avec des
Corses et voit régulièrement certains artistes
installés dans la capitale. C’est le cas de José Fabri-
Canti 16 qui organise dans les années 1960,
notamment avec Toni Casalonga des manifestations
pour promouvoir l’art corse. Parmi les artistes corses
de Paris, il y a Pierre Dionisi (1904-1976) 17, Robert
Falcucci (1900-1989) 18, Nicolas Carréga (1914-
1993) 19 ; ils poursuivent leur voie tout en
maintenant une relation avec la Corse. Max Agostini
et Tony Agostini ont également choisi leur chemin
et la Corse est moins présente dans leur production.
Paradoxalement, il y a beaucoup d’artistes mais on
en parle très peu alors, comme si l’activité créatrice
des artistes corses de Paris était un sujet de peu
d’importance.
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
14
16. José Fabrikant — ou Fabri-Canti- (1916-1994), sociétairedes Artistes français, obtient leprix Jean Geoffroy en 1941, uneseconde médaille en 1942, leprix James Bertrand la mêmeannée et, en 1943, une boursede voyage. En 1946, il obtientle Grand Prix de Rome et il estlauréat de l’Institut et duGouvernement. Il est à l’originede création, en 1959, de CyrneArte, structure qui ne se limitepas aux arts plastiques :peinture, sculpture, mosaïque,mais s’étend également authéâtre et à la musique et quitente la synthèse des artsplastiques et de l’artisanat ausein de l’architecture.17. Pierre Dionisi obtient en 1923le premier Grand Prix de Romede peinture. Après son retour àParis, il réalise des travaux dedécoration monumentale puiss’oriente dans les années 1930vers la sculpture bénéficiant denombreuses commandespubliques.18. Robert Falcucci, peintre,affichiste talentueux etillustrateur d’ouvrages commeGuynemer, héros légendaire deR. Hervouin, Flèches Ouvrantesde Paul Ribers, et Colomba deProsper Mérimée. Falcucci estconsidéré comme un desspécialistes français de l’affichedes années vingt-trente avecGrand Prix de Monaco, Air-France, S. N. C. F. Energol, Gazde France, et des réclames :Porto-Cruz, Byrrh.19. Nicolas Carréga participeraà de nombreux Salons etexpositions nationales et àl’étranger. Son art figuratif, detendance expressionniste ad’abord été inspiré par lemonde de la mer. Plus tard, sapeinture évolua versl’abstraction, utilisant de grandsaplats aux arrière-plans trans-parents. Carréga est peintre,sculpteur, lithographe et graveur,on lui doit de nombreux travauxd’illustration et de décorationréalisés dans les années 1950-1960.
•ParisAquarelle 26 x 34 cm.© Jean Harixçalde
Les liens réguliers de Suzanne Cornillacavec la CorseÀ partir de 1951, Suzanne Cornillac vient peindre
en Corse tous les ans au printemps et en été, entre
juillet et fin septembre puis, à partir de 1956, en été
seulement, et ceci jusqu’en 1980. Généralement elle
passe au moins un mois à Ajaccio, entre quinze jours
et un mois à Vizzavona et un mois à Fozzano,
occasions de voir famille et amis. Une importante
partie de ces séjours est réservée à son travail qu’elle
accomplit avec méthode prenant souvent un ou deux
jours pour des séances de travail sur un lieu
particulier, choisi et repéré préalablement. Elle
répond aussi à de nombreuses demandes d’amis,
de connaissances et d’amateurs de peinture qui
souhaitent acquérir ses aquarelles ou lui passent
des commandes précises : maison, vue de village,
bateau… Elle alterne également ses sorties en
fonction des saisons et elle a peint certains endroits
de Corse sous des aspects très diversifiés.
Elle travaille avec méthode et, pendant ses séjours
en Corse, d’après les témoignages recueillis, elle
s’estime satisfaite lorsqu’elle réussit plusieurs
aquarelles par jour : une partie du travail étant
réalisée le matin, l’autre l’après-midi. Travaillant
de façon organisée, elle est assise sur un petit siège,
sa feuille de papier sur les genoux ; elle fait de façon
quasi systématique une esquisse au crayon. Elle a
toujours avec elle une mallette ou un sac léger où
se trouve rangé son matériel. Tout son travail est
réalisé en plein air et elle n’apporte aucune retouche
par la suite. Si une aquarelle ne lui convient pas,
son sort est vite réglé : déchirée, elle n’existe plus…
, il faudra recommencer ou changer de sujet ! Elle
cherche le meilleur endroit pour rendre le lieu choisi
avec soin ; son regard expérimenté trouve la
lumière, la vie, le mouvement, car elle déteste ce
qui est « figé ». Elle sait trouver les couleurs qui
correspondent à l’instant qu’elle veut capter, sachant
que les couleurs changent tout le temps ; sachant
aussi que l’aquarelle est un art qui permet de saisir
l’instantanéité des paysages et des choses… Ses
aquarelles sont transparentes, légères, aériennes.
L’eau qu’elle utilise avec générosité donne de la vie
aux nuances de ses couleurs. Parfois, un trait de
fusain noir pour souligner un angle, une ligne de
fuite, une masse. Ce fusain qui capte le regard et
permet de mémoriser l’œuvre, le lieu…
Dans l’Ajaccio de ces années-là, Suzanne Cornillac
n’éprouve pas le besoin d’exposer à la galerie Bassoul,
qui est toujours la seule galerie de peinture en Corse
et qui le restera encore longtemps, jusque dans les
années 1970 20. En 1934, après la mort de Jean-
Baptiste Bassoul ses fils Philippe (1909-1983) et
François (1913-2001), ont repris l’entreprise de
peinture en bâtiment et la galerie. Philippe Bassoul
s’occupe principalement du magasin, spécialisé dans
le matériel, les produits pour la peinture artistique
et l’encadrement. François Bassoul, de son côté, va
donner dès la fin des années trente, une nouvelle
dimension à la galerie, puis dès l’automne 1945, après
la reprise d’une vie normale en ville, une plus grande
ampleur à cette activité en organisant régulièrement
des expositions pour montrer les peintres connus et
présenter de nouveaux talents. François Bassoul
s’occupe des relations avec les artistes ; parmi ceux
qui exposent régulièrement entre 1945 et 1960 :
Marcel Poggioli (1882-1969), tous les ans et Raymond
Rifflard ; Jacques Willem Thétard (1917-1995), à
partir de 1955. Au même moment, des artistes font
leurs premiers pas comme Anne Mari-Roustan (née
en 1920) qui exposera jusqu’en 2000,
alternativement à Ajaccio, chez Bassoul et à Bastia,
chez Bosdure des paysages de Corse rendus avec
justesse et réalisme ou Pierre Vellutini (1921-2008),
qui tiendra une place importante parmi les artistes
corses ; ses œuvres peuvent être vues, pour la
première fois à Ajaccio, en 1952 chez Bassoul, avec
même des nus… une grande première à l’époque !
Alors qu’une partie des artistes de la génération
PREMIÈRE PARTIE. Suzanne Cornillac : une vie consacrée à l’expression figurative et à l’écriture
15
20. La galerie Bassoul a étéouverte en 1913, à une époqueoù il n’y avait quasiment pasde lieux pour exposer à Ajaccio.C’était alors une extension dumagasin que tous lesAjacciens connaissaient bienpuisqu’en 1911, lorsque Bassouls’installait au 8, cours Grandval,reprenant le commerceexploité par Joseph Gini devente de papiers peints etpapiers vitraux, de matérield’artistes et de dessinateurs, etd’encadrements. Lieu derencontre et d’échange ladiscussion durait parfoisjusqu’à des heures avancéesde la soirée, la plupart despeintres Ajacciens s’y arrêtaient,profitant de la présence deBassoul et d’autres artistes depassage.
antérieure n’est plus sur le devant de la scène,
l’activité artistique elle-même n’est cependant pas
réduite à rien en Corse : certains artistes conservent
leurs sujets et leur manière de peindre pendant que
d’autres cherchent de nouvelles marques et peinent
à trouver leur public. Cette activité est relativement
difficile à apprécier tant à Ajaccio et Bastia ou dans
l’intérieur de l’île qu’à Paris ou Marseille car les
artistes travaillent de façon cloisonnée et les
possibilités d’échanges sont peu nombreuses.
Pendant une longue période, on évoque plus les
peintres du passé que les artistes vivants et on
constate qu’entre 1945 et 1959, peu d’artistes
figurent sur la scène nationale et internationale. On
parle avec précaution des jeunes artistes, attendant
qu’ils fassent leurs preuves. Par la presse, on a une
vision contrastée de la créativité artistique de cette
période dont on verra justement plus tard qu’elle a
été tout aussi féconde que celle de la période
précédente. Il est vrai que la société corse est trop
occupée par ses mutations économiques et sociales
pour donner aux arts une place majeure.
Suzanne Cornillac fait partie de ces artistes qui
comptent et si elle n’expose pas à Ajaccio, elle
possède en revanche une très bonne méthode pour
vendre ses aquarelles. Elle est amie de longue date
— depuis la fin des années trente — avec
Mlle Victoria Sicurani appelée affectueusement
« Yaya » par son entourage et ses amis 21. L’amitié
et la confiance qui s’instaurent entre les deux
femmes aboutissent au fait que Victoria Sicurani
accepte de lui acheter régulièrement sa production
et de s’occuper ensuite de la vente de ses aquarelles.
Dans son bel établissement raffiné « Horlogerie-
Bijouterie » du cours Grandval, là où les Ajacciens
aisés viennent faire des achats, ils peuvent se voir
confier les grands cartons à dessins rangés à l’abri
des regards où se trouvent les belles aquarelles
lumineuses et les dessins de Cornillac. Leur choix
réalisé, en faisant une vingtaine de mètres sur le
cours Grandval, ils se trouvent « À la Palette d’Or »,
chez Bassoul où ils auront au bout de quelques jours,
leurs œuvres encadrées avec « la baguette
Cornillac », une fine baguette à la feuille d’or qui
fait resplendir leurs acquisitions et qui trouveront
une place de choix dans leur intérieur. Suzanne
Cornillac aura ainsi une clientèle fidèle chez
Mlle Sicurani qui lui amène aussi des vues des régions
françaises, de Paris notamment, qu’elle lui apporte
chaque année.
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
16
•Suzanne Cornillac à soixante-quatorze ans Photographié àChoisy-le-Roi.© Raphaël Van den Driessche
21. Victoria Sicurani estpharmacien de formation. Ellefait le choix d’exercer un autremétier qui lui permet de vendrede beaux objets car elle aaussi des antiquités. Lesaquarelles de Cornillac, elle lesvend à ses clients, qui aimentla peinture et qu’elle sélec-tionne.
La peinture de Suzanne Cornillac est appréciée en
Corse et notamment à Ajaccio où depuis longtemps
existe un public connaisseur de la peinture et qui
encourage les artistes locaux et amis de la Corse 22.
Tout au long des années soixante et soixante-dix,
Suzanne Cornillac va voir augmenter de manière
considérable le nombre des amateurs de sa peinture.
Et quand en décembre 1975, est organisée à la
galerie Bassoul 23 une exposition-vente au profit de
la Croix-Rouge par Antonia Bigou-Bosc (présidente
pour la Corse), des aquarelles de Suzanne Cornillac
voisinent avec les œuvres de Paul Agostini, Gabriel
Carriat-Rolant, Toni Casalonga, Louis de
Casabianca, Mme de Casabianca, Bosdure, Daniel
Jaugey, Jean Padovani, Rifflard et bien d’autres
artistes…
Les natures mortes et bouquets de fleurs
C’est ici, au moment de clore cette présentation de
la vie et de la carrière de Suzanne Cornillac que l’on
évoquera ses natures mortes et bouquets de fleurs.
Sa maîtrise des différentes techniques et modes
d’expression lui permet en effet d’être un excellent
peintre de natures mortes et de bouquets de fleurs.
À la fois par passion et parce que, à Choisy-le-Roi,
elle a moins de lieux à peindre, les objets et les fleurs
sont pour elle un très bon moyen de satisfaire son
désir de peindre et de libérer sa sensibilité féminine.
Elle réalise des natures mortes très simples, avec peu
de choses, posées sur une table : un livre, un vase de
roses jaunes, un bouquet avec du muguet, des fleurs
épanouies, un vase vide, un collier, un grand
coquillage : le « Colombu », qui lui rappelle la Corse,
Suzanne Cornillac les transforme en œuvres d’art qui
remportent un franc succès auprès de ceux qui la
connaissent et l’apprécient.
Cette artiste qui a si bien su peindre la nature et les
choses, avec tant de sensibilité et de justesse, est
décédée à Longjumeau le 3 octobre 1982.
PREMIÈRE PARTIE. Suzanne Cornillac : une vie consacrée à l’expression figurative et à l’écriture
17
Ci-dessous, de gauche à droite : •Fleurs. Aquarelle. 28 x 19 cm. © Raphaël Van den Driessche•Nature morte. Aquarelle. 37 x 27 cm. © PMS
22. Voir à ce sujet : La peintureà Ajaccio : 1890-1950 :Bassoul, Canavaggio, Frassati,par Pierre Claude Giansily,« Association Le lazaretOllandini », diffusion Colonnaédition, Ajaccio,décembre 2008.23. Le Provençal Corse,8 décembre 1975, « Au profitde la Croix-Rouge, deux toilesde Leonor Fini proposées auxAjacciens. »
19
Deuxième partieDessins et aquarelles traduisant
la beauté de la Corse
Suzanne Cornillac participe pleinement au
grand mouvement d’expression artistique dont la
Corse est l’objet au cours de la première moitié du
XXe siècle, à la fois comme sujet et lieu de travail des
peintres et comme terre d’artistes. Suzanne
Cornillac a en effet le double regard de ceux qui
découvrent la Corse et de ceux qui y vivent et la
connaissent très bien, qui ont su s’en imprégner,
dans tous ses aspects : physique, humain, spirituel.
Il est avéré que, dès après 1900, il y a une grande
vogue pour la Corse et nombreux 24 sont les artistes,
de tous bords et de tous styles, en quête d’exotisme
et de pittoresque qui viennent y installer leur
chevalet. Ils ont souvent organisé leur tour de Corse
en suivant les indications contenues dans les livres
et guides et peints les lieux « recommandés » : les
îles Sanguinaires, les Calanche de Piana, Bastia et
son vieux port, Bonifacio et ses falaises, Sartène…
Ils ont rendu ces endroits pittoresques avec des
couleurs et de la lumière, pas uniquement avec leurs
verticalités, leurs minéralités ou leurs forêts denses
et sombres comme au siècle précédent. Les artistes
ont abordé tous les thèmes, tous les sites de Corse
et les personnages sont souvent, non plus un
élément du décor, mais les sujets de leurs
compositions où ils ont une place vivante allant au-
delà des stéréotypes pratiqués auparavant. Ces
peintres organisent généralement une visite
complète de la Corse et font une grande moisson
d’impressions, d’études et de toiles qui leur
permettront d’exposer à Paris, dans une galerie ou
au Salon, ou dans leur pays ou leur ville d’origine.
Souvent, ce voyage en Corse n’est qu’une étape 25
dans leur carrière et dans leur recherche de sujets
et de nouvelles techniques.
Quelques peintres se sont bien imprégnés des parti-
cularités de la Corse pour en donner une vision
synthétique et fidèle. Parmi eux, Jean Chièze (1898-
1975), graveur et illustrateur, professeur de dessin
au collège d’Ajaccio en 1925-1926 26, puis au lycée
de Bastia en 1931-1932, qui a montré avec ses
dessins des aspects de la Corse et d’Ajaccio de
manière très originale. On citera aussi André Strauss
(1885-1971), qui a fait de nombreux voyages en
Corse et qui est sans doute le peintre de la période
1920-1930 qui a le mieux rendu les paysages de
Corse dans leur aspect de grandeur et de sérénité
estimant que les bords de mer avaient peu d’attrait.
C’est pour cette raison que l’essentiel de son travail
représentant des villes, villages et sites de l’intérieur.
24. Les livrets des Salonsorganisés à Paris entre 1900et 1950 montrent que plus dequatre cents peintres dont prèsde cent étrangers, principa-lement des pays d’Europeoccidentale ainsi que deRussie ou d’Europe centrale, dujapon et des Etats-Unis, ontadressé des œuvres représen-tant la Corse aux Salons. On apour les années 1900 quatre-vingt-onze peintres ; au coursdes années 1910, on endénombre seulement quatre-vingt-six mais il y a eu quatreannées sans Salons à causede la guerre. Pour les années1920 ce sont trois centquarante-cinq artistes qui sontprésents à ces grands rendez-vous et pour les années 1930,ils sont deux cents-cinquante-deux à y figurer, les dernièresannées étant marquées parune baisse sensible. Lesannées 1940 où les salons setiennent quand même en dépitde la guerre font apparaîtreseulement quelques dizainesd’artistes.25. Nombreux sont les artistesqui se limitent à un seul séjouren Corse. La difficulté de rendreles paysages corses, si variéset si spécifiques du point devue technique explique cephénomène.
Page précédente : FozzanoAquarelle. 37, 5 x 27 cm© PMS
Parmi d’autres artistes : Auguste Bouchet, (1865-
1937), qui est également très attaché à la Corse dont
il peint tous les aspects et Bion Barnett (1887-1958),
peintre américain qui s’est installé à Ajaccio, au
début des années vingt 27.
René Bazin dans un long article intitulé Les quatre
beautés de la Corse, publié dans L’illustration du
3 décembre 1910, décrit la Corse, « sa » Corse.
Il écrit au début de son introduction :
« J’ai parcouru la Corse presque tout entière
et en tous sens, et j’ai éprouvé vingt fois le
sentiment que connaissent bien ceux qui ont
voyagé ; je me suis dit : « Si j’étais né ici ou
là-bas, sur cette terre que je foule, comme je
l’aimerais ! Comme je la préférerais ardem-
ment ! Comme je voudrais y revenir ! » J’y
suis revenu, moi qui n’ai pas vu ses
montagnes et sa mer avec des yeux d’enfant,
à l’heure jeune où le paysage qu’on aperçoit
de la porte, et celui qu’on découvre par la
lucarne du toit, font partie de notre âme, et
deviennent comme un frère et comme une
sœur. Et j’ai cherché, depuis, la raison de cet
attrait puissant, de ce pouvoir de regret qu’elle
exerce sur nous. Les guides n’expliquent pas
ces choses-là. Ils énumèrent les curiosités de
l’île, ses défilés, de Santa-Regina et de l’Inzeca,
ses rochers sculptés, ses monuments
médiocres, et ils citent des pages admirables
qui furent écrites en l’honneur des calanques
de Piana, roches de porphyre battues par la
mer. Je crois qu’un homme de goût aurait tort
de négliger leurs indications. Il y a plaisir et
quelquefois un plaisir vif à voir les
singularités du monde. Mais la beauté de la
Corse n’est pas dans ces raretés. Elle est faite
d’éléments plus communs, elle est presque
partout présente. »
Cet article est illustré par des peintures, aquarelles
et pastels de Gaston Guignard, René Ménard, Jules-
Alexis Muenier, Paul Saïn et Lucien Peri.
René Bazin avait déjà présenté ses impressions d’un
voyage en Corse dans Le Gaulois du 9 juillet 1908,
et publié en 1913 chez Calmann-Lévy Nord-Sud :
Amérique, Angleterre, Corse, Spitzberg.
Suzanne Cornillac adopte une démarche similaire
en visitant cette nature qui l’entoure, ces rivages,
ces forêts, ces champs, ces amoncellements de
rochers et de pierres, ces villages aux aspects si parti-
culiers. Jusqu’à la fin des années 1970, elle vient en
Corse chaque année, consacrant une partie de ses
séjours à sa famille, à ses amis. Une importante
partie de son temps est réservée à son travail qu’elle
accomplit avec méthode. Elle se déplace, ici et là,
prenant habituellement les cars ou allant peindre
avec un parent, une amie. Elle a réalisé de très
nombreuses vues de villages de Corse, surtout du
sud de la Corse, ainsi que d’Ajaccio et de ses
environs, le tout formant un ensemble qui respire
la vie de belle manière. Elle décrit ainsi des coins
de villages avec des enchevêtrements de maisons,
de façades – parfois détaillées avec fenêtres,
balcons… parfois au simple crépi pour se protéger
de l’exposition au vent et à la pluie – de toits, reliés
par des cheminements de ruelles aux pavés inégaux,
purement minéraux. Elle ne cherche pas les vues
panoramiques ressemblant trop à la photo ou à la
carte postale et c’est bien ça qui, d’une certaine
manière, constitue la force de sa peinture.
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
20
26. Années de la publicationde ses premières gravures parSeptimanie : treize bois consa-crés à Ajaccio.27. On trouve régulièrement desreproductions du travail de cesartistes dans la revue La Corsetouristique (publiée de 1924 à1934) qui compte parmi sescollaborateurs littérairesAlbitreccia, Ambrosi, Arrighi,Bonardi, De Bradi, Fontana,Guelfucci, Luciani, Maestratti,Maki, Marcaggi, Nivaggioni,Pierangeli, Rocca, Roger, Trojani,Villat.
Le Sud de la Corse par Suzanne CornillacSuzanne Cornillac donne sa vision de la Corse par le
pinceau et par la plume car elle tient à s’exprimer pas
ces deux moyens. Lors de sa découverte de la Corse,
elle écrit beaucoup et confie au cours de ses premiers
voyages en Corse, dans ses « Carnets de route », ses
impressions et ses sentiments sur les lieux qu’elle
parcourt et sur les choses de la vie… Par la suite, elle
adoptera surtout une démarche picturale car au cours
de ses quarante-sept années de fréquentation de la
Corse, elle a parcouru bien des régions, bien des
villages, arpenté tant de routes et de petits chemins
où elle s’installait pour peindre et donner pour son
public cette vision picturale de la Corse décrivant la
mer et la montagne, tant il est vrai que la montagne
l’inspire souvent plus que les bords de mer.
Girolata, Cargèse et la vallée de la GravonaDans ses « Carnets de route » de l’année 1936,
quand elle fait son tour de Corse à pied, le passage
qui évoque son retour à Girolata un an après avoir
séjourné dans la tour montre à quel point elle a été
marquée par le lieu. Sa vie a été très mouvementée
durant cette année-là, mais sa sensibilité est intacte.
En voici un extrait :
« O terre engourdie j’écoute les voix du passé
psalmodier à mon oreille le chant de paix…
Je suis si bien loin du monde. La lourde porte
en se refermant m’a à nouveau séparée de la
douleur, de la lutte.
« En cette halte brève, j’ai retrouvé mon âme
paisible. Et si à nouveau, mes paupières sont
humides c’est de joie que je pleure.
« Par l’encadrement de la fenêtre, le cap
d’Osani flotte, fantôme bleu, sur la mer
calmée.
« Corse, je suis tienne à jamais… Maintenant
rien ne peut détruire l’amour que j’ai pour toi.
Garde mon âme enclose dans la tour de
lumière au bord des flots, je te la donne !… »
De nombreuses années plus tard, au nord d’Ajaccio,
c’est vers Cargèse que ses pas la guident. Elle connaît
des gens sur place, des Ajacciens originaires de
Cargèse comme Noël Rochiccioli 28 ; elle a des amis
à Calcatoggio auxquels elle rend visite. À la sortie
d’Ajaccio, en direction de Bastia, les petits villages
sont nombreux : pleins de charme avec leur église
et leurs maisons de toutes tailles et de toutes
époques, imbriquées les unes aux autres. Les
occasions de peindre ces villages sont nombreuses
car ils sont sur son chemin,
quand elle va à Vizzavona… En
même temps, elle prend soin de
choisir des lieux champêtres, et
de retenir et de mettre en relief
les éléments les plus simples…
C’est Appietto, situé à moins de
vingt kilomètres d’Ajaccio, qui
s’étale du Mont Gozzi jusqu’au
littoral du Golfe de Lava, c’est
Carbuccia, le village de la famille
de Toni Rocca où Suzanne
Cornillac séjourne régulièrement
lors de ses venues en Corse.
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
21
28. Natale Rochiccioli (1911-2002), humoriste et écrivaindont la réputation de poète etde conteur a largementcontribué à la renommée deCargèse. Il a écrit plusieursouvrages mettant en scènedes personnages hauts encouleur dans la Corse de lapremière moitié du XXe siècle.Spécialiste de la fable et del’historiette à moralité, il affec-tionne les portraits minutieuxde personnages étranges etattachants, adaptant des fablescélèbres et une descriptionhardie de ses contemporains.La rencontre de SuzanneCornillac avec N. Rochiccioli sesitue avant la guerre, quand ellehabitait Ajaccio.
Ci-contre : PartinelloCrayons. 12 x 18 cm©Raphaël Van den Driessche
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
22
Ci-dessus : Appietto, le ListinconeAquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm© PMS
Page suivante : AfaAquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm
© PMS
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
23
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
24
Ci-dessus : Le Monte GozziAquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm© PMS
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
25
Ci-dessus : UccianiCrayons. 26 x 18, 5 cm. © PMS
Ci-contre : BocognanoCrayons, 26 x 18, 5 cm. © PMS
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
26
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
27
L’Ajaccio de Suzanne Cornillac
La ville tient une place particulière pour Suzanne
Cornillac. Cette ville d’Ajaccio où elle a vécu à la
fin des années trente, elle en connaît tous les
aspects : le port, les places, les ruelles, les
monuments. Elle sait également quels sont les
modes de vie des habitants, notamment de la vieille
ville et montre avec habileté le linge séchant aux
fenêtres des immeubles, comme avant elle, les
Bassoul et Corbellini, dans les années 1910-1930.
Au fil de ses promenades, elle aime représenter les
barques, les bateaux, les remorqueurs et péniches
où engins de chantier en activité sur le port. Elle
figure aussi avec aisance les barques en hiver,
posées sur les immenses dalles du terre-plein, face
aux cafés du port, « chez Yvonne », par exemple.
Les barques hors de leur élément, en cours de
travaux avec de grandes parties de leur peinture
enlevée, au moment de leur révision, sont un
prétexte pour montrer la taille de ces imposants
navires en bois. Elle a peint aussi la modernité
d’Ajaccio, n’hésitant pas à montrer dans les années
soixante-dix, les grandes tours d’habitation des
Salines, au-delà du port des pêcheurs et de ses
barques traditionnelles.
Page précédente :Ajaccio, la fontaine desquatre lions.Aquarelle. 37, 5 x 27 cm© Jean Harixçalde
Ci-dessus, de gauche à droite : •Ajaccio, vue des hauteurs, vers 1936Gouache sur carton. 19 x 25, 5 cm.© Raphaël Van den Driessche
•Ajaccio, les tombeaux, vers 1936Gouache sur carton. 19 x 25, 5 cm.© Raphaël Van den Driessche
Ci-contre : •Le remorqueur dans le port d’AjaccioAquarelle. 26 x 18 cm© Jean Harixçalde
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
28
Ci-dessus : Ajaccio, les barques au reposAquarelle. 37 x 27 cm© Raphaël Van den Driessche
Page suivante : Ajaccio, une ruelle près du port
Aquarelle. 37 x 27 cm© Raphaël Van den Driessche
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
29
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
30
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
31
Ci-contre : Ajaccio, la fontainedes quatre lionsAquarelle. 37, 5 x 27 cm© PMS
Page précédente : Ajaccio, un coindu portAquarelle. 37 x 27 cm© Raphaël Van den Driessche
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
32
Ci-dessus : •Ajaccio, les Milelli.Crayons, 26 x 18 cm. © Jean Harixçalde•Ajaccio, les voûtes.Aquarelle. 37 x 27 cm. © Jean Harixçalde
Le Sud : Propriano, Fozzano, Sartène, BonifacioLa vaste région comprise entre Ajaccio et Bonifacio
comporte une grande diversité de paysages : bords
de mer, vastes vallées, montagnes et cours d’eau
importants qui rejoignent la mer en des estuaires
aux grandes beautés sauvages. De très nombreux
villages sont répartis sur ce territoire, dans les
vallées, sur des crêtes, au bord de la mer. Ces lieux
ont intéressé et captivé Suzanne Cornillac pendant
très longtemps. Lorsqu’elle adopte cette région, dans
les années trente, elle est conquise par ces villages
pittoresques, avec leurs caractéristiques géologiques
et naturelles, architecturales, animés d’activités de
toutes sortes, et dont les habitants ont gardé un sens
élevé des traditions. Tous les guides touristiques et
ouvrages consacrés à la Corse évoquent ces richesses
et les spécificités de l’île de beauté. Nombre de ces
villages de l’intérieur sont des lieux de séjour très
prisés. Pourtant, ces endroits sont assez peu abordés
par les peintres qui viennent en Corse et qui sont,
à l’évidence, plus attirés et inspirés par les côtes et
leur variété.
C’est la région de Fozzano, dont elle connaît les
moindres recoins, qu’elle a le mieux représentés.
D’une certaine manière, il y a un fort paradoxe de
constater que c’est presque un siècle après la
publication de la Colomba de Prosper Mérimée, en
1840, que Suzanne Cornillac propose et entame une
représentation picturale forte, exacte et précise de
Fozzano, le village de Colomba Carabelli 29. Et c’est
là tout le mérite de Suzanne Cornillac. En effet,
aucun artiste n’a su montrer avec autant d’aisance
et de précision les lieux où vécut Colomba : les rues,
les maisons fortifiées et les maisons plus modestes,
avec parfois des escaliers extérieurs, les fours, les
places et placettes du village mais aussi les arbres
et la végétation avec une atmosphère très juste,
pleine de vie et de lumière. Elle en montre les
environs : les dernières – ou premières – maisons
du village, parfois mal entretenues, un peu à
l’abandon, avec dans le fond, un magnifique écran
de montagnes lumineuses : les Giacomoni, ou bien
le fond clair de la baie du Valinco, avec Propriano
estompée dans la clarté du littoral… Elle montre
aussi les endroits où les habitants vivent et
travaillent : ici, un vaste enclos fermé « à la diable »
avec quelques branches, là, un autre enclos fermé
selon la tradition, avec de savants emboîtements de
grosses branches, encastrées entre deux troncs
creusés. Plus loin, c’est un enclos occupé par
quelques animaux et, à la sortie du village, un arbre
mal en point, victime il y a peu de la foudre. Des
champs d’oliviers, les pâturages descendant en pente
douce vers la mer, là-bas au loin. La vie dans toute
sa simplicité quotidienne.
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
33
Fozzano, u cataruCrayons. 26 x 18 cm
© Jean Harixçalde
29. Nombreux ont été lesartistes qui ont illustré l’ouvragede Mérimée : au XIXe siècle, desillustrateurs : Pierre Colonnad’Istria (en 1857), l’abbé Jean-Ange Galetti (en 1863), GastonVuillier (en 1893) et au XXe siècledes peintres et illustrateurs :Gaston Nick (Gaston Petrelli)avec des eaux-fortes en 1928,Pierre Rousseau (en 1934et 1949), Jean Picart le Doux(en 1946), Jean Chièze, dansles années 1940, RobertFalcucci (en 1946)…
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
34
Ci-dessus : Fozzano, l’acaciaAquarelle. 37 x 27 cm©Jean Harixçalde
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
35
Ci-dessus : Fozzano, la maison de Colomba
Aquarelle. 37 x 27 cm© Raphaël Van den Driessche
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
36
À la campagne. Aquarelle. 27 x 37 cm© PMS
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
37
Ci-dessus : L’escalierAquarelle. 37 x 27 cm. © PMS
Ci-contre : La maisonAquarelle. 37 x 27 cm. © PMS
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
38
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
39
Double page : Fozzano
Encres. 14 x 12 cm.© Raphaël Van den Driessche
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
40
Ci-contre : Viggianello, l’arbre coupéEncre. 14 x 12 cm© Raphaël Van den Driessche
Ci-dessous : Fozzano
Aquarelle. 27, 5 x 37, 5 cm© Raphaël Van den Driessche
Page suivante :Fozzano, l’escalier
Aquarelle. 27 x 37 cm© PMS
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
41
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
42
Ci-dessus de haut en bas : •Fozzano. Aquarelle. 27 x 37 cm•Fozzano. Aquarelle. 27 x 37 cm© Jean Harixçalde
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
43
Ci-dessus : Fozzano, l’égliseAquarelle. 27, 5 x 37, 5 cm
© PMS
44
Fozzano. Aquarelle. 27 x 37 cm© PMS
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
45
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
46
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
47
Page précédente : FozzanoAquarelle. 37 x 27 cm© Jean Harixçalde
Ci-dessus : Les GiacomoniAquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm
© PMS
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
48
Ci-dessus : PozzacciuAquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm© PMS
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
49
Ci-dessus : Sur la route de Sainte Marie Figaniella, vers 1954Aquarelle. 37 x 27 cm
© Raphaël Van den Driessche
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
51
Page précédente : Chemin de FiganiellaAquarelle. 37, 5 x 27 cm© PMS
Propriano, Sartène et Bonifacio
Propriano est un lieu que Suzanne Cornillac connaît
bien mais qui l’inspire moins que d’autres, comme
si elle ne parvenait pas à en trouver l’âme et, pour
cette raison, le déclic de la créativité. Elle en a
seulement donné des vues avec un coin du port et
ses bateaux, sujet largement abordé dans ses vues
d’Ajaccio.
Dans le sud de la Corse, Sartène a une belle
réputation en matière de singularité et de
pittoresque, ce qui fait écrire à Pierre Morel, dans
son ouvrage intitulé La Corse, publié en 1938 : « A
Sartène, on est imprégné dès l’abord d’une
atmosphère tout autre. Ce n’est plus comme au long
du Cap, un rappel de la Côte d’Azur, et de ses grâces ;
la race ne se ressent plus comme à Bonifacio, Calvi,
Bastia, du mélange des sangs ; la ville est spécifi-
quement corse ». La ville accrochée à sa montagne
a été peinte par Georges Artemoff, Raoul Carré,
Adolphe Cossard, Germaine de Coster, Max Escher,
Gaston Guignard, Stanley Hayter, Suzanne
Lecoannet, Louis Soull’ard et Pierre Gaston Rigaud,
spécialiste des églises et de l’architecture qui en
envoie aux Salons des Artistes français entre 1933
et 1938 des vues très structurées de la plus corse
des villes corses. Suzanne Cornillac a beaucoup
représenté Sartène. Elle aime ces lieux qui lui
rappellent les villages médiévaux du Sud de la
France qu’elle connaît bien, qu’elle a visité et qui
l’ont inspirée, avec leurs remparts, leurs ruelles
étroites, leurs hautes maisons en pierres. Elle quitte
Fozzano le matin ave le car pour aller passer la
journée à Sartène : elle y travaille sans relâche et
rentre le soir, heureuse, avec son travail et sa
mallette sous le bras. Sartène est largement présente
dans son répertoire, la ville avec son aspect massif
et ses maisons des siècles passés, avec leurs
imposants moellons l’inspirent beaucoup. Les
passages voûtés, l’intimité qui semble régner dans
ces ruelles lui donnent l’occasion de trouver les jeux
de lumière qui mettent en relief ces caractéristiques
que les Sartenais connaissent bien et qui séduisent
les visiteurs de passage. Suzanne Cornillac peint
souvent les passages voûtés, trouvant avec justesse
les oppositions d’ombre et de lumière.
À propos de Bonifacio, Pierre Morel, dans le même
ouvrage La Corse indique : « La nature et l’histoire
ont comploté ensemble pour faire de Bonifacio et
de ses alentours un pays profondément différent du
reste de la Corse. On se demande par quel hasard
ce plateau de calcaires récents est resté accroché au
bloc compact de roches granitiques et schisteuses
qui forment l’ensemble de l’île ». La grandeur des
lieux et l’atmosphère de la cité des falaises sont
rendues de belle façon au cours des années 1920-
1940 par les mêmes artistes qui ont peint Sartène :
Berjonneau, Carré, Chieze, Cossard, Coster, mais
aussi André Delpey ou Louis-Ferdinand Antoni.
D’une certaine manière, la verticalité des falaises
de Bonifacio présente, apparemment, un intérêt
limité pour Suzanne Cornillac qui en traduit des
aspects plus intimistes ou particuliers. Elle connaît
bien les lieux qu’elle a peints à plusieurs reprises
montrant la marine, les remparts, la haute ville avec
ses rues étroites, si caractéristiques. Elle a donné
également des vues du « grain de sable », de certains
coins du plateau ou du « goulet », au coucher du
soleil. Au milieu des années cinquante, elle arpente
la ville pour trouver les meilleurs endroits et les
traduire avec son pinceau plein de finesse. Ses
aquarelles serviront de décoration à l’hôtel du Roi
d’Aragon, chez Simon Cotoni, pour le plus grand
plaisir des clients de l’établissement. Elle y
retournera plusieurs fois, empruntant le car, souvent
conduit par Thomas Ollandini. Sur place, elle prend
pension chez une dame qui a également un
restaurant sur le port.
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
52
Ci-dessus : Propriano, les barquesAquarelle. 37, 5 x 27 cm© Raphaël Van den Driessche
Page suivante : Sartène, la voûte
Aquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm. © PMS
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
54
Sartène, une ruelleAquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm© PMS
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
55
Sartène, l’escalierAquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm
© PMS
56
Le pont sur le Rizzanese. Aquarelle. 37, 5 x 27 cm© PMS
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
58
Ci-dessus : Bonifacio, vers la haute-villeAquarelle. 32 x 24 cm© Raphaël Van den Driessche
Le Nord de la Corse : Bastia, Corte, VizzavonaLors de sa découverte de l’île, Suzanne Cornillac a
beaucoup peint la Corse. Par la suite, comme de
nombreux artistes, et pour des raisons de logistique
notamment, elle réduit son champ d’action et peint
seulement quelques lieux du Nord de la Corse. La
forêt de Vizzavona, où elle séjourne chaque été, a
sa préférence. En général elle y passe au moins une
quinzaine de jours et réside à l’hôtel-restaurant du
Monte d’Oro, propriété de la famille Sicurani. C’est
Mlle Sicurani qui la conduit ou la fait conduire en
voiture. Vizzavona est l’occasion pour Suzanne
Cornillac de montrer la montagne et les pins lariciu,
avec quelques sujets majestueux au premier plan.
Elle peint la grandeur des masses rocheuses, de la
forêt, qui ont inspiré d’autres artistes comme Lucien
Peri. Elle laisse quelques aquarelles chez les
Sicurani, et les amateurs de peinture ravis de
retrouver la forêt, la fontaine ou la chapelle de
Vizzavona, peuvent en faire l’achat s’ils le souhaitent.
Elle a également peint Bastia, Corte avec son
campanile et les environs de la ville.
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
59
Bastia, le vieux port, vers 1936Gouache sur carton. 19 x 26 cm
©Jean Harixçalde
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
60
En haut : CorteIllustration de l’ouvrage La Corse de Paul Arrighi,1946. © DR
En bas : CorteCorteCrayons. 26 x 18, 5 cm© PMS
Page suivante : Vizzavona, la fontaine
Aquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm© PMS
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
61
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
62
DEUXIÈME PARTIE. Dessins et aquarelles traduisant la beauté de la Corse
63
Page précédente :Vizzavona, la chapelleAquarelle. 38 x 28 cm© Jean Harixçalde
Hêtre, forêt de Vizzavonacrayons. 26 x 18, 5 cm
© PMS
Vizzavona, la cascadecrayons. 26 x 18, 5 cm
© PMS
65
Page précédente : Vizzavona, le Monte d’OroAquarelle. 37, 5 x 27, 5 cm© PMS
À droite : Rémuzat (Drôme),Chapelle Saint Michel.Crayons. 26 x 18, 5 cm.© PMS
Troisième partieRegards
sur d’autres lieux
Suzanne Cornillac nous donne un regard
personnel de plusieurs régions où elle a vécu ainsi
que des villes et villages où elle est allée, pour
répondre à des commandes ; visions de jeunesse
mais aussi de l’âge mûr et de la vieillesse, toujours
réalisées avec beaucoup de justesse. Cet ensemble
permet aussi de voir l’évolution de son style. On
note également une constante dans son approche
des sujets traités à l’encre ou à l’aquarelle. Quand
elle est dans la Drôme où elle vécut certaines années
de sa jeunesse, les vues des paysages de ce
département représentent Vaison la Romaine,
Nyons, Rémuzat, Romans, Saint Mai. Suzanne
Cornillac donne avec ses vues de l’Aveyron : de
Millau, d’Aguessac, cette atmosphère si
caractéristique des petites villes anciennes de ce
département. Ses vues de l’Aveyron, elle ne les traite
pas seulement à l’aquarelle mais aussi au dessin, en
petits coups de charbon et de crayon noir, tout en
nuances. Et lorsqu’elle peint la Provence, c’est
encore une autre approche pour décrire des coins
du Vaucluse, avec Avignon, Villeneuve les Avignon,
ou à Lapalud au château de Kerchêne, dont les
propriétaires étaient ses amis ; là elle réalise des
dessins dans un style généralement usité dans les
années vingt-trente.
Lors de ses séjours en Provence, Suzanne Cornillac a
dessiné et peint le littoral : Marseille, Aix en Provence,
la plupart du temps à la demande de personnes de
son entourage ou qui connaissaient la qualité de son
travail. La Ciotat où habite Émile Rippert. Suzanne
Cornillac a vécu à Nice de 1938 à 1956, exerçant à la
radio, au journal, évoquant la Corse dans ses
émissions et articles. Elle peint la Côte d’Azur, Nice
avec les collines de Cimiez et son monastère, Saint
Jean Cap-Ferrat, Èze village, les Hauts de Cagnes,
Monaco et sans doute beaucoup d’autres lieux car,
que ce soit en Corse ou sur le Continent, elle se déplace
énormément en fonction de la demande de ses clients.
– la Drôme –– La Drôme –
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
66
Ci-dessus : Nyons, la tour du château.Aquarelle. 37, 5 x 27 cm© PMS
Ci-contre : Vaisons la Romaine, le cloître.Crayons, 37, 5 x 27, 5 cm© PMS
– L’Aveyron –
TROISIÈME PARTIE. Regards sur d’autres lieux
67
AguessacAquarelle. 37 x 27 cm
© Raphaël Van den Driessche
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
68
– La Provence –
Valence, côte Saint MartinAquarelle. 37 x 27 cm© PMS
TROISIÈME PARTIE. Regards sur d’autres lieux
69
Villeneuve-les-AvignonAquarelle. 37 x 27 cm
© Raphaël Van den Driessche
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
70
– La Côte d’Azur –
Ci-dessus, de gauche à droite (© Raphaël Van den Driessche) : Nice, vieille rue. Aquarelle. 14 x 9 cm
Nice, rue Sainte-Claire. Encre. 37 x 27 cm
TROISIÈME PARTIE. Regards sur d’autres lieux
71
Ci-dessus, de gauche à droite (© Raphaël Van den Driessche) : Cagnes, une ruelle.
Aquarelle. 37 x 27 cm, signée SC.
Villefranche-sur-Mer, l’église.Aquarelle. 37 x 27 cm, signée SC.
En 1957, Suzanne Cornillac quitte la côte d’Azur
pour la région Parisienne. À cinquante-trois ans,
elle fait le choix de retourner dans la ville où elle est
née et où elle pense trouver une certaine sérénité.
Elle a commencé sa carrière d’artiste à Paris ; c’est
là aussi qu’elle l’a terminée. Tant d’artistes ont peint
Paris, la ville lumière et ses endroits si beaux…
Suzanne Cornillac nous montre le Paris qu’elle aime,
qu’elle a appris à connaître dans sa jeunesse. On
apprécie alors ses vues de la capitale : là, elle
affectionne la pierre des bâtiments, des fontaines,
l’eau qui coule, la Seine qui se reflète sur la voûte
des ponts, les murs… Elle peindra également Choisy-
le-Roi à différentes saisons, parfois d’une fenêtre
de son appartement ; elle trouve aussi un sujet avec
les sablières en bord de Seine. La région Sud de
Paris lui plaît tout autant avec ses nombreux motifs :
l’Étang d’Ablis, près de Rambouillet, la campagne
de Ballainvilliers, près d’Epinay-sur-Orge…
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
72
– Paris, région parisienne –
Paris, rue GalandeDessin. 26 x 18 cm
©Jean Harixçalde
Ci-dessous : Paris, escalier près de la SeineAquarelle. 26, 5 x 34 cm
©Raphaël Van den Driessche
TROISIÈME PARTIE. Regards sur d’autres lieux
73
Choisy-le-Roi, vue de sa fenêtreAquarelle. 32 x 24 cm© Raphaël Van den Driessche
BallainvilliersAquarelle. 37 x 27 cm
© Raphaël Van den Driessche
En haut : Portrait de Suzanne Cornillac en 1933. Archives iconographiques du Palais du Roure, Avignon ©-DR
Ci-contre : Peignant, assise sur son tabouret, vers 1975.© Raphaël Van den Driessche
75
Quatrième partie
Les techniques de Suzanne Cornillacpar Catherine Van den Driessche, fille de l’artiste
Durant mon enfance, j’étais souvent auprès de ma
mère quand elle peignait. Je la vois encore lorsqu’elle
choisissait son sujet. En général elle venait « repé-
rer » auparavant l’heure la plus favorable, celle où la
lumière était la plus vibrante et les ombres les mieux
dessinées. « Le plus difficile c’est de savoir s’asseoir »
disait-elle en reprenant la phrase de Corot. Elle s’ins-
tallait alors sur son siège pliant et sortait son maté-
riel. Elle utilisait pour ses aquarelles du papier
Arches coupé à la dimension de son carton et main-
tenu par des pinces à dessin.
Pour cadrer et définir les limites de son sujet, elle
se servait d’un «viseur », petite fenêtre découpée
dan un morceau de carton. Puis elle commençait à
dessiner. Les lointains étaient à peine suggérés, le
trait s’affirmait dans les plans intermédiaires et de-
venait fort dans les plans rapprochés. Parfois, à cer-
taines périodes, dans les années 1950-1960, elle
renforçait les premiers plans avec un crayon fusain
Wolf sur lequel elle vaporisait du fixatif. Sa manière
de dessiner sans détails superflus, allant à l’essen-
tiel, était destinée à servir de guide pour la mise en
couleurs. Elle disait qu’il fallait prendre du recul et
qu’on devait « entrer dans le paysage » et en pres-
sentir la couleur.
Elle commençait toujours par peindre le ciel. Elle af-
firmait que si le ciel était « raté », ce n’était pas la
peine de continuer. A vrai dire, je ne l’ai jamais vu
rater un ciel. Ensuite, pour laisser le papier sécher un
peu, elle s’attaquait aux contrastes des premiers
plans. « Il faut écouter sécher le papier », disait-elle,
car pour placer les lointains, le ciel devait être légè-
rement humide. Les couleurs étaient appliquées di-
rectement et fusionnaient grâce à l’eau qui les faisait
se mélanger sur le papier. Les lumières qui avaient
été précisées sur le dessin, étaient réservées et lais-
saient apparaître le blanc du papier.
« La qualité des lumières est directement liée à la qua-
lité des ombres ». C’était sa manière de dire que la ri-
chesse des couleurs dans les contrastes et la réserve
des blancs permettent d’obtenir le maximum de lu-
minosité. Elle utilisait une gamme de couleurs res-
treinte où dominaient les ocres, les terres aux tons
chauds et les bleus profonds comme l’outremer et le
cobalt. Les autres couleurs qui composaient sa palette
intervenaient de façon moins généreuse. Sa préfé-
rence allait aux couleurs en tubes Winsor et Newton.
Assise à coté d’elle, j’aimais voir les couleurs, conte-
nues dans son pinceau gonflé d’eau, s’écouler et se
mélanger sur le papier. Ce n’est qu’à la fin, après
avoir mis de l’eau claire dans son godet, qu’elle co-
lorait partiellement, avec des tons lumineux et
transparents, les parties qui avaient été réservées.
Cette façon de procéder, qu’elle a le plus souvent
pratiquée, lui venait de l’enseignement qu’elle avait
reçu de son « Maître », Pierre Vignal, qui exigeait
de ses élèves une forte discipline de travail, une
maîtrise du dessin et de la construction. Excellent
pédagogue, il savait leur communiquer l’envie de
maîtriser et de sentir l’intérêt de cette technique
d’eau et de lumière qui tendait avant tout à saisir
un effet ou une atmosphère.
Ma mère me parlait souvent de Pierre Vignal pour
qui elle avait une grande admiration. Elle parlait de
son exigence, mais aussi de la manière bienveillante
qu’il avait d’observer le travail de ses élèves. Ses cor-
rections commençait toujours par : « Mais ce n’est
pas mal du tout !... ». Il relevait ensuite point par
point ce qui laissait à désirer et mettait en évidence
ce qui était réussi. Tout en gardant les bases de cet
enseignement, elle n’a cessé tout au long de sa vie
d’exprimer sa propre vision des choses et sa sensi-
bilité. Elle n’a pas hésité à s’éloigner de cette tech-
nique pour obtenir des effets particuliers.
A plusieurs reprises, elle a peint sur un papier ocre
à grains fins où elle plaçait avec discrétion quelques
touches de gouache blanche. Pendant peu de
temps, dans les années cinquante, elle dessinait au
crayon fusain sur un papier lisse à peine teinté et
elle rehaussait délicatement son dessin avec des
crayons de couleurs aquarellables qu’elle humectait
très légèrement. Elle a également souvent utilisé le
fusain, particulièrement à Avignon quand elle fré-
quentait le Palais du Roure et dans la période où
elle a illustré le livre de Paul Arrighi. Elle travaillait
à l’estompe pour les nuances claires et renforçait
progressivement l’intensité des ombres.
Elle a fait aussi de nombreuses sanguines pour les-
quelles elle se servait du même procédé. Elle aimait
beaucoup dessiner à la plume avec de l’encre de
chine. C’est une discipline qu’elle a pratiquée toute
sa vie. Comme en aquarelle, elle privilégiait les
contrastes. Son trait vigoureux ne s’embarrassait
pas de détails. Elle n’hésitait pas à couvrir de noir
certaines parties d’ombres pour mettre en valeur le
blanc du papier où elle traçait un léger dessin qui
était réduit à l’essentiel. Dans les années cinquante
elle se servait d’un stylo à pompe (inventé par Pey-
net) qui était muni d’une plume d’oie. Elle appré-
ciait ce stylo avec lequel elle obtenait une liberté de
trait et davantage de vigueur. Malheureusement la
fabrication de ce stylo a duré peu de temps.
Elle peignait et dessinait toujours d’après nature,
sur le motif. Par contre, tout ce qui était lié à l’il-
lustration se faisait à la maison.
Lorsque le soir elle travaillait au projet des contes
d’Andersen, je l’observais penchée sur son bureau,
la lumière vive de sa lampe éclairait sa feuille de
petit format. Cette image est restée gravée dans ma
mémoire. Elle dessinait finement à la plume avec
de l’encre de chine noire. Pour colorer, elle utilisait
des encres de couleurs. C’était un travail très délicat
destiné à l’édition d’un livre d’art qui devait être
mis en couleurs à la main, par passages successifs
avec des pochoirs. Lors de la réalisation, il fallait
anticiper les possibilités de superpositions néces-
saires pour restituer le plus fidèlement possible les
couleurs de la maquette. Elle a énormément tra-
vaillé sur ce projet qui, trop coûteux pour l’éditeur,
n’a pas abouti, malheureusement. Pour l’illustra-
tion du « Cantique du soleil » de Saint François
d’Assise, livre qui était entièrement réalisé à la
main en nombre limité, elle utilisait un papier à
fort grammage qu’elle appelait « parchemin végé-
tal ». Ses dessins cloisonnés, dont les traits noirs
affirmés faisaient penser à des vitraux, étaient éga-
lement colorés avec des encres.
Il y avait toujours pour moi un morceau de papier
pour que je dessine quand je l’accompagnais sur
les sites qu’elle avait choisis. C’est naturellement
en regardant ma mère peindre et dessiner, que
s’est imposée l’envie de la suivre modestement
dans cette voie. Peu à peu en grandissant, j’ai
commencé à peindre, elle m’encourageait et me
donnait des conseils.
A sa disparition, la peinture est devenue mon ac-
tivité principale et j’ai éprouvé le besoin de trans-
mettre ce qu’elle m’avait appris en animant des
cours de dessin et d’aquarelle.
Epinay sur Orge, 12 juillet 2009
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
76
Suzanne Cornillac illustrateur et auteur littéraire
Entre 1934 et 1982, Suzanne Cornillac a illustré de
nombreux ouvrages et réalisé ou participé à
plusieurs projets. Par ces opportunités, elle a pu
donner une dimension complémentaire à sa carrière
d’artiste.
En 1934, deux de ses dessins à l’encre figurent dans
un livre d’Émile Ripert « Avignon au XIXe siècle —
La Librairie Roumanille », publié à Lyon par la
Société anonyme de l’imprimerie A. Rey sous l’égide
des « Bibliophiles du Roure ». Ces dessins figurent
« Le mas des Pommiers, maison natale de
Roumanille » (pleine page hors texte au début du
livre) et un dessin au chapitre « Un fils de jardinier
poète et imprimeur ». Une de ses illustrations,
signée S.C. de Trémines, « La Madone de l’hôtel
de Javon » figure dans le livre « Souto la tiaro
d’Avignoun » écrit par Folco de Baroncelli-
Javon, publié en 1935.
En 1945, elle produit six illustrations pour l’ouvrage
de L.-M. Beam, Marquita, publié à Nice, d’après les
aquarelles de l’auteur. L’action se passe dans la
Californie espagnole du XIXe siècle et les illustrations
représentent des personnages locaux traités dans
des couleurs pâles et bien contrastées.
L’année suivante, elle donne, pour figurer dans la
partie illustration de l’ouvrage de Paul Arrighi, La
Corse, publié à Nice par « L’image littéraire » en
1946, quarante-deux fusains représentant toutes les
régions de Corse : bords de mer, montagnes, villes,
villages, églises, maisons, traités en fortes
oppositions d’ombre et de lumière et en nuances
délicates.
QUATRIÈME PARTIE. Suzanne Cornillac, illustrateur et auteur
77
Ci-contre : Le mas des Pommiers, maison natale de Roumanille. Dessin. © Raphaël Van den Driessche
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
78
En 1959, un de ses dessins illustre le « Cours familier
de littérature, quarantième entretien, apparition
d’un poème épique en Provence », reproduction du
manuscrit d’Alphonse de Lamartine, publié pour le
centenaire de « Mireille », de Frédéric Mistral.
Elle est par la suite mise en relation par Paul Arrighi
avec Roccu Multedo 30 ; les deux hommes se
connaissent bien, ils ont écrit à la fin des années
trente dans L’Annu Corsu, devenu L’Année Corse en
1937 31. Roccu Multedo souhaite illustrer son ouvrage
Le tombeau de Colomba ; bien sûr Suzanne Cornillac
connaît si bien les lieux… Une rapide correspondance
est échangée entre eux au début des années 1980 et
l’accord est conclu. L’ouvrage publié en 1982 par
l’éditeur Belisane contiendra ainsi des dessins de
Cornillac. La réédition de cet ouvrage de Roccu
Multedo sous le titre Le Nouveau Folklore Magique
de la Corse, publié en 1998 chez Sammarcelli contient
également deux dessins représentant « Le tombeau
de Colomba » et « L’arbre vampire ».
Parmi ses projets : une importante série
d’illustrations pour les « Contes d’Andersen » à la
demande d’un éditeur Niçois
qui voulait faire des livres
d’art, peu après 1945.
Suzanne Cornillac
s’attelle aux
illustrations de
plusieurs contes.
Ces illustrations devant être colorées planche après
planche à l’aide de pochoirs et pour cette
commande, elle monte un atelier ; mais les
problèmes économiques feront que ce livre ne
paraîtra pas.
Suzanne Cornillac entame également un projet
personnel : l’illustration d’une vingtaine
d’exemplaires, sur commande, du Cantique des
Créatures ou « Cantique du Soleil » de Saint
François d’Assise.
Le sujet rappelle que durant l’automne 1225, épuisé
par la stigmatisation et par la maladie, Saint
François s’est retiré à Saint-Damien. Presque
aveugle, seul dans une cabane de roseaux, abattu
par la fièvre, Saint François composa ce chant
d’amour qu’il fit monter vers le Père de toute
Création.
30. En 1936, encore élève aulycée de Bastia, Roch Multedoest lauréat des jeux Floraux deCorse pour la poésie corse. En1950, il reçoit le Prix PierreBenoit de LittératureRégionaliste et en 1974, le PrixPétrarque. De 1956 à 1963, ilest archiviste de l’Académielittéraire « Lingua corsa » etcollabore à l’établissement duLexique Français-Corse. Il estl’auteur de plusieurs ouvragessur la Corse.31. Voir à ce sujet le numéro 64de la revue « Études corses »de juin 2007 qui publie lesactes du colloque « La Corsedans l’histoire et histoire desrevues », Bastia, 28 juin 2006.
Ci-contre : Le Cantique du Soleil
Encre et Aquarelle. 16, 3 x 12, 3 cm
© Raphaël Van den Driessche
© Raphaël Van den Driessche
Suzanne Cornillac auteur littéraire
Il s’agit là d’un aspect moins connu de Suzanne
Cornillac. Au fil du temps, des amitiés nouvelles se
tissant, voici que sa curiosité s’éveille, augmente ;
son désir de créer, dans des genres nouveaux :
poésie, romans, recherches… va s’exprimer… Sa
fréquentation des écrivains, depuis ses années
passées en Avignon, son activité de journaliste, son
désir ancien de s’exprimer par l’écriture le fait qu’elle
ait illustré des ouvrages, expliquent que son envie
d’écrire depuis longtemps (jeune, elle écrivait ses
« carnets de bord ») se soit traduit par un grand
nombre de poèmes ainsi que par deux romans dont
l’action de l’un se déroule en Corse et l’autre en
Provence ; ces deux romans n’ont pas été publiés à
ce jour ; il s’agit de « Catena », qui traite de la vie
rurale en Corse au début du XXe siècle et de « Le
mur des Templiers » dont l’action se déroule à
Rémuzat, largement inspiré par les souvenirs
d’enfance et des anecdotes racontées par son père.
Elle a écrit également des poèmes, notamment dans
les années 1970 à 1975, à Choisy-le-Roi.
QUATRIÈME PARTIE. Suzanne Cornillac, illustrateur et auteur
79
Ci-dessous : Autoportrait de Suzanne Cornillac a choisy-le-roi.© Raphaël Van den Driessche
La Corse-du-sud par le charme de l’aquarelle : Suzanne Cornillac (1904-1982)
80
32. Émile Delpierre (1915-1992).Maître de chapelle à Lille, saville natale, à vingt ans, il aégalement fréquenté l’écolenormale de musique de Paris.Sur les conseils de ReynaldoHahn, il s’installe à Nice en1942 où il fonde une asso-ciation de concerts et unechorale. Là, il donne denombreux concerts, participe àdes émissions radiophoniques,à des spectacles musicaux. Ila composé tous les thèmesqui accompagnaient lesdisques de Suzanne Cornillacainsi que la musique du filmde Claude Chabrol, Le beauSerge. La ville de Nice lui adécerné un prix de compo-sition en 1960 ; dans cettemême ville, un jardin porte lenom de ce musicien.
33. Rennie Pequeux Barboni aédité en 2008 un remarquableouvrage « Costumes de CorsePannu è panni » consacré auxmodes vestimentaires deCorse, fruit de quarante annéesde recherches, de la publi-cation d’une thèse en anthro-pologie sur le sujet, ainsi quede nombreux articles, notam-ment dans des revues etouvrages collectifs.
Ses textes pour émissions « radio »À partir de la fin des années cinquante, les émissions
radiodiffusées et l’engouement pour les disques
entrainent des opportunités d’activité d’écriture
pour certains artistes et écrivains. Suzanne Cornillac
va participer à ce mouvement jusqu’en 1965. On
peut ainsi écouter sur les antennes de la radio
nationale, dans l’émission hebdomadaire
« Évocation », des « dramatiques » auxquels elle a
contribué comme « Un Noël pas comme les autres »,
également diffusée en disque.
À partir de 1957 Suzanne Cornillac est sollicitée
pour écrire des textes pour disques accompagnés
de diapositives pour les Editions du Berger. Elle
participe dans ce cadre pour « La merveilleuse
nuit de Gréccio » (disque avec vues fixes) ; « Le
loup de Gubbio » aux éditions du Berger, les textes
sont de Suzanne Cornillac ; Philippe Joudiou a
fait les dessins des films de vues fixes
accompagnant les disques. À mentionner
également : « Un cadeau qui chante pour
maman », livre disque au Petit Ménestrel : les
illustrations ne sont pas de Suzanne Cornillac :
c’est sa fille Catherine qui chante la chanson ; elle
tient également des rôles dans pratiquement tous
les disques, notamment dans « Sœur Rosalie ».
Suzanne Cornillac participe pour Bayard Presse à
cinq contes de Noël : elle écrit les textes qui sont
illustrés par Philippe Joudiou ; il s’agit de
« Mamadou et l’étoile de Noël » ; « Noël au pays
des santons » ; « Le Noël d’Angelito » ; « Un Noël
pas comme les autres » et de « La bergère des
Alpilles ». On citera aussi « Trois brins de Paille » ;
« Peuple mon frère » (qui relate la vie de sœur
Rosalie, fille de la charité qui a consacré sa vie aux
pauvres et a eu une conduite héroïque sur les barri-
cades de 1870) ; « Don Bosco » ; « Saint Vincent
de Paul ». La musique de tous ces disques a été
composée par Émile Delpierre 32 ; les vues fixes
avec des dessins sont indépendantes, réalisées par
d’autres auteurs.
Suzanne Cornillac s’est toujours intéressée aux diffé-
rents costumes Corses et, lorsqu’elle est installée à
Choisy-le-Roi et qu’elle a moins de possibilités de
peindre, elle se passionne de nouveau pour le sujet.
Alors, autour des années 1976-1978, avec les conseils
de Rennie Pecqueux-Barboni 33, avec qui elle
entretient une abondante correspondance, elle
confectionne une vingtaine de figurines.
Figurines. Taille : 25 centimètres© Raphaël Van den Driessche
Remerciements
Jean-Jacques Panunzi, président du Conseil général de la Corse-du-sud
Jacques et Catherine Van den Driessche, Raphaël Van den Driessche, Christian Istria, Pierre-Marcel Sicurani,
Sabine Barnicaud, conservatrice du Musée du Palais du Roure, Avignon, Pierre Vignal (fils), Christiane Castel Verret, Véronique Ripert.
Le service de communication du Conseil général de la Corse-du-sud
Ainsi que les collectionneurs qui ont permis, par le prêt de leurs œuvresla réalisation de cette exposition.
L’association « le lazaret Ollandini-musée Marc Petit », et son président François Ollandini, pour l’accueil de cette exposition.
Conception graphique et mise en page : Crédits photographiques : Raphaël Van den Driessche, Jean Harixçalde, PMS
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays.© 2009 - Conseil général de la Corse-du-sud
Achevé d’imprimer en septembre 2009 sur les presses de l’imprimerie Sammarcelli20600 BIGUGLIA - France
LLa peinture de Suzanne Cornillac est un univers
particulier, presque un monde à part tant il est vaste
et diversifié par ses sujets ; domaine sans cesse
renouvelé, toujours étonnant par ses compositions et
ses harmonies de couleurs. En parler est un grand
plaisir car c’est une façon de poursuivre son but qui
était de nous montrer la beauté des lieux et des choses,
la nature et la vie.
Présenter Suzanne Cornillac, c’est évoquer et montrer
le travail, réalisé au cours d’une cinquantaine d’années
dans plusieurs régions françaises et en Corse, par cette
femme au destin si particulier. Sa vie est à l’image de
sa personnalité et du genre de femme qu’elle a été : une
femme à l’évidence en avance sur son temps, d’une
certaine manière un peu anticonformiste, qui aimait se
fixer des défis, n’avait pas froid aux yeux et voulait
s’exprimer par la peinture et par l’écriture.
La découverte et l’amour de la Corse sont pour Suzanne
Cornillac une affaire de hasard… et de hasard
chanceux… C’est en 1935 qu’elle vient en Corse sur les
conseils d’Émile Ripert, et les circonstances font qu’elle
séjournera plusieurs mois dans la tour de Girolata. Peut-
on trouver plus bel endroit pour découvrir la Corse ?
Elle y reviendra et découvrira la Rocca et Fozzano… et
y séjournera… Elle a réalisé de très nombreuses vues
de villages de Corse ainsi que d’Ajaccio ; elle s’est
imprégnée de sa région d’adoption, Fozzano et du
Sartenais.
Recommended