LA SALLE DES INVENTIONS, BONBONS INUSABLES ET...

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LASALLEDESINVENTIONS,BONBONSINUSABLESETCARAMELSACHEVEUX

LorsqueMr.Wonkacria:«Arrêtezlebateau!» lesOompa-Loompasenfoncèrent leursramesdanslarivièreetramèrentfurieusementàrebours.Lebateaus’immobilisa.

LesOompa-Loompasvenaientderangerlebateaudevantlaporterouge.Surcetteporte,onpouvait lire :SALLEDES INVENTIONS–PRIVE–ENTREE INTERDITE.Mr.Wonkaprituneclefdanssapoche,sepenchapar-dessusbordetglissalaclefdanslaserrure.

«Ceciestlasallelaplusimportantedetoutemonusine!dit-il.C’esticiquemijotentmesdernières inventions les plus secrètes !Que ne donnerait le vieux Fickelgruber s’il pouvaitentrerici,nefût-cequepourtroisminutes!SansparlerdeProdnose,deSlugworthetdetouslesautrespetitschocolatiersmiteux !Etmaintenant,écoutez-moi !Vousnesalirez rien,enentrant ici !Vousnetoucherezàrien!Vousnetripoterezrien!Vousnegoûterezderien!Promis?

—Oui!Oui!crièrentlesenfants.C’estpromis!—Jusqu’àcejour,ditMr.Wonka,personne,pasmêmeunOompa-Loompa,n’aeuledroit

d’entrerici!»Ilouvritlaporteetquittalebateaupourlasalle,suividesquatreenfantsetdeleursparents.

«Netouchezàrien!criaMr.Wonka.Etnerenversezrien!»CharlieBucketpromenasesregardssur lasallegigantesque.Oneûtditunecuisinede

sorcière!Danstouslescoins,ilyavaitdesmarmitesenmétalnoir,fumantetbouillonnantsurdegrandsfourneaux,desbouilloiressifflantesetdespoêlesàfrireronronnantes,d’étrangesmachines de fer qui crachotaient et cliquetaient, et des tuyaux qui couraient le long duplafondetdesmurs,letoutenveloppédefumée,devapeurs,derichesetdélicieuxparfums.

QuantàMr.Wonka,ilsemblaitencoreplusvif,plusagitéqued’habitude.Onvoyaitbienquec’étaitlàsasallepréférée.IlsautillaitaumilieudescasserolesetdesmachinescommeunenfantparmisescadeauxdeNoël,nesachantparoùcommencer.Ilsoulevalecouvercled’unegrandemarmiteetrenifla:puisiltrempaundoigtdansunebarriquepourgoûterunemassejauneetvisqueuse:puisilallaàgrandspasversl’unedesmachinesettournaàgaucheetàdroiteunedemi-douzainedeboutons;puisiljetaunlongregardinquietparlaportièrevitréed’un gigantesque fourneau, se frotta lesmains et rit tout doucement, l’air satisfait. Puis ilcourutversuneautremachinepetiteetbrillante,etquiémettaitd’inlassables«Phut–phut–phut – phut », et à chaque « phut », il en tombait une grosse bille verte. Du moins, celaressemblaitàdesbilles.

«Desbonbonsacidulésinusables!s’écriafièrementMr.Wonka.Ladernièrenouveauté!Jelesaiinventéspourlesenfantsquin’ontquetrèspeud’argentdepoche.Prenezundecesbonbons,etsucez-le,sucez-le,sucez-le,ilnedeviendrajamaispluspetit!

—C’estcommeduchewing-gum!s’écriaVioletteBeauregard.—Cen’estpascommeduchewing-gum,ditMr.Wonka.Lagommedoitêtremâchée,mais

tu te casserais les dents sur ces bonbons-là. Cependant ils ont un goût fabuleux ! Et ilschangentdecouleurunefoisparsemaine!Etilsnes’usentjamais!JAMAIS!C’estdumoinscequejepense.L’und’euxestmisàl’épreuve,encemomentmême,danslapiècevoisinequimesertdelaboratoire.UnOompa-Loompaestentraindelesucer.Celafaitdéjàunanqu’illesucesansarrêt,etiltientbon!

«Danscecoin-là,poursuivitMr.Wonkaentraversantlasalleàpasvifs,danscecoin,jesuis en train d’inventer une toute nouvelle espèce de caramels ! » Il s’arrêta près d’unegrande casserole. La casserole était pleine d’une mélasse violâtre, bouillonnante etmoussante.LepetitCharliesehissasurlapointedespiedspourmieuxlavoir.

«C’estducaramelquifaitpousserlescheveux!criaMr.Wonka.Ilsuffitd’enavalerune

toutepetitepincéeet,auboutd’unedemi-heureexactement,ilvouspoussesurtoutelatêteunesuperbecrinière!Etdesmoustaches!Etunebarbe!

—Unebarbe!s’écriaVerucaSait.Quipeutbienavoirenvied’unebarbe?— Elle t’irait très bien, dit Mr. Wonka, mais, malheureusement, le mélange n’est pas

encoreaupoint.Ilesttropfort.Ilesttropactif.Jel’aiessayéhiersurunOompa-Loompa,dansmonlaboratoire,etaussitôt,unegrandebarbenoireluiapoussé,etcettebarbeapoussésivite que bientôt le sol était couvert de tout un tapis chevelu. Elle poussait si vite qu’ellerésistait aux ciseaux, impossible de la couper ! A la fin, nous avons dû nous servir d’unetondeuseàgazonpourenveniràbout!Maisbientôt,monmélangeseraprêtàl’usage!Etalors, plus d’excuse pour les petits garçons et les petites filles qui se promènent le crânechauve!

— Mais, Mr. Wonka, dit Mike Teavee, les petits garçons et les petites filles ne sepromènentjamaisle…

—Nediscutonspas,monpetit,nediscutonspas!criaMr.Wonka.Nousn’avonspasuneminuteàperdre!Maintenant,sivousvoulezvousdonnerlapeinedemesuivre,jevaisvousmontrerquelquechosedontjesuisterriblementfier.Oh!Prenezgarde!Nerenversezrien!Reculez!»

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LAGRANDEMACHINEACHEWING-GUM

Mr. Wonka conduisit le groupe à une gigantesque machine qui se dressait au centremêmede lasalledes inventions.Unemontagnedemétal luisant,dominantde trèshaut lesenfantsetleursparents.Toutenhaut,elleportaitquelquescentainesdefinstubesdeverre,et tousces tubesétaientcourbésvers lebas, formantunbouquet suspenduau-dessusd’unénormerécipient,aussigrandqu’unebaignoire.

«Etvoilà!»criaMr.Wonka,puisilpressasurtroisdifférentsboutonsquifaisaientpartiede la machine. Au bout d’une seconde, on entendit un effroyable grondement. Toute lamachine était secouée de façon inquiétante, dégageant de la fumée de toutes parts, etsoudain, les spectateurs virent couler du liquide dans tous les petits tubes de verre, endirectionde lagrande cuve.Etdans chacundespetits tubes, le liquideétait d’une couleurdifférente, si bien que toutes les couleurs de l’arc-en-ciel (et bien d’autres encore) serencontraientdansunformidableéclaboussement.C’étaituntrèsjolispectacle.Etlorsquelacuvefutpresquepleine,Mr.Wonkaappuyasurunautreboutonet,aussitôt,leliquidecessade couler à l’intérieur des tubes, le grondement se tut pour faire place à un mélange debourdonnementsetdesifflements,puisuntourniquetgéantsemitàvirevolterdansl’énormecuve,frappantlesliquidesmulticolorescommeunice-cream-soda.Petitàpetit,lemélangesemitàmousser.Lamoussesefitdeplusenplusabondante,virantdubleuaublanc,duvertaubrun,puisdujauneaunoirpourredevenirbleueàlafin.

«Attention!»ditMr.Wonka.Ilyeutundéclicetletourniquets’arrêta.Alorsonentenditunesortedebruitdesuccion,

et, très rapidement, tout lemélange bleu etmousseux de la grande cuve fut aspiré jusquedansleventredelamachine.Aprèsunbrefsilence,ilyeutquelquesgrondementsbizarres.Puis ce fut encore le silence.Et soudain, lamachinepoussauneplaintemonstrueuseet aumême instant, unminuscule tiroir (pasplusgrandque celui d’undistributeur automatique)sortitbrusquementduflancdelamachine,etdanscetiroir,quelquechosedesipetit,desiplat,desigrisquetoutlemondecrutàuneerreur.Onauraitditunpetitboutdecartongris.

Les enfants et leurs parents ouvrirent de grands yeux sur ce petit bout de carton grisblottidansletiroir.

«C’esttout?ditMikeTeavee,l’airdéçu.—C’esttout,répondit,pleindefierté,Mr.Wonka.Tunesaisdoncpascequec’est?»Ilyeutunsilence.Puissoudain,VioletteBeauregard,mâcheusedegommechevronnée,

poussa un long cri hystérique. «Mais c’est de la gomme ! hurla-t-elle. C’est une barre dechewing-gum!

—Exact ! » s’écriaMr.Wonka. Il donnaune tape dans le dos deViolette. «C’est unebarre de gomme. Et cette gomme est la plus étonnante, la plus fabuleuse, la plussensationnelledumonde!»

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ADIEUVIOLETTE!

« Cette gomme, poursuivit Mr. Wonka, est la dernière, la plus importante, la plusfascinante demes inventions ! C’est un vrai repas ! C’est… c’est… c’est… cetteminusculebandedegommequevousvoyezlàestàelleseuleunvéritabledînercomposédetroisplats!

—Queracontez-vouslà?C’estinsensé!ditl’undespères.— Cher monsieur ! s’écria Mr. Wonka, cette gomme, une fois mise en vente dans les

boutiques,changera lafacedumonde!Cesera lafindesplatscuisinés!Plusdemarchéàfaire ! Plus de boucheries, plus d’épiceries ! Plus de couteaux, plus de fourchettes ! Plusd’assiettes!Plusdevaisselleàlaver!Plusdedétritus!Plusdepagaille!Rienqu’unepetitebarremagiquedechewing-gumWonka!Elleremplaceravotrepetitdéjeuner,votredéjeuner,votresouper!Cemorceaudegommequevousvoyezlàreprésentejustementunesoupeàlatomate,unrosbifetunetarteauxmyrtilles.Maislechoixestgrand!Voustrouverezpresquetoutcequivousplaira!

—Soupeàlatomate,rosbif,tarteauxmyrtilles?Quevoulez-vousdireparlà?demandaVioletteBeauregard.

—Ilsuffitdemâchercettegomme,ditMr.Wonka,pouravoirexactementl’impressiondemanger les plats de cemenu. C’est absolument stupéfiant ! Vous croyez avaler réellementvotrenourriture,vouslasentezquidescendjusquedansvotreestomac!Etvousmangezavecappétit!Etaprès,vousavezleventreplein!Vousmangezàvotrefaim!C’estformidable!

—C’esttoutàfaitimpossible,ditVerucaSait.—Dumoment que c’est de la gomme, hurla Violette Beauregard, de la gomme qui se

mâche, çam’intéresse ! »Celadit, elle recracha sonboutde chewing-gumvouéà tous lesrecordsdumondeetselecolladerrièrel’oreillegauche.«Anousdeux,Mr.Wonka,dit-elle,passez-moivotrefameusegommemagiqueetnousverronsbiencequeçadonne!

—Voyons,Violette,ditMrs.Beauregard,samère,tuvasencorefairedesbêtises!—Ilmefautcettegomme!ditVioletteavecobstination.Cen’estpasunebêtise.— Il vaudramieuxque tune laprennespas, dit avecdouceurMr.Wonka.Vois-tu, elle

n’estpasencoretoutàfaitaupoint.Ilyaencorequelquesdétails…—Causetoujours!»ditViolette,etsoudain,avantmêmequeMr.Wonkapûtintervenir,

elle étendit une main potelée, sortit la gomme de son tiroir et la prit dans sa bouche. Etaussitôt, ses larges mâchoires bien entraînées se mirent à travailler comme une paire detenailles.

«Arrête!ditMr.Wonka.— Fabuleux ! hurla Violette. Du tonnerre, cette soupe à la tomate ! Chaude, épaisse,

délicieuse!Etçadescend!—Arrête!ditMr.Wonka.Cettegommen’estpasprête!Ellen’estpasaupoint!—Mais si,mais si ! dit Violette. Elle fonctionne àmerveille !Oh !MonDieu !Quelle

bonnesoupe!—Recrache-la!ditMr.Wonka.—Çachange!hurlaViolette,toutenmastiquant,avecunlargesourire.Voicilesecond

plat !Durosbif !Oh!Commeilest tendreetsucculent !Etcespatates!Ellesont lapeaucroustillante,puis,àl’intérieur,ilyadubeurre!

— Comme c’est in-té-res-sant, Violette, dit Mrs. Beauregard. Tu es une fille sensée,vraiment.

—Vas-y,mafille!ditMr.Beauregard.Continue,monlapin!C’estungrandjourpourlesBeauregard!Notrepetitefilleestlapremièreaumondeàmangerunrepaschewing-gum!»

TouslesregardsétaientfixéssurVioletteBeauregard,entraindemâchercettegommeextraordinaire.LepetitCharlieétaitcommehypnotiséparlespectacledeseslèvresépaissesetmobilesquis’ouvraientetserefermaient.Asescôtés,grand-papaJoeparaissaitégalementfasciné.Mr.Wonka, lui,setordait lesmainsenrépétant:«Non,non,non,non,non!Cettegommen’estpasprête!Ellen’estpasbonne!Tun’auraispasdû!

—Etvoicilatarteauxmyrtillesàlacrème!hurlaViolette.Çayest!Oh!C’esttoutàfaitça ! C’est épatant ! C’est… c’est tout à fait comme si je l’avalais ! Comme si j’avalais debonnescuilleréesdelaplusmerveilleusetarteauxmyrtillesdumonde!

—Ciel!Mafille!s’écriasoudainMrs.Beauregard,lesyeuxposéssurViolette,qu’est-cequiarriveàtonnez!

—Oh!Tais-toi,mère,etlaisse-moifinir!ditViolette.—Ilvireaubleu!hurlaMrs.Beauregard.Tonnezdevientbleucommeunemyrtille!—Tamèrearaison!hurlaàsontourMr.Beauregard.Tuasleneztoutviolet!—Quevoulez-vousdire?ditViolettesanscesserdemastiquer.—Tesjoues!hurlaMrs.Beauregard.Ellesvirentaubleuaussi!Ettonmenton!Touteta

figureestbleue!—Recracheimmédiatementcettegomme!ordonnaMr.Beauregard.—Pitié !Ausecours !hurlaMrs.Beauregard.Ma filleesten traindedevenirbleueet

mauvepartout!Mêmesescheveuxchangentdecouleur!Violette!Tevoilàviolette!Qu’est-cequ’ilt’arrive?

— Je t’avais bien dit qu’elle n’était pas au point, soupira Mr. Wonka en secouanttristementlatête.

—Ça,vouspouvezledire!criaMrs.Beauregard.Mapauvrefille!Voyezcequ’elleestdevenue!»

TouslesyeuxétaientfixéssurViolette.Quelterribleetsingulierspectacle!Sonvisage,sesmains, ses jambeset soncou,en fait, toutesapeau, sansoubliersachevelurebouclée,toutétaitd’unbleu-violetéclatant,exactementcommedujusdemyrtille!

«Ça segâte toujours au dessert, soupiraMr.Wonka. C’est la faute de cette tarte auxmyrtilles.Maisunjour,j’yarriverai,vousverrez!

—Violette,hurlaMrs.Beauregard,tevoilàquigrossis!—Jenemesenspasbien,ditViolette.—Tugonfles!hurlaMrs.Beauregard.—Jemesensbizarre!suffoquaViolette.—Çanem’étonnepas!ditMr.Beauregard.—Ciel!hurlaMrs.Beauregard.Tugonflescommeunballon,mafille!—Commeunemyrtille,ditMr.Wonka.—Vite,unmédecin!criaMr.Beauregard.—Piquez-laavecuneépingle!ditl’undespères.

—Sauvez-la!»pleuraMrs.Beauregardensetordantlesmains.Maisiln’yavaitpasmoyendelasauverpourl’instant.Soncorpss’arrondissaittoujours,

changeantd’aspectavecunerapiditétellequ’auboutd’uneminuteil futtransforméenuneénormeboulebleue–unegigantesquemyrtille.ToutcequirestaitdeVioletteelle-mêmeétaituneminusculepairedejambesetuneminusculepairedebrasplantésdanslegrosfruitrond,etunetoutepetitetêteposéeausommet.

«C’est toujours lamêmechose,soupiraMr.Wonka. Je l’aiessayéevingt foisdansmonlaboratoire,survingtOompa-Loompas,ettouslesvingtontfiniparêtrechangésenmyrtilles.C’esttrèsennuyeux.Jen’ycomprendsvraimentrien.

—Maisjeneveuxpasdemyrtillepourfille!hurlaMrs.Beauregard.Réparez-la-moivite,pourqu’ellesoitcommeavant!»

Mr.Wonkaclaquadesdoigts,etdixOompa-Loompasapparurentaussitôtàsescôtés.«RoulezMissBeauregarddanslebateau,leurdit-il,etconduisez-laviteàlasalleauxjus

defruits.—Lasalleauxjusdefruits?s’écriaMrs.Beauregard.Qu’est-cequ’ilsvontenfaire,là-

bas?—La presser, ditMr.Wonka. Il faut qu’elle perde immédiatement tout son jus. Après,

nous verrons bien.Mais ne vous tourmentez pas, chèremadame.Nous vous la réparerons,quoiqu’ilarrive.Jesuisnavré,vraiment…»

DéjàlesdixOompa-Loompasroulaientl’énormemyrtilleàtraverslasalledesinventions,vers la portequi s’ouvrait sur la rivièrede chocolat où les attendait le bateau.Mr. etMrs.Beauregard les suivirent en courant.Cequi restait dugroupe, y comprisCharlieBucket etgrand-papaJoe,demeuraimmobileenlesregardants’éloigner.

«Écoute ! chuchotaCharlie.Écoute,grand-papa !LesOompa-Loompas se remettentà

chanter!»Lesvoix,unecentainedevoixchantantenchœur,leurparvenaientdistinctementdepuis

lebateau:

Chersamis,ilfautbiensavoirQuerienn’estmoinsjoliàvoirQu’unpetitmonstredégoûtant

Mâchantdelagommetoutletemps.(C’estpresqueaussimal,avouez,

Qued’avoirlesdoigtsdanslenez.)Onvousledit,etc’estbienvrai:Lechewing-gumnepaiejamais;

CettehabitudedéplorableAppelleunefinbienlamentable.Connaissez-vouslatristehistoire

DemademoisellePipenoire?Laredoutablemijaurée

Mastiquaittoutelajournée.Ellemastiquait,soiretmatin,

Al’église,aubal,danssonbain,Dansl’autobus,dansl’ascenseur,

Vraiment,çavoussoulevaitlecœur!Et,ayantégarésagomme,Ellemâchaitdulinoléum,

Toutcequiétaitàsahauteur,Desgants,l’oreilledufacteur,Lejuponbleudesabelle-sœur,Etmêmelenezdesondanseur.Ellemâchait,mâchaitsansrépit.

Samâchoires’enressentitEtl’enverguredesonmentonFutcelled’uneboîteàviolon.Ainsipassèrentlesannées:

Cinquantepaquetsparjournée!Jusqu’àcefameuxsoird’été

Oùellefutbienembêtée.Aprèsavoirludanssonlit,

Toutenmâchant,elles’endormit,Toutenfaisant,danslanuitnoire

Travaillerdursesmâchoires.Commeellen’avaitriensousladent

Cefutd’autantplustrépidant,Elleétaitsibienentraînée

Qu’ellenepouvaitpluss’arrêter.Çafaisaittic-tacdanslenoirAvecunvraibruitdebattoir

Sabouche,telleuneportecochèreS’ouvraitdansunbruitdetonnerre.

Enfin,samâchoiregéanteBâilla–etdemeurabéante,

Béantepourunbonmoment,PuisserefermaviolemmentEt,souslecouperethideux

Elleeutlalanguecoupéeendeux!Muettepourlerestedesesjours

EllefituntrèslongséjourAl’affreuxsanatorium.

Toutcelaàcauseduchewing-gum!C’estpourcelaque,sansretard,FautempêcherMissBeauregard

Desouffrirlemêmemartyre.Ilfautluiéviterlepire

Commeelleestjeune,l’espoirestgrandQu’ellesurvivraàsontraitement.

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LELONGDUCORRIDOR

«Etvoilà,soupiraMr.WillyWonka.Deuxméchantsenfantsnousquittent.Restenttroisenfantssages. Jepensequ’il vaudramieuxsortird’ici leplusvitepossible,avantdeperdreencorequelqu’un!

—Mais, Mr. Wonka, dit anxieusement Charlie Bucket, est-ce que Violette Beauregardredeviendracommeavant,oubiensera-t-elletoujoursunemyrtille?

— Ils ne tarderont pas à lui faire perdre tout son jus ! déclaraMr.Wonka. Ils vont laroulerjusquedanslepressoir,etelleenressortiramincecommeunfil!

—Maissera-t-elletoujoursbleuepartout?demandaCharlie.—Elleseraviolette!proclamaMr.Wonka.D’unbeauetricheviolet,delatêteauxpieds!

Maisc’estbienfait!C’estcequiarrivequandonmâchecettegommerépugnanteàlongueurdejournées!

—Sivoustrouvezlagommerépugnante,ditMikeTeavee,pourquoienfabriquez-vous?—Parledistinctement,ditMr.Wonka.Jenecomprendspasunmotdecequetudis.En

route ! Allons-y !Dépêchons-nous ! Suivez-moi !Nous allons repasser par les corridors ! »Celadit,Mr.Wonkatraversaencourant lasalledes inventionspourouvrirunepetiteportesecrète, dissimulée par des tas de tuyaux et de fourneaux, suivi des trois enfants – VerucaSait,MikeTeaveeetCharlieBucket–etdescinqadultesquirestaientencourse.

CharlieBucketreconnut l’undeces longscorridorsrosescoupésdebeaucoupd’autrescorridors roses. Mr. Wonka galopait en tête, tournant à gauche et à droite, à droite et àgauche,etgrand-papaJoedit:«Serrebienmamain,Charlie.Cenedoitpasêtredrôledeseperdreici.»Mr.Wonka,lui,disait:«Plusdetempsàperdre!Acetrain-là,nousn’arriveronsplusnullepart !»Et il filaitpard’interminablescorridorsroses,avecsonchapeauhautdeformenoiretsonhabitcouleurdeprunedontlaqueueflottaitderrièreluicommeundrapeauauvent.

Ils passèrent devant une porte. « Pas le temps d’entrer ! cria Mr. Wonka. Allons !

Pressons!»Ilspassèrentdevantuneautreporte,puisuneautreetencoreuneautre.Ilyenavaitune

àpeuprèstouslesvingtpas,etchacuneportaitunécriteau.D’étrangesbruitsmétalliquesensortaient, desparfumsdélicieux filtraientpar les trousde serrure, etquelquefois, depetitsjetsdevapeurcoloréss’échappaientparlesfentes.

Grand-papa Joe et Charlie devaient courir vite pour maintenir l’allure, mais ilsparvenaient néanmoins à lire quelques inscriptions en passant. OREILLERSMANGEABLESENPÂTEDEGUIMAUVE,disaitl’uned’elles.

« Formidables, les oreillers de guimauve ! s’écria Mr. Wonka sans ralentir. Ils ferontsensationquandjelesauraimisenvente!Maisnousn’avonspasletempsd’entrer!Pasletemps ! » PAPIER PEINT QUI SE LECHE POUR CHAMBRES D’ENFANTS disait l’écriteausuivant.

«Charmant,cepapierquise lèche!criaMr.Wonka, toujourspressé.Des fruitsysontpeints : des bananes, des pommes, des oranges, des raisins, des ananas, des fraises et desflageoises…

—Desflageoises?demandaMikeTeavee.

—Nemecoupepaslaparole!ditMr.Wonka.Touscesfruitsfigurentsurlepapier,etilsuffitdelécherunebananepouravoirungoûtdebanane.Léchezunefraise,etvousobtenezun goût de fraise. Et si vous léchez une flageoise, ça donnera exactement le goût d’uneflageoise…

—Maisçaaquelgoût,uneflageoise?—Tumangesencoretesmots,ditMr.Wonka.Parleplusfort,laprochainefois.Allons!

Dépêchons-nous ! » CREMES GLACEES CHAUDES POUR LES JOURS DE GRAND FROID,disaitl’inscriptionsuivante.

« Extrêmement utiles en hiver, dit Mr. Wonka en passant. Les glaces chaudes sontétonnammentréchauffantesquandilgèle.Jeproduisaussidesglaçonschaudspourboissonschaudes. Les glaçons chauds rendent les boissons chaudes encore plus chaudes. VACHESDONNANTDULAITCHOCOLATE,lisait-onsurlaportesuivante.

«Ah!Mesjoliespetitesvaches!s’écriaMr.Wonka.Commejelesaime,mesvaches!—Pourquoinepouvons-nouspaslesvoir!demandaVerucaSait.Pourquoifaut-ilpassersi

vitedevanttoutescesjoliessalles?—Nousnousarrêteronsaubonmoment!s’écriaMr.Wonka.Nesoispassiimpatiente!»BOISSONSGAZEUSESAÉRODYNAMIQUES,disaitl’écriteausuivant.«Oh ! celles-là sont fabuleuses ! criaMr.Wonka. Elles vous remplissent de bulles, de

bullespleinesd’ungazspécial,etcegazestsiincroyablementlégerqu’ilvousdécolledusolcommeunballon,etvousvousenvolezauplafond–pouryrester.

—Maisqu’est-cequ’onfaitpourredescendre?demandalepetitCharlie.—Ilfautroter,naturellement,ditMr.Wonka.Vousrotezdetoutesvosforces,etalors,le

gaz remonte et vous redescendez ! Mais n’en buvez pas en plein air ! On ne sait jamaisjusqu’oùçapeutmonter!J’enaifaitboireunefoisàunvieilOompa-Loompa,dehors,danslacour,etilestmonté,monté,monté!Alafin,iladisparudansleciel!C’étaittrèstriste.Jenel’aiplusjamaisrevu.

—Ilauraitdûroter,ditCharlie.—Biensûrqu’ilauraitdûroter,ditMr.Wonka.J’étais là,entrainde luicrier :«Rote,

espèced’âne,rote,sanscela,tuneredescendrasplus!»Maisiln’apasroté,iln’apaspu,ouil n’a pas voulu, je ne sais trop. Il était peut-être trop poli. Il doit être dans la lunemaintenant.»

Sur la porte suivante, on pouvait lire : BONBONS CARRES QUI ONT L’AIR D’ETRERONDS.

«Attendez!criaMr.Wonkaens’arrêtantsoudain.Jesuistrèsfierdemesbonbonscarrésquiontl’aird’êtreronds.Allonslesvoir!»

23

LESBONBONSCARRESQUIONTL’AIRD’ÊTRERONDS

Toutlemondes’arrêtadevantlaportedontlehautétaitdeverre.Grand-papaJoesoulevaCharliepourluipermettredevoirl’intérieurdelasalle.Charlieyvitunelonguetableet,surcette table, des rangées et des rangées de petits bonbons blancs en forme de cubes. Cesbonbonsressemblaientbeaucoupàdesmorceauxdesucre–maischacund’euxavaitsurl’undesessixcôtésunedrôledepetitefigurepeinteenrose.Al’autreboutdelatable,quelquesOompaLoompass’appliquaientàpeindred’autresfiguressurd’autresbonbons.

«Voilà!criaMr.Wonka.Lesbonbonscarrésàl’aspectrond!—Jenelesvoispasronds,ditMikeTeavee.—Ilsontl’aircarrés,ditVerucaSait.Complètementcarrés.—Maisilssontcarrés,ditMr.Wonka.Jen’aijamaisditlecontraire.—Vousdisiezqu’ilsétaientronds!ditVerucaSait.—Jen’aijamaisditça,ditMr.Wonka.J’aiditqu’ilsavaientl’aird’êtreronds.—Maisilsn’ontpasl’aird’êtreronds!ditVerucaSait.Ilsontl’aircarrés!—Ilsontl’airronds,insistaMr.Wonka.—Ilsn’ontpasl’airrondsdutout,c’estsûr!criaVerucaSait.—Verucachérie,ditMrs.Sait,nefaispasattentionàcequeditMr.Wonka!Iltement!—Pauvrevieilletoupie,ditMr.Wonka,tupeuxcauser!—Commentosez-vousmeparlersurceton!hurlaMrs.Sait.—Silence!ditMr.Wonka.Etregardezbien!»Ilsortituneclefdesapocheetouvritla

porte.Laportebâilla…etsoudain…ausondubâillementdelaporte,lesinnombrablespetitsbonbons carrés qui s’entassaient sur la table apparurent ronds aux spectateurs. Les petitsvisagessetournaientlittéralementverslaporte,lesyeuxposéssurMr.Wonka.

«Etvoilà!cria-t-iltriomphalement.Ilsontl’aird’êtreronds.C’estindiscutable!Cesontdesbonbonscarrésàl’aspectrond!

—Sapristi!Ilaraison!ditgrand-papaJoe.—Allez!Enroute!ditMr.Wonka.Enroute!Pasuneminuteàperdre!»WHISKYAU

BEURREETGINAUBEURRE,disaitl’écriteaudelaportesuivante.«Voilàquimeparaîtbienplusintéressant,ditMr.Sait,lepèredeVeruca.—Magnifique!ditMr.Wonka.TouslesOompa-Loompasenraffolent.Çaleurmonteàla

tête.Écoutez!Ilsfontlanoce!»Descrisjoyeux,desriresetdesbribesdechansonsparvenaientauxvisiteursparlaporte

close.« Ils boivent comme des trous, dit Mr. Wonka. Ce qu’ils préfèrent c’est le scotch au

beurreetausoda.Mais legin-tonicaubeurreest trèspopulaireaussi.Suivez-moi,s’ilvousplaît!Nousnedevrionspasnousarrêterpartout.»Iltournaàgauche.Iltournaàdroite.Puisilsarrivèrentdevantunegrandevoléed’escalier.Mr.Wonkadescenditsurlarampe.Lestroisenfants l’imitèrent.Mrs. Sait etMrs. Teavee, les seules femmes restées en course, étaientcomplètementessoufflées.Mrs.Saitétaituneénormecréatureavecdetoutespetitesjambes.Ellesoufflaitcommeunrhinocéros.«Parici!»criaMr.Wonkaarrivéaupieddel’escalier.Iltournaàgauche.

«Courezmoinsvite!haletaMrs.Sait.—Impossible,ditMr.Wonka.Nousn’arriveronspasàl’heuresinousallonsmoinsvite!—Arriveroù?demandaVerucaSait.—Net’inquiètepas,ditMr.Wonka.Tuverrasbien.»

24

VERRUCADANSLASALLEAUXNOIX

Mr.Wonkaseremitàgaloperlelongducorridor,LASALLEAUXNOIX,disaitl’écriteaudelaportesuivante.

«Parfait,ditMr.Wonka,arrêtez-vousiciquelquessecondespoursouffler,etjetezuncoupd’œilpar lavitredecetteporte.Maissurtout,n’entrezpas !Quoiqu’ilarrive,n’entrezpasdanslasalleauxnoix!Vousrisquezdedérangerlesécureuils!»

Ilss’attroupèrentdevantlaporte.«Oh!Regarde,grand-papa,regarde!»criaCharlie.«Desécureuils!»criaVerucaSait.«Çaalors!»ditMikeTeavee.Le spectacle était fascinant. Une centaine d’écureuils étaient juchés sur de hauts

tabouretsautourd’unegrandetable.Surlatable,ilyavaitdestasetdestasdenoix,etlesécureuils travaillaient comme des forcenés. Ils décortiquaient les noix à une vitesseincroyable.

«Desécureuilsontétéentraînésexprèspourdécortiquerlesnoix,expliquaMr.Wonka.—Pourquoidesécureuils?demandaMikeTeavee.PourquoipasdesOompa-Loompas?—Parceque,ditMr.Wonka, lesOompa-Lompasn’arriventpasàsortir lescerneauxde

leurscoquillessanslescasser.Seulslesécureuilssontcapablesdelesconserverintacts.C’estextrêmementdifficile.Or, dansma chocolaterie, je tiensbeaucoupàn’utiliser quedesnoixentières.C’estpourquoij’airecoursàdesécureuils.Ilssontmagnifiques,n’est-cepas?Voyezleursgestes!Etvoyezcommeilsfrappentd’abordlacoquilledudoigtpours’assurerquelanoixn’estpaspourrie!Lesnoixpourriessonnentcreux,etalors,paslapeinedelesouvrir!Ilslesjettentàlapoubelle.Là!Regardez!Regardezbienlepremierécureuil!Jepensequ’ilesttombésurunemauvaisenoix!»

Tous les regards s’étaient posés sur le premier écureuil qui frappait de la patte la

coquille.Ilpenchalatêted’uncôté,écoutaattentivement,puis,soudain,illançalanoixpar-dessussonépaule,dansungrandtrou,parterre.

«Maman!criasoudainVerucaSait,jeveuxunécureuil,c’estdécidé!Achète-moiundecesécureuils!

—Nedispasdesottises,machérie,ditMrs.Sait.IlssonttousàMr.Wonka.—Jem’enmoque!hurlaVeruca.J’enveuxun.Jen’aiàlamaisonquedeuxchiens,quatre

chats,sixpetitslapins,deuxperruches,troiscanaris,unperroquetvert,unetortue,unbocalplein de poissons rouges, une cage pleine de souris blanches et un vieux hamstercomplètementgaga!Jeveuxunécureuil!

—Trèsbien,monchou,lançaMrs.Sait.Mamant’offriraunécureuilleplustôtpossible.— Mais je ne veux pas un écureuil quelconque ! hurla Veruca. Je veux un écureuil

entraîné!»Acetinstant,Mr.Sait,lepèredeVeruca,fitunpasenavant.« Eh bien, Wonka, dit-il présomptueusement en sortant un portefeuille plein d’argent,

combienvoulez-vouspourl’unedevossacréesbestioles?Quelestvotreprix?

—Mesécureuilsnesontpasàvendre,réponditMr.Wonka.Ellen’enaurapas.— Comment, je n’en aurai pas ! hurla Veruca. Qu’est-ce qui m’empêche d’aller m’en

chercherun,toutdesuite?— N’y va pas ! » intervint aussitôt Mr. Wonka mais… trop tard ! Déjà la fillette avait

ouvertlaportepourseprécipiterdanslasalle.Al’instantmême,lescentécureuilscessèrentdetravaillerettournèrentlatêtepourla

dévisagerdeleurspetitsyeuxdejais.Veruca s’arrêta à son tour pour les regarder. Puis son choix se fixa sur un joli petit

écureuil,nonloind’elle,auboutdelatable.L’écureuiltenaitunenoixentresespattes.«Bien,ditVeruca,jet’aurai!»Elle étendit les mains pour attraper l’écureuil… mais aussitôt… en une fraction de

seconde,alorsqu’elleavançaitseulementlesmains,ilyeutsoudainunremue-ménageéclairdanslasalle,unremue-ménagetoutroux,ettouslesécureuilsquittèrentd’unbondlatablepouratterrirsurlecorpsdeVeruca.

Vingt-cinqécureuilsprirentpossessiondesonbrasdroitetl’attachèrent.Vingt-cinqautress’emparèrentdesonbrasgauchepourl’attacherdemême.Vingt-cinqs’abattirentsursajambegaucheetlaclouèrentausol.Vingt-quatreenfirentautantpoursajambedroite.Enfin,l’uniqueécureuilencoreinoccupé(lechef,detouteévidence)grimpasurl’épaule

deVerucaetsemitàfrapper,toc-toc-toc,latêtedelamalheureusepetitefille.«Sauvez-la!hurlaMrs.Sait.Veruca!Reviens!Qu’est-cequ’ilsluifont?—Ilsl’examinentpourvoirsielleestunenoixpourrie,ditMr.Wonka.Regardez!»Verucasedébattaitfurieusement,maislesécureuilslaserraientdetropprès,impossible

debouger.Celuiquiétaitjuchésursonépaulecontinuaitàtapersursatête.Puis, toutàcoup, lesécureuils renversèrentVerucaet semirentà la traînerpar terre,

toutlelongdelasalle.« Bonté divine ! Elle est une noix pourrie, dit Mr. Wonka. Sa tête a dû sonner bien

creux.»Verucagigotaetbrailla.Rienàfaire.Lespetitespattesvigoureuseslaserraienttrèsfort.

Impossibledefuir.«Oùl’emmènent-ils?hurlaMrs.Sait.—Làoùvonttouteslesnoixpourries,ditMr.WillyWonka.Auvide-ordures.—Çaalors!Ilslajettentdansletrou!ditMr.Saitquiobservaitsafilleàtraverslaporte

vitrée.—Qu’est-cequevousattendezpourlasauver?criaMrs.Sait.—Troptard,ditMr.Wonka.Elleestpartie!»Etc’étaitvrai.« Mais où est-elle ? hurla Mrs. Sait en gesticulant comme une folle. Que fait-on des

mauvaisesnoix?Oùconduitcevide-ordures?—Levide-orduresenquestion,ditMr.Wonka,aboutitdirectementàl’égoutquicharrie

touslesdétritusdetouslescoinsdemonusine–toutelapoussière,touteslesépluchuresdepommesdeterre,lesfeuillesdechouxpourries,lestêtesdepoissonsetj’enpasse.

—Quiest-cequimangedupoisson,deschouxetdespatatesdanscettechocolaterie,jevoudraisbienlesavoir?ditMikeTeavee.

—Moi,naturellement, réponditMr.Wonka.Oucrois-tuque jemenourrisdegrainsdecacao?

—Mais…mais…mais…criaMrs.Sait,oùfinitcetégout?—Alafournaise,voyons,ditcalmementMr.Wonka.Al’incinérateur!»Mrs.Saitouvrit

sagrandeboucherougeetpoussauncriperçant.« Ne vous tourmentez pas, dit Mr. Wonka, il y a de fortes chances qu’elle ne soit pas

alluméeaujourd’hui.—Deschances!hurlaMrs.Sait.MapauvrepetiteVeruca!Elle…elle…elleseragrillée

commeunesaucisse!—Trèsjuste,machère,ditMr.Sait.Maintenant,écoutez-moi,Wonka,ajouta-t-il,jepense

quevousallezuntoutpetitpeutroploin,vraiment.Quemafillesoitunevraiepetitepeste,jeveux bien l’admettre. Mais ce n’est pas une raison pour la faire rôtir au four. Je suisextrêmementindignéetfâché.

—Oh!nevousfâchezpas,chermonsieur!ditMr.Wonka.Jesupposequ’elleremontera

tôt ou tard. Peut-être n’est-elle pas descendue du tout. Elle a pu rester coincée dans laglissière, justeau-dessusdutrou,et,danscecas, ilvoussuffiraitd’yentrerpourlatirerdelà.»

A ces mots, Mr. et Mrs. Sait se précipitèrent tous deux dans la salle aux noix. Ilscoururentversletrouetsepenchèrentdessus.«Veruca!criaMrs.Sait.Es-tulà?»Pasderéponse.

Afindemieuxvoir,Mrs.Sait sepenchaplusavant.Maintenant,elleétaitagenouilléeàmêmelereborddutrou,latêtebaissée,sonénormederrièreenl’aircommeunchampignongéant.Positionplutôtdangereuse.Ilsuffisaitdelapousserunpeu…deluidonnerunetoutepetitetapeaubonendroit…etc’estexactementcequefirentlesécureuils!

Elletomba,latêtelapremière,enpoussantdescrisdeperroquet.«Bontédivine!ditMr.Saitenvoyantdégringolersavolumineuseépouse,cequ’ilyaura

commedéchetscesoir!»Etelledisparutdansletrousombre.«Tuteplaislà-bas,Angine?»s’exclama-t-il,toutensepenchantunpeuplusavant.

Lesécureuilssurgirentderrièresondos…«Ausecours!»hurlaMr.Sait.Maisdéjàiltombait,latêtelapremière,pourdisparaîtredanslaglissière,succédantàsa

femme…etàsafille.«Oh!MonDieu!criaCharliequiassistaitaveclesautresàlascène,derrièrelavitre,

quevont-ilsdevenirmaintenant?—Jepensequequelqu’unlesattraperaaupieddelaglissière,ditMr.Wonka.—Etlegrandincinérateur?demandaCharlie.—Ilsnel’allumentqu’unjoursurdeux,ditMr.Wonka.C’estpeut-êtreunjoursans.Onne

saitjamais…Ilspeuventavoirdelachance…—Chut!ditgrand-papaJoe.Écoutez-les!Ilschantentencore!»Au loin,à l’autreboutducorridor, lesbattementsde tamboursse firententendre.Puis

vintlachanson.

VerucaSait!chantèrentlesOompa-Loompas,VerucaSait,l’horribleenfant,V’làqu’elledescendletoboggan.(Aussiavons-nouscrubienfaire,Afinderéglercetteaffaire

Quinouscausaittantdetourments,D’expédieraussisesparents.)

VerucasevolatiliseEtilfautbienqu’onvousledise:Ilsepeutbienqu’elleconnaisseDesamisd’unetoutautreespèceDesamisbienmoinsraffinés

Queceuxqu’ellevientdequitter.VoyezlatêtedemorueQuiaupassagelasalue.

EndescendantcetuyausombreElleferabiend’autresrencontres,

Desosrognés,dulardmoisi,Devieuxcroûtonsdepainrassis,Unsteakdontonn’apasvoulu,Uncamemberttoutvermoulu,Unecoquilled’huîtretristeàvoir,Unboutdesaucissontoutnoir,Desnoixpourriesàchaquepas,Delasciureaupipidechat,Toutçagalopeets’enchevêtre,Empestantàtroiskilomètres.TelssontlesamisdélicatsQu’aurarencontrésVeruca,Endescendant,àsonpassage!Vrai,pouruneenfantdesonâge,Direz-vous,c’estunbientristesort.C’estjuste,vousn’avezpastort.Car,bienqu’ellesoitinsupportable,Ellen’estqu’àmoitiécoupable.Etc’estpourquoi,àvoixhaute,

Onvousdemande:Aquilafaute?

Car–etc’estloind’êtreunproblème,Onnesegâtepassoi-même.QuidoncafaitdeVerucaLepetitmonstrequevoilà?

Hélas,hélas!Necherchezpas!Ilssonttoutprès,lesscélérats!

Ah!C’estbientristeàdire,vraiment:IlsontnomPAPAetMAMAN.

Lesv’làenroutepourlafournaise,Lasolutionn’estpasmauvaise!

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