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My 3 years expatriation in Sweden

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Les convertis à l’international

TELECOM n°162 / DIPLÔMÉS TÉLÉCOMS ET GLOBALISATION

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Suède, la performance tranquille !par Sylvain LAMBLOT (96)

Il faut noter tout d’abord que travailler pour une société étrangère depuis la France et travailler pour l’expatriation sont deux concepts di!érents. En e!et, avant de m’expatrier pour la Suède, j’ai eu l’occasion de travailler à l’interna-tional (COLT; "omson Multimédia) mais aussi pour une société suédoise pour laquelle j’ai créé la #liale française (Netwise). L’expérience s’avère totale-ment di!érente mais aussi beaucoup plus enrichissante avec l’expatriation car il s’agit non seulement d’une option professionnelle mais également d’un choix familial avec des implications dans la manière de percevoir le monde, d’appréhender les problèmes et de ma-nager ses équipes et ses projets.

L’aventure suédoise a donc commencé en janvier 2008, après le rachat de la so-ciété Netwise par Ericsson. Le choix de l’expatriation fut évident en raison de mon expérience positive avec Netwise mais surtout le souhait de découvrir une nouvelle culture et d’élargir mon spectre de leadership avec de nouvelles mé-thodes de travail. Le choix fut par contre plus incertain pour ma femme et mon #ls : changement d’école, démission, dé-ménagement, éloignement familial...

D’un point de vue personnel, l’intégra-tion à Stockholm s’est faite très faci-lement. Il s’agit d’une capitale à taille humaine où tout le monde parle par-faitement anglais et dotée d’une école française. D’un point de vue profession-nel, l’intégration fut beaucoup plus pro-gressive et elle a nécessité des e!orts d’adaptation importants.

Une socialisation bien différente - Un anglais parfait - Une vie équilibrée !

Les Suédois ne sont pas des Latins. Je con#rme ! Le processus de socialisation est très di!érent et un peu laborieux. Les Suédois sont parfois di$ciles à cer-ner et se livrent peu dans un premier temps. Par exemple, au bureau, les su-jets personnels ne sont jamais abor-dés. Il faut du temps pour gagner leur con#ance. J’ai mis une année pour vrai-ment connaître mon équipe et deux ans pour gagner sa con#ance ! Une petite astuce pour accélérer ce processus : faire du team building en dehors du bureau et les inviter à « descendre » ensemble quelques bières/vodka...

Une autre di!érence importante réside dans la gestion des problèmes. Les émo-tions doivent être absolument bannies des conversations. Les Suédois détes-tent les con%its et évitent de donner un avis tranché. Ils trouvent aussi que nous (les Latins) parlons trop et que notre manière de hausser le ton pour régler nos di!érends est inappropriée et ine$cace !

Au siège d’Ericsson à Kista, tout le monde utilise l’anglais que ce soit dans les mails, les réunions ou devant la machine à café et le niveau d’anglais des Suédois est excellent. Malgré une bonne pratique de l’anglais en France, je me suis vite rendu compte que je n’étais pas au niveau mais également

en dessous de la moyenne par rap-port aux autres expatriés. Un conseil : continuez à travailler votre anglais car faire une présentation devant 500 per-sonnes ou socialiser toute une soirée avec des clients en anglais, c’est une autre gageure….

La plupart des Suédois (à tous les ni-veaux hiérarchiques !) #nissent vers 16 heures (sachant qu’il fait nuit à 15 heures pendant l’hiver et que les nou-nous n’existent pas...) pour passer du temps avec leur famille ou faire du sport. La famille passe toujours en prio-rité et le niveau de maturité, en ce qui concerne la %exibilité dans les horaires, et la con#ance entre l’employé et l’em-ployeur sont impressionnants.

Chez Ericsson, chacun possède un té-léphone portable et un laptop et tra-vaille au moins un jour par semaine à distance. Beaucoup d’employés se re-connectent également régulièrement en soirée après avoir fait du sport ou après s’être occupé de leurs enfants. Les congés maternité/paternité sont de 18 mois pour chaque enfant ! Ils doivent être partagés dans le couple. Il s’agit là encore d’un phénomène culturel : tous les pères prennent neuf mois de congé paternité sans craindre de perdre leur emploi ou de ralentir leur carrière ! C’est vraiment le principe productif d’un système ga-gnant-gagnant pour Ericsson et pour la société suédoise sur le long terme. J’ai découvert pour la première fois en Suède le sens de l’expression « équilibre sociétal ».

Après trois ans d’expatriation en Suède au siège d’Ericsson à Stockholm, Sylvain LAMBLOT (ENST 96 ; Essec MBA 03) Directeur du Business Development Europe, nous livre son retour d’expérience au sein du leader mondial des infrastructures mobiles.

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Les convertis à l’international

DIPLÔMÉS TÉLÉCOMS ET GLOBALISATION / TELECOM n°162

La performance avec la manière - Le coach plutôt que le manager!- L’éducation avant tout ! Même avec beaucoup d’humilité et un désir de m’intégrer au plus vite, j’ai très vite constaté des di!érences notables avec nous dans leur manière de travailler, de manager des équipes, d’analyser les problèmes et de prendre des décisions.

Le problème n’est pas évident à gérer car deux options s’arc-boutent dans ces cas-là : d’une part, l’envie de montrer son savoir-faire et sa capacité à être per-formant et d’autre part sa #erté d’être Français avec tout ce que cela implique... (et cela fait partie de nos gènes !).

Lors de ma première année, j’ai triplé les ventes d’un des business d’Ericsson mais mon résultat en tant que manager fut très en-dessous de la moyenne (ce résul-tat annuel, leadership index, est obtenu via un process très strict avec toute votre équipe et un questionnaire exhaustif sur votre style de management mais aussi avec l’implication des RH). Il faut com-prendre que ce process et ces résultats ne sont pas uniquement là pour sélection-ner les meilleurs managers ou traquer les mauvais mais surtout pour permettre à toute l’organisation de s’améliorer sur des compétences de leadership (écoute, moti-vation, formation, vision, valeurs, travail en équipe...). L’école ne se termine claire-ment pas avec un Bac+5 en Suède....

Mon manager hiérarchique ainsi que les RH m’ont donc aidé à identi#er mes points forts et mes points faibles avec des suivis mensuels. Ils m’ont également pro-posé un coach spécialisé en culture sué-doise. J’ai également dû réaliser un 360º avec toute mon équipe et écouter les feed-backs sur mes points faibles ! A la #n de la deuxième année, ce travail sur moi-même et avec mon équipe m’a permis d’obtenir des résultats très satisfaisants. J’ai dou-blé les ventes et quadruplé dans le même temps mon index de leadership.

Pour réussir ce challenge, j’ai dû oublier une grande partie de mon manage-ment à la française et devenir un coach d’équipe impliquant beaucoup plus sou-vent et beaucoup plus en amont mes équipes dans les choix et les décisions importantes. Les Suédois détestent le micro-management. Ils aiment prendre des initiatives et régler les problèmes sans demander la permission. J’ai dû aussi penser davantage en termes de for-

mation et d’éducation pour améliorer les performances. J’ai également travaillé sur le moyen terme, en clari#ant et par-tageant avec toute l’équipe une vision à cinq ans de notre business.

Ce fut un exercice di$cile, presque de la cogestion tout en essayant de garder mon autorité ! Au #nal, il m’a fallu deve-nir un vrai leader d’équipe en générant l’envie et la motivation et en donnant un sens à ma mission. Ce fut pour moi une vraie révélation et un fantastique bond en avant en termes de leadership.

L’absence de code hiérarchique – L’équipe avant l’individu - La positive attitude !

L’une des choses les plus frappantes quand vous commencez à travailler chez Ericsson, c’est l’absence quasi totale de code hiérarchique dans l’organisation et dans les relations entre employés et managers. Les employés ne se sen-tent absolument pas socialement ”in-férieurs” aux managers et considèrent simplement posséder une expertise di!érente. C’est très impressionnant au quotidien et cela passe par une mul-titude de petits signes. Par exemple, le CEO d’Ericsson déjeune régulièrement à la cantine et vous salue quand il vous croise ! Le top management se trouve en open space comme tous les autres employés ! Les employés n’hésitent pas à dé#er le management lors des réu-nions (sans émotions)...

Un autre aspect très di!érent de mon expérience suédoise est dans l’organi-sation elle-même de la société Ericsson qui est très ”horizontale” et très ”dé-mocratique” avec de nombreux pro-cessus ”bottom-up” et ”peer to peer”, que ce soit en matière d’innovation, de stratégie ou de partage de la connais-sance. J’ai eu notamment l’occasion de travailler six mois en direct avec le di-

recteur de la BU multimédia et le SVP de la Stratégie lors de mon arrivée chez Ericsson. L’objectif était simplement d’avoir un avis extérieur (”fresh blood”) sur la stratégie et les évolutions de l’or-ganisation. Trois mois après mon arri-vée, j’ai eu donc l’occasion de faire une présentation devant le CEO d’Ericsson et les 200 top executives d’Ericsson sur la stratégie d’Ericsson dans le domaine multimédia !

En fait, l’un des fondements de la culture d’Ericsson c’est que l’équipe est toujours plus forte que l’individu (cf. un excellent livre sur ce sujet : "e wisdom of the crowd).

Un autre aspect important dans la culture suédoise et/ou d’Ericsson, c’est la ”positive attitude”. Malgré la concur-rence chinoise et la pression toujours plus grande des opérateurs sur les marges, il existe un état d’esprit positif, cherchant à aller de l’avant et à prendre des risques.

J’ai senti immédiatement la di!é-rence quand je suis rentré en France où les mentalités sont souvent trop mé#antes/défensives. Et pourtant, la Suède est loin d’avoir tous les atouts de la France !

En conclusion, mon expatriation en Suède fut une expérience très enri-chissante. J’ai découvert une nouvelle culture très présente, un modèle de so-ciété intéressant et un pays magni#que. Je vous conseille d’ailleurs vivement d’aller visiter l’archipel suédois en été à la voile. C’est à vous couper le sou&e ! Sur le plan professionnel, la culture chez Ericsson est fortement tournée vers la performance à long terme, la formation et le travail en équipe. J’encourage donc tous les Français souhaitant élargir leur spectre de leadership et acquérir de nouvelles méthodes de management à s’expatrier quelques années en Suède.

C’est une expérience de vie inoubliable '

Fort d’une expérience de 15 ans dans le secteur des télécommunications, Sylvain LAMBLOT (96) a occupé différents postes tels que consultant chez Solucom, responsable avant-vente chez COLT, Directeur Marketing chez Thomson Telecom, ou encore Directeur Général de Netwise France. Il a rejoint le groupe Ericsson en mai 2005 où il occupe désormais le

poste de Directeur du Business Development pour la Business Unit Multimedia.Il est diplômé de Télécom ParisTech (promo 96), de l’institut EURECOM et également titulaire de l’executive MBA de l’ESSEC (promo 2003).

L'AUTEUR