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4/6/2015 Élections au Royaume-Uni: ce qui se joue pour le système politique britannique | Slate.fr http://www.slate.fr/story/101385/elections-gb-royaume-uni 1/11 Élections au Royaume- Uni: ce qui se joue pour le système politique britannique Fabien Escalona Monde 09.05.2015 - 10 h 16 mis à jour le 09.05.2015 à 16 h 18 Les résultats projetés dans le centre de Londres, le 7 mai 2015. REUTERS/Eddie Keogh Par Fabien Escalona Enseignant à Sciences Po Grenoble Le scrutin du 8 mai confirme plusieurs tendances lourdes de la vie électorale britannique, dont la fin déjà ancienne du (/) / Monde (/monde) En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies pour vous proposer des contenus et services adaptés à vos centres d’intérêts. En savoir plus...

Ce qui se joue pour le système politique britannique

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4/6/2015 Élections au Royaume-Uni: ce qui se joue pour le système politique britannique | Slate.fr

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Élections au Royaume-Uni: ce qui se joue pour lesystème politiquebritanniqueFabien Escalona Monde 09.05.2015 - 10 h 16 mis à jour le 09.05.2015 à 16 h 18

Les résultats projetés dans le centre de Londres, le 7 mai 2015. REUTERS/Eddie Keogh

Par Fabien Escalona

Enseignant à

Sciences Po

Grenoble

Le scrutin du 8 mai confirme plusieurstendances lourdes de la vie électoralebritannique, dont la fin déjà ancienne du

(/)

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Sa bio (/source/87081/fabien-

escalona), ses 22 articles

(/source/87081/fabien-

escalona)

bipartisme. La fragmentation politique dupays est aussi territoriale. Le principalparti d'opposition, le Labour, se retrouvesans leader ni stratégie évidente. Unemauvaise nouvelle de plus pour le centre-gauche européen.

Les résultats des élections législatives au Royaume-Uni ont

créé la surprise (http://www.slate.fr/story/101369/elections-

britanniques-grosse-surprise-1945), en permettant aux

conservateurs de remporter non seulement une victoire, mais

une majorité à eux seuls à la Chambre des communes.

L’ampleur de la défaite travailliste et la vague nationaliste en

Ecosse font partie des autres faits marquants de cette élection,

qui ne s’inscrit pas moins dans certaines tendances lourdes de

la vie électorale britannique.

Participation modeste etfragmentation politiqueC’est ce que l’on peut observer d’abord sur le plan de la

participation. Son niveau (66,1% des inscrits) n’a été supérieur

que d’un point à celui enregistré en 2010, alors même que

l’issue de la compétition électorale semblait très incertaine. Si

c’est la troisième fois consécutive que la participation

augmente depuis le point bas historique de 2001, elle reste à

un étiage modeste, nettement en-dessous de la barre des 70%,

au-dessus de laquelle se situaient tous les niveaux de

participation entre 1922 et 1997. La fin des années 1990

apparaît de plus en plus comme une transition vers une ère de

moindre capacité mobilisatrice des acteurs du système

partisan britannique.

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La fin du bipartisme au Royaume-Uni était quant à elle déjà

actée, et se voit confirmée. Ce type de système suppose une

alternance régulière entre deux formations rivales, qui

souhaitent et parviennent à gouverner seules (et donc à

sécuriser une majorité absolue).

En 2010, la première coalition en temps de paix depuis le

second après-guerre, nouée entre les conservateurs de

Cameron et les lib-dems de Nick Clegg, témoignait de

l’obsolescence d’un modèle en fait déréglé depuis fort

longtemps.

En effet, dès février 1974, une élection «déviante» avait été

marquée par la forte progression électorale des libéraux et

l’absence d’une majorité nette à la chambre des députés. Par

la suite et surtout, les périodes 1979-1997 (gouvernements

conservateurs) et 1997-2010 (gouvernements travaillistes)

ont été caractérisées par une faible intensité de la compétition

électorale. Les écarts en voix ou en sièges entre les deux

principaux partis ont été régulièrement bien plus élevés que

durant les trois décennies antérieures, de sorte que les

conservateurs puis les travaillistes sont apparus

structurellement dominants par rapport à leur adversaire

principal.

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En outre, le système partisan a continué de se fragmenter

dans l’arène électorale durant ces deux périodes, sans que cela

ne se traduise véritablement dans l’arène parlementaire. On

touche ici du doigt l’effet protecteur pour le Labour et les

Tories du mode de scrutin dit «first past the post», où le

candidat arrivé en tête au premier tour emporte la

circonscription. La dis-proportionnalité entre le vote des

Britanniques et la composition de la Chambre des communes a

ainsi eu tendance à augmenter

(http://blogs.lse.ac.uk/generalelection/what-would-the-

election-look-like-under-pr/).

À LIRE AUSSILa victoire de Cameron est mauvaise pour l'Europe

(http://www.slate.fr/story/101373/victoire-cameron-

europe)

LIRE (HTTP://WWW.SLATE.FR/STORY/101373/VICTOIRE-

CAMERON-EUROPE)

L’élection de 2015, bien qu’elle ait permis aux conservateurs

d’obtenir une (courte) majorité, confirme la fragmentation du

champ partisan. Tandis que les lib-dems se sont effondrés

(réalisant leur pire performance depuis 1970), les autres partis

ont doublé leur part en comparaison de 2010, l’essentiel de

cette progression étant nourrie par la droite radicale du UKIP

(+9,6 points), les nationalistes écossais du SNP (+3,1 points) et

les Verts britanniques (+2,8 points). Les scores additionnés

des deux protagonistes du bipartisme d’après-guerre restent

sous la barre des 70%, pour la troisième fois consécutive

depuis les années 2000. Celle des 80% n’a plus été atteinte

depuis 1979, et celle des 90% depuis 1959.

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Cette élection est encore une fois l’occasion d’observer les

effets du mode de scrutin, qui apparaissent caricaturaux dans

le cas du contraste entre les résultats du UKIP (qui réunit

12,6% des suffrages mais ne recueille qu’un seul siège) et ceux

du SNP (qui réunit 4,8% des suffrages, tous concentrés dans

les circonscriptions d’Ecosse et lui permettant d’obtenir 56

sièges). Non seulement les autres partis que le Labour et les

Tories ne sont pas aussi représentés que l’exigerait leur part

réelle des suffrages, mais cette dis-proportionnalité les frappe

aussi entre eux.

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Echec du centre-gauche etfragmentation territorialeEnfin, si les conservateurs sont parvenus à obtenir une

majorité, il n’a jamais semblé crédible durant la campagne que

les travaillistes puissent réaliser une telle performance. La

perte de 25 sièges, malgré une légère progression en voix,

atteste de la rétractation territoriale du Labour. L’exemple le

plus spectaculaire restera sans nul doute sa quasi-disparition

d’Ecosse, où il n’a sauvé qu’une seule des 41 circonscriptions

qu’il contrôlait. Des anciens ministres, mais aussi le leader du

Labour écossais lui-même ont été désavoués dans les urnes.

L’implantation travailliste se résume désormais aux aires

métropolitaines et à ses bastions du Nord et du pays de Galles.

Cela pose la question du diagnostic sur la défaite subie et de la

stratégie à suivre par le leader qui remplacera Ed Miliband.

Comme lors des défaites des années 1980 (hors 2010, c’est

jusque-là qu’il faut remonter pour trouver des scores aussi

médiocres en part des suffrages et en sièges), la première des

batailles concernera en effet l’interprétation de l’échec

travailliste. Ainsi que l’explique l’éditorialiste Rafel Behr

(http://www.theguardian.com/commentisfree/2015/may/08/labour-

vote-party), chacune des tendances du parti pourra mobiliser

les résultats pour appuyer son argumentation. L’aile gauche

mettra en avant la perte des sièges écossais face à un parti

clairement «anti-austérité», tandis que les nostalgiques du

blairisme souligneront l’absence de gains dans l’Angleterre des

classes moyennes pour déplorer une image d’incompétence

économique.

Dans tous les cas, il apparaît que le dépassement de

l’opposition entre Old et New Labour qu'Ed Miliband croyait

avoir réalisé, s’est révélé vague et peu attractif

(http://www.lesinrocks.com/2015/05/08/actualite/elections-

britanniques-les-travaillistes-nont-pas-reussi-a-mobiliser-

leur-electorat-11747035/). Les élections locales tenues

pendant la législature 2010-2015 constituaient d’ailleurs un

indicateur

(http://blogs.lse.ac.uk/europpblog/2015/01/10/what-do-

local-election-results-tell-us-about-parties-prospects-in-the-

2015-uk-general-election/) qui s’est révélé plus solide que les

sondages. Transposés nationalement, rarement les résultats

de scrutins intermédiaires n’avaient montré une si faible

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avance du principal parti d’opposition. Au passage, ils

montraient aussi à quel point les lib-dems subissaient bien

plus que les conservateurs la sanction du bilan de la coalition.

(http://www.slate.fr/story/101131/royaume-uni-perdant-sortir-europe)À LIRE AUSSILe Royaume-Uni aurait plus à perdre que l’Europe à en sortir

(http://www.slate.fr/story/101131/royaume-uni-perdant-sortir-

europe)

LIRE (HTTP://WWW.SLATE.FR/STORY/101131/ROYAUME-UNI-

PERDANT-SORTIR-EUROPE)

La dénationalisation du travaillisme s’inscrit dans une

polarisation territoriale des comportements politiques qui est

assez frappante (voir la carte interactive

(http://www.theguardian.com/politics/ng-

interactive/2015/may/07/live-uk-election-results-in-full) du

Guardian). La dirigeante du SNP a affirmé qu’un nouveau

référendum sur l’indépendance ne pourrait découler que des

élections pour le Parlement écossais. Le scrutin du 8 mai

donne cependant des arguments aux nationalistes locaux,

attachés à la résurrection du projet social-démocrate

(http://www.slate.fr/story/92207/referendum-ecossais-

mirage-social-democrate) et à l’intégration européenne. Même

s’ils avaient conservé leurs sièges en Ecosse, les travaillistes

auraient en effet échoué à battre les conservateurs, dont la

politique d’austérité est violemment rejetée par la population

écossaise. De plus, David Cameron a promis d’organiser un

référendum sur l’appartenance à l’UE. S’il se soldait par un

«oui» en Ecosse et un «non» dans le reste du royaume, ce

serait une motivation supplémentaire pour l’indépendance.

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The UK's political landscape it starting to look A LOT like

Maggie Simpson. #GeneralElection #GE2015

07:56 - 8 Mai 2015

2 180 1 050

Peter Lloyd @Suffragentleman

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A la décomposition communautaire, pourrait donc s’ajouter la

décomposition d’un Royaume-Uni dont les partis dominants

ont sans doute modifié trop peu et trop tard l’architecture

territoriale. Le Labour peut se mordre les doigts d’avoir fait

une campagne contre l’indépendance écossaise quasi-

commune avec les Conservateurs, dont la majorité absolue

découle de sa domination électorale dans la seule nation

anglaise, et en particulier au sud de cette dernière. Les

travaillistes doivent maintenant faire la preuve de leur

capacité à étendre à nouveau leur influence territoriale, ou

s’engager pour des réformes institutionnelles et dans des

alliances rendant crédible un retour au pouvoir.

Fabien Escalona

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