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Article original Étude de la sensibilité d’une batterie d’épreuves sémantiques au vieillissement normal et à l’évolution de la maladie d’Alzheimer > L. Rico Duarte *, M. Jiménez, A. Syssau, M. Launay EA3021 « Mémoire et Cognition », université Paul-Valéry, route de Mende, 34199 Montpellier cedex 05, France Reçu le 31 mars 2003 ; accepté le 24 octobre 2003 Résumé Ce travail constitue une première étape dans la création d’une batterie d’épreuves permettant de tester la mémoire sémantique. Notre objectif est d’estimer la sensibilité de cette batterie au vieillissement normal et pathologique (patients Alzheimer aux trois stades de la maladie). Les résultats montrent que globalement les épreuves sont sensibles à l’affaiblissement de la mémoire sémantique lié l’âge et à la maladie d’Alzheimer. La diminution des performances observée dans le vieillissement normal concerne essentiellement les épreuves verbales. Dans la maladie d’Alzheimer, les épreuves permettent de discriminer les différentes atteintes de la mémoire sémantique en fonction des différents stades d’évolution de la maladie. En conclusion, cette batterie d’épreuves sémantiques a permis de distinguer le vieillissement normal de la maladie d’Alzheimer au stade débutant et de décrire le profil d’évolution du déficit sémantique en fonction de cette maladie. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract This study establishes a first stage in the creation of a battery of tests allowing the evaluation of the semantic memory. Our objective is to estimate the sensibility of this battery at the normal and pathological ageing (Alzheimer’s patients at different stages of the disease). The results showed that the tests are sensitive to the decline of the semantic memory in normal ageing and Alzheimer’s disease. In normal ageing the decrease of performances concerns essentially the verbal tasks. In the Alzheimer patients groups a progressive decline according to the evolution of the disease was observed. In conclusion, this battery of semantic tests allowed to distinguish the normal ageing of theAlzheimer’s disease in the early stages and to describe the profile of evolution of the semantic memory impairment in Alzheimer’s disease. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Épreuves sémantiques ; Mémoire sémantique ; Vieillissement normal ; Maladie d’Alzheimer Keywords: Semantic tests; Semantic memory; Normal ageing; Alzheimer’s disease 1. Introduction L’intérêt pour l’évaluation des performances cognitives découle d’un besoin d’adapter la pratique clinique à la prise en charge de la population vieillissante. Cet intérêt obéit à deux objectifs : diagnostique et théorique. D’un point de vue diagnostique, il est nécessaire de mettre au point des outils d’évaluation qui permettent de différencier les changements cognitifs liés à l’âge de ceux associés à un syndrome démen- tiel tel que la maladie d’Alzheimer (MA). Sur un plan théo- rique, cette approche nous renseigne sur la structure et le fonctionnement du système cognitif lui-même. À l’heure actuelle, la démarche diagnostique utilisée dans l’approche des démences se fonde sur des critères biologiques, neurora- diologiques et neuropsychologiques. L’examen neuropsy- chologique doit permettre de dégager le profil des troubles observés ainsi que leurs origines à partir d’une évaluation > Les auteurs remercient pour leur collaboration les Professeurs Jacques Touchon et Claude Jeandel, les Docteurs Pierre-Jean Ousset et Dominique Castan et l’orthophoniste Olivier Héral ainsi que le personnel du centre de Gériatrie Antonin Balmès à Montpellier, de l’hôpital de Jour Alzheimer de Casselardit à Toulouse et de l’Hôpital Général de Castres. * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (L. Rico Duarte). Revue européenne de psychologie appliquée 54 (2004) 143–155 www.elsevier.com/locate/ © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.erap.2003.10.002

Étude de la sensibilité d'une batterie d'épreuves sémantiques au vieillissement normal et à l'évolution de la maladie d'Alzheimer

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Article original

Étude de la sensibilité d’une batterie d’épreuves sémantiquesau vieillissement normal et à l’évolution de la maladie d’Alzheimer>

L. Rico Duarte *, M. Jiménez, A. Syssau, M. Launay

EA 3021 « Mémoire et Cognition », université Paul-Valéry, route de Mende, 34199 Montpellier cedex 05, France

Reçu le 31 mars 2003 ; accepté le 24 octobre 2003

Résumé

Ce travail constitue une première étape dans la création d’une batterie d’épreuves permettant de tester la mémoire sémantique. Notreobjectif est d’estimer la sensibilité de cette batterie au vieillissement normal et pathologique (patients Alzheimer aux trois stades de lamaladie). Les résultats montrent que globalement les épreuves sont sensibles à l’affaiblissement de la mémoire sémantique lié l’âge et à lamaladie d’Alzheimer. La diminution des performances observée dans le vieillissement normal concerne essentiellement les épreuves verbales.Dans la maladie d’Alzheimer, les épreuves permettent de discriminer les différentes atteintes de la mémoire sémantique en fonction desdifférents stades d’évolution de la maladie. En conclusion, cette batterie d’épreuves sémantiques a permis de distinguer le vieillissementnormal de la maladie d’Alzheimer au stade débutant et de décrire le profil d’évolution du déficit sémantique en fonction de cette maladie.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

This study establishes a first stage in the creation of a battery of tests allowing the evaluation of the semantic memory. Our objective is toestimate the sensibility of this battery at the normal and pathological ageing (Alzheimer’s patients at different stages of the disease). The resultsshowed that the tests are sensitive to the decline of the semantic memory in normal ageing and Alzheimer’s disease. In normal ageing thedecrease of performances concerns essentially the verbal tasks. In the Alzheimer patients groups a progressive decline according to theevolution of the disease was observed. In conclusion, this battery of semantic tests allowed to distinguish the normal ageing of the Alzheimer’sdisease in the early stages and to describe the profile of evolution of the semantic memory impairment in Alzheimer’s disease.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Épreuves sémantiques ; Mémoire sémantique ; Vieillissement normal ; Maladie d’Alzheimer

Keywords: Semantic tests; Semantic memory; Normal ageing; Alzheimer’s disease

1. Introduction

L’intérêt pour l’évaluation des performances cognitivesdécoule d’un besoin d’adapter la pratique clinique à la priseen charge de la population vieillissante. Cet intérêt obéit à

deux objectifs : diagnostique et théorique. D’un point de vuediagnostique, il est nécessaire de mettre au point des outilsd’évaluation qui permettent de différencier les changementscognitifs liés à l’âge de ceux associés à un syndrome démen-tiel tel que la maladie d’Alzheimer (MA). Sur un plan théo-rique, cette approche nous renseigne sur la structure et lefonctionnement du système cognitif lui-même. À l’heureactuelle, la démarche diagnostique utilisée dans l’approchedes démences se fonde sur des critères biologiques, neurora-diologiques et neuropsychologiques. L’examen neuropsy-chologique doit permettre de dégager le profil des troublesobservés ainsi que leurs origines à partir d’une évaluation

> Les auteurs remercient pour leur collaboration les Professeurs JacquesTouchon et Claude Jeandel, les Docteurs Pierre-Jean Ousset et DominiqueCastan et l’orthophoniste Olivier Héral ainsi que le personnel du centre deGériatrie Antonin Balmès à Montpellier, de l’hôpital de Jour Alzheimer deCasselardit à Toulouse et de l’Hôpital Général de Castres.

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (L. Rico Duarte).

Revue européenne de psychologie appliquée 54 (2004) 143–155

www.elsevier.com/locate/

© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.erap.2003.10.002

psychométrique et cognitive. L’examen psychométrique vapermettre de détecter et quantifier les changements globauxobservés chez un sujet. Dans le cadre de la démence, ladiminution des performances du patient par rapport à lanorme peut être le signe d’un dysfonctionnement pathologi-que. Cependant, cet examen psychométrique est insuffisantlorsqu’il s’agit d’un syndrome démentiel qui débute. Eneffet, outre l’hétérogénéité des troubles observés dans cettepathologie, le praticien est confronté au problème du dia-gnostic différentiel : les manifestations comportementalesobservées à ce stade de la démence peuvent également êtreévoquées dans un syndrome dépressif ou dans le vieillisse-ment normal. En conséquence, une évaluation cognitive plusapprofondie est nécessaire. Cette évaluation peut concernerles différentes fonctions cognitives telles que la mémoire(épisodique, sémantique, à court terme, de travail), le lan-gage, les fonctions exécutives, les praxies et les gnosies, etnécessite ainsi l’utilisation d’épreuves cognitives plus spéci-fiques que les tests globaux.

Actuellement, un grand nombre de tests d’efficience glo-bale ont été mis au point dans l’évaluation de la démence(Baudu et Juignet, 1997). La plupart de ces tests renseignesur le fonctionnement cognitif global des sujets. En ce quiconcerne l’évaluation des fonctions cognitives plus spécifi-ques, diverses épreuves ont été développées. Parmi les plusemployées nous pouvons citer le Questionnaire autobiogra-phique de Kopelman (mémoire biographique), les blocs deCorsi (mémoire à court terme), l’épreuve de Grober et Bus-chke (mémoire épisodique), le Protocole Montréal-Toulouse1992 (langage), le Stroop test, le Trail-Making Test A et B(fonctions exécutives), les praxies gestuelles et la copie ducube (praxies). Cependant, dans cet ensemble d’instruments,il n’y a pas à notre connaissance d’épreuve spécifique visantà évaluer la mémoire sémantique.

D’après Tulving (1972), la mémoire sémantique est lamémoire nécessaire à l’utilisation du langage. C’est un thé-saurus mental, qui comprend le savoir organisé qu’une per-sonne possède à propos des mots et d’autres symboles ver-baux, de leurs sens et de leurs référents. Ce systèmecomprend également les règles, les formules et les algorith-mes nécessaires à la manipulation des concepts, des symbo-les et de leurs relations (Tulving, 1972 pp 385–386). À ladifférence de la mémoire épisodique, la mémoire sémantiqueest culturellement partagée, atemporelle et décontextualisée(Hodges et al., 1999). À l’heure actuelle, dans l’examenneuropsychologique les épreuves telles que la fluence ver-bale ou les questions d’acquisition culturelles de la WAIS,généralement utilisées pour évaluer la mémoire sémantique,permettent certes de détecter un affaiblissement sémantique,mais elles demeurent insuffisantes pour appréhender l’état dusystème sémantique dans sa totalité. L’évaluation de la mé-moire sémantique doit se structurer dans un cadre conceptuelet méthodologique précis. Pour cela, au moins quatre aspectsdoivent être pris en compte. Le premier concerne le niveau dereprésentations des connaissances évalué : s’agit-il d’unnom, de la catégorie d’appartenance ou d’informations plus

spécifiques telles que les attributs de l’objet ? Il est mainte-nant bien établi qu’au stade débutant de la maladie, la dété-rioration sémantique concerne les attributs spécifiques desobjets, alors que la catégorie d’appartenance et les noms quidésignent l’objet persistent plus longtemps (Garrard et al.,2001). Le second aspect concerne le type de matériel (ima-ges, mots) utilisé pour tester les connaissances. En effet, il estpossible d’observer une variabilité des performances pour lemême item en fonction du codage imposé par le matérielemployé (Diesfeldt, 1989). De ce fait, il demeure très impor-tant d’utiliser un matériel à double codage : verbal et visuel.Le troisième aspect correspond aux processus cognitifs im-pliqués par la tâche : s’agit-il d’une activité de production, decompréhension, de jugement, de classification ou autre. Lesprocessus mis en oeuvre diffèrent en fonction du type detâche demandée et, en conséquence, le diagnostic pourra êtredifférent en fonction de la tâche utilisée (Hodges et Patterson,1995). Le quatrième aspect concerne la nature du matérielutilisé, selon qu’il représente des entités vivantes ou nonvivantes. En effet, des travaux maintenant classiques ont misen évidence des déficits sémantiques pour certaines catégo-ries (effet catégorie-spécifique). Cet effet est caractérisé parune double dissociation concernant les connaissances descatégories vivantes et celles des catégories non vivantes.L’effet catégorie-spécifique est généralement observé dansdes lésions temporales d’étiologie vasculaire, traumatique oupost-encéphalitique, (Warrington et Mc Carthy, 1983, 1987;Warrington et Shallice, 1984; Farah et al., 1991), dans despathologies dégénératives comme la démence sémantique(Cardebat et al., 1996), l’aphasie progressive (Silveri et al.,1997) et la MA (Mauri et al., 1994; Robinson et al., 1996). Ledéficit le plus souvent rapporté est la détérioration desconnaissances des items vivants avec une relative préserva-tion de connaissances à propos des items non vivants (Sheri-dan et Humphreys, 1993; Laiacona et al., 1997). Cependant,le patron de résultats inverse a également été observé (Hilliset Caramazza, 1991). Ces observations divergentes condui-sent à prendre en compte ce facteur lors de la constructiondes épreuves visant à évaluer la mémoire sémantique.

C’est en fonction de ces quatre aspects que nous avonsentrepris un travail visant à adapter une batterie d’épreuvessémantiques dont la version originale a été élaborée en espa-gnol par Peraita, Galeote, et Gonzalez (1999). Ainsi, lesépreuves de cette batterie permettent d’examiner les compo-santes classiques de la mémoire sémantique : le niveau d’in-formation supra-ordonné (classification), la production d’at-tributs spécifiques (définition de catégories et évocationd’attributs), ainsi que la disponibilité des noms (dénomina-tion, fluence verbale), le jugement (vérification d’énoncés),la compréhension (analogies sémantiques) et l’identification(couplage nom–image) des items. Elle utilise un doublecodage en évaluant les connaissances des participants à partirde mots et d’images et explore la dichotomie vivant–nonvivant. L’objectif de cette étude est d’estimer la sensibilité decette batterie d’épreuves de mémoire sémantique au vieillis-sement normal et pathologique. Nous mesurons cette sensi-

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bilité en trois temps. Dans un premier temps, nous évaluonsles effets du vieillissement normal sur la mémoire sémanti-que en comparant les performances d’un groupe de partici-pants adultes à celles d’un groupe de participants âgés. Dansun deuxième temps, nous voulons savoir si cette batteriepermet de distinguer les troubles de la mémoire sémantiqueliés au vieillissement normal de ceux liés à un début demaladie d’Alzheimer. Pour ce faire nous comparons les per-formances d’un groupe de participants âgés à celles d’ungroupe de patients en début de maladie. Dans un troisièmetemps, nous estimons la sensibilité de la batterie à l’évolutionde la MA en comparant les performances des patients enfonction du stade d’avancement de la maladie (débutants,modérés et sévères).

2. Méthode

2.1. Sujets

La batterie d’épreuves a été administrée à quatre-vingtquatre participants repartis en trois groupes. Le premiergroupe est constitué de 42 patients avec un diagnostic proba-ble de démence de type Alzheimer (27 femmes et 15 hom-mes). Le deuxième groupe est composé de 22 personnesâgées (11 femmes et 11 hommes). Ces participants sontappariés aux patients en âge et en niveau d’éducation. Letroisième groupe est constitué de vingt participants adultes(10 femmes et 10 hommes), dont la plupart exercent uneactivité professionnelle.

La sélection du groupe de patients a été réalisée en fonc-tion des informations issues de la consultation de l’hôpital dejour Alzheimer de Casselardit à Toulouse et de celles de laconsultation « Mémoire » du centre de gériatrie AntoninBalmès à Montpellier. Le diagnostic de démence de typeAlzheimer probable a été prononcé selon les critères duNINCDS-ADRDA (National Institute of Neurological andCommunicative Disorders and Stroke and Alzheimer’s Di-sease and Related disorders Association) énoncés par Mc-Khann et al., (1984). Il s’agit essentiellement d’un diagnosticd’exclusion d’autres pathologies fondé sur des critères clini-ques et paracliniques positifs. Ainsi, tous les patients partici-pant à cette étude présentaient des déficits dans deux ouplusieurs sphères de la cognition. Les patients avec unehistoire psychiatrique, de toxicomanie ou avec un troubleperceptif évident ou ayant des difficultés de compréhensionimportante ont été exclus de cette étude.

Les 42 patients Alzheimer ont été repartis en trois sous-groupes en fonction de leur score au MMSE (Mini MentalTest Examination de Folstein, Folstein et Mc Hugh, 1975) :entre 24 et 27 pour le groupe des patients au stade débutantde la maladie ; entre 18 et 23 pour le groupe des patients austade modéré de la maladie et entre 10 et 17 pour le groupedes patients au stade sévère. Le nombre de participants danschaque sous-groupe, leur moyenne d’âge, leur niveau moyend’éducation et leur moyenne au M.M.S.E. sont indiqués dansle Tableau 1.

2.2. Instruments de mesure

La batterie d’épreuves est composée de neuf épreuvesvisant à estimer les connaissances sémantiques concernantun groupe régulier d’items présentés soit de manière verbale,soit de manière imagée, soit mixte. Le Tableau 2 présentel’ensemble des épreuves.

La passation de la batterie est individuelle et nécessite untemps moyen d’une heure et quart.

Nous avons sélectionné 32 items de base qui pour lamoitié appartiennent à deux catégories « vivantes » : ani-maux et fruits et pour l’autre moitié appartiennent à deuxcatégories « non vivantes » : vêtements et véhicules. Danschaque catégorie, nous avons contrôlé la fréquence des itemsd’après le BRULEX (Content, Mousty, et Radeau, 1990).Cependant, nous avons complété le contrôle de la fréquencepar un contrôle de la familiarité. Nous avons soumis120 exemplaires appartenant à six catégories sémantiques,parmi lesquels les items utilisés dans cette étude, auprès d’ungroupe de personnes âgées. Les résultats de cette étude mon-trent que les items utilisés dans la construction de la batteriesont tous familiers car tous ont un score supérieur à 2,5 surune échelle de cinq points (Rico Duarte, Gély-Nargeot, etBrouillet, soumis). L’annexe A illustre les moyennes de fa-miliarité et fréquence pour chacun des exemplaires.

Les images sont issues pour la plupart du corpus créé parSnodgrass et Vanderwart (1980). Elles ont été sélectionnées

Tableau 1Caractéristiques des groupes de sujets

Adultes Agés Débutants Modérés SévèresFemmes 10 11 10 10 7Hommes 10 11 4 4 7Moyenne âge 46,15 (41–50) 76,32 (73–81) 76,43 (71–81) 76,65 (71–81) 76,9 (71–81)MMSE 30 29,63 (28–30) 25,28 (24–27) 21,35 (19–23) 14,78 (10–17)Niveau d’éducation I < 9 ans d’étude a 11(7,83) 0,42 11 (7,33) 0,82 5 (6,4) 1 5 (6,4) 1 6 (7,4) 0,54Niveau d’éducation II > 9 ans d’étude 11 (13,9)1,72 11 (13,20) 1,75 9 (13,22)0,83 9 (11,88)1,36 8 (13,14) 1,95

a Nombre de sujets par groupe, (moyenne) et écart-type.

Tableau 2Ensemble des épreuves en fonction de la modalité sensorielle

Modalité sensorielle ÉpreuvesVerbales Épreuve 1. Fluence verbale Épreuve 2. Définition de

catégories Épreuve 8. Vérification d’énoncésVisuelles Épreuve 3. Dénomination Épreuve 6a. Classification

libre Épreuve 6b. Classification indicée(verbales–visuelles) Épreuve 4. Évocation d’attributs Épreuve 5. Cou-

plage nom–image Épreuve 7. Analogies sémantiques

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en fonction du pourcentage d’accord sur leurs noms (de 90 à100 %, Jamet, 1995). Le Tableau 3 présente les 32 itemsutilisés.

L’ordre de passation des items dans chacune des épreuvesa été établi de façon à éviter la succession d’éléments d’unemême catégorie et de façon à obtenir une distribution descaractéristiques de fréquence et de longueur des noms quisoit relativement uniforme sur l’ensemble des épreuves. Parailleurs, le nombre d’apparitions de chacun des items a étécontrôlé.

Nous décrivons à présent les épreuves dans l’ordre danslequel elles sont proposées aux participants.

2.2.1. Épreuve 1. Fluence verbale

Cette épreuve consiste en une production libre de mots àpartir de chaque nom générique des quatre catégories étu-diées (animaux, fruits, vêtements et véhicules). Le partici-pant a deux minutes pour énoncer le plus grand nombrepossible d’exemplaires pour chaque catégorie.

2.2.2. Épreuve 2. Définition de catégories

Cette épreuve consiste en une production libre, sans limitede temps, d’attributs concernant les quatre catégories (ani-maux, fruits, vêtements et véhicules) et quatre exemplairesappartenant à chacune de ces catégories (voitures, pommes,pantalons et chiens). L’ordre de présentation alterne les nomsdes catégories et des exemplaires. Le participant doit évoquerle plus grand nombre de caractéristiques concernant chacundes items énoncés.

2.2.3. Épreuve 3. Dénomination

Cette épreuve consiste à dénommer les huit exemplairesde chacune des catégories étudiées. Les exemplaires sontprésentés sous forme d’une image au centre d’une planche(30 × 21 cm). Le participant doit produire le nom correspon-dant à chacune des images montrées. L’annexe B présentedes exemples d’images de cette épreuve.

2.2.4. Épreuve 4. Évocation d’attributs

Dans cette épreuve, le participant doit répondre à quatrequestions qui portent sur les caractéristiques fonctionnelles« à quoi ça sert ? », perceptives « quelles sont les parties quile composent ? », contextuelles « où est-ce qu’on le trouve ? »et associatives « autres caractéristiques ? » de deux exemplai-res de chacune des catégories. Les items sont présentésbrièvement sous forme d’images et ensuite les questions sontposées. Cette épreuve n’est pas limitée dans le temps.

2.2.5. Épreuve 5. Couplage nom entendu–imageDans cette épreuve, le participant doit choisir parmi quatre

images celle qui correspond à l’item dénommé par l’expéri-mentateur. Dans chaque planche, l’item cible (e.g. mouche)est présenté avec trois distracteurs, un distracteur catégoriel(e.g. fourmi), un distracteur phonémique (e.g. louche) et undistracteur associatif (e.g. tapette). L’épreuve comprend huititems, correspondant à deux exemplaires de chacune descatégories. Des exemples sont présentés dans l’annexe C.

2.2.6. Épreuve 6a. Classification libreDans cette épreuve le participant doit regrouper des ima-

ges sans qu’aucun critère de classification ne lui soit donnépar l’expérimentateur. L’épreuve porte sur 16 images corres-pondant à quatre exemplaires par catégorie qui ont été déjàutilisées auparavant. Ces images sont présentées sur descartes individuelles de 8 × 12,5 cm. Cette épreuve n’est paslimitée dans le temps.

2.2.7. Épreuve 6b. Classification indicéeCette épreuve invite le participant à regrouper les images

dans les différentes catégories mentionnées explicitementpar l’expérimentateur. Elle porte sur 16 images des quatrecatégories, différentes de celles utilisées dans l’épreuve declassification libre. Quatre nouvelles images sont utiliséespar l’expérimentateur pour illustrer le critère catégoriel deregroupement des exemplaires.

2.2.8. Épreuve 7. Analogies sémantiquesDans cette épreuve, on présente au participant des plan-

ches de 30 × 21 cm sur lesquelles figurent les images de cinqobjets. Deux objets A et B entretenant un lien sont présentésà gauche à titre d’exemple. Pour le troisième objet C leparticipant doit trouver parmi les objets D et E celui quicorrespond au lien illustré dans l’exemple : « A est à B ce queC est à D ou à E ». Cette épreuve comprend au total 12 plan-ches, l’objet C correspond à trois exemplaires de chacune descatégories utilisées. Cette épreuve porte sur quatre analogiesde type perceptif, deux analogies de type fonctionnel, deuxde type contextuel et quatre analogies de type catégoriel. Ledistracteur qui peut être D ou E a aussi un lien avec la cible,mais différent du lien illustré par l’exemple. Des exemplessont présentés dans l’annexe D.

2.2.9. Épreuve 8. Vérification d’énoncésDans cette épreuve, le participant doit porter un jugement

en répondant vrai ou faux sur le contenu de deux séries de16 phrases. La première série concerne deux exemplairesdéjà utilisés et deux exemplaires nouveaux, de chaque caté-

Tableau 3Items de base, selon la catégorie et la fréquence

Animaux Fruits Véhicules Vêtements

Domestiques Insectes Sauvages Oiseaux

fréquents Chien Mouche Singe Poule Pomme, Cerise, Raisins, Fraise Train, Voiture, Avion, Bateau, Robe, Chapeau, Chemise, pantalon

peu fréquents Tortue Sauterelle Girafe Paon Poire, Banane, Ananas, citron, Camion, Vélo, Moto, Bus Jupe, Veste, Chaussette, Pull

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gorie sémantique. Les phrases portent sur des informationsde type catégoriel, parties de, couleur–forme et fonction, quiconcernent les quatre exemplaires de chacune des catégories.Pour chaque type d’information la moitié des phrases estvraie et l’autre moitié est fausse. La deuxième série estcomposée également de deux exemplaires déjà utilisés et dedeux nouveaux. Les caractéristiques des phrases sont lesmêmes que celles de la première série. Des exemples sontprésentés dans l’annexe E.

3. Résultats

L’analyse des résultats porte sur le nombre de réponsescorrectes fournies par les participants en fonction du groupeauquel ils appartiennent (adultes, âgés, débutants, modérés etsévères) dans chacune des épreuves. Nous allons présenterles résultats de ces différents groupes dans l’ordre suivant :les épreuves verbales (mots), les épreuves visuelles (images)et les épreuves mixtes (mots et images). Pour chaqueépreuve, nous avons effectué une analyse de la variance(ANOVA) avec le groupe comme facteur inter-sujet.

3.1. Épreuves verbales

Les moyennes et les écart-types des résultats aux épreuvesverbales sont présentées dans la Fig. 1. Globalement, nousobservons une détérioration des capacités verbales avec l’âgeet l’évolution de la maladie d’Alzheimer.

Dans l’épreuve 1 (Fluence Verbale) ainsi que dansl’épreuve 2 (définition de catégories) nous constatons unediminution progressive de la production d’exemplaires etd’attributs en fonction de l’âge et de l’évolution de la maladie[respectivement, F(4,79) = 183,88, p < 0,0001 ;F(4,79) = 175,22, p < 0,0001]. Les comparaisons parcontraste montrent des différences significatives entre tousles groupes de sujets (pour toutes les comparaisonsp < 0,001). Dans l’épreuve de vérification d’énoncés l’ana-lyse de variance met en évidence une diminution statistique-ment significative de la capacité de jugement[F(4,79) = 17,54, p < 0,0001]. Cependant, les contrastes nesont significatifs qu’entre les groupes de sujets âgés et lespatients Alzheimer au stade débutant [F(1,34) = 4,177,p < 0,044] et entre les groupes de patientsAlzheimer modéréset sévères [F(1,26) = 7,625, p < 0,008]. En revanche, aucunedifférence significative n’a été observée ni entre les sujetsjeunes et les sujets âgés, ni entre les patients débutants et lespatients modérés.

3.2. Épreuves visuelles

La Fig. 2 présente les moyennes et les écart-types desrésultats aux épreuves visuelles. À la lecture de cette figurenous constatons pour les trois épreuves visuelles un effetplafond pour les performances des groupes adultes et âgés,

alors que les patients Alzheimer sont plus ou moins perfor-mants selon le stade de leur maladie. Dans l’épreuve 3 (déno-mination), nous constatons une diminution progressive descapacités de dénomination avec l’évolution de la maladie[F(4,79) = 55,67, p < 0,0001]. Les comparaisons par contras-tes mettent en évidence des différences significatives entreles groupes de participants âgés et Alzheimer débutants[F(1,34) = 25,39 p < 0,0001], débutants et modérés[F(1,26) = 11,27, p < 0,001] et modérés et sévères[F(1,26) = 6,903, p < 0,010]. Dans l’épreuve 6a (classifica-tion libre), bien qu’il n’y ait pas d’effet significatif du facteurgroupe, nous avons effectué des comparaisons car une chutedes performances est observée chez les patients. En effet, lesanalyses montrent une diminution de performances en fonc-

Fig. 1. Résultats aux épreuves verbales en fonction du groupe des sujets.Épreuve 1 (en haut), Fluence verbale : moyennes du nombre d’exemplairesproduits. Épreuve 2 (au centre), Définition de catégories : moyennes dunombre d’attributs produits. Épreuve 8 (en bas), Vérification d’énoncés :moyennes du nombre d’énoncés correctement jugés. La moyenne apparaîten gras et l’écart-type en italique.

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tion de la sévérité de la maladie. Les patients Alzheimertémoignent de difficultés à classer les images en fonction deleur catégorie d’appartenance. Les comparaisons parcontraste sont significatives entre les groupes de participantsâgés et Alzheimer débutants [F(1,34) = 17,25, p < 0,0001] etentre les groupes des patients modérés et sévères[F(1,26) = 67,83, p < 0,0001]. En revanche, aucune diffé-rence significative n’est observée entre les patients débutantset modérés. Dans l’épreuve 6b (classification indicée), nousobservons une diminution des performances avec l’évolutionde la maladie [F(4,79) = 10,17, p < 0,0001]. La seule compa-raison qui se révèle significative concerne les groupes modé-rés et sévères [F(1,26) = 19,06, p < 0,0001]. En effet, lespatients à ce stade font davantage d’erreurs de classementque les participants des autres groupes.

3.3. Épreuves mixtes

Les moyennes et les écarts-types des résultats aux épreu-ves mixtes sont présentées dans la Fig. 3. Globalement, nousobservons une diminution de performances avec l’âge etl’évolution de la maladie.

Dans l’épreuve 4 (évocation d’attributs), nous constatonsune diminution des performances avec l’âge et la maladie[F(4,79) = 361,70, p < 0,0001]. Les participants adultesproduisent davantage de caractéristiques que les personnesâgées et des différences similaires sont observées entre lesdifférents groupes de patients (pour l’ensemble de comparai-sons p < 0,001). Dans l’épreuve 7 (analogies sémantiques),bien qu’il n’y ait pas d’effet significatif du facteur groupe,nous avons effectué des contrastes étant donné la forme de lacourbe observée. Les comparaisons par contraste révèlent

Fig. 2. Résultats aux épreuves visuelles en fonction du groupe des sujets.Épreuve 3 (en haut), Dénomination : moyennes du nombre d’images correc-tement nommées. Épreuve 6a (au centre), Classification libre : moyennes dunombre d’items correctement classés. Épreuve 6b (en bas), Classificationindicée : moyennes du nombre d’items correctement classés. La moyenneapparaît en gras et l’écart type en italique.

Fig. 3. Résultats aux épreuves mixtes en fonction du groupe des sujets.Épreuve 4 (en haut), Évocation d’attributs : moyennes du nombre d’attributsproduits. Épreuve 5 (au centre), Couplage nom entendu–image : moyennesdu nombre d’images correctement associées. Épreuve 7 (en bas), Analogiessémantiques : moyennes du nombre d’items correctement associés. Lamoyenne apparaît en gras et l’écart type en italique.

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des différences significatives entre les groupes des partici-pants adultes et âgés [F(1,40) = 11,48, p < 0,001], âgés etdébutants [F(1,34) = 16,84, p < 0,0001] et modérés et sévères[F(1,26) = 10,46, p < 0,001]. En revanche, cette différencen’est pas significative entre les patients des groupes débu-tants et modérés. En ce qui concerne l’épreuve 5 (couplagenom entendu–image), nous observons un effet plafond dansl’ensemble de groupes.

4. Discussion

L’objectif de cette étude était d’estimer la sensibilitéd’une batterie d’épreuves d’évaluation de la mémoire séman-tique. Pour ce faire nous avons analysé les résultats desparticipants en fonction de l’âge (adultes et âgés), de lapathologie (âgés et Alzheimer débutants) et de la progressionde la maladie (Alzheimer modérés et sévères).

Si toutes les épreuves utilisées dans cette batterie sontcensées impliquer le système sémantique seules certainesd’entre elles permettent d’identifier les troubles de la mé-moire qui caractérisent les personnes âgées et les patientsAlzheimer.

En ce qui concerne le vieillissement normal quatre épreu-ves se sont avérées sensibles : deux épreuves verbales (lafluence verbale et la définition de catégories) et deux épreu-ves mixtes (l’évocation d’attributs et les analogies sémanti-ques). Pour ce qui est des processus impliqués par ces épreu-ves, les trois premières mettent essentiellement en jeu uneactivité de production tandis que la quatrième est une tâchede raisonnement qui requiert une attention soutenue. Enrevanche, les épreuves visuelles sont particulièrement peusensibles aux effets du vieillissement normal.

Pour ce qui est du stade débutant de la maladie d’Alzhei-mer sept épreuves ont permis de distinguer le vieillissementnormal du vieillissement pathologique : les quatre épreuvesmentionnées précédemment auxquelles s’ajoutent la vérifi-cation d’énoncés et deux épreuves visuelles (la dénominationet la classification libre). Néanmoins à ce stade de la patho-logie, les patients ont des performances préservées dans lesépreuves à indiçage (couplage nom entendu–image et classi-fication indicée).

Au stade modéré, la progression du déficit sémantique estmise en évidence par quatre épreuves, les trois épreuves deproduction verbale (fluence verbale, définition de catégorieset évocation d’attributs) et une épreuve visuelle (dénomina-tion). Enfin, toutes les épreuves (à l’exception du couplagenom entendu–image) sont sensibles au passage du stademodéré au stade sévère de la maladie d’Alzheimer.

Globalement, la diminution de la production d’exemplai-res à partir d’une catégorie dans l’épreuve de fluence verbale,la baisse du nombre d’attributs produits lors des épreuvescomme la définition de catégories et l’évocation d’attributs,le manque du mot mis en évidence lors de l’épreuve dedénomination, le trouble de jugement remarqué dansl’épreuve de vérification d’énoncés et la difficulté observée

dans l’épreuve d’analogies sémantiques sont des résultats quiattestent d’une atteinte sémantique dans la maladie d’Alzhei-mer et confirment les travaux d’autres auteurs (Hodges etPatterson, 1995; Eustache et Desgranges, 1995; LambonRalph et al., 1997).

Nous pouvons constater que les difficultés observées dansle vieillissement normal apparaissent dans les épreuves deproduction verbale et celles de raisonnement (analogies sé-mantiques). En revanche, le traitement des épreuves impli-quant des images se révèle comparable à celui des sujetsadultes jeunes. En ce qui concerne le vieillissement patholo-gique, nous observons une dégradation progressive sur l’en-semble des épreuves. Deux épreuves sont particulièrementsensibles au début de maladie d’Alzheimer, il s’agit del’épreuve de dénomination et de classification libre. Dans cesens l’utilisation d’une batterie d’épreuves sémantiques quiévalue les connaissances des sujets à partir de deux types dematériel (mots et images) se révèle pertinente pour distinguerle vieillissement normal de la maladie d’Alzheimer débu-tante. De même, ces résultats confirment l’importance del’utilisation des tâches sémantiques dans le diagnostic pré-coce de la maladie d’Alzheimer (Spaan et al., 2003). Toute-fois, malgré la sensibilité de ces tâches à différencier lespatients Alzheimer des personnes âgées normales, d’autresétudes montrent que les tâches de mémoire sémantique nepeuvent pas être considérées comme prédictives du déclincognitif des patients atteints de cette pathologie (Beatty et al.,2002).

Par ailleurs, cette batterie permet également d’analyser lesdéficits sémantiques. En effet, le fait que les performancesdes personnes âgées soient déficitaires dans les épreuvesverbales (mots) et soient préservées dans les épreuves visuel-les (images), pourrait être interprété comme une difficultéd’accès au système sémantique (Shallice, 1987). Puisquechacun des items a été testé sous ces deux formes (verbale etimagée), et que la diminution des performances des person-nes âgées ne concerne que la modalité verbale, on peutpenser que les connaissances à propos des items sont tou-jours disponibles mais qu’il est plus facile d’y accéder àpartir d’une image qu’à partir d’un mot. Ainsi, les difficultésprésentées par les personnes âgées relèveraient davantaged’une diminution des capacités d’accès aux caractéristiquesde l’item plutôt que d’une désintégration du système séman-tique lui-même. En revanche, en ce qui concerne le vieillis-sement pathologique nous observerions une dégradation pro-gressive du système sémantique lui-même (Hodges et al.,1994). Au stade débutant de la maladie, les patients bénéfi-cieraient de l’indiçage et du double codage : dans l’épreuvecouplage nom entendu–image et dans celle de classificationindicée, le participant reçoit des informations à la fois verba-les et imagées qui constituent deux voies cumulées d’accèsau système sémantique, il doit juste mettre en relation cesinformations. Ces patients bénéficieraient de l’indiçage et dudouble codage jusqu’au stade modéré de la maladie, au-delàduquel l’accès à la mémoire sémantique serait globalementdéficitaire.

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Nous avons utilisé cette batterie à titre expérimental et ilfaudra effectuer d’autres passations et d’autres modificationspour la rendre valide et applicable en tant qu’épreuve dia-gnostique standardisée. Cependant, les résultats observésdans cette étude rendent compte déjà de l’intérêt d’une tellebatterie aussi bien d’un point de vue pratique que théorique.En effet, cet outil peut s’avérer utile, d’une part, d’un point devue diagnostique, car il permettrait de différentier le profilsémantique observé dans le vieillissement normal de celuiobservé dans la maladie d’Alzheimer et d’autre part, d’unpoint de vue théorique, il pourrait affiner nos connaissances àpropos de la structure du système sémantique, de ses princi-pes organisateurs et de ses dysfonctionnements.

Annexe A. Familiarité et fréquence de l’ensembled’exemplaires de base

Familiarité a Lexique BRULEXItem moyenne Écart-type Frantfreq b FRLEX c

Chien 4,86 0,93 69,68 12112Girafe 2,75 1,67 1,03 119Mouche 4,32 1,37 12,45 3373Paon 2,63 1,60 2,84 472Poule 4,86 1,19 10,87 2182Sauterelle 3,94 1,60 1,03Singe 3,49 1,55 20,72 1646Tortue 3,12 1,65 4,35 557Ananas 3,57 1,40 2,1 110Banane 3,98 1,26 2,45 268Cerise 4,76 1,11 2,48 701Citron 4,20 1,26 8,06 502Fraise 4,84 1,18 2,45 612Poire 4,74 0,79 6,42 531Pomme 4,96 0,69 26,45 3041Raisin 4,80 1,30 4,39 1157Chapeau 4,22 1,43 42,48 8721Chaussette 4,82 0,62 26,03Chemise 4,92 0,96 38,71 4658Jupe 4,04 1,45 18,13 2207Pantalon 4,66 0,82 29,26 2846Pull-over 4,57 0,98 6,68 –1Robe 4,56 1,27 65,48 9929Veste 4,62 0,87 27,68 2063Autobus 3,85 1,41 15,23 1391Avion 3,82 1,36 34,71 4981Bateau 3,65 1,44 41,94 5483Camion 4,10 1,35 18,19 2144Moto 3,43 1,48 8,03 157Train 4,29 1,20 161,55 16774Vélo 4,20 1,23 13 442Voiture 4,76 0,71 123,13 11827

a Score de familiarité obtenu auprès d’un groupe de sujets âgés sur uneéchelle de 1 à 5.

b Frantfreq : fréquences de frantext par million d’occurrences d’aprèsLexique.

c FRLEX : fréquence lexicale d’après le BRULEX.

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Annexe B. Items de base : épreuves 3. Dénomination, 4. Évocation d’attributs, 6. Classification

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Annexe C. Exemples d’items de l’épreuve 5. Couplagemot entendu/Image

Annexe D. Exemples d’items de l’épreuve 7. Analogiessémantiques

Annexe E. Phrases utilisées dans l’épreuve 8. Vérifica-tion d’énoncés

no Phrases V F1 La cerise a des ailes2 La chemise est blanche3 Le singe est un animal4 Le métro est rond5 Les gants servent à faire de l’alcool6 La pomme est un fruit7 Le train transporte des voyageurs8 Le papillon a un noyau9 Le manteau a des boutons10 Le canard est rouge11 La pêche sert à s’habiller12 La voiture a des roues13 Le chien garde la maison14 Le pantalon est un véhicule15 Le citron est jaune

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no Phrases V F16 Le taxi est un vêtement

no Phrases V F1 Le cygne est orange2 La banane a une peau3 Le bus est un véhicule4 Le béret a la forme d’un râteau5 La sauterelle est verte6 Le pull sert a manger7 Le tramway a des nageoires8 L’ananas est un animal9 Les chaussettes servent à couvrir les pieds10 Le vélo est carré11 La souris est un fruit12 La framboise sert a faire de la confiture13 Le gilet est un vêtement14 Le camion de pompiers est rouge15 La tomate est triangulaire16 La girafe a un long cou

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