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ITEM Site officiel de l'Institut des textes & manuscrits modernes Mobilité proustienne, Mobilité journalistique. Intertextes et imaginaires médiatiques dans « Impressions de route en automobile » —Yuri Cerqueira dos Anjos, Table des matières La presse, l’espace et la mobilité Poétiques de l’automobile, poétiques médiatiques Le chemin proustien Les chemins qui bifurquent Notes Pour citer cette page Les idées de « spatialité » et de « mobilité » surgissent dans plusieurs des écrits de presse de Proust. Sans vouloir proposer une interprétation naïve de leur titre, il n’est pas inintéressant de voir que ces textes évoquent, directement ou indirectement, un déplacement caractéristique : c'est par exemple le cas de « Choses Normandes » (Le Mensuel, Sept. 1891), « Voyage en Turquie d’Asie » (Littérature et critique, 25 Mai 1892), « Mélancolique Villégiature de Mme de Breyves » (La Revue blanche, 15 Sept 1893), « Fête littéraire à Versailles » (Le Gaulois, 31 Mai 1894), « Lettres de Perse et d’ailleurs » (La Presse, Sept.-Oct. 1899), « Pèlerinages ruskiniens en France » (Le Figaro, 13 Fév. 1900), « Impressions de route en automobile » (Le Figaro, 19 Nov. 1907), pour n'en citer que quelques-uns. Il serait même possible, sous cet angle, de repenser la signification d’un pseudonyme comme « Étoile Filante » (que Proust utilise dans Le Mensuel1 ), phénomène dont l’existence est définie par le mouvement. Or, si cette clé de lecture peut s'avérer pertinente, c’est qu’en effet elle constitue un trait marquant dans le contexte culturel qui traverse le XIX e siècle et qui s’intensifie au seuil du XX e , surtout dans le cadre parisien2 . Les nouvelles technologies de transport et d’information, les migrations, l’accélération et l'amplification du phénomène de la presse, vont de pair avec tout un mouvement culturel qui s’interroge sur le rapport entre l’espace et une temporalité marquée par l’accélération et la simultanéité3 . Que l’on pense aux interrogations sur la mobilité posées par la littérature de la fin du XIX e siècle, dont le Tour du Monde en quatre-vingts jours de Jules Verne est un exemple particulièrement emblématique, ou à la peinture du début du XX e siècle, avec les investigations des cubistes, telles que le Nu descendant un escalier de Marcel Duchamp, ou encore au mouvement futuriste et à l’éloge qu’il fait de la modernité et de la vitesse, nous pourrons entrevoir à quel point le déplacement et la vitesse sont importants dans le répertoire des représentations de l’époque. La presse, l’espace et la mobilité Ainsi, si les titres des articles de Proust cités plus haut suggèrent la mise en scène d’une spatialité multiple, ce trait évoque une logique également présente dans le contexte global de la culture de la Belle

Mobilité proustienne, Mobilité journalistique: Intertextes et imaginaires médiatiques dans « Impressions de route en automobile »

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ITEMSite officiel de l'Institut des textes & manuscrits modernes

Mobilité proustienne, Mobilité journalistique.Intertextes et imaginaires médiatiques dans « Impressions de route en automobile » —Yuri Cerqueira dosAnjos,

Table des matièresLa presse, l’espace et la mobilitéPoétiques de l’automobile, poétiques médiatiquesLe chemin proustienLes chemins qui bifurquentNotesPour citer cette page

Les idées de « spatialité » et de « mobilité » surgissent dans plusieurs des écrits de presse de Proust. Sansvouloir proposer une interprétation naïve de leur titre, il n’est pas inintéressant de voir que ces textesévoquent, directement ou indirectement, un déplacement caractéristique : c'est par exemple le cas de« Choses Normandes » (Le Mensuel, Sept. 1891), « Voyage en Turquie d’Asie » (Littérature et critique,25 Mai 1892), « Mélancolique Villégiature de Mme de Breyves » (La Revue blanche, 15 Sept 1893),« Fête littéraire à Versailles » (Le Gaulois, 31 Mai 1894), « Lettres de Perse et d’ailleurs » (La Presse,Sept.-Oct. 1899), « Pèlerinages ruskiniens en France » (Le Figaro, 13 Fév. 1900), « Impressions de routeen automobile » (Le Figaro, 19 Nov. 1907), pour n'en citer que quelques-uns. Il serait même possible,sous cet angle, de repenser la signification d’un pseudonyme comme « Étoile Filante » (que Proust utilisedans Le Mensuel1), phénomène dont l’existence est définie par le mouvement.

Or, si cette clé de lecture peut s'avérer pertinente, c’est qu’en effet elle constitue un trait marquant dans lecontexte culturel qui traverse le XIXe siècle et qui s’intensifie au seuil du XXe, surtout dans le cadreparisien2. Les nouvelles technologies de transport et d’information, les migrations, l’accélération etl'amplification du phénomène de la presse, vont de pair avec tout un mouvement culturel qui s’interrogesur le rapport entre l’espace et une temporalité marquée par l’accélération et la simultanéité3.

Que l’on pense aux interrogations sur la mobilité posées par la littérature de la fin du XIXe siècle, dont leTour du Monde en quatre-vingts jours de Jules Verne est un exemple particulièrement emblématique, ou àla peinture du début du XXe siècle, avec les investigations des cubistes, telles que le Nu descendant unescalier de Marcel Duchamp, ou encore au mouvement futuriste et à l’éloge qu’il fait de la modernité etde la vitesse, nous pourrons entrevoir à quel point le déplacement et la vitesse sont importants dans lerépertoire des représentations de l’époque.

La presse, l’espace et la mobilitéAinsi, si les titres des articles de Proust cités plus haut suggèrent la mise en scène d’une spatialitémultiple, ce trait évoque une logique également présente dans le contexte global de la culture de la Belle

Époque et plus particulièrement dans le contexte médiatique où ses textes se présentent. À partir d’unetendance élémentaire du journal à attirer différentes spatialités vers soi4, il est possible de rapprocher lapolyphonie caractéristique de la presse périodique5 d'une « polytopie » où se rassemblent, se contaminentet se superposent (à un degré plus ou moins intense) plusieurs espaces différents.

Un regard panoramique sur les journaux des années 1890-1910 peut par exemple montrer que l’espace seconfigure comme une catégorie structurante du discours médiatique. L’espace est d’abord le signe dupouvoir (symbolique et économique) du journal. Le Gaulois et Le Figaro, par exemple, comme la plupartdes quotidiens de l’époque, portent sur l’en-tête de leurs unes non seulement le lieu de provenance dujournal, mais aussi les espaces sur lesquels ils sont distribués grâce aux abonnements (à Paris, dans lesdépartements, et à l’étranger), et dans les kiosques et les gares (avec l’indication du prix par numéro) :

Figure 1 - L'annonce (réitérative) du lieu de rédaction et des lieux où l'on peut avoir accès au journal, estune caractéristique des quotidiens de l'époque (Le Gaulois, 1 jan. 1895).

L’en-tête du Figaro va même un peu plus loin et ajoute, en bas des prix, le signe de sa conquête del’espace : « On s’abonne dans tous les Bureaux de Poste de France et d’Algérie ».

Figure 2 - Le Figaro, 01 jan. 1895.

Cette conquête, que l’on doit non seulement rapprocher des développements technologiques de lacommunication et des transports, mais aussi de l’expérience coloniale, sert à la construction d’une imagepositive du périodique. Cependant, la conquête de l’espace multiple dans le journal n’est pas uniquementliée à sa capacité de diffusion sur le territoire urbain et rural, national et étranger, mais aussi aux formesque le journal utilise pour mettre en scène la multiplicité des espaces. En ce sens, il est intéressantd’observer que les rubriques mêmes de ces journaux ont un rapport très étroit avec la spatialité. LeGaulois, par exemple, comporte des sections intitulées « Au dehors », « Bloc-Notes Parisien », « Echosde Paris », de même qu’une série d’articles paraissant quotidiennement sous des titres qui suivent laformule « À … » ou « En … » que l’on complète avec le nom d’un lieu, selon l’occasion (« À Londres »,« À Nice », « À l’Étranger », etc.). Le Figaro n’échappe pas non plus à cette pratique. On y retrouve « LeMonde et la Ville », « À l’Étranger », « Les Colonies », etc. de même que d’autres exemples qui semblentêtre plus directement évocateurs d’une mobilité, comme « À Travers Paris », et « Figaro à Londres6 ».

Si on les regarde de plus loin, les pages de ces importants quotidiens font une espèce de mosaïquespatiale :

Figure 3 - Deuxième page du Figaro du 2 janvier 1905 - Les parties soulignées sont les référencesspatiales de la page. Ici le regard du lecteur passe par la ville de Paris, l'Italie, le Chili, le Vatican, laRussie, le Japon, la Tunisie, l'Allemagne, la Suisse, etc.

D’une part, le journal tend donc à mettre en valeur cette multiplicité simultanée de l’espace, dérivée deson désir de rendre compte de l’actualité, par sa propre présentation typographique et sa mise en page.D’autre part, de manière plus spécifique, on observe d’autres moyens pour arriver à ce but. Nouspourrions, dans ce sens, souligner les manifestations du journalisme sportif, volet médiatique en ascensiondans les journaux et revues de l’époque, où des sports tels que le cyclisme et l’automobilisme attirent unlarge public7 et renforcent l’imaginaire reliant temporalité et spatialité, accélération et mobilité. Ce n’estpas par hasard que l’un des récits pionniers de l’expérience du voyage en automobile a été écrit par unécrivain-journaliste. Octave Mirbeau avec son roman La 628-E6 s’interroge8 justement sur la conquête del’espace par le progrès technique, conquête qui se révèle un trait essentiel de la presse.

Un article de Frantz-Reichel sur la course Paris-Madrid, paru le 14 mai 1903 dans le Figaro, incarne biencet imaginaire de la mobilité de même que ses intersections avec la presse et évoque déjà quelques thèmesqui seront abordés par le texte de Proust de 1907 :

En 1901, c’était Paris-Berlin ; l’an dernier ce fut Paris-Vienne ; et cette année, c’est Paris-Madrid ; Paris-Rome s’impose pour 1904 ; mais après ? Après, il ne restera plus qu’àrecommencer, et pour ma part, je ne saurais m’en plaindre, puisque le retour de cesmanifestations me vaut d’être transformé en globe-trotteur du journalisme et en bohème dureportage, délicieusement affranchi des horaires des trains, n’ayant pour maître que lafantaisie, m’arrêtant à mon gré dans la grande ville ou dans la modeste bourgade accrochée àflanc de coteau ou tapie au fond d’une vallée, connaissant tour à tour le luxe confortable etabusif des grands hôtels, le charme ou l’insuffisance des petites auberges9.

Le lien entre le journalisme et la mobilité, qu'elle concerne l’espace physique (Paris-Madrid) ou social (du

luxe à la simplicité), permet au journaliste de se construire une image caractérisée par sa capacité àtraverser des espaces et des réalités diverses et à se présenter comme quelqu’un qui circule dans le mondeavec une aisance particulière10. Son but n’ayant jamais été d’arriver en premier, mais de rendre le plusd’informations possible à son journal, il choisira plutôt de mettre en valeur sa capacité de mobilité, deprendre des bifurcations, d’accumuler les expériences afin de les transmettre, de raconter comment etpourquoi il choisit de ne pas prendre la route principale de la course, d’où son insistance sur les détails etdétours du trajet, de même que sur l’intense dynamique de la tâche :

J’ai donc filé par Saint-Cyr, Trappes, Rambouillet, Epernon, Maintenon : trajet exquis et,pour le moment, d’un charme incomparable, tant est fraîche et tendrement verdoyante lanature de par les pluies de ces temps derniers. Je n’ai pu franchir Chartres sans m’y attarder,sans me laisser aller déambuler par ses moyenâgeuses rues étroites, tortueuses, aux maisonscabossées, titubantes et charmantes, sans me complaire au spectacle de sa cathédrale, dardantses flèches vers l’azur.Mais l’heure passe et il nous faut reprendre la route pour atteindre Vendôme avant la nuit. MaSerpollet ronfle, prête à la chasse aux bornes. En route11 !

Le journaliste sportif se présente souvent comme une déclinaison particulière du reporter, figure quipersonnifie cette valorisation de la vitesse et de la mobilité dans la culture de la IIIe République, de sortequ’il n’est pas étonnant que Pierre Giffard appelle son célèbre personnage reporter « Sieur de Va-Partout ». Il évoque justement l’idéal-typique du journalisme moderne :

Le lecteur verra comment a fini ce globe-trotter intrépide, toujours prêt à voler aux quatrecoins de Paris, de la France, ou du monde, et que j’ai vu coucher, pendant les six dernièresannées de sa vie, sur une valise toujours bouclée, en guise d’oreiller. […]Je le vis plus d’une fois traverser notre territoire comme une flèche, affamé, rompu de fatigue.Il arrivait à Marseille où son journal l’avait envoyé, et n’avait que le temps de toucher labarre, puis de prendre le chemin de fer de l’Ouest et de gagner Cherbourg où son journal leréexpédiait12.

Poétiques de l’automobile, poétiques médiatiquesIl semble donc qu’un article comme « Impressions de route en automobile », publié dans le Figaro en1907et portant sur l’expérience de l’automobile, ne saurait être lu isolément, sans prendre en comptel’élan médiatique qui l’entoure de près, voire de très près. Ainsi, si d’autres chercheurs, comme SaraDanius13, se sont penchés sur les tendances esthétiques qui marquent ce texte de Proust, en y retrouvantdes interrogations présentes dans les arts plastiques, dans le cinéma et dans le modernisme de manièregénérale, il est également intéressant de saisir les intertextes médiatiques qu’il véhicule, surtout dans lecontexte spécifique du Figaro. Au-delà d’un engouement répandu pour l’automobilisme, qui figure assezrégulièrement dans les rubriques sportives de la presse des années 1900, il s’agit en effet, en novembre1907, d’un moment où l’usage médiatique de l’automobilisme est encore plus marqué.

Une semaine avant la parution de l’article de Proust, Paris reçoit l’Exposition Décennale de l’Automobile,et l’événement tiendra une place importante dans le même Figaro qui se dispose d’ailleurs à changer saconfiguration éditoriale afin d'intégrer et de mettre en vedette cette inauguration : « Demain, à l’occasionde l’Exposition décennale de l’Automobile, du Cycle et des Sports, le FIGARO paraîtra sur huitpages14 ». Il faudrait donc resituer l’article de Proust au sein de cette couche discursive qui dictait lerythme du Figaro tout au long de la semaine précédant sa parution. La couverture journalistique del’événement, que l’on doit surtout à Frantz-Reichel, l’un des plus grands journalistes sportifs del’époque15, tend à souligner que cette exposition s’inscrit dans le sillage de l’Exposition Universelle. Ilest question de montrer l’importance du Salon de l’Automobile et de le rapprocher de l’idée du progrès,de l’industrie et de la modernité de la France. Pour ce faire, deux dimensions sont associées àl’événement : d’une part, la dimension mondaine liée à un événement spectaculaire qui attire les figures

les plus importantes de la société française ; d’autre part, la dimension économique et industrielle de laBelle Epoque qui se place au premier plan à travers l’exposition des derniers modèles d’une industrie depointe.

Ainsi, le traitement médiatique de ce salon d’exposition semble faire écho à la poétique médiatique de lamondanité :

Sertissant le Grand Palais et les halls des Invalides dans des rampes de feu dont la lumièreruissellera par les avenues et les quais, M. Rives a donné aux deux temples passagers del’industrie automobile des décorations triomphales qui éblouiront les yeux et les enchanterontpar leur éclat féerique et leur goût délicieux.On ne fit jamais rien de pareil ! on ne vit jamais rien de semblable 16 !

Ce type de description est largement ancré dans le discours médiatique mondain. Un indice plus explicitede cet ancrage est certainement l’abondance de quelques formules très chères aux genres mondainscomme « décorations triomphales », « éblouiront les yeux », « enchanteront », « éclat féerique », « goûtdélicieux », « rien de pareil » et « rien de semblable ». Cette effusion de l’éloge indique un discourslaudatif qui veut se placer au-delà des résistances caractéristiques des premières réceptions del’automobilisme auprès des mondains entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle17. Cette série d’articlessur l’exposition tend à souligner qu’en 1907 la voiture est un objet directement lié à la mondanité. Lajournée du vendredi 15 novembre sera particulièrement intéressante dans ce sens, car elle montre à quelpoint les organisateurs de ce Salon en étaient conscients, de sorte que l’on y observe même un usageambigu du mot « salon » :

Ce fut, hier, au Grand Palais, un vrai Salon, le vrai Salon de l’Automobile. Jamais journéen’eut un caractère plus mondain, plus distingué, de plus sûr, de meilleur ton. Cette note, qui a ravi les exposants d’abord, les visiteurs ensuite et les visiteuses surtout, a étédue tout simplement à une double décision du comité d’organisation, qui a porté le droitd’entrée du vendredi à 5 fr. et fermé l’accès aux tickets à tarif réduit. La hausse de prix de l’un et l’interdiction des autres ont fait une immédiate sélection et ontvalu au Grand Palais une assistance triée sur le volet18.

Cependant, dans le témoignage du Figaro du Salon de l’Automobile, le référent mondain n’est pas le seulà transparaître. Comme l’a dit Guillaume Pinson, « le sport se situe aussi au centre d’enjeux sociauxparfois contradictoires, notamment entre popularité et élitisme ; il redouble la tension fondatriced’ouverture et de fermeture du journal mondain19 ». Ainsi, le journaliste du Figaro fait cohabiter unecaractérisation du spectacle et de la singularité de l’événement avec une perspective plus ample, celle del’industrie, du développement et de la nation20 :

Et cette fantastique splendeur, et cette désinvolte prodigalité, et ce gaspillage voulu,intentionnel de clarté et de luxe sont bien les plus décisives et les plus spirituelles réponsesque l’industrie française pouvait faire aux méchants bruits de crise répandus par les uns etexploités par les autres, les étrangers que l’incessante et croissante prospérité de notreindustrie nationale désole et exaspère21.

À cette tension entre ouverture et fermeture, nous pourrions encore ajouter d’autres éléments comme letrait de la modernité et des développements techniques et économiques que cette industrie symbolise. Ilest souvent aussi question d’un discours plus (parfois très) technique qui s'exprime dans les descriptionsdes moteurs, des châssis, des sources d’énergie utilisées, entre autres, et dans la mise en scène desfabricants, de leurs innovations, des leurs originalités :

Un autre côté du Salon est l’apparition multiple des auto-mixtes, c’est à dire des voitures quiassocient d’une façon ou d’une autre pour la propulsion du véhicule le moteur à pétrole etl’énergie électrique.

Un modèle remarquable dans ce genre nouveau, et d’un avenir considérable d’ailleurs, est laMercédès-Mixte dont voici brièvement l’économie mécanique.Un moteur à explosions actionne une dynamo calée sur son vilebrequin ; cette dynamoproduit un courant qui au moyen de fils appropriés et d’un appareil spécial, est envoyé dansdes dynamo réceptrices fixées directement sur le moyen des roues arrière ainsi transforméesen roues-moteurs22.

Ce type de texte véhicule l'image d'un journaliste qui circule dans l’exposition en véritable connaisseurdes multiples dimensions de l’événement (mondaine, industrielle, nationale), de sorte que le lecteur al’impression d’être lui-même en train de parcourir les stands du Salon sous la perspective multi-compétente du journaliste. Le discours sur l’automobilisme sert donc aussi à renforcer l’idée d’unemobilité médiatique, liée à la capacité qu'ont le journal et le journaliste de transiter et de conquérirl’espace autour d'eux.

Le chemin proustienLors de sa parution le 19 novembre 1907, le texte de Proust « Impressions de route en automobile » nesaurait donc être lu, surtout pour un lecteur du Figaro, sans que l’on établisse un lien avec ce grandévénement médiatique qu'est le Salon et avec le discours du journalisme sportif alors prépondérant.L’article de Proust, tout en ayant des caractéristiques particulières, dialogue directement avec des traits decette poétique et de cet imaginaire de la mobilité. S’il n’est plus question de parler du Salon del’Automobile, Proust propose à son lecteur, comme un bon chroniqueur, une réflexion plus large sur lephénomène actuel et médiatique qu'est l’automobile.

On remarque, par exemple, que l’image de l’énonciateur dans l’article de Proust s’installe plussubtilement que celle du journaliste sportif, plus assertive et ferme, que nous avons observée dans l’articlede Frantz-Reichel du 14 mai 1903. Cependant il ne néglige pas quelques caractéristiques de ce type dediscours. Le « je » du texte proustien se construira aussi à partir de la perspective subjective du voyage enautomobile et des impressions qu’il évoque. Le texte évoque également un énonciateur marqué par unepréoccupation de la vitesse, et la poursuite d’un large espace dans un intervalle restreint de temps : « Partide *** à une heure déjà assez avancée de l’après-midi, je n’avais pas de temps à perdre si je voulaisarriver avant la nuit chez mes parents à mi-chemin à peu près entre Lisieux et Louviers23 ».

L’expérience du voyage en automobile est notamment une nouvelle manière de vivre l’espace-temps etrend patent le dialogue du texte proustien avec d’autres chroniqueurs comme Jules Claretie :

Lorsqu’on a senti autour de ses tempes l’impression de vertige que donne la machine fendantle vent, comment s’arrêter ? C’est une autre forme d’ivresse. […] Et la soif vous prend desespaces avalés, des kilomètres, des courses folles, des paysages filant, éperdus, le long desroutes, des villages traversés, de ces visions d’êtres et de choses, de bois et de fermes, qui sesuccèdent comme en un cinématographe éperdu dans l’emportement d’une machineemballée24.

La perspective, dans l’article de Proust, est aussi semblable à celle du cinématographe, comme si lepassager était un spectateur et que les choses autour de lui étaient mobiles et animées :

Du plus loin qu’elles nous apercevaient, sur la route où elles se tenaient courbées, de vieillesmaisons bancales couraient prestement au-devant de nous en nous tendant quelques rosesfraîches ou nous montraient avec fierté la jeune rose trémière qu’elles avaient élevée et quidéjà les dépassait de taille. […] Bientôt la route tourna et le talus qui bordait sur la droites’étant abaissé la plaine de Caen apparut, mais sans la ville qui, comprise pourtant dansl’étendue que j’avais sous les yeux, ne se laissait voir ni deviner, à cause de l’éloignement25.

La mobilité de l’observateur, sa désinvolture dans sa prise de l’espace, est cependant placée chez Proustsous la perspective visuelle d’une mobilité problématisée, car elle comporte, par le degré même de lavitesse qu’elle incarne, quelque chose de l’ordre de l’illusoire et du paradoxal :

J’avais demandé au mécanicien de m’arrêter un instant devant les clochers de Saint-Etienne ;mais me rappelant combien nous avions été longs ànous en rapprocher quand dès le début ilsparaissaient si près, je tirais ma montre pour voir combien de minutes nous mettrions encore,quand l’automobile tourna et m’arrêta à leur pied. Restés si longtemps inapprochables àl’effort de notre machine qui semblait patiner vainement sur la route toujours à la mêmedistance d’eux, c’est dans les dernières secondes seulement que la vitesse de tout le temps,totalisée, devenait appréciable26.

L’image virile, active et assertive, du journaliste sportif telle qu’on la retrouve chez Reichel est iciéquilibrée par le fait que l’énonciateur n’est pas le conducteur de la voiture27. Il assume sa place(socialement plus élevée) de passager et son rôle est plus lié à la perception des détails complexes et descontradictions liées à cette rapidité de l’automobile. Mais s’il est différent du journaliste-conducteur quisemble saisir le temps de manière plus sûre et moins passive, le passager proustien est lui aussi tenté parles détours, par le goût du paysage, et n’oublie pas d’avoir sa part de maîtrise de l’espace-temps :

Je commençais de désespérer d’arriver assez tôt à Lisieux pour être le soir même chez mesparents, qui heureusement n’étaient pas prévenus de mon arrivée, quand vers l’heure ducouchant nous nous engageâmes sur une pente rapide au bout de laquelle, dans la cuvettesanglante de soleil où nous descendions à toute vitesse, je vis Lisieux qui nous avait précédésrelever et disposer à la hâte ses maisons blessées, ses hautes cheminées teintes de pourpre ; enun instant tout avait repris sa place et quand quelques secondes plus tard nous nous arrêtionsau coin de la rue aux Fèvres, les vieilles maisons […] semblaient ne pas avoir bougé depuis lequinzième siècle28.

L’impression causée par le voyage en automobile est celle d’un monde qui se meut autour du sujet. Dansce contraste entre sujet et monde, en filigrane, nous voyons aussi l’assimilation entre voyage, mobilité etindépendance de l’individu, autre trait de l’imaginaire automobilistique largement lié à son traitementmédiatique. « L’automobile, écrit Guillaume Pinson, est un bouleversement de l’individualité, cettemanière pour chacun de se sentir et de s’affirmer unique dans un monde où les échanges, de plus en plusnombreux, produisent un nivellement des mœurs29 ». Dans le cas de Proust, c’est l’imagedu voyageur quiincarne cette indépendance et cette affirmation de l’individualité : « Mais surtout, de ce voyageur, ce quel’automobile nous a rendu de plus précieux c’est cette admirable indépendance qui le faisait partir àl’heure qu’il voulait et s’arrêter où il lui plaisait30 ».

Les chemins qui bifurquentLe récit du trajet, de ses détours, de ses péripéties, par un énonciateur qui se fait observateur mobile enquête d’un espace-temps de plus en plus rapide et complexe, est le lien de base qui relie ce texte de Proustà tout le mouvement discursif des médias qui abordent la question. Cependant, il y a aussi dissonancedans ce dialogue. Dans son traitement de la mémoire et de la culture, Proust semble convoquer un espace-temps plus large et plus profond que celui normalement présent dans les figurations médiatiques del’automobile. Il y a dans cette chronique non seulement une représentation de l’espace-temps del’automobile, mais aussi de l’espace-temps de toute une dimension historique31 qui défile aux yeux duvoyageur (clochers, maisons médiévales, cathédrales etc.) et dont l’image condensée est celle de la voitureilluminant la cathédrale de Lisieux :

Je m’avançais pourtant [dans l’obscurité], voulant au moins toucher de la main l’illustrefutaie de pierre dont le porche est planté et entre les deux rangs si noblement taillés delaquelle défila peut-être la pompe nuptiale d’Henri II d’Angleterre et d’Éléonore de Guyenne.

Mais au moment où je m’approchais d’elle à tâtons, une subite clarté l’inonda ; tronc partronc les piliers sortirent de la nuit, détachant vivement en pleine lumière sur un fondd’ombre le large modelé de leurs feuilles de pierre. C’était mon mécanicien, Agostinelli, qui,envoyant aux vieilles sculptures le salut du présent dont la lumière ne servait plus qu’à mieuxlire les leçons du passé, dirigeait successivement sur toutes les parties du porche, à mesureque je voulais les voir, les feux du phare de son automobile32.

L’épaisseur spatio-temporelle atteinte ici nous transporte en dehors du discours médiatique commun. Carle « je » de cet article tend à se présenter, ce qui est aussi le cas dans les articles de critique d’art de Proust(le nom de Ruskin relie les deux productions), comme un sujet possédant une vaste culture. Si le contrasteentre la voiture et le paysage médiéval n’est pas étranger à la poétique médiatique des discours sur lavoiture et ses courses à la campagne, chez Proust ce contraste donne lieu à une investigation profonde dela mémoire et de la culture, ce qui nous semble ici l’ingrédient particulier que Proust apporte afind’approfondir le contenu et le style de sa chronique.

Les inflexions syntaxiques (le cumul d’interpositions) en conjonction avec les métaphores sont aussiresponsables de cette épaisseur, car elles transportent le lecteur d’un lieu-moment à l’autre, mais donnentà ce déplacement une immatérialité qui s’éloigne du discours de visibilité matérielle de la presse sportive.Dans le même sens, le style de Proust propose une mise en question du discours technique et objectifd’une bonne partie des écrits médiatiques sur la voiture. Dans ce texte, la matérialité même de la voitureen tant qu’objet se dissout, le son du moteur devient une « musique abstraite » et la voiture un« instrument immatériel » :

Quand nous quittâmes Lisieux il faisait nuit noire ; mon mécanicien avait revêtu une vastemante de caoutchouc et coiffé une sorte de capuche qui, enserrant la plénitude de son jeunevisage imberbe, le faisait ressembler, tandis que nous nous enfoncions de plus en plus vitedans la nuit, à quelque pèlerin ou plutôt à quelque nonnede la vitesse. De temps à autre –sainte Cécile improvisant sur un instrument plus immatériel encore – il touchait le clavier ettirait un des jeux de ces orgues cachées dans l’automobile et dont nous ne remarquons guèrela musique, pourtant continue, qu’à ces changements de registres que sont les changementsde vitesse ; musique pour ainsi dire abstraite, tout symbole et tout nombre, et qui fait penser àcette harmonie que produisent, dit-on, les sphères, quand elles se tournent dans l’éther33.

Cette originalité, ou ce détournement d’un discours médiatique de l’automobile par Proust se reflète dansl’image de l’énonciateur présente dans ce texte : celui qui tient un discours hors des normes sur lamobilité rend aussi plus complexe sa propre conquête de l’espace et du temps. À la toute fin de l’article, ily reste un grain de souffrance et d’enfermement qui caractérise cette image et qui la différencieradicalement de celle du journaliste sportif. Ici, le voyage en automobile est la contrepartie d’un fond plusmélancolique et moins dynamique qui s'exprime. Il existe donc un jeu de contrastes intéressant entreenfermement et mobilité qui constitue l’une des richesses particulières à cette chronique de Proust. Ledésir du déplacement est renforcé par une difficulté de mobilité liée à des souffrances :

Tous ceux surtout qui savent ce que peut être, certains soirs, l’appréhension de s’enfermeravec sa peine pour toute la nuit, tous ceux qui connaissent quelle allégresse c’est, après avoirlutté longtemps contre son angoisse et comme on commençait à monter vers sa chambre enétouffant les battements de son cœur, de pouvoir s’arrêter et se dire : « Eh bien ! non, je nemonterai pas ; qu’on selle le cheval, qu’on apprête l’automobile » et toute la nuit fuir, laissantderrière soi les villages où notre peine nous eût étouffé, où nous la devinons sous chaque petittoit qui dort, tandis que nous passons à toute vitesse, sans être reconnu d’elle, hors de sesatteintes34.

Cependant, toute originale que soit cette tension figurée dans le texte de Proust, elle ne peut pas non plusêtre isolée de son contexte. Or, les lecteurs de l’article de Proust pourraient retrouver, deux pages plus loindans la même édition du Figaro du 19 novembre 1907, la description de la visite faite par le roi de

Belgique qui s’est fait promener en voiture à l’intérieur du Salon à cause de son état « fatigué etlégèrement souffrant35 ». L’effet intertextuel est certes subtil, mais l’intérêt commun pour le contrasteentre la souffrance du sujet et les avantages de la mobilité suggère que l’imaginaire proustien participe àun mouvement plus large. L’interrogation proustienne s’inscrit dans un imaginaire en expansion qui tentede comprendre l’automobile et les nouvelles manières de saisir l’espace et le temps, que la presse del’époque aide à formuler et à véhiculer. Frantz Reichel souligne lui aussi que le journaliste ne prétend pasêtre « un sot avaleur de kilomètres », et qu’il doit être sensible à ce qui se passe « autour de la route36 ».Proust semble dialoguer avec ce programme médiatique tout en l'approfondissant et en échappant auxformules liées à la valorisation d’un pittoresque trop codifié et d’une mise en scène trop positive de ladimension technique de cette nouvelle forme d’appréhension de l’espace.

Cet article de Proust et la lecture des articles sur l’automobilisme qui occupent une place de plus en pluslarge dans le Figaro et dans toute la presse de la Belle Époque, nous permettent de remarquer que, dans lecadre d’un écrit de presse, la construction des images et des imaginaires tend à se faire à partir d’unedynamique polyphonique où chaque voix se définit toujours par rapport aux autres, jamais de manièreisolée. Ce que cet article reprend – la mobilité, la mise en scène de la rapidité et de l’indépendance – demême que ce qu’il semble proposer de nouveau – l'épaisseur temporelle, l'évocation d’une mémoireculturelle profonde, la dissonance avec le discours technique et la fragilité du sujet voyageur –perdentbeaucoup de leur force si l’on néglige les discours qui l’entourent et le rapport avec le contextemédiatique où il circule.

Notes1 Ce pseudonyme attribué à Proust apparaît dans Le Mensuel entre novembre 1890 et mars 1891. VoirMarcel Proust, Le Mensuel retrouvé (éd. Jérôme Prieur), Paris, Éditions des Busclats, 2012. Articleségalement disponibles sur : <http://proustetlapresse.blogspot.ca>.

2 Dans une ville comme le Paris des années 1890-1900, alors marquée par la restructurationhaussmannienne et par les transformations apportées par l’industrialisation française, l’élan vers lareprésentation et la réflexion artistique de l’espace urbain parisien était largement répandu, de sortequ’« écrivains, sociologues, urbanistes, journalistes et essayistes, savants et artistes s’emparent du sujet ».Christophe Prochasson, Paris 1900 – Essai d’histoire culturelle, Paris, Calman-Lévy, 1999, p. 15.

3 Comme le montre Jürgen Osterhammel, le XIXe siècle est globalement marqué par une accélérationintense : « In the wake of the steam engine and its mechanical combination with wheels and ship’spropellers, the nineteenth century became the age of speed revolution. Although the dramatic increases inspeed made possible by air travel and greatly improved road transport would come only in the nextcentury, the railroad and the telegraph marked a decisive break with all previous history ». TheTransformation of the World, Princeton and Oxford, Princeton University Press, 2014, p. 74.

4 Déjà au temps de la Gazette, Théophraste Renaudot tient à assurer ses lecteurs de la multiplicité et del’ampleur de l’espace couvert par ses correspondants. Selon lui, à travers eux son journal pouvait atteindre« jusqu’aux pays les plus éloignés » pour trouver les nouvelles. Recueil des Gazettes de l’année 1631,Paris, 1632, p. 7, disponible sur Gallica, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k106358h, consulté le 10 nov.2015.

5 Le journal est « une entreprise collective où s’expérimente la création du sens par la fusion de voixplurielles et quelquefois discordantes. Bien plus que le roman, il est conçu comme un lieu authentique dela polyphonie ». Marie-Ève Thérenty, La Littérature au quotidien, Éditions du Seuil, 2007, p. 61-62.

6 Cette pratique s’inscrit également dans un procédé qui depuis longtemps fait partie des journaux, maisqui à la Belle Époque semble prendre une nouvelle dimension, celui qui caractérise les rapports entrediplomatie et journalisme. La presse prend de plus en plus en compte les questions internationales. On lit,

par exemple dans le Figaro du 5 mai 1903 : « Sans la presse, il n’y a pas de paix durable. Son pouvoir estsupérieur à celui de la diplomatie. Celle-ci peut donner des conseils aux journalistes, mais les journalistespeuvent donner à la diplomatie d’utiles avertissements ». Pour une analyse des origines de la presse et sesrapports avec la diplomatie, voir Andrew Pettegree, The Invention of News, London, Yale UniversityPress, 2014.

7 « Dans les années 1890, la création des premiers quotidiens spécialisés, Le Vélo puis L’Auto, coïncideainsi avec la montée en puissance de l’information sportive dans les journaux généralistes. Au même titreque les faits divers et le feuilleton, la rubrique sportive, qui s’adresse à un public tout aussi large, est unfacteur important du succès de la petite presse populaire ». Dominique Kalifa et al. (dir.), La Civilisationdu journal, Paris, Nouveau Monde, 2011, p. 1077.

8 Pour une étude de la poétique et de l’esthétique du voyage et de l’automobile dans ce roman, voirnotamment Éléonore Reverzy et Guy Ducrey (dir.), L’Europe en automobile, Strasbourg, PressesUniversitaires de Strasbourg, 2009.

9 Le Figaro, 14 mai 1903.

10 En outre, si l’on observe la biographie de Frantz-Reichel, journaliste actif, athlète, pilote et aviateur,l’on comprendra qu’il ne s’agit pas d’un ethos purement discursif, mais d’une manière d’être dans unmonde où mobilité et journalisme s’alimentent mutuellement.

11 Le Figaro, 14 mai 1903.

12 Pierre Giffard, Le Sieur de Va-Partout : Souvenirs d’un reporter, Paris, Maurice Dreyfous, 1880, p. 2.

13 Sara Danius, « The Aesthetics of the Windshield: Proust and the modernist rhetoric of speed »,Modernism/Modernity, n° 1, vol. 8, jan. 2001, p. 99-126.

14 Le Figaro, 11 nov. 1907.

15 Francois-Étienne Obus Reichel (qui signe « Frantz-Reichel ») est une figure qui est au cœur del’engouement social et médiatique pour les sports, surtout les mécaniques (automobilisme et aviation). Ilintègre d’autres périodiques spécialisés comme L’Auto-Vélo et Le Sport Illustré, de même qu’il estfondateur de l’Association Internationale de la Presse Sportive (1924) qui existe encore de nos jours.

16 Le Figaro, 12 nov. 1907.

17 Guillaume Pinson, Fiction du Monde, Montréal, PUM, 2008, p. 154.

18 Le Figaro, 16 nov. 1907.

19 Guillaume Pinson, Fiction du Monde, op. cit., p. 152-153.

20 Cet éloge de la nation à travers son industrie serait à confronter avec le ton plus critique de PaulManoury pour le Petit Journal, par exemple, qui insiste, lors de l’inauguration du Salon de l’Automobile(12 novembre 1907), sur le retard de la France par rapport à l’Angleterre dans ce champ de production.L’on s’aperçoit ainsi que l’usage politique du thème de l’industrie est plein de contradictions, surtout sil’on considère qu’en effet l’industrie de l’automobile en France est en pleine force et se place en tête dumarché européen au début du XXe siècle. Patrick Fridenson, « Une industrie nouvelle : l’automobile enFrance jusqu’en 1914 », Revue d’histoire moderne et contemporaine, t. 19, n° 4, oct.-déc. 1972, p. 557-558.

21 Le Figaro, 12 nov. 1907.

22 Le Figaro, 14 nov. 1907.

23 Ibid.

24 Jules Claretie, La Vie à Paris 1901, Paris, Charpentier et Fasquelle, 1904, p. 248 ; Guillaume Pinson,Fiction du Monde, op. cit., p. 156.

25 Le Figaro, 19 nov. 1907.

26 Ibid.

27 Le lien entre activité/masculinité dans le reportage de Reichel, renforcé lorsqu'on le compare à lachronique de Proust, semble refléter justement un imaginaire lié à ces deux genres : « Lorsque, entre1870-1880, un nouveau genre journalistique, le reportage, détrône peu à peu la chronique, le modèlesexué du journal semble confirmé et même complété par l’émergence de cette pratique souvent connotéecomme masculine, voire virile ». Marie-Ève Thérenty, « La chronique et Le reportage. Du « genre »(gender) des genres journalistiques », Études littéraires, n. 3, v. 40, Automne 2009, p. 118. Il fauttoutefois souligner que le rapport féminin/masculin avec l’imaginaire de la voiture et l’écriturejournalistique est très complexe et va au-delà d’un rapport d’opposition. À ce sujet, voir par exemple,Alexandre Buisseret, « Les femmes et l’automobile à la Belle Époque », Le Mouvement social, n° 192,juil.-sept. 2000, p. 41-64.

28 Le Figaro, 19 nov. 1907.

29 Guillaume Pinson, Fiction du Monde, op. cit., p. 158.

30 Apud Le Figaro, 19 nov. 1907.

31 Il faut se rappeler que les images du christianisme médiéval (églises, sculptures, etc.) de même qu’unesérie de références à des figures célèbres de la culture française, comme La Fontaine, font tout de suiteécho à une historicité nationale, alors que d’autres références comme Ruskin, Cuyp ou Wagner semblentmettre en question cette géographie culturelle et historique.

32 Le Figaro, 19 nov. 1907.

33 Ibid.

34 Ibid.

35 Ibid.

36 Le Figaro, 14 mai 1903, p. 3.

Pour citer cette pageYuri Cerqueira dos Anjos, «Mobilité proustienne, Mobilité journalistique.», Item [En ligne], Mis en ligne le: 18 décembre 2015Disponible sur: http://www.item.ens.fr/index.php?id=579891.

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