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Volume 50 – N°2 – MAI-AOÛT 2013 BRUXELLES BULLETIN DU CERCLE D’ÉTUDES NUMISMATIQUES

Review of L. TRAVAINI, Philip Grierson, Irish Bulls and Numismatics, Roma, Edizioni Quasar, 2011

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THE JOURNAL OF ARCHÆOLOGICAL NUMISMATICS

VOLUME 2-2012

TABLE OF CONTENTS

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the chairman’s address e “charon’s obol”: some methodological reflexions i

articles Fanny Martin, Michel Fourny & Michel Van Assche, avec la collaboration de Peter Cosyns & Jean-Marc Doyen

Ittre « Mont-à-Henry » (Brabant wallon, Belgique) : le mobilier de l’occupation de transition entre La Tène et l’époque gallo-romaine en question 1

Charlotte Sillon & Sylvia Nieto-Pelletier Analyse élémentaire d’un « bronze du type de Mardorf » mis au jour à Ittre 29

Jean-Marc Doyen Une approche contextuelle des potins nerviens « au rameau » du type A : l’apport du site du « Mont-à-Henry » à Ittre (Brabant wallon, Belgique) 31

Jean-Patrick Duchemin, avec la collaboration de Guillaume Florent, Samuel Lelarge, Guillaume Marie & Arnaud Poirier

Numismatique et archéologie du rituel : réflexion sur le rite dit de l’« obole à Charon » à partir de l’exemple de la nécropole tardo-antique de Nempont-Saint-Firmin (Pas-de-Calais, France) 127

Jean-Marc Doyen, Pierre Mathelart & Claire Pilliot, avec la collaboration d’Alessio Bandelli, Didier Bayard, Michaël Brunet, Hubert Cabart, Sévérine Lemaître & Stéphane Sindonino

Un ensemble théodosien tardif de Reims (Marne, France) : la fosse fs 22 (vers 420-430 apr. J.-C.) 199

Richard Reece Coins from the British excavations at Carthage: a summary and discussion 265

Gitte Tarnow Ingvardson Nørremølle – the largest Viking age silver hoard of Bornholm (Denmark) 281

Jan Moens Some caveats concerning the use of frequency indices 347

news Monica Baldassarri

e ist international workshop on numismatics – Il i workshop internazionale di numismatica: report 355

Volume 50 – N°2 – MAI-AOÛT 2013

BRUXELLES

BULLETIN DU CERCLE D’ÉTUDES

NUMISMATIQUES

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EXEMPLAIRE D’AUTEUR

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n’est le monnayeur même ou celui à qui le seigneur  l’aura  permis  par  une  autorisa-tion spéciale. 

[3]  Surtout,  les  deniers  d’un  monnayage particulier  doivent  se  distinguer  des  de-niers d’un autre monnayage par des signes et  des  images  avec  des  différences  si  évi-dentes que d’emblée, au premier regard et sans  la moindre difficulté,  il puisse exister distinction et différenciation réciproques. 

[4]  Ajoutons  à  cela  que,  si  quelqu’un  est pris en possession de faux deniers, il subira le châtiment du faussaire, et il ne lui sera d’aucun secours, le cas échéant, d’affirmer qu’il  les  aurait  reçus  dans  un  marché public et commun, à moins que la somme ne soit à ce point modique qu’elle n’excède pas neuf deniers. Si, de surcroît,  cet hom-me est découvert une troisième fois en pos-session de  la  somme ci-dessus mentionnée ou plus ou moins de même valeur, dès lors il  pourra  être  jugé  comme  un  faussaire, sans aucune des exceptions ni excuses men-tionnées précédemment. 

Ainsi  donc,  attendu  que  ces  dispositions ont été ordonnées justement et raisonnable-ment, nous enjoignons, en raison de notre pouvoir  discrétionnaire,  qu’elles  soient  in-violablement observées dans  tous  les  lieux dans  lesquels  le  monnayage  du  prince existe habituellement. 

Enfin,  pour  assurer  l’éternelle  validité  de notre  injonction  ou,  si  l’on veut, de notre condamnation  et  déclaration  solennelle, nous  avons  fait  renforcer  (l’autorité  de) cette page par l’apposition de notre sceau... 

 

Abréviations 

asrab : Annales de  la Société  royale d’ar-chéologie de Bruxelles – bcen : Bulletin du Cercle  d’Études  numismatiques  –  bcrh : Bulletin de la Commission royale d’histoire –  rbn :  Revue  belge  de  numismatique  – rbph :  Revue  belge  de  philologie  et  d’his-toire.  

RECENSIONS 

K.-P. JOHNE (éd.), avec la collaboration de U.  HARTMANN  &  .  GERHARDT,  Die Zeit der Soldatenkaiser. Krise und Transfor-mation des Römischen Reiches  im 3.  Jahr-hundert n. Chr. (235-284), Berlin, Akade-mie Verlag, 2 vol. in-8°, 1.400 p., 1 carte, 7 pl.,  cartonnés dans boîtier.  isbn  978-3-

05-004529-0. Prix : 178. 

l pouvait sembler superflu d’éditer 

une telle somme – 1.400 pages  ! – trois ans à peine après la sortie du monumental volume  collectif  intitulé e Crisis  of  the Empire, ad 193-337 de  la Cambridge An-cient  History71*.  Toutefois,  cette  période dite de  l’anarchie militaire et son histoire extrêmement troublée, est en pleine effer-vescence  depuis  de  nombreuses  années. De  plus,  les  mêmes  faits  historiques  ob-servés par  des historiens  latins,  germani-ques ou anglo-saxons reçoivent des éclai-rages  souvent  fort  différents.  Et  finale-ment,  les  deux  forts  volumes  édités  par P.-K. Johne et ses collaborateurs (U. Hart-mann  et .  Gerhardt)  couvrent  des  as-pects fort différents de l’Ancien Monde au iiième  s.  de  notre  ère,  puisque  des  cha-pitres importants sont consacrés aux peu-ples et états extérieurs à l’Empire romain. Ce sont eux, qui finalement, ont en quel-que sorte modelé la politique impériale au cours de la crise du iiième siècle même si les causes  profondes  doivent  en  être  recher-chées à l’intérieur même des frontières. 

I. Sources et historiographie 

L’ouvrage fait tout d’abord le point sur nos sources.  Elles  sont  soit  littéraires  :  orien-tales (Sassanides) ou occidentales, avec en tête Hérodien  et  l’Histoire Auguste  et  sa problématique  si  spécifique,  mais  égale-ment bien d’autres sources primaires (épi-graphie, papyrologie, numismatique). On notera  une  remarquable  et  très  détaillée biographie de quarante-trois auteurs occi-dentaux,  écrivant  en  grec  ou  en  latin, 

__________  *  Cambridge University Press, 2005, réimpr. 2009. 

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ayant  vécu  entre  le  iiième  et  le  xiième  s., mais encore ceux (p. 89-107) qui nous sont conservés dans d’autres langues comme le syriaque  (9  attestations),  le  « moyen  per-se »  (3),  le  « nouveau  perse »  (3),  l’arabe (13), l’hébreu (5) et finalement l’arménien ou le géorgien (7). 

Le  chapitre  historiographique  (p.  125-

157)  nous  détaille  les  apports  des  siècles précédents, d’où émergent, comme on s’en doute, les noms des grands historiens clas-siques,  de  Le  Nain  de  Tillemont  (1637-

1698)  à X. Loriot  et D. Nony,  en passant par E. Gibbons, M. Rostovtzeff, A. Alföldi et F. Altheim. 

II.  Les  événements  et  l’histoire  de  l’Em-pire 

Le 2ème chapitre de l’ouvrage (p. 161-423) constitue  une  monographie  à  elle  seule. Elle compte sept articles différents, traitant successivement des règnes de Maximin le race à Émilien (V. Huttner), Valérien et Gallien  puis  Claude  II  et  Aurélien  (U.  Hartmann), l’Empire gaulois (A. Luther), l’Empire  palmyrénien  (U.  Hartmann), Tacite (K.-P. Johne) et finalement Probus et  Carus  (G.  Kreucher).  Le  chapitre  le plus  développé  est  celui  consacré  aux règnes  de  Valérien  et  Gallien  (253-268). L’a., d’une grande érudition, y fait preuve de  sa  parfaite  connaissance  des  sources littéraires,  épigraphiques mais  également numismatiques.  On  est  toutefois  surpris de voir le peu de place laissée à la recher-che française, italienne ou espagnole. 

III. Les peuples du nord-ouest de l’Empire 

Le  3ème  chapitre  (p.  424-580)  s’intéresse aux peuples et états situés au-delà des fron-tières de  l’Empire. À côté de populations bien  connues  comme  celles  occupant  les régions  rhénanes ou du moyen et du bas Danube  jusqu’à  la Mer Noire  (A. Goltz), nous  trouvons des  chapitres  très détaillés concernant les Maures (A. Gutsfeld) et les royaumes  du  Caucase  –  Arménie,  Ibérie (Géorgie  orientale), Colchide, Albanie  et petites  principautés méconnues  –  la  plu-part documentées  essentiellement par  les inscriptions  sassanides.  Viennent  ensuite 

la Mésopotamie septentrionale (A. Luther), avec le grand centre que մեt Hatra, la Cha-racène et les Juifs de Babylone (M. Schuol), ces derniers  constituant  le groupe  issu de la  Diaspora  le  plus  important  au-dehors des  frontières  de  l’Empire.  Les  Arabes sont étudiés par U. Hartmann, et  les Sas-sanides, principaux concurrents de Rome à l’Est, par J. Wiesehöfer. Quelques pages sont  consacrées  aux  zones  infiniment moins documentées que  sont  le  royaume méroïtique, sur le Nil, et les nomades con-nus sous le nom de Blemmyes. 

IV. L’État romain 

L’importante  partie  relative  à  l’État  ro-main couvre les p. 583 à 712. K.-P. Johne s’intéresse  à  l’origine  sociale  des  empe-reurs qui ont accédé au pouvoir entre 235 et 285. Il relève que jusqu’à l’époque sévé-rienne,  les  princes  sont  issus  de  l’ordo senatorius. L’a.  examine  les modifications qui  apparaissent  par  la  suite.  Il  décrit  le rôle  des  impératrices,  la  représentation que l’empereur veut offrir de lui-même au travers  des  titulatures  impériales  et  des titres militaires  dont  il  se  pare  à  plus  ou moins bon escient. Vient se greffer sur ce canevas  l’importance  croissante  du  culte solaire, qu’on finit par  retrouver dans  les titulatures  impériales  à  partir  du  règne d’Aurélien  qui  se  proclame  dominus  et deus. L’origine géographique des lieux de proclamation des différents empereurs est elle même lourde de sens. Ainsi, de 235 à 285,  seize  acclamations  ont  lieu  sur  le Rhin,  dix  sur  le  Danube,  quatre  dans l’hinterland  frontalier  (Italie  du  Nord), neuf sur la frontière euphratique, trois en Afrique, trois en Égypte et finalement six à Rome. Encore faut-il noter que les éphé-mères Balbin et Pupien, suivis de Gordien III, comptent pour la moitié de ces prises de pouvoir dans l’Urbs. 

K.-P. Johne décrit ensuite la famille impé-riale,  par  exemple  les  postes  occupés par les  frères  des  empereurs.  La  situation  est complexe par exemple dans le cas du cadet de Gallien,  dont  le  rôle  est  plutôt  effacé. Elle  est plus  claire  en ce qui  concerne C. Iulius  Priscus,  le  frère  de  Philippe  I,  qui occupe d’importantes fonctions en Orient. 

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Mais  certains  puinés  succèdent  à  leurs aînés à la tête de l’Empire ; c’est le cas pour Quintille,  frère  de  Claude  II,  ou  de  Flo-rien, frère (ou plutôt demi frère ?) de Ta-cite. Le  rôle des  femmes  semble considé-rable  :  Salonine,  Zénobie,  Sévérine  sont    à  mentionner,  mais  également  Sulpicia Dryantilla, épouse de l’éphémère Régalien qui se proclama à Carnuntum en 260, ou encore Magna Urbica (épouse de Carus), à la fin de la période couverte par l’ouvrage. 

Un  intéressant  paragraphe  est  consacré aux  titres  portés  par  les  différents  empe-reurs, par exemple ceux de caesar, de pius, de pontifex maximus, de pater patriae, de mentions de consulat ou de cognomina ex virtute,  tels  Persicus,  Carpicus,  Germani-cus Maximus ou Gothicus Maximus. 

M.  Schuol  examine  pour  sa  part  le  droit romain au iiième s. Il relève, dans le Codex Iustianianus, pas moins de 500 « constitu-tions »  émises  au  cours  des  règnes  des « Soldatenkaiser »,  contre  800  sous  les Sévères,  et plus de 1.200  sous Dioclétien. La  répartition  est  parfois  très  anormale  : on connaît 100 rescrits datés de 223, sous Sévère Alexandre, contre un seul, en 235, à  l’extrême  fin  du même  règne. Gordien III  est  responsable  de  271  documents légaux,  Philippe  de  78  ;  Valérien/Gallien de  89,  dont  22  en  260,  avant  un  trou  de plusieurs  années.  L’a.  insiste  sur  le  fait qu’il  est  clair  que  tous  les  rescrits  n’ont pas  été  conservés.  Il  est  par  exemple peu vraisemblable  que  Probus  n’en  ait  pro-mulgué  que  quatre  au  cours  de  ses  sept années de règne. 

La  gestion  des  provinces  est  un  domaine complexe.  Nous  trouvons  ainsi  (p.  642 puis  p.  669)  une  liste  des  provinces  avec les titres et grades des gouverneurs, legati Augusti  pro  praetore  de  rang  consulaire ou prétorien, proconsules des mêmes caté-gories,  praefecti,  procuratores,  praeses  ou autres correctores. 

L’armée fait l’objet d’une courte notice du grand spécialiste qu’est Michael P. Speidel (p.  673-690).  Vu  l’importance  du  sujet, nous  nous  serions  attendu  à  un  travail 

beaucoup plus développé  et nous  restons en quelque sorte sur notre faim. 

La gestion des villes  et  l’évergétisme  sont traités par . Gerhardt. C’est à ce niveau qu’intervient  pour  le  première  fois  la numismatique et plus précisément le pro-blème des contremarques faisant passer la grande  pièce  de  bronze  (à  légende  grec-que) de quatre assaria (4 as = 1 sesterce) à 5 assaria sous Philippe puis, à partir de la fin des années 250, à 6, 7, 8, 9, 11 et finale-ment 12 assaria. Mais il faut relever que la situation diffère d’une ville à une autre. 

V. La société romaine 

Le 2ème volume débute par une étude de la société  romaine  au  iiième  s.  Le  rôle décli-nant du Sénat est particulièrement remar-quable.  Il  fait  l’objet  d’une  synthèse  de   M.  Heil,  qui  s’appuie  sur  les  travaux     d’A. Chastagnol et ceux, plus anciens, de nos compatriotes P. Lambrechts (1937) et S.J. De Laet  (1941), ou plus récents com-me le livre de M. Christol (1986). L’empe-reur  retire  aux  sénateurs  la  plupart  de leurs  prérogatives  antérieures.  Dès  le milieu du  iiième s., nous ne  trouvons plus aucun légat de légion, ni d’ailleurs de tri-bun militaire, appartenant à  l’ordre séna-torial, mais  certains personnages de haut rang  émergent  encore,  tel  L.  Petronius Taurus Volusianus, qui après une brillante carrière dans la cavalerie, est accueilli dans le Sénat sous Gallien, avant d’atteindre  le consulat ordinaire en 261 puis occuper la préfecture urbaine. Au contraire,  le iiième s.  est  la grande époque de  l’equester ordo comme le souligne M. Heil. Les chevaliers occupent de très nombreux postes, mais il convient  de  se  souvenir  de  la  différence quantitative  entre  les  600  sénateurs  face aux  quelques  20.000 membres  de  l’ordre équestre. 

. Gerhard aborde ensuite  la probléma-tique  des  couches  sociales  inférieures  et des  conflits  sociaux. L’a. montre  l’impor-tance  des  ivvenes,  une  mention  que  l’on retrouve  dans  la  numismatique  de  Gal-lien, de Claude II ou de Tacite par exem-ple.  Il  insiste  particulièrement  sur  l’im-portance quantitative des esclaves, qui re-

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présentent près de 6 millions d’individus, soit 10%  de  la  population  totale de  l’Em-pire.  Les  mouvements  sociaux  les  plus connus sont les Bagaudes, qui se dévelop-pent dans  les  années 285/286, mais d’au-tres  rébellions  sont  attestées  ailleurs  et  à d’autres moments par  les sources  littérai-res.  Ainsi  deux  chapitres  (F.  Herklotz) concernent  deux  régions  spécifiques, l’Isaurie et l’Égypte, qui ont connu au mi-lieu du siècle d’importants troubles. 

VI. L’économie et la monnaie 

La recherche moderne, depuis les travaux de Rostovtzeff, eux-mêmes influencés par l’œuvre  de  Gibbons,  a  largement  discuté du  caractère  de  la  crise  économique  du iiième s., opposant cette période à un « Âge d’Or »  qu’aurait  constitué  l’époque  anto-nine. K. Ruffing (p. 817-820) montre l’im-portance  du  contexte  social  dans  lequel les  historiens  modernes  vont  développer leur  point  de  vue  sur  cette  « crise ».  Cet aspect  historiographique  de  la  recherche est fort intéressant : il montre que chacun en  a  recherché  les  causes  en  fonction  de son  acquis  personnel.  L’a.,  pour  sa  part, réduit  la  problématique  à  trois  facteurs  : l’inflation,  la  démographie,  les  impôts  et le  budget  de  l’État.  Rappelons  que  sous Caracalla,  le  budget  annuel  de  l’Empire avoisine 1,5 milliard de sesterces ! 

K. Ruffing ne croit pas trop à la crise et il nous  fournit  de  nombreux  exemples  de prospérité  économique  au  cours  des  an-nées 235-284. Ceux-ci sont variés ; citons parmi bien d’autres : l’exportation de l’huile d’olive d’Espagne, le développement topo-graphique  des  agglomérations  secondai-res  de Gaule  septentrionale,  la  fondation de villes nouvelles  en race et  en Mésie Inférieure,  l’aisance des  cités du nord de l’Asie Mineure grâce au commerce à  tra-vers la Mer Noire. À cette époque d’ailleurs, nous notons le développement maximum des  émissions  monétaires  de  villes  de Bithynie,  sous  les  Sévères,  sous  Gordien III et finalement sous Valérien/ Gallien. 

La supposée crise ne touche pas non plus le commerce international. Ainsi, l’absen-ce  de  monnaie  de  cette  époque  en  Inde 

est  interprétée  par  le  fait  que  l’argent monnayé  a  toujours  constitué,  pour  ces régions,  une  marchandise  comme  une autre.  L’a.  relativise  finalement  deux  ar-guments  clefs  en  faveur  d’une  crise  éco-nomique  généralisée  au  iiième  s.,  à  savoir que l’avilissement de la monnaie implique automatiquement de l’inflation, et d’autre part, que nous assistons à une  régression démographique généralisée. 

La  monnaie  fait  l’objet  d’un  court  mais fort dense chapitre de K. Ehling  (p. 843-

860).  L’a.  distingue d’abord  les  émissions impériales des frappes des cités grecques, qui  arrivent  à  leur  terme  sous  Gallien, même  si  quelques  émissions municipales se  prolongent  sous  Claude  II  (Cyzique), Aurélien  (Sidé)  et  même  Tacite  (Pergé). K. Ehling reprend brièvement les données traditionnelles relatives au fonctionnement de  l’atelier  monétaire  de  Rome  quant  à l’organisation  des  officines.  Il  se  fonde, comme  toujours,  sur  les  mêmes  inscrip-tions connues depuis bien longtemps (cil vi,  44  et  239).  Mais  les  sources  complé-mentaires  sont  finalement  rares  :  sur  les 18 procuratores monetae  attestés entre  les règnes de Trajan et de Valentinien I, seu-lement 4 sont attribuables au iiième s. 

À côté de la production officielle de la ca-pitale, on relève de très nombreux ateliers répartis dans les provinces. On notera à ce sujet que l’a. situe à Cologne l’atelier ger-manique de Gallien, et non à Trèves com-me c’est actuellement la mode. 

Les  conditions  de  la  création  par  Cara-calla,  en  215,  de  l’antoninianus,  sont  dé-sormais  bien  connues.  On  retrouve  dans l’ouvrage  le  classique  diagramme  mon-trant la chute du pourcentage d’argent au sein  de  cette  monnaie  surévaluée  dès  le départ. Mais  là aussi,  l’a.  s’insurge contre la vision – une metallistischer Irrtum esti-me-t-il –, que la diminution du pourcen-tage d’argent fin dans la monnaie est auto-matiquement  un  élément  forcément  né-gatif,  que  le  procédé  entraîne  ipso  facto une hausse des prix et qu’il entretient fina-lement  l’inflation.  La  valeur  de  la  mon-naie, selon le droit romain (Dig., 18, 1, 1) 

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n’est pas fondée sur  la substantia  (« Stoff-wert »),  sa  valeur  métallique,  mais  bien sur la quantitas (« Nennwert ») qui dérive de  la  forma publica,  c’est-à-dire  la  valeur nominale garantie par l’État. 

L’a.  évoque ensuite  le problème du mon-nayage  au  type  du  DIVO  CLAVDIO  / CONSECRATIO, série à laquelle les sour-ces  de  l’époque  utilisent  les  termes  élo-quents de vitiare et de corrodere. Au sujet de leur fabrication par des employés indé-licats  de  l’atelier  romain,  K.  Ehling  re-prend les termes de R. Göbl, à savoir que c’est l’œuvre d’une « véritable Maffia »... 

La réforme d’Aurélien est décrite avec mi-nutie.  Alors  qu’une  certaine  unanimité émerge actuellement en faveur de  l’inter-prétation  de  la marque  XXI  comme  une indication  de  la  composition  métallique de  la  monnaie  (1/20ème  d’argent  fin),  l’a. considère qu’il s’agit en réalité du taux de reprise des anciens antoniniens : 20 mau-vaises  pièces  antérieures  à  la  réforme (Gallien, Claude  II,  empire gaulois)  con-tre  un  seul  « antoninien  réformé »,  ce dernier surévalué de 150%. On notera que n’apparaît  nulle  part  le  néologisme d’aurelianus  pour  désigner  ces monnaies réformées,  essentiellement  utilisé  par  les numismates  français  ;  Ehling  préfère  le terme  d’aurelianische  Reformantoninian. L’émission de cette nouvelle monnaie au-rait cette fois des conséquences politiques négatives  car  elle  semble  favoriser  l’infla-tion. La preuve en serait le retour rapide à un taux de change diminué de moitié :  la marque  XI,  utilisée  sous  Tacite  et  Carus dans certaines zones limitées de l’Empire, est ici interprétée comme l’indication d’un nouveau  taux de change de 10  anciennes monnaies contre une nouvelle, issue de la réforme. Ces hypothèses, résumées ici en quelques  lignes,  sont  soigneusement  ar-gumentées  à partir de sources anciennes. Elles  méritent  en  tout  état  de  cause  une lecture extrêmement attentive. 

VII. L’enseignement et les sciences 

L’enseignement  (au  sens  large)  est  étudié par  K.  Pietzner.  Les  sources  antiques  ne manquent  pas. On  apprend  par  exemple 

la  création  d’une  nouvelle  bibliothèque située  près  du  Panthéon,  à  Rome,  sous Sévère Alexandre. Elle est l’œuvre de Sex-tus Iulius Africanus, un chrétien. Elle s’a-joute  aux  deux  autres  bibliothèques  déjà présentes dans les thermes de Caracalla. 

Les œuvres  littéraires  à  caractère  histori-ques  sont  un  domaine  particulièrement travaillé  par  la  recherche  moderne,  sans doute  à  cause  de  l’indigence  des  sources contemporaines  des  faits.  Les  chapitres postérieurs  à  Sévère  Alexandre  de  l’ou-vrage  d’Hérodien,  mort  au  milieu  du siècle, sont perdus. Il se composait à l’ori-gine  de  huit  livres,  publiés  sous  Philippe ou  Trajan  Dèce.  L’autre  grand  historien de  l’époque,  l’Athénien P. Herennius De-xippus, dont la chronique allait jusqu’à la mort de Claude II en 270, n’est connu que par des fragments. Cette partie consacrée aux sources historiques complète en quel-que sorte le chapitre I de l’ouvrage. 

Quelques  pages  sont  ensuite  consacrées aux  philosophes  de  l’époque,  Longin  et surtout Plotin, dont Gallien մեt un ardent défenseur. 

VIII. Les religions 

Nous  n’entrerons  pas  dans  le  détail  des aspects  religieux,  qui  traitent  successive-ment  du  paganisme,  du  judaïsme,  du christianisme, du manichéisme et surtout du culte impérial (F. Herklotz). Cette der-nière  contribution  est  peut-être  un  peu brève à notre goût  : 12 p. seulement pour traiter  des  rites  spécifiquement  liés  à  la personne  de  l’empereur,  aux  cérémonies et  anniversaires  (decennalia  par  ex.),  au culte  des  divi  et  surtout  à  l’assimilation progressive du Prince à Sol invictus. 

IX.  Crise  en  transformation  de  l’Empire au iii s. 

Cette remarquable encyclopédie de  l’Em-pire entre 235 et 284 s’achève par un texte synthétique (p. 1025-1053) coécrit par K.-P.  Johne  et  U.  Hartmann,  résumant  les informations  évoquées  ci-dessus,  en  les replaçant dans leur contexte. 

BCEN vol. 50 no 2, 2013  177

L’ouvrage  se  clôture par des  fasti du plus haut  intérêt  car  extrêmement  détaillés (empereurs, consuls, préfets urbains, pré-fets  du  prétoire,  gouverneurs,  évêques, monarques  orientaux  et  finalement  prin-ces barbares), couvrant pas moins de 142 pages, et par une bibliographie de 160 p., totalisant environ 5.300 titres ! 

La  longueur  inusitée  de  cette  recension montre  l’importance que nous attribuons à  cette  œuvre  magistrale.  Les  nombreux numismates  et  historiens  travaillant  sur les  prémices  de  l’Antiquité  tardive  pour-ront  difficilement  se  passer  de  recourir  à ce monument de l’érudition allemande. 

Jean-Marc Doyen 

 

L. TRAVAINI, Philip Grierson,  Irish Bulls and Numismatics, Roma, Edizioni Quasar di Severino Tognon, 2011, 12, 120 p., 18 

’est  avec  plaisir  que  nous  ferons mention  ici  du  petit  ouvrage  édité 

par notre ancienne lauréate du Prix Quin-quennal  de  Numismatique,  Mme  Lucia Travaini.  Il  s’agit d’un hommage à Philip Grierson  (1910-2006),  spécialiste  mon-dialement  reconnu  de  la  numismatique médiévale.  Mais  Mme  Travaini,  au  lieu d’un  traditionnel  volume  biographique, édite quelques textes « mineurs » du prof. Grierson dont une étonnante étude (Irish Bulls, 1938) tendant à prouver que « Every-one  knows  that  an  Irish  bull  possesses some  rare  ethereal  quality denied  to bulls of  other  nations »,  et  s’achevant  par  le monumental apophtegme de Sir Boyle  (+ 1807) « that it was hereditary in his family to have no children ». 

Plus sérieusement, l’ouvrage est complété par une bibliographie de Philip Grierson, totalisant 277 entrées.  

Jean-Marc Doyen 

 

Larissa  BARATOVA, Nikolaus  SCHINDEL &  Edvard  RTVELADZE :  Sylloge  Nummo-rum Sasanidarum Usbekistan, Wien, Verlag der Österreich.  Akad.  der Wissenschaen (Veröff. der numismatischen Kommission, Bd. 51), 2012, a4, 199 p., 47 pl., 647 n. 

our un numismate intéressé par la période  sassanide,  la  parution  d’un 

nouveau  volume dans  la  série des Sylloge Nummorum Sasanidarum est toujours un événement. 

En  effet,  cette  série  avait  pour  but  initial de  combler  un  vide  abyssal  dans  ce  do-maine oublié de la numismatique : publier quelques  grandes  collections  publiques (Paris, Berlin, Vienne) sous forme de Syl-loge  et,  par  la  même  occasion,  proposer une  nouvelle  définition,  bien  plus  com-plète que celle proposée par Göbl, des dif-férents  types utilisés  et une  identification des  ateliers  en  activité  aux  différentes époques. 

Les  trois  premiers  volumes  se  sont  donc penchés  sur  la  publication  de  ces  collec-tions jusqu’au règne de Kawad I (488-531 

ad). Il reste encore à publier les monnaies des derniers règnes, certes bien plus nom-breuses  que  celles  des  règnes  précédents mais  avec  moins  de  types  monétaires  et une frappe bien plus structurée et centra-lisée. 

Entretemps, le projet s’est élargi, incluant d’autres collections nationales (SNS Israël et  le  présent  volume)  et  une  importante collection  privée  sera  également  publiée très prochainement. 

Le  volume  Sylloge  Nummorun  Sasanida-rum – Usbekistan est en fait très différent des  précédents.  En  effet,  il  regroupe  les monnaies  de  type  sassanide  (sassanides, imitations de  type sassanide et arabo-sas-sanides) se trouvant dans différentes insti-tutions  d’Uzbekistan. De  plus,  la  plupart du matériel publié provient de trouvailles locales bien répertoriées. Il ne s’agit donc pas  d’une  collection  unique  essayant  de donner une  image  relativement complète du monnayage sassanide mais plutôt d’un groupe  de monnaies  illustrant  assez  clai-

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